Le chemin de fer de ceinture (rive gauche)
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- LES GRANDS TRAVAUX DE PARIS
- I
- LE CHEMIN DE FER
- DE
- (rive; gauche)
- Par M. Alfred D’AUNAY
- Rédacteur au Journal des Travaux publics.
- Xjign© d’A-iatenil à Ivi*y
- ESPÉRANCES QUE FAIT NAITRE LE TRACÉ. DESCRIPTION DE LA LIGNE ET DES OUVRAGES D’ART. ÉTUDE DES DIFFICULTÉS D’EXÉCUTION. ORGANISATION ET POLICE DES CHANTIERS.
- PARIS
- "SUQTfK-.*
- IMPRIMERIE DE È. BRlÊRE*
- Rue Saint-Honoré, 257.
- cv y
- 1864
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- Ce travail a été publié dans le JOURNAL DES TRAVAUX PUBLICS, Bulletin officiel des adjudications administratives , 13, rue delà Grange-Batelière, à Paris.
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- Les grands Travaux de Paris.
- LE CHEMIN DE FER
- n e
- CEINTURE.
- I.
- LES ESPÉRANCES QUE FAIT NAITRE RE TRACÉ,
- Le chemin de Ceinture (rive gauche) n’est pas, comme on l’a cru d’abord, une ligne de jonction entre les diverses gares de Paris, destinée, au principal, à faciliter les rapports des Compagnies entre elles.
- Au point de vue de ce service, le chemin d’Ivry aux Batignolles ne laisse presque rien à désirer. Les Compagnies qui l’ont construit n’ont pas à se plaindre du produit qu’il leur donne, tant comme ligne isolée que comme agent, leur procurant forcément des transports à faire.
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- L’Etat a donc un but en créant la voie circulaire. Ce dessein doit être considérable pour qu’il ait pu le déterminer à une dépense aussi importante.
- Pour nous, le chemin circulaire est le complément de la mesure qui a reculé aux fortifications l’enceinte de Paris.
- Il fallait ouvrir à la construction de vastes espaces où elle puisse édifier de nouveaux asiles pour le peuple dépossédé des quartiers malsains, sombres, affreux, du centre de la ville.
- Ces espaces se trouvaient entre les communes de la banlieue et l’enceinte continue.
- L’annexion s’est opérée. Des sommes énormes ont été dépensées pour la fécondation de ces espaces immenses. On y a répandu l’eau et le gaz; des rues, avec leurs égouts, ont été établies de tous côtés. On a construit des églises, des écoles, on a créé des promenades.
- Et les spéculateurs n’ont presque rien fait. ,
- Ont-ilseu tort?Hier, nous aurions dit non ;
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- aujourd’hui, avec le chemin de fer de Ceinture, nous disons oui.
- En décrétant que la plaine de Grenelle, par exemple, fait partie de Paris, on n’a pas rendu moins longue la distance qui sépare cette plaine de la ville proprement dite.
- En créant des voies publiques conduisant directement aux territoires annexés, on a rendu la communication facile, il est vrai, mais la distance n’a pas changé.
- C’est donc la distance qu’il fallait diminuer. Par l’établissement du chemin de Ceinture, cette distance se trouve supprimée.
- Quand l’idée nouvelle apparaît, on la passe au crible de l’esprit ; on en cherche les. çôtés vulnérables, et on en rit.
- Depuis dix ans, tous les auteurs de projets de chemins de fer'dans Paris ont ainsi excisé l’hilarité publique. Nous en ayons eu notie part avec le chemin de l’Opéra à la Bastille, 'déjà oublié sans doute.
- 1 Eh bien ! malgré le rire, l’idée poursuit sa route, et elle triomphe. Ç. . :
- i On rit des chemins de fer dans Paris, et,
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- sans's’en douter, on les voit fonctionner et on s’en sert avec fruit.
- A la Bastille, vous prenez le chemin de Vincennes, qui, par le Bel-Air, vous conduit en une demi-heure au fond des Batignolles ; en un quart-d’heure à Bercy.
- Voilà donc la place de la Bastille en communication, par voie ferrée, avec la moitié de la circonférence de Paris.
- Supposez un instant qu’il y ait correspondance entre la gare des Batignolles (ceinture) et celle des Batignolles (ligne d’Auteuil), et vous aurez un chemin de fer de l’Opéra (rues Auber et du Havre) à la Bastille.
- Qu’importe le tracé. Le résultat n’est- il pas le même?
- Le but à atteindre est la réunion de tous lès points du centre de Paris à tous les points de la circonférence. La vitesse de la locomotion suppléera à l’impossibilité d’établir des communications plus directes.
- Il y a à l’intérieur de Paris huit points favorisés, où aboutissent un grand nombre de voies, larges et commodes.
- Ces points, vu l’immensité actuelle de la
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- ville, peuvent être considérés comme appartenant au centre.
- Ce sont : la place du Havre, la place Roubaix, la place de Strasbourg, la Bastille, le boulevard Mazas, la place Walhubert, la place d’Enfer et la rue de Rennes.
- A chacun de ces points se trouve une vaste gare de chemin de fer...
- A chacun de ces points commence une voie ferrée menant fort loin, il est vrai, mais conduisant d’abord aux fortifications, c’est-à-dire se rencontrant avec la voie ferrée circulaire.
- On a établi aux environs de chaque point de rencontre un système de communication par aiguilles et plaques tournantes, fort commode pour le service des marchandises et l’échange du matériel.
- On peut établir, sans aucune difficulté, un système de correspondance pour les, voyageurs.
- Ceci n’est plus discutable depuis que la Compagnie de l’Est en a pris l’initiative au chemin de Vincennes.
- Donc, dès l’ouverture de la ligne complète
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- du chemin de Ceinture, huit points du centre de Paris, en attendant mieux, pourront être mis en communication avec tous les points de la circonférence.
- A partir de la station deBatignolles-Güchy, la voie, descendant vers Monceaux par une pente assez rapide, passera sous les lignes de l’Ouest, et, se relevant insensiblement, rejoindra la ligne d’Auteuil, entreles stations des Batignolles Monceaux et de Courcelles. On-élargira l’entre-voie de cette dernière ligne, de façon à lui donner un écartement semblable à celui de la voie circulaire, et il n’y aura plus aucune solution de contU nuité.
- Ainsi, Batignolles-Glichy, Courcelles, la Porte-Maillot, l’avenue de l’Impératrice , Passy, Auteuil, le Point-du-Jour, Grenelle, .Vaugirardf Montrouge, Gentilly, la Maison-Blanche, Ivry, Bercy, Bel-Air, Charonne, Ménilmontant, la Petite-Villette et la Chapelle, sont dix-neufs points où une station existe déjà.
- . Ajoutez à ces dix-neufs points la station de Plaisance où ss fera la correspondance
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- avec la ligne de l’Ouest (rive gauche), une station de correspondance avec la ligne de Sceaux, une autre avec la ligne de l’Est à la Villette, une station, enfin, à Clignancourt, et vous avez vingt-trois stations du parcours circulaire, stations placées sur tous les points où une population s’est groupée ou peut se grouper avant peu.
- Supposez à ce merveilleux réseau métro-» politain, qui n’est plus à l'état de projet, puisque demain nous pourrons le parcourir, un prix de transport très réduit, un prix omnibus, dont la dépense puisse entrer dans les habitudes de toute cette immense population qui travaille au centre de la ville, et ne peut se loger que dans les faubourgs, et vous comprendrez l’importance du chemin de fer de Ceinture, et vous serez reconnaissants envers l’Etat des sacrifices qu’il s’impose pour établir la ligne circulaire.
- Donc, le chemin dé fer de Ceinture doit ouvrir un vaste champ à la construction privée, et, par suite, améliorer le sort de la classe ouvrière, qui trouvera ainsi, à une
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- distance insignifiante, des quartiers nou* veaux établis tout exprès pour elle.
- C’est là la raison de l’intérêt avec lequel le public s’occupe des travaux du chemin de ceinture.
- Nous ne savons pas encore, et nul ne le sait, qui exploitera ce chemin de fer. Sera-ce une Compagnie, un Syndicat, ou l’Etat lui-même ? ou peut-être encore la Ville 1 de Paris ?
- Mais ce dont nous sommes certain, ce qui est pour nous une chose évidente et indiscutable, c’est qu’on ne tirera du chemin de ceinture un produit considérable, tant au point de vue de la recette qu’à celui du résultat moral, qu’en le faisant communiquer avec le centre de la ville, et qu’en mettant son prix de transport à la portée des classes laborieuses.
- Telle doit être la pensée du gouvernement, car telle est l’espérance des populations riveraines. Il y a, de nos jours, trop de rapports intimes entre les aspirations de la foule intelligente et laborieuse et les actes du pouvoir, pour que tout désir juste et raison-
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- nable ne soit pas pour les gouvernants la base d’un programme.
- Ainsi, Paris n’aura plus rien à envier à Londres, et notre capitale a, de plus, cet avantage que son chemin de fer intérieur, loin d’être entrepris par des spéculateurs, est créé dans un but essentiellement bienfaisant et populaire.
- Il y aura sans doute, un jour, à compléter ce réseau ; mais on est lancé dans cette voie où Von ne peut plus s’arrêter, et où l’on ne s’arrêtera pas. L’avenir doit nous donner raison.
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- DESCRIPTION DE LA LIGNE d’aUTEUIL A 1VRŸ,
- Ce qui est à remarquer tout d’abord, dans le chemin de ceinture, c’est qu’il présente, sur un parcours d’un peu plus de onze kilomètres, un échantillon de tout ce qui se fait sur les chemins de fer. Ponts, viaducs, tunnels, tranchées, remblais, ouvrages en fer et en pierre, tout s’y trouve, à l’exception, cependant, des passages à niveau, que l’expérience a condamnés, au moins à l’intérieur des villes.
- Aussi, allons-nous décrire cette curieuse ligne, comme si elle était achevée.
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- § 1er.—jie Viaduc d’Auteuil.
- La gare d’Auteuil, actuellement tête de ligne d’une section des chemins de fer de l’Ouest, va devenir une station intermédiaire. Les tampons que l’on y remarque, et contre lesquels viennent se buter les machines, seront supprimés, et la voie se prolongeant traversera la grande rue d’Auteuil sur un pont en fer.
- Ce pont se compose de deux culées en pierre et de deux files de quatre colonnes de fonte, supportant un tablier métallique de 30 mètres de longueur. La hauteur sous poutre est de 5 mètres.
- La culée construite du côté opposé à la station d’Auteuil est percée de deux haies cintrées, ouvrant le promenoir qui s’étend sous toute la traversée d’Auteuil.
- De la grande rue à la route de Versailles, un immense viaduc de 152 arches décrit une courbe et forme le milieu d’un magnifique boulevard. Ces arches ont 5 mètres d’ouverture, et leur hauteur moyenne,
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- sous clé, est de 7 mètres 1/2. Les pieds droits, gui en supportent les voûtes, ont 1 mètre d’épaisseur, et sont percés de deux baies cintrées de 3 mètres à 3 mètres 1 /2 de hauteur, et de 2 mètres 25 centimètres d’ouverture.
- Rien ne peut donner une idée de la magnificence de cette promenade couverte, dont les deux côtés ne tarderont pas à être bordés de charmantes demeures. La voie, d’une largeur totale de 40 mètres, se compose d’abord d’une contre-allée plantée d’arbres, le long des habitations, puis d’une large chaussée, puis d’un promenoir bitumé au centre duquel s’élève le viaduc, large de 9 mètres, puis encore d’une chaussée, et, enfin, d’une autre contre-allée également plantée. Ce boulevard a plus d’un kilomètre de longueur. Il ne sera pas, on le voit, le moindre des enchantements que présentent le bois de Boulogne et ses abords.
- Le grand viaduc d’Auteuil, dont l’ordonnance est uniforme, se trouve, cependant, divisé en plusieurs sections par des ouvrages d’art qui marquent les points de rencontre
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- de son parcours avec les voies du quartier qu’il traverse.
- Il rencontre d’abord une large rue projetée, encore innommée et désignée sous le nom de boulevard A, qu’il traverse sur une voûte en pierre de 23 mètres d’ouverture, puis le boulevard qui, partant de la place de la Fontaine à Auteuil, conduit à la porte de Saint-Cloud, et qu’il franchit sur un pont semblable. La promenade couverte se continue sous les culées de ces ponts. Deux tabliers métalliques de 14 mètres traversent les rues Boileau et de la Municipalité, enfin la route de Versailles, est franchie également par un pont métallique de 36 mètres, à peu près semblable à celui de la grande rue d’Auteuil.
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- § 2.—Le pont sur la Seine au Poinl-du-Jour,
- A partir de la route de Versailles, le viaduc s’élargit afin de recevoir la station du Point.-du-Jour. Puis, se rapprochant de la Seine, il reprend les dimensions de la traversée d’Auteuil, pour passer sur le pont.
- La station formera ainsi le centre d’une place rectangulaire, de niveau avec la route de Versailles et les quais à construire aux abords du pont.
- Le pont du Point-du-Jour sera certainement le plus monumental de Paris. Vu des hauteurs de Saint-Cloud et Meudon,ii annoncera magnifiquement où commence la grande ville. Ce sera pour l’étranger à la fois un témoignage de la grandeur de nos conceptions artistiques et de notre science. Il ne s’agit pas ici de ces ouvrages qui étonnent par leur hardiesse, et vous donnent le ver-tigel, mais d’une œuvre aux larges proportions, au caractère imposant, aussi admirable d’aspect que de difficulté vaincue.
- Le viaduc du Poinl-du-Jour se compose
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- d’abord d’an pont sur la Seine, de 175 mètres de longueur, sur 31 de large, et de 11 mètres de hauteur de l’étiage à la chaussée. Ce pont est formé par cinq arches en cintre surbaissé de 30 mètres d’ouverture.
- La plate-forme dupont, large de 30 mètres entre les deux parapets, se divise en trois parties qui sont cà peu près la reproduction du boulevard d’Auteuil. Deux larges trottoirs longent les parapets, puis viennent deux chausséespour les voitures, et, au centre, le viaduc du chemin de fer, sous lequel se trouve ménagé un promenoir pour les pié -tons.
- Le viaduc proprement dit a deux grandes arches de 20 mètres aux extrémités, traversant les quais d’Auteuil et de Javel, et 31 arcades de 4 mètres 80 d’ouverture et de 8 mètres de hauteur. Les pieds droits ont 1 mètre d’épaisseur. Ils sont percés chacun de deux baies de 2 m. 25 d’ouverture et de 4 m. 58 de hauteur sous clé.
- La hauteur totale du pont sera de 21 mètres. Sobre de décoration, il frappera d’avantage par la beauté de ses lignes et les
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- bonnes proportions de toutes ses parties que par ses ornements. En ce temps où l’on confond trop souvent le grand et l’énorme, il se fera remarquer par son caractère de vraie grandeur.
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- § S. — De Grenelle à Montrouge,
- Après avoir traversé la Seine sur le pont double que nous avons décrit, le chemin de fer de Ceinture franchit le quai de Javel sur une grande arche en pierre de 20 mètres de largeur, et se continue en viaduc sur un parcours de 50 mètres environ.
- L’on établira sur ce point une gare de marchandises qui servira à approvisionner les usines nombreuses de Grenelle, et qui pourra aussi être mise en communication avec le port de Javel, l’un des plus étendus, des plus commodes, et bientôt sans doute des plus fréquentés de Paris.
- Le chemin de fer traverse la plaine de Grenelle sur un remblai de 6 à 10 mètres de hauteur, en suivant à quelque distance la route militaire qui se trouvera ainsi élargie jusqu’au pied du remblai. Du chemin du Moulin de Javel à la' rue [de Sèvres, une rue latérale de l’autre côté de la voie, servira de débouché à l’avenue Saint-Charles, et au chemin des Marais. En face de la porte
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- de Sèvres, une voûte de 12 mètres d’ouverture mettra en communication Issy et Grenelle. À ce point une station de voyageurs, contiguë à la gare de marchandises dont nous avons parlé, sera aussi établie, et hâtera le développement et l’amélioration du vaste quartier Saint-Charles, si mal habité actuellement, qu’il a recule sobriquet d’llc-des-Singes,
- . A l’extrémité de la rue de Sèvres, nous trouvons un autre passage formé par une voûte de 12 mètres d’ouverture.
- Le remblai, se continuant dans les mêmes proportions, arrive ,à la rue Notre-Dame, qui aboutit aune porte de Paris. Cette rue, obliquant avec le chemin, le traverse sous un viaduc de trois arches hautes de 10 mètres. Celle du milieu, au-dessus de la chaussée, a 20 mètres d’ouverture, les deux arches latérales ont chacune 9m 60. Ici, on le voit, le chemin ne rétrécit pas la voie publique. Tout au contraire,, prévoyant l’accroissement futur de la circulation des rues qu’il traverse, il donne à ces passages une largeur qui défie toutes les exigences de l’avenir.
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- Nous arrivons ainsi à la rue du Hameau, où le remblai a atteint une hauteur de 11 mètres. A ce point commence un grand via-duc qui se compose de quatorze arches dont douze de 9ra 60 d’ouverture, une-de 14 mètres, sur la chaussée de la rue du Hameau, et une de 19 mètres sur larue de Vaugirard. Ce viaduc a une longueur totale de 195 mètres, et une hauteur qui varie en raison de l’inclinaison du terrain. Les piles sont percées d’ouvertures de 3 à 4 mètres dé large et de 4 à 5 mètres de haut, qui pourront servir de promenoir couvert.
- Le chemin qui, passé la rue de Vaugirard, forme un remblai de 7 mètres, se change bientôt en une tranchée, jusqu’à la rue de la Poterne, où commence le premier tunnel. Entre ces deux voies, un vaste espace est réservé pour l’établissement de la station de Vaugirard, admirablement située entre cet ancien village et Issy.
- La rue de la Poterne passe sur l’entrée du tunnel de Vaugirard, lequel s’étend sous les magasins à fourrages de l’armée, sur une longueur de 300 mètres. Ce tunnel présente
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- des difficultés d’exécution sur lesquelles nous aurons à revenir.
- A la sortie du tunnel , le chemin se continue en tranchée, et traverse ainsi le plateau de Plaisance. La me de Turbigo franchit cette tranchée sur un beau pont, de 18 mètres d’ouverture. La chaussée de ce pont a 12 mètres de largeur, comme la rue à laquelle elle sert de passage.
- Là commence la voie de raccordement avec la ligne de l’Ouest, qui, décrivant une courbe, monte par une rampe vers ce che * min, sur lequel elle s’aiguille à la hauteur de la rue du Transit.
- Le chemin de l’Ouest traverse celui de ceinture sur un viaduc à peu près semblable au précèdent. Là devra se trouver une station de correspondance dans le genre de celle de Bel-Air, qui unit la ligne de ceinture rive droite au chemin de Vincennes. Aussi, le viaduc sur lequel passe la ligne de l’Ouest est-il assez large pour que l’on puisse y ménager de chaque côté de la voie un quai à voyageurs.
- Larue de Vanves, qui oblique avec le
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- chemin de fer, le traverse sur un viaduc large de 28 mètres, et de 12 mètres d’ouverture. La tranchée se continue ainsi jusqu’à la rue des Plantes, sans interruption. Quatre sentiers la franchiront sur des ponts en charpente. La rue des Plantes passe ensuite sur un viaduc en maçonnerie de
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- 12 mètres, et la tranchée arrive à la route de Châtillon qui franchit le chemin de fer sur un pont de 30 mètres de large.
- A la route de Châtillon, commence la station de Montrouge, qui sera située à proximité de ce village et du carrefour des Qua-tre-Ghemins, centre d’un quartier qui, chaque jour, tend à devenir un des plus beaux du nouveau Paris.
- La station de Montrouge sera établie dans une tranchée s’étendant de la route de Châtillon à la route d’Orléans. L’avenue du Grand-Montrouge la traversera sur un pont. Le bâtiment de la station sera en façade sur la route d’Orléans, et deux escaliers descendront de la route de Châtillon au quai des voyageurs.
- Le lecteur trouvera sans doute que nous
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- passons rapidement sur tous les ouvrages que nous rencontrons depuis le tunnel de Vaugirard. Nous avons passé rapidement de môme sur le pont du Point*du-Jour. Les travaux que nécessitent ces parties du chemin de ceinture ne trouvent ici leur place qu’au point de vue de la description. Nous en reparlerons quand nous traiterons des difficultés que leur exécution a présentées ou présente encore.
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- § 4. — Le grand Tunnel.
- La route d’Orléans a plus de trente mètres de largeur. Sous toute la largeur de cette route, un pont de neuf mètres d’ouverture donne passage à la voie ferrée. Ce pont sera un véritable tunnel, puisqu’il portera en outre le bâtiment de la station, qui se développera en façade de vingt mètres sur la route.
- Passé la route d’Orléans, le chemin se continue, en tranchée, jusqu’à la rue du Chemin-Vert, à une profondeur de onze mètres environ. C’est dans cette tranchée que prendra naissance la voie de raccordement avec le chemin de fer de Sceaux et Orsay, voie dont le tracé n’est pas encore définitivement fixé.
- La rue du Chemin-Vert passe sur l’entrée du grand tunnel de Montrouge, l’ouvrage le plus remarquable de celte curieuse ligne, au point de vue des difficultés d’exécution.
- Le tunnel a 903 mètres de longueur. Il s’étend sous la haute colline appelée le Mont-Souris, dont. la masse était déjà creusée en tous sens par de vastes exploitations sou-
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- terraines, abandonnées depuis longtemps. Qu’on se figure cette gigantesque route, traversant en ligne droite tous ces cavages, tantôt sur un sol ferme, tantôt sur des vides, qu’il faut combler. Ici, il ne s’agit pas seulement de consolider une plate-forme, sous laquelle on peut faire des sondages, et qui révèle d’elle-même par ses tassements les faiblesses du sol qui la supporte, mais il faut créer, à travers tous ces abîmes inconnus, une voie dont la solidité doit défier et les plus fortes charges et les injures du temps. Lorsque dans deux ans, le voyageur, étendu nonchalamment sur sa banquette, parcourra sans aucune crainte en quelques' secondes cette route souterraine, large de neuf mètres, haute de sept, songera-t-il aux hommes qui lui ont frayé ce chemin si sûr à travers mille dangérs dont la voûte rigide, unie, droite, ne lui rappellera même pas le souvenir? Les anciens n’auraient confié de semblables travaux qu’à leurs esclaves ou à leurs condamnés. Ils eussent sacrifié des milliers d’existences à cette oeuvre. Nous y envoyons des hommes du monde, pour qui
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- tous ces dangers sont.affaire de science. Froidement, ils calculent toutes les difficultés de l’entreprise ; ils prévoient tous les obstacles, ils sondent tous les abîmes, ils indiquent dans les moindres détails la tâche aux bons pères de famille qu’ils emploient, honnêtes gens dont la confiance est grande, et a raison de l’être. Ceux-ci marchent en aveugles dans la route périlleuse, se contentant d’obéir. Quand l’œuvre est achevée, ils se comptent; pas un ne manque à l’appel.
- Et maintenant que les rhéteurs accusent ou défendent notre siècle, qu’ils nient ou affirment le progrès, qu’importe? On leur répondra par un de ces ouvrages merveilleux, sortis des mains des hommes de science, et qui rendront service à tous sans avoir coûté de larmes à personne.
- Le progrès est là, et rien que là.
- Le tunnel de Montrouge passe à 21 mètres au-dessous du chemin de fer de Sceaux. Il sort peu après. Un viaduc, léger, étroit, élégant de coupei traverse la tranchée profonde de 16 mètres, c’est l’aqueduc d’Àrcueil, qui conduit l’eau de ltungis à Paris, et qui
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- vieux comme Lutôce, approvisionnait jadis les thermes de Julien.
- La montagne s’abaisse rapidement, et la rue de la Glacière que l’on rencontre après l’aqueduc, n’est plus qu’à 7 mètres au-dessus du rail qu’elle franchit sur un pont. En façade sur l’un des côtés de ce pont sera le bâtiment des voyageurs'de la station de Gentilly.
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- § 5 . ~ De Gehtilly au pont Napoléon.
- La station de Gentilly occupe le fond d’une petite valiée. La voie y sera sur un remblai peu considérable. Les quais à voyageurs sont mitoyens d’une pépinière dont les deux parties sont réunies par un pont passant sous la voie.
- La station est également à proximité du faubourg de la Glacière et du village de Gentilly.
- De la station, le chemin se dirige vers la vallée de Bel-Air, en traversant en tranchée la colline de la Fontame-à-Mulard.
- Bel-Air est un des sites les plus riants de Paris. Les deux branches de la Bièvre y serpentent entre des rangées de peupliers ; ie terrain y est très-accidenté ; la vallée, limitée par la hauteur dont nous venons de parler et celle dite la Maison-Blanche, a de très-agréables perspectives, et il est question d’y établir un parc,'moins considérable, mais tout aussi agréable que celui des Buttes-Chaumont.
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- Le chemin de Ceinture formerait la limite méridionale de ce parc/ Il traverse la vallée sur un remblai de 7 mètres, au deux extrémités duquel se trouvent deux viaducs, l’un pour l’entrée de la Bièvre, l’autre pour le passage du chemin des Peupliers.
- Cette vallée franchie, le chemin de fer traverse en tranchée l’ancien hameau du Bel-Air. Deux ponts de neuf mètres d’ouverture livrent un passage à. la rue de ce nom et à celle du Moulin de-la Pointe, et on arrive ainsi à la route d’Italie, qui, large de quarante-cinq mètres, est franchie par un pont de treize mètres d’ouverture. Sur ce pont et à l’alignement de la route, sera construit le bâtiment de la station de la Maison-Blanche, dont les quais.à voyageurs se trouveront dans la tranchée de six à sept mètres, qui s’étend entre la route d’Italie et celle do Ghoisy-le-Roi. Cette station sera ouverte également au service des marchandises.
- A partir de la Maison-Blanche, nous rencontrons un pont sous la route de Choisy, un autre sous la rue Neuve-des-IIospices, un
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- troisième sous la route.d’Ivry. Ici, la tranchée a près de 11 mètres de profondeur. La rue Nationale prolongée passe sur un pont qui forme la tête du souterrain d’Ivry, long de 348 mètres. Ce souterrain s’étend sous la hutte du Moulin-Neuf. La plate-forme est au plus à 14 mètres en contre has du sol de la hutte.
- A la sortie de ce tunnel, les deux côtés de tranchée s’abaissent rapidement, et le chemin traverse bientôt, sur un pont métallique, le boulevard de Vilry. Nous avons fini notre route accidentée, et nous entrons à pleins jalons dans la vallée de la Seine.
- Bientôt nous rencontrons le chemin de fer d’Orléans, dont le chemin de ceinture franchit les dix voies sur un pont métallique d’une seule travée de 45 mètres de portée. Là sera placée la station de correspondance des voyageurs de la ligne d’Orléans. A peu de distance, nous trouvons la voie de raccordement établie, on le sait, sur un viaduc formant quart de cercle. Le remblai du chemin de ceinture se trouve resserré entre deux murs de soutènement jusqu’aux ap-
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- proches de la ligne de jonction. Deux arches, de même forme que celles du viaduc du pont Napoléon, unissent enfin le remblai à ce viaduc.
- Là se termine l’œuvre en cours d’exécution. Nous l’avons décrite d’une façon dont le seul mérite est. croyons nous, d’être claire et complète. Nous avons évité avec soin de fatiguer le lecteur par des expressions tecli» niques ou des détails intelligibles seulement aux hommes spéciaux. Nous nous- sommes promené en touriste sur cette ligne, et nous avons rendu compte de nos impressions de voyage.
- Nous allons essayer maintenant d’étudier les parties ardues de l’entreprise et de nous rendre compte des difficultés de la construction.
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- DIFFICULTÉS D’EXÉCUTION*
- Ces difficultés sont de deux sortes : les difficultés morales et les difficultés matérielles.
- On sait, en effet, que le mode de procéder de l’Etat n’est pas le même que celui de la Ville. La municipalité exproprie non-seule-? ment remplacement qui lui est nécessaire pour l’exécution de ses travaux, mais encore, sauf le cas d’arrangements à l’amiable, la totalité des propriétés atteintes. Elle' ne laisse donc derrière elle aucun intérêt en souffrance. Si le sacrifice est lourd, il l’est pour elle seule.
- L’Etat, au contraire, a le droit, au nom de l’utilité publique, de passer à travers tous les biens, en ne payant que ce qu’il supprime.
- Ainsi-armé, il pourrait légalement, et sems laisser de recours CQplre lui, porter atteinte
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- à une foule d’intérêts respectables, piétiner tous les droits acquis , causer la désolation partout où son action s’opère.
- Heureusement, la loi qui donne à l’Etat ce droit terrible a prévu qu’en raison de notre degré d’avancement moralles dépositaires du pouvoir n’en useraient qu’avec une sage modération et sauvegarderaient le plus possible les intérêts privés.
- Sous les gouvernements précédents, l’esprit outré/d’économie a amené l’abus de pouvoir en cette matière. On a de nos jours des vues plus larges. On n’exécute un pr’ojet
- que lorsqu’il concilie le droit de l’Etat et
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- l’intérêt des tiers. On n’en confie l’exécutioii qu’à des hommes qui joignent à la science nécessaire un esprit .éclairé de justice et d’équité. A ce point de vue, rien n’est délicat comme l'établissement’d’un chemin de fer dans une ville, surtout lorsque cette ville est Paris. ' -
- Aussi, pour le chemin qui npus occupe, trouvons-nous," dans les moindres détails, le résultat d’une étude consciencieuse et intelligente de tous ,les intérêts. . '
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- Rien n’est négligé ni froissé. Voyez plutôt.
- Le viaduc d’Àuteuil, qui sera pour ce quartier déjà charmant un embellissement de premier ordre, ne lui enlève aucune de ses voies actuelles et n’en détourne aucune. Il maintient" dans leur intégralité la rue Militaire, l’infortuné palais de l’Exposition universelle permanente, le hameau Boileau. Il franchit les grandes routes de Boulogne et de Sèvres sur des ponts qui n’enlèvent pas à ses avenues un millimètre de leur largeur, et sont assez élevés pour ne pas nuire aux perspectives.
- Loin d’encombrer les abords de la Seine, comme le fait le pont Napoléon de Bercy, il les améliore. Pas de rampes à double évolution, pour les voitures, pas d’escaliers pour les piétons. Des quais au contraire de chaque côté. Des voies conduisant de ces quais à l’intérieur des quartiers. Un pont large, horizontal, établissant une communication nouvelle de premier ordre* La voie ferrée ne crée pas là une gène dont elle doit profiter. Tout au contraire, elle développe les moyens de circulation, ordinaire, elle améliore les
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- quartiers qu’elle. traverse, au moinsautant que ce.ux où, elle, s’arrête. L’œuvré es.t une œuvre, d’Etat, c’est-à-dire, conçue dans l’intérêt de tous , sans restriction, "sans calcul mesquin de bénéfices futurs.
- Çet exemple-suffira pour faire comprendre quelles-difficultés morales il a fallu vaincre. Etudions maintenant les difficultés maté-
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- rielles..
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- § 1er,—Le pont sur la Sëine au Point-du-Jour.
- On a, de notre temps, en France et à l’étranger, construit bien des viaducs remarquables. Non-seulement on à vaincu les difficultés, mais on a mis un orgueil très-justifiable à s’en jouer. Surprenants d’abord, les travaux sont maintenant vertigineux.
- Le pont du Point du-Jour n’a pas préci* sèment ce. dernier aspect. Il surprend par sa grandeur, et ce n’est qu’en y songeant un peu que l’on comprend toute l’étendue de la difficulté vaincue.
- Les viaducs à plusieurs étages se composent en effet, généralement aurez-de-chaus-séè, d’arches à petite ouverture. Les étages supérieurs sont formés par des arches, plus légères, souvent d’une ouverture plus grande. Au fur et à mesure qu’on s’élève, on diminue la charge. Les piles reposent sur lès piles, et on n’élève rien sur le vide.
- En construisant ainsi, les ingénieurs se sont occupés surtout de la pesanteur des matériaux et accessoirement de leur résistance.
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- Au Point-du-Jour, la résistance est le principe constitutif de la force du pont. On l’a calculée de façon à opposer cette force à la pesanteur des matériaux, qu’elle ne rend plus qu’accessoire.
- Ainsi nous avons un pont de cinq grandes arches, supportant un viaduc de 3i arcades, chaque grand cintre du pont porte' donc six piles du viaduc. Toute imperfection de détail dans une pareille œuvre rendrait la construction périlleuse. Suivons donc les procédés employés.
- ' Le sol de la Seine, à 9 m. au-dessous de l’étiage, se compose de craie à silex. Au-dessus, s’étendent les marnes crayeuses, puis le sablé de rivière, puis lé sable gris, vaseux et enfin une légère couche de vase.
- On a dragué pour chaque pile, jusqu’à 3 mètres 50 au-dessous de l’étiage. Sur ce sol ainsi préparé, on a placé un caisson long de 40 m., large de 9 à la base, et haut de près de 6m. Ce caisson, en charpente,'monté sur des bateaux placés des deux côtés de l’emplacement de la pile, est descendu par dix chèvres.
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- A l’extérieur du caisson on fait un enrochement destiné à le maintenir immobile. A l'intérieur on coule le béton, à une épaisseur de 3 mètres. Le socle en pierre de taille, et la première assise de maçonnerie sont posés à sec dans le caisson.
- Les piles sont en pierre dure. Elles ont 31 mètres de longueur et 4,n72 d’épaisseur. Elles sont accompagnées, à l'avant et à l’ar ri ère, de becs coniques de 2'"36 à 2,n16 de rayon.
- La culée de la rive droite est construite sur pilotis. Celle de la rive gauche est fondée sur le gravier pur. Elle repose sur une cou-ehe de béton de lm50 d’épaisseur.
- Les voussoirs des grandes voûtes qui, nous l’avons dit, ont 30 mètres d’ouverture, sont en pierre dure. Les douelles sont en meulière piquée, liourdée en mortier déciment de Portland.
- Les piles du viaduc supérieur descendent jusqu’e sur l’extrados des grandes voûtes. Les remplissages de ces voûtes sont en meulière brute.
- Les piles du viaduc supérieur sont per-
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- cées de baies, formant sous ce viaduc un promenoir couvert s’étendant sur toute la longueur du pont, ce qui lui donnera une grande légèreté. Le viaduc supérieur sera entièrement recouvert de cette belle pierre de Château-Landon, toujours neuve, toujours blanche, qui, sous notre ciel inclément, remplace le marbre des arcs de triomphe romains.
- L’idée d’employer au revêtement de ce viaduc cette belle pierre est doublement heureuse. Au point de vue de la solidité, elle ne le cède à aucune autre...
- Puis, n’est-il pas bon aussi que ce merveilleux trait d’union entre les deux rives ait un aspect monumental ? N’est-ce pas un monument élevé au génie industriel dè notre siècle, dont les chemins de fer sont la plus^
- haute expression?.. monument qui. lui-
- même prouve d’une façon éclatan te que pour la science moderne il n’est plus d’impossibilités.
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- § 2.—travaux souterrains.
- Une grande partie du tracé de la rive gauche s’étend sur d’anciennes carrières, abandonnées pour la plupart depuis fort longtemps. Ce que les Parisiens ignorent généralement, c’est que ces souterrains sont le siège d’une industrie assez importante, celle des champignonistes, que la construction du chemin de fer vient de déposséder d’une partie de leurs domaines mystérieux.
- A travers tous ces abîmes, et à différentes profondeurs, la voie se trouve généralement indiquée par des piliers et des arceaux en maçonnerie. Les vides sont comblés par des bourrages. Les pieds droits dès ouvragesjd’art sont fondés jusque dans les carrières. Les matériaux sont descendus par les anciens puits, utilisés déjà par les champignonistes.
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- Ces travaux sont exécutés avant le commencement des constructions apparentes.
- Où ils présentent un grand intérêt, c’est au dessous du parcours souterrain de la voie.
- Ainsi, au tunnel de Vaugirard, les pieds droits de la voûte se répètent dans les carrières, au moyen de deux séries de piliers en maçonnerie de 2n,50 de largeur, descendant jusque sur la masse. Ces piliers sont espacés de 2m50, et reliés par des arceaux également en maçonnerie. Sous l’impasse des Pé-richeux, les piliers traversent deux étages de carrières avant de trouver un sol suffisamment solide pour porter l’ouvrage.
- Le tunnel de Vaugirard s’étend ainsi sur une longueur de 327 mètres, sous laquelle ne se trouvent qu’environ 45mètres de parties pleines. Il est construit à ciel ouvert.
- A quelque distance de ce souterrain, le tracé rencontre le chemin de fer de l’Ouest, sous lequel il passe au moyen d’un pont, également au dessus de cavages, et qu’il faudra construire sans interrompre un seul tant la marche des trains, très-fréquents
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- sur celle ligne, à cause du service de la banlieue.
- La slation de Montrouge, qui se trouve, ainsi que nous l’avons dit, entre les routes de Cbâtillon et d’Orléans, est située dans une profonde et large tranchée. Les parois sont revêtues d’une maçonnerie en mosaïque établie en moellons de roche à joints irréguliers. Ces murs sont inclinés et soutenus par'des contre-forts logés dans les entailles faites dans le terrain.
- Ces ouvrages se trouvent répétés dans les cavages. Les piles correspondant aux contre-forts sont reliées par des arceaux. Sous la voie et les quais à voyageurs, on a comblé les vides par des bourrages. En dehors des maçonneries déconsolidation, on a conservé ou creusé, de chaque côté de la voie, une galerie d’inspection d’un mètre de largeur.
- Ces galeries s’étendent de même dans toute la longueur du souterrain de Montrouge, l’ouvrage le plus hérissé d’obstacles de toute la ligne, ou tout au moins celui qui demande le plus de précautions, celui où chaque difficulté expose à de graves accidents.
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- A l’entrée du souterrain, les ravages se rencontrent à 9 mètres au dessous de la plate-forme du chemin de fer. Tandis que la voie descend vers Gentilly, les anciennes carrières montent vers le même point de façon qu’à la tête opposée du tunnel leur sol se trouve à 5 mètres au dessus de la plate-forme.
- Sous la voie, on a comblé les vides par des bourrages, puis construit un mur d’une épaisseur totale de 3 mètres, destiné à consolider les maçonneries du tunnel. Les galeries d’inspection isolent ces ouvrages. Tantôt on a utilisé pour ces galeries des cavages existants, tantôt on les a prises dans la masse, ce qui a produit une grande quantité de moellons dont on a facilement trouvé l’emploi. Dans maints endroits on a été obli • gé de maçonner le côté extérieur de ces galeries, soit pour combler des vides, soit pour assurer la solidité du ciel.
- Ces galeries d’inspection serviront à constater l’effet des vibrations produites par le passage des trains. Elles seront aussi la voie d’accès du service des mines, qui, on le sait,
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- esl chargé de la surveillance de l'inextricable réseau de ruelles souterraines qui s’étend sous cette partie de Paris. On y parviendra par des niches et des puits spéciaux placés dans le tunnel.
- Leur établissement est un travail réellement vertigineux. Dans la plupart des couloirs existants, on ne marche pas, mais on rampe* Les ciels menacent de crouler. A Chaque instant il faut placer des étais et des blindages. Il n’y a pas un mètre de maçonnerie qui ne nécessite une étude. La moindre négligence peut entraîner la mort d’un nombre considérable d’ouvriers...
- Et le plus grave des sinistres qu’on a eus à déplorer dans cette partie de la construction, a entraîné pour sa victime une incapacité de travail de cinq jours 1
- Les mortiers sont préparés hors du tunnel, puis transportés en Wagon, dans la cunette, jusqu’à l’orifice des puits spéciaux. Le service est organisé, malgré ces énormes difficultés, de façon à ce que jamais les ouvriers ne perdent une minute. Ils travaillent jour et nuit*
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- Lorsque les cavages sont au niveau de la voie ou au dessus, on double les pieds droits du tunnel par d’épaisses murailles et des contreforts. Du côté opposé au tunnel, on consolide également le pied droit de la galerie d’inspection, afin d’éviter la pression des masses supérieures qui agirait irrégu*, lièrement sur la voûte du chemin de fer.
- Quant à la construction du tunnel proprement dit, on a commencé par creuser une cunette blindée de 4 mètres de large et 4 mètres 60 de hauteur. Quand les consolidations souterraines sont achevées, on fait l’abattage en giand, et on pose au fur et à mesure de l’abattage des étais en éventail supportant un blindage.
- L’étaiement de la partie creusée terminé, on monte les cintres en charpente. Au fur et à mesure de la construction d’un arc, on retire les .étais et les blindages. On procède ainsi par chambres. Chaque section de voûte entreprise se commence aux deux extrémités. Les sections ont environ 10 mètres.
- Quand le pied droit porte sur la masse,
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- on creuse en faisant l’abattage, de façon à le construire avant le cintrage. Quand, au contraire, il doit porter sur les consolidations, ce qui est le cas le plus fréquent, on construit la voûte sur des semelles en charpente, de façon à la reprendre en sous-œuvre quand on abaissera le sol de la cunette au niveau de la voie.
- Le 5 juin dernier, il s’est formé une cloche dans une partie du tunnel. On a immédiatement construit la voûte, dont l’épaisseur en cet endroit a été portée à 90 centimètres. On lui a fait une chape en mortier hydraulique et on a bourré le vide avec des cotterets écorcés, qui, entièrement privés d’air, se conserveront éternellement et répartiront également la charge sur toutes les parties de l’extrados.
- La voûte du tunnel de Montrouge a 85 centimètres d’épaisseur aux naissances et 65 à la clef. Elle est construite en moellons smillès, hourdés de mortier de chaux.
- Dans la tranchée qui suit le souterrain, on trouve encore des cavages, mais bien au-dessus de la plate-forme. On les consolide
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- en maçonnant et bourrant les parties voisines des talus.
- Tous les murs de soutènement sont pourvus de barbacanes pour l’écoulement des eaux. Des rigoles en maçonnerie suivent les deux côtés de la voie.
- Le tunnel d’Ivry, construit à ciel ouvert, présente bien moins de difficultés que le précédent.
- Les terres enlevées dans la traversée d’I-vry servent à faire l’immense remblai qui s’étend jusqu’au pont Napoléon. Un pont métallique de 45 mètres de portée passe au-dessus de la voie du chemin de fer d’Orléans.
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- IV.
- SERVICE MÉDICAL, POLICE DES CHANTIERS,
- .CANTINES.
- Il n’est pas sans intérêt de publier ici les dispositions réglementaires prises par l’ingénieur en chef du chemin de ceinture, tant dans l’intérêt des ouvriers que dans celui de la bonne tenue des chantiers.
- Cette petite ligne, qui contient un échantillon de tous les ouvrages, avait d’autant plus besoin de cette réglementation qu’elle est exécutée au milieu de quartiers populeux et dans une grande ville.
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- § i er.~Service médical.
- Quotité et condition des secours. l.— Conformément à l’article 3 de l’arrêté ministériel en date du 15 octobre 1848, les ouvriers atteints de blessures ou de maladies ayant pour cause, dûment constatée, les travaux auxquels ils auront été employés, après avoir reçu sur place les premiers secours de l’art, seront traités gratuitement, soit à l’hôpital, soit à domicile, aux frais de l’entrepreneur, sous le contrôle et la surveillance des ingénieurs de l’Etat.
- 2. — En dehors des soins désignés ci-dessus, les ouvriers malades ou blessés par le fait direct des travaux, recevront pendant la durée de l’interruption obligée du travail, qui devra être constatée par un certificat du médecin, la moitié du salaire qu’ils auraient pu gagner s’ils avaient continué à travailler.
- Toutefois, lorsque les ouvriers seront soignés à l’hôpital, l’allocation de la moitié du salaire ne leur sera accordée que dans le cas où ils seront mariés ou qu’ils auront des charges de famille.
- 3. —Lorsque, par suite de blessures, ils seront devenus impropres au travail de leur profession, il leur sera alloué la moitié de leur salaire pendant une année à partir de l’accident.
- 4. — Lorsqu’un ouvrier marié ou ayant des charges de famille aura été tué sur les travaux, ou aura succombé dans l’année à la suite de blessures ou de maladies occasionnées par les travaux, ce dont le médecin d’arrondisse-
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- ment sera seul juge, sa veuve ou sa famille aura droit à l’indemnité fixée par les instructions ministérielles.
- 5. — Les ouvriers qui seront blessés dans un état d’ivresse ou par refus d’observer les mesures de prudence ordonnées, ne pourront recevoir que des secours médicaux.
- (5. — Tout ouvrier atteint de maladies anciennes, de maladies occasionnées par l’inconduite ou la malpropreté, ou encore de maladies contractées en dehors des travaux , ne pourra prétendre ni aux secours médicaux, ni à la moitié du salaire qu’il aurait pu gagner pendant la durée de sa maladie. La constatation de ces maladies par le médecin sera une cause de renvoi de l’ouvrier.
- 7. —Les secours ne sont dus qu’aux ouvriers employés sur les chantiers qui dépendent directement soit de l’entrepreneur, soit de l’Etat. Ils ne sont pas dus aux ouvriers ou aux voituriers qui effectuent des travaux à la. tâche et en dehors de la surveillance directe des agents de l'Etat ou de l’entrepreneur.
- 8. — Pour toutes les contestations qui pourraient s’élever entre l’entrepreneur ou l'Etat et les ouvriers intéressés au présent règlement, ces' derniers s’engagent, par le fait même de leur emploi sur les travaux, à prendre élection de domicile à la mairie du lieu où réside l’entrepreneur ou son représentant immédiat.
- Ambulances. - 9. — Il sera établi dans les locaux désignés par l’ingénieur en chef, aux frais de l’entrepreneur et par ses soins ou à défaut par ceux des agents de l’Etat, une ou plusieurs ambulances destinées à permettre de
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- donner aux ouvriers les premiers soins en cas d’accident.
- 10. — Ces ambulances seront munies d’une boîte à pansement complète. Une boîte semblable sera déposée dans chacun des chantiers où le médecin d’arrondissement la jugerait utile.
- 11. — Chaque ambulance sera également munie de deux brancards à matelas et à rideaux.
- Un de ces brancards sera aussi déposé dans chacun des chantiers présentant quelque danger de chute ou d’éboulement et où le médecin d’arrondissement le jugerait utile.
- 12. — L’ingénieur de l’arrondissement déterminera remplacement, l’importance et l’installation des ambulances, le médecin entendu.
- Cabinets de consultation. — 13. — Il sera établi, en outre, près de l’ambulance la plus centrale de chaque arrondissement, un cabinet de consultation pour le médecin, aün que les ouvriers atteints de blessures ou d’indispositions légères résultant des travaux et n’entraînant ni traitement à domicile ni séjour à l’hôpital, puissent s’y présenter aux jours et heures qui seront indiqués.
- L’installation en sera faite aux frais de l’entrepreneur et par ses soins, ou à -défaut par ceux des agents de l’Etat.
- 14. — L’entrepreneur devra autant que possible confier la garde des ambulances à des surveillants de chantier susceptibles de donner les premiers soins aux ouvriers blessés.
- Médecin d'arrondissement. — 15. — Il sera désigné par l’ingénieur en chef pour chaque
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- arrondissement, un médecin-chirurgien dont les attributions consisteront :
- 1° A visiter soit à domicile aussi souvent que leur état l’exigera, soit à l’hôpital une fois par semaine, les ouvriers malades ou blessés ;
- 2° A délivrer, le cas échéant, les certificats d’hôpital et les bons de médicaments ;
- 3° A inspecter au moins une fois par semaine les chantiers de l’arrondissement.
- 4" A se rendre trois fois par semaine au cabinet central de consultation ;
- 5° A prescrire les précautions hygiéniques et les boissons spéciales que devra fournir l’entrepreneur aux ouvriers, soit dans les grandes chaleurs, soit dans les froids intenses, soit dans des circonstances exceptionnelles ;
- 6° A examiner l’organisation des dortoirs et cantines au point de vue de la salubrité ; à goûter et analyser au besoin les aliments et les boissons, à consigner les modifications ou améliorations qu’il jugera nécessaires;
- 7° A transmettre, le 4 de chaque mois; à l’ingénieur de l’arrondissement un rapport sur l’ensemble du service médical dans sa circonscription.
- Pharmaciens.— 10. — Le médecin d’arrondissement choisira dans les environs de son service un ou plusieurs pharmaciens chez lesquels il autorisera les ouvriers traités à domicile à prendre les médicaments nécessaires au moyen de bons.
- Mesures à prendre en cas d'accidents.—17.— Lorsqu’un ouvrier sera blessé ou malade sur un chantier, l’entrepreneur ou son représentant sur ce chantier détachera du registre à souche qui y sera déposé le certificat de blessé
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- et le coupon d’hôpital, après avoir rempli la souche et le certificat en ce qui le concerne. La pièce ainsi détachée sera remise à l’ouvrier ou à la personne chargée de l’accompagner.
- Le médecin décidera si l’ouvrier sera transporté à l’hôpital ou s’il pourra être soigné à domicile.
- Dans le premier cas, le médecin signôra le coupon d’hôpital et l’expédiera à l’hôpital désigné par la direction générale de l’assistance publique.
- Dans le deuxième cas, il lui donnera ses soins à domicile.
- 18.—L’ouvrier devra conserver avec le plus grand soin le certificat de blessé. Pour être payé, il devra le représenter, après son rétablissement, rempli soit par le médecin, soit par le directeur de l’hôpital, selon le cas ; cette pièce, ainsi complétée, servira de hase au règlement de l’indemnité qui sera due à l’ouvrier blessé ou malade ou à ses ayants droits. Elle sera remise et conservée au bureau de l’ingénieur ordinaire.
- Registre matricule des accidents, —19.— Il sera tenu dans chaque arrondissement d’ingénieur ordinaire un registre matricule des accidents.
- Ce registre contiendra la statistique de l’accident et le décompte des irais qu’il aura occasionnés. Il sera rédigé d’après les éléments du certificat du blessé et d'après les renseignements fournis par le conducteur chef de la subdivision. A cet effet, celui-ci devra exiger de l’entrepreneur la remise du certificat, lequel sera classé dans un dossier spécial. Il y aura un dossier correspondant à chaque accident.
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- Les éléments du décompte résulteront aussi du certificat du blessé, et des notes du médecin et du pharmacien.
- Un extrait de ce registre signé du médecin, de l’entrepreneur, du conducteur de la subdivision et vérifié par l’ingénieur de l’arrondissement, sera adressé à l’ingénieur en chef pour chaque accident ou maladie, aussitôt le règlement terminé.
- Médicaments.—20.—Pour les malades ou blessés soignés à domicile, il sera déposé chez le médecin d’arrondissement un registre de bons à souche. Quand il y aura lieu à la délivrance de médicaments, le médecin détachera, après l’avoir rempli, un bon à souche pour le pharmacien. Ce bon, sur lequel celui-ci indiquera le prix de la fourniture, sera vu bon à payer par le médecin, puis soldé par l’entrepreneur ou pour son compte.
- Il sera réuni au dossier conservé dans les bureaux de l’ingénieur ordinaire pour servir à la rédaction du décompte de l’accident ou de la maladie.
- Comptabilité.—21.—La comptabilité des accidents s’établira chaque Irimestre au moyen d’un état récapitulatif dressé contradictoirement avec Penlreprenenr par le conducteur chef de subdivision qui le rédigera en trois expéditions : une de ces expéditions sera remise à l’entrepreneur. La seconde restera au bureau de l’ingénieur ordinaire. La troisième sera adressée à l’ingénieur en chef.
- Rapport médical mensuel.—22.—Le 4 de chaque mois, le médecin d’arrondissement adressera à l’ingénieur ordinaire un rapport sur l’état des ouvriers en traitement et sur l’hygiène
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- générale des chantiers, Ce rapport sera envoyé par l’ingénieur ordinaire avec ses observations à l’ingénieur en chef, qui le lui retournera avec ses ordres et sera classé ensuite dans les archives de chaque arrondissement.
- Procès-verbaux d'accidents.—23.—Toutes les fois qu’un accident grave aura lieu, le conducteur de la subdivision en dressera un procès-verbal dont copie sera adressée immédiatement à l’ingénieur d’arrondissement et à l’ingénieur en chef.
- Etat annuel des accidents. — 24.—J1 sera adressé par l’ingénieur d’arrondissement à l’ingénieur en chef, à la fin de chaque année et au plus tard le 10 janvier, un état général des accidents arrivés dans un arrondissement pendant l’année précédente.
- Traitement du médecin.— 25. — Le traitement du médecin se composera :
- 1° D’une somme fixe de 500 fr. pour consultations, visites des chantiers, rapports, soins d’hygiène et visites aux hôpitaux, etc.;
- 2° D’une somme de 1 fr. par visite à domicile.
- Le traitement fixe sera payé par trimestre par l’entrepreneur au médecin ; le traitement éventuel lui sera soldé lors du règlement de chaque accident sur acquit porté au verso du certificat de blessé.
- Le règlement que nous avons publié fait bien connaître l’organisation du service mé- • dical. Quelques détails peuvent cependant intéresser, quant à une bonne précaution prise au point de vue de l’hygiène.
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- Pendant les fortes chaleurs, il est donné gratuitement aux ouvriers une boisson excellente, qui ne provoque pas la transpiration.
- Cette boisson se compose de :
- Essence de café Trablit, 2 flacons
- à 1 fr. 50, net 1 fr..............fr. 2 »
- Sucre blanc, 1 kilogramme........ 1.50
- Alcool pur, 1 demi-litre à 2 fr. 50 1 25
- Dépense.............fr. 4 75
- pour cent litres d’eau. Soit 0 fr. 0475 par
- litre. On en accorde un litre par jour à chaque ouvrier, un tiers à 9 heures du matin, un tiers à 2 heures et un tiers à 4 heures. Ainsi, moyennant une dépense de moins de cinq centimes par jour, l’entrepreneur évite que ses ouvriers abandonnent le chantier, pour aller boire dans les cabarets voisins, et.assure le bon état sanitaire de son personnel.
- Les carîtiniers ambulants ne peuvent vendre aucun spiritueux pendant les grandes chaleurs.
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- § 2.'—Police des chantiers.
- Admission. — i.—Les ouvriers qui cherchent à s’embaucher seront seuls admis sur les chantiers et seulement aux heures de travail. Le public et les rôdeurs en seront expulsés.
- 2. — Tout ouvrier non muni d’un livret, conformément aux lois et règlements sur la matière, ne pourra être employé sur les travaux. On se conformera, en ce qui concerne les livrets, aux prescriptions de la circulaire ministérielle du 18 mai 1855.
- 3. — L’ouvrier terrassier ou manoeuvre qui se sera fait embaucher sur les travaux devra être muni d’une pelle en bon état et agréé par le chef d’atelier.
- L’ouvrier piocheur sera en outre tenu d’être muni d’une pioche convenablement enman-chée et également agréée par le chef d’atelier.
- Les outils etmatérieL, autres que la pelle ou la pioche dont chaque ouvrier ci-dessus sera susceptible défaire usage, lui seront fournis à litre de prêt par l’entreprise; il deviendra alors responsable vis-à-vis le chef d’atelier, qui en aura tenu note, des pertes de ces outils et matériel qui pourraient avoir lieu, et le montant dont l’évaluation sera faite par le même chef d’atelier lui sera retenu sur le salaire restant à lui payer, sauf tous autres recours.
- Durée du travail. — 4. — La journée réglementaire est de dix heures ; toutefois, la durée du travail pourra être portée à douze heures effectives, suivant les conditions débattues
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- entre l’entrepreneur et les ouvriers ; mais cette durée sera la même pour tous les ateliers de la ligne, pendant la même saison.
- La période d’été commencera le 1er avril et finira le 1er octobre. Pendant cette période, le (ravail pourra être porté à douze heures, commençant le malin à cinq heures et finissant le soir à sept heures, avec deux heures de repos.
- La période d’hiver commencera le Ier octobre et finira le 1er avril. Pendant celte période, on travaillera du jour à la nuit avec une heure et demie de repos, excepté du 15 novembre au 15 février, où le repos sera, réduit à une heure.
- Les heures de repos seront les mêmes pour tous les ouvriers, quelle que soit d’ailleurs leur profession.
- La réglementation de ces heures sera faite par l’entrepreneur, sous réserve de l’approbation de l’ingénieur chargé des travaux.
- Toutefois, quand il y aura des chevaux employés dans un atelier, le temps du repos ne sera pas divisé et aura lieu entre onze heures du matin et une heure de l’après-midi, suivant la durée pour chaque saison.
- Le prix de la journée sera établi comme il est indiqué au premier paragraphe du présent article, suivant le nombre d’heures de travail effectif, et chaque heure demandée en plus sera comptée proportionnellement.
- 5. — Atin d’assurer la régularité du travail sur les chantiers, il sera établi, sur chacun d’eux, une cloche dont la manoeuvre sera confiée au chef de ce chantier. Cette cloche sera sonnée un quart d’heure avant la reprise du travail à titre d’avertissement ; elle sera sonnée de nouveau à l’heure même de commencer ou de cesser le travail pendant cinq mi-6
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- mîtes, et aussitôt après ces minutes écoulées, tout ouvrier qui n’aura pas répondu à l’appel du chef d’atelier ne pourra plus être admis à la période du travail commencé.
- Paie. — 6. — La paie aura lieu chaque mois pour les journées faites pendant le mois précédent. Elle se fera au bureau central de l’entreprise. Les ingénieurs ou les conducteurs délégués par eux pourront y assister.
- 7. —.Un avis indiquant le jour de la paie sera affiché par l’entrepreneur trois jours au moins à l’avance, sur un poteau placé en un lieu apparent de chaque chantier, afin que les fournisseurs ou logeurs puissent établir leur compte et se présenter assez à temps pour toucher le montant de ce qui leur est légitimement dû.
- Us devront remettre au plus tard la veille de la paie, avant midi, au bureau de l’entrepreneur, à peine de voir rejeter leur créance, les notes de ce qui leur est dû par chaque ouvrier, approuvées par cet ouvrier^
- 8. — Chaque atelier devra se présenter à la paie, son chef en tête, dans son ordre de numéro ; les ouvriers qui n’auront pas répondu au premier appel devront al tendre un contre-appel.
- Réclamations. — 9. —Toutes les réclamations que les ouvriers pourraient avoir à faire seront entendues le lendemain et au lieu de la paie, de sept heures du matin à midi, pour qu’il y soit donné une solution. L’ingénieur de l’arrondissement ou son délégué pourra y assister.
- 10. — Il sera toujours déduit, avant le paiement, ce qui pourrait être dû pour nourriture et logement aux répondants ou maîtres de
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- pension de chaque ouvrier, sous les conditions stipulées à l’article 7 ci-dessus.
- A-comptes. —11. — Il pourra être donné des à-comptes en bons de vivres, argent et outils , pourvu que la somme totale n’excède pas la moitié du salaire dû; mais seulement aux ouvriers les plus nécessiteux et toujours un dimanche ou un jour autre que celui de la paie.
- Tout ouvrier qui profiterait de ces à-comptes pour s’enivrer ou s’absenter des chantiers ne pourra plus y êlre admis.
- ' Départ volontaire.—12.—Les ouvriers voulant quitter les travaux seront tenus de prévenir cinq jours à l’avance les chefs d’atelier sous les ordres desquels ils auront travaillé, afin d’éviter le refus des offres de ceux qui se présentent journellement, susceptibles de les remplacer.
- Ils ne pourront réclamer le solde de ce qui leur est du avant la paie mensuelle que moyennant la stricte exécution de cette formalité.
- Renvoi. — 13. — En cas de renvoi, l’ouvrier pourra exiger immédiatement le montant de son salaire, déduction faite également de ce qui serait dû à son répondant ou maître do pension.
- Cantines.— 14.—Pour faciliter le logement et. la nourriture des ouvriers, il pourra être établi, avec l’autorisation de l’ingénieur en chef, un nombre suffisant de cantines. Un reglement spécial affiché à l’intérieur et à l’extérieur des cantines déterminera la police de ces établissements et les mesures à prendre pour le bien-être et l’hygiène des ouvriers qui seraient dans le cas d’y vivre et d’y loger.
- 15.—Il est défendu aux cantiniers ambulants
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- non autorisés de vendre quoi que ce soit sur les chantiers.
- Ceux autorisés qui débiteraient des produits do mauvaise qualité ou qui donneraient lieu à du désordre, seront expulsés des chantiers, sans préjudice des poursuites judiciaires auxquelles iis s’exposeraient.
- Il est interdit aux cantinicrs sédentaires do recevoir chez eux des ouvriers pendant les heures de travail.
- Mesures d'ordre.— 16. — Il est formellement interdit à tout ouvrier en état d’ivresse de so présenter sur les travaux. Ceux qui contreviendraient à cette prescription seront expulsés des chantiers.
- 17.—Les ouvriers soit à la tâche, soit à la journée, ne pourront travailler les dimanches et jours fériés que pour des travaux dont l’urgence aura été reconnue par l’autorité compétente et sur l’ordre écrit de l’ingénieur de l’arrondissement.
- Tout travail fait contrairement à cette prescription ne sera pas payé et pourra être une cause de renvoi des chantiers.
- Objets trouvés dans les déblais, — 18, — Lors-
- âue les fouilles des fondalions des ouvrages ’art ou les déblais des tranchées feront découvrir des objets de nature quelconque, tels que objets d’art ou d’histoire naturelle, médailles ou autres, il est rappelé aux ouvriers, qu’avant de continuer le déblai, ils doivent immédiatement appeler le surveillant de l’entrepreneur et celui de l’administration, qui assisteront à la continuation de la découverte faite avec toutes les précautions désirables, recevront les objets trouvés, et en constate-
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- ront lo nombre et la nature clans un procès-verbal qui relatera les noms des ouvriers au-leuis de la découverte et ceux des ouvriers présents.
- Le procès-verbal et les objets trouvés seront immédiatement déposés au bureau de l’ingénieur pour être statué conformément aux lois sur la matière.
- 19. — Lorsqu’il y aura lieu d’extraire des déblais de roche à la poudre, les plus grandes mesures de précaution devront être prises par l’entrepreneur pour éviter tout accident soit pour les ouvriers, soit pour le public. A cet effet, il devra se conformer aux prescriptions suivantes :
- 1° Etablir son dépôt de poudre en un lieu isolé, loin des habitations et non exposé à l’approche du feu ou de la malveillance, en observant d’ailleurs les règlements de police ;
- ‘2° Veiller à ce que l’on ne se serve que de bourroirs en cuivre ou en bois ;
- 3° Etablir sur le chantier soit un tambour, soit un silffet, soit une cloche d’un timbre particulier et tout à fait distinct qui battra ou sonnera tout le temps pendant lequel il y aurait danger à s’approcher des mines en cours d’exécution.
- Le chef d’atelier sera chargé personnellement de ce détail important du service.
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- § 3. — Cantines.
- Forme des demandes d’autorisation.—1 .—Toute demande d’installation de cantine permanente sur les chantiers sera adressée à l’entrepreneur, qui la transmettra avec son avis à l’ingénieur de l’arrondissement.
- Cette demande contiendra les nom, prénoms, profession et demeure du demandeur, un certificat de moralité délivré par le maire de sa dernière résidence, les pièces qui l’autorisent à exercer comme débitant, un extrait du plan cadastral indiquant par une teinte rose l’emplacement exact de la cantine, et un dessin donnant l’élévation et le plan de la distribution intérieure de la cantine, enfin le tarif des objets d.e consommation et du logement. L’omission d’une seule de ces pièces entraînera le renvoi du dossier au demandeur pour être complété.
- Les cantines auront la forme de ehâlets ou toute autre agréée par les ingénieurs ; elles seront solidement établies, proprement entretenues, parfaitement aérées et accompagnées de plantations lors de la belle saison.
- Elles porteront, au-dessus de la porte principale, un. tableau avec cette mention :
- CHEMIN DE FER DE CEINTURE (R. G.),
- • ARRONDISSEMENT.
- Cantine autorisée n°
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- 2. — Les pièces ci-dessus détaillées, accompagnées de l’avis do l’entrepreneur, seront transmises à l’ingénieur d’arrondissement, qui les adressera avec son rapport à l’ingé-neur en chef.
- 3. —Sur le vu de ces pièces et du rapport de l’ingénieur d’arrondissement, l’ingénieur en chef donnera, s’il y a lieu, l’autorisation, qui sera révocable à toute époque, sans indemnité quelconque.
- En cas de révocation, la démolition des constructions et l’enlèvement des matériaux, devront être faits dans les quarante-huit heures qui suivront l’ordre de retrait d’autorisation, lequel sera notifié au canlinier par un conducteur des ponts et chaussées assermenté.
- . Ouverture el, fermeture des caniin.es.—4.— Les cantines seront ouvertes de cinq heures du matin à neuf heures du soir en été, et de sept heures du mitin à sept heures du soir en hiver.
- La période d’été commencera le 1er avril et tinira le lur octobre. La période d’hiver commencera le 1er octobre et finira le 1er avril. A dix heures du soir, tous les feux et lumières seront éteints, sous peine de 20 fr. d’amende.
- 5. — Pour assurer le paiement des amendes, un cautionnement de 200 francs sera versé par le cantinier entre les mains de l'entrepreneur qui lui en donnera reçu et qui lui en restituera le reliquat, sans intérêts, lors de sa révocation ou de son départ volontaire.
- 6. —L’autorisation sera retirée s’il est trouvé des ouvriers ivres ou s’il y a rixe dans une cantine, ou si le canlinier reçoit des ouvriers pendant les heures de travail.
- 7. — Les objets de consommation seront
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- fixés par le médecin d’arrondissement, qui le contrôlera aussi souvent qu’il le jugera nécessaire. Ce médecin ou les agents autorisés du service médical prescriront les mesures d’hygiène et de propreté dans les cantinc's, et les cantiniers devront s’y conformer sous peine de révocation.
- Dispositions générales. — 8. — Il sera affiché dans chaque cantine :
- 1° Un exemplaire du présent règlement;
- 5° L’arrêté d’autorisation ;
- 3° Le tarif de consommation.
- 9. — Les cantiniers resteront d’ailleurs soumis à tous lcsrèglements de police applicables aux établissements de ce genre.
- Cantiniers ambulants. — 10. — Les cantiniers ambulants devront demander et obtenir une autorisation dans la même forme que les cantiniers sédentaires.
- Us seront dispensés seulement de fournir les plans et dessins de la cantine.
- 11. — Us ne pourront circuler sur les chantiers que pendant les heures de travail.
- 12. —Us en seront expulsés et l’autorisation leur sera retirée, s’ils y causent du trouble ou dérangent les ateliers, ou bien encore s’ils donnent à boire aux ouvriers jusqu’à les enivrer.
- 13. —'Ils seront soumis, quant à la qualité et au choix des objets de consommation, à la surveillance du service médical.
- 14. — Us devront porter une plaque en cuivre avec cette mention :
- CHEMIN 1)E FER DE CEINTURE (r. G.)
- c Arrondissement,
- Cantinier ambulant N°.
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- Etre porteurs de leur autorisation et la présenter à toute réquisition des agents des travaux ou du service médical.
- 15. — Le nombre des cantiniers sédentaires ou ambulants, le nomb.c et remplacement des cantines, seront déterminés par l’ingénieur en chef, en raison du développement des chantiers et sur la proposition des ingénieurs d’arrondissement.
- 16. — Les cantiniers ambulants devront se conformer à toutes les mesures de police applicables à leur profession.
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- V.
- On a pu voir, en lisant ces trois documents, que, grâce à cette réglementation, le séjour d’un ouvrier dans un chantier comme celui du chemin de fer de Ceinture est de nature à lui donner d’excellentes habitudes, à le moraliser, à lui inspirer des idées d’ordre et d’économie.
- A notre époque, tout se tient. Un ingénieur en chef a charge d’âmes. Il faut non-seulement qu’il s’occupe de la bonne exécution de ses travaux, mais aussi des besoins des gens qu’il emploie. Les entreprises de l’Etat, ainsi dirigées par une main habile et intelligente, sont autant, pour ceux qu’ils font vivre, un bienfait moral qu’un moyen d’existence.
- Un chantier de l’Etat est une grande école de travailleurs.
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- TABLE DES MATIÈRES.
- 1. Les espérances que fait naître le tracé..’ 3
- II. Description de la ligne d’Auteuil aIvry. 13
- g 1. Le viaduc d’Auteuil.............. 14
- g 2. Le pont sur la Seine au Point-du-
- Jour............................. 17
- g 3. De Grenelle à Montrouge............ 20
- g 4. Le grand tunnel.................. 26
- g 5. De Gentilly au pont Napoléon.......... 30
- III. Difficultés d’exécution............... 35
- g 1. Xe pont sur la Seine au Point-du-
- Jour............................... 39
- g 2. Les travaux souierrains.............. 43
- IV. Service médical, police des chantiers,
- CANTINES.............................. 61
- g 1. Service médical.................. 62
- g 2. Police des chantiers............. 60
- g 3. Cantines ................. 66
- V. Conclusion................................. 70
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