Traité théorique et pratique de l'impression des tissus
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- BIBLIOTHEQUE
- DES
- ARTS INDUSTRIELS
- PUBLIÉE SOUS- LES AUSPICES
- >F FA SOCIÉTÉ D'FIACOIJKAOFIUFWT
- pour l’industrie nationale.
- ARTS CHIMIQUES.
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- I ans. Imprimerie ne Bourgogne et Martinet, rue Jacon, 50.
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- TRAITE
- T H É OHIO U E E T P R A TIQ U E
- DK
- L IMPRESSION
- DES TISSUS,
- PAR
- J. PERSOZ,
- Professeur à lu Faculté des Sciences de Strasbourg , professeur-directeur de l’École de pharmacie de la même ville.
- OU Vil AGE
- AVEC 165 FIGURES ET 429 ÉCHANTILLONS INTERCALÉS DANS LE TEXTE,
- ET ACCOMPAGNÉ
- d’un Allas in-4 de 20 planches.
- TOME DEUXIÈME.
- PARIS.
- VICTOR MASSON,
- LIBRAIRE DES SOCIÉTÉS SAVANTES PRÈS LE MINISTÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE,
- TLACK DE l'ÉCOLE-DE-MÉDECINE;
- MCmp maison. chez L. illiclielscn ,
- n Lelpz]
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- TRAITE
- THEORIQUE ET PRATIQUE
- DE L’IMPRESSION
- TISSUS.
- TROISIÈME PARTIE.
- UE LA FABRICATION EN GÉNÉRAL.
- Avant d’exposer comment on arrive à produire ces dessins
- si variés qui sortent des fabriques d’indienne , en imprimant et
- en fixant sur les tissus les matières colorantes organiques et inorganiques dont nous nous sommes occupé, il nous a paru convenable de traiter d’abord de la fabrication sous un point de vue général, et de décrire les opérations, les procédés et les machines qu’elle emploie communément, afin d’éviter d’ennuyeuses répétitions et de resserrer ainsi le cadre de cet ouvrage, sans omettre cependant aucun des détails qu’il importe de connaître.
- Nous diviserons cette 3e partie en 6 chapitres qui seront consacrés , le 1er, aux diverses espèces de tissus employées pour l’impression et aux opérations qu’ils doivent subir pour devenir propres à recevoir les couleurs ; le 2e, aux principes généraux d’après lesquels les matières colorantes se combinent avec les tissus, ainsi qu’à l’examen des conditions dans lesquelles ces matières colorantes doivent se trouver pour être imprimées et fixées sur ces derniers ; le 3e, à l’impression proprement dite :
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- de la fabrication en général.
- nous aurons à parler, dans ce chapitre, des conditions physiques dans lesquelles l’impression doit s’effectuer et des machines qu’elle exige. Dans le he, nous ferons connaître les moyens de rendre adhérentes ou de fixer les matières colorantes ou les mordants , une fois qu’ils ont été imprimés sur les tissus. Dans le- 5e, nous examinerons les procédés généraux de teinture, et dans le 6e, les opérations qui suivent celles de la teinture ou du garançage, et qu’on désigne le plus généralement sous le nom à'avivages.
- CHAPITRE PREMIER
- ÉTOFFES EMPLOYÉES POUR L’iMPRESSION.------RASAGE.-----GRILLAGE.
- — FLAMBAGE. — BLANCHIMENT.-----SECHAGE.
- § /l23. Les étoffes soumises aux opérations de l’impression et de la teinture sont formées des fibres textiles du coton, du lin, du chanvre, de la laine et de la soie. Les trois premières, d’une même nature chimique, ne sont que du ligneux proprement dit (cellulose, Payen) ; les deux dernières," d’une nature toute différente, constituent deux espèces bien distinctes, § 329-331.
- Nous n’avons point à parler ici des opérations qu’on fait subir à ces diverses fibres pour les amener d’abord à l’état de fils et ensuite à celui de tissu. Il nous suffit de dire que , seules ou mélangées, elles constituent des étoffes diversement dénommées. Avec la fibre textile du lin on confectionne les toiles fines dites de lin, et notamment les batistes - avec celle du coton :
- / Le calicot,
- en étoffe unie. . .
- La percale, Le croisé poi Le jaconnas,
- Le velours Le barége
- \ La mousseline ,
- # Le velours de coton [ Le barége, \L’organdis ;
- Le croisé pour meubles
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- ÉTOFFES EMPLOYÉES POUR L IMPRESSION.
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- /La'mousseline satinée, à jour, etc., j Les organdis rayés , l Les organdis foudres.
- ILes balsorines,
- en étoffe ouvragée. ,{Le créPe de ChW™'
- Le crêpe façonné ,
- Le barége ouvragé ,
- Le villis , étoffe imitant le tulle,
- La percale brochée ( brillanté ) ;
- 'Les piqués grecs.
- »
- avec la fibre textile de la laine :
- . Le Casimir,
- La mousseline-laine,
- Le mérinos,
- Le cachemire d’Écosse, qui diffère du mérinos en ce qu’il n’est croisé que d’un côté ,
- La flanelle,
- Le drap:
- avec la fibre textile de la soie une infinité ‘de tissus dont ceux sur lesquels on fait plus particulièrement des impressions, sont :
- Les foulards d’Inde et de France ,
- Les crêpes,
- Les taffetas, etc.
- On fait aussi des tissus mélangés de laine et de coton, de laine et de soie , de soie et de coton.
- Les premiers s’appellent mi-laines et vulgairement chaîne coton ; Les seconds châlis,
- —• balsorines,
- — baréges.
- Du reste , la plupart de ces dénominations ne sont que passagères; la plus légère modification apportée au tissu suffit pour lui faire donner un autre nom'.
- Celui qui se livre à l’impression des tissus peut bien ignorer
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- !\ DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- les détails de leur préparation ; mais il doit toujours être à même de reconnaître l’origine des matières premières qui ont servi à leur confection , et la manière dont les fibres textiles ont été filées et tissées. En effet, s’agit-il du coton? il doit savoir que. toutes les espèces ne sont pas également propres à recevoir les mêmes teintes ; que le coton Fernambouc se teint mieux en rouge turc et produit des nuances plus vives que le coton Géorgie ; que le coton Macédoine est inférieur aux deux précédents pour tous les genres de teinture, attendu qu’il ne présente jamais que des couleurs maigres , ternes et raclées.
- Pour constater cette différence, M. D. Kœchlin fit tisser une toile de différentes espèces de coton, et cette toile, après avoir été blanchie et imprimée à la manière ordinaire, présenta à la teinture des inégalités telles que chaque espèce de coton semblait avoir été soumise à un traitement différent, et qu'il lui fut impossible d’obtenir un fond d’une teinte uniforme.
- La qualité d’une toile de coton dépend aussi de l’égalité du fil, de la manière dont il est tordu, en un mot, de la régularité du tissu. Il est des établissements qui ont si bien compris les soins que réclame la fabrication de ces toiles destinées à l'impression, qu’ils se sont créé une espèce de privilège pour la vente de ces produits, même en ne les livrant qu’à un prix plus éleyé.
- S’il s’agit de tissus de laine, le fabricant doit s’assurer qu’ils ne contiennent pas de laine morte , puisque cette laine , ainsi que nous l’avons déjà dit § 333 , n’a pas la propriété d’attirer à elle les matières colorantes. A cet effet, il fixera sur ces tissus des couleurs d’une application sûre, et en comparant l’intensité des nuances qu’il obtiendra à celles qu’il aura préalablement obtenues sur une étoffe normale, il se fera une idée exacte de la qualité du tissu qu’il essaie.
- Les mi-laines ne réclament pas moins d’attention, attendu que les couleurs qui les recouvrent doivent être en relation avec les proportions respectives des fibres de coton et de laine qui constituent ces tissus. Pour connaître ce rapport, on traite une
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- ÉTOFFES EMPLOYÉES POUR l’IMPRESSION. 5
- partie de ces toiles par une solution concentrée et bouillante d’hydrate potassique; tout ce qui est laine se dissout; la fibre textile du coton reste pour résidu, et le poids de cette fibre, desséchée et pesée, comparé à celui de l’étoffe qui n’a pas subi ce genre d’épreuve, donne pour différence le poids de la laine associée au coton. On peut aussi, dans le même but, appliquer sur une pareille‘étoffe une matière colorante, le carmin d’indigo , par exemple, qui jouit de la propriété de se fixer sur la laine, tandis qu’il ne se fixe sur le coton qu’autant que celui-ci a été préalablement préparé. Le bleu est d’autant plus nourri qu'il y a plus de laine dans le tissu, et, au contraire , il apparaît d’autant plus de parties blanches qu’il y a plus de coton.
- On ne saurait trop recommander l’usage de ce dernier procédé, qui non seulement permet d’estimer exactement la valeur de l’étoffe, mais encore indique au fabricant la modification qu’il doit apporter dans la confection de ses couleurs ; celles-ci, en effet, ne se fixant pas de la même manière sur la laine et sur le coton , on est toujours obligé d’imprimer un mélange dont les éléments conviennent aux différen'.es fibres du tissu et soient en rapport avec la quantité de celles-ci.
- Toutes ces étoffes, qu’on les soumette au blanchiment ou qu’elles subissent les opérations de la teinture, doivent toujours être plongées dans l’eau ou exposées à un air chargé d’humidité. Il importe donc au fabricant de savoir exactement quelle est la quantité cl’eau, sous un état quelconque , qui adhère au tissu que l'on fait séjourner dans un de ces milieux, pour calculer d’avance l’effet physique ou mécanique à produire pour enlever l’eau d’un tissu qui en est chargé, et réciproquement la quantité d’eau ou de vapeur d’eau nécessaire pour imprégner ce tissu anhydre.
- Nous devons à M. Chevreul des expériences extrêmement précises relativement à la quantité d’eau dont se chargent les étoffes que l’on expose à une atmosphère plus ou moins humide. Dans un travail lu à l’Académie, le 21 mars 1836, et
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- 6 DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- qui a pour objet de déterminer les proportions d’eau que les étoffes absorbent dans des atmosphères à 65, 75, 80 et 100° de l’hygromètre de Saussure , ce savant chimiste arrive à cette conclusion que 100 parties d’étoffe , préalablement bien desséchées , absorbent, à la température de 20° et à 100° de l’hygromètre, savoir :
- Les étoffes de chanvre, de. . 24,34 à 35,40 d’eau.
- — de lin, de. . . . 26,65 à 32,87
- — de coton, de . . . 23,30 à 30,87
- — desoie, de. . . . 28,91 à 33,20
- — de laine, de . . . 28,01 à 36,70
- Il est à remarquer que, malgré la différence de leur nature chimique, ces étoffes absorbent toutes des quantités d’eau à peu près les mêmes. Si quelques étoffes, telles que la laine en suint et la soie écrue, lui ont fourni des nombres plus élevés, il faut l’attribuer à ce que des gouttes d’eau s’étaient condensées à la surface de ces tissus.
- Les tissus exprimés, après avoir été plongés dans l’eau, retiennent des quantités de ce véhicule beaucoup plus différentes entre elles.
- 100 parties d’étoffe de laine sèches , plongées dans
- l’eau et exprimées ensuite, peuvent retenir jusq. 200 part, d’eau.
- 100 parties de calicot..................................125
- 10 0 parties de soie.................................... 92
- Ces données, quoique n’ayant rien d’absolu, attendu que la quantité d’eau que retient un tissu varie avec sa finesse et avec les moyens mécaniques employés pour en exprimer le liquide, méritent cependant d’être connues du fabricant, auquel elles peuvent servir dans plus d’une circonstance.
- Supposons, par exemple, qu’on ait besoin de fàirë»passer une étoffe dans une liqueur alcaline, pour fixer une couleur acide qui s’y trouve imprimée , pourrait-on , si l’on ne connaît pas la quantité de liquide qu’elle retient, savoir la perte que le
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- RASAGE DES TISSUS. 7
- passage de chaque pièce fera éprouver au bain, et calculer la proportion de base à ajouter à celui-ci pour compenser cette perte '(
- /|2Zi. Marques clés étoffes. La première opération que l’on fasse subir aux étoffes écrues consiste à mettre .aux extrémités ou chefs de toutes les pièces une marque au moyen de laquelle on puisse toujours les reconnaître durant les diverses périodes de la fabrication. Cette marque doit être faite avec une encre grasse , capable de résister à tous les traitements auxquels on soumet la toile. On peut donc se servir d’encre d’imprimerie ou d’une encre formée d’huile de lin rendue siccative, dans laquelle on délaie, soit du goudron avec du noir de fumée , soit de la sanguine.
- Rasage ou épluchage des tissus.
- § 425. Quels que soient les perfectionnements apportés à l’art de filer , il est impossible d’obtenir des fils qui soient exempts de duvet, et de fabriquer des tissus qui ne présentent ^jfelques aspérités qui proviennent soit des brins des fils, soit dés nœuds formés durant le tissage. Ces aspérités, qui rendent Jdéjà le blanchiment inégal, présentent des inconvénients bien plus graves encore à l’impression, en ce que les fils et les nœuds qui les forment empêchent, en se rabattant sur l’étoffe, les parties qu’ils masquent de recevoir la couleur, et les font apparaître ensuite, en se relevant, comme autant de points blancs réservés. Le duvet qui recouvre les tissus n’est pas moins défavorable en ce qu’il rend ternes les couleurs même les plus vives.
- Pour éplucher les tissus et prévenir d’aussi fâcheux effets, on a recours à deux genres de procédés : l’un, mécanique, est connu sous le nom de tondage ; l’autre, chimique, est appelé grillage ou flambage.
- Le tondage peut se faire à la main ; anciennement des femmes appelées tondeuses étaient chargées d’enlever , au
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- moyen de ciseaux courbés, toutes les inégalités qui se trouvaient à la surface des pièces de calicot employées pour l’impression; mais cette manière d’opérer, outre qu’elle était longue et dispendieuse, offrait encore d’autres inconvénients : tantôt l’ouvrière laissait échapper des fils ou des nœuds ; tantôt, au contraire , elle endommageait le tissu : on y a donc renoncé depuis un certain nombre d’années, et maintenant on fait usage, pour cette opération, d’une machine admirable appelée tondeuse, dont M. Courber est l’inventeur. Dans le principe, cette tondeuse ne s’appliquait qu’au rasage des étoffes de laine d’une certaine épaisseur ; mais à mesure que la fabrication de ces étoffes se perfectionna , la tondeuse reçut ellelmême des améliorations telles qu’aujourd’hui elle est appliquée non seulement aux plus fins tissus de laine, comme le cachemire, mais encore au calicot ; on la trouve dans la plupart des fabriques importantes;
- En voici la coupe longitudinale.
- Fig. 5.
- a, a. Bâtis de la machine.
- ne Table en bois sur laquelle on place l’étoffe que l'on veut tondre, e Règle au-dessus do laquelle passe la toile.
- ». Règles de tension.
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- RASAGE DES TISSUS.
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- e. Rouleau en bois portant à une de ses extrémités une poulie dont la gorge est en partie enveloppée d’une courroie qui, portant le contre-poids f , produit l’effet d’un frein.
- g. Autre cylindre de tension.
- h. Brosse cylindrique recevant de la machine même un mouvement de rotation.
- i. Règle placée en avant du couteau en hélice.
- k. Couteau composé de 8 lames tournées en hélice , dont le pas est égal à la largeur de la toile à tondre.
- l. Lame très mince placée au-dessous du couteau précédent.
- M. Traverse en fer et mobile destinée à rapprocher la toile de la lame même l, lorsqu’on veut faire fonctionner la machine.
- n. Petite bascule portant un cuir imbibé d’huile qui s’abaisse sur le couteau quand il est en mouvement, pour le graisser.
- o. Troisième rouleau de tension.
- p. Règle élargisseuse en fonte qui porte des cannelures divergentes , à partir du milieu, les unes à droite et les autres à gauche.
- q. Arbre des poulies motrices de la machine.
- n. Poulie à gorge qui donne le mouvement à la brosse cylindrique n.
- s. Rouleau d’appel commandé par un pignon fixé sur l’arbre G.
- r. Roue engrenant avec le pignon précédent, et fixée sur l’arbre du rouleau s.
- u. Brosse cylindrique qui enlève le duvet détaché, au moment ou la toile s’enroule.
- v. Levier s’appuyant sur l’arbre du rouleau w.
- vv. Rouleau autour duquel s’enroule la toile tondue.
- x. Contre-poids suspendu à l’extrémité du levier v, et qui a pour objet de rapprocher le rouleau w du rouleau d’appel s qui le fait tourner par son contact.
- y. Levier à Tune des extrémités duquel se trouve un contre-poids-, tandis que l’autre extrémité s'appuie contre le levier qui supporte la brosse u pour maintenir cette dernière dans un contact continu avec la toile qui s'enroule sur le rouleau w.
- j. Marche-pied servant à soulever le couteau k.
- .Supposons que cette machine soit mise en mouvement par une force suffisante imprimée aux roues et aux poulies motrices, au moyen du rouleau d’appel s, des règles c, d, et des rouleaux de tension e, g, o , les pièces partiront de la table b et arriveront bien tendues, cl’abord sous la brosse cylindrique n, qui relèvera les poils et autres inégalités du tissu, puis sous le couteau k, qui les tranchera. En passant sous cet
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- instrument tranchant, la pièce se trouve tendue, d’une part, par la règle i placée en avant du couteau, d’une autre, par la lame l, qu’on peut à volonté rapprocher ou éloigner de ce couteau. De là, continuant son trajet, elle passe sous le rouleau de tension o, et arrive sur la règle p, dont la fonction est de tendre la toile de manière à en faire disparaître tous les plis et à prévenir ainsi une foule d’accidents plus ou moins graves. Se rendant enfin sous le rouleau s le tissu s’enroule sur le cylindre av, tout en passant sur la brosse cylindrique u, qui achève de la nettoyer.
- Il est des étoffes que l’on ne rase que d’un côté et en une. seule fois ; d’autres, au contraire, sont rasées des deux côtés et à plusieurs reprises. A moins que les tissus ne soient très fins et très réguliers, il est plus prudent de tondre les pièces en plusieurs fois, et de ne les rapprocher que peu à peu des lamés tranchantes; autrement on est exposé ou à n’enlever que les parties saillantes et à laisser le duvet, si le tissu n’est pas assez rapproché de ces lames, ou, dans le cas contraire, à endommager l’étoffe sur certains points.
- Grillage ei flambage.
- § Zl26. Ces deux dénominations sont données à des opérations qui, en définitive , aboutissent l’une et l’autre à détruire par le feu les aspérités qui se trouvent à la surface des étoffes de laine et de coton. Dans le grillage on fait passer l’étoffe sur sur une plaque métallique portée au rouge ; dans le flambage on l’expose à la flamme d’un gaz en combustion , à celle du gaz de l’éclairage, par exemple, ou à celle de l’alcool; de là les expressions flamber une étoffe au gaz , à l’alcool, etc.
- Pour comprendre qu’une pareille opération est sans danger pour l’étoffe, il suffit de savoir que les diverses fibres textiles qui constituent les tissus peuvent supporter une assez forte température sans se décomposer, et sont de tous les corps les
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- GRILLAGE ET FLAMBAGE DES TISSUS. 11
- plus mauvais conducteurs de la chaleur. (Voyez les Traités de Physique. )
- Grillage. Le grillage s’opère à l’aide d’un foyer à combustion,//y. 6 , communiquant à un conduit rectangulaire qui se
- Fig. G.
- • H '
- prolonge horizontalement, et dont la longueur est en rapport avec la largeur de l’étoffe qu’on veut griller. Ce conduit débouche dans une cheminée r; sa partie supérieure, en forme de voûte c, est recouverte d’une plaque de fonte, de lm,ûOc de longueur et de 0m,26c de largeur, et représente assez bien la section d’un cylindre coupé parallèlement à son axe. Dans quelques établissements cette plaque de fonte est remplacée par une plaque de cuivre c', dont les points culminants de la surface sont les arêtes aiguës de 5 prismes triangulaires.
- g est le gril de ce fourneau.
- ii, la hotte destinée à enlever les produits de la décomposition ignée, pour les diriger par le point o dans la cheminée r, au moyen d’un tuyau qui s’y engage à la distance de 1 à
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- 2 mètres. Sur l’un des côtés de cette hotte se trouvent 2 rainures qui livrent passage aux deux tringles du cadre bascule l.
- f n sont des treuils sur lesquels s’enroulent [les pièces, et pour que celles-ci puissent se griller d’un bout à l’autre, on prend quelques mètres de toile dont on cloue une des extrémités sur chacun de ces treuils, tandis qu’on attache à l’autre la tête de chaque paquet de pièces que l’on soumet à l’opération.
- a a sont des montants en bois auxquels sont ajoutées des brosses cylindriques mobiles m, n, qui sont destinées à relever le poil de l’étoffe, et qui, selon qu’on les abaisse ou les élève, la rendent tangente à un plus ou moins grand nombre de points de la surface de chauffe.
- I est un cadre-bascule en fer portant à son extrémité une corde, à l’aide de laquelle on peut l’élever ou l’abaisser pour soustraire subitement l’étoffe à l’action de la plaque rougie, ou la mettre, au contraire, en contact avec cette plaque.
- II est facile de saisir la manière dont fonctionne cette machine. On coud ensemble un certain nombre de pièces qu’on enroule sur le treuil f, par exemple; puis, prenant la tête de-ce paquet de pièces, on la joint avec le bout de toile qui est cloué sur le treuil d au moyen d’un fil de cuivre assez fin, qui fait à la fois office d’aiguille et de fil, en ayant soin, durant cette opération, de tenir le tissu à distance de la plaque chaude à l’aide du cadre-bascule l. On imprime alors au treuil d le mouvement nécessaire pour que la tête de la toile se trouve amenée juste au-dessus de la plaque de chauffe, puis on lâche le cadre-bascule, qui, en tombant par son propre poids, met le tissu en contact avec cette plaque; au même instant l’ouvrier placé du côté du treuil d imprime à celui-ci une rotation assez rapide pour que l’étoffe passe sur la plaque sans en être endommagée, et lorsqu’il arrive à l’extrémité du rouleau, abandonnant la manivelle fixée au treuil, il saisit la corde attachée au cadre-bascule l, et soustrait ainsi le tissu à l’action du feu. On peut faire
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- GRILLAGE ET FLAMBAGE DES TISSES.
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- la même opération, sur la surface opposée du tissu en changeant les cylindres de treuils, ou sur la même surface, en leur imprimant un mouvement opposé au précédent. Comme il se développe durant le grillage beaucoup de vapeursplus ou moins em-pyrcumatiques, on place communément au-dessus de la plaque la petite hotte n, qui a pour objet d’entraîner ces vapeurs dans la cheminée. Cette précaution est inutile dans les établissements où l’opération se fait en plein airsous des hangars.
- Indépendamment de la nécessité de chauffer et de maintenir la plaque au rouge blanc, il y adans cette opération deux points importants à saisir : d’une part, la vitesse du mouvement à imprimer à la toile; d’une autre, l’étendue de la surface de chauffe qu’il convient de lui faire parcourir; car non seulement l’étoffe sera mal grillée si le mouvement est trop rapide ou la surface de chauffe trop restreinte, mais encore elle sera fortement altérée si le mouvement est trop lent et la surface de chauffe trop grande. La rapidité du mouvement dépend en grande partie de l’intelligence de l’ouvrier ; quant à la surface de chauffe , si l’on abaisse les cylindres-brosses m , n , (ou les / lames qui les remplacent dans quelques ateliers ) , placés des deux côtés de laplaque, la pièce décrit une courbe moins étendue et effleure par conséquent une plus grande surface de cette plaque ; en les élevant, au contraire, on peut amener la toile à n’être tangente qu’à un point presque mathématique. Cette dernière condition se réalise bien plus facilement quand on fait usage de la plaque c'. En général, le mouvement des pièces doit être d’autant plus rapide qu’on veut utiliser une plus grande surface de chauffe, et vice versa.'
- Zi27. Flambage. Les appareils à flamber sont de deux genres. Dans les uns, on produit la flamme au moyen d’un liquide combustible (l’alcool, l’esprit de bois ou l’acétone); dans les autres, on demande à l’un des procédés appliqués à la fabrication du gaz de l’éclairage la quantité voulue de ce fluide élastique. Pour ces derniers modes dé flambage, il est des con-
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- 14 DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- ditions indispensables à réaliser : la flamme, quelle que soit sa nature , doit être produite sur une ligne droite, avec une égale intensité sur une longueur proportionnelle à la largeur du tissu, et de plus être aspirée au travers des mailles de l’étoffe ; autrement il n’y aurait que les poils de la surface qui seraient brûlés.
- Le flambage à l’alcool s’effectuait d’abord d’une manière fort simple, mais en même temps très coûteuse. On faisait couler ce liquide , pour l’enflammer ensuite , dans une petite gouttière placée au-dessous d’un cylindre, et la pièce passait sur la flamme en recevant le mouvement de ce cylindre. On consommait ainsi une grande quantité d’alcool sans obtenir de résultats réguliers , attendu que l’intensité de la flamme variait à chaque instant.
- A ce procédé on en a substitué un autre moins imparfait, dans lequel on emploie une espèce de lampe à niveau constant, dont le réservoir communique par un tube horizontal à une multitude de petits becs donnant une flamme mince, non interrompue , qui a pour longueur la largeur de l’étoffe. Comme, à mesure que le bec métallique d’une lampe à alcool s’échauffe, il s’opère une distillation qui tend à grandir de plus en plus la flamme, au point que souvent on ne peut plus la maîtriser, pour obvier à cet inconvénient, le réservoir et le tube sont enveloppés d’une couche d’eau froide qui se renouvelle sans cesse. (Voyez Dictionnaire technologique, t. X, p. 368. )
- M. Descroizilles, de Rouen, a imaginé un appareil de beaucoup préférable, et qui a fait le sujet d’un rapport à la Société industrielle de Mulhouse, t. I, p. 259. Au moyen de la coupe transversale que nous donnons ici, jig. 7, il sera facile de comprendre comment fonctionne cet appareil.
- a, a. Bâtis en fontei
- k, k, k. Traverses enfer et en bois auxquelles sont fixés^des rouleaux qui servent au mouvement et à la tension de la toile.
- », ». Tuyaux de plomb qui sont percés, dans toute la longueur de leur
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- GRILLAGE ET FLAMBAGE DES TISSUS.
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- partie supérieure , de petits trous munis chacun d’une mèche d’amiante , êt qui communiquent avec un réservoir d’alcool disposé de telle sorte que ce liquide inflammable ne s’écoule dans le tube en plomb qu’au fur et à mesure que ce tube se vide.
- Fig. 7.
- c. Châssis en fonte, qui sert de support aux tubes d , d.
- s. Traverse sur laquelle se meut le châssis c avec les tubes qu’il supporte.
- l, l. Rouleaux d’appel.
- b. Boîte d’aspiration en tôle qui communique à l’aide d’un tube p doublement recourbé , avec un appareil aspirateur placé en o, dont l’arbre est mis en mouvement par la poulie o qui reçoit l’impulsion de la grande poulie n.
- h. Tuyau qui sert à l’écoulement des produits de la combustion , et qu’on dirige dans une cheminée.
- Quand les mèches sont allumées et la toile tendue par les cjdindres d’appel, ceux-ci recevant une impulsion , la communiquent à la toile m, m, qu’ils font passer au-dessus des tubes d, d, et au-dessous de la boite aspiratrice b. Dans le même instant, l’aspirateur entrant en action attire la flamme avec une grande énergie, et la fait passer au travers du tissu en expulsant les vapeurs par l’ouverture h..
- Il est dit dans le rapport que nous avons cité que cette
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- 1(5 DF. LA FABRICATION EN GENERAL.
- machine exige le concours de trois ouvriers quand elle est mue à la main , et de deux seulement si elle l’est par un moteur ; qu’il suffit de 2 minutes pour griller une pièce de 32 à 35 mètres; que le produit d’une journée de travail de 12 heures est de h à 500 pièces ; qu’enfinil ne faut que 1 litre environ d’alcool pour griller 25 pièces. Le rapporteur fait d’ailleurs rem arquer que cet appareil est particulièrement applicable aux étoffes légères, mousselines,.etc., à mailles peu serrées, mais qu’il fatigue les toiles de coton partout où il y a des défauts.
- § Zi28. Flambage au gaz. Ce genre d’opération se compose de trois parties qui concernent, l’une , la production du gaz, dont nous n’avons pas à parler; l’autre, la combustion, qui doit se faire de telle sorte que le tissu passe à travers la flamme sans en être altéré; la troisième enfin, l’aspiration, qui force la flamme à passer au travers des mailles du tissu.
- L’appareil qui paraît le plus avantageux au flambage des
- Fig. 8.
- BM
- tissus est celui dont le principe a été découvert par Samuel Hall, et d’une section verticale duquel nous donnons (fig.S) la figure
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- GRILLAGE ET FLAMBAGE.
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- pour faciliter l’intelligence du texte : dans cet appareil a est une artère qui distribue le gaz aux tubes horizontaux 4f, «/, au moyen des tubes b, b', munis l’un et l’autre de robinets. Ces tubes n, d', dont on n’aperçoit ici que la section perpendiculaire à l’axe, ont une dimension telle qu’ils admettent les tissus les plus larges. Ils sont percés dans leur partie supérieure et en ligne droite d’une multitude de petits trous qui donnent issue au gaz qu’on enflamme. Immédiatement au-dessus se trouvent deux tubes horizontaux c, c' ; sur la face inférieure desquels il y a une fente qui correspond exactement à la flamme. Ces tubes c et c', à l’aide des tubes f. f , munis de robinets , et de l’artère f, sont mis en communication avec une espèce de machine aspirante, qui peut être soit un soufflet, soit une pompe, soit un appareil hydraulique comme l’a proposé M. Hall (voyez Dictionnaire technologique, t. X, p. 366). Les autres parties de la machine qui ont pour objet de relever les fils des tissus ou d’imprimer un mouvement à ceux-ci, sont déjà en quelque sorte connus.
- g , g' , sont deux paires de cylindres en bois recouverts de futaine 5 en tournant sur leur axe, ils entraînent dans leur mouvement la pièce d’étoffe, à laquelle ils donnent une vitesse d’environ 1 mètre par seconde.
- "h , h', sont des brosses placées en avant de la flamme, et i, i', des frottoirs en bois également garnis de futaine, placés derrière les flammes pour éteindre les étincelles que l’étoffe pourrait entraîner.
- Supposons qu’on ait un gazomètre rempli de gaz à la pression convenable, qu’au moyen d’une machine aspiratrice on ait fait le vide dans le système des tuyaux correspondants à c, c', qu’on ait ouvert les robinets correspondants aux tubes n, d', et qu’enfim on ait allumé le gaz qui se dégage de toute la longueur de ces deux derniers, lorsqu’on mettra les tissus en mouvement, la flamme se précipitera dans les tuyaux c, c’, en
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- 18 DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- traversant la toile avec une rapidité trop grande pour pouvoir lui causer aucun dommage.
- Si tous les fabricants sont unanimes pour reconnaître la nécessité de faire subir à la plupart des tissus qu’ils consacrent à l’impression, l’une ou l’autre des opérations que nous venons de décrire ( flambage ou grillage ), ils ne le sont pas sur le moment le plus opportun d’y procéder ; les uns soutiennent qu’il est plus rationnel de flamber ou de griller les étoffes après les manipulations du blanchiment, qui se composent d’opérations chimiques et mécaniques à la suite desquelles un nouveau duvet et des brins de fil reparaissent toujours; d’autres, partageant la même opinion, la fondent sur ce fait d’une autre nature, et dont nous croyons pouvoir contester l’exactitude , qu’en soumettant à l’opération du flambage ou du grillage les toiles écrues qui sont toujours plus ou moins chargées de graisses, ces matières grasses se fixent intimement sur l’étoffe et résistent alors aux opérations les plus énergiques du blanchiment. Pour être fixé à cet égard, nous avons soumis aux opérations du blanchiment deux morceaux de calicot huilé pour rouge turc, mais dont l’un seulement avait été préalablement grillé, et celui-ci s’étant beaucoup mieux et beaucoup plus .promptement blanchi que l’autre, nous en concluons que dans ce cas, du moins , l’opération du grillage est loin d’exercer une fâcheuse influence sur les toiles écrues. Il est néanmoins des circonstances où elle peut être' très nuisible : c’est lorsque, par accident, ces tissus sont imprégnés de préparations de fer et d’alumine décomposables dans les conditions de température où le grillage s’opère, parce que les oxides ferrique et aluminique, devenant indifférents et insolubles, se fixent intimement au tissu. L’oxide aluminique cependant présente moins d’inconvénient sous ce rapport, attendu qu’il conserve sa modification isomé-rique, tandis que l’oxide ferrique, réductible par des opérations ultérieures, peut être appelé à jouer le rôle de mordant.
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- BLANCHIMENT.
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- I] est enfin des fabricants, et en général ce sont ceux qui exécutent le mieux les impressions au rouleau, qui donnent un grillage à leurs toiles avant de les blanchir, puis, quand le blanchiment est terminé ou sur le point de l’être, les font passer à la tondeuse, et quelquefois même, selon la nature de l’étoffe , les flambent, afin d’en faire disparaître même le plus fin duvet.
- Blanchiment.
- § Z|29. Pour que les étoffes reçoivent avec avantage l’impression des diverses couleurs employées en teinture, il ne suffit pas d’enlever toutes les aspérités que présente leur surface ; il faut encore , pour que les matières colorantes s’y combinent uniformément, pour que les couleurs y soient fixées en conservant leur vivacité et leur éclat, pour que les parties destinées à rester blanches conservent leur pureté, même après avoir passé dans les bains de teinture» que, par des opérations rationnelles, chimiques et mécaniques, qui constituent le blanchiment proprement dit, on en fasse disparaître toutes les matières étrangères , organiques et, inorganiques, que celles-ci fassent partie de la fibre brute telle que la nature la fournit ou qu’elles s’y soient introduites par le fait même des opérations du filage et du tissage. Connaissant donc toutes les circonstances dans lesquelles les différentes fibres textiles conservent leur intégrité, il faut chercher dans le même cercle d’action les agents qui enlèveront directement ou indirectement, en les détruisant, toutes ces matières étrangères.
- La question ainsi posée , on s’aperçoit tout d’abord que la laine et la soie, qui sont attaquables par les alcalis, ne supporteraient pas les mêmes traitements que les tissus formés des fibres textiles du coton, du chanvre et du lin (cellulose, Payen), qui résistent à l’action de ces agents, et à celle du chlore dans des conditions déterminées : aussi devrons-nous traiter séparément du blanchiment: 1° des étoffes qui ont pour base les fibres
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- DE LA FABRICATION EN GÉNÉRAL.
- ligneuses ; 2° de celles qui sont formées de fibres animales (laine et soie) ou d’un mélange des unes et des autres.
- Blanchiment des étoffes de coton , de chanvre et de lin.
- § Zl30. Berthollet a fait, sur le blanchiment des tissus, des travaux qui ont rendu son nom cher aux arts , et qui d’abord semblaient ne rien laisser à désirer ; il avait, en effet, si nettement défini le rôle du chlore , si bien établi les conditions dans lesquelles ce corps décolorant doit être employé, qu’on ne se serait jamais douté alors qu’il fût possible d’aller plus loin. Cependant l’expérience vint bientôt démontrer que cette branche des arts chimiques n’était pas encore établie sur des bases suffisantes ; car il arrivait de temps en temps des accidents qu’il était impossible d’expliquer : en même temps que' certains fabricants condamnaient l’emploi de telles ou telles bases, d’autres les recommandaient, et pourtant il n’était pas rare de voir ceux qui se conformaient à ces recommandations victimes de leur confiance. Depuis quelques années, grâce aux travaux qui ont été faits, toute incertitude a disparu , et les opérations du blanchiment reposent aujourd’hui sur des principes aussi certains que faciles à saisir.
- La fibre ligneuse des tissus de coton , de chanvre, de lin, de formium tenax, etc., n’est pas pure , § 321 ; elle renferme :
- 1° Une certaine quantité de matière colorante, à l’état colo-rable ou coloré, qui se trouve plus ou moins préservée de l’action des agents décolorants par les corps qui l’accompagnent, naturellement ou accidentellement ;
- 2° Une résine particulière, naturelle à la fibre, insoluble dans l’eau et difficilement soluble dans les alcalis, qui fait fonction de réserve et protège les principes Colombie et coloré inhérents à la fibre, contre l’action des agents qui doivent les détruire et les enlever ;
- 3° Une certaine quantité de corps gras. dont une très faible
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- BLANCHIM. UES ETOFFES UE COTON , UE CHANVRE ET UE LIN. 21
- portion est inhérente à la fibre, et la plus forte provient des opérations du'filage et du tissage. On sait, du reste, que ces corps gras n’existent pas au même état sur les étoffes; les uns, modifiés par l’air, fonctionnent à la manière des mordants : ce sont, par exemple, les graisses qu’un accident y a fait tomber des machines à filer et à tisser , ou celles que l’on a introduites à dessein dans la composition du parement. Les autres ne sont rien que le savon dont on a fait usage pour diminuer l’effet du frottement des fils dans l’opération du tissage ;
- Zl° Une substance neutre,, 301-327, de la fécule, de l’amidon, de la farine ou de la colle-forte, selon que dans l’en-col âge de la chaîne on s’est servi de l’une ou de l’autre de ces substances ; mais nous devons faire remarquer que généralement aujourd’hui on ne se sert plus que de fécule, parce que celle-ci, ne renfermant pas de gluten comme la farine, et par suite ne pouvant subir la décomposition putride, ne se transforme jamais en carbonate ammonique, sel qui, avec le concours de l’air, métamorphose le corps gras en mordant organique toujours insoluble sur la toile, dont il ne peut plus être enlevé qu’avec une extrême difficulté.
- 5° Des matières salines inorganiques, dont les unes sont inhérentes à la fibre, les autres à l’eau et aux matières employées pour la préparation du parement de la chaîne. Nous avons vu, § 311, que les sulfates cuivrique et zincique figurent parmi ces dernières matières ; mais ces sels disparaissent bientôt par suite des doubles décompositions qu’ils subissent et des modifications que leurs bases éprouvent en présence des substances neutres, en sorte qu’il serait impossible de leur assigner un ordre de combinaison quelconque.
- Maintenant, si, faisant abstraction de toutes les substances que nous venons d’énumérer sous les n°* 2, 3, Zi et 5, nous pouvions nous représenter une étoffe comme formée uniquement de ligneux et de matière colorante, le problème du blanchiment serait aussi simple que facile à résoudre ; il suffirait d’enlever
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- directement, ou, si cela n’était pas possible, de modifier d’abord, pour enlever ensuite, la matière colorante qui accompagne la fibre, et de mettre celle-ci en liberté avec toutes les propriétés qui la caractérisent et la font rechercher; nous n’aurions à faire, en un mot, qu’une opération que nous pourrions appeler décoloration de la fibre ; mais la présence des matières étrangères, surtout celle de la résine et des corps gras, complique la difficulté, car ces corps faisant obstacle à l’action des agents qui doivent modifier la matière colorante et la rendre soluble, on comprend que cette action ne peut devenir efficace qu’autant qu’on a préalablement fait disparaître ces corps gras ou résineux : autrement, ou la décoloration de la fibre serait incomplète et le blanc imparfait, ou cette décoloration de la fibre serait poussée à son terme ; mais dans ce cas la quantité de l’agent décolorant employé serait tellement forte que le tissu en éprouverait toujours un dommage plus ou moins grand. De là la nécessité d’une série d’opérations qui doivent précéder la décoloration, et que nous comprendrons sous le nom de dégraissage de la fibre ligneuse. Ce dégraissage et la décoloration sont les deux points fondamentaux du blanchiment.
- § 431. Le dégraissage de la fibre ligneuse se compose de deux ordres d’opérations, les unes chimiques, les autres mécaniques. Par les premières on soumet les toiles à l’action :
- 1° D’une ou de deux lessives de chaux, dans le but principal de saponifier, en formant des combinaisons calciques, les corps gras ou résineux qui s’y trouvent adhérents ;
- 2° D’un bain acidulé, soit d’acide sulfurique, soit de chlo-ride hydrique, appelé à décomposer les savons calcaires formés durant l’opération précédente et à mettre les acides gras ou résineux en liberté ;
- 3° D’une ou de plusieurs lessives de carbonate sodique , qui doivent opérer la dissolution des acides précédents.
- Les secondes , qui sont le complément des premières, ont pour objet de faire disparaître les substances insolubles et so-
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- BLANCHIM. DES ETOFFES DE COTON , DE CHANVRE ET DE LIN. 23
- lubies qui se rencontrent, les uns, à la surface, les autres dans les pores de l’étoffe.
- § /|32. Lessivage à la chaux. Si dès le principe on avait nettement posé la question du blanchiment et recherché les corps les plus capables de saponilier les graisses et d’opérer cette saponification avec le plus d’avantage, on en serait inévitablement venu à l’emploi de la chaux , de.toutes les bases celle qui agit avec le plus d’énergie sur les corps gras; mais commç, dans l’application que l’on fit d’ùbord de cette base , on ne cherchait qu’à la substituer, dans des vues d’économie, à la potasse et à la soude , on ne s’occupa ni des principes de son action ni des moyens de régler cette action. Les uns en rejetaient l'emploi parce qu’elle brûlait, disaient-ils, les toiles, et en effet telles furent souvent les tristes, conséquences de l’usage qu’on en fit ; les autres lui reprochaient de former sur latoile des savons insolubles, et qui, s’y combinant intimement, attiraient plus particulièrement la matière colorante et formaient ainsi des taches. La question changea complètement de face du jour où l’on connut les conditions dans lesquelles la chaux peut se trouver en contact avec la fibre ligneuse sans l’altérer, et que l’on eut constaté quelle y produit, avec les corps gras qu’elle y rencontre, un savon calcaire, et que ce savon doit être décomposé par un acide et le corps saponifié enlevé par une lessive de carbonate sodique.
- A qui est dû l’honneur de cette importante découverte? C’est ce qu’il nous est impossible de préciser ; celui qui le premier a employé la chaux d’une manière rationnelle était trop intéressé à tenir son procédé secret pour le divulguer ; tout ce que nous pouvons dire, c’est qu’avant MM. Dana et Prince, près Boston (Lettre adressée à la Société industrielle- de Mulhouse, t. X , p. 281 ), personne n’avait présenté ni soutenu le principe de ce procédé. D’une autre part, M. Guéraud aîné, de Troyes, a publié, en 1835 , un mémoire fort intéressant sur le blanchiment , dans lequel l’emploi des acides est considéré comme indispensable pour obtenir un blanc parfait.
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- D’après nos propres observations, la chaux n’aurait pas seulement la propriété d'opérer la saponification brusque clu corps gras et de mieux attaquer les résines que les autres bases ; mais elle jouirait encore du pouvoir de contribuer à l’oxidation de la matière colorante de la fibre, de favoriser les métamorphoses qu’elle doit subir pour en être enlevée, d’attaquer fortement l’alumine du tissu, enfin de maintenir la fibre ligneuse dans l’état de contractilité le plus avantageux au feutrage des brins. Cet état de contractilité, que les fabricants ne paraissent pas jusqu’ici avoir pris en considération, n’en mérite pas moins la plus sérieuse attention ; car, que l’on fasse agir, sur un tissu de coton surtout, une lessive, si cette lessive est trop faible, elle ne contractera pas la fibre, et par suite elle développera ce duvet dont la présence en fait disparaître le brillant et la beauté ; que si elle est au contraire trop forte, la fibre sera alors fortement contractée, mais aussi elle pourra être altérée. Il y a donc deux écueils à éviter dans une telle'opérationet l’on n’y parvient qu’en trouvant le point de concentration où la lessive est assez forte pour contracter la fibre sans l’altérer, tandis qu’avec la chaux, qui est une base très peu soluble, on n’a ni les mêmes inconvénients à craindre, ni, par suite, les mêmes précautions à prendre.
- Maintenant que la nature de la base qui doit être employée dans le blanchiment nous est connue, dans quelles conditions faut-il faire agir cette base, et quels sont les appareils les plus propres à favoriser son action sur les tissus ?
- Ainsi que nous l’avons vu § 323 , la fibre ligneuse ne peut exister sous la double influence de là chaux et de l’air sans éprouver des altérations plus ou moins grandes ; il est donc nécessaire de mettre les tissus à l’abri de l’air durant toute la durée de leur contact avec la chaux. D’un autre côté, si nous ne perdons pas de vue que la saponification a lieu d’autant plus rapidement qu’elle s’effectue à une pression, ou, ce qui revient au même, à une température plus élevée, il est facile de préciser la température à laquelle il convient d’opérer, et en consé-
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- APPAREILS A LESSIVER. 25
- quence de reconnaître quels sont, des nombreux appareils à lessiver, les plus favorables à ce genre d’opération.
- Appareils à lessiver.
- § /|33. Les appareils à lessiver peuvent tous être ramenés à deux genres fondamentaux. Par les uns les tissus sont mis purement et simplement en contact avec la lessive , dont on élève la température, soit par un chauffage direct à feu nu, soit par un chauffage à la vapeur. Les autres représentent fidèlement l’opération du coulage pratiquée dans les ménages; la lessive, chauffée dans un vase distinct, monte, par un procédé mécanique ou physique, à la partie supérieure du cuvier qui contient les toiles à blanchir, traverse celles-ciarrive à la partie inférieure de ce cuvier, puis rentre dans la chaudière, où on la chauffe de nouveau pour la faire repasser sur les toiles, et ainsi de.suite durant toute la durée du lessivage. Les appareils affectés à ce genre d’opération sont appelés appareils à circulation , et parmi ceux-ci , il en est dont la circulation est intermittente.
- § A3/i. Chauffage direct, a, à feu nu, b, à la vapeur.
- a. La forme des vases employés pour le chauffage varie à l’infini; cependant, comme on n’obtient tous les avantages attachés à ce genre de chauffage qu’autant que la lessive est portée à une température élevée, il convient que ces vases, par leur matière et par leur forme, puissent résister à la pression de 2 à 3 atmosphères nécessaire pour porter la lessive à une température supérieure à celle de l’eau en ébullition. Dès I8O/1, M. D. Kœchlin employait une chaudière de la forme de celle que nous aurons l’occasion de décrire en parlant de Xavivage du rouge turc ; 50 à 60 pièces y étaient maintenues en ébullition pendant h heures. On se sert, dans quelques fabriques, d’une chaudière en tôle forte, de forme ovoïde, dans laquelle on peut chauffer, avec la quantité de lessive suffisante, 1,500 à 2,000 mètres de calicot. Le fond et les parois de cette chaudière
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- sont doublés en bois , pour que l’étoffe ne soit pas en contact direct avec les parois du vase , dont la température trop élevée pourrait l’altérer, sur certains points du moins. L’ouverture de la chaudière est munie d’un cercle sur lequel s’ajuste un couvercle qui la ferme hermétiquement, et qu’on y fixe au moyen d’agrafes de boutons ou d’une vis de pression. Le reproche qu’on peut adresser à ce système, c’est que les opérations, au lieu d’y être continues , sont intermittentes , et que l’économie de combustible qui en résulte est en partie annulée par la perte de chaleur et de temps qu’occasionne la nécessité d’attendre le refroidissement de la chaudière pour en retirer les pièces et les y remplacer par d’autres. 11 conserverait, selon nous, tous ses avantages, si l’on opérait avec 3 petites chaudières mobiles qui contiendraieht chacune 50 pièces avec la quantité d’eau et d’alcali nécessaire, et s’adapteraient toutes trois à un foyer unique. D’après des expériences qui nous sont propres, il suffit de chauffer une toile durant 25 à 30 minutes à la pression de 2 | à 3 atmosphères, pour opérer la saponification complète du corps gras dont elle est imprégnée ; or , en ne travaillant que 12 heures, On voit qu’au moyen de ces trois chaudières , dont l’une serait chargée et en ébullition, l’autre en charge, mais remplie d’eau chaude qu’on obtiendrait économiquement à l’aide d’un bassin placé de manière à utiliser la chaleur du fourneau qui se perd , et la 3e en décharge, il serait facile de lessiver ou de passer à la chaux 1,000 à 1,200 pièces par jour. La seule dépense étrangère au mode ordinaire de lessivage serait l’établissement d’une grue qui donnerait à deux ouvriers la facilité de manœuvrer les chaudières , dé les placer à volonté dans le foyer ou de les en retirer. Non seulement il y aurait économie de combustible et de main-d’œuvre dans un tel procédé; mais on pourrait en même temps diminuer de moitié la proportion de chaux que l’on emploie communément, et d’ailleurs le lessivage serait toujours égal, ce qui n’a pas ordinairement lieu quand on expérimente sur de grandes masses.
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- APPAREILS A LESSIVER.
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- § A35. ü. Les appareils chauffés à la vapeur sont de deux espèces : dans les uns, le bouilleur ou générateur de vapeur est distinct du cuvier ; dans les autres il se confond avec lui. Nous 11e reproduirons pas ici la figure de ces appareils, attendu que quelques mots suffiront pour en donner une idée. Qu’on se représente un cuvier en bois, ou en fonte quand on veut éviter des réparations 4rop fréquentes, capable de contenir de A à 600 pièces de 60 à 70 mètres chacune. A la partie inférieure est un double fond percé de trous, au centre duquel se trouve un tube qui sert à établir une communication entre l’espace que présentent les deux fonds du cuvier et le générateur de vapeur; c’est sur ce double fond qu’on entasse avec ordre jusqu’à une certaine distance du haut du cuvier les pièces préalablement imprégnées de lessive ; elles sont ensuite recouvertes d’un gril en bois qui les maintient à un niveau fixe et constamment submergées. Ce cuvier est surmonté d’un couvercle mobile percé d’un trou auquel s’adapte le tuyau qui conduit la vapeur sous le double fond. Au moyen d’un générateur de vapeur mis en communication avec 2 ou 3 cuviers a, b, c, disposés de même manière, on peut avoir un lessivage continu ; car, tandis que la vapeur passe dans le cuvier a pour en chauffer le contenu, le cuvier b peut être en charge et le cuvier c en décharge, et vice versa. Quand-le bouilleur a produit dans le cuvier a l’effet désiré, il suffit de fermer un robinet pour intercepter toute communication entre le bouilleur et ce cuvier, et d’en ouvrir un autre pour diriger la vapeur dans le cuvier b , puis dans le cuvier c. Par ce système de chauffage ou de lessivage, au moyen d’un seul bouilleur on peut donc chauffer plusieurs cuviers , et au besoin même faire servir ce bouilleur à d’autres opérations qu’à celle du blanchiment; mais il n’en offre pas moins plusieurs désavantages : il entraîne toujours à une trop grande dépense de combustible quand 011 n’a pas plusieurs cuviers à chauffer, et que l’excédant de vapeur ne peut pas être utilisé au chauffage des bains de teinture ou autres; il a aussi pour effet d’étendre de beaucoup la lessive , car le volume de
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- celle-ci augmente : 1° de toute la quantité d’eau qui provient de la vapeur employée à porter la lessive de la température ordinaire à celle de l’ébullition , et qui n’est pas moindre de ~ ; 2° de toute la vapeur qui est condensée par l’action refroidissante des surfaces en contact avec l’air : or une lessive ainsi étendue est naturellement affaiblie, et de plus cette accumulation d’eau offre le grave inconvénient de limiter le terme de l’ébullition , puisque aussitôt que les cuviers sont remplis de liquide on est obligé d’arrêter l’opération.
- Dans les autres appareils chauffés à la vapeur, le générateur se confond avec le cuvier et forme avec lui une seule pièce. Pour s’en faire une idée , il suffit de se représenter un cuveau en tôle ou en cuivre dont le fond , concave à l’extérieur, est convexe à l’intérieur; ce cuveau est placé sur un foyer; à 2 ou à 3 décimètres du fond se trouve un autre fond à claire-voie, sur lequel on ttisse les toiles préalablement imprégnées de lessive; le cuvier est surmonté d’un couvercle qui le bouche hermétiquement, et l’espace qui sépare les deux fonds est rempli d’eau, en sorte qu’en faisant du feu sous le fond inférieur, celui-ci, faisant fonction de surface de chauffe , transmet la chaleur au liquide et le porte à l’ébullition ; la vapeur ainsi produite passe peu à peu à travers la couche de toile qui est en dessus, et comme ces toiles exercent une pression , la température de la lessive est portée au-dessus de 100°.
- Ce système de lessivage a cela d’avantageux que l’alcali se trouve en contact avec le tissu sous l’influence d’une certaine pression, circonstance qui, avons-nous dit, est la plus favorable à la saponification des corps gras. (Voyez Péclet, Traité sur la chaleur, p. 283, pl. 96.)
- § /i36. Appareils à circulation. Lepremierperfectionnement apporté à l’opération du lessivage, telle qu’elle se pratique dans les ménages depuis un temps immémorial, fut de placer le cuvier au-dessus de la chaudière contenant la lessive portée à l’ébullition , puis d’élever le liquide à l’aide d’une pompe à la partie supérieure du cuvier, d’où il s’écoulait en traversant
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- APPAREILS A LESSIVER.
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- la couche de toile et retombait dans la chaudière. On ima-
- gina ensuite une foule d’appareils divers, et Widmer, de Jouy, eut l’heureuse idée de faire servir la pression même de la vapeur pour faire monter la lessive. Son appareil, bien simple , est représenté par lafiy. 9.
- i
- »
- - '1=1.
- . c,c. Cuvier placé sur un foyer pour être chauffé.
- d. Double fond sur lequel on tasse les pièces.
- e. Tube plongeur qui passe au travers du double fond et de la couche de toiie , muni à sa partie supérieure d’un chapiteau s, qui a pour effet de répartir uniformément la lessive. Quand on chauffe cette dernière, elle ne tarde pas à entrer en ébullition ; la vapeur qui se produit rencontrant pour résistance la couche de toile qui est. sur son passage, presse naturellement sur le liquide , qui s’élève alors par le tube e , et se déverse par le chapiteau sur la partie supérieure du cuvier.
- L’appareil ci-après , fig. 10, est construit d’après le même principe; la seule différence, Fig. 4 0.
- c’est que la lessive, au lieu d’être chauffée dans le cuvier même, est portée à l’ébullition dans un cylindre indépendant p , placé sur un foyer, et communiquant par un tube v avec la partie inférieure du cuvier, et par un tube a, qui'est plongeur, avec la partie supérieure.
- Quand la lessive est chauffée, la pression qui s’exerce sur la surface du liquide l’oblige à s’élever par le tube a, et à se rendre dans
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- le cuvier g, g, rempli de toiles, qu’il traverse pour rentrer dans le cylindre par le tube de retour v.
- On a fait à cet appareil le reproche fondé et facile à comprendre, de ne pas toujours, fournir aux toiles une lessive d’une température suffisamment elevée : ce cylindre, en effet, renferme de l’air avec le liquide : or cet air, qui n’a pas d’issue, presse, en se dilatant, sur la colonne de liquide, et en détermine l’ascension avant que la lessive ait atteint le degré de chaleur nécessaire à son action. Pour remédier à cet inconvénient, on a eu recours à quelques modifications. Le tube a a été muni d’un robinet qu’on ferme ou qu’on ouvre à volonté ; le tube y, dit de retour, d’une soupape qu’on peut également ouvrir et fermer à volonté. Supposons maintenant que le tube a soit fermé, l’air et la vapeur produite n’ont issue que par le tube v, et pendant tout ce temps l’appareil fonctionne comme un véritable appareil à la vapeur ; mais qu’on vienne ensuite à fermier momentanément la soupape, le liquide se trouve chauffé à une pression beaucoup plus forte qu auparavant, et par conséquent sa température s’élève dans la même proportion. Si, après un certain temps , on ouvre le robinet du tube a , le liquide s’élance et se répand avec force à la surface du cuvier. Ces modifications offrent l’avantage d’élever la température de la lessive au-dessus de 100° ; mais elles occasionnent, d’autre part, des pertes de chaleur assez fortes, résultant de l’évaporation qui a lieu naturellement dès que la lessive est soustraite à la pression où elle avait d’abord été chauffée, et demandent beaucoup d’intelligence dans celui qui dirige l’o- 1 pération.
- Les mêmes inconvénients n’existent pas dans l’appareil qu’a imaginé René Duvoir (Péclet, Traite sur la chaleur, t. II, p. 282, pl. 95 ). Au moyen de deux flotteurs qui font mouvoir une soupape à air placée dans le bouilleur, et une autre soupape placée à l’ouverture du tube de retour, il se produit une ascension périodique et tellement régulière que toutes les ;
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- APPAREILS A X.ESSIYER.
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- heures une quantité déterminée de lessive arrive à la partie supérieure du cuvier.
- On emploie encore d’autres appareils de circulation, mais qui reposent sur des principes différents. 11 en existe un bien simple, /if/, il ; il consiste en un cylindre bouilleur a , posé verticale-
- Fig. 14.
- ment sur un fourneau et mis en communication avec un cuvier n , où s’opère le lessivage , au moyen de deux tubes c, c, placés, l’un à la partie supérieure l’autre à la partie inférieure du cuvier, et de telle sorte que le niveau des deux liquides s’établisse sans peine. D’après cette disposition on conçoit que la .chaudière, complètement remplie de liquide, ne peut être chauffée sans que celui-ci, se dilatant, augmente de volume et vienne se répandre à la partie supérieure du cuvier ; mais la lessive renfermée dans le'cuvier coulant sans cesse dans le bouilleur, il s’établit une circulation continue produite par la tendance qu’ont les deux liquides à se mettre en équilibre.
- L’appareil ci-après, dont nous représentons une coupe verticale, ficj. 12 , et qui fonctionne dans la maison Dollfus Mieg, de Mulhouse, est un peu différent du précédent ; cependant le liquide y est mis en mouvement par une cause à peu près semblable. Au moyen de cet appareil on peut lessiver 500 pièces calicot, et plus quand ce sont des jaconas ou des mousselines, dans l’espace de 2/i à 30 heures.
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- a. Chaudière.
- c. Cuvier dans lequel on place les toiles à lessiver, i). Foyer. e. Cendrier.
- Fig. '12.
- f, f. Plancher pour le service de l’appareil. b, b. Carneaux de chauffage.
- a, a. Tuyau vertical par lequel monte la lessive , muni d’un robinet b à ; sa partie supérieure.
- d,ff. Tuyau de retour muni d’un robinet c.
- Les robinets adaptés aux tubës d’ascension et de retour n’ont d’autre rôle à jouer que d’intercepter momentanément toute communication avec le bouilleur : car, ainsi que la figure le représente, deux cuviers sont en relation avec la chaudière, en sorte que le lessivage ne se fait jamais que dans l’une des cuves, tandis que l’autre est déchargée et rechargée.
- Comme dans cet appareil le tube ascensionnel a est plus élevé que le niveau du liquide dans le cuvier, on ne conçoit pas d’abord comment la circulation du liquide peut s’établir ; mais il suffit d’un peu d’attention pour le comprendre. Le cuvier cet le bouilleur a étant remplis d’eau, comme il est indiqué, la lessive s’élève à un point correspondant ou sensiblement plus élevé dans le tube a ; le liquide Tenfermé dans le bouilleur se trouve donc
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- comprimé par toute la colonne de liquide renfermée dans le cuvier et par celle du tube a. Dans les premiers moments où l’appareil est mis en activité , la chaleur produit des différences assez notables dans la densité de la lessive pour qu’une petite portion de celle que contient je tube a s’élève et se répande à la partie supérieure du cuvier. Toutefois l’ascension du liquide s’arrêterait là, si la vapeur qui se forme au commencement de l’ébullition, et qui se liquéfie d’abord parce qu’elle ne peut faire équilibre à la pression de la colonne de liquide qui la comprime , n’acquérait bientôt une force expansive suffisante pour expulser par le tube vertical a et pour déverser dans le cuvier un volume de lessive égal à celui qu’elle avait dans le bouilleur. Ce dernier appareil de circulation est le plus avantageux en ce que la lessive déversée est toujours à une température élevée ; cependant il offre, comme tous les appareils du même genre, plusieurs inconvénients : d’abord il demande beaucoup de temps , car il faut, en moyenne, 2h heures pour y traiter 3,000 mètres de calicot ordinaire ; secondement, quand les pièces ne sont pas bien disposées dans le cuvier, il se trouve des points où la lessive a plus d’accès que dans d’autres, en sorte que' le tissu est inégalement lessivé ; enfin, comme on opère sur de grandes masses, les pièces placées à la partie supérieure du cuvier reçoivent l’action de la lessive bouillante durant toute la durée du blanchiment, tandis que celles qui sont au fond ne la reçoivent que pendant une partie de ce temps , d’où résultent encore des inégalités qui influent plus ou moins sur toutes les opérations subséquentes.
- En sortant les pièces de ces divers appareils à lessivage, on les dégorge par des moyens mécaniques que nous exposerons tout-à-l’heure, puis on leur donne une seconde lessive à la chaux pure. Le résidu de cette seconde lessive est ordinairement employé pour la première lessive suivante , dans les établissements où l’opération du lessivage est continue et se fait avec économie. Après cette seconde lessive, les toiles sont de
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- nouveau soigneusement dégorgées, et alors elles ont perdu toutes les matières solubles, gomme, fécule, etc., qui les accompagnaient, ainsi qu’une petite partie de corps gras qui s’en est séparée à l’état de savon calcaire et une portion de résine ; elles ne retiennent plus que la matière colorante et les corps gras résineux qui restent intimement unis à la fibre à la faveur de la chaux à laquelle ils sont combinés.
- Arrivées à ce point, les toiles sont passées dans un acide étendu à 1° Æ: c’est l’acide sulfurique chez les uns, chez les autres le chloride hydrique. Pour opérer ce passage on plonge es pièces, tantôt en paquet, dans de grandes cuves enfoncées en terre et remplies d’eau acidulée, tantôt, lune après l’autre, dans un baquet également plein d’eau acidulée, qui est surmonté d’un tourniquet a, t, b, muni d’une manivelle m , semblable à celui que représente la fig. 13, et dans lequel on a soin d'ajouter de temps à autre de l’eau et de l’acide, parce que,
- Fig. 13.
- d’une part, les pièces entraînent toujours avec elles une cer- taine quantité de liquide, et, d’une autre, la chaux qui y ad-nère et s’y combine affaiblit le bain en saturant l’acide. Cette opération a lieu ordinairement à froid; mais nous avons la preuve que la faible dépense de combustible nécessaire pour ' élever la température de ces bains de 70 à 80°, serait plus que compensée par les résultats qu’on obtiendrait. Nous avons re-marqué, en effet, qu’à cette température, non seulement les savons calcaires sont infiniment mieux décomposés qu’à la tem-pérature ordinaire, mais encore qu’une portion de la matière
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- colorante et de la résine se trouve dissoute par l’acide etfnlevée au tissu. Enfin les acides gras mis en liberté à chaud réagissent sur le corps résineux de l’étoffe, et en s’y unissant favorisent sa dissolution dans les opérations ultérieures du blanchiment. Si l’on adoptait la modification que nous proposons, l’opération pourrait se faire, soit à feu nu dans un bassin en plomb, soit dans un baquet de bois chauffé à la vapeur. Dans ce dernier cas, le bain serait alimenté par la vapeur condensée, et des additions successives d’acide le maintiendraient au degré voulu.
- En sortant de ce bain acide les pièces sont dégorgées et rincées avec soin, puis soumises à l’action de lessives de carbonate sodique, dans les appareils de lessivage que nous avons décrits plus haut ; les acides gras se combinant alors directement forment un savon soluble qui, conjointement avec l’exc's de carbonate sodique, dissout le corps résineux. Quand ce lessivage est bien fait et que les pièces sont suffisamment dégorgées , celles-ci ne se composent plus que de fibre ligneuse ou cellulose pure, et d’une certaine quantité de matière colorante plus ou moins modifiée, qu’il reste à enlever par les opérations de la seconde phase du blanchiment, la décoloration proprement dite.
- § h37. Opérations mécaniques du blanchiment. Après chaque lessive et chaque passage en acide, les pièces sont nettoyées ou dégorgées, c’est-à-dire débarrassées par des lavages à l’eau et moyennant certains effets mécaniques, des matières solubles et insolubles qu’elles peuvent contenir; ce qui n’est pas d’une exécution aussi facile qu’on le croirait au premier abord. La fibre textile, en effet, possède, de même que tous les corpspo-reux. la propriété de retenir dans ses pores les matières qui s’y trouvent; il est donc indispensable, pour en extraire ces dernières, de comprimer plus ou moins et à plusieurs reprises ces pores, qui, se remplissant d’eau dès que la pression est interrompue, finissent par se débarrasser, à la suite d’absorptions et de déplacements successifs, de toutes les matières solubl s qu’ils
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- contenaient. Quant aux matières insolubles, c’est par le frottement qui s’établit entre les pièces, aidé de l’action mécanique de l’eau, qu’elles disparaissent. L’eau est par conséquent l’agent indispensable pour nettoyer et dégorger les tissus. Des appareils de formes diverses sont'employés à cette opération. Les uns réalisent mécaniquement l’effet que produisent les laveuses en battant leur linge ; les autres se composent de cylindres entre lesquels les toiles passent et sont comprimées ; dans quelques uns, cette compression s’effectue par la chute régulière des toiles elles-mêmes; dans d’autres, par l’eau qu’on fait tomber avec une force d’impulsion plus ou moins grande sur les tissus. Nous allons examiner successivement ces appareils, qui ne sont pas nécessaires seulement pour le blanchiment, mais encore pour toutes les circonstances où une étoffe ayant reçu l’action d’un agent en dissolution ou l’impression de couleurs, a besoin d’être débarrassée de la substance qui ne doit pas y rester adhérente.
- 5$ 438. Battage à la main. Il n’y a pas bien longtemps encore que l’opération du dégorgeage des pièces se pratiquait de la manière suivante dans les fabriques4e toiles peintes : on étalait sur un pont un certain nombre de pièces que des manœuvres, munis de battes ou fléaux, battaient vigoureusement pendant que d’autres les retournaient et les .aspergeaient d’eau. Ce procédé n’est plus en usage que dans les pays où la main-d’œuvre est à très bon marché ; les résultats qu’il donne sont satisfaisants quand il est exécuté avec soin; mais s’il est toujours praticable et sans inconvénient .en été, il n’en est pas ainsi en hiver, par les grands froids surtout.
- § 439. On a inventé, pour remplacer mécaniquement le battage à la main, une ingénieuse machine qui porte le nom de 'plateau-battoir ; nous en donnons le plan et une élévation.1 (PI. I ,Jig. 1 et 2):
- c. Plate-forme composée de grosses planches de chêne bien polies, exactement unies ensemble et percées de petits trous pour l’écoulement de l’eau, sur laquelle on étale les pièces.
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- APPAREILS A LAVER OU DEGORGER LES TISSUS. 37 b. Arbre de la plaie-forme.
- d. Lanterne qui reçoit son mouvement de l'arbre y, réglé par x , n, pour l'imprimer à la roue a, fixée sur l’arbre de la plate-forme, i, i, 1,1. Battes mises en mouvement par les cames o, o, o, de l'arbre s. p, p, p. Pompes qui déversent continuellement de l'eau sur les pièces. r. Réservoir d’eau. n\ Réservoir d’écoulement.
- u. Conduit dirigeant l’eau du réservoir n dans le réservoir h’.
- u’ Autre conduit dirigeant l’eau du réservoir ir sur les pièces étalées sur la plate-forme.
- q , q. Leviers de pompes mis en mouvement par les cames de l’arbre r. m , l , k. Roues destinées à mettre en mouvement les différents arbres de la machine.
- g. Levier articulé pour régulariser le courant d’eau. x, x} x. Cames de l’arbre r. z , z. Contre-poids du balancier y.
- v, v, v. Charpente de la machine.
- La plate-forme c, une fois chargée de pièces, reçoit un mouvement très lent du pignon de la lanterne d, qui engrène avec la roue a fixée sur l’arbre b. Au même instant les battes sont rapidement élevées, l’une après l’autre, par les cames o, o, o, de l’arbre s , et retombent par leur propre poids sur les pièces , aussitôt que les cames cessent d’agir. Dès que la machine est en mouvement, les deux balanciers q, q, reçoivent un mouvement de bascule produit par les cames x, x, de l’arbre t, et par les contre-poids z, z. Le mouvement est communiqué à la roue m, fixée sur l’arbre x, par l’intermédiaire de la roue l, qui reçoit elle-même le mouvement de la roue k, fixée sur l’arbre moteur. Les pompes p,p, mises ainsi en activité, fournissent de l’eau, qui se rend d’abord dans le réservoir r, et de là, par le tuyau u, dans le réservoir de distribution r’ , pour s’écouler ensuite sur la plate-forme par les tuyaux u, u’, placés entre chacune des battes. La quantité d’eau est réglée par la soupape que l’on ouvre au moyen du levier articulé g.
- § MO. Une seconde machine à dégorger qui se rapproche de la précédente par le principe d’action, mais qui en diffère essentiellement par la forme, a été établie il y a longtemps
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- dans les fabriques d’indienne, et fonctionne encore dans un certain nombre d’entre elles; nous voulons parler du foulon. Nous donnons ici la coupe longitudinale d’une des dix à douze auges dont se compose ordinairement une batterie à fouler.
- Fig. Mi.
- a. Arbre en bois sur lequel sont ajustées des cames b, b, b, b. c. Tète du foulon portant à sa partie inférieure trois dents légèrement cintrées.
- cl. Manche de ce foulon tournant autour de l'axe e.
- i. Auge en bois de chêne dans laquelle on place les pièces à fouler.
- y, y, y. Charpente du foulon.
- h. Tuyau en plomb placé le long du sommier i, et communiquant avec un réservoir plein d’eau, qui distribue l'eau dans les diverses auges. h. Robinet qui règle l’introduction de l’eau dans l'auge.
- Les pièces en paquet étant placées dans l’auge f, on ouvre le robinet en même temps qu’on- imprime le mouvement à l’arbre a, qui, au moyen des cames b, b, b, 6, soulève le foulon par la tête c ; celui-ci retombant par son propre poids sur les pièces, les foule, en leur imprimant un mouvement rotatoire qui s’effectue dans le sens opposé à celui où marche l’arbre a, et qui est déterminé par la forme cintrée des dents et la configuration de l’auge.
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- Les opinions sont très partagées relativement au mérite de cette machine : des fabricants prétendent que son emploi offre de grands inconvénients ; que les pièces ainsi traitées ne sont pas exactement dégorgées, et que.souvent elles sont endommagées. D’autres, au contraire, la trouvent très avantageuse. M. H. Schlumberger, qui s’occupe en ce moment d’un travail extrêmement intéressant sur les diverses machines à dégorger et auquel nous devons la coupe ci-contre,// '1 h , trouve que, quand on sait donner aux foulons et aux auges surtout, la configuration la plus favorable pour que le mouvement rotatoire des pièces se fasse uniformément, et pour éviter ainsi que les pièces s’engagent entre le foulon et l’auge du côté des cames, aucune autre machine ne saurait être préférée pour le dégor-geage des tissus à celle dont nous nous occupons en ce moment.
- § Ml. Une autre machine, fondée sur le même principe d’action , quoiqu’elle n’ait pas la moindre analogie dans sa disposition avec les deux précédentes, fonctionnait, il y a une dizaine d’années, dans l’important établissement de Wesserling. Sur un grand arbre en bois de chêne d ,Jig. 15 , fixé sur un bâtis e, e, on faisait passer un certain nombre de pièces, dont chacune liée par les extrémités formait une toile sans fin. Ces pièces, abandonnées à elles-mêmes et plongeant en partie dans l’eau g, se trouvaient naturellement tendues sur l’arbre n, qui imprimait son mouvement, mais en sens opposé , au petit cylindre de traction e muni d’un levier /, placé derrière et un peu au-dessus. A une certaine distance de ce petit cylindre, était un bâtis en bois servant de point fixe à des battes mobiles , dont l’une des extrémités b , en forme de marteau cintré , coïncidait avec la surface cylindrique de l’arbre, tandis que l’autre aboutissait au-dessous d’un autre arbre a, muni de cames g, g, qui pressaient sur les battes et soulevaient momentanément le marteau cintré, pour le laisser retomber par son propre poids sur les pièces en boyaux h, ii, qui circulaient lentement sur l’arbre;
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- ces cames étaient à une distance telle les unes des autres que le marteau se relevait aussitôt qu’il était tombé.
- fl a fl
- § Zi/i2. Leclapeau, dit aussi sauteur et Rouennaise, parce que c’est à Rouen qu’on l'a d’abord adopté, fonctionne en partie comme les machines précédentes, et en partie comme les cylindres presseurs.
- Nous donnons, fig. 16, une coupe transversale et une élévation de cette machine, qui rend les plus grands services au fabricant qui sait s’en servir et qui ne l’applique pas au nettoyage des étoffes fines et délicates.
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- Deux rouleaux en bois marchant en sens opposé en sont les parties essentielles. Le rouleau inférieur a est cannelé et fixe ; le rouleau superposé b est parfaitement cylindrique ; la courbe
- Fig. 16.
- de sa surface correspond à celle des cannelures du cylindre inférieur ; ce cylindre b s’élève ou s’abaisse par l’effet du cylindre cannelé en glissant dans une rainure pratiquée dans l’épaisseur des jumelles c et d du bâtis.
- Cette machine est placée au-dessus d’une eau courante ou d’un grand bassin rempli d’une eau qui se renouvelle sans cesse. Au-dessous du cylindre a est une traverse sur laquelle sont implantées des chevilles o, o, o, o, destinées à espacer convenablement les pièces qui passent en spirales entre les deux cylindres. A la partie tout-à-fait inférieure se trouve un petit cylindre de tension caché sous l’eau. Quand on veut se servir de cette machine, on fait passer au-dessous du cylindre de tension une ficelle qu’on élève ensuite en a, pour la faire passer sur le cylindre a au point /, et redescendre pour repasser, mais en sens opposé, sous le cylindre de tension; on relève la ficelle en c, pour la faire passer sur le cylindre a en d, en l’espaçant à chaque tour au moyen des chevilles o, o, o, o. On continue de la sorte jusqu’à ce que la ficelle s’étende en spirale sur toute la
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- longueur du cylindre. Les pièces à dégorger, toutes liées les unes à la suite des autres, forment un ruban dont l’une des extrémités est fixée à la ficelle. Le cylindre a, recevant l’impulsion d’un moteur, met en mouvement tout le système, et les pièces entraînées par le mouvement de la ficelle s’engagent entre les cylindres a et b aux points /, cl, /, etc., et finissent par arriver à l’autre extrémité du cylindre, d’où l’on doit les retirer dans le sens opposé au courant de l’eau pour qu’elles restent toujours tendues et soient mieux lavées. Pendant que les pièces se rendent en sortant de l’eau sur le cylindre a , le cylindre b, à chaque instant soulevé par les cannelures, comprime en retombant l’étoffe et en fait jaillir les impuretés. Ordinairement, pour s’épargner l’embarras des préliminaires de l’opération, on a soin d’attacher un bout de ficelle au bout du ruban de toile, et de n’arrêter la marche de la machine que lorsque la ficelle a remplacé à la fin de l’opération la*toile sur le cylindre a.
- Les pièces sont d’autant mieux nettoyées qu’elles sont revenues un plus grand nombre de fois de l’eau sous le cylindre b , et vice versa. Il semblerait d’après cela qu’en donnant une longueur suffisante aux cylindres qui composent l’appareil, on devrait pouvoir nettoyer les pièces en une seule opération ; il n’en est cependant pas ainsi, attendu que la longueur des cylindres est en quelque sorte déterminée par l’opération elle-même. Ces cylindres, en effet, doivent avoir un diamètre de 15 à 25e pour exercer une pression convenable; or, si on leur donnait trop de longueur, par suite de l’augmentation de leur poids , les pièces ne pouvant se mouvoir qu’avec une extrême difficulté seraient exposées à se déchirer. La longueur de ces cylindres doit encore être limitée parce que la traction augmentant avec le nombre des spirales, la pièce qui se trouverait momentanément arrêtée sur un point serait nécessairement plus ou moins endommagée. Pour éviter des accidents de ce genre, on préfère ordinairement mettre trois clapeauxde ln',50 à 2 mètres de longueur à la suite l’un cfe l’autre; les pièces sor-
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- tant du 1er cia,peau sont saisies par un ouvrier qui les introduit dans le 2°, et de celui-ci dans le 3e.
- Quoique dans le principe on n’ait employé cette machine qu’au nettoyage des toiles fortes, elle donnait lieu cependant à de fréquents accidents causés par les cannelures du rouleau a . Afin d’éviter ces accidents et de pouvoir appliquer cette précieuse machine au nettoyage des toiles fines, on a remplacé lé cylindre a par un cylindre non cannelé. En augmentant la pression du cylindre b , soit en lui donnant un plus grand diamètre, soit, ce qui vaut mieux, en exerçant une pression sur ses axes , on est parvenu à remplacer avec succès le choc que produisait les cannelures du cylindre a ; le dégorgement s’effectue si bien quand la vitesse de la machine est normale, ou telle qu’elle puisse dévider 90 mètres de toile par minute, que l’eau qu’on exprime des pièces qui sortent du 3e clapeau est parfaitement claire et ne retient en dissolution aucune matière étrangère.
- /|/|3. La machine ci-après, dont nous donnons le plan et 1 é-lévation, a beaucoup de ressemblance avec le clapeau, mais elle
- est plus propre aux étoffes légères, telles que jacon-nas, mousseline, etc., parce que les pièces , ne s’enroulant pas en spirales sur les cylindres , ne sont point exposées à des tractions capables de les déchirer.
- Cette machine se compose de plusieurs couples de cylindres a , b, placés sur la même ligne et correspondant les uns aux autres. Ces cylindres ont 25 à 30 centimètres de longueur et autant de diamètre ; les cylindres a, a, sont cannelés et reçoivent l’impulsion du moteur, qu’ils transmettent aux cylindres b, b , qui sont mobiles et se
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- meuvent dans la rainure du montant c, comme dans la machine précédente. C’est par le point e , où deux règles convergentes a, cl, sont placées pour que les étoffes ne s’engagent pas dans les tourillons, que les pièces sont introduites entre les deux premiers cylindres où elles sont exprimées ; de là elles se rendent dans l’eau en passant sous un cylindre de tension, se relèvent pour se rendre entre la 2e paire de cylindres, rentrent dans l’eau , reviennent entre la 3° paire de cylindres, et sortent enfin par le conduit a, y*. On peut, si cela est nécessaire, recommencer l’opération sur les mêmes pièces.
- § AM. Une machine infiniment plus favorable, quoiqu’elle ne soit pas sans rapport avec la précédente, est adoptée dans beaucoup d’établissements du Lancastershire, et, à notre connaissance, dans une blanchisserie d’Alsace. Qu’on s’imagine, d une part, une caisse de 6 à 8 compartiments, ou, si l’on veut, une série de caisses ( 6 à 8 ) placées les unes à côté des autres , de hauteurs telles que celle qui est la plus voisine du réservoir soit la plus élevée et déverse son eau dans la seconde, celle-ci dans la troisième ; et ainsi de suite, en un mot, que ces caisses remplies d’eau, en se déchargeant l’une dans l’autre, simulent autant de cascades ou chutes d’eau ; que, d’une autre part, on se représente une toile mise en mouvement par un mécanisme convenable, dans le sens opposé à celui du courant de l’eau, et par conséquent passant dans toutes ces caisses, en commençant par la caisse la plus basse, pour en sortir, et, après avoir été exprimée , entrer dans la caisse supérieure, sortir de celle-ci et continuer son trajet en plongeant successivement dans une eau qu’elle salira de moins en moins. On doit comprendre sans peine que cette toile arrivera à la caisse la plus haute, complètement dépouillée de ses impuretés. Voici maintenant la coupe longitudinale de cet appareil :
- a, b et c, d, sont deux paires de cylindres munis de leviers et contre-poids /, /, qui fonctionnent à la fois comme rouleaux expresseurs et comme rouleaux d’appel, et qui, recevant 1 un-
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- pulsion d’un moteur, la transmettent à tout l’appareil. Les rouleaux e , e , ne sont que des rouleaux expresseurs ; les rouleaux
- Fig. 1S.
- ?, i, i et k, k, ic, des rouleaux qui servent à tendre la toile durant son trajet au travers des caisses. Cette machine offre ce grand avantage qu’elle donne le moyen de nettoyer très promptement une grande quantité de tissus avec peu d’eau ; mais la traction est si forte durant cette circulation que les pièces s’allongent considérablement et jusqu’à !\ p. 0/0.
- § Zj/i5. Les machines à nettoyer qui nous restent à examiner sont construites sur de tout autres principes que les précédentes : l’une d’elles , le Dasswhel, depuis assez longtemps connue en Angleterre , n’est employée en France que depuis 20 à 25 ans.
- Elle est de la plus grande utilité, surtout pour le dégorgeage des mousselines et étoffes fines, qui sont toujours plus ou moins endommagées par les autres systèmes de battage. Lafig. 19 en donne l’élévation et une coupe perpendiculaire à l’axe. C’est, ainsi qu’on peut le voir, une espèce de tambour cylindrique divisé en quatre compartiments percés de trous, à chacun desquels se trouve une ouverture /’ de 35 à ZiO centimètres de diamètre, par laquelle on introduit et retire les pièces. La coupe du cylindre fait voir quelle est la position des toiles dans le tambour en temps -de repos. Que la roue à laquelle est engagée un arbre a soit mise en mouvement par un moteur quelconque, les toiles imbibées d’eau, après s’être élevées jusqu’au haut de cette roue, retomberont par leur propre poids sur le plancher
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- tlos compartiments avec une vitesse qu’augmentera encore la force centrifuge, et seront lavées en même temps que battues;
- Fig. 19.
- car un filet d’eau, qui arrive par le tube k, jaillit dans l'intérieur par les ouvertures /q li, /q et les arrose continuellement. Douze ou quinze minutes au plus suffisent pour bien nettoyer les pièces, qui sont introduites deux à deux dans chacun des compartiments de cette machine, et qui, se battant par elles-mêmes, ne se déchirent que très rarement.
- Le résultat d’une opération de ce genre dépend beaucoup de la vitesse qu’on imprime à la machine : le mouvement de cette dernière est-il trop lent, les pièces, au lieu de tomber, glissent le long des parois de la roue, en sorte que leur chute ne produit ni choc ni pression ; est-il au contraire trop accéléré, la force centrifuge absorbe l’effet du poids des pièces, qui restent attachées aux parois excentriques du cylindre. Pour bien fonctionner, la roue doit faire de 20 à 25 tours par minute , et la chute des pièces avoir lieu et se répéter régulièrement en moins de deux secondes, en produisant l’effet d’une pulsation. Cette vitesse est facile à obtenir quand la roue est mise en mouvement par une force qui lui est transmise, soit par une machine à vapeur, soit par une machine hydraulique ; mais il en est autrement quand on fait tourner cette roue, entourée à cet effet de palettes, au moyen d un courant d eau qui, sujet à varier, peut en augmenter ou en diminuer à chaque instant la marche.
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- Ces inconvénients cesseraient si cette roue était mue directement par l’eau d’un canal dont on pourrait régler à volonté le cours. Dans les fabriques un peu importantes il y a plusieurs de ces roues, et l’on conçoit qu’il est difficile de les exposer toutes sur le même point à l’action de l.a même chute d’eau. Par une disposition aussi simple qu’ingénieuse , MM. Louis Yerdan, père et fils, de Neuchâtel, sont parvenus à vaincre cette difficulté et à faire marcher plusieurs roues à laver au moyen d’une chute d’eau de 2 mètres de hauteur. Dans le principe, cette chute ne faisait marcher que les machines à imprimer, à calendrer, à broyer, etc., qui se trouvent encore aujourd’hui dans un local contigu; mais comme une grande quantité d’eau passait dans le canal d’écoulement où elle ne pouvait plus produire d’autre effet que celui de l'impulsion quelle avait conservée, ces fabricants construisirent un canal souterrain carré, formé de quatre planches de chêne clouées ensemble et consolidées par des châssis placés de distance en distance. Ce canal en bois communique par une de ses bran-
- ches a 11 c avec la masse d’eau qui se trouve au-
- dessus du barrage, tandis que la branche b est enfoncée au fond du canal. Sur tous les points de cette branche b , qui suit le courant d’eau où l’on veut avoir desK roues à laver, on ajoute des tubes carrés légèrement inclinés dans le sens du courant et qui sont destinés à relever l’eau à peu près à la hauteur où elle se trouve au-dessus du barrage et à la déverser ensuite sur les palettes des roues qui se trouvent au-dessous. Ces conduits dèverseurs sont munis de clapets au moyen desquels on règle l’écoulement du liquide , et partant la vitesse de la roue.
- § hh§. Dans quelques établissements , on dégorge les pièces en les faisant passer entre deux tubes ayant pour longueur la largeur des toiles , et percés d’une multitude de petits trous du diamètre de ceux qui sont pratiqués à la pommelle d’un arro-
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- soir, d’où jaillissent autant de jets d’eau. La direction de ces jets est telle que les pièces s’élevant entre les tubes dans une position verticale, les filets d’eau effleurent les deux surfaces de la toile obliquement et en sens opposé à son mouvement. Ces tubes sont en communication avec un réservoir plus ou moins élevé, afin que l’eau se projette contre la surface de la toile avec toute la force possible.
- Enfin, on emploie aussi quelquefois dans le même but une machine , le trinquet, dont nous donnerons la description en traitant de l’impression des laines.
- § hhl. Maintenant que nous avons passé en revue les diverses machines qu’on emploie pour nettoyer ou dégorger les toiles après chacune des opérations du dégraissage, nous avons à dire un mot des avantages et des inconvénients qu’elles présentent , en les considérant sous les rapports :
- J\° De la manière dont elles nettoient les tissus ; les unes les débarrassant complètement de toutes les matières solides et liquides qui y adhèrent, les autres ne les purgeant que des matières liquides ;
- 2° De l’action destructive qu’elles peuvent produire, selon qu’on s’en sert pour dégorger telle ou telle espèce de tissu ;
- 3° Du temps qu’elles exigent pour opérer un nettoyage parfait ;
- /i° De la quantité d’eau qu’elles demandent ;
- 5° De la force qu’elles absorbent pour être mises en mouvement , eu égard à la quantité de toiles qu’elles peuvent nettoyer 5
- 6° Des effets de feutrage et de traction qu’elles produisent, les unes rétrécissant, les autres allongeant les tissus.
- Quand les pièces que l’on blanchit offrent de la résistance et ne sont pas, d’ailleurs, destinées à des genres d’impression qui comportent l’application des couleurs rentrures (voyez ce mot), on doit employer les machines qui, moyennant le minimum de temps et de force, produisent le maximum d’effet. Sous ce
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- APPAREILS A LAVER QU DEGORGER LES TISSUS. /|V)
- triple point de vue le clapeau présente le plus d’avantages; mais le fabricant n’a-t-il qu’un filet d’eau à sa disposition, il doit donner la préférence à la machine § hhh. La machine § Ml produit un nettoyage parfait et serait susceptible de recevoir une modification d’après laquelle elle ne consommerait qu’une petite quantité d’eau; mais , d’autre part, elle est inférieure aux autres sous le rapport de la force qu’elle exige , et surtout sous celui de la faible proportion de tissu qu’elle peut nettoyer dans un temps donné. Cette machine était bonne à l’époque où le travail des fabriques était moins précipité qu’il ne l’est par moment de nos jours, où l’on se trouve souvent intéressé à produire le plus possible et dans le plus court espace de temps. On peut aussi adresser au plateau-battoir le reproche de demander beaucoup de temps ; mais il nettoie parfaitement les étoffes sans les fatiguer et sans exiger trop de force. Pour les tissus qui veulent être ménagés , il faut les soumettre, soit au plateau-battoir, § Z|39 , soit au dasswhel, § M5 , soit aux rouleaux, § M3, soit enfin aux tubes-arrosoirs, § M6.
- Si les tissus, abstraction faite de leur force, sont destinés à recevoir l'impression des couleurs rentrures, il faut choisir le mode de dégorgement qui les expose le moins possible à des variations dans leur dimension lorsqu’ils subiront les opérations de la teinture ; autrement le fabricant aurait beau donner les plus grands soins à l’impression de ces tissus, ils se contracteraient toujours dans un sens ou dans lin autre, et rendraient ainsi presque impossible l’encadrement régulier des couleurs de rentrage. Sous ce rapport, le foulon, § Zi/iO , et le dasswhel, ^ M5, rendent de très grands services, le premier, quand on opère sur des toiles ordinaires, le second, quand on traite des toiles légères , parce que l’une et l’autre de ces machines contractent et foulent les tissus dans tous les sens.
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- DR LA FABRICATION EN GENERAL.
- SECONDE PHASE DU BLANCHIMENT.
- Décoloration proprement dite.
- § hh 8. Les toiles, après avoir subi les opérations de la première phase du blanchiment, ne se composent plus, ainsi que nous l’avons dit, que de fibre ligneuse et de matière colorante. Pour faire disparaître cette matière colorante, onia soumet à l’action d’agents qui en modifient et en changent la constitution sans altérer sensiblement la toile. De ces agents le plus anciennement employé est l’air. Qui ne sait qu’une pièce de toile exposée alternativement à l’action de l’air et des lessives finit par se blanchir'? L’air, par sonoxigène, oxide la matière colorante, la modifie et la rend soluble en partie dans l’eau, dans les alcalis et dans les acides ; mais pour qu’il produise son effet, il a besoin du concours des rayons solaires et surtout d’une certaine quantité de vapeur d’eau, car c’est en vain qu’on exposerait dans un flacon rempli d’air sec une toile également sèche, en vue d’en faire disparaître la matière colorante ; et, d’autre part, on exposerait pendant longtemps la même toile à l’air humide, dans l’obscurité, sans en modifier sensiblement la couleur. Le concours de ces trois agents étant nécessaire pour la décoloration des étoffes, nous avons à étudier le rôle de chacun d’eux.
- Celui de l’oxigène n’est pas difficile à concevoir, en tant qu’on ne considère que le résultat de son action, car on ne peut mettre en doute que, dans ce cas, iln’oxide la matière colorante et n’en change les propriétés, en lui enlevant une certaine quantité d’hydrogène ; mais il n’est pas aussi facile de s’expliquer comment ce gaz opère cette destruction de la matière colqrante. En effet, s’il agit directement sur l’hydrogène, pourquoi le concours de l’eau est-il nécessaire? Ce liquide ne jouerait.-il qu’un rôle indirect, celui d’aider à l’action chimique, ou bien agirait-il directement en se condensant dans les pores de la toile, ainsi que
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- nous l’avons ditp. (5? L’eau , en dissolvant une certaine quantité d’oxigène , met-elle ce gaz dans les conditions les plus favorables pour exercer son action sur la matière colorante, ou favorise-t-elle la formation momentanée de l’eau oxigénée, un des agents décolorants les plus puissants, dont la production serait due alors à la puissance de contraction de la fibre?
- Quant aux rayons lumineux, ils ont évidemment pour objet de déterminer l’action chimique qui s’accomplit, selon l’hypothèse que l’on admettra touchant le rôle de l’oxigène , soit entre I ce dernier et la matière colorante, qui serait ainsi directement détruite, soit entre l’oxigène et l’eau, pour former de l’eau oxigénée et produire le même efFet.
- Ces principes suffisent pour faire comprendre les opérations du blanchiment à l’air libre, qui sont, du reste, trop connues : pour que nous en parlions longuement.
- Lorsque les pièces ont été lessivées, on les expose sur le pré, pendant 3, U et 5 jours, à l’action des rayons solaires. Si le ; temps est clair, la température élevée, et que durant les nuits
- Iil y ait de fortes rosées, ou que la prairie soit irriguée, ou que le climat soit humide, la décoloration marche promptement, tandis que le contraire a toujours lieu quand l’une ou l’autre de ces conditions ne se réalise pas. Quand c’est l’agent physique qui fait défaut, on doit se résigner à attendre; quand c’est l’eau, on humecte les toiles. Dans les grandes blanchisseries on pratique sur les prés de petits canaux qui, en se remplissant, four-
- Inissent les moyens d’arroser les pièces au soleil. Lorsque par cette première exposition sur le pré on a altéré une partie de la matière colorante, on fait subir aux toiles une nouvelle lessive pour mettre à nu une nouvelle couche de cette matière ; on remet au pré, et l’on continue de la sorte jusqu’à ce que le tissu soit entièrement blanc. Enfin, pour donner aux toiles un blanc parfait et qui se conserve tel, on leur fait subir l’opération du vitriolacje ou passage en acide sulfurique , dont nous parlerons plus tard en traitant du blanchiment par le chlore. Les
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- de la fabrication en général. anciens avaient déjà parfaitement constaté la nécessité de faire intervenir les acides pour terminer les opérations du blanchiment, puisqu’ils faisaient passer dans du lait aigri qui, comme on le sait, renferme une grande quantité d’acide lactique, toutes les toiles blanchies à l’air.
- D’après les détails suivants (Note inédite de M. D. Kœchlin), on se fera une idée du temps qu’exigeait ce système de blanchiment et des dépenses qu’il entraînait.
- Après avoir dégommé à deux reprises, à l’eau tiède, les pièces à blanchir et les avoir dégraissées en les traitant à chaud par un bain de savon vert, § 3/i0 , qui avait évidemment pour effet d’enlever la majeure partie des matières grasses et résineuses adhérentes à la fibre ligneuse, on leur faisait, subir :
- 1° Une première lessive qu’on prolongeait durant 4 heures (1), et à la suite de laquelle les pièces étaient soigneusement nettoyées.
- 2° Une exposition au pré durant 3 ou 4 jours, selon la saison.
- 3° Une deuxième lessive , suivie d’un deuxième nettoyage.
- 4° Une deuxième exposition au pré , de 4 à 5 jours.
- 5-° Une troisième lessive de 4 heures, toujours suivie d’un nettoyage.
- 6° Une troisième exposition au pré , de 4 à 5 jours,
- 7° Enfin, un passage en acide.
- On voit qu’en supposant le temps favorable, il ne fallait pas moins de 12 à 15 jours d’exposition sur le pré pour arriver à la destruction complète de la matière colorante. Dans le cas con-
- (I) La lessive qu’on employait dans l’établissement.de MM. les frères Kœchlin était formée de 45 kil. de potasse des Vosges , de 20 kil. de chaux, de 35 kil. de chlorure sodique, le tout traité à l’ébullition pen- 1 dant ! heure par 1,200 litres d’eau. La décomposition du carbonate I opérée, § 108 , on laissait déposer, et la liqueur devenue claire était étendue de 7 fois son volume d’eau. Ces quantités de matières suffisaient pour une lessive de 300 pièces ; par conséquent pour les trois lessives il fallait 45 >< 3 ou 135 kil. de potasse et des quantités proportionnelles de chaux et de chlorure sodique.
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- traire, on n’obtenait guère le résultat désiré qu’au bout de h à 5 semaines. Outre que le fabricant perdait ainsi beaucoup de temps, les .toiles étaient exposées à tous les accidents qui sont inséparables d’une exposition à l’air, aux déchirures qu’occasionnent les- coups de vent, aux saletés des insectes , des' oiseaux, et aux taches qu’y causent lesbourgeons des arbres qu’on plante ordinairement sur le bord des prairies (blancheries). Ces taches sont le plus souvent des matières cireuses qui, se fixant sur les tissus, produisent quelquefois à la teinture les effets les plus déplorables.
- Comme on a beaucoup amélioré ce procédé depuis quelques années, en soumettant préalablement les toiles au mode de dégraissage décrit § Zi31, qui diminue la durée de l’exposition sur le pré, et partant les inconvénients qui en sont la conséquence, il est encore employé quelquefois au printemps, qui est l’époque la plus favorable au blanchiment des tissus, et à laquelle les travaux d’impression sont ordinairement ralentis dans les fabriques d’indienne; mais depuis 1785 il a été généralement remplacé par celui qu’a proposé Berthollet, en s’appuyant sur la propriété dont jouit le chlore de décolorer les tissus. Ce procédé, qui n’a aucun des inconvénients du précédent et qui est praticable dans toutes les saisons de l’année, s’applique aujourd’hui d’une manière très régulière et avec une telle rapidité, que sous ce rapport on est certainement allé au-delà de ce que l’auteur avait pu imaginer ; mais-si les Widmer, les Welter, les Descroizils, les Haussmann en France, les Watt, les Henry, les Cooper en Angleterre, en firent, au début, les applications les plus heureuses, combien d’autres fabricants le décrièrent et enregistrèrent comme autant de protestations des accidents qu’il était cependant facile de prévenir avec un peu plus de connaissances ou de prudence !
- Le procédé de Berthollet, en effet, à l’époque où il fut publié, se compliquait d’une opération,! a préparation du chlore, qui ne se fait plus actuellement en fabrique; les appareils qui étaient
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- affectés à cette préparation étant plus ou moins parfaits , les ouvriers se trouvaient exposés à des émanations qui les mettaient souvent dans l’impossibilité de travailler, tandis que, d’autre part, le chlore n’étant pas toujours employé au degré de force convenable, les toiles étaient ou brûlées ou inégalement blanchies. Outre ces inconvénients, il en existait d’autres plus propres encore à discréditer le nouveau procédé. N’étant pas fixé comme aujourd’hui sur l’opportunité de dégraisser le tissu avant de le soumettre à l’action de l’agent décolorant, on com-mençaitpar faire agir le chlore avant d’avoir complètement enlevé les corps gras et résineux , et ceux-ci soustrayaient à son action , en réservant le tissu, la matière colorante, qui, à peine modifiée, reparaissait toujours, et faisant tache dans les opérations de la teinture, occasionnait au fabricant des dommages tout aussi préjudiciables que s’il y avait eu détérioration de l’étoffe.
- De nos jours, à moins de négligence ou de malveillance de la part des ouvriers, on n’a plus rien de semblable à craindre, quand on connaît à la fois et le rôle que joue le chlore dans les opérations si importantes de la décoloration des tissus, et les conditions dans lesquelles il est le plus avantageux de l’employer ; c’est donc ici le cas d’étudier le premier et de préciser les secondes.
- § Zf/|9. Rôle du chlore dans la décoloration des tissus. Ber-thollet, envisageant avec ses contemporains le chlore comme un composé d’oxigène et d’acide muriatique qu’il nommait acide eotfps muriatique oxigènè , assimilait son action à celle de l’air, avec cette restriction, toutefois, que dans ce composé l’oxigène se trouvait condensé en très grande quantité et sous un état particulier où il avait une action infiniment plus énergique sur les tissus que lorsqu’il est libre comme dans l’air. Cette manière d’envisager l’action du chlore dut naturellement être repoussée lorsqu’on constata la nature simple de ce corps ; mais comme on put se convaincre en même temps de la grande affinité de
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- ce corps pour l’hydrogène, on admit qu’il décolorait les matières colorantes en s’emparant d’une partie de celui qu’elles contiennent, et qu’en changeant ainsi le rapport de leurs principes constituants , il les transformait en d’autres matières qui ne possédaient plus les mêmes propriétés.
- Des expériences entreprises en vue d’étudier ce que cette théorie avait de fondé, ont bientôt prouvé qu’elle n’avait pas toute la solidité désirable. On a , en effet, remarqué que des matières colorantes qui sont instantanément détruites par le chlore humide quand elles sont hydratées, peuvent, lorsqu’elles sont desséchées avec soin, se conserver intactes dans une atmosphère de chlore également sec, pourvu que tout le système soit à l’abri de la lumière, car sous l’influence de cet agent physique il y a toujours une altération qui diffère cependant de celle qui a lieu sous l’influence de l’eau , en ce qu’on obtient avec une certaine quantité de chloride hydrique gazeux, un ou plusieurs produits organiques, selon la durée de l’action du chlore , dans lesquels on retrouve ce corps comme partie constituante. Il n’est donc pas possible , dans l’état actuel des choses, de soutenir que le chlore agit directement, dans le blanchiment, sur l’hydrogène de la matière colorante , puisqu’il est prouvé que le concours de l’eau est indispensable ; il faut donc reconnaître qu’il agit indirectement, ce qui n’a rien de contraire aux faits, puisque nous voyons les acides arsé- * nieux, phosphoreux et sulfureux s’oxider sous l’influence du chlore et de l’eau, et passer à l’état d’acides arsénique, phos-phorique et sulfurique, en enlevant l’oxigène à l’eau qui abandonne son hydrogène au chlore. Mais en admettant que le chlore agisse indirectement et par l’oxigène de l’eau qu’il met en liberté, nous nous trouvons en présence d’une difficulté qui s’est déjà présentée à nous p. 50 , celle de préciser le rôle de l’oxigène. Cependant, comme le chlore et ses composés exercent leur action à des conditions diverses, ne peut-il se faire qu’en donnant un même résultat final que l’oxigène de l’air
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- (une oxidation), ils ne se comportent pas delà même manière que ce gaz? Voici ce qui nous porte à le penser. Le chlore forme plusieurs composés oxides dont les uns sont décolorants par eux-mêmes (acides hypochloreux, Cl2 O, et chloreux, oxide chlorique) , et les autres , sans action par eux-mêmes sur les couleurs ( acides chlorique, hyperchlorique ) , sont cependant susceptibles d’éprouver des décompositions qui les ramènent à un produit décolorant ; il n’y aurait donc rien d’impossible que l’effet du chlore sur les matières colorantes dépendît de l’action d’un de ses composés décolorants qui, dans tant de circonstances , cèdent leur oxigène et agissent comme des oxidants non moins énergiques que l’eau oxigénée. Aucune objection sérieuse n’est à faire à cette manière de voir tant qu’il est question des corps Cl2 O4 , Cl2 O3 , Cl2 O, puisque, pris isolément, ils détruisent à l’instant même les couleurs les plus solides, même le rouge turc ; mais il en est autrement quand on considère l’ac- h tion du chlore libre en présence de l’eau, parce que l’expérience prouve que le chlore ne fait que se dissoudre dans ce vé- ,
- hicule, et qu’aucun phénomène n’est jusqu’ici venu démontrer (
- que, sous l’influence des fibres du tissu, l’acide hypochloreux 0
- puisse prendre naissance par l’action du calore sur l’eau , ti
- comme il arrive lorsque ce gaz est en contact avec les bases fi
- puissantes ; il faut donc admettre jusqu’à preuve contraire, ou ci
- que le chlore et ses composés n’ont d’autre objet que de fournir ri
- de l’oxigène naissant à la matière colorante pour la brûler, et m
- qu’à l’intensité près, leur action est la même, ou bien que le es
- chlore et ses composés n’agissent pas aux mêmes conditions ; ef
- que les seconds (acides chloreux et hypochloreux) décolorent en vertu d’une propriété qui leur est propre , celle de se décom- fa:
- poser en oxidant les corps qui sont en leur présence ; que le ris
- premier, au contraire, décompose l’eau et oxide les matières co- cel
- lorantes comme il oxide les acides arsénieux, phosphoreux et pic
- sulfureux en présence de l’eau.
- Quelle que soit Vopinion qu’on adopte touchant l’action du
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- chlore, dans quel état convient-il le mieux de l’employer 1 Est-ce à l’état libre où à l’état de combinaison? Pour nous, il n’y a pas de doute, des expériences réitérées nous ayant démontré que, plongées dans le chlore gazeux, des toiles humides s’y blanchissent parfaitement sans éprouver aucune altération. Cependant, dans les premières applications que l’on a faites de ce corps au blanchiment, c’est presque toujours au chlore liquide qu’on a donné la préférence, probablement parce que n’ayant pas d’appareils convenablement disposés, on craignait pour les ouvriers l’irritation que le chlore gazeux produit sur les organes respiratoires; mais rien n’estplus facile à éviter que cet inconvénient. Il suffit d’établir dans l’atelier où l’on blanchit une grande cheminée en plomb, qu’on emplit de chlore gazeux, en faisant arriver le tube de l’appareil à chlore à la partie inférieure, de manière à déplacer l’air couche par couche , et à la base de laquelle on met une légère couche d’eau pour absorber le chloride hydrique qui se forme. On introduit les pièces à décolorer dans cette cheminée par une ouverture placée à un des côtés supérieurs, et on les y fait circuler pour les faire ressortir par une ouverture opposée à la précédente ; on peut aussi fermer ces deux ouvertures par une légère couche d’eau, pour prévenir toute émanation. Comme les tissus ainsi traités sont toujours bien blanchis, ce procédé, dont la promptitude et les bons résultats ne laissent rien à désirer, serait, sans contredit, préférable à tout autre , mais il exige la préparation du chlore dans la fabrique même où il est consommé, et cette préparation est toujours onéreuse quand elle n’est pas liée à la fabrication de la soude, § 17, p. 19.
- § Zi50. Chlore liquide. Le chlore liquide blanchit aussi parfaitement les tissus, et l’on peut toujours les y plonger sans risque, en réglant la force de la dissolution ; c’est même sous cet état que, pour la première fois, Berthollet conseilla de l’employer ; cependant on y a renoncé par plusieurs raisons :
- 1° Parce que, faute d’appareils convenables pour opérer la dissolution du chlore , il y a constamment perte d’une certaine
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- quantité de ce corps, et parce qu’obligé d’opérer sous une pression assez forte, on ne peut empêcher de fortes émanations, qu’augmente encore la tension du gaz en dissolution dans l’eau ;
- 2° Parce qu’il est trop dispendieux, sa préparation entraînant les mêmes frais que celle du chlore gazeux, et son application nécessitant en outre l’acquisition de vases de pierres coûteux, ou une dépense continuelle de vases en bois.
- En 1832 , ce mode de blanchiment était encore suivi dans le département de l’Oise. On dissolvait le chlore par le moyen indiqué § 17 ; on le dirigait immédiatement ensuite dans des bassins en briques où il était amené à un état de dilution tel que l’odeur en était à peine perceptible , et l’on mettait macérer les pièces pendant un certain temps dans ces bassins, d’où on les retirait pour les soumettre aux opérations subséquentes.
- § £51. Chlore combine. C’est à l’état de chlorure de chaux que le chlore est actuellement appliqué au blanchiment des tissus. Le chlorure de chaux n’est pas décolorant par lui-même, car dissous et mis en contact avec une matière colorante, il ne lui fait subir que de légères modifications tant que le mélange est à l’abri du contact de l’air ; mais dès qu’il y a intervention d’un acide ou de l’air, qui renferme de l’acide carbonique, il se décompose, et la matière colorante est détruite ; l’acide, s’emparant de la chaux, met en liberté le chlore ou l’acide chloreux, selon l’interprétation que l’on donne à cette réaction (voyez § 28 ). On comprend donc que si le chlorure de chaux n’était accompagné d’un auxiliaire, il n’atteindrait pas le but qu’on se propose en l’appliquant au blanchiment ; celui qu’on lui donne est tantôt l’air, dont l’action est lente, et tantôt l’acide sulfurique ou le chloride hydrique étendu d’eau, dont l’effet est instantané.
- Il semblerait au premier abord qu’une dissolution concentrée de chlorure de chaux qui ne détruit pas les couleurs peut, à plus forte raison, être mise en contact avec la fibre textile sans la détériorer ; l’expérience prouve cependant qu’il n’en est pas
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- ains,icar une toile imprégnée de chlorure de chaux, même assez étendu d’eau, qui paraît au premier abord n’avoir subi aucune altération, finit toujours par tomber en poudre. Une toile plongée dans une dissolution bouillante de ce même chlorure est encore plus promptement endommagée. En employant le chlorure de chaux, le fabricant ne doit donc jamais perdre de vue que l’altération de la fibre textile serad’autant plus prompte que la dissolution sera plus concentrée, que la température sera plus élevée et que le contact du tissu avec le chlore sera plus prolongé.
- On peut substituer au chlorure de chaux les chlorures de soucie et de potasse", mais ils sont plus chers.
- Il y a encore une autre manière d’employer le chlore à la décoloration des tissus: c’est de former sur la toile même, sous l’influence d’un excès de chlore, le chlorure d’oxide, qui détruit toutes les matières organiques. A cet effet, une fois que les pièces sont imprégnées d’hydrate potassique, dont on détermine la force, on les plonge dans une atmosphère de chlore gazeux qui réagit sur l’oxide et déplace l’oxigène. Ce dernier fait disparaître alors la matière colorante, mais en altérant l’étoffe. Disons une fois pour toutes que, si l’on veut prévenir les fâcheux effets du chlore dans les diverses conditions où l’on en fait usage pour blanchir les tissus, il est nécessaire de se rappeler que le tissu sur lequel on le fait agir est un mélange de deux substances inégalement oxidables, la fibre textile et la matière colorante , qui se comportent en présence du chlore et des agents oxidants d’une manière analogue à celle d’un mélange d’indigo et d’acide arsénieux. Le premier de ces deux derniers corps étant le moins oxidable correspond à la fibre ligneuse, et Je dernier à la matière colorante. Or, qu’à un pareil mélange on ajoute du chlore sans ménagement, l’acide arsénieux se transformera en acide arsénique , et l’indigo sera détruit sans qu'on puisse découvrir lequel des deux est le plus stable. Si, au contraire, le chlore est ajouté peu à peu, l’acide
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- arsénieux passera complètement à l’état d’acide arsénique sans que l’indigo ait subi la moindre altération. Il en est de môme pour les tissus à blanchir ; le chlore est-il employé sans discernement, non seulement il décolore la matière colorante , mais encore il altère plus ou moins la fibre ; est-il au contraire en quantité insuffisante pour les attaquer toutes deux à la fois, son action se porte exclusivement sur la matière colorante , et la fibre n’éprouve aucune altération durant la destruction de cette dernière.
- Si donc le poids de la matière colorante qui se trouve sur un tissu nous était connu, si cette matière colorante était également attaquable sur tous les points de la fibre, et si, d’ailleurs, elle y était répandue uniformément, on pourrait imprégner le tissu de la quantité de chlore strictement nécessaire pour opérer la destruction complète de cette substance sans que la fihre fût attaquée, quelles que fussent les conditions d’expérience, l’élévation de la température et la durée du contact.
- Ce point établi, voyons les différents procédés au moyen desquels on fait agir le chlorure de chaux sur les étoffes.
- A peu d’exceptions près, c’est toujours le chlorure de chaux
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- sec qui est employé dans les ateliers, parce qu’il est d’un transport plus facile et par conséquent moins cher que le chlore li-
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- quide. On en opère la dissolution dans une cuve en pierre, les vases en bois étant trop facilement attaqués ; et dans le but de rendre plus parfaite et plus prompte cette dissolution , on place immédiatement au-dessus de cette cuve un tonneau,//y. 20, traversé d’un axe, à l’une des extrémités duquel se trouve une manivelle m et qui est percé sur toutes ses surfaces d’une multitude de trous de 2 à 3e. Ce tonneau, qui plonge de 10 à 15 centimètres dans l’eau que contient la cuve b, a sur une de ses douves une ouverture o, qui se ferme exactement par une porte et par laquelle on introduit le chlorure de chaux sec avec quelques cailloux. Cette ouverture une fois fermée, le tonneau est mis en mouvement par la manivelle m de son axe. et les cailloux frottant les uns contre les autres broient et pulvérisent le chlorure de chaux, dont la dissolution est ainsi favorisée. Comme il importe que cette dernière soit claire et transparente, on la laisse déposer 5 sans cette précaution on courrait risque de brûler les pièces et d’y produire des trous sur certains points ; c’est ce qui n’est que trop souvent arrivé dans le blanchiment des mousselines. Des parcelles , en effet, de chlorate basique ou d’un composé non encore étudié , et qui se rencontrent accidentellement clans le chlorure de chaux du commerce, se déposent dans 1|| mailles du tissu, surtout quand celui-ci est ouvré, et dès qu’on fait passer ces pièces dans un bain acide pour rendre le chlorure de chaux actif, ces parcelles insolubles se décomposant, font, par l’acide chloreux ou par l’oxide chlorique qui se dégage , autant de trous dans la fibre. M. Edouard Schwartz attribue cette altération à des bulles de chlore ; mais nous nous sommes assuré , par des expériences directes, que cette opinion n’est pas fondée, car les mousselines peuvent séjourner quelque temps dans le chlore gazeux humide sans éprouver d’altération notable, et nous avons remarqué qu’en lavant du chlorure de chaux jusqu’à extinction, on obtient un résidu insoluble, mélangé de plus ou moins de chaux et de carbonate calcique, qui, traité par le chloride hydrique, donne
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- naissance à lin corps oxidant des plus énergiques, et qui, répandu sur une toile qu’on fait passer ensuite dans un bain acide, la brûle sur une multitude de points. Du reste, les faits mêmes qu’a observés M. E. Schwartz au sujet de cette altération viennent à l’appui de notre proposition, puisqu’il en résulte, d’une part, que les parties de mousseline les plus généralement brûlées et perforées sont précisément les parties ouvragées qui retiennent toujours le mieux les parties insolubles , et d’une autre, que si l’on emploie une solution parfaitement claire de chlorure de chaux, ces accidents ne se reproduisent plus même sur les mousselines ouvragées.
- § Zi52. La dissolution de chlorure de chaux bien faite, on l’étend d’une quantité d’eau assez considérable pour qu’elle marque, selon le procédé que l’on applique , ou 0°, ou 1 à 2° de l’aréomètre^ ou mieux encore , pour qu’elle décolore, 1 ou 2 fois son volume d’une dissolution d’indigo, § 30. Quand elle a été amenée à ce point de concentration, on en imprègne les toiles en suivant l’une ou l’autre des opérations que nous allons indiquer, et dans lesquelles on emploie le chlorure, tantôt en dissolution très étendue, et alors il n’exerce qu’une action plus ou moins lente, tantôt en dissolution plus concentrée, et alors son action est brusque et rapide. £
- Dans le premier cas l’opération se fait :
- Soitcomme elle a lieu encore actuellement chez MM. Dollfus, Mieg : on a 2 grandes cuves pouvant contenir chacune, outre la quantité de liquide nécessaire pour humecter les tissus, h à 500 pièces de calicot ; on met dans l’une de ces cuves la dissolution de chlorure de chaux affaiblie 5 on y introduit les toiles pliées en paquet, et on les y laisse pendant quelques heures. Quand l’immersion a été suffisamment prolongée on retire les toiles pièce par pièce au moyen d’un crochet, et on les expose à l’air pendant un certain temps afin de prolonger l’action lente et progressive du chlorure. Ce contact du chlorure avec les pièces a surtout pour but de le faire pénétrer uniformément
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- BLANCH. 2e PHASE (DECOLORATION PROPREMENT DITE). 63 dans tous les pores du tissu, afin qu’à l’instant où le chlore est mis en liberté , ce ne soit pas seulement à la surface de la fibre qu’il exerce son action. Lorsque ce contact a été suffisamment prolongé, on plonge les toiles dans un bain acide que contient la seconde cuve ; le chlorure de chaux qu’elles renferment encore est décomposé, et le chlore mis en liberté produit tout son effet : on retire alors les pièces et on les dégorge ;
- Soit d’après la méthode généralement employée autrefois, et qui consistait à placer les pièces dans un cuvier, et à les faire traverser par la •solution de chlorure de chaux, de la même manière que l’on fait circuler la lessive ; après cette espèce de ;lessivage, on retire les pièces du cuvier pour les passer dans un bain acide. Mais cette manière de faire agir le chlorure de ; chaux, outre qu’elle fi l’inconvénient d’exposer les tissus à être brûlés, pour peu que la dissolution décolorante ne soit pas suffisamment étendue, présente encore celui de ne pas toujours donner des résultats uniformes, car dès que la circulation du liquide est interceptée sur un point, il y a nécessairement inégalité dans les effets du chlorure ;
- Soit en imprégnant les pièces de chlorure de chaux et en les. abandonnant à elles-mêmes pendant quelques heures dans l’atelier sur ^s cailloux siliceux bien lavés. Dans cette circonstance , Wchlorure est à peu près décomposé par l’acide carbonique de l’air, et 'le chlore mis en liberté détruit une partie de la matière colorante. En passant ensuite les pièces dans un bain acide, on achève la décomposition du chlorure, et la totalité du chlore accomplissant son action blanchit le tissu;
- Soit, comme cela se pratiquait autrefois à Vesserling, en plongeant les pièces dans un petit baquet g rempli de chlorure de chaux faible et placé sous le rouleau, Jig. 15. Les pièces circulant du baquet sous la batte et de cette dernière dans le baquet s’imprègnent uniformément du chlorure, qui, subissant la même décomposition que dans le cas précédent, produit
- lemmes résultats:
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- (54 DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- Soit, comme le font certains fabricants, en trempant les toiles (environ 15 pièces à la fois) dans un cuvier de l,nc à lm c 5 de capacité, de forme oblongue et surmonté d un tourniquet, rempli de chlorure de chaux faible. Quand les pièces ont séjourné durant 30 à ZiO minutes dans le chlorure, on les en retire pour les enrouler au large sur le tourniquet et les y laisser égoutter jusqu’à ce qu’il ne s’en écoule plus de liquide : on enlève alors le tourniquet avec les pièces, et on le place au-dessus d’un autre cuveau de même forme et de même dimension, rempli d’acide sulfurique ou de chloride hydrique étendu, dans lequel on fait plonger l’étoffe en la déroulant ;
- Soit enfin en faisant séjourner les tissus pendant quelques heures dans des caisses en bois garnies de plomb a b c d, a' b' c' d', a" b" c" d", fig. 21 , qui sont remplies de
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- Fig. 21.
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- chlorure de chaux li-B quide. Chacune de ces a caisses est surmontée
- d’un tourniquet T, T, t, à l’aide duquel on fait mouvoir les pièces pour multiplier les points de contact pendant tout le temps qu’elles doivent rester dans le bain. En ft retirant on les fait passer entre deux rouleaux prvsseurs a, b, situés sur le côté d’une des cuves extrêmes, et l’excédant du chlorure de chaux rentre dans la cuve a7 b" c" d", au moyen du plan incliné qui est immédiatement au-dessous de ces rouleaux. 11 est inutile d’ajouter qu’onpasse ensuite, comme toujours, ces pièces dans un bain acide, afin de décomposer le chlorure et de mettre le chlore en liberté.
- § 453. Dans le second cas, le bain de chlorure de chaux est employé à un degré de concentration tel qu il serait dangereux d’v laisser séjourner les pièces; on les lait donc simplement passer dans ce bain, et afin qu’elles en soient bien imprégnées
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- BLANCH. 2e PHASE (DECOLORATION PROPREMENT DITE I. 65
- et d’une manière égale, on les immerge et exprime à plusieurs reprises, et on les soumet après chaque immersion à l’action de de deux cylindres expresseurs; puis, cette opération achevée, on les passe dans un bain acide que renferme un baquet placé sous une cheminée en bois, destinée à entraîner le chlore qui s’exhale toujours plus ou moins durant une telle opération.
- Le choix entre ces deux manières de faire agir le chlorure de chaux n’est pas difficile. Dans la première, l’opération, lente, à la vérité, se fait du moins avec économie, sans aucun danger pour les toiles et sans incommodité pour les ouvriers ; dans la seconde, au contraire, la dépense en chlore et en acide est plus considérable, et il y a toujours danger pour les tissus, pour peu que les soins viennent à se ralentir. Le seul avantage que puisse offrir cette méthode réside dans la célérité et dans la régularité qui la distinguent, et qui permettent de lier les opérations du blanchiment de manière à les rendre continues ; mais on pourrait arriver aux mêmes résultats avec le chlorure de chaux extrêmement affaibli, employé à chaud ; en outre le chlorure pénétrerait mieux dans les pores du tissu, on serait dispensé de ces immersions et de ces expressions répétées toujours indispensables quand on opère à froid, pour déplacer l’eau qui reste dans les pores du tissu à la suite des opérations du dégraissage. Traitées par le chlorure de chaux faible, porté à la température de 70 à 80°, les pièces s’imbiberaient presque sans difficulté, et l’eau renfermée dans leurs pores serait déplacée par suite de la différence de sa température et de sa densité comparées à celle du bain.
- § àôà. Quel que soit celui de ces procédés qu’on adopte, les pièces que l’on retire du bain acide doivent être dégorgées avec soin parles moyens que nous avons décrits § a37 à âù5. On leur fait alors subir l’action d’une lessive de carbonate sodique, qui a pour but de dissoudre la portion de matière colorante qu’a déjà modifiée le chlorure et qui adhère encore au tissu. Après cette seconde lessive, les pièces, selon le degré de blancheur qu’on
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- veut leur donner et selon la résistance qu’offre leur fibre aux opérations du blanchiment, reçoivent un second passage au chlorure, semblable à celui qui l’a précédé, et suivi également d’un passage en acide, après lequel elles sont dégorgées pour être lessivées une seconde fois au carbonate sodique.
- Lorsque les pièces sont arrivées au degré de blancheur désiré, on les soumet à l’opération du vitriolage, qui consiste à les plonger dans un bain d’acide sulfurique chauffé pour les empêcher de devenir à la longue plus ou moins jaunes, en raison de l’action qu’exerce l’air sur la matière résinoïde qu’elles contiennent toujours, et que le chlore ne décolore que momentanément, matière qui, insoluble dans les alcalis, se dissout à chaud dans les acides. Ce passage des pièces en acide a de plus pour effet de dissoudre les oxides, tels que la chaux, l’alumine, le fer, qui adhèrent au tissu, et qui exercent souvent de fâcheux effets dans les opérations de la teinture. Ce bain se donne de l’une ou l’autre des manières suivantes.
- Lorsqu’on n’a pas à sa disposition un générateur de vapeur, on prend une feuille de plomb qu’on relève des quatre côtés, de manière à en faire un bassin ; on la place sur un foyer, en ayant soin, pour la préserver d’un coup de feu qui pourrait la faire fondre, de mettre au-dessous des barres de fer plates destinées à répartir uniformément la chaleur. Lorsqu’au contraire on a un générateur de vapeur, on se procure une cuve ou une caisse en bois intérieurement garnie de plomb,, dans laquelle on fait arriver la vapeur par un tuyau de même métal.
- A 500 litres d’eau chauffée à AO ou 50°, qu’on introduit dans l’un ou l’autre de ces vases , on ajoute 12 kil. 50 d’acide sulfurique du commerce qu’on délaie préalablement dans une cer-taine quantité d’eau, pour le débarrasser par décantation du 111 sulfate plombique qu’il peut tenir en dissolution, § 12 ; et au C£ moyen d’un tourniquet dont on doit surmonter les vases, on y ^ fait passer 12 à 15 pièces, en leur donnant 1 ~ à 2 tours ; puis on les retire en ajoutant au bain affaibli par ce passage, pour
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- PROCÉDÉS‘DE BLANCII. EMPLOYÉS DANS LES FABRIQUES. 67
- ire ai lui rendre sa force primitive , une quantité d’acide qui varie age '< depuis 200 jusqu’à 500 grammes, selon que les pièces ont été Jeme: plus ou moins bien nettoyées et dégorgées après le dernier :S P°: lessivage. Après cette opération, la dernière du blanchiment, les pièces doivent être lavées avec le plus grand soin ; autre-mrdt ment, à mesure qu’elles se dessécheraient, l’acide sulfurique isiste se concentrant sur les fibres les réduirait en poudre.
- 3ur 11 Maintenant que nous avons exposé avec détails les différentes raisc phases du blanchiment, nous devons faire connaître quelques lu’ell uns des principaux procédés qui sont suivis dans les établisse-omei ments d’indienne, afin d’appeler l’attention sur ceux qui offrent lisso: le plus d’avantage et sur les améliorations dont ils sont suscep-; a i tibles. s, l'i
- PREMIERE PHASE. ----
- ravei
- am s § A55. Les pièces de calicot reçoivent :
- Dégraissage.
- ipeffi és, d er, ei 'ait 1 plate l cou CW ns la létal
- 1° Un lessivage à la chaux , de 4 2 heures , suivi d’un nettoyage parfait. .
- 2° Un lessivage à la soude caustique, à raison de 260 litres de lessive à 1° /IB pour 1,000 mètres calicot, dans l’appareil, § 436 , avec jet continu d’une durée de 10 heures au moins, et un nettoyage parfait au foulon, § 440.
- 3° Une deuxième lessive semblable à la précédente , suivie d’un troisième nettoyage.
- 4® Une troisième lessive toujours à la soude caustique à 4° dB, et un quatrième nettoyage.
- Du reste, on fait ordinairement ces lessivages sur une quan-
- 3 gj]j- ...
- tité de toile qui dépend de la capacité des appareils, dont les
- i ggi
- uns permettent de lessiver à la fois jusqu’à 30,000 mètres de n calicot, tandis qu’on n’en peut lessiver avec les autres plus de 81 à,000 mètres.
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- seconde phase. — Décoloration.
- 5° Une immersion de 30 minutes dans un bain formé (pour la même quantité de 'l"‘et ,000) de 900 litres deau contenant en dissolution 9 litres chlorure de chaux à 8° dB , mais auquel on doit ajouter après avoir retiré 500 mètres de toile , 1 litre à 'I '.4 de chlorure de chaux.
- 6° Uno immersion de 30 à 40 minutes dans 900 litres ( toujours pour la même quantité’ d’étoffe ) d’une eau aiguisée de 3,7 à 4 kil. d’acide sulfurique concentré.
- 8° Un lavage et un dégorgeage.
- 9° Un lessivage semblable au n° 2 ci-dessus.
- \ 0" Un lavage et un dégorgeage.
- \ \° Une immersion dans le chlorure, semblable au n° 5.
- 12° Un passage en acide, semblable au n° G.
- 13° Un nouveau lessivage à la soude caustique semblable au n" 2.
- 14° Une immersion de \ 2 heures dans un bain d’acide sulfurique marquant dB.
- 1 o° Un lavage et un dégorgeage.
- Ce procédé donne un assez beau blanc, mais n’est point rationnel ; car la chaux qu’on emploie d’abord forme un savon insoluble, dont une partie seulement est enlevée par les opérations mécaniques du dégorgeage, tandis que l’autre restant intimement unie au tissu s’oppose à l’action du chlorure, en sorte que ce n’est qu’après avoir subi les immersions ( nos 5 et 6 ), et enfin le lessivage ( n° 9 ) que le chlore exerce son action sur les parties que réservait ce savon calcaire.
- AUTRE PROCÉDÉ.
- première phase. — Dégraissage.
- § /|56. Les pièces de calicot sont :
- 4° Trempées et bien foulées dans l’eau.
- 2° Mises en fermentation dans une cuve avec un peu d’eau tiède, à laquelle on ajoute, pour favoriser cette fermentation , une certaine quantité de son, avec la précaution de maintenir les pièces constamment submergées durant l’opération , qui est de 40 à 50 heures en été, et de 3 à 5 jours en hiver.
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- PROCÉDÉS DE B LANCil. EMPLOYÉS DANS LES FABRIQUES. 69
- 3° Foulées et dégorgées.
- 4° Soumises à l’action d’une lessive de soude caustique de I ",8 dB durant 30 à 36 heures.
- 5° Foulées et lavées.
- seconde phase. — Décoloration.
- 6° Immergées durant 43 à 60 minutes dans un bain de chlorure de chaux à 1° AB.
- 7° Passées en acide sulfurique.
- 8° Soumises à l’action d’un deuxième lessivage do 30 à 36 heures, à la soude caustique à 1°,5 dB, dans laquelle on verse 9 kil. de savon vert pour 1,000 mètres de calicot.
- 9° Foulées et lavées.
- I 0° Soumises à l'action d’un troisième lessivage de 25 à 30 heures, à la soude caustique à 1° AB.
- 1 10 Foulées et lavées.
- 12" Soumises à l'action d’un quatrième lessivage de 25 à 30 heures à la soude caustique à 1° AB.
- 1 3° Foulées et lavées.
- 1 4° Immergées dans le chlorure de chaux à 1°, comme au n° 6.
- 15° Immergées dans l’acide sulfurique à 2°, et tiède.
- La dépense approximative de ce procédé est de 356 fr. pour 10,000 mètres de calicot 3//i, savoir :
- 85 kil. sel de soude, § 100, à 70 fr. les 100 kil. 59 5
- 40 — do chaux................................. 1 »
- 90 —- savon vert à 105........................ 94 5
- 50 — chlorure de chaux........................ 1 6 »
- 50 — acide sulfurique à 20........... .... 10 »
- 181
- Plus pour main-d’œuvre, combustible, intérêt du
- capital, amortissement..................... 175
- Somme égale...........fr. 356
- Ce qui fait environ 1 fr. 75 c. par pièce de 50 mètres. Et ce chiffre approximatif est la condamnation de ce procédé,
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- UE LA FABRICATION EN GENERAL.
- puisque le blanchiment d’une pièce de 50 à 60 mètres revient aujourd’hui à moins de 1 fr.
- Outre ce défaut capital, ce procédé en a un autre, celui de soumettre les toiles à la fermentation que tous les fabricants éclairés condamnent généralement, par la raison que, si les pièces ne sont pas suffisamment submergées, la température de la masse s’élevant considérablement, surtout au centre , il en résulte une espèce de pourriture, tandis que s’il y a trop d’eau, la fermentation s’établit mal et l’on manque le but qu’on s’était proposé , celui de faire disparaître le gluten et les autres matières amylacées qui peuvent se trouver sur le tissu. Un inconvénient non moins grave, c’est que le corps gras qui existe sur la toile subissant dans le second cas la modification dont il a été fait mention § 337, fonctionne comme un véritable mordant, et occasionne ainsi des accidents qui ne sont jamais à craindre quand les tissus sont traités directement par la chaux, parce que le corps gras se saponifie aussitôt, et que le mordant organique ne peut plus prendre naissance une fois que les acides gras sont formés.
- Dans ce procédé, d’ailleurs, les opérations ne sont point conformes aux principes que nous avons posés ; aussi n’est-ce que par le concours du savon vert et des lessives répétées que le tissu se dépouille de ses impuretés , et si les bains de chlorures se trouvent à une si grande distance l’un de l’autre, c’est sans doute parce qu’on a observé qu’en procédant à l’immersion dans le chlorure, immédiatement apres la première lessive, on facilitait toutes les opérations subséquentes , le passage en acide qui suit l’immersion dans le chlorure ayant pour effet, non seulement de déplacer le chlore, mais encore de décomposer les savons .calcaires ; et les lessives suivantes, en enlevant ces corps, de rendre la matière colorante plus impressionnable à l’action décolorante du chlore qui clôt les opérations.
- Nous pourrions donner ici une foule de procédés qui s’emploient encore dans quelques fabriques d’indienne, sans être
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- PROCÉDÉS DE BLANCH. EMPLOYÉS DANS LES FABRIQUES. 71
- revie: basés sur aucun principe, mais nous préférons en faire connaître deux autres tout-à-fait différents des précédents : le eluit premier est dû à M. Gréau, de Troyes (1) ; le second, plus ricanl généralement employé, est basé sur les principes que nous si lf avons développés § 430 à 432, et que quelques fabricants ;urec désignent souâ le nom de blanchiment américain.
- , il e
- ym PROCÉDÉ GRÉAU.
- 5 première phase. — Dégraissage.
- i ma ncoi te si t ili dant indr pare orga 3ide:
- DOÉ
- st-Cf
- qui
- hlo
- j’esi
- ier-
- ive,
- &
- ’et.
- § 457. Les pièces sont :
- Immergées durant 48 à 5'0 heures dans une eau de soude à 2U alcalimétriques ( contenant 0u-,6 de soude pure pour 300 kil. d’eau, ou 1 kil. de soude à 60° pour la môme quantité d’eau).
- 2° Foulées et lavées.
- 3° Soumises durant 24 heures à l’action d’une première lessive de soude caustique à 12° alcalimétriques.
- 4° Foulées et lavées.
- 5° Immergées durant | heure dans un bain de chlorido hydrique formé de 50rt- d'acide pour I 0 litres d’eau.
- 6° Foulées et lavées.
- 7° Soumises durant 24 heures à l’action d'une lessive de soude < caustique à 9° alcalimétriques.
- 8° Foulées et lavées. *
- 9° Immergées dans le bain de chloride hydrique , comme dans l’opération n° 5.
- 10° Soumises durant 12 heures à l’action d’une lessive de soude caustique à 6<>.
- set
- (1 ) Mémoire sur la destruction des tissus dans le blanchiment et la teinture, par M. Gréau aîné. Troyes, 1835.
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- PE PA FABRICATION EN GÉNÉRAL.
- seconde phase. — Décoloration.
- \ 10 Immergées à deux reprises successives, durant 3 heures chaque fois , savoir : \0 dans un bain de chlorure de chaux à 4°, 5 chlorométrique ; 2° dans un bain de chlorure de chaux à 1° chlorométrique.
- !2fl Soumises durant 4 heures à l’action d’un bain chaud de soude caustique à 4° alcalimétriques, maintenu durant 2 heures à l’ébullition.
- 13° Immergées dans un bain do chloride hydrique, semblable à ceux des opérations 5 et 9.
- I 4° Foulées et lavées.
- 15° Immergées durant 3 heures dans un bain de chlorure à 3/4 de degré chlorométrique.
- 10° Moulinées dans un bain de chloride hydrique formé do \ litre chloride hydrique du commerce pour 300 litres d’eau.
- 17° Enfin , parfaitement foulées et lavées.
- M. Gréau a été le premier à ériger en principe que l’immersion des tissus dans le chlorure ne doit se faire que lorsqu’ils sont dépouillés de toutes les matières grasses qui les accompagnent : aussi voit-on que dans son procédé les opérations du dégraissage', toutes faites d’après des principes rationnels, tendent à saponifier peu à peu les graisses et à mettre en liberté par des immersions dans le chloride hydrique les acides gras qu’ils contiennent, et qui en se combinant avec les corps résineux, favorisent la dissolution de ces derniers dans les lessives alcalines dont les immersions acides sont toujours suivies. Enfin le procédé qui nous occupe présente encore cette particularité, que les pièces en sortant du chlorure (opér. 11), au lieu d’être traitées par un acide qui met le chlore en liberté, § h51 , sont bouillies dans une lessive de soude (opér. 12), qui a pour effet d’opérer une double décomposition, et finalement de mettre les tissus en contact à chaud avec un chlorure de soude, qui contient pour excès de base toute la chaux déplacée par la lessive.
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- PROCEDAS DE BLANC H. EMPLOYES DANS LES FABRIQUES. 73
- PROCÉDÉ AMÉRICAIN. première phase. — Dégraissage.
- § /|58. Les pièces écrues (éch. 1) reçoivent :
- 1. Calicot écrit.
- 1° Un premier lessivage à la chaux do 20 à 24 heures (30 kil. de chaux pour 1,000 pièces de toile écrue 3/4 , et au lieu d’eau le résidu de la lessive n° 3 ).
- 2ü Un lavage et un dégorgeage.
- 3° Un second lessivage à la chaux, do môme durée que le premier et de môme composition.
- L’éch. 2 représente l’état des pièces après la 3e opération.
- 9. Calicot qui a subi les opérations f à 4.
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- 4° Un lavage et un dégorgeage.
- 5° Une immersion dans l’acide sulfurique tiède à 10 AB 6° Un lavage et un dégorgeage.
- L’éch. 3 présente l’état des pièces après la 6° opération.
- 3. Calicot qui a .subi les opérations 1 à G.
- 7° Un lessivage au carbonate sodique ( formé du résidu do la lessive n° 12, additionnée d’environ 1 kil, de carbonate sodique pour 1,000 mètres de toile 3/4 ).
- 8° Un lavage et un dégorgeage.
- L’éch. 4 présente l’état des pièces après la 8e opération.
- 4. Calicot qui a subi les opérations 1 à 8.
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- PROCÉDÉS DE BLANCH. EMPLOYÉS DANS LES FABRIQUES. 75
- seconde phase.—Décoloration.
- 9° Une immersion de quelques heures dans une solution de chlorure de chaux qui ne marque pas à l’aréomètre , et qui, saturée par un acide, ne laisse pas dégager de chlorure.
- 4 0° Une immersion en cliloride hydrique à 2° AB,
- 4 10 Un lavage et un dégorgeage.
- L’éch. 5 présente l’état des pièces après la 11° opération.
- 5. Calicot qui a subi les operations 1 à 11.
- 12° Un second lessivage au carbonate sodique de 24 heures. A la quantité d’eau necessaire au lessivage de 1,000 mètres calicot, on ajoute 4k,5 de carbonate sodique.
- 4 3° Un lessivage et un dégorgeage.
- 1 4° Une seconde immersion dans le chlorure de chaux, semblable à l’opération n° 9.
- 15° Une seconde immersion dans l’acide à 2° AB , semblable à l’opération n" 4 0.
- 4 6° Un lavage et un dégorgeage parfaits.
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- 76 DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- Les éch. 6 et 7 présentent l’état clés pièces après la 16° opération.
- Calicot qui a subi les operations 1 ù 10.
- 9. Jaconas qui a subi les opérations 1 si fl O.
- Dans ce procédé, le montant approximatif de la dépense pour 10,000 mètres est, savoir :
- 10,000 mètres est, savoir :
- Pour 60 kil. de chaux............................. 1
- — 55 — sel de soude......................... 37
- — 5,5 — chlorure de chaux.............. 16
- acide................................. 10
- Main-d’œuvre et frais généraux......... 150
- Total.
- fr. 214
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- PROCÉDÉS DR BLANCII. EMPLOYÉS DANS LES FABRIQUES. 77
- Ce qui fait 1 fr. 07 c. par pièce de 50 mètres. Les frais généraux ayant été calculés sur une petite échelle , sont cotés beaucoup trop haut; ils.sont infiniment moindres quand on opère sur une grande partie de calicot, et surtout quand on rend les opérations continues.
- De tous les procédés que nous avons examinés, c’est le seul où l’on fasse usage de carbonatesodique au lieu de soude caustique ; l’emploi de ce sel dans le blanchiment a ramené cette opération à celle qui se pratique dans les ménages au moyen des cendres, qui, comme on le sait, ne renferment que du carbonate potassique. Les carbonates alcalins, contrairement aux idées que l’on s’en était faites d’abord, dissolvent les corps gras saponifiés tout aussi bien, si ce n’est plus promptement que ne le font leurs bases à l’état caustique , et ont sur celles-ci l’avantage de faire subir aux savons calcaires qui auraient échappé à l’action décomposante des acides une double décomposition qui les transforme en savons à base potassique ou sodique soluble et en carbonate calcique insoluble. Ils remplissent si bien ce rôle, que MM. Dana et Prince , qui ont été les premiers à proclamer les heureux effets de la chaux, et à substituer les alcalis carbonatés aux alcalis caustiques, n’ont employé aucun acide dans la première phase de leur procédé de blanchiment (voyez Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, t. X, p. 301). Les toiles, en sortant d’un lessivage de 12 heures à la chaux, sont soumises pendant 20 heures à l’action d’une lessive de carbonate potassique, et de cette dernière passent immédiatement, après avoir été dégorgées et lavées-, dans un bain de chlorure de chaux à |° Æ, puis en acide, etc.
- Il est aussi àremarquer que, dansce procédé, les bains acides qui succèdent aux immersions dans le chloïure, au lieu d’avoir pour base l’acide sulfurique, sont formés de chloride hydrique. On pourrait croire que l’emploi du chloride'hydrique a simplement pour objet de donner naissance à un sel calcique très
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- soluble, et d’exercer sur le tissu une action moins destructive. Mais l’expérience fait voir que là ne se borne pas son effet ; car si l’on prend une solution de chlorure de chaux qui ne soit pas récente , et qu’on en mesure 2 volumes égaux pour en déterminer ensuite les titres chlorométriques au moyen de deux solutions d’acide arsénieux d’égale force, mais faites, l’une avec le chloride hydrique, l’autre avec l’acide sulfurique étendu', on trouvera toujours au chlorure de chaux un titre plus élevé quand on l’essaiera avec la première de ces dissolutions arsénieuses. On ne peut s’étonner de ce résultat quand on fait attention que le chlorure de chaux renferme une certaine quantité de chlorate et même un sel particulier non encore étudié, qui se décomposent par le chloride hydrique , en développant un pouvoir décolorant proportionnel à l’oxigène qu’ils renferment, ainsi que le prouve du reste l’équation ci-après :
- Le chlorate calcique €1 Ca en contact avec Cl12 H!î = H10 O6 4- Cl2 Ca -f- Cl12 qui devient libre.
- Ce procédé, qu’on l’envisage sous le point de vue économique ou sous celui du principe même sur lequel il est basé, est bien plus avantageux que le précédent; néanmoins il est susceptible de recevoir des modifications qui, pour être en apparence assez légères, n’en ont pas moins d’importance. Ainsi, au lieu de donner consécutivement deux lessivages à la chaux, il serait plus rationnel de faire succéder aux opérations 1 et 2 un traitement à l’acide, afin de décomposer les savons calcaires qui se sont formés, et de faire suivre ce traitement d’une lessive au carbonate sodique, qui aurait poqr effet de dissoudre les acides gras mis en liberté ; arrivant après cette opération, le second lessivage à la chaux agirait plus efficacement, puisque la chaux n’aurait plus à vaincre l’obstacle du savon calcaire qu’enlèvent toujours si imparfaitement du tissu les opérations mécaniques du dégorgeage, les seules qui séparent les deux lessivages à la chaux ( opér. 1 ët 3).
- La baisse qu’ont éprouvée les calicots a eu pour consé-
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- ictive, quence naturelle d’obliger le fabricant à introduire toute l’é-îtjcai conomie possible dans les procédés du blanchiment. Dans plu-it pas sieurs ateliers, pour réduire la dépense de la main-d’œuvre, on déter- coud plusieurs centaines de pièces à la suite l’une de l’autre, ix so- et moyennant un nombre suffisant de cylindres de traction ou î avec qui servent seulement à supporter les pièces, on les fait passer U', on Par un mouvement non interrompu de la cuve à lessive sous élevé l’appareil à nettoyer, le clapeau, par exemple, de cette ma-arsé- chine dans le bain d’acide ou de chlorure, selon l’époque de it at- l’opération, et ainsi de suite ; c’est ce qu’on appelle 1 eblanchi-tntitë nient continu, qui réalise le perfectionnement du manœuvrage,
- 5 qUj comme le procédé américain réalise celui des opérations chi-
- ît un niques.
- lent, § Æ50. On emploie depuis quelques années en Angleterre, pour
- le blanchiment, un appareil qui paraît être très économique et
- j __ pour lequel on a pris un brevet d’importation en France. Cet
- appareil que nous avons vu à l’exposition de 184/l, fonctionne
- déjà enNormandie, mais il n’est point encore, à notre connais-
- ^Ue nance en usage en Alsace. Il se compose d'une chaudière en bien
- ;ible Fi«-
- tôle a, close par un couvercle c, qui est en communication avec
- un générateur de vapeur au moyen du tube d , muni d'un ro-
- L
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- binct d. Cette chaudière communique, par sa partie inférieure, I avec un vase b également en tôle , au moyen d un tube e garni I d’un robinet e, et par sa partie supérieure , mais par un point opposé à celui où se trouve le tube d , avec le meme vase b au moyen d’un tube f muni d’un robinet/, qui plonge au fond de ce vase. Enfin, un tube g, muni d’un robinet g , met le vase a en communication avec un réservoir d’eau.
- On dispose les pièces à blanchir dans la chaudière a , où elles | reposent à une certaine distance du fond sur un disque percé de trous. On ferme les robinets e, /, g , et l’on ouvre le*robinet d. La vapeur passe alors dans le vase a , et élève la température de la lessive et du tissu à un degré de chaleur qui est en rapport avec la pression sous laquelle elle s’est elle-même produite. Quand la coction a duré 8 à 10 heures, on ouvre le robinet è, et la vapeur, pressant sur le liquide, le fait passer par le tube E dans le vase b. Une fois que tout le liquide est arrivé dans ce vase, on ferme les robinets d, /, et l’on ouvre le robinet y par lequel l’eau vient se précipiter dans le vase A, et y produit un vide en condensant une partie de la vapeur qui s’y trouve. Veut-on faire rentrer le liquide du vase b dans le vase a : il suffit d’ouvrir le robinet f pour qu’il s’y élance par le tube plongeur f. Lorsqu’au contraire on a intérêt à enlever aux toiles toute la lessive dont elles sont imprégnées, on ferme d’abord, puis on rouvre les robinets d, e ; la vapeur chauffe le liquide, et pressant ensuite sur toute la masse, la fait passer dans le vase b. Ce lavage terminé, on peut réintroduire de l’eau par le tube g, et continuer ainsi l’opération jusqu’à ce que les toiles paraissent suffisamment lessivées et lavées. Quand elles ont atteint ce point, on les fait arriver au moyen d’appareils appropriés dans des bains de chlorure de chaux, puis dans des bains acides.
- Cet appareil, outre qu’il offre l’avantage de pouvoir faire agir la lessive sur le tissu dans les conditions de pression et de température où la saponification du corps dont il est imprégné s’opère le mieux, § 437, se prête encore merveilleusement aux
- binet d. Cette chaudière communique, par sa partie inférieure, I avec un vase b également en tôle , au moyen d un tube e garni I d’un robinet e, et par sa partie supérieure , mais par un point opposé à celui où se trouve le tube d , avec le même vase b au moyen d’un tube f muni d’un robinet/, qui plonge au fond de ce vase. Enfin, un tube g, muni d’un robinet g , met le vase a en communication avec un réservoir d’eau.
- reposent à une certaine distance du fond sur un disque percé de trous. On ferme les robinets e, /, g , et l’on ouvre le*robinet d. La vapeur passe alors dans le vase a , et élève la température de la lessive et du tissu à un degré de chaleur qui est en rapport avec la pression sous laquelle elle s’est elle-même pro-
- sant ensuite sur toute la masse, la fait passer dans le vase b. Ce lavage terminé, on peut réintroduire de l’eau par le tube g, et continuer ainsi l’opération jusqu’à ce que les toiles paraissent suffisamment lessivées et lavées. Quand elles ont atteint ce
- des bains de chlorure de chaux, puis dans des bains acides.
- Cet appareil, outre qu’il offre l’avantage de pouvoir faire agir la lessive sur le tissu dans les conditions de pression et de
- s’opère le mieux, § 437, se prête encore merveilleusement aux
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- lavages à l’eau chaude ; mais si, sous ce double rapport, il mérite d’être recommandé, il ne laisse pas de présenter des inconvénients d’autant plus graves qu’il n’y peut être remédié ; car non seulement les pièces ainsi traitées, n’étant point dégorgées mécaniquement, y restent, jusqu’à la fin des opérations, imprégnées de toutes les parties insolubles qu’elles renferment, mais encore, ce qui n’est pas moins fâcheux, elles n’y peuvent subir les opérations chimiques dans l’ordre que nous avons reconnu le plus convenable pour obtenir de bons résultats : aussi est-il douteux que les toiles blanchies par ce procédé puissent servir pour tous les genres d’impression , attendu que les substances insolubles qu’elles retiennent encore doivent nécessairement produire trop souvent des effets contraires à ceux qu’on désire réaliser; peut-être est-ce pour cette raison qu’il n’est pas encore employé en Alsace.
- Tout ce que nous avons dit jusqu’ici des opérations chimiques du blanchiment s’applique au blanchiment des toiles de coton. Les tissus de chanvre et de lin sont bien aussi traités de la même manière ; mais les opérations du dégraissage doivent être beaucoup plus nombreuses ; il faut au moins , selon la qualité et la finesse des toiles, quatre lessives à la chaux, suivies chacune d’un bain acide et d’un lessivage au carbonate sodique, avant d’aborder les opérations de la seconde phase du blanchiment, celle de la décoloration.
- Lorsque les tissus sont très fins, on ajoute à la lessive, pour en augmenter la puissance, une certaine quantié de savon vert. Pourvu que les fibres de ces tissus aient été bien débarrassées du corps cireux qui les recouvre et que la matière colorante soit bien mise à nu, le blanchiment marche promptement; dans le cas contraire, on remarque , à côté de fils parfaitement blancs, des fils qui ont conservé une couleur dont on ne peut les débarrasser sans endommager plus ou moins les parties déjà blanchies.
- D’après tout ce que nous venons de dire, on voit qu’il faut,
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- pour assurer le succès des opérations du blanchiment en gé- j”
- néral :
- 1° Attaquer directement les toiles par la chaux, afin de saponifier les corps gras , de prévenir la formation d’un mordant organique, et de modifier en même temps la matière colorante inhérente au tissu, mais ne jamais oublier que les pièces ne peuvent sans danger être à la fois en contact avec l’air et avec la chaux.
- 2° Bien nettoyer les pièces à la suite de chaque traitement à la chaux, pour favoriser d’autant mieux, par cette opération mécanique , le traitement chimique qui la suit.
- 3° Décomposer le savon calcaire par un acide ( le chloride I hydrique est toujours préférable à l’acide sulfurique), trouver le degré de température et la proportion d’acide convenables pour que cette décomposition s’accomplisse sans altération du tissu, et ne point perdre de vue que le bain a en outre pour effet de dissoudre la substance résineuse et une portion de la matière colorante, en sorte qu’une fois saturé de cette dernière, ne pouvant plus, quelque soit d’ailleurs son degré d’acidité, que décomposer le savon calcaire, il doit être renouvelé.
- k° Lessiver par le carbonate sodique de préférence à la soude caustique, qui fatigue la fibre et donne toujours un blanc moins parfait. Nous tenons de M. J. Fries que les cristaux de soude, qui renferment toujours une certaine quantité de sesqui-carbonate, donnent un blanc plus pur que la soude ordinaire , qui est du carbonate neutre. Si l’on fait usage d’une soude qui contienne du sulfure, on doit se garder de laisser au contact de l’air les pièces qui présenteraient quelques taches noires dues au sulfure ferreux , qui se forme dans ce cas par la double décomposition qu’éprouve le sulfure sodique en présence de l’oxide ferreux ou ferrique (voyez notre introduction à l’Et. , § 282) ; ce sulfure, en effet, s’oxidant à l’air altérerait plus ou moins ;; la fibre ligneuse au point même où il se serait formé, ou y déposerait de l’oxide ferrique dans cet état isomérique, § 168 ,
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- où il ne peut plus rentrer en dissolution. Ce n’est pas que la soude qui contient du sulfure soit nuisible aux lessives, car s’il se trouve de l’oxide ferrique à la surface des toiles, le sulfure sodique contribue toujours à en favoriser la dissolution ; mais il faut avoir soin de passer sans retard les pièces en acide.
- 5° Immerger les pièces dans une dissolution de chlorure de chaux bien claire , afin d’éviter ces perforations qui ont lieu sur les points mêmes du tissu où s’est logé le composé insoluble que nous venons de signaler pag. 61, et en outre étendre cette dissolution d’une grande quantité d’eau, quitte à prolonger l’immersion, ou à la répéter , ou à élever la température du bain.
- 6° Employer le chloride hydrique dans tous les bains acides qui succèdent aux immersions, attendu que l’effet décolorant qui en résulte devient proportionnel au composé chloruré oxide qui se trouve sur la toile, et qu’on utilise ainsi, non pas seulement l’hypochlorite , mais encore le chlorite et le chlorate.
- 7° Donner une grande attention à l’effet du vitriolage sur les toiles, pour leur faire subir, si les oxides n’en étaient pas complètement enlevés, un nouveau passage en acide. Si cette opération supplémentaire était encore insuffisante , ce qui arrive quelquefois quand le tissu retient du fer oxidé à cet état isomérique où il est insoluble dans les acides, il ne faudrait point hésiter à imprégner les pièces d’une eau légèrement acidulée d’un mélange d’acides oxalique ettartrique, pour les vaporiser ensuite. L'oxide ferrique se trouvant alors réduit, tout le fer disparaît, et par un nouveau passage des pièces dans un bain d’acide étendu, le blanc devient parfait.
- Alors même qu’on a fait subir aux toiles toutes les opérations que nous venons de décrire et qu’elles ont atteint toute la blancheur désirable, un fabricant prudent doit toujours en soumettre une pièce prise au hasard à des épreuves qui lui garantissent le succès de certains genres d’impressions qui exigent un blanc parfait. Les corps gras, en effet, qui pourraient rester
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- sur ces pièces, y produiraient inévitablement des taches ; si on les passait, par exemple, dans unecuve d’indigo, la couleur ne I prendrait pas également bien sur toutes les parties ; si 1 on y I imprimait des fonds unis , les parties grasses, en fixant plus de 1 matière colorante, offriraient des inégalités de nuances qui di- : minuent toujours la valeur d’une étoffe ; enfin, dans les impressions genres fonds blancs, quelques unes des parties qui doi- q vent rester blanches attirant à elles la matière colorante du bain de teinture, le fabricant se trouverait dans la triste alternative ou de conserver le fond blanc avec ses taches pour ne | pas trop compromettre les couleurs , ou d’endommager plus ou moins ces dernières pour rendre aux parties tachées leur pureté primitive.
- Pour s’assurer si une partie de toiles destinées à l’impression est débarrassée de toute matière étrangère à la fibre, on en met une pièce à la suite de pièces mordancées, et on les plonge f toutes dans un bain de garance (voyez Garançage), où elle | devra d’autant moins se colorer qu’elle aura été mieux blanchie, j C’est ainsi qu’on a essayé la pureté de deux pièces qui parais- | saient également blanches et dont nous donnons ici les échan- f tillons au sortir du bain de teinture n09 0 et 10. Il est évident
- 8. Blanc ordinaire passé en garance.
- que le blanchiment de ces deux pièces n’a pas été le meme , et
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- ESSAIS DES TOILES BLANCHIES. 85
- que si l’on eût imprimé un mordant sur le n° 9 et qu’on l’eût passé dans un bain de teinture, la couleur se serait fixée non
- 9. Blanc d’impression passé en garance.
- seulement sur les parties mordancées, mais encore sur le fond du tissu.
- Ce moyen d’essai, cependant, n’indique pas toujours fidèlement les accidents auxquels est exposé le fabricant, car il arrive quelquefois que certaines taches de graisse ou de résine ont par elles-mêmes si peu d’affinité pour la couleur de la garance qu’elles n’en fixent que des quantités insignifiantes, tandis qu’au contraire ces mêmes corps gras ou résineux en absorbent une très grande quantité avec le concours d’un mordant de fer ou d’alumine. Ainsi quand des mordants sont imprimés sur des toiles de cette espèce et que l’on passe en bouse, l’excès de mordant qui s’en détache et se délaife dans le bain est attiré par les corps gras et forme avec eux des combinaisons qui non seulement attirent la matière colorante , mais encore constituent avec elle des composés très stables.
- Pour être sûr que les toiles blanchies ne subiront jamais de pareils accidents, il faut en passer une pièce dans un bain de bouse en même temps que des pièces mordancées (voyez Bousage), et après l’avoir bien nettoyée, la teindre comme les échantillons
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- n°* 9 et 10 dans un bain de garance. Si elle ne se teint pas ou qu’elle ne contracte qu’une légère teinte bien uniforme, la fibre est certainement pure de toute matière étrangère.
- Après le blanchiment, les toiles sont desséchées par des procédés divers que nous ferons connaître à la suite du blanchiment des tissus de laine et de soie.
- Blanchiment des étoffes de laine et de soie.
- ^ /l60. Les opérations auxquelles on soumet les étoffes de laine et de soie pour les blanchir ne diffèrent que par de légères modifications que nous aurons soin de signaler. Ainsi que dans le blanchiment des tissus végétaux, ces opérations se divisent en deux classes, les premières ayant pour objet de débarrasser les fibres textiles des substances grasses, cireuses ou résineuses , dont elles sont imprégnées; les secondes, de modifier la matière colorante inhérente à ces fibres , de manière aies blanchir aussi complètement que possible. Nous aurons donc encore içi à examiner les opérations du dégraissage proprement dit, et les opérations du blanchiment ou de la décoloration de la fibre textile.
- PREMIÈRE PHASE.
- § A61. Dégraissage. — Pour peu qu’on réfléchisse à ce que nuos avons dit £ 329 et 333 , on comprendra que la graisse et la substance cireuse et résineuse dont la laine et la soie sont accompagnées naturellement et artificiellement (dans ce dernier cas par suite des opérations qu’elles ont subies pour arriver de l’état brut à celui de tissu), ne peuvent en être enleveés aux mêmes conditions que des tissus de chanvre et de lin. Ainsi, par exemple, il faut renoncer à saponifier ces corps gras par les alcalis .caustiques, puisque ces alcalis, ou dissolvent en même temps la fibre de ces tissus animaux , comme la potasse ou la soude, ou la rendent impropre à attirer les matières colorant
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- comme la chaux. Pour les faire disparaître on emploie toujours le carbonate sodique (cristaux de soude) ; mais comme ce composé alcalin est insuffisant pour en saponifier ou dissoudre la totalité , on est obligé de faire intervenir le savon , qui tantôt favorise la saponification des corps gras, et tantôt agit en vertu de cette précieuse propriété que nous lui avons reconnue, de se décomposer sous l’influence de l’eau, § 3A6, p. 355 , et par ses acides gras de rendre miscibles avec l’eau des substances qui ne le sont, par elles-mêmes, ni dans ce véhicule ni même dans le carbonate sodique. Il n’y a point à douter que dans le blanchiment des laines le savon ne joue à la fois ces deux rôles et qu’on ne lui doive ainsi la disparition de la substance grasse signalée dans cette fibre par M. Chevreul, § 332. Les conditions dans lesquelles on doit faire agir ces substances alcalines et savonneuses ne sont pas non plus celles où l’on obtient le dégraissage de la fibre ligneuse ; car, au lieu d’opérer les lessivages à la température élevée où le corps gras se saponifie le mieux, on est contraint, pour ménager le tissu que l’action de l’alcali détériore et qui se contracte et se feutre d’autant plus qu’il est exposé à une plus grande chaleur, de faire ces lessivages à une température qui varie entre 60 à 65°. Les appareils au moyen desquels on dégraisse mécaniquement les tissus de laine sont également différents de ceux qu’on emploie pour le blanchiment du calicot. Les étoffes de laine ont besoin d’être tendues en passant au travers d une dissolution alcaline chaude : autrement elles se contractent inégalement, et les tiraillements qui en résultent en divers sens nuisent a la qualité et à la beauté du tissu. A cet effet, on se sert le plus généralement de la machine à foularder ou à plaquer les pièces, pour imprégner ces dernières de la dissolution alcaline ou du savon alcalin. Chaque pièce passe une ou plusieurs fois au fond d’une auge remplie de lessive, en ressort pour être exprimée par deux rouleaux qui font retomber dans 1 auge 1 excédant de la lessive, et s’enroule sur des cylindres mobiles en bois.
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- a , a. Bâtis en bois.
- c. Caisse renfermant l’eau ou l’eau alcaline. n, n, n, n, n. Roulettes en bois reposant sur des coussinets en cuivre, au moyen desquelles on fait circuler les pièces dans le liquide pendant un certain temps.
- Fig. 23.
- d, n. Deux rouleaux en cuivre qui font à la fois fonction de rouleaux de traction et de rouleaux presseurs', et sur lesquels on enroule quelques mètres de calicot pour mieux exprimer les tissus à leur sortie du bain. Le rouleau supérieur est muni d’un levier e et d’un contre-poids qui donnent les moyens d’augmenter la pression ù volonté.
- f. Rouleau mobile en bois glissant dans une rainure, sur lequel s’enroulent les pièces, qu’il a pour objet de tendre en les pressant plus ou moins, selon qu’on fait agir le poids qui se
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- trouve à l’extrémité du levier i, qui est en communication avec lui. (Ordinairement on ne fait point usage du levier i dans les passages en savon. )
- h. Règle élargisseuse munie de rainures divergentes pour tendre le tissu avant qu’il arrive sur les cylindres et éviter ainsi les plis.
- Quand les pièces ont été suffisamment en contact avec la lessive, on fixe les rouleaux (Bobines) où elles sont enroulées par I\ ou 6, suivant la longueur de l’étoffe, sur les coussinets du point r, puis on met la machine en mouvement. Ces pièces , dont la tête est en communication avec les rouleaux de traction d, d, pénètrent dans la caisse remplie d’eau chaude , y circulent pendant un certain temps et arrivent enfin sur les cylindres expresseurs d, d, pour s’enrouler ensuite sur le rouleau f , d’ou elles sont enlevées, ou pour recevoir un second lavage, ou pour subir un nouveau lessivage, selon le degré de blancheur qu’elles ont atteint.
- Il est évident qu’il faut plusieurs passages au carbonate so-dique seul, puis à ce même carbonate mélangé de savon, pour enlever tous les corps gras qui se trouvent sur la laine ; ce n’est donc qu’après avoir donné à celle-ci un nombre suffisant de lessives, suivies de lavages à l’eau chaude, qu’on passe aux opérations qui constituent la seconde phase du blanchiment.
- SECONDE PHASE.
- § 462. Décoloration.— Quand les soies et les laines sont débarrassées autant que possible des corps gras, résineux ou cireux qui les accompagnaient, on les expose à l’action de l’acide sulfureux qui les blanchit ; mais cet agent, au lieu d’agir comme le chlore et de transformer les matières colorantes en d’autres produits plus ou moins colorés que le tissu ne retient plus, ne fait que s’unira la matière colorante propre au tissu pour former avec elle une combinaison intime incolore qui reste adhérente à
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- la fibre. La décoloration des tissus par l’acide sulfureux rentre dans les phénomènes qu’a constatés M. Chevreul, en faisant réagir le sulfide hydrique sur l’hématine , et dans ceux qu’ont observés M. Lafolie et M. Kuhlmann, en mettant l’acide sulfureux en contact avec les couleurs végétales , § 361, p. 386 et 387 5 il nous est impossible de les expliquer dans l’état actuel de la science.
- On emploie l’acide sulfureux à l’état de gaz ou en dissolution dans l’eau, § 9-10. m
- § 463. Décoloration par l’acide sulfureux gazeux. — Il se-ràit difficile d’assigner l’époque à laquelle on a appliqué pour la première fois au blanchiment des étoffes de laine, de soie, et même de la paille, l’action de la vapeur qui résulte de la combustion du soufre. Cette opération dite soufrage est si simple que tout le monde peut l’exécuter ; il suffit de mettre dans une chambre, ou dans une caisse, ou enfin dans un cuveau en bois hermétiquement fermé et dans lequel on étale les étoffes que l’on veut ainsi blanchir, un vase plein de soufre qu’on enflamme. L’acide sulfureux, produit de cette combustion, se trouvant en présence des tissus qu’on a eu soin d’humecter, réagit sur eux et les décolore. L’essentiel est de pi\ ndre les dispositions les plus favorables à la bonne distribution des tissus et à la combustion la plus parfaite du soufre , sans perte d’acide sulfureux et sans accident pour l’étoffe ; enfin, il faut s’arranger de manière à utiliser l’acide sulfureux avec le moins de perte possible.
- On peut consulter avec avantage à ce sujet l’ouvrage de M. Darcef, sur cette matière.
- Tous fondés sur le même principe, les appareils employés au soufrage sont de deux espèces : dans les uns la combustion du soufre se fait aux dépens de l’oxigène de la chambre ; dans les autres elle s’effectue par l’introduction d’une certaine quantité d’air extérieur.
- Nous donnons ici deux figures qui représentent les deux systèmes d’appareils que nous avons vu employer.
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- La fig. 2h représente la coupe verticale d’une chambre d’environ 5 mètres de côtés, et de 6 mètres de hauteur. Laporte de cette chambre se ferme hermétiquement, et aux angles supé-
- Fig. 24.
- rieurs a, a, se trouvent des ouvertures munies de clapets , à l’aide desquels on peut renouveler l’air. Aux angles inférieurs b, b, existent deux autres ouvertures qui se ferment avec des
- Fig. 25.
- lesquelles on peut introduire à volonté un vase
- rempli de soufre enflammé. Dans l’intérieur de cette chambre
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- I)E LA FABRICATION EN GENERAL.
- dallée on fixe solidement 16 poutrelles p, p, qui sont rangées deux par deux en quatre étages. Sur chacune de ces poutrelles et dans toute leur longeur, à Zi et 5 centimètres de distance, sont implantées des chevilles en bois v, v, de 7 à 8 centimètres delongueur, munies à leur extrémité d’un petit bourrelet, et qui, légèrement divergentes, permettent de tendre les pièces d’une poutrelle à l’autre, sans qu’elles puissent ni glisser ni tomber. La fig. 25 représente une coupe horizontale de l’un des quatre étages mentionnés, p, p, p, p, sont les poutrelles, et v, v, v, v, les chevilles de tension. On coud ensemble les pièces que l’on veut soufrer, on en attache un des bouts à la cheville située à l’un des angles de la poutrelle de l’étage supérieur, puis on fait passer l’étoffe derrière la première cheville du râtelier qui lui correspond et dont la denture diverge en sens'opposé au premier. On la ramène à la seconde cheville , du premier râtelier, de celle-ci à la seconde du second râtelier, et ainsi de suite jusqu’à ce que les râteliers formés par les quatre poutres soient complètement garnis. Après avoir répété successivement la meme opération sur les étages inférieurs , on ferme hermétiquement la chambre, dans laquelle on introduit, par les ouvertures b, b, les terrines où se trouve le soufre allumé. On referme aussitôt ces ouvertures, et le soufre brûle aux dépens de l’oxigène pendant que l’acide sulfureux qui résulte de cette combustion se dissout dans l’eau dont le tissu est imprégné, et, pénétrant dans les pores du tissu, y exerce alors son action sur la matière colorante.
- Cette opération n’est pas aussi économique qu’elle est simple; elle entraîne inévitablement de grandes pertes d’acide sulfureux. Le soufre, en brûlant, dilate l’air delà chambre et le force à passer au dehors par les issues qui existent toujours en plus ou moins grand nombre, malgré toutes les précautions que l’on prend pour les calfeutrer. Cet air entraîne mécaniquement avec lui une certaine quantité d’acide, et celui qui reste dans la chambre après l’opération est encore perdu, puisqu’on
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- tngées trelles ;ance, êtres !t qui, d’une liber, [uatre v, v, e l’on ude à i fait li lui premier,
- : j usaient ît la aoti-.ver-1 re-oens jette , et, tion
- pie; Ifu-; le en ons ue-s te ’on
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- doit l’expulser pour que les ouvriers appelés à enlever les pièces soufrées et à commencer une nouvelle opération puissent le faire sans danger. Cet inconvénient n’est pas le seul : à moins d’avoir à sa disposition deux chambres de cette espèce , l’établissement qui fait usage de ce procédé a toujours à souffrir d’intermittences de travail plus ou moins préjudiciables à ses intérêts. Enfin , la combustion du soufre ainsi allumé à la partie inférieure de la chambre est souvent étouffée, et l’acide sulfureux, plus dense que l’air, ne se répand pas uniformément dans toutes les parties de la pièce.
- Pour assurer sous ce rapport les bons résultats de l’opération , il suffirait, selon nous, de placer au-dessus et en dehors de la chambre un foyer au-dessus duquel passerait un canal en terre recourbé, dont l’une des branches descendrait jusqu’à la partie moyenne de cette chambre, tandis que l’autre déboucherait à la partie supérieure. La combustion du soufre s’opérant dans ce local et sur le point correspondant au foyer, un courant s’établirait nécessairement, et l’acide sulfureux se répandrait sur les pièces de l’étage le plus élevé à l’étage inférieur, tandis que l’air qui occuperait la région moyenne arriverait continuellement au foyer de combustion et l’alimenterait.
- Les deux figures que nous donnons ici représentent l’appareil à soufrer qui est en activité dans la maison de M. D. Kœchlin : il consiste en deux chambres accouplées d’inégale grandeur.
- La jicj. 26 représente à la fois l’élévation de l’une des chambres et la coupe verticale de la plus petite.
- La fuj. 27 la coupe horizontale des deux chambres à la hauteur du premier étage , où l’on arrive par l’escalier h et par les portes qui se trouvent en face l’une de l’autre.
- a. a. Foyer en briques, surmonté d’un tuyau de cheminée i, en communication avec l’extérieur. Ce foyer sert à chauffer l’air des chambres.
- b. Tiroir destiné à faire pénétrer l’air chaud dans l'intérieur de la chambre, et que l’on ferme dès que l’on veut faire brûler le soufre.
- c. Registre en tôle pour régler de l’extérieur l’introduction de l’air chaud dans la chambre à soufrer.
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- df, la fabrication en général.
- d, d. Cheminées placées aux angles delà chambre , et dans lesquelles a lieu la combustion du soufre.
- Fig. 26.
- e, e. Portes par lesquelles on introduit les capsules remplies de soufre dans les cheminées ci-dessus.
- Fig. 27.
- fj f> f> />/) /i /• Solives scellées dans les parois du mur, sur lesquelles reposent les perches en bois g, g, g, qui servent à suspendre les pièces. h. Escalier qui conduit à l'étage supérieur.
- Lorsque les pièces sont suspendues dans ces chambres et que les portes en sont bien fermées, on y fait arriver de l’air chaud jusqu’à ce que la température en soit élevée de 25 ou
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- 30° ; on ferme alors le registre c, et l’on introduit les capsules de soufre par les ouvertures <?, e ; le gaz sulfureux qui se répand dans l’air se combine à la fois à l’eau dont les tissus sont imprégnés, et à celle que l’air contient à l’état gazeux.
- Une partie des inconvénients que nous avons signalés dans l’appareil précédent se retrouvent encore dans celui-ci ; on perd également de l’acide sulfureux toutes les fois qu’il faut retirer les pièces qui sont dans la chambre. Cependant, quoique d’une construction plus dispendieuse, il lui est préférable en ce que le manœuvrage des pièces est plus facile, que l’emploi de l’air chaud favorise l’action de l’acide sulfureux, et que le fourneau placé entre les deux chambres peut au besoin fonctionner comme fourneau d’appel et activer le renouvellement de l’air des chambres lorsqu’on veut y entrer.
- Quel que soit le mode de soufrer avec le gaz sulfureux, il faut avoir soin d’isoler les pièces du foyer où se forme l’acide sulfureux, au moyen de toiles d’emballage légèrement humectées. Sans cette précaution, surtout si l’on employait du soufre brut, les impuretés qu'il renferme, en se déposant sur l’étoffe , l’endommageraient, plus ou moins.
- § ll6h. Acide sulfureux liquide. — C’est d’Oreilly ( Annales des arts et manufactures , t. V, p. h h, germinal an ix) , qui le premier , à notre connaissance , a proposé de substituer l’acide sulfureux liquide à l’acide gazeux, tel qu’on l’emploie depuis des siècles. Dans son travail cet auteur traite deux questions distinctes : il examine la préparation de l’acide sulfureux liquide qui nous a déjà occupé, et sur laquelle nous croyons inutile de revenir, et il démontre quelles sont les opérations préalables qu’on doit faire subir aux laines avant de les soumettre a 1 action de cet acide ; il est ainsi conduit à établir la nécessité de commencer par enlever, au moyen du carbonate potassique, du savon et de l’eau tiède , tous les corps gras dont la laine est imprégnée avant de la mettre en contact avec 1 acide sulfureux ; c’est alors seulement qu’il conseille d’immerger les pièces dans
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- une caisse remplie d’eau saturée de cet acide. Selon lui, une immersion de k heures , durant lesquelles les pièces sont moulinées comme nous l’avons ditt. II, p. 64, donne un blanc beaucoup plus pur que le procédé précédent. D’après les résultats qu’en a obtenus d’Orcilly, on est surpris que ce procédé n’ait pas été adopté ; nous ne connaissons qu’un fabricant qui 1 ait employé, et encore d’une manière onéreuse , puisqu il fixait l’acide sulfureux des chambres à soufrer sur des cristaux de soude, pour produire du sulfite sodique qu’il décomposait ensuite sous l’influence d’une certaine quantité d’eau par la proportion d’acide sulfurique nécessaire pour le transformer en sulfate sodique et en gaz sulfureux qui, tous deux, restaient en dissolution.
- Pour la préparation du gaz sulfureux , il n’y a pas , selon nous, de procédé plus économique*, plus facile et plus à la portée de tout le monde que celui que nous avons indiqué ^ 9 c , et qui consiste à calciner un mélange de sulfate fenique et de soufre. Comme cette calcination se fait au-dessous du rouge sombre, toute espèce de vase'.de fonte peut servir à l’effectuer; mais la forme la plus convenable est celle du cylindre. On pourrait même appliquer à cette préparation l’appareil affecté à la fabrication de l’acide nitrique dans des cylindres de fonte dont plusieurs ouvrages de chimie, et notamment le traité de M. Dumas, donnent la description. Une seule modification devrait y être apportée: ce serait d’employer des cylindres plus longs d’environ 50 centimètres ; on y introduirait d’abord par la partie antérieure, c’est-à-dire du côté qui donne issue au gaz, une couche de sulfate ferrique d’une longueur de 20 à 30 centimètres , et le reste serait rempli d’un mélange de ce sel et de soufre dans les proportions indiquées § 19. Ces cylindres devraient être chauffés de telle sorte que la partie où se trouverait le sulfate ferrique pur ressentît la première l’action du feu, afin qu’à mesure que la chaleur atteindrait le mélange, le soufre qui se volatiseraitpût rencontrer une couche de sulfate ferrique
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- chaude, et réagir sur elle pour produire du gaz sulfureux. Il va sans dire que le gaz, au sortir du cylindre, devrait être dirigé au fond d’un tonneau laveur, rempli de paille ou de mousse humectée, pour de là se rendre dans les appareils les plus propres à opérer sa dissolution par l’eau, une caisse munie d’un agitateur, une cheminée, ou une cascade chimique. (Voyez ce qui a été dit au sujet de la dissolution du chlore , §17). En opérant sur 1,500 grammes sulfate ferrique censé pur, et 1,000 soufre on obtiendrait 3/i0 litres gaz sulfureux à 0° et 0°,76 de pression : or, comme l’eau dissout à la température ordinaire Zi3 fois son volume de gaz sulfureux, avec cette quantité de gaz on aurait de quoi saturer 79 litres d’eau.
- Il est probable que ces faits, éveillant l’attention des fabricants et des blanchisseurs , les détermineront à remplacer le procédé généralement en usage par un autre qui consisterait simplement à immerger dans l’eau saturée d’acide sulfureux les étoffes de laine et de soie qu’il s’agirait de blanchir; mais pour que ce procédé de blanchiment donnât des résultats satisfaisants , il serait nécessaire de porter le bain à la température de 28 à 32°, et de n'y dissoudre que la quantité de gaz suffisante pour que la chaleur n’en déterminât pas un dégagement qui, en même temps qu’il serait une véritable perte, incommoderait plus ou moins les ouvriers et compromettrait le succès de l’opération. Pour atteindre le degré convenable de saturation, le fabricant doit saturer d’abord de gaz une certaine quantité d’eau à la température ordinaire, puis chercher le rapport d’après lequel cette solution devra être mélangée avec une nouvelle quantité d’eau ordinaire pour que le bain porté à la température à laquelle on y plongera les pièces ne laisse dégager d’autre gaz que celui qui s’exhale par la tension du liquide.
- Quand les étoffes ont été suffisamment dégraissées et décolorées àl’acide sulfureux, on leur donne toujours, surtout quand il s’agit de tissus chaîne coton, un azurage qui a pour effet
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- d’en rehausser le blanc ou plutôt de masquer la teinte jaunâtre qu’elles conservent ordinairement. 11 y a quelques années cette coloration bleue se donnait au moyen d’une préparation qui avait pour base le cuivre ; mais ce mode d'azurer a été abandonné du moment qu’on a reconnu les accidents graves qui en sont souvent la conséquence; plus d’une fois, en effet, on a constaté que des étoffes ainsi traitées, et qui avaient été imprimées avec tous'les soins possibles, présentaient, après leur vaporisage (voyez ce mot), sur les parties réservées du tissu, des taches plus ou moins foncées , que M. Chevreul attribue à la présence du cuivre ( voyez l’important travail que ce savant a publié dans les Gompies-rendus de VAcadémie , 1837, et voyez aussi l’article Vaporisage des laines). Aujourd’hui c’est le carmin ou l’acétate d’indigo seul ou mélangé d’alumine dont se sert pour l’azurage.
- Après avoir fait connaître les agents et appareils employés au blanchiment des laines, nous allons mettre en parallèle quelques uns des procédés dont on fait l’application en grand dans les fabriques, pour les comparer et nous arrêter à ceux qui nous paraissent le plus convenables sous le triple rapport de l’économie, de la promptitude de l’exécution et de la qualité du produit.
- Supposons qu’après avoir été grillées ou flambées et lavées à l’eau,. 40 pièces de 45 mètres chacune aient été enroulées par 4 sur 10 rouleaux ( on les enroule quelquefois par 5 ou 6, mais le manœuvrage en est alors plus difficile), ces pièces passent alors :
- 1° A trois reprises dans un bain formé de 11 kil. carbonate so-dique et de 2,8 , savon chauffé à 40°, auquel on ajoute 300 grammes de savon après le premier passage de chaque rouleau.
- 2° A deux reprises dans une eau chauffée à 40°.
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- 3« A trois reprises dans un bain (I) formé de 11 kil. cristaux do soude , chauffé à 50“, auquel on ajoute, pour lui conserver sa force , 300 gr. de cristaux de soude après le premier passage de chaque rouleau.
- 4° Durant 12 heures au soufroir, où l’on brû'e 250 grammes de soufre par pièce, ou 1 1 kil. pour la décoloration des 40 pièces.
- 5° A trois reprises dans un bain contenant 1 3 kil. 5 cristaux do soude, chauffé à 50°, auquel on ajoute 300 grammes de cristaux de soude après le premier passage de chaque rouleau.
- 6° Une seconde fois au soufroir, comme au n° 4.
- 7° A trois reprises dans un bain de cristaux do soude à 50* , comme au n° 5 (2).
- 8° A deux reprises dans une eau chauffée à 40°.
- 9° Une troisième fois au soufroir durant 12 heures (opér. 4 et 6).
- 1 0° A deux reprises dans l’eau tiède, puis à l’eau froide.
- 11° A l’azurage, qui s’opère parleur passage dans une eau colorée de carmin d’indigo , § 390, p. 451 , ou d’acétate d’indigo , au degré d’intensité que désire le fabricant.
- (1) Comme la caisse décrite plus haut contient 250 à 300 litres d’eau , le bain renferme 45 à 50 grammes de sel par litre d’eau.
- (2) Au lieu de peser et de dissoudre le savon et les cristaux de soude qu’on ajoute pendant l’opération, on a des dissolutions titrées de ces corps, dont on mesure des volumes correspondants aux poids qu’on devrait employer de ces substances ; à cet effet :
- Dans 100 litres d’eau chaude on fait'
- dissoudre
- 19kil',500 carbonate sodique cristallisé,
- Et dans 100 kil. d’eau bouillante 18 kil. savon de Marseille.
- Pour avoir le bain de soude.
- \ Pour avoir le bain de savon.
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- AUTRE PROCÉDÉ.
- ^ Zl65. Quand les pièces sont grillées et nettoyées à l’eau tiède, on les fait passer :
- 4° Durant 10 à 20 minutes dans un bain chauffé à 50°. auquel on ajoute 6 litres bain de soude pour chaque rouleau de 4 pièces.
- 2" Durant 15 à 20 minutes dans un bain de savon chauffé à 50°, auquel on ajoute 6 litres bain de savon pour chaque rouleau de 4 pièces. <
- 3° Durant 8 à 10 heures au soufroir, où l’on brûle environ 7 kil. de soufre pour 40 pièces.
- ' 4° Durant 10 minutes dans un bain de carbonate de soude chauffé à 45°, auquel on ajoute 1 litre bain de soude pour chaque rouleau do 4 pièces.
- 5° Durant 20 minutes dans un bain de savon chauffé à 50° et entretenu avec 4 litres bain de savon pour chaque rouleau.
- 6° Dans une cuve à roulettes remplie d’eau tiède, afin de bien les dégorger.
- 7° Durant 8 à 10 heures au soufroir, comme au n° 3.
- 8° Durant 10 minutes dans un bain de carbonate sodique, comme au n° 4.
- 9° Durant 20 minutes dans un bain de savon , comme au n" 5.
- 10° Dans un bain d’eau tiède, afin de bien dégorger les pièces.
- 11° Une troisième fois au soufroir, comme au n° 3.
- 12° Durant 20 minutes dans un bain de carbonate sodique, comme au n» 4.
- 13° Dans une cuve à roulettes remplie d’eau tiède.
- 14° Dans un bain d’azur formé d’hydrate aluminique, et de carmin d’indigo maintenus en suspension dans une eau contenant une très faible quantité de savon.
- ©ans les deux procédés dont nous venons de retracer la marche et qui diffèrent peu l’un de l’autre, les opérations du dégraissage ne sont point assez multipliées pour que toute la graisse soit enlevée du tissu au moment où on le soumet à
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- l’action décolorante du gaz sulfureux; de là le peu d’efficacité de ce dernier agent, et de là aussi des taches qui se font surtout remarquer lorsque les toiles passent dans le bain de teinture pour y recevoir des couleurs tendres. Ces inconvénients n’existent plus dans le procédé suivant :
- Après avoir grillé et lavé à l’eau les tissus écrus (Éch. 10) on doit :
- ÎO. Chaîne -coton écruc.
- 11. Mousseline-laine écruc.
- 1° Les faire passer 2 fois dans un bain de savon alcalin chauffé à GO ou 65° formé de 20 kil. de carbonate sodique cristallisé et de 4 kil. de savon.
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- 2° Les dégorger à l’eau chaude.
- 3° Les faire passer deux fois dans un bain chauffé à 60 ou 65°, formé de 10 kil. cristaux de soude.
- 4° Les dégorger à l’eau chaude.
- 5° Les faire passer au soufroir durant 10 heures, en employant 10 kil. soufre, ou 250 grammes par pièce.
- 6° Les dégorger à l’eau chaude.
- 7° Les faire passer deux fois dans un bain chauffé à 60 ou 65°, contenant 7 kil. carbonate sodique cristallisé.
- 8° Les faire passer deux fois dans un bain chauffé à 60 ou 65°, contenant 5kiL,5 carbonate sodique cristallisé.
- 9° Les dégorger à l’eau chaude.
- 10° Les faire passer au soufroir, en employant 7 kil. de soufre, ou 175 grammes par pièce.
- 110 Les faire passer à l’eau tiède.
- 12° Les fair.e passer dans un bain d’azur.
- Les pièces qui ont passé par ces diverses manipulations sont dans l’état ci-après :
- 1&. Chaîne-coton blanchie et azurée.
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- 18. Chaîne-coton ( mérinos «l’Écossc ) blanchie et azurée.
- 14. ?(oussclinc>laine blanchie.
- Quand les étoffes à blanchir sont destinées à l’impression de fonds de couleurs foncées, de bouquets ou de tout autres sujets détachés, on peut s’arrêter à la 6e opération (dégorgeage des pièces à l’eau chaude), et azurer. Lorsqu’au contraire ces mêmes étoffes doivent recevoir des fonds de couleurs tendres, il est indispensable de leur faire subir la série des opérations ci-dessus , pour éviter les taches dont nous avons parlé p. 98.
- En terminant ce sujet, nous croyons devoir rappeler les principales conditions de succès dans le blanchiment des laines et des mi-laines.
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- La première est de bien dégraisser le tissu, et on y parvient en le traitant dès le principe par le savon, puis parle carbonate sodique, et en lui faisant subir de nombreux lavages à l’eau tiède.
- La deuxième est de mettre le tissu à l’abri de l’action directe du gaz sulfureux durant l’opération du soufrage par ce gaz, dont les impuretés peuvent altérer l’étoffe ou tout au moins y produire des taches.
- La troisième, de ne point donner de lavages à une température trop élevée après l’opération du soufrage, pour ne pas détruire en partie la combinaison qui se forme entre l’acide sulfureux et la matière colorante.
- Blanchiment des étoffes de soie.
- § 466. Les étoffes de soie qu’on veut blanchir, ou ont déjà été en partie blanchies par les opérations du décruesage qu’on a fait subir à la soie avant de la tisser, ou sont à l’état écru.
- Dans le premier cas , on se contente d’immerger quelque temps les pièces dans une eau courante, puis on les fait bouilllir durant une heure dans une bain formé de 60 grammes de savon et de 500 grammes de son par pièce de 8 à 10 mètres. Le son saturant par son acide l’excès d’alcali du savon, celui-ci affaiblit moins la soie. En sortant de ce bain , les pièces sont dégorgées dans une eau chauffée à 50°, lavées ensuite à l’eau froide et battues dans les roues à laver.
- Dans le second cas on immerge les pièces après les avoir introduites dans un sac, dans une chaudière remplie d’une eau qui tient en dissolution 250 grammes de savon par kilogramme de soie sèche. Après avoir chauffé et maintenu le tout à l’ébullition durant 2 à 3 heures, on retire l’étoffe de ce bain pour la rincer à l’eau courante. Quand elle est bien dégorgée, on lui donne un second bain de savon semblable au précédent, et on la dégorge de nouveau dans les roues à laver, § 445 , fig. 19. Le dégorgeage achevé, on la passe, durant 10 à 15 minutes,
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- dans une eau contenant 15 grammes de carbonate sodique cristallisé pour chaque pièce. En sortant de ce bain alcalin, elle est encore dégorgée, puis rincée avec soin et passée alors dans une eau aiguisée d’acide sulfurique, mais qui doit à peine marquer à l’aréomètre ; on termine enfin l’opération en donnant un dernier lavage à l’eau chaude , en battant et en rinçant à l’eau courante.
- Les tissus de soie ainsi blanchis sont assez purs pour tous les genres d’impression où l’on fait usage de couleurs foncées, telles que celles de la garance, du bleu de Prusse, de l’amarante et du violet à la cochenille, et enfin les couleurs brunes en général ; mais quand on veut y imprimer des couleurs plus tendres, on doit leur donner un léger soufrage. C’est pour des tissus qui ont cette destination que l’acide sulfureux liquide est surtout avantageux , puisqu’on peut l’employer en très faible proportion. Il n’est pas inutile de faire remarquer ici que cet acide ne doit être appliqué qu’avec la plus grande circonspection au blanchiment de la soie, qu’il jaunit toujours plus ou moins et finit même par altérer quand il en a opéré le blanchiment.
- Séchage.
- § /i67. Nous avons pu voir, en passant en revue toutes les opérations du blanchiment des étoffes qui servent à l’impression, que tous les agents à l’action desquels on les soumet récla-. ment toujours, en dernière analyse, des lavages à l’eau, qui ont pour objet de faire disparaître non seulement les matières étrangères dont les tissus étaient imprégnés, mais encore l’agent même qu’on a employé pour modifier et altérer la matière colorante. Or, pour enlever cette eau, deux opérations sont pratiquées simultanément. Dans la première, les tissus sont exprimés par un.moyen quelconque, et abandonnent ainsi une plus.ou moins grande partie du liquide qu’ils renferment ; dans la seconde, les toiles exprimées sont exposées à l’action mécanique d’un air
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- plus ou moins chaud , et cèdent à cet agent l’humidité dont elles sont encore imprégnées, ou bien elles sont soumises à une véritable dessiccation sur des surfaces chaudes, qui favorisent la vaporisation de l’eau, et secondent ainsi puissamment l’action mécanique de l’air.
- § /168. Expression. Anciennement on tordait à la cheville les toiles qu’on sortait de l’eau, c’est-à-dire que chaque pièce repliée 3 ou A fois dans'sa longueur passait derrière une cheville en bois fixée dans une position verticale à l’extrémité d’une table en chêne à rainures. L’ouvrier, en tordant la pièce, la rapprochait d’une seconde cheville placée à l’autre extrémité de cette table, et lui imprimait, en la tordant autour, un mouvement qui en faisait jaillir l’eau.
- Ce procédé a été depuis longtemps abandonné, d’une part, parce qu il est lent et dispendieux, d’une autre, parce que les
- Fig. 28.
- tensions diverses qu’éprouvent les différentes parties de la toile produisent toujours, soit des plis, soit des retraits inégaux dans l’impression des couleurs rentrures ; on y a généralement substitué le procédé suivant fig. 28 ci-dessus.
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- d, e, sont deux cylindres expresseurs en cuivre, garnis de toile et placés entre deux tables c, b. Le cylindre e est surmonté d’un levier f, g, muni d’un contre-poids. Sur la table c, légèrement inclinée de a en c , on met les toiles mouillées, tandis que celles qui viennent d’être exprimées se dévident en boyaux sur la table b. Quand on craint que ces toiles ne contractent de faux plis par un feutrage inégal, on peut les faire passer en large entre les cylindres, et c’est une précaution que l’on prend plus particulièrement pour les tissus de laine et de mi-laine; mais ce second mode a toujours, comme le premier, quoiqu’à un moindre degré, l’inconvénient de tendre les tissus irrégulièrement et dans le seul sens de leur longueur. On ne peut d’ailleurs, jamais ni par l’un ni par l’autre, quelle que soit la force qu’on emploie, extraire assez d’eau de l’étoffe sans la compromettre ou la fatiguer pour que la dessiccation en devienne aussi rapide qu’il est à désirer.
- On fait encore usage, pour être sûr de ne pas endommager l’étoffe, d’une machine nouvellement inventée par Penzoldt, Y hydro-extracteur , espèce de toupie creuse doht les deux figures ci-après représentent, l’une, une coupe verticale, l’autre, une élévation, telles qu’elles se trouvent dans le Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, t. XIV, p. 227 [fig. 29-30).
- I c, c, c. Bâtis en fonte de fer qui servent de supports aux arbres qui transmettent le mouvement à la machine par poulies et engrenages à plusieurs vitesses.
- d. (fig. 29 ). Fourche à guide pour la courroie.
- e. [fig. 29). Vis de rappel pour la fourche à guide d.
- f. Manivelle du canon d’une roue d’engrenage qui transmet le mouvement à un pignon fixé sur la vis de rappel pour accélérer le déplacement de la courroie d’une poulie sur l’autre.
- G> G- (fig- 29-30 ). Arbre qui transmet le mouvement par une roue d’angle à l’arbre vertical u, h, portant l’hydro-extracteur.
- h, h. (fig. 29 ). Arbre vertical pivotant- du bas dans une crapaudine em-ferméedans une boite à huile, et à son milieu dans un bourrelet.
- i, i. Hydro-extracteur à double cylindre en cuivre rouge , fixé par des Clefs sur l’arbre vertical h, et dont la paroi extérieure est percée d’une
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- multitude de petits trous à travers lesquels la force centrifuge projette l’eau des tissus.
- Fig. 29.
- k, k, k. Bâche ou chemise en cuivre servant à recevoir l’eau projetée qui s’écoule par un tuyau o.
- Dès que les toiles mouillées ont été placées dans les compartiments i, i, on imprime à la machine, au moyen de la ma-
- Fig. 30.
- nivelle f , un mouvement qui, en devenant uniformément
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- projet accéléré par le jeu des poulies et engrenages à plusieurs vitesses , expulse des tissus, en vertu de la force centrifuge, l’^au qu’ils contiennent, et la projetant vers les parois extérieures percées de trous, la font tomber dans la bâche k, k, d’où elle s’écoule par l’ouverture o.
- d’où elle s’écoule par l’ouverture o.
- L’hydro-extracteur, tel que nous venons de le décrire , a Fig. 31.
- mm
- a. Cône en bois garni de cuir, ou pignon d’angle sans dents, n, b. Disques en fonte ou roues d’angles j fixés solidement sur les arbres sans dents. j par des clavettes.
- c. c. Poulies en fonte.
- d. Cylindre en cuivre dans lequel on place les étoffes à sécher.
- e. Arbre vertical sur lequel est fixé le cylindre en cuivre et le cône de friction.
- F. Bâtis sur lequel toutes les autres pièces sont fixées. g. Élévation dans l’intérieur du cylindre.
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- 110 DE LA FABRICATION EN GÉNÉRAL.
- reçu dans ces derniers temps des modifications qui ne nous paraissent pas sans importance, et que nou s devons en conséquence faire connaître à nos lecteurs : nous voulons parler de l’hydro-extrateur mû par friction, dont nous devons le plan ci-contre à l’obligeance de MM. Huguenin et Ducommun, constructeurs à Mulhouse [fig. 31, 32).
- Le cylindre d, au lieu d’être muni d’un couvercle qui gênerait plus ou moins dans le service de l’appareil, et qui pourrait d’ailleurs être assez dangereux s’il n’était pas exactement fixé, a des rebords rentrants à la partie supérieure. La paroi annulaire de ce cylindre est intérieurement garnie d’arêtes [fig. 32) qui contribuent à lui donner de la solidité et à empêcher que les étoffes qui sont sans cesse pressées contre la face interne ne bouchent les ouvertures par lesquelles l’eau doit s’échapper et l’air se renouveler continuellement.
- Dans l’intérieur de ce cylindre la partie relevée g détermine la place que doivent occuper les étoffes, s’oppose à leur contact avec l’arbre e , et renferme en outre des disques ou volants en fer qui, lorsque le cylindre est inégalement chargé et que la i machine à acquis une certaine vélocité, se jettent du côté le plus léger et maintiennent l’équilibre dans toutes les parties de l’appareil.
- Le mouvement de cette machine est très simple. Les disques b, b, sont des roues d’angles sans dents qui frottent contre un pignon conique a , également édenté, et ne travaillent qu’en raison de leur diamètre. Or, pour faciliter le frottement et pour donner plus d’adhérence aux points qui sont en contact, le cône ' a est entouré de cuir et a pour diamètre le quart de celui des roues. En imprimant à ces dernières une vitesse de ZiOO tours par minute, on en donne une d’environ 1,500 au cylindre.
- Les poulies c, c, qui sont rendues fixes sur le même arbre que les disques, sont mises en mouvement par des courroies f sans fin, dont l’une est croisée , afin que , l’un des disques tournant à droite et l’autre à gauche, le cône a soit entraîné des | deux côtés. Du reste, les disques sont appuyés contre le cône
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- SÉCHAGE.
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- 111
- au moyen d’un ressort ou d’une vis de pression qui appuie sur les bouts des arbres i, i , et lorsque la machine entre en mouvement, ces disques, en frottant contre le cône, lui impriment une rotation dont la vitesse augmente progressivement.
- Cet hydro-extracteur, beaucoup moins compliqué dans sa construction que les précédents et demandant beaucoup moins de force, ne tardera pas sans doute à obtenir la préférence.
- Telle est la puissance de cette machine qu’elle fait encore jaillir de l’eau d’une toile dont on a exprimé ce liquide avec le plus grand soin par tout autre moyen mécanique et rend l’étoffe presque complètement sèche. Ainsi une pièce de calicot, exprimée par la machinefig. 28, du poids de 34 kilogrammes, ayant été placée pendant 5 minutes seulement dans l’hydro-extracteur, y a perdu 16 kil. d’eau. Nous entrerons dans quelques autres détails sur l’emploi qu’on en fait, en parlant de la dessiccation des laines imprimées, à laquelle elle est spécialement appliquée.
- § 469. Dessiccation. Après les opérations que nous venons de décrire, les toiles contiennent encore beaucoup d’humidité (1), en sorte que, pour les avoir sèches , le fabricant est obligé de leur faire subir celles qui constituent le séchage proprement dit.
- Les appareils appliqués à la dessiccation des tissus, appelés séchoirs, sont de plusieurs genres et peuvent être ramenés à 3 types, savoir :
- 10 Les séchoirs à air libre ;
- 2° Les séchoirs à air chaud ;
- 3° Les séchoirs à la vapeur, où le tissu est en contact direct avec une surface chauffée à une certaine température.
- Tous ces appareils ont pour objet de placer les étoffes dans les conditions les plus favorables à la volatilisation de l’eau dont elles sont encore imprégnées ; cette volatilisation so fait
- (1) Une pièce jaconas exprimée à la machine, fig. 28 , p. 106, renferme encore ..... 2kil-,02 d’eau (H. Schlumberger).
- Une pièce id. id. 3,7, 4,25, 4,35 d’eau (Royer).
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- avec d’autant plus d’économie, lorsqu’on y emploie le combustible , qu’on sait mieux y faire concourir l’effet mécanique de l’air, § 3 , qui, comme on le sait, se sature d’autant plus facilement d’humidité que sa température est plus élevée , que sa pression est moins grande et qu’il est en contact avec l’eau par des points plus nombreux.
- §A70. Séchage à l’air libre. — C’est de tous les moyens de séchage le plus économique et, partant, le plus généralement employé. Il consiste à suspendre sur des perches ou sur des cordes, dans un local ouvert, les tissus qu’on veut sécher. Les avantages que présente la simplicité de ce procédé sont rachetés par plusieurs inconvénients, dont le plus grave pour le fabricant est d’être dépendant des variations atmosphériques ; on sait, en effet, que les étoffes qu’on sèche à l’air libre peuvent y rester longtemps exposées sans abandonner l’eau dont elles sont imprégnées quand l’atmosphère est chargée d’humidité. Toutefois la disposition des séchoirs à air libre n’étant pas sans influence sur les résultats qu’ils fournissent, nous entrerons dans quelques détails au sujet de leur construction. Si l’évaporation de l’eau que contiennent les tissus se fait d’autant mieux que ceux-ci sont en contact avec une plus grande masse d’air, on comprend tout d’abord qu’il convient de leur donner la forme qui, en mettant l’air en mouvement, réalisera le mieux cette condition, c’est-à-dire la forme qui les rapproche le plus de celle des cheminées, afin de déterminer ainsi une circulation ascensionnelle de l’air qui, se renouvelant sans cesse, se chargera déplus d’humidité. A cette forme du séchoir il faut joindre l’exposition dans un lieu isolé et bien aéré.
- Les séchoirs de ce genre adoptés en Alsace et en Suisse ont ordinairement la forme d’une tour carrée de 20 à 25 mètres d’élévation sur 8 à 10 mètres de côtés. Ils sont en bois, et sur les planches dont chacun des côtés est garni, sont pratiquées de nombreuses ouvertures munies de vasistas ou de persiennes que l’on ferme et ouvre à volonté. Quelques fabricants, au lieu de revêtir les pans de leur séchoir de garnitures en bois, ont
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- préféré les recouvrir d’un treillage en branches d’arbres qui , lui-même, est recouvert de branches de genêts et donne accès à l’air sur tous les points.
- La fig. 33 ci-après représente le séchoir à air libre de la maison Steinbach et Blech, de Mulhouse, qui a environ 20
- Fig. 33.
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- mètres d’élévation. Comme des bâtiments de ce genre offrent beaucoup de prise au vent et que d’ailleurs ils sont d’une construction très légère, il n’est pas rare de les voir renversés ; pour prévenir de pareils accidents, on les consolide au moyen de quatre câbles qui sont attachés, d’un bout, à des pieux implantés dans le sol, de l’autre , aux quatre angles supérieurs . de cette espèce de tour. Quant à la disposition intérieure , elle est des plus simples, ainsi qu’on peut en juger par le plan ci-
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- après de l’étage supérieur d’un pareil séchoir ou étendage, e. Escalier par lequel les ouvriers arrivent à cet étage pour suspendre les pièces.
- d. Treuil destiné à élever deux caisses c, c, dont l’une fait ordinairement contre-poids à l’autre, en sorte qm’en élevant les pièces humides au moyen de la première on descend dans la seconde les pièces sèches.
- a, a, a, a. Espaces garnis de perches sur lesquelles on suspend les toiles à sécher.
- Fig. 34.
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- b, b. Espaces libres qui donnent accès à l’air et en favorisent la circulation.
- Les étages inférieurs, dont le nombre est en raison de l’élévation du séchoir, sont également garnis de perches sur les-
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- quelles on relève les pièces quand elles sont trop longues. On remplace souvent ces perches, pour ne pas déchirer les pièces qui frottent toujours plus ou moins, par de petits cylindres garnis de boulons en fer qui leur servent d’axes, et au moyen desquels on fait mouvoir et circuler les tissus sans les endommager.
- La forme carrée que l’on donne à ces séchoirs n’est pas la plus convenable, à notre avis; car elle oblige à placer les pièces à côté l’une de l’autre sur plusieurs rangées, en sorte que l’air ne les affleurant pas toutes également et n’arrivant jamais, d’ailleurs, jusqu’à celles qui sont au centre, que quand il est déjà plus ou moins chargé d’humidité, on trouve souvent des pièces encore humides à côté d’autres qui sont tout-à-fait sèches. Il nous semble qu’il y aurait avantage à leur donner la
- Fig. 35.
- forme d’un parallélogramme, dont deux des côtés seraient assez rapprochés pour ne laisser dans l'intérieur que 1 espace
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- suffisant à la suspension de deux pièces de la plus grande largeur l’une à côté de l’autre, en plaçant au bas de ces séchoirs des canaux destinés à conduire l’air de l’extérieur au centre ; les pièces qui s’y trouveraient recevraient à la fois sur une grande étendue l’air qui pénétrerait par les ouvertures des côtés et celui qui déboucherait du niveau du sol sur toute la ligne médiane. Un semblable séchoir devrait être placé de manière que les deux plus grandes surfaces fussent dans la direction la plus favorable pour recevoir à la fois les rayons solaires et les courants d’air; mais, moins solide encore que le précédent, il réclamerait impérieusement l’emploi de contre-forts en bois qui s’appuieraient au 1/3 environ de sa hauteur, puis de 6 câbles , dont h aux angles et 2 au milieu. La figure 36 ci-contre donne une idée de cette disposition.
- En Alsace, où régnent souvent d’épais brouillards, ces sé- j choirs sont ordinairement établis de manière à servir à la fois
- comme séchoirs à air libre , et comme séchoirs à air chaud. C’est une tour carrée , à la partie supérieure de laquelle se trouve une galerie en saillie , dont le plancher est formé de perches placées à de très petites distances l’une de l’autre, sur lesquelles on suspend les pièces , et on les expose à l’air quand le temps est propice. Quand, au contraire , il est pluvieux , ces pièces sont desséchées dans l’intérieur par des courants d’air chaud dirigés de bas en haut ; mais , ainsi que le fait remarquer M. Péclet ( Traité sur la chaleur, t. II, p. 112), ) cette disposition est peu favorable à l’emploi de l’air chaud, et entraîne pour le fabricant la perte de tout le combustible employé à chauffer l’air qui se dégage par la partie supérieure du
- Fig. 36
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- séchoir sans être saturé de vapeur. Du reste, nous allons voir, en parlant des séchoirs à air chaud proprement dits, que le principe de leur construction est incompatible avec celui des séchoirs à air libre. '
- § A 71. Séchage à air chaud.—Ce sont, comme les précédents, des chambres plus ou moins vastes, dans l’intérieur desquelles on suspend les étoffes à sécher; mais leur conformation est essentiellement différente. Dans les séchoirs à air libre, en effet, ce que l’on recherche surtout, c’est le mouvement le plus rapide de l’air, et c’est pour cela, comme nous l’avons dit, qu’on leur donne l’élévation et la forme de cheminées ; dans les séchoirs à air chaud, au contraire, l’air doit se mouvoir avec lenteur, pour bien pénétrer dans le tissu et se charger de l’eau qui y adhère; il doit donc partir d’en haut pour descendre sur les différentes couches d'étoffes humides, les traverser peu à peu, arriver aux régions inférieures complètement saturé d’humidité, et s’échapper par des ouvertures pratiquées au niveau du sol ; lui donner une direction opposée, ce serait faciliter sa tendance à s’élever à la partie supérieure du séchoir, d’où il se répandrait au dehors sans avoir réalisé la moitié et souvent même le quart de l’effet qu’on lui demande.
- On a méconnu pendant fort longtemps les vrais principes sur lesquels doit être basée la construction des séchoirs à air chaud. On pensait que, chauffé au bas de ces séchoirs, l’air devait être évacué par la. partie supérieure après s’être saturé d’humidité. C’était une erreur grave , comme le prouvèrent bientôt les constructeurs d’étuves à dessécher les sucres et surtout les fécules, dont les observations ont fait admettre des principes plus vrais et d’une application plus économique; car c’est dans leur construction qu’on a vu pour la première fois des séchoirs peu élevés avec des cheminées d’écoulement placées au niveau du sol. Pour comprendre comment ils ont été amenés à adopter une semblable disposition , il ne faut que se faire une idée exacte du séchage à air chaud. Deux choses distinctes
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- sont à réaliser : 1° la production de la vapeur d’eau qui se délaie dans l’air et le sature d’humidité; 2° l’expulsion de cet air humide ou ce qu’on appelle la ventilation. La question ainsi posée, on voit que, pour exécuter avec avantage la première partie de cette opération, la chambre où elle a lieu doit être fermée hermétiquement, excepté à sa partie inférieure au niveau du sol, pour donner issue à l’air qui se dilate.'Si l’on chauffe par un moyen quelconque l’air d’une telle chambre, la partie de cet air qui a d’abord été en contact avec la surface de chauffe s’élève rapidement, en suite de sa raréfaction, à la partie supérieure, sans avoir pour ainsi dire affleuré le tissu ; mais de nouvelles couches d’air plus chaud venant occuper sa place le forcent bientôt à redescendre, et tout l’air du séchoir finit par être chauffé dé la température moyenne qui est de + 15 jusqu’à + 50, + 60, + 70°, selon la nature des étoffes que l’on veut sécher, et aussi selon le volume d’air que renferme la chambre, comparé à celui de l’eau qu’il s’agit de faire disparaître, puisque la température de cette chambre doit être d’autant plus élevée que la quantité d’eau à vaporiser est plus grande et le volume d’air plus petit, ou l’inverse, c’est-à-dire d’autant moins élevée que le volume d’air de la chambre est plus considérable et celui de l’eau moindre.
- En ayant soin d’imprimer un mouvement a l’air ainsi renfermé dans l’intérieur du séchoir, on le met successivement et à plusieurs reprises en contact avec les tissus, qui bientôt se sèchent, quoique plongés dans un bain de vapeur. C’est alors qu’il est nécessaire d’expulser l’air saturé d’humidité, et l’on y parvient par deux voies différentes. La plus simple consiste à ouvrir le séchoir et à en renouveler l’air ; mais, dans ce cas, si l’air extérieur est à une température très basse et l’air intérieur, au contraire, à une température très élevée, on est exposé à voirdel’eau se condenser sur les toiles, et par conséquent l’opération est à recommencer. Par l’autre voie , qui ne présente pas cet inconvénient, on fait pénétrer, au moyen d’un ventila-
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- teur, à la partie supérieure de la chambre, un courant d’air chaud qui chasse l’air humide, et quand on juge que le mélange de l’air intérieur et de l’air extérieur ne peut plus produire de condensation , on ouvre toutes les issues du séchoir et on enlève les pièces.
- Lorsqu’on est bi£n pénétré des conditions à réaliser pour le séchage à air chaud, il n’est pas difficile de déterminer quels sont, parmi les séchoirs de ce genre, les plus avantageux , abstraction faite , bien entendu , du système de chauffage, que nous supposons le plus parfait.
- Deux genres de séchoirs à air chaud sont en usage ; dans les uns, l’air est chauffé au moyen d’appareils indépendants, puis lancé d’une manière continue dans l’intérieur de la chambre ou séchoir proprement dit; dans les autres, c’est l’air même du séchoir qui est chauffé, soit par des conduits dans lesquels circule de la vapeur, soit par des tuyaux de cheminée qui servent d’écoulement aux produits de la combustion. Dans les premiers, il y a un mouvement continu de l’air de l’extérieur à l’intérieur, et vice versa; dans les seconds, ce mouvement n’a lieu que par intervalle, lorsque l’air de la chambre est saturé d’humidité et qu’il importe de l’expulser. D’après cet exposé, on comprend que les premiers séchoirs ne fonctionnent avec économie qu’autant que, par un concours de dispositions plus ou moins dispendieuses et difficiles à réaliser en ce qui concerne l’arrangement des tissus et l’arrivée et le départ de l’air chaud, on parvient à forcer celui-ci à se mettre avec les toiles humides en un contact assez multiplié et assez prolongé pour ne sortir du séchoir que saturé d’humidité. Si ces conditions ne sont pas remplies, on ne retire du combustible que la moitié et quelquefois même le quart de l’effet qu’on obtiendrait de son application directe à la vaporisation de l’eau. Les seconds séchoirs, au contraire, étant clos et d’une construction beaucoup plus simple, n’offrent pas les mêmes inconvénients ; on peut les établir partout et à peu de frais, car il suffit d’avoir une chambre
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- hermétiquement fermée dont les murs soient assez épais pour résister à l’action refroidissante de l’air extérieur, et à laquelle se trouve appliqué un système de chauffage qui permette d’en élever la température le plus rapidement possible. A cet effet on peut employer un foyer indépendant ou utiliser la chaleur ' perdue du foyer d’un bouilleur, la vapeur ou l’eau de condensation d’une machine à vapeur. En France, les avantages de ce mode de dessiccation ont été tout d’abord compris par les fabricants de fécule, les premiers qui l’aient employé, et en Angleterre, l’un des fabricants d’indienne les plus estimés . (Walter Crum ) , y soumet depuis longtemps ses tissus. Nous i laisserons parler à ce sujet MM. H. Schlumberger et A. ;
- •> Scheurer (Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, juillet 1837) :
- « Nous avons vu dans l’établissement de M. Walter Crum,
- » près Glasgow, une manière de sécher qui doit présenter une ; » économie de temps et de combustible. Le séchoir ne diffère ” des nôtres qu’en ce qu’on ne donne aucune issue à l’air chaud » ni à la vapeur, et qu’on le tient hermétiquement fermé pen-» dant le séchage des pièces ; de cette manière on sèche en trois » heures, nous a-t-on assuré, les 200 pièces de toiles mouil-» lées qu’il peut contenir, tandis qu’il faudrait cinq heures de ; » temps en donnant issue à la chaleur comme on le fait géné-» râlement, ce qui procure donc une économie de deux cin-» quièmes de temps et de combustible. »
- Nous renvoyons le lecteur, pour tous les détails relatifs à la construction et à la forme à donner aux séchoirs, an Traité sur la chaleur de M. Péclet, ouvrage dans lequel toutes ces questions sont examinées et discutées avec autant de talent que de sagacité.
- § Z|72. Séchage à la vapeur. — En Angleterre et en Normandie , on sèche depuis longtemps les tissus en les faisant passer sur des cylindres creux de cuivre et quelquefois de fer-blanc chauffés à la vapeur. Depuis quelques années cette mé-
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- DE LA DESSICCATION OU DU SECHAGE DES PIECES. 121 thodc a aussi été introduite en Alsace. Les appareils de ce mode de séchage sont de plusieurs espèces; tantôt c’est une batterie de 6 cylindres de 15 à 25e de diamètre, placés sur le même plan, à une faible distance l’un de l’autre, et sur lesquels on fait passer une seule ou plusieurs pièces de front, selon la longueur des cylindres et la largeur des pièces ; tantôt, comme le représente la fig. 37, ce sont deux rangées de cylindres en
- Fig. 37.
- cuivre a, placés l’un au-dessus de l’autre, et dont les arbres b, percés d'un bout a l’autre, servent à l’introduction de la vapeur dans les cylindres et à l’évacuation de l’eau de condensation ; tendues par les cylindres de tension d , les pi; ces r passent sur les cylindres a , où elles sont alternativement chauffées des deux côtés, puis viennent s’enrouler sur le cylindre m fixé à l’arbre l; tantôt enfin l’appareil ne se compose que d’un seul cylindre, mais d’un grand diamètre , qu’on désigne communément sous le nom de tambour à dessécher. Ce tambour est toujours accompagné d’un tambour èlargisseur à règles mobiles, qui a pour objet de faire disparaître les plis que conservent les étoffes qui sortent des opérations du blanchiment. (Voyez ci-après,fig. 38, l’élévation longitudinale du grand tambour à sécher faite du côté de la transmission du mouvement, et Jig. 39 la coupe verticale faite par l’axe du tambour. )
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- a. Bâtis en bois.
- b. Tambour en tôle de 2 mètres de diamètre sur 2m.035 de largeur.
- a, a*. Tourillons creux en fonte , munis, vers Tune de leurs extrémités, d’une forte barre qui permet de les boulonner sur les faces du tambour, et tournant dans deux patins en fonte fixés sur le bâtis.
- Fig. 38.
- b. Tuyau par lequel arrive la vapeur.
- c. Robinet pour régler l’entrée de la vapeur dans le cylindre.
- d. Tuyau en équerre s’ajustant d'un côté à la bride inférieure du robinet et de l’autre à la partie creuse du tourillon a.
- c. Presse-étoupe qui forme le joint du tuyau d avec le tourillon.
- /. Roue de 72 dents fixée sur le tourillon ai, engrenant avec un pignon de 12 dents.
- Fig 39.
- g. Tuyau en équerre dont Tune des extrémités s’ajuste dans la partie évidée du bras i et l’autre à la bride du robinet h.
- h. Robinet qui règle la sortie de la vapeur du tambour.
- k. Tuyau pour conduire la vapeur à l’extrémité de l’atelier. j. Robinet pour retirer la vapeur condensée.
- m. Soupape de sûreté, appelée soupape ronflante, qui laisse rentrer l’air
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- quand le vide vient à se produire dans l’intérieur du tambour par la condensation de la vapeur.
- n. Roue de 80 dents montée sur le même arbre que le pignon de 12 dents, engrenant avec le pignon de 15 dents placé sur l’arbre des poulies dont l’une folle sur son arbre , l’autre recevant le mouvement du moteur.
- Nous avons signalé à plusieurs reprises l’emploi de règles divergentes destinées à tendre les toiles dans le sens de leur largeur. Sur un des côtés plats et légèrement arrondis de ces règles en bois ou en métal, sont pratiquées des cannelures divergentes qui partent du centre de la règle et se dirigent vers ses extrémités, les unes à droite, les autres à gauche. En passant sur ces règles solidement fixées à une machine, les pièces s’élargf çsènt par la disposition même des cannelures qui tendent à ramener sans cesse le tissu du centre vers les bords ; mais la durée du contactde la toile n’est jamais assez prolongée pour que tous les plis soient effacés, et ce n’est qu’en multipliant le nombre de ces règles et qu’en augmentant la tension de l’étoffe qu’on peut atteindre ce but. Aujourd’hui l’importation en France et le perfectionnement du tambour élargisseur que nous avons mentionné plus haut, et que M. Huguenin Cornetz a présenté à la Société industrielle de Mulhouse [Bulletin de cette société, t. XYI, p. 72), fait disparaître toutes ces difficultés; voici une coupe longitudinale de cette machine vue par le bout du tambour, ainsi que celle de deux lames cannelées et accouplées :
- Fig. 40.
- a. Arbre de l’élargisseur.
- b. Poulies à gorges solidaires avec l’arbre a, dont le plan est 'incliné sur l’arbre, et qui sont penchées deux d’un côté et deux d’un autre.
- c. Bras faisant corps avec l’anneau ajusté dans la gorge de
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- la poulie b, sur lesquels sont fixées les règles cl qui portent chacune deux oreilles assujetties aux bras par des goupilles.
- La surface de ce tambour se compose de 8 règles divergentes mobiles d, qui, en même temps qu’elles tournent par la tension de la toile même, décrivent, guidées par les gorges des poulies b, un mouvement de va-et-vient, par suite duquel chacune d’elles se meut alternativement, dans le sens de sa longueur, du milieu vers les bords pendant la moitié d’une révolution du tambour , et des bords vers le centre pendant l’autre moitié. Du reste, la disposition de l’appareil est telle que , pendant qu’une règle se meut dans un sens, celle qui lui est opposée et avec laquelle elle est articulée se meut dans un sens contraire. L’étoffe se trouvant tendue en enveloppant le tambour en suit le mouvement, et est tellement étirée dans sa largeur qu’il suffirait d’une légère traction dans le sens de sa longueur pour la déchirer.
- Aujourd’hui, comme nous l’avons dit, on accouple toujours le tambour élargisseur au tambour à dessécher. La fig. kl re-
- présente cette disposition. Sur le bâtis en fonte b se meuvent le cylindre à dessécher a, le cylindre d, sur lequel s’enroulent les pièces humides, le cylindre de tension e, et le tambour élar-
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- gisseurc. Les pièces, en se déroulant du cylindre d, passent sur le cylindre e, sous la règle carrée i, arrivent sur le tambour élargisseur c, en embrassent la circonférence comme le ferait la courroie d’une poulie, et entraînent les règles qui à leur tour font tourner les anneaux porteurs des bras. Suivant qu’on abaisse ou qu’on élève la règle carrée i, qui est mobile, on met la toile en contact avec un plus grand nombre de points, et l’on parvient ainsi à régler l’effet de l'élargisseur. En quittant ce tambour, les toiles passent sous le tambour a, chauffé à la vapeur, et viennent s’enrouler sur un cylindre mobile F, fixé au bâtis g.
- D’après des expériences faites par des membres de la Société industrielle de Mulhouse (1), ce serait de tous les systèmes de séchage le plus économique; car, en comparant la quantité d’eau évaporée par chacun des moyens de dessiccation que nous avons indiqués, on a obtenu avec 1 kilogramme de houille :
- Dans le séchoir, fig. 36, à l’évaporation de........ 1 ,68 d’eau.
- Dans le même séchoir, mais en procédant comme M. Walter Crum :
- (1re Expér.)........................ l'évaporation de 2,86 d'eau
- (2e Expér.). Id. id. . . . 2,34
- ( 3e Expér.). Id. id. . . . 2,37
- ( 4° Expér.). Id. id. . . . 2,57
- Sur 6 cylindres en cuivre, § 472.................... 2,45
- Sur le cylindre ou tambour chauffé par la vapeur à la
- pression moyenne de 137e de...................... 3,03
- Quoique ces chiffres parlent assez haut en faveur de la dessiccation à la vapeur , il est encore d’autres considérations qui doivent déterminer le fabricant à lui donner la préférence. Quand, par exemple , il n’a à sa disposition que des eaux très calcaires, il y a pour lui avantage à dessécher ainsi les tissus et à recueillir l’eau de condensation pour la faire servir à un bain de
- (1) T. XII, p. 507 à 535 de son Bulletin.
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- teinture; ce qui non seulement procure une économie, mais assure encore une meilleure réussite clans la fabrication.
- Quoiqu’en parlant des différents modes de séchage, nous ayons fait abstraction de la nature de l’étoffe, on doit la prendre en sérieuse considération dans le choix des moyens de dessiccation ; car, si les calicots blancs peuvent être desséchés par les procédés les plus prompts comme par les plus longs et indifféremment à telle ou telle température, les laines ne sont pas dans le même cas ; elles doivent toujours l’être, au contraire, à une température basse et de plus se trouver en état de tension : aussi, quand on expose ces tissus mouillés dans les étendages, a-t-on soin de mettre des poids aux extrémités de chaque pièce, pour prévenir le retrait qu’elles éprouveraient.
- Nous ferons voir, en parlant de la fabrication de quelques genres d’impression, que c’est surtout quand on sèche des tissus qui ont déjà reçu l’application de certaines couleurs ou dont l’impression est terminée, qu’on doit avoir égard à la température , attendu que toutes les couleurs ne supportent pas également bien la chaleur et ne se fixent pas au même degré. Nous aurons encore l’occasion d’examiner d’autres modes de séchage en traitant de l’impression des mordants.
- CHAPITRE II.
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- PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA FIXATION DES MATIERES COLORANTES ------------MORDANTS. -- LEUR PRÉPARATION.
- Il y a deux moyens, qu’il ne faut pas confondre , de colorer les étoffes. Par l’un, comme le peintre à l’huile, on délaie les matières colorantes, les laques , etc., dans des espèces de vernis, pour en faire une couleur qu’on applique sur les tissus, et qui, en s’y desséchant, adhère à la fibre. Qu’on délaie les substances colorantes dans un vernis gras, dans l’huile siccative, dans le gluten, dans le blanc d’œuf, dans la farine ou
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- PRINCIPES GÉNÉR. DE LA FIXATION DES MATIERES COLOR. 127
- dans les mucilages, le résultat est toujours le même; mais cette opération , purement mécanique, et qui peut être pratiquée sur toute espèce de tissus, ne doit nous occuper qu’en tant qu’il s’agit de trouver le corps glutineux le plus capable de rendre telle ou telle substance colorée adhérente à telle ou telle étoffe. Par l’autre, lesmatières colorantes, amenées aux conditions convenables , sont déposées puis fixées sur le tissu de manière à faire corps avec la fibre et à n’en pouvoir être détachées que par l’intervention d’un agent chimique plus ou moins énergique; mais les unes, et de ce nombre sont quelques substances du règne organique telles que Y indigotine, la cartha-mine, la curcumine , et parmi les couleurs minérales, les oxides ferrique, chromique, plombique, etc., n’ont besoin que d’être appliquées sur la toile, tandis que les autres en plus grand nombre, telles que celles de la garance , de la cochenille , du bois de Brésil et de campèche, de la gaude, du quercitron et du bois jaune, etc., ne s’unissent aux différentes fibres que par le concours d’auxiliaires qu’on désigne sous le nom de mordants ; c’est par suite de cette différence que tous ceux qui ont écrit sur la teinture ont divisé les matières colorantes en matières colorantes qui se fixent par elles-mêmes sur les étoffes, et en matières colorantes qui ne s’y fixent qu arec le concours des mordants.
- Découvrir la cause en vertu de laquelle les différents corps colorés s’unissent aux fibres textiles du coton, de la laine et de la soie, au point de former un corps avec elles; expliquer comment il se fait qu’une même matière n’a pas la même aptitude pour chacune de ces fibres, telle est la question qui s’est présentée tout d’abord aux savants qui se sont occupés de 1 application des couleurs, et dont la solution importe surtout à l’art de la teinture, dont l’impression des tissus n est qu un cas particulier. Hellot et Le Pileur d’Aplfgny, Macquer, Ber-thollet, Bergmann et Chevreul, qu’on peut à juste titre considérer comme des autorités sur cette matière, ont émis a ce
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- sujet des opinions différentes. Les deux premiers ne voient dans la fixation des couleurs sur les étoffes qu’une opération purement mécanique; les quatre derniers, au contraire, qu’une opération purement chimique.
- Des opinions aussi opposées , et soutenues d’ailleurs par de semblables célébrités, réclamaient déjà un examen approfondi dans l’intérêt de la vérité; une nouvelle obligation nous est encore imposée à cet égard par les considérations que vient de publier un des chimistes - fabricants les plus distingués de l’Angleterre, M. Walter Crum, qui, dans son travail, tend à faire revivre l’opinion de Hellot et de Le Pileur d’Apligny.
- Pour expliquer la différence entre bon teint et 'petit teint, Hellot voit, dans la fibre de la laine, des pores susceptibles de s’ouvrir et de se fermer , dans lesquels les atomes colorants viennent se loger. Y sont-ils mastiques par la substance astringente qu’on fait communément intervenir dans les opérations de la teinture, et qui, selon lui, formerait un enduit, la couleur est bon teint ; elle est petit teint dans le cas contraire.
- « Les expériences , qui sont un très bon guide dans la phy-” sique ainsi que dans les arts, m’ont démontré que la diffé-» rence des couleurs, selon la distinction précédente ( bon teint » et petit teint ), dépend en partie de la préparation du sujet » qu’on veut teindre, et en partie du choix des matières colo-” rantcs qu’on emploie ensuite pour lui donner telle ou telle « couleur. Ainsi je crois qu’on peut dire comme principe général > de l’art dont je traite, que toute la mécanique invisible de » la teinture consiste à dilater les pores du corps à teindre, à >’ y déposer des particules d’une matière étrangère, et à les y •• retenir par une espèce d’enduit, que ni l’eau de la pluie ni les » rayons du soleil ne puissent altérer ; à choisir les particules » colorantes d’une telle ténuité qu’elles puissent être retenues » suffisamment enchâssées dans les pores du sujet, ouverts par » la chaleur de l’eau bouillante, puis resserrés par le froid, » et de plus enduits de l’espèce de mastic que laissent dans ces
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- >• mêmes pores les sels choisis pour les préparer. D’où il suit » que les pores des fibres de la laine dont on a fabriqué , ou » dont on doit fabriquer des étoffes , doivent être nettoyés,
- ” agrandis, enduits, puis resserrés , pour qu.e l’atome colorant » y soit retenu à peu près comme un diamant dans le chaton » d’une bague.
- » Les expériences m’ont fait connaître aussi qu’il n’y a » point d’ingrédients colorants de la classe du bon teint, qui » n’ait une faculté astringente et précipitante plus ou moins » grande; que cela suffit pour séparer la terre de l’alun (oxide » aluminique ), l’un des sels qu’on emploie dans la préparation » de la laine avant que de la teindre : que cette terre unie aux » atomes colorants forme une espèce de laque semblable à » celle des peintres, mais infiniment plus fine ; que dans les » couleurs vives, telles que l’écarlate, où l’on ne peut employer ” l’alun, il faut substituer à sa terre, qui est toujours blanche » quand l’alun est bien choisi, un autre corps qui fournisse à ” ces atomes colorants une base aussi blanche ; que l’étain pur » donne cette base dans la teinture en écarlate ; que lorsque » tous ces petits atomes de laque terreuse seront introduits » dans les pores dilatés du sujet, l’enduit que le tartre ( autre » sel servant à sa préparation ) y a laissé sert à y mastiquer » ces atomes, et qu’enfin le resserrement des pores occasionnés ” par le froid sert à les y retenir.
- ’• Peut être que les couleurs de faux teint ( petit teint) n’ont » ce défaut que parce qu’on ne prépare pas suffisamment le " sujet; en sorte que les particules colorantes n’étant que dé-” posées sur sa surface lisse, ou dans les pores dont la capa-» cité n’est pas suffisante pour les recevoir, il est impossible que ” le moindre choc ne les en détache. Si l’on trouvait le moyen ” de donner aux parties colorantes des bois de teinture 1 as-" friction qui leur manque, et qu’en même temps on préparât ” la laine à les recevoir comme on la prépare, par exemple, à ” recevoir le rouge de la garance , je suis déjà assuré, par une
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- » trentaine d’expériences, qu’on parviendrait à rendre ces bois -- aussi utiles aux teinturiers du bon teint, qu’ils l’ont été jus-» qu’à présent aux teinturiers du petit teint. •>
- Comme on cherche vainement dans le travail de Hellot ces 30 expériences, on se voit forcé de penser qu’en exposant sa théorie il a suivi plutôt les inspirations de sa vive imagination que les réflexions qu’auraient fait naître en lui les expériences qu’il aurait entreprises en vue de justifier l’énoncé de sa proposition.
- Le Pileur d’Apligny a prêté l’appui de son talent et de sa plume à la théorie de Hellot, mais au lieu de se borner comme ce dernier à n’étudier que la laine dans ses rapports avec les matières colorantes, il envisage sous le même point de vue la soie, le coton, le chanvre et le lin ; et pour rendre cette théorie plus probable , il a soin de la faire précéder de considérations sur la contexture des diverses fibres textiles.
- Selon lui , la laine est composée d’un nombre infini de poils, de la nature des cheveux et contenant comme eux une moelle ou substance graisseuse, qui ne sont rien que des tuyaux criblés dans toute leur lqngueur et latéralement d’une infinité de trous par lesquels les corps étrangers parviennent jusqu’au centre de ces tuyaux préalablement dépouillés de leur moelle, et cette fibre étant de toutes les fibres textiles la plus poreuse est par là même la plus facile à teindre et en même temps celle qui absorbe le plus de matière colorante. La soie n’est qu’une série de molécules de gelée animale desséchée qui, prenant plus ou moins de retrait par la dessiccation et donnant ainsi lieu à des inégalités , et partant à des pores qui n’existent qu’à la surface du fil, n’admettent que des couleurs extrêmement diluées et en très petite quantité, ce qui explique pourquoi la soie est une des fibres les plus difficiles à teindre. Le brin de coton beaucoup plus fin que celui de la laine, mais comme lui creux, rempli de moelle et muni de trous latéraux, est aussi plus difficile à teindre parce qu’il
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- PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA FIXATION DES COULEURS, i 31 n’admet dans ses pores et dans son intérieur que des couleurs beaucoup plus ténues et en moindre proportion. Les fils de lin et de chanvre, plus fins encore que les précédents , sont également poreux.
- Ces considérations établies , Le Pileur d’Apligny arrive aux conclusions suivantes :
- << On voit par l’examen de ces quatre matières, laine, soie, » coton et fil, que c’est à leurs textures qu’il faut attribuer le » plus ou le moins d’aptitude qu’elles ont à recevoir les diffé-» rentes teintures. Ainsi, sans supposer gratuitement des rai-» sons d’homogénéité ou d’affinité de règles entre les fécules » eolorées et les sujets à teindre, on comprend facilement » pourquoi celle qui donne à la laine une couleur écarlate, ne » donne pas la même couleur à la soie et n’en donne aucune ” au coton. Elle ne donne à la soie qu’une couleur de lie de » vin fort terne, parce que les parties de cochenille forment » une laque avec la chaux d’étain répandue dans le bain de » teinture. Les pores de la laine sont assez grands pour la » loger, mais ceux de la soie étant trop petits ne peuvent ad-» mettre cette laque trop grossière, ils n’admettent que les » parties cadavéreuses de la cochenille plus déliées que celles de ” la laque (parce qu’elles sont simples), mais dont la chaux » d’étain (oxide stannique) a absorbé presque toute la couleur. ” Le coton, dans son état naturel, n’en admet aucun dans ses ” pores ; mais, par la même raison, il reçoit, comme la soie,
- ” une couleur de lie de vin lorsqu’il a été convenablement dé-» creusé.
- » Il résulte encore de la texture différente des matières qu’on ” veut teindre, que chacune d’elles prend différentes nuances " dans les teintures qui peuvent pénétrer dans leurs pores ,
- ” quoique l’on emploie les mêmes procédés pour les teindre.
- ” Cette observation a même lieu à l’égard des étoffes différem-” ment tissues, quoique d’une même matière : ces différents ” tissus doivent en effet occasionner un resserrement plus ou
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- » moins grand des pores de ces étoffes, qui fait qu’ils reçoi-» vent plus ou moins de fécules colorées. C’est ce resserrement » qui est cause que la tranche d’un drap écarlate est blanche » dans l’intérieur, les molécules colorées étant trop grossières » pour y pénétrer; ce qui n’arrive pas dans les autres tein-» tures pour lesquelles on aluneles draps avant de les teindre.
- » Indépendamment des raisons que je viens d’apporter , les » différentes positions et la différente finesse des poils des » étoffes occasionnent des différences, non seulement dans la » nuance, mais encore dans l’éclat des couleurs , à proportion » de la plus ou moins grande réflexion des rayons de lu-» mière. »
- Ce travail n’est donc, comme Le Pileur d’Apligny le dit lui-même dans sa préface, qu’un développement des idées de Hellot sur la teinture des laines.
- Dufay, en 1737, et Bergmann, en 1776, ont été les premiers à émettre une opinion opposée à celle que nous venons de rapporter et à recourir aux affinités chimiques pour expliquer la propriété dont jouit une matière colorante de s’unir à telle étoffe de préférence à telle autre. Bergmann surtout, dans son travail sur l’indigo, s’explique nettement à ce sujet, en disant que, si le sulfate d’indigo est attiré de préférence et en plus grande proportion par la laine que par la soie, on doit en voir la cause dans la différence d’affinité qui existe entre ces deux fibres , dont l’une , celle de la laine , est assez puissante pour enlever au bain de teinture toutes ses parties colorantes, tandis que l’autre, celle de la soie, beaucoup plus faible, ne peut que diminuer la proportion des molécules colorées qui se trouvent dans un semblable bain.
- Macquer, à qui l’art de la teinture doit les travaux les plus importants qui aient été faits sur les moyens de fixer les couleurs, semblait, du moins à une certaine époque de sa vie, pencher vers les idées de Hellot; mais en 1778 , dans l’article Teinture de son Dictionnaire de Chimie, il émit clairement
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- une opinion toute différente ; car après avoir rapporté quelques particularités essentiellement propres aux matières colorantes qui produisent des couleurs aussi variées dans leurs nuances que dans leur intensité à mesure qu’on fait varier les fibres sur lesquelles on les imprime , cet habile chimiste ajoute :
- » Ce qui paraît résulter de plus général de ces détails par-” ticuliers, c’est que la laine, et même toutes les matières ani-” males , sont, de toutes les substances qu'on peut teindre,
- ” celles qui se prêtent le plus aux opérations de la teinture; que » le fil et toutes les matières purement végétales sont, au con-” traire, celles qu’il est le plus difficile de teindre, qui prennent ” le moindre nombre de couleurs , et de plus qui les prennent ” les moins belles et les moins solides ; enfin, que la soie et » autres substances qui paraissent tenir le milieu entre les ma-» tières purement animales et celles qui sont purement végé-” taies, tiennent aussi le milieu à cet égard dans les opérations ” de teinture.
- » Cette facilité plus ou moins grande que les différentes ma-n tières ont à prendre et à retenir la teinture dépend certai-” nement en grande partie du nombre, de la grandeur, de ” la disposition des pores et de leur proportion avec les par-” ticules colorées de matières teignantes; mais ce n’est assu- * ” rément point là la seule cause des grandes différences qu’on » observe relativement à la nature des matières à teindre. Voici ” un fait très constant et très connu dans la teinture qui ” prouve cette vérité avec évidence.
- ” Si après avoir aluné, autant qu’il est possible, une livre »> de laine et une livre de soie, on les teint ensuite chacune ” séparément dans un bain de cochenille , elles prendront 1 une " et l’autre un cramoisi très beau et très solide ; mais a quan-” tité de cochenille égale dans chaque bain, la couleur de la ” laine aura infiniment plus de plénitude et d’intensité que ” celle de la soie : cette différence est si grande qu’on ne peut ” parvenir à donner au cramoisi de la soie autant d intensité
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- -• qu’à celui de la laine, qu’en y employant une quantité de » cochenille plus que double; c’est-à-dire qu’il faut deux onces » et demie de cet ingrédient pour donner à la livre de soie un » cramoisi aussi plein que celui que la livre de laine prend avec » une seule once du même ingrédient. Et l’on ne peut pas » dire , avec M. Le Pileur d’Apligny, que cela vient de ce que » les pores de la soie étant beaucoup plus fins que ceux de la » laine, elle ne peut prendre que les parties colorantes les » plus fines de la cochenille , tandis que la laine les prend » toutes, parce que ses pores sont plus grands ou plus nom--- breux ; s’il en était ainsi, il devrait rester beaucoup de cou-•• leur dans le bain où la soie en a pris tout ce qu’elle pouvait » et refusé d’en prendre davantage; or, c’est ce qui n’arrive -- point ; il est constant, au contraire, que la soie teinte , à » raison de deux onces et demie de cochenille par livre, laisse >• son bain aussi clair et aussi épuisé de couleur, que l’est celui » de la laine teinte par une seule once de cochenille.
- .. Il faut donc qu’il y ait quelque autre cause que la grandeur » et la disposition des pores, qui influe puissamment dans la » différence des effets qu’on observe relativement à la nature » des matières qui reçoivent la teinture. Les pores, en multi-» pliant les surfaces et les points de contact de la matière à h teindre avec la matière teignante, ne peuvent manquer, sans » doute, de faciliter considérablement l’application de cette » dernière ; mais ce n’est point un simple enchâssement des » atomes colorés dans les pores qui leur servent comme de » chaton : il y a de plus une adhérence réelle de contact, et » même une combinaison chimique de ces particules colorées » avec la substance même sur laquelle elles s’appliquent, et » cette adhérence est, comme dans toutes les autres unions, » plus ou moins intime et forte, suivant la nature des matières » qui s’unissent. Il estaisé de sentir, en effet, que le nombre et » la profondeur des pores, loin de faire valoir les parties colo-» rantes, est bien plutôt capable de les absorber, de les ca-
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- » cher, et de diminuer par conséquent l’intensité de la teinture. ” C’est donc principalement en s’appliquant sur les surfaces, où » rien ne les couvre, que les atomes colorés des matières tei-» gnantes font prendre la couleur aux matières teintes; c’est « une espèce de peinture dont les parties s’appliquent et adhè-» rent aux surfaces par l’effet du contact et en vertu del’affi-» nité plus ou moins grande qu’elles ont avec les parties de •> ces mêmes surfaces, suivant leur nature respective. -•
- En traitant le même sujet, Berthollet n’a apporté dans la question aucun argument nouveau ; mais dans les éléments qu’il a publiés sur l’art de la teinture , il groupe tous les faits importants de cet art, et en tire une série de conclusions qui tendent toutes à faire considérer les phénomènes qu’on y observe comme dépendants de l’affinité chimique.
- De tous les chimistes, M. Chevreul est celui qui a le plus approfondi cette importante matière ; et en comparant, comme il le fait dans le Dictionnaire technologique, t. XXI, p. 239, les phénomènes généraux de la teinture à ceux que les physiciens et les chimistes considèrent généralement comme dépendants des forces moléculaires, causes de l’action chimique , il arrive à prouver que les premiers sont du nombre de ceux que l’on constate lorsque deux ou plusieurs corps sont en contact et que leur combinaison s’effectue d’une manière lente.
- On voit par les extraits que nous avons donnés et par les citations que nous avons faites que , tandis que Hellot et Le Pileur d’Apligny rattachent tous les effets produits par les matières colorantes dans les opérations de la teinture à l’existence dans les fibres de pores ou cavités plus ou moins nombreuses et spacieuses, où viennent se loger les atomes colorants , tous les autres chimistes repoussent cette manière de voir et font découler ces mêmes effets de l’affinité chimique.
- Toutefois les conclusions de Macquer ont un caractère particulier sur lequel nous croyons devoir insister : c’est que, tout
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- en rejetant les opinions émises par Le Pileur d’Apligny, il ne nie pas l’influence des pores et de la nature des fibres, et pose la proposition formelle que les parties colorantes s’appliquent et adhèrent aux surfaces des fibres , par ï effet du contact et en vertu de l'affinité plus ou moins grande qu’elles ont avec les qiarties de ces mêmes surfaces , suivant leur nature respective.
- Telles étaient les notions que possédait la science sur les causes de l’adhcrence des matières colorantes aux étoffes, quand a paru, dans ces derniers temps, le travail de M. Walter Crum. D’apres les expériences de de Saussure , si pleines d’intérêt et que tout le monde connaît, on sait que le charbon absorbe les gaz sans les dénaturer, en proportions qui varient, selon la nature de ces gaz, la sienne propre et son état de porosité. Personne n’ignore non plus les applications que l’on fait journellement de ce corps dans les arts pour décolorer les sirops en les débarrassant de telles ou telles substances. C’est dans cet ordre de faits et éclairé , d’ailleurs, des travaux théoriques du célèbre chimiste de Berlin, queM. Walter Crum vient de puiser des arguments en faveur des idées de ITellot. 11 avance , en effet, après avoir passé en revue les divers modes d’action des corps poreux, que plusieurs opérations de teinture dépendent de l’action capillaire décrite par de Saussure, et cette opinion, il l’appuie surtout du résultat de l’examen microscopique qu’ont fait des fibres de coton M. Tompson de Clitheroe et M. Bauer, cet examen ayant établi que ces fibres sont formées de tubes transparents et comme vitreux qui, cylindriques avant leur maturité, s'aplatissent au contraire d’un bout à l’autre en mûrissant et présentent alors l’aspect de deux tubes séparés. M. Walter Crum pense que, puisque Tes parois de ces tubes permettent le passage de l’eau , elles doivent être poreuses; mais il ajoute que ni la forme, ni l’existence même de telles perforations latérales n’ont pu être découvertes à l’aide du microscope le plus puis-
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- sant. C’est, comme on le voit, l’hypothèse mise en avant par Le Pileur d’Apligny, présentée sous une nouvelle forme et avec la réserve d’un esprit essentiellement expérimental. Cette hypothèse admise, voici comment le fabricant anglais explique la fixation des couleurs. Il admet d’abord que la base minérale d’une couleur garancée (oxide ferrique ou aluminique) traitée par un acide volatil ( l’acide acétique , par exemple ) donne lieu à une solution qui, imprimée sur le tissu, s’y décompose peu à peu avec le temps , en abandonnant son acide, tout comme elle se décomposerait dans des circonstances semblables sans l’intervention du coton ; et si cette base déposée sur le tissu y reste adhérente au point de résister à l’action du lavage le plus parfait, c’est que la solution, après avoir pénétré par les ouvertures latérales dans l’intérieur des tubes qui composent le coton, y a été décomposée, et que l’oxide , devenu libre dans l’étroit couloir où il a été renfermé, n’en peut plus être dégagé. Quand alors le coton, composé de sacs ainsi garnis d’oxide métallique, passe dans un bain de garance ou de toute autre matière colorante, celle-ci se combine avec l’oxide métallique par suite d’une véritable action chimique , pour former une laque ou couleur proprement dite.
- Telle est la théorie qu’adopte M. Walter Crum , et qu’il s’efforce de justifier par plusieurs arguments. Selon lui, par exemple, en faisant dépendre l’adhérence des couleurs de la force d’attraction qui unit les corps d'atome à atome, on est forcé d’admettre la désorganisation du tissu alors que l’expérience prouve que le coton en laine peut être teint par des oxides métalliques sans que la fibre en soit endommagée, puisqu’elle se retrouve avec toutes ses propriétés quand, par des procédés chimiques, on l’a dépouillée de la couleur dont elle était imprégnée. L’habile fabricant anglais trouve une nouvelle preuve à l’appui de sa manière de voir, dans les observations qu’il a faites, tant à l’œil nu qu’à l’aide du microscope, sur des brins de coton teints en bleu, en rouge et en jaune , et d’où il ré-
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- sulterait que ces couleurs , qui paraissent répandues uniformément sur toute la surface des fibres, ne feraient, observées au microscope, que colorer la paroi interne des tubes, qui seraient eux-mêmes incolores. La coloration des plantes lui offre aussi un terme de comparaison auquel il rattache les phénomènes de la teinture, et, avec le docteur Lindley, il regarde leur tissu cellulaire comme formé de petites vésicules dont les ouvertures, pour n’être pas visibles, rien doivent pas moins exister, puisqu’elles sont perméables aux liquides, et, se remplissant de diverses matières colorantes, donnent naissance aux couleurs qui caractérisent les divers organes des plantes. Enfin, M. Walter Crum discute les opérations de la teinture à l’indigo, dans le but de prouver qu’il n’y a pas combinaison chimique, dans le sens du mot, lorsqu’on fixe cette matière colorante sur les étoffes. (Soc.phil. de Glasgow, 1842-1843. )
- Ce sont là en quelques mots les principales considérations que fait valoir ce chimiste; nous allons examiner jusqu’à quel point cette théorie, qui, de l’aveu même de son auteur, a plusieurs points de ressemblance avec celle de Hellot et de Le Pileur d’Apligny, est soutenable en raison des faits sur lesquels elle est basée.
- D’après la première proposition, l’acétate aluminique, par exemple, se décomposerait en présence des tissus comme s’il était libre, et l’expérience nous semble en opposition ici avec une telle assertion. Nous ne contestons pas que ce sel libre ou en présence du tissu se résume en acide acétique et en oxide aluminique ou acétate basique; mais que, à quantités égales et répandues sur des surfaces égales de toile de coton , de lames de verre, de mica ou de platine , et desséché, d’ailleurs, dans les mêmes conditions, cet acétate abandonne toujours la même quantité d’oxide aluminique, c’est ce qu’il nous est impossible d’accorder. En effet, si la dessiccation a lieu à une température peu élevée, la quantité d’oxide aluminique enlevée à l’acétate par le coton sera incomparablement plus grande que celle qui
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- deviendra libre sur les lames de verre ou de mica ; il faut donc en conclure que la fibre textile du coton exerce une influence notable sur la décomposition de l’acétate aluminique. Que s’il existe encore des doutes sur la part que peut avoir la fibre dans la décomposition d’un mordant, le fait ci-après doit, ce nous semble, les dissiper. Une solution d’alun cubique soumise à une évaporation spontanée donne des cristaux d'alun cubique ; mais si l’on y fait séjourner durant un certain temps des étoffes de soie et de coton , cette même dissolution ne fournit plus , après avoir subi une évaporation spontanée, que des cristaux d’alun octaédriques, dépouillée qu’elle est par ces tissus d’une notable portion de sa base.
- Si de cette proposition nous passons à celle qui est comme le fondement de la théorie que nous discutons, et d’après laquelle on devrait envisager la fibre du coton comme formée de petits sachets capables de se remplir de matière colorante ou d’un oxide susceptible de s’unir ensuite chimiquement à la substance teignante d’un bain de teinture, nous ne la trouvons pas moins opposée à toutes les données de l’expérience. Comment expliquer, en effet, que des liquides aussi visqueux que les couleurs épaissies à la gomme ou à l’amidon, qu’on imprime sur les tissus , puissent chasser l’air qui se trouve dans les sachets de la fibre cotonneuse et en occuper la place? Faudrait-il admettre que ces sachets ne contiennent pas d’air, ou qu’ils sont doués d’une attraction capillaire des plus puissantes? Cette manière de voir ne nous paraît guère admissible ; toutefois ce u est pas la plus grande difficulté que présente cette hypothèse. On apprête avec l’empois d’amidon et avec une certaine quantité de sulfate cuivrique, les pièces que l’on veut teindre en bleu de cuve (voy. Gros bleu) , afin d’économiser la matière colorante de l’indigo. D’après la théorie de M. Walter Crum, cet apprêt remplissant les petits sachets devrait être un obstacle à la teinture, et cependant l’expérience prouve , au contraire, qu il la favorise. De même, dans la fabrication du rouge turc
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- nous verrons qu’on imprègne d’abord les toiles de préparations huileuses et ensuite de substances astringentes, telles que la noix de galle, le sumac, etc., avant de faire intervenir le sel alumi-nique qui sert de base à ce genre de teinture.
- Quand on plonge une toile de coton dans une dissolution de chlorure ou de sulfate manganeux et qu’on la passe ensuite dans une solution alcaline, on précipite de l’oxide manganeux qui, d’après M. Walter Crum, est rendu insoluble, non pas à la surface de la fibre, mais au sein de ses sachets , où il absorbe une nouvelle quantité d’oxigène et se transforme en suroxide manganique , qui se trouve ainsi adhérer à la fibre ; mais une toile qui, par ce procédé , serait chargée le plus possible de suroxide manganique, ne devrait plus pouvoir attirera elle une autre matière colorante, et cependant il est si bien démontré qu’en pareil cas elle est plus que jamais apte à s’imprégner de bleu d’indigo , qu’on se sert de la propriété que possède le suroxide manganique de favoriser la précipitation de ce bleu, pour en obtenir dédoublés nuances. On n’alléguera pas que l’indigo n’adhère qu’au suroxide manganique , et qu’il suffit d’enlever ce suroxide pour voir en même temps disparaître la matière colorante qui s’y est associée, puisqu’on peut toujours, en détruisant le suroxide manganique au moyen du chlorure stanneux, faire reparaître le bleu avec l’éclat et la solidité qu’il a quand il est fixé directement sur l’étoffe sans le concours de ce suroxide.
- Déposé à la surface d’une toile de coton, le sulfate plom-bique, qui est insoluble, s’en détache par le plus léger lavage à l’eau; mais en plongeant simplement l’étoffe dans un lait de chaux on peut le rendre adhérent à la fibre sans le faire passer à l’état liquide, sans qu’il puisse par conséquent pénétrer dans les vésicules du tissu.
- Enfin, beaucoup de couleurs peu adhérentes aux étoffes, même avec le concours de certains mordants, s’y fixent avec énergie quand ces étoffes sont préalablement préparées à
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- l’oxide d’étain. Cet oxide, de même que les corps gras et astringents employés dans la fabrication du rouge turc, ne devrait-il pas , si l’hypothèse qui nous occupe était fondée, remplir les cavités de la fibre du coton, et, partant, s’opposer à l’introduction et à la fixation des couleurs qu’on y applique postérieurement ?
- Passant de cet ordre de faits à un autre, on voit bientôt, en examinant attentivement une étoffe teinte ou imprimée, que la couleur y est toujours à la surface et en relief; rien ne le prouve mieux d’ailleurs que la facilité avec laquelle on enlève cette couleur par des rongeants épaissis. Si elle n’adhérait au tissu qu’en pénétrant et en remplissant les vésicules des fibres, comment un acide épaissi pourrait-il s’introduire dans ces mêmes vésicules et enlever l’oxide? Comment le plus léger lavage suffirait-il pour nettoyer ces cellules des composés chimiques qui se seraient formés dans leur intérieur? D’autre part, le grand art de produire du rouge turc vif et brillant ne consiste-t-il pas à ne déposer le mordant ou la couleur qu’à la surface de l’étoffe? Si le centre en était imprégné, le rouge deviendrait brun et ne pourrait jamais être avivé.
- Du reste, le fait que la fibre se retrouve intacte après les opérations de la teinture , tandis qu’elle devrait être désorganisée si sa combinaison avec la matière colorante s’était effectuée d’atome à atome en vertu de la force d’attraction , et celui que l’indigo s’unit avec la fibre en conservant toutes ses propriétés , ne prouvent point, selon nous ,. qu’il n’y ait pas combinaison entre la matière colorante et le tissu; l’explication de ces phénomènes en apparence anormaux dépend seulement du point de vue où l’on se place et des distinctions que 1 on établit dans les phénomènes d’attraction. Nous allons essayer de traiter cette question en empruntant à un travail inédit que nous avons fait sur les combinaisons chimiques en général, les matériaux propres à l’éclairer dans ce qu’elle a ici de spécial.
- Dans l’état actuel de nos connaissances, on considère 1 inertie
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- de la matière comme une propriété générale des corps, et l’on reconnaît que, si leurs particules peuvent être animées et se maintenir en équilibre les unes par rapport aux autres, c’est qu’elles sont soumises à l'influence de deux forces opposées, et qui tendent, l’une à les rapprocher, l’autre à les éloigner. La première, la seule qui doive nous occuper, est désignée sous le nom à’attraction , mais comme elle agit tantôt sur des masses placées à de grandes distances les unes des autres, tantôt sur des particules qui sont en contact immédiat, on a , à tort ou à raison, distingué l’attraction en attraction planétaire et en attraction moléculaire ; de plus, comme cette dernière se manifeste, soit sur des particules de même nature qui sont ainsi attirées les unes vers les autres de manière à former un agrégat de particules homogènes, soit sur des particules de nature hétérogène pour créer un tout digèrent et distinct des particules composantes , on a encore été amené à diviser l’attraction moléculaire en cohésion ou force qui tend à réunir les molécules de même nature, et en affinité ou force qui tend à réunir les molécules de nature différente, ou à opérer ce que les chimistes appellent la combinaison. Ces distinctions disparaîtront tôt ou tard, car elles sont moins des vérités que le résultat nécessaire des besoins d’une époque. Ce qui caractérise en effet la première phase du développement d’une science, c’est toujours une • tendance à différencier et à grouper les phénomènes qu’elle présente ; -mais, à mesure que la science se constitue, il se produit bientôt une réaction dont les tendances contraires n’ont d’autre but que le rapprochement et la liaison de tous les éléments qui la constituent. Quant à nous , depuis longtemps nous nous sommés expliqué catégoriquement sur la distinction jusqu’ici admise entre Xaffinité et la cohésion. (Voyez p 833 83/i de notre introduction à l’étude de la chimie moléculaire.)
- Comme c’est l’attraction qui anime les particules matérielles, il faut voir en elle la cause du mouvement de la matière et l’accepter, sans vouloir remonter plus haut, comme une propriété
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- essentielle des corps que nous ne pouvons pas plus nous expliquer que Y étendue et Y impénétrabilité, dont nous ne savons rien dire autre chose sinon qu’elles existent.
- Ces préliminaires posés et confondant les phénomènes de la cohésion et de l’affinité qui nous paraissent les effets d’une même cause, nous prétendons prouver que la fixation des couleurs sur les étoffes n’est due qu’à l’attraction. Pour arriver à cette démonstration, nous établirons d’abord quelques considérations générales sur la fixation des matières colorantes, puis nous passerons en revue les principaux phénomènes d’attraction , dans le double but de faire ressortir les différences qu’ils peuvent offrir et de découvrir ceux qui présentent le plus d’analogie avec la fixation de telle ou telle couleur.
- Le règne organique et le règne inorganique, le premier surtout, fournissent un grand nombre de substances qui possèdent la propriété de teindre les étoffes, soit qu’elles constituent des couleurs par elles-mêmes, soit qu’elles entrent comme éléments dans des composés colorants plus compliqués ; mais , pour recevoir une application, ces substances, simples ou complexes , doivent réunir, si ce n’est par elles-mêmes , du moins par l’intervention de corps convenablement choisis, deux qualités essentielles : la première, celle d’être insolubles ou solubles • la seconde , celle de résister le plus possible à l’action destructive de l’air et des rayons solaires. La première de ces qualités est indispensable, car si elle fait défaut il y a coloration d’une étoffe , mais il n’y a pas teinture dans le sens du mot ; un simple lavage à l’eau suffit pour faire disparaître la couleur. La seconde ne l’est pas au même degré , puisqu’elle est subordonnée à la stabilité qu’on désire donner aux couleurs que l’on applique sur un tissu.
- L’indigotine, la carthamine, la curcumine, l’oxide ferrique, l’oxide chromique, le sulfide arsénieux, le sulfide antimonique, sont des matières teignantes par elles-mêmes. Quand on interroge l’expérience sur les moyens de les faire adhérer aux tissus
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- au point qu’ils fassent corps avec eux, on trouve qu’il est de toute nécessité ou de former ces couleurs sur l’étoffe même, en mettant en la présence de celle-ci les éléments qui les constituent et dont un au moins doit être soluble, ou, si ces couleurs sont préalablement formées, de les faire entrer dans un combinaison soluble dont on imprègne le tissu pour les mettre ensuite en liberté, de telle sorte qu’elles soient en contact immédiat avec lui au moment où elles passent de l’état soluble où elles se trouvent dans leur combinaison à l’état d’insolubilité qui leur est propre dans leur isolement. C’est ainsi que la couleur bleue d’indigo ne se fixe sur les étoffes qu’autant qu’on les imprègne d’indigo réduit, § 391, et qu’on les expose ensuite à l’action de l’air, qui, par son oxigène, transforme l’indigo blanc en indigo bleu ; que la couleur rouille de l’oxide ferrique n’est stable qu’autant qu’on dépose à l’état naissant sur le tissu, soit de l’oxide ferreux, qui, en s’oxidant à l’air, passe peu à peu à l’état d’oxide ferrique, soit de l’oxide ferrique. La couleur de l’oxide chromique ne se fixe pas autrement. Nous verrons qu’il suffit d’appliquer aux étoffes , pour y faire adhérer les sulfides arsénieux et antimonieux , une des combinaisons salines et solubles de ces corps , puis de l’y décomposer par un acide afin de les mettre en liberté. La fixation de la carthamine a lieu à des conditions à peu près semblables.
- La plupart des matières colorantes (les 9/10 au moins) ne sont pas teignantes par elles-mêmes et ne le deviennent qu’en entrant dans une combinaison qui a non seulement pour objet de leur donner la première qualité indispensable à toute couleur pour être fixée , Y insolubilité , mais encore le plus souvent de leur faire contracter une nuance qu’elles n’affectent pas par elles-mêmes. La matière colorante de la garance, par exemple, qui est soluble dans l’eau, n’acquiert la propriété de teindre qu’autant qu’on la combine avec un corps capable d’abord de former avec elle un composé insoluble, comme certaines substances grasses, les oxides aluminiques, stannique, stanneux,
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- ferrique, etc., et ensuite de lui faire contracter la nuance que l’on désire obtenir; car nous ne devons pas perdre de vue ce qui a été dit, § 367, au sujet de l’influence du volume des bases sur la nuance des laques. '
- Les divers bois de teinture ne teignent pas mieux par eux-mêmes que la garance : aussi doivent-ils, comme elle, entrer préalablement dans une combinaison.
- L’acide chromique lui-même, tout riche qu’il est en couleur, ne devient substance teignante qu’autant qu’il fait partie d’une combinaison saline qui doit présenter', avec la nuance que l’on cherche, la plus grande insolubilité possible. Nous aurons occasion de voir plus tard que l’oxide aluminique, qui sert de base à toutes les couleurs organiques, ne peut fixer l’acide chromique.
- Ce n’est qu’autant qu’on les forme sur les étoffes mêmes que les composés teignants de ce groupe y deviennent adhérents. Dans tout autre cas il n’y a pas teinture, à moins, comme il arrive quelquefois, que la combinaison ne devienne peu à peu insoluble , soit par elle-même (icarthamine), soit par l’intervention d’un agent convenable [cachou). L’expérience prouve en outre que des deux substances qui concourent ordinairement à la formation de la couleur, c’est celle qui est insoluble qu’on doit fixer d’abord sur le tissu, et avec les mêmes précautions que s’il s’agissait d’une des substances qui sont teignantes par elles-mêmes. On ne s’écarte de cette règle qu’autant que les éléments de la laque, également solubles et doués d’ailleurs d’une égale tendance pour la fibre de l’étoffe, permettent d’imprégner indifféremment celle-ci en premier lieu de l’un ou de l’autre : ainsi on rend adhérente la combinaison colorée que forment la noix de galle et une préparation ferrugineuse, soit en déposant d’abord le composé ferrugineux sur le tissu, que l’on fait passer ensuite dans une décoction de noix de galle, soit en commençant par imprégner l’étoffe de cette
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- infusion, pour la faire passer ensuite clans une préparation
- ferrugineuse.
- Ce rapide coup d’œil que nous venons de jeter sur la formation et sur la fixation des matières teignantes suffira, sans doute , pour faire comprendre que le sujet que nous examinons présente des ordres de faits qui ne doivent pas être confondus. Ce sont, par exemple, dans la fixation de l’indigo, d’une part, la formation de l’indigo bleu, et d’une autre, l’adhérence de celui-ci à l’étoffe. Le premier de ces faits rentre dans les phénomènes d’oxidation les mieux définis; le second dans ceux d’adhérence ou de juxtaposition , qui se confondent plus ou moins avec les faits d’agrégation des particules similaires. Dans la fixation de la couleur de la garance et de toutes ses congénères il y a également deux ordres de faits : l’un qui se lie aux actions chimiques les mieux connues : nous voulons parler de l’union de cette matière colorante avec l’oxide, qui est appelé à lui donner, outre l’insolubilité qui lui est nécessaire , la nuance désirée ; l’autre qui consiste dans la juxtaposition et l’adhérence à l’étoffe des laques qu’elle engendre. De même , dans la fixation de l’acide chromique, considéré comme matière colorante , il faut distinguer la formation du composé salin coloré que l’on veut obtenir, et sa fixation proprement dite sur le tissu. Il y a donc dans toutes les opérations de la teinture et de la fixation des couleurs, certains phénomènes qui, rentrant dans les réactions chimiques les plus vulgaires , ne sauraient donner lieu à aucune discussion ; voyons s’il n’est pas possible de faire disparaître aussi toute indécision en ce qui concerne les autres.
- Toutes les fois que deux corps sont mis en contact dans les conditions convenables pour réagir l’un sur l’autre, leurs molécules, en se combinant ou en se juxtaposant, forment un composé dont les propriétés s’éloignent d’autant plus de celles des composants que les propriétés physiques de ces derniers
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- offrent une plus grande différence. Ainsi, dans les oxides, comme dans la plupart des sulfures métalliques, les propriétés des métaux ont presque complètement disparu , tandis que dans les combinaisons des métaux qui présentent moins d’éloignement entre eux , les propriétés des composés se rapprochent davantage de celle des composants. C’est surtout dans les combinaisons salines d’un ordre élevé qu’on peut constater la justesse de cette remarque.
- En parcourant l’échelle des combinaisons chimiques depuis l’une de ses extrémités, où deux corps doués de propriétés opposées se combinent pour former un tout qui, le plus souvent, n’a plus aucun rapport apparent avec ses composants , jusqu’à l’autre, où des corps s’unissent sans que leur union donne lieu à des phénomènes plrysiques apparents ou qu’ils offrent des changements notables à la vue, on remarque qu’en général les composés dont les dimensions s’éloignent le plus de celles de la moyenne des composants, sont ceux dans lesquels.on constate les plus fortes différences, et encore que les combinaisons qui, en s’effectuant, développent le plus de chaleur sont «elles dont les propriétés des composés s’éloignent le plus de celles des composants.
- A côté de ces phénomènes dans lesquels deux corps simples ou composés sont attirés l’un vers l’autre pour former un nouveau tout ayant plus ou moins de rapport avec les composants, il en est d’autres qui, en apparence, semblent s’éloigner des premiers , mais qui, en réalité, se confondent avec eux , ainsi qu’on va en juger.
- On sait que deux lames bien planes superposées sans interposition d'air adhèrent entre elles , et d’après une expérience de M. Clément Désormes , deux plaques de verre superposées dans cette condition ont fini par se souder au point de ne former pour ainsi dire qu’un tout. Il ne faut donc qu’une juxtaposition pour déterminer un phénomène d’attraction, et 1 on conçoit dès lors que les molécules d’une dissolution saline , qu elles
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- soient de même nature ou de nature différente, mais physiquement comparables tant sous le rapport de leurs dimensions que sous celui de leur forme géométrique, puissent donner lieu à un agrégat qui reproduise en grand la figure qu’elles ont à l’état de division extrême où elles sont invisibles : aussi voyons-nous que les particules d’un sel tenu en dissolution passent à l’état solide en affectant une forme cristalline qui est la même, quel que soit le volume des cristaux que l’on observe. De même, quand par un choc on détermine la désagrégation d’un cristal de spath d’Islande, on trouve que les parcelles dans lesquelles il se divise en sont l’image fidèle. Lorsqu’on calcule les volumes des équivalents des sulfates zincique, inagnésique et ferreux, on reconnaît qu’ils sont les mêmes et peuvent être représentés par 896 centimètres cubes; il n’est donc pas étonnant que ces sels cristallisent ensemble et en toute proportion ; et comme ils affectent la même forme cristalline et que les dimensions de leurs molécules sont les mêmes, il en résulte comme conséquence que dans une circonstance donnée ils peuvent concourir à la formation d’un agrégat qui contiendra indistinctement des quantités prédominantes de l’un ou de l’autre de ces sels. Le volume d’un équivalent d’alun octaédrique est de 3584cr, celui de l’alun de chrome, isomorphe avec le 1er, de de-3584e''; on peut donc développer un cristal d’alun ordinaire dans une solution d’alun de chrome, sans qu’il change déformé, et réciproquement.
- La différence qui existe entre ces deux ordres de phénomènes , c’est que dans les derniers la juxtaposition est immédiate,* en sorte que des particules de même nature ou dénaturé différente, mais de dimension et de forme identiques, se trouvant en contact, se juxtaposent, tandis que dans les premiers cette juxtaposition n’a plus le même caractère, subordonnée qu’elle est aux changements qui surviennent dans les dimensions des particules des corps hétérogènes qui sont en présence. D’où l’on doit conclure, en ce qui touche ce dernier ordre de
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- faits, que trouver les conditions dans lesquelles deux corps se combinent, c’est établir la circonstance où leurs molécules sont amenées aux dimensions où une juxtaposition devient possible, soit que l’un d’eux, en abandonnant tout ou partie du calorique qui tient ses particules à distance, soit ramené aux dimensions de celui en la présence duquel il se trouve, soit, au contraire, que par une absorption de calorique, les particules de ce corps acquièrent le volume qu’elles doivent occuper dans la combinaison.
- Enfin on connaît un troisième ordre de phénomènes qu’il est plus difficile de rapprocher de ces deux premiers : nous voulons parler de ceux auxquels donnent particulièrement lieu les corps poreux et les corps réduits en poudre.
- Les travaux de Morozzo, de Rouppe ( Journal de Physique, t. XXII et LVIII ) , de Noorden ( Annales de Chimie, t. XXXII) , et surtout ceux de Th. de Saussure ( Bibliothèque britannique, 1812) , nous ont révélé sous ce rapport des faits de la plus grande importance en nous faisant connaître la propriété dont jouissent tous les corps poreux , et le charbon en particulier, d’absorber les gaz, absorption qui dépend :
- 1° Du degré de chaleur ou l’on opère, puisqu’elle est d’autant plus grande que la température est plus basse 5
- 2° De leur pression, puisque l’absorption est d’autant plus forte que la pression est plus élevée ;
- 3° De la nature du gaz , puisque des volumes égaux d’un charbon de même nature absorbent, savoir :
- 90 fois leur volume de gaz ammoniac.
- 85 —
- 65 —
- 55 —
- 40 —
- 35 —
- de chloride hydrique, d’acide sulfureux, de sulfide hydrique d’oxide nitreux.
- 35 —
- 9.42 —
- d’acide carbonique, de carbure bi-hydrique. d’oxide carbonique.
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- 9,25 — 7,5 -1,75 —
- d’oxigène. de nitrogène. d’hydrogène.
- 4° De la nature des corps absorbants, puisque , ainsi que l’a observé Théodore de Saussure , l’écume de mer absorbe plus de nitrogène que de gaz hydrogène , et qu’au contraire les bois condensent plus d’hydrogène que de nitrogène , et que de tous les corps sur lesquels ce chimiste a opéré, la soie, la laine , la filasse de lin, les bois de coudrier, de mûrier et de sapin, le pyrophore , les poudres métalliques , le plâtre, le carbonate calcique spongieux, le quartz de Vauvert, l'hydro-phane, Tasbeste ; le schiste happant, l’écume de mer et le charbon de buis , c’est ce dernier qui a produit l’absorption la plus considérable ;
- 5° Du nombre des pores, puisque, si l’on met deux poids égaux d’un même charbon, dont l’un a été finement pulvérisé, en contact avec le même gaz , le charbon non pulvérisé en absorbe 7,26 fois son volume , et l’autre seulement 4,25;
- 6° Du diamètre des pores, puisque , d’après Théodore de Saussure, le charbon de liège, dont la densité est de 0,1, n’absorbe pas sensiblement d’air, tandis que le charbon de sapin , dont la densité est de 0,4, en absorbe 4 [ fois son volume , et celui de bois, dont la densité est de 0,6, 7 | fois son volume ;
- 7° Enfin du vide des pores , qui rend l’absorption d’autant plus grande qu’il est plus parfait.
- Les gaz fixés de la sorte sont absorbés en nature sans subir de décomposition , puisqu’il suffit de la plus légère élévation de température ou d’une diminution de pression pour les mettre en liberté avec toutes leurs propriétés; il n’y a que les gaz oxigène et oxide nitreux qui, absorbés par le charbon , ne se retrouvent plus en totalité , attendu que dans ces circonstances ils forment des combinaisons avec ce corps.
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- L’action des corps poreux est si puissante que M. Dobereiner., MM. Dulong et Thénard, et beaucoup d’autres après eux, l’ont mis à profit pour réaliser des combinaisons chimiques dans des conditions de température où l’on était loin de supposer qu'elles fussent possibles. Comment se fait-il que dans ces expériences l’effet d’ un corps poreux soit égal en puissance à celui qu’on n’obtiendrait que d’une pression de plusieurs atmosphères ou d’un abaissement considérable de chaleur, si l’on tentait directement la liquéfaction des gaz?
- L’effet que les corps solides et poreux produisent sur les gaz est également réalisé par les liquides qui, comme on le sait, les dissolvent. Il y a même une observation à faire à ce sujet : c’est que l’absorption des gaz par les corps poreux est en relation avec leur solubilité dans l’eau, puisque, ainsi qu’on peut le remarquer, ceux qui se dissolvent le plus facilement dans l’eau sont aussi ceux dont l’absorption est la plus grande.
- Dans cette même classe de phénomènes on constate une autre série de faits non moins surprenants, mais moins bien établis : le charbon animal mis en contact avec les solutions de matière colorante les rend incolores, et cette propriété lui est commune avec beaucoup d’autres corps, tels que les oxides métalliques et les sels basiques. Mais les réactions de ces différents corps sur les bains. colorés sont-elles dues à la même cause? Le charbon agit-il aux mêmes conditions que les oxides métalliques et les sels basiques? Evidemment non 5 car c’est parce que ces derniers interviennent comme éléments générateurs des sels qu’ils fixent des quantités de matières colorantes proportionnelles à leurs équivalents respectifs, et d’ailleurs la matière colorante n’en est séparée que par l’intervention d un corps qui joue le même rôle chimique, mais avec une énergie plus grande, tandis qu’à moins de reconnaître au charbon une propriété qui lui a été refusée jusqu’à ce jour, celle d’engendrer des sels, il faut admettre que son action est toute spéciale, toute distincte, ou que celui sur lequel on a constaté son
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- pouvoir décolorant n’était point du charbon pur, et contenait des matières organiques ou inorganiques capables d’attirer les couleurs.
- Là ne se bornent pas les effets des corps poreux, et en particulier ceux du charbon ; car on a constaté que la puissance de celui-ci est suffisante pour vaincre des affinités chimiques même assez fortes. D’après les expériences de M. Graham, il jouirait de la propriété d’enlever les oxides, non pas aux sels neutres, sur lesquels il serait sans action , mais à beaucoup de sels basiques et aux solutions d’oxides métalliques dans les alcalis ; et dans ces circonstances l’intimité du contact serait telle, que les sels plombiques et les sels argentiques surtout seraient réduits et les métaux mis en liberté.
- M. Chevalier, non seulement se rencontre avec M. Graham quant à ces effets du charbon, mais va encore plus loin, et soutient que l’action de ce corps s’étend jusque sur les sels neutres plombiques, car il avance avoir enlevé au moyen du charbon tout l’oxide plombique d’un poids donné de nitrate plombique préalablement dissous dans l’eau. La contradiction des résultats obtenus sur ce point par MM. Graham et Chevalier réclame un nouvel examen ; mais comme ce dernier n’a pas constaté par des expériences directes jusqu’à quel point était pur et exempt de toute matière organique ou inorganique, le charbon qu’il a employé , on peut sans trop de témérité , jusqu’à preuve contraire, mettre en doute l’action qu’il prête à ce corps sur le nitrate plombique.
- Il résulte de tous ces faits : 1° que les gaz peuvent être absorbés par les corps poreux, comme ils le sont par l’eau, en vertu d’une action toute spéciale dont nous n’avons pas à rechercher ici la cause ; 2° que le charbon décolorerait les bains de teinture et enlèverait les oxides aux dissolutions salines. Mais sous ce rapport nous croyons que de nouvelles recherches sont nécessaires pour établir cette propriété ; car si les expériences de De Saussure , celles que nous avons relatées. § 329,
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- en parlant de l’action des gaz sur la soie, etc. , et celles de M. Chevreul sur les différentes fibres textiles, mettent hors de doute que les gaz sont condensés par la fibre des étoffes, de la même manière qu’ils le sont par le charbon, il est loin d’être établi que le charbon se comporte comme la fibre en présence des matières colorantes.; autrement, comme le charbon, la fibre décolorerait un bain de cochenille, de gaude ou de garance, et le contraire est prouvé; on sait même que toutes les fois qu’une étoffe est bien purgée de matières étrangères , elle n’attire aucune parcelle de matière colorante, tandis qu’elle prend toujours plus ou moins bien la teinture s’il se trouve des oxides métalliques ou des taches de graisse à sa surface.
- Maintenant que nous avons énuméré les‘différents cas de combinaison, qui se réduisent tous, ou à une juxtaposition précédée d’un changement dans les dimensions d’un composé, ou à une juxtaposition directe , ou enfin à une absorption des corps liquides et gazeux par les corps solides et poreux, il nous reste à examiner auxquels de ces phénomènes paraît se rattacher la fixation des couleurs sur les étoffes. Nous avons déjà fait remarquer , dans ce chapitre, que la formation d’une couleur, qu’il faut bien distinguer de sa combinaison avec le tissu , rentre d’une manière incontestable dans le premier genre de phénomènes que nous venons de signaler ; telle est, par exemple, la formation de l’indigo bleu , celle de la laque de garance et de toutes les laques de cette espèce, celle du chro-mate plombique, etc. Mais, cette formation opérée, comment tous ces corps colorés restent-ils unis à la fibre ? Est-ce en vertu d’une juxtaposition immédiate , ou de la force capillaire des pores des différentes espèces de fibres, qui agiraient ici à la manière des corps poreux, du charbon, par exemple ? Selon nous, cette adhérence des couleurs est due à une juxtaposition immédiate, la matière colorante se déposant, non dans les pores des brins de coton, de laine et de soie, mais à leur surface , qui, ainsi qu’on peut s’en assurer au microscope,
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- se compose de facettes assez semblables, pour la laine, aux écailles de poisson. Qu’on plonge, en effet, à plusieurs reprises un morceau de calicot dans une cuve d’indigo désoxidé, avec la précaution d’exposer ce tissu à l’air après chaque immersion , on finira par lui donner un ton bleu des plus intenses ; or, si l’adhérence avait lieu en vertu de la force capillaire de la fibre textile du coton, il arriverait un moment où les pores remplis ne produiraient plus aucune action sur le bain de teinture , où par conséquent la fibre ne serait plus susceptible de se charger de matière colorante; et cependant l’expérience prouve qu’on peut toujours y faire adhérer de nouvelles couches , dont la moindre fixité ne provient que de ce qu’elles ne sont pas en contact immédiat avec le tissu. Ce phénomène est surtout remarquable dans la coloration du calicot par l’oxide ferrique ; car si, par des immersions successives de l’étoffe dans une préparation ferrugineuse , on y accumule des quantités très grandes et très variées d’oxide ferrique, les molécules de ce dernier se juxtaposent pour former une concrétion, tout comme les molécules de certains sels tenus en dissolution dans l’eau se déposent en couches successives pour donner naissance à ces incrustations si connues dans certaines localités ; et rien ne prouve mieux que l’oxide ferrique n’est qu’un dépôt à la surface du tissu, que la facilité avec laquelle on peut toujours enlever d’un point quelconque de l’une de ses faces colorées tout ou partie de l’oxide , pour faire reparaître le blanc de la fibre. Que si les couleurs étaient logées dans les vaisseaux ou pores du tissu, comment pourraient-elles en être détachées par un effet en quelque sorte mécanique ? Comment J.-M. Hauss-mann serait-il parvenu , comme il nous l’apprend dans son important mémoire sur l’indigo, à décolorer complètement une pièce de calicot teinte avec beaucoup de soin en bleu d’indigo, en l’abandônnant à elle-même dans la petite rivière qui traverse l’établissement qu’il occupait ? En remontant à la cause de cette décoloration , ce fabricant a constaté qu’on devait l’at-
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- tribuer à l’action mécanique des particules de sable siliceux que charrie la rivière, et qui, en frottant contre les faces de la toile. avaient fini par en détacher toutes les particules colorées. D’autre part, si l’adhérence des couleurs est le résultat d’une action capillaire en relation avec les pores , comment, lorsque les pores sont garnis d’une laque colorée, une toile saturée de rouge reçoit-elle l’impression d’une couleur bleue qui y produit du noir, ou d’une couleur jaune qui y produit de l’orange, ou une toile chargée de couleur bleue l’application d’une couleur rouge qui y produit du brun, ou d’une couleur jaune qui y produit du vert ? Ces divers phénomènes ne peuvent évidemment s’expliquer que par une juxtaposition des substances teignantes à la surface de la fibre textile. Enfin , si cette adhérence dépendait des pores, toutes les substances insolubles devraient pouvoir être logées dans ces pores, le sulfate barytique comme le chromate plombique, le carbonate bary-tique comme l’oxide plombique, l’oxide zincique comme l’oxide aluminique et l’oxide stannique : or, l’expérience prouve-t-elle qu’il en soit ainsi? Ne démontre-t-elle pas , au contraire , que les uns, tels que le sulfate et le carbonate barytiques, le sulfate et le carbonate calciques n’adhèrent jamais à la fibre , quelles que soient les conditions dans lesquelles on les place, tandis que les autres s’y combinent avec la plus grande facilité ? Dans l’opinion que nous soutenons, ces différences de résultats n’ont rien d’extraordinaire, puisque, ainsi que nous avons cherché à le démontrer dans notre introd. à l’Et. de la chimie, p. 257-832, les dimensions des équivalents des corps n’étant pas les mêmes, leurs volumes sont représentés parles termes de deux progressions géométriques régulières, et que dès lors il est naturel que ne présentant pas tous des faces semblables à celles de la fibre, ils n’aient pas tous une égale aptitude à y adhérer. Il est d’ailleurs un fait qui nous semble justifier l’influence de la dimension et de la forme d’une molécule dans la fixation des matières colorantes ; c’est que, parmi les oxides métalliques, ceux
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- qui se combinent avec le plus d’énergie aux tissus et dans les conditions les moins différentes, sont précisément les hydrates des trois oxides isomorphes ci-après :
- L’oxide ferrique, dont l’équivalent a pour volume 168cC.
- L’oxide aluminique. — — — 168«-.
- L’oxide chromique. — — — 168ic.
- Nous aurons plus d’une fois l’occasion de faire remarquer que les composés qu’on dépose sur la laine et sur le coton y deviennent adhérents à des conditions diverses : ainsi on peut avancer comme règle générale qu’une couleur n’adhère au coton qu’autant qu’elle présente une réaction alcaline ou qu’on plonge le tissu qui en est imprégné dans un bain alcalin : or, cette influence alcaline est précisément celle où la fibre textile se contracte. La laine, au contraire , est fortement contractée par les acides, et souvent ce n’est que sous leur influence qu’on parvient à y fixer des couleurs ; serait-il donc étonnant que dans le cas de juxtaposition dont il s’agit entre les couleurs et la fibre, des changements dans les dimensions de celle-ci concourussent à l’acte même de la fixation?
- Enfin, il n’est‘pas inutile d’ajouter que les fibres de la laine, de la soie et du coton , qui peuvent recevoir les mêmes couleurs sans réfléchir les mêmes nuances, doivent cette propriété à leur configuration.
- Des mordants.
- § Æ73. Jusqu’ici on a donné le nom de mordant à toute substance qui possède la double propriété de s’unir, d’une part, aux tissus, d’une autre, aux matières colorantes. Il semble d’après cela que les mordants jouissent de propriétés toutes particulières , tandis qu’en réalité il n’en est pas ainsi. En se plaçant, en effet, au point de vue qui nous est propre, on ne voit plus dans ces corps que lés éléments, les principes constitutifs
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- DES MORDANTS.
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- d’un composé salin qui se forme sur le tissu même pour y devenir adhérent.
- D’après ce que nous avons établi § 364, savoir, que les principes colorables et colorés se combinent tous aux oxides métalliques pour former des composés insolubles, il semblerait aussi que ces derniers devraient tous pouvoir remplir le rôle des mordants et devenir par conséquent la base des laques colorées qui doivent se former sur le tissu ; il n’en est rien cependant : le nombre des corps qui possèdent cette propriété est très restreint ; ce sont, parmi les composés du règne inorganique, les oxides aluminique, ferrique, chromique et stan-nique ; parmi les produits du règne organique, les corps gras modifiés, § 337. Nous avons déjà fait ressortir un rapprochement des oxides aluminique, ferrique et chromique entre eux en faisant voir que le volume de leurs équivalents est le même ; considérés sous un autre rapport, ces trois oxides sont de tous les oxides métalliques ceux dans lesquels se manifeste au plus haut degré la propriété de passer d’un état où ils jouissent de toute leur aptitude à se combiner, à un état isomérique où ils deviennent indifférents en présence des agents les plus énergiques.
- Il faut, selon nous, pour qu’un corps puisse jouer le rôle de mordant, que les dimensions de ses molécules soient dans un rapport simple avec celles de la surface de la fibre, et que, fixé sur le tissu , il engendre un composé coloré dont les faces en relation aussi avec celles de cette fibre l’y fassent adhérer.
- Tous les mordants ne rendent pas de la même manière les couleurs adhérentes aux étoffes : les uns ne leur font éprouver que de légers changements de nuance, qui tiennent au rôle acide ou basique que joue le mordant, et surtout aux dimensions de la molécule colorée qui se forme. Ainsi, qu’on dépose sur une étoffe, d’une part, de l’hydrate plombique, d’une autre, de l’hydrate aluminique, l’un et l’autre incolores, mais de dimensions différentes, et qu’on passe cette étoffe dans un
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- bain de cochenille, le mordant d’alumine se teindra en rouge et le mordant plombique en lilas foncé. Il en sera de même , par la même raison, de l’hydrate stannique et de l’hydrate aluminique, qui, fixés sur une étoffe et teints dans un bain de garance, donneront, le second, un rouge tirant au rose violet, le premier, un rouge tirant à l’orange. Les autres, particulièrement l’oxide ferrique, font préalablement subir une altération au principe Colombie ou coloré; car si l’oxide ferrique s’unissait purement et simplement à la matière colorante de la garance, par exemple, qui, dans son état d’isolement, est d’un brun clair ou d’un jaune orangé, on devrait obtenir des laques d’une couleur plus claire que celle qui est propre à cet oxide, tandis qu’il se produit des laques dont la nuance varie du noir le plus intense au lilas le plus tendre, selon la proportion d’oxide qui se trouve sur l’étoffe.
- La nature des principaux mordants nous étant connue, examinons s’il est indifférent d’employer telle ou telle combinaison saline pour en rendre la base adhérente aux tissus. Il y a dans cette question deux points à considérer : le premier, c’est que le fabricant ne doit jamais perdre de vue, dans les opérations par lesquelles il juxtapose un mordant sur une étoffe, le rôle chimique que ce mordant une fois fixé doit remplir en présence de la matière colorante. Supposons, par exemple, qu’au lieu d’avoir mis en liberté sur l’étoffe de l’alumine hydratée dans cet état où elle a toutes ses propriétés chimiques, on l’y ait par le fait déposée dans cette modification isomérique où elle a perdu momentanément toute aptitude à se combiner, on aura manqué son but, et une étoffe ainsi mor-dancée ne se teindra pas. Le second, c’est que l’éclat et l’intensité de la couleur qu’on obtient d’un mordant dépendent de la • manière dont ce mordant est mis en liberté et passe à l’état insoluble sur la fibre pour s’y juxtaposer. Ainsi, qu’on prépare de l’hydrate aluminique avec toute précaution, qu’on en dessèche une partie lentement et l’autre brusquement, on ob-
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- tiendra dans le premier cas une masse cohérente d’aspect corné, dans le second, une masse terne et opaque, et ces deux résidus , plongés dans une solution de matière colorante de garance pure , se teindront, l’un en rouge presque brun, l’autre en rouge terne et pâle. Il importe donc de rechercher parmi les combinaisons salines celle qui cède le plus facilement à une étoffe la base qu’elle renferme, et qui est appelée à jouer le rôle de mordant, en conservant à cette base tout son pouvoir chimique et l’état physique le plus favorable à la réflexion des rayons lumineux.
- Mordants aluminiques.
- § !\lk. Les composés aluminiques dont on se sert pour déposer sur les tissus l’oxide aluminique dans l’état où il fonctionne comme mordant, en attirant à lui et en fixant la matière colorante d’un bain de teinture, sont de deux espèces. Dans les uns a, l’oxide aluminique est à l’état de base; dans les autres b, il remplit le rôle d’un acide, § 162.
- a. Il y a autant de sels aluminiques que d’acides, mais on ne peut les employer tous ; ceux qui sont insolubles se détachent , par le plus léger lavage , de l’étoffe sur laquelle on les applique : tels sont le sulfate tribasique, le phosphate, le phosphite, l’arséniate, le borate aluminique, etc.; ceux qui sont solubles se comportent de trois manières différentes : les uns sont basiques, ou pouvant le devenir en abandonnant une partie de leur acide, n’ont besoin que d’être déposés sur un tissu pour céder à la fibre soit à froid, soit à l’aide d’une température plus ou moins élevée , tout ou partie de l’alumine qu’ils contiennent : tels sont l’acétate aluminique pur ou impur, l’alun cubique , § 1A7 , l’oxalate aluminique, le butyrate et le formiate; les autres, ou neutres ou renfermant un excès d’acide, se divisent en deux groupes : 1° les sels aluminiques dont l’oxide n’est point masqué , et qui par suite peuvent toujours devenir des mordants ou céder leur oxide aux tissus , dès qu’on sature
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- leur acide par une base ou qu’on détermine, à l’aide d’un autre sel, par double décomposition, la formation d’un nouveau sel aluminique insoluble et adhérant à l’étoffe. A cette catégorie appartiennent le sulfate, le séléniate, le chlorate, le bromate, l’iodate, le biphosphaste, le bi-arséniate, le nitrate, le chro-mate, le chlorure, le bromure, l'iodure et l’alun octaédrique; 2° les sels aluminiques dont la base est masquée, et qui, saturés par un oxide ou mélangés avec un autre sel, ne fournissent jamais au tissu un composé aluminique insoluble adhérent et capable d’attirer la matière colorante. C’est dans ce groupe que se rangent le tartrate, le citrate et le malate alumi-niques. Ainsi, à l’exception de ces trois derniers, on peut dire que tous les composés aluminiques peuvent servir de mordants , avec cette différence, toutefois, que les uns n’ont besoin que d’être déposés sur l’étoffe, à une température plus ou moins élevée , pour y fixer leur base , tandis que les autres y resteraient indéfiniment sans abandonner d’alumine au tissu, si par une intervention quelconque cette base ne devenait libre et insoluble. On comprendra mieux notre pensée en répétant les expériences suivantes .-après avoir préalablement purgé, par un acide, de toute substance étrangère, les échantillons de calicot a , b , c , d , e , nous avons imprégné :
- L’éch. a d'une dissolution d’acétate aluminique à 4° AB.
- — u d’une dissolution de nitrate aluminique dans la liqueur
- précédente , et marquant 8° AB.
- — c d’une dissolution de nitrate aluminique à 4°.
- — d d’une dissolution d'alun dans un acétate aluminique à
- 2° et marquant 6°.
- — F. d’une dissolution d’alun marquant G”,
- et, tous ces échantillons desséchés à la même température, dans les mêmes conditions, rincés ensuite à plusieurs reprises à l’eau distillée, enfin teints dans un bain de garance, se sont présentés dans l’état ci-après :
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- L’éch. a chargé de matière colorante d’une intensité proportionnelle à la quantité d’oxide cédée au tissu par l’acétate.
- L’éch. b, quoique imprégné d'une préparation beaucoup plus riche en alumine, avec une nuance beaucoup plus faible, vu l’influence du nitrate qui rend toujours un peu plus difficile la décomposition de l’acétate.
- L’éch. c, incolore toutes les fois que le nitrate aluminique employé contenait 1 éq. de base pour 3 éq. d’acide , et que la toile sur laquelle il était appliqué était entièrement débarrassée des substances calcaires dont elle est quelquefois chargée à sa sortie des opérations du blanchiment, toujours terminées par des lavages à l’eau.
- L’éch. d , d’une nuance d’une intensité de moitié plus faible que celle de l’éch. a, en sorte que l’alun associé à l’acétate aluminique avait été employé en pure perte.
- L’éch. e, incolore comme l’éch. c, et aux mêmes conditions.
- Quand on imprègne des mêmes dissolutions les échantillons a', b', c', d', e', mais qu’après les avoir desséchés, on les passe dans une eau contenant, soit du bicarbonate potassique ou sodique, soit de l’arséniate neutre potassique et un peu de craie, ou tout autre corps saturant incapable par sa nature de redissoudre le composé aluminique qui se forme , et qu’on lave et fait passer comme précédemment tous ces échantillons dans un bain de garance, voici dans quel état ils se présentent.
- L’éch. a' est d’une nuance d’un ton plus élevé que celui de l’éch. a , attendu que l’intervention du composé basique complète la précipitation de l’alun sur le tissu.
- L’éch. b' est d’une nuance double de celle de l’éch. b, 1 a-lumine du nitrate, précipitée par l’intervention du bain saturant, s’ajoutant à celle de l’acétate.
- L’éch. c' est de la même nuance et du même ton que l’éch. a', par les raisons que nous venons d’exposer en parlant de l’éch. b', tandis que.c est incolore ou à peine coloré.
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- L’éch. d' est cl’une teinte plus foncée que d, intermédiaire entre celles de a' et de b', comme étant le produit de l’alumine de l’acétate, à laquelle s’est ajoutée l’alumine de j l’alun précipité par le passage dans le bain saturant.
- Enfin l’éch. e', au lieu d’être incolore comme l’éch. e , est I d’une couleur dont l’intensité est proportionnelle à l’alumine de l’alun qui s’est fixé, c’est-à-dire à peti près de moitié moins ! iritense que cejle des échantillons a et a'.
- Le chlorure aluminique donne les mêmes résultats que le nitrate; toutefois, comme il se décompose par la chaleur en 1 chloride hydrjque et pn oxide pliiminique, il abandonne une partie de sa base quand il est desséché un peu fortement sur | le tissu, et peut ainsi servir directement de mordant ; mais I cette décomppsition, qui a lieu sans trop de danger sur la soie, ne s’effectue sur la fibre ligneuse du coton, du lin et du | chaqvre , qu’en l’endommageant plus ou moins.
- L’oxalate aluminique présente une particularité qu’il importe d’autant plus de signaler, quelle dpit être prise en considération dans une foule de circonstances. Au moment où il vient I d’ptre formé., il est privé de la propriété de céder sa base au [ fissu, au point qu’on emploie l’acide oxalique pour enlever |. l’oxjde aluminique qui recopvre une étoffe sur laquelle on veut I produire un dessin blanc ; mais par suite d’un contact prolongé I ou sur-le-ctyajpp, quand on soumet l’étoffe à l’action de la va- i peur à upe température de 100°, attendu que tout effet produit j| par le temps se réalise toujours plus promptement par l’inter- I veption de la chqjeur, l’oxalate aluminique subit une méta-1 morphose, et, abandonnant une partie de sa base au tissu, de- H vient ainsi un mordant. (Voy., pour plus de détails, le chapitre 1 des Couleurs, conversion. )
- L’alun est de tous les composés aluminiques le plus géné- !| râlement et le plus anciennement employé. Il est impossible de [1 remonter à l’époque où on l’introduisit dans la teinture ; tout r ce qu’on sait à ce sujet, c’est que dans l’Tndostan on en I
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- DES MORDANTS d’a^'MINF.. 1()3
- fait usage depuis un temps immémorial, et qu’en Europe, au xive siècle, Césalpin en donnait déjà la préparation; mais comment se fait-il que ce sel, qui ne peut par lui-même céder sa base au tissu, § 333, soit de toutes les préparations celle qui a d’abord été employée? On le comprend quand on considère qu’il existe plusieurs espèces d’aluns, l’alun octaédrique, dont la solution ne se trouble point par la chaleur, et l’alun cubique, plus ou moins saturé, dont la solution se trouble au contraire par cet agent physique, qui précipite alors sur la toile du sulfate tri-aluminique, et que les anciens ne connaissaient que l’alun naturel, qui contient toujours un excès de base, mais en proportions variables. Du reste, l’expérience leur avait appris à opérer la saturation de l’alun et à le rendre basique, puisqu’ils recommandent dans tous leurs ouvrages l'addition d’une certaine quantité de nairon ou de potasse à ce corps quand on veut l’employer pour mordancer les étoffes. On suppose même qu’ils associaient alors à leurs mordants saturés du vinaigre de riz ou de palmier, ce qui n’a rien que de vraisemblable; car en faisant usage de carbonates potassique et sodique, ils devaient, vu l’état de leurs connaissances chimiques, précipiter parfois une partie de la base de l'alun , et n’avaient, pour remédier à cet accident et redissoudre cette base, d’autre acide que le vinaigre. Plus tard on fit intervenir l’acétate plombique dans la préparation des mordants d’alumine, mais on ne voit nulle part que les Indiens s’en soient servis ; tout porte, au contraire, à penser que c’est en Europe que, pour la première fois, ce sel a été utilisé, sans qu’il soit possible cependant de préciser ni par qui ni à quelle époque, sans doute parce que celui qui en fit d’abord l’application était trop intéressé à ne pas divulguer un secret auquel il devait des résultats si constants. Personne n’ignore de quels mystères les fabricants s’entouraient dans leurs travaux à une certaine époque.
- A l’acétate plombique on ajoutait, ainsi que le prouvent d’anciennes recettes, plusieurs substances, telles que Xacétate
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- cuivrique, le chlorure sodique, Y acide arsénieux (arsenic blanc), le suljide hyper-arsénieux (arsenic rouge ), la craie et le sel ammoniac. Quelques unes de ces substances ne sont presque plus employées aujourd’hui ; mais il faut reconnaître qu’à une époque où la chimie était encore peu avancée, elles devaient avoir leur utilité, les unes pour prévenir la fixation du fer, dont la présence dans l’alun pouvait nuire à la pureté du rouge , les autres pour maintenir la couleur dans l’état hy-groscopique qu’exige l’impression , ou pour contribuer à donner au mordant, pendant son évaporation, l’aspect translucide et corné que l’on doit avant tout rechercher.
- Dans l’état actuel de nos connaissances, l’alun octaédrique aura toujours la propriété de céder au tissu sur lequel on l’applique , tout 'ou partie de l’alumine qu’il renferme, quand on l’aura préalablement saturé, soit par les acétates plombique , calcique , barytique , strontique , qui, par double décomposition , donnent naissance à des sulfates plus ou moins insolubles et à une quantité proportionnelle d'acétate, soit par les acétates potassique, sodique, lithique, ammonique et magné-sique, qui ne produisent aucun trouble dans la solution d’alun, soit par les carbonates potassique, sodique, ammonique, calcique et magnésique, en employant les trois premiers en proportions telles que l’alun passe à l’état d’alun cubique sans que l’alumine se trouve précipitée, et les deux derniers, qui sont insolubles, dans quelques proportions que ce soit.
- Maintenant quel est le rôle que remplissent ces corps ? Quel est particulièrement celui de l’acétate plombique que l’on ajoute à l’aluni Cet acétate n’a-t-il pour effet que de produire, par double décomposition, de l’acétate aluminique qui, décomposé sur le tissu, lui abandonne sa base après l’expulsion de l’acide acétique par la chaleur ? C’est la question que s’est posée et qu’a cru pouvoir résoudre affirmativement M. Sébille, ancien directeur des mines de Bouxviller. En partant de ce principe et en consultant les doses d’alun et d’acétate plombique que
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- ] usage a consacrées pour la préparation du mordant rouge , et qu on peut généralement estimer à 100 parties d’alun pour 75 d’acétate plombique, il démontra que ces proportions n’étaient pas dans le rapport voulu par la théorie, puisque, en comparant les nombres qui représentent 3 éq. d’acétate plombique avec 1 éq. d’alun, ou les quantités de chacun de ces corps nécessaires pour que la double décomposition s'opère
- d’après la formule S* Al, S K , 24 H(I) 2 O -h 3 (À Pb H6
- O5 ) = 3 S Pb -f- A3 AI +SK + 24 A q, on trouve que 100 parties d’alun en exigent sensiblement 125 d’acétate, et que même, si l’on veut décomposer le sulfate potassique, il n’en faut pas moins de 164. D’où il arriva à cette conclusion qu’en croyant faire une économie par la diminution des doses d’une substance qui vaut plus du double de l’alun, les fabricants faisaient en réalité des pertes journalières , attendu que ce dernier n’étant utilisable qu’en raison de l’acétate aluminique qui se forme , tout l’alun qui n’avait point rencontré la quantité d’acétate plombique nécessaire à sa décomposition disparaissait en pure perte dans les opérations du dégorgeage. Ainsi, selon lui, 100 parties d’alun et 100 parties d’acétate plombique ne devaient pas produire plus d’effet que 80 parties d’alun, 100 parties d’alun et 75 parties d’acétate pas plus que 60 parties de ce même sel, enfin 100 parties d’alun et 50 parties d’acétate pas plus que 40 parties , d’où résultait, savoir :
- Dans le Ier cas, une perte de 20 parties alun.
- Dans le 2e —, — 40 parties.
- Dans le 3e —, — 60 parties.
- Quelque juste que paraisse ce raisonnement, M. D. Kœchlin
- a prouvé par des expériences décisives (1) qu’il est loin d’être confirmé par la pratique. D’après ces expériences, en
- (I) Mémoire sur le mordant rouge des fabricants d’indiennes. Bulletin
- de la Société industrielle, tom. 1 , pag. 325.
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- effet, l’acétate plombique produirait non seulement de l’acétate aluminique, mais encore un sulfate octo-basique qui concourrait avec lui à la fixation de l’alumine sur le tissu ; car elles établissent d’abord que le sulfate octo-aluminique, qui se dissout parfaitement et en très grande quantité dans l’acide acétique , forme un mordant qui, appliqué sur une étoffe, produit un aussi bon effet que la meilleure préparation d’alumine ; en second lieu, qu’en opérant sur des quantités constantes d’alun et d’eau et en ne faisant varier que les proportions d’acétate plombique, on obtient des mordants d’égale force, qu’on emploie 75, 80, 100 ou 125 parties d’acétate plombique pour 100 parties d’alun, les nuances que produisent ces mordants ne devenant plus faibles qu’autant que les proportions d’acétate sont inférieures à 75 parties; en troisième lieu, qu’en agissant sur des quantités invariables d’eau et d’acétate plombique et en changeant seulement les doses de l’alun ( circonstance où il devrait toujours se produire des quantités égales d’acétate aluminique), le mordant le plus fort est celui qui renferme h parties d’alun pour 3 parties d’acétate plombique.
- Ces résultats n’ont rien que de naturel quand on considère les acétates comme de véritables bases et l’acide acétique comme incapable de disputer à un autre acide la propriété de se combiner avec la base à laquelle il est uni. Depuis longtemps, dans nos cours , nous adoptons cette manière de voir, sans laquelle il devient impossible d’expliquer une foule de phénomènes anormaux. Quand, par exemple , on ajoute une solution de nitrate plombique à une solution d’acide tartrique, deux acides se trouvent en contact avec une base qu’ils se partagent pour former deux sels acides qui restent en dissolution. Quand, au contraire , on ajoute à ufte solution d’acétate plombique une solution d’acide tartrique, ce n’est pas un sel qu’on met en contact avec l’acide tartrique, mais une véritable base : aussi l’oxide plombique donne-t-il, en se combinant à l’acide tartrique, un composé insoluble. Qu’on prenne plusieurs portions d’une
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- dissolution de sulfate ferreux saturée de sultide hydrique , et qu’aux unes on ajoute de véritables composés salins neutres et solubles, tels que les nitrates sodique, potassique et ammo-nique, les sulfates et les chlorures des mêmes bases, ces additions ne -leur feront éprouver aucune altération ; le sultide hydrique y restera libre et sans produire avec elles de sulfure ferreux ; qu’aux autres , au contraire , on ajoute une base sali-fiable puissante ou un composé salin jouant ce rôle, comme les hydrates, les carbonates et les acétates alcalins, il y aura aussitôt décomposition du sulfate ferreux, l’acicle sulfurique du sel sera saturé par la base de l'hydrate, du carbonate ou de l’acétate, et le sultide hydrique, se trouvant en présence de l’oxide ferreux, le transformera en eau et en sulfure ferreux d’après l’équation • Â K, S Fe 4- H2 S = K S + H2 O, S Fe 4- À. Comment pourrait-on, d’ailleurs, s’expliquer autrement le rôle des acétates potassique, sodique et ammonique, qu’on ajoute à une solution d’hématine et qui en font virer la nuance, même sous 1’influence de l’acide acétique, comme si elle était traitée par une base l Enfin les expériences suivantes, que tout le monde peut répéter , confirment jusqu’à l’évidence èette proposition. Qu’on divise en autant d'e portions qu’on veut faire d’expériences une solution chargée d’alun et qu’on sature ces diverses portions, les unes d’hydrate ou de carbonate ammonique, de carbonate potassique ou sodique , les autres d’acétate barytique , strontique, calcique , potassique, sodique et ammonique, on obtiendra dans l’un et l’autre cas de l’alun cubique qui se troublera par la chaleur en donnant naissance à du sulfate tri-aluminique qui se précipitera toujours, avec cette seule différence que le précipité dû aux acétates sera plus riche en alumine. Ajouter à froid de l’acétate à l’alun, c’est donc pour ainsi dire ajouter à ce sél un oxide, ou un hydrate, ou un carbonate : seulement le sulfate aluminique basique dont la formation a lieu en présence de l’acide acétique se trouve maintenu en dissolution. Par suite, si l’on ajoute 75 parties d’acétate plombique à 100 par-
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- ties d’alun, c’est à peu près comme si l’on ajoutait 2 A Pb à S! Al, S K (nous faisons ici abstraction de l’eau de l’acétate et de celle de l’alun ) ; or, 2 Pb s’emparant de 2 S pour former du sulfate plombique insoluble, il reste S Al, qui est maintenu en dissolution à la faveur de l’acide acétique , puisqu’une expérience directe prouve que ce composé basique est soluble dans cet acide, plus le sulfate potassique de l’alun, qui n’éprouve aucune altération tant que la quantité d’acétate plombique employée ne dépasse pas celle que demande la décomposition de tout le sulfate aluminique. Tels doivent être les éléments de la dissolution du mordant rouge ; cette dissolution chauffée, soit libre, soit sous l’influence d’une étoffe, se décompose de telle sorte que les éléments du sulfate tri-aluminique se groupent et se séparent pour former, les uns, du sulfate aluminique qui régénère , au moyen du sulfate potassique qui se trouve en sa présence, une certaine quantité d’alun, les autres, un sulfate basique qui, d’après les expériences de M. D. Kœchlin, doit être formée de 1 éq. d’acide sulfurique et de 8 éq. d'oxide aluminique. En parlant de l’alun nous avons déjà élevé des doutes sur la composition qu’on attribue à ce sel basique, qui, s’il était anhydre comme on le prétend, devrait être représenté par S Al3 et serait un sulfate nono-basique dont la formation résulterait de k S Al qui se transformerait en S3 Al, et ce dernier, à son tour, passerait à l’état d’alun, et de S + Al3, qui se précipiterait.
- Il est important de faire remarquer ici que cette décomposition du mordant en sulfate basique sous l’influence de la chaleur ne s’effectue pas toujours de la même manière; que, dans tous les cas où elle a lieu, ce n’est pas à la même température, et qu’enfin les quantités d’eau en présence desquelles on opère interviennent pour une grande part dans ce phénomène: c’est ce qui ressort clairement des expériences ci-après de M. D. Kœchlin (Mémoire déjà cite) :
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- J,e Expérience. 250 gr. alun et 250 gr. acétate plombique dissous successivement dans deux litres d’eau, ont donné, à la suite d’une double décomposition de ces sels, un mordant marquant 6 | à l’aréomètre de Baume, et qui, chauffé à 68°, se troublait et se prenait en gelée à 73°.
- 2e Expérience. 500 gr. alun et 500 gr. acétate plombique dissous dans la même quantité d’eau ont donné un mordant marquant 8° à l’aréomètre, et qui, chauffé, ne se troublait qu’à 80° et ne se prenait en gelée qu’à 88°.
- 3e Expérience. Dissous toujours dans la même quantité deau, lk'',500 alun et lk"-,500 acétate plombique ont donné un mordant marquant 15° Æ, et qui, chauffé, ne se troublait plus, même à l’ébullition.
- Enfin, en augmentant encore les proportions d’acétate plombique, M. D. Kœchlin a obtenu, par la décomposition de l’alun, un précipité d’oxide aluminique dans cet état isomérique où les acides mêmes ne peuvent le dissoudre.
- Il est donc évident que si l’on remplace l’acétate plombique par des quantités équivalentes d’un autre acétate à base également puissante, ou l’alun par du sulfate aluminique, on arrivera au même résultat : seulement quelques uns des acétates employés produiront des sulfates plus ou moins insolubles ( sulfates plombique , barytique, strontique et calcique), d’autres des sulfates solubles, et la présence de ces derniers sels pourra présenter des phénomènes particuliers, qu’on les attribue à leur action sur l’air humide ou à leur tendance à cristalliser, et aura une certaine influence sur l’état et l’aspect que prendra le mordant en se desséchant sur la toile.
- Quant au rôle des carbonates alcalins dont on sature l’alun, il est des plus simples, puisque ces sels ont pour effet de former de l’alun cubique, qui donne par la chaleur de l’alun ordinaire et du sulfate tribasique , mais en proportion infiniment moindre que lorsqu’on fait usage d’acétate, attendu que c’est à peine si l’on obtient des carbonates le tiers de 1 effet saturant
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- des acétates ; car, à partir d’un certain point, il ne peut plus être ajouté de carbonates potassique ou sodique à une solution d’alun sans qu’elle se précipite, § 150. Toutefois, si cette saturation de l’alun ne peut s’effectuer complètement tant que ce corps est en liberté, rien n’empêche qu’elle ne s’opère lorsqu’il est déposé sur le tissu. Qu’on imprime en effet, sur du calicot, des solutions concentrées d’alun saturées de carbonate potassique ou sodique, et qu’après avoir fortement desséché l’étoffe pour précipiter l’alun, on la fasse passer à froid dans un bain contenant du bicarbonate potassique ou sodique, ou mieux encore tenant en suspension de l’arséniate potassico-calcique, elle sera parfaitement mordancée et se teindra aussi bien que celle sur laquelle on aurait déposé de l’acétate.
- L’usage que l’on fait depuis si longtemps de la craie pour saturer l’alun qui entre dans la préparation du rouge turc, prouve l’effet saturant de ce corps 5 il résulte même des travaux de J.-M. Haussmann que l’alun peut se charger de | de son poids de craie et perdre la propriété de se troubler, ce qu’il faut sans doute attribuer à une combinaison particulière qui s’effectue entre la chaux et l’alumine, qui ont l’un pour l’autre une grande tendance.
- Après avoir fait connaître le rôle des substances qui concourent à la formation des mordants aluminiques, nous allons parler de la composition des principaux mordants dans lesquels l’alumine fait fonction de base, et en même temps des précautions à prendre pour leur préparation, nous réservant de dire plus tard quels sont les mordants qui conviennent le mieux à tel ou tel genre de fabrication. Nous donnerons d’abord comme terme de comparaison la composition de deux mordants anciens de cette nature.
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- DES MORDANTS D ALUMINE.
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- MORDANTS ANCIENS.
- Mordant roiige (de 1760 à 1800).
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- § A75. Dans 10 litres d’eau on faisait dissoudre :
- kil.
- 2,500 alun , et l’on ajoutait :
- 0k,260 arsenic blanc.
- 0k,250 litharge. •„
- 0^,640 sel de saturne.
- 0k,070 sulfure antimonique.
- 0k,070 chlorure mercurique (sublimé corrosif ).
- 0k, 1 50 carbonate sodique.
- AUTRE MORDANT (de 1800 à 182/j).
- Dans 10 litres d’eau on faisait dissoudre :
- kil
- 2,2o0 alun, et l’on ajoutait à cette dissolution :
- 0k,230 acétate cuivrique préalablement dissous dans I litre de vinaigre.
- I k,25 sel ammoniac.
- 1K, 10 carbonate potassique.
- 1k, 10 carbonate calcique.
- 0\870 acétate plombique.
- MORDANTS NOUVEAUX.
- K
- La composition des trois mordants ci-après est celle qu a donnée M. D. Kœchlin dans son' mémoire sur les mordants rouges :
- MORDANT N° 1.
- Dans 100 litres d’eau on fait dissoudre :
- kii.
- 40 , alun.
- 4k, cristaux de soude.
- 40k, acétate plombique.
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- 172 de la fabrication en général.
- MORDANT N° 2.
- Dans 100 litres d’eau on fait dissoudre :
- k il.
- 27 alun
- 2k,7 cristaux de soude.
- 20k,250 acétate plombique.
- MORDANT N° 3.
- Dans J 00 litres d’eau on fait dissoudre :
- kil.
- 20,250 alun.
- 2k,280 cristaux de soude.
- I3k,500 acétate plombique.
- On procède de la manière suivante à la préparation de ces mordants : on introduit dans un baquet l’alun préalablement pulvérisé, on y verse la quantité d’eau chaude voulue pour en favoriser la dissolution 5 puis 011 ajoute à la liqueur obtenue le carbonate sodique et enfin l’acétate plombique. L’effet de ce sel, qui est très soluble, se produit sur-le-champ ; il y a formation d’un précipité abondant de sulfate plombique. On doit avoir soin de remuer le tout sans interruption pendant une heure au moins , et, ensuite , de temps en temps seulement, mais en laissant le vase découvert, afin que le refroidissement soit aussi prompt que possible ; car on a observé que quand il est lent, l’acétate se trouvant longtemps exposé au contact de l’air, il y a toujours une certaine quantité d’alumine mise en liberté qui ne se redissout plus. Lorsqu’on fait intervenir le carbonate sodique dans la préparation du mordant rouge, il n’est pas indifférent de l’ajouter à la solution d’alun ou au liquide qui résulte de la double décomposition de ce sel par l’acétate; dans le premier cas, il agit sur l’acide sulfurique du sulfate alumi-nique et a pour effet de saturer l’alun et d’en former de l’alun cubique ; dans le second, il porte , au contraire , son action sur l’acide acétique pour donner naissance à des quantités proportionnelles d’acétate potassique ou sodique, selon la nature de
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- DES MORDANTS D ALUMINE.
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- l’acétate. Un tel mordant peut être considéré comme basique et plus ou moins déliquescent (D. Kœchlin). Lorsque le mordant est refroidi et que le dépôt de sulfate plombique est formé, on décante la partie claire qu’on introduit et conserve dans des vases de verre ou de grès bien clos ; quant au précipité, on le met égoutter sur une toile où on le lave, et l’on fait servir les eaux de lavage à la préparation des mordants faibles, ou à une nouvelle opération des mêmes mordants.
- Certains fabricants ne séparent plus le sulfate plombique du mordant proprement dit, et impriment le tout ensemble, l'expérience leur ayant prouvé que ce sel, une fois formé, ne se fixe sur le tissu qu’autant qu’il y rencontre une base comme la chaux qui le décompose et l’y fait adhérer; que sa présence donnant du corps à la couleur, permet de réduire la quantité d’épaississant nécessaire (gomme, amidon ou fécule) pour imprimer le mordant et de produire des impressions plus uniformes et plus régulières, surtout quand il s’agit de dessins très couverts, et qu’enfin , renfermant moins d’épaississants , ces mordants imprimés se nettoient toujours mieux dans les opérations du bousâge.
- Il semblerait au premier abord qu’il dût exister dans toutes les fabriques un mordant mère, avec lequel on préparerait tous les autres, en l’étendant plus ou moins d’eau et en y faisant les additions de substances convenables pour les différentes nuances : cependant telle n’est pas l’habitude des fabricants, qui, pour la plupart, préfèrent préparer plusieurs espèces de mordants qui diffèrent tant par leur densité que par les proportions d’alun et d’acétate plombique employées, guidés qu ils sont par les considérations ci-après iD. Kœchlin, Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, t. I , p. 3Z|2) :
- 1° Il n’est que peu d’impressions pour lesquelles on emploie un mordant très fort, ou exigeant une plus grande quantité de sel de saturne qu’un mordant de densité moyenne.
- 2° Ce dernier, dans la préparation duquel il entre moins
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- DR LA FABRICATION EN GENERAL.
- Mh
- d’acétate plombique, se conserve plus longtemps qu’un mordant fort, qui bientôt, par la décomposition à froid, laissant déposer plus de sous-acétate d’alumine que le mordant de densité moyenne, ne donnerait pas toujours, étendu d’eau, un résultat constant.
- 3° Un mordant fort, dans lequel l’acétate acide domine , ne S saurait convenir dans plusieurs genres d’impression, notamment dans le genre de deux ou trois rouges , où des mordants, 1 de densité différente sont imprimés les uns sur les autres, parce qu’alors les mordants, en se confondant, donneraient des teintes moins distinctes.
- 4° Le mode de donner de la consistance à un mordant ou de j l’épaissir varie selon le genre d’impression pour lequel on le J destine, et un mordant acide ne peut s’épaissir aussi facilement I qu’un autre avec toutes les substances qui servent d’épaissis-sant.
- 5° Un mordant fort et acide se dégorge moins aisément par l’opération du bousage.
- Dans beaucoup de fabriques d’indienne des environs de Paris et de Rouen , on fait usage, pour la préparation du mordant rouge, de sulfate aluminique, § 154 , qu’on y fabrique actuellement en assez grande quantité. Tel qu’il est dans le commerce, I il renferme sur 100 parties (Voy. R. scientifique, t. XI, p. 274) : I
- Acide sulfurique. ....... ........... 25.
- Oxide aluminique. . . ,....................... 13,67.
- Eau........................................... 51,29.
- Il faut donc 75 parties d’acétate plombique pour en opérer la saturation partielle, et 118 parties de ce même sel pour que la double décomposition devienne complète et que tout l’acide sulfurique se trouve précipité à l’état de sulfate plombique insoluble ; toutefois ces doses d’acétate peuvent varier beaucoup; car, ainsi que nous l’avons déjà fait remarquer, § 152, la composition du sulfate aluminique n’est pas toujours la même.
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- DES MORDANTS d’aLUMINE.
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- Nous nous sommes assuré que celui du commerce renferme des quantités différentes d’acide et de base, et le fabricant ne saurait apporter trop de circonspection dans l’emploi de ce sel, surtout pour certains genres d’impression
- M. D. Kcechlin prépare le mordant rouge avec le sulfate aluminique en opérant de la manière suivante :
- A 110 parties d'une solution de sulfate aluminique marquant 29 ou 30° Æ lorsqu’elle est chaude, et 31 à 33° lorsqu’elle est froide, il ajoute 100 parties d’acétate plombique dissoutes dans 30 parties d’eau ; une double décomposition a lieu entre ces deux sels, et l’on obtient une dissolution d’acétate aluminique marquant 15° à 16°, la plus concentrée qu’on puisse obtenir.
- Il est des fabriques où on remplace l’acétate par un poids égal de pyrolignite plombique ; mais quand on ne veut faire usage ni de l’un ni de l’autre . on peut y substituer des quantités équivalentes d’acétate calcique, barytique ou sodique, attendu que .
- 237a kil. d’acétate plombique cristallisé sont remplacés ou par
- 1600 — — barytique anhydre, ou par
- 1708 — — sodique cristallisé , ou par
- 1233 — — potassiqpe anhydre.
- Jusqu’ici on n’a pour ainsi dire encore employé que de l’acétate calcique ; il serait cependant à désirer que les composés plombiques fussent remplacés dans la confection des mordants par des substances moins chères. L’oxide plombique qui existe dans l’acétate représente plus des 2/3 de la valeur des matières premières qui contribuent à la formation de ce sel, dont les 100 kil. se vendent actuellement 135 fr. , et en le faisant concourir à la préparation d’un mordant, on le-transforme en sulfate plombique insoluble, produit plombifère dans lequel le plomb a perdu presque toute sa valeur, puisqu’on ne s’en est servi jusqu’à présent que pour la préparation du jaune de chrome et de la céruse.- On l’utilisait encore autrefois pour
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- 176 DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- monter des cuves au plombalc de chaux. (Yoy. Verl au plombate. J
- Si le commerce livrait à la consommation des acétates ba-rytique ou calcique purs , le fabricant aurait un grand avantage à en faire usage, parce qu’il laisserait le sulfate calcique ou le sulfate barytique, produit de la double décomposition, mélangé au mordant, et que ces sels contribueraient comme mastic à l'épaississage de la couleur.
- Au lieu de préparer les mordants par voie de double décomposition, ce qui nécessite toujours l’emploi d’un acétate, depuis longtemps on aurait dû fabriquer en grand le mordant dont la préparation a été indiquée par M. D. Kœchlin, et qui consiste : 1° à neutraliser une dissolution d’alun saturée à froid, par le carbonate potassique qu’on ajoute peu à peu et en remuant, jusqu’à ce que les flocons qui se forment commencent à ne plus se redissoudre; 2° à porter à l’ébullition cette dissolution neutralisée, afin de déterminer la formation du sulfate aluminique basique , qu’on recueille et traite ensuite par l’acide acétique, dans lequel il se dissout parfaitement, surtout à chaud, pour donner un des mordants les plus forts et les plus fidèles que l’on puisse préparer et employer. Mais il serait trop onéreux de faire cette préparation en petit et dans les ateliers mêmes, attendu qu’on se verrait forcé de jeter l’eau de laquelle on aurait séparé le sulfate aluminique basique, et avec cette eau le sulfate potassique, en sorte que toute la potasse de l’alun, toute celle qui a servi à sa saturation, et enfin une certaine quantité d’alun même se trouverait perdue. Si, au contraire, la fabrication de ce produit se faisait en grand dans une fabrique d’alun, l’eau plus ou moins saturée de sulfate potassique rentrant continuellement dans une nouvelle opération, il n’y aurait aucune perte de potasse, on produirait du sulfate aluminique basique d’une composition constante, se dissolvant bien dans l’acide acétique, qui pourrait lui-même être remplacé par l’acide pyroligneux rectifié ou par du vi-
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- DES MORDANTS D ALUMINE. 177
- naigre de vin, et il y aurait dans ce cas économie de toute la potasse de l’alun, quand on ferait usage de ce sel, et de tout l’oxide plombique, quand on emploierait l’acétate ou le * pyrolignite de cette base.
- Si l’hydrate aluininique du commerce était d’une composition constante, et qu’il fût toujours egalement attaqué par l’acide acétique, on l’utiliserait ainsi avec avantage en le dissolvant dans cet acide, puisqu’il est démontré par les expériences de M. D. Kœchlin que l’acétate ainsi préparé est un excellent mordant.
- Des mordants dans lesquels T oxide aluminique fait fonction
- cT acide.
- § Z|76. Macquer et Haussmann ont été des premiers à conseiller l’emploi de ces composés salins pour déposer sur le calicot l’alumine nécessaire à la fixation des matières colorantes. Depuis une vingtaine d’années les fabricants anglais en ont tiré un excellent parti dans les impressions au rouleau. En traitant de la préparation des composés aluminiques nous avons fait connaître la composition de l’aluminate potassique ou sodique, nous n’avons donc plus qu’à nous occuper des conditions dans lesquelles l’oxide aluminique peut en être séparé et se combiner avec le tissu.
- Cet pxide, qui remplit le rôle d’acide , ne peut être déplacé que par un acide. C’est une règle de déplacement à laquelle tous les corps de ce genre sont soumis. L’acide qu'on emploie à cet effet est l’acide carbonique de l’air ; les tissus imprégnés d’aluminate potassique ou sodique sont exposés dans ce milieu, où la potasse ou la soude de l’aluminate se saturant peu à peu met l’oxide en liberté; mais on arriverait plus facilement à ce but en plaçant les étoffes imprégnées de mordant dans un air chargé artificiellement d’acide carbonique ou même d’acide acétique, et en même temps de beaucoup d’humidité.
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- En opérant comme on le fait dans les fabriques, il est rare que la saturation de la base alcaline par l’acide carbonique soit complète : aussi la termine-t-on toujours, ainsi que nous le verrons, en passant les étoffes chargées de mordant dans un bain de chlorure ammonique ; la base alcaline s’empare alors du chlore, et l’alumine et l’ammoniaque deviennent libres ; car, ne formant pas de combinaison entre elles, la dernière r ste en dissolution dans l’eau ou se volatilise selon la température, et la première se précipite sur l’étoffe. Toutefois ce moyen de précipitation de l’oxide aluminique n’est pas le plus avantageux ; il est toujours préférable de prolonger ou de rendre plus énergique l’action de l’acide carbonique, parce que l’alumine mise en liberté par le chlorure ammonique n’a jamais le brillant de celle qui se dépose lentement.
- Applications. Les mordants d’alumine sont employés seuls ou avec d’autres mordants à la fixation de toutes les matières colorantes qui ont besoin d’un intermédiaire pour constituer une couleur et pour devenir ensuite adhérentes aux tissus.
- Des mordants ferrugineux.
- 477. Les préparations ferrugineuses, de même que les préparations aluminiques, ne remplissent le rôle de mordants qu’au-tant qu’elles sont solubles, et que par une cause quelconque elles donnent lieu à un dépôt de fer oxidé sur l’étoffe ; l’étude en est compliquée. Le fer , en effet, présente plusieurs degrés d’oxidation, et il faut trouver non seulement la combinaison saline qui abandonne le mieux sa base à l’étoffe, mais encore celle qui joint à cette propriété le degré d’oxidation nécessaire pour attirer les matières colorantes sans nuire au tissu. On ne doit pas perdre de vue qu’en déposant sur une étoffe une préparation ferrugineuse, le fer peut s’y combiner à l’état, soit d’oxide ferreux , qui passe peu à peu à l’état d’oxide ferrique, et même d’oxide ferroso-ferrique, soit d’oxide ferrique, qui peut
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- DES MORDANTS l'ERRt'GÎNECX.
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- être hydraté ou dans cet état où il a conservé ses propriétés chimiques, ou anhydre, dans cette modification Ou il est pour ainsi dire impropre à remplir aucun rôle, soit enfin de sous-sel ou de sel neutre insoluble.
- Dans un travail intitulé : Emploi cle T acide pyroligneux dans quelques opérations des arts, et publié t. Y, p. 37 des Annales des arts et manufactures, le tribun Bosc examine à quel état d’oxidation le fer doit se trouver sur les étoffes pour servir de base au noir. D’après cet auteur, on n’obtiendrait sur le coton une teinte noire foncée, solide et brillante, qu’autant qu’on ferait usage d’un sel de fer à base d’oxide noir (oxide ferreux ), et la combinaison la plus favorable résulterait de la dissolution du fer dans l’acide pyroligneux, parce que cet acide, par le charbon qu’il renferme (goudron), préviendrait l’oxida-tion et maintiendrait l’oxide à son degré inférieur.
- Arrivant aux mêmes conséquences, dans un mémoire fort étendu qui traite de la fixation des mordants de fer sur les toiles de coton , Mém. de là Société industrielle de Mulhouse, t. XIII, p. 399, M. H. Schlumberger établit d’abord que l’acétate ferreux obtenu par plusieurs procédés donne des résultats très rapprochés, et base cette proposition sur les expériences suivantes :
- Epaissies à l’eau de gomme , d’une part, et à l’amidon , d’une autre, les dissolutions ci-après, d’égale force (7° AB) ,
- La lre d'acétate ferreux obtenu par la double décomposition du sulfate ferreux et de l'acétate plombique ,
- La 2e d’acétate ferreux provenant d’une dissolution de fer dans l’acide acétique,
- La 3e d’acétate ferreux provenant d’une dissolution de fer dans le vinaigre ,
- La 4e de pyrolignite ferreux préparé au moyen de l'acide p^roli-gneux épuré ,
- La 5* de pyrolignite ferreux dont on avait séparé le goudron par une ébullition de 5 minutes ,
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- La 6e de pyrolignite ferreux brut, contenant un grand excès de goudron ,
- La T enfin de pyrolignite ferreux brut mélangé de pyrolignite épuré,
- furent imprimées dans les mêmes conditions sur des morceaux de calicot; puis ces échantillons, divisés en deux et exposés à l’air, une moitié pendant deux jours seulement, l’autre pendant dix avant d’être soumis à l’opération du bousage et passés dans un bain de garance, donnèrent tous un très beau violet, intense et bien nourri.
- Quoique, d’après ce résultat, il semble indifférent d’employer l’une ou l’autre de ces préparations , M. H. Schlumberger fait cependant observer qu’il en est qui doivent être préférées dans quelques localités pour certains genres de fabrication. Toute l’opération, en effet, se réduisant aune oxidation de l’oxide ferreux sur le tissu, le pyrolignite ferreux sera plus favorable pour les impressions a la planche où les couleurs sont exposées longtemps à l’air et où, par conséquent, l’oxidation a besoin d’être ralentie pour avoir lieu sur l’étoffe, tandis que l’acétate ferreux pur devrait, au contraire, obtenir la préférence poulies impressions au rouleau, surtout dans les genres où les pièces sont immédiatement dégorgées et où, par conséquent, l’oxidation se fait rapidement.
- Allant ensuite plus loin, ce chimiste affirme que si les acétates sont oxidés avant d’être appliqués à l’étoffe, la combinaison de la base avec le tissu n’a pas lieu et cpie le fer se détache en grande partie, si ce n’est en totalité, par l’opération du bousage. Si cette proposition est prise dans un sens limité et n’embrasse que les combinaisons de l’acide acétique avec le fer oxidé, nous l’admettons sans difficulté, car nous considérons l’acétate ferrique comme une solution d’oxide ferrique qui se trouve en quelque sorte libre et ne se fixe au tissu que beaucoup plus difficilement par la raison que l’acide acétique se dégage avant
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- DES MORDANTS FERRUGINEUX.
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- que le sel se soit mis en contact immédiat avec l’étoffe. Si, au contraire, cette proposition est prise dans un sens général et s’étend à tous les sels ferriques, nous devons la combattre comme étant l’expression d’une manière de voir que ne confirme aucune des expériences suivantes, que nous avons faites, et qui nous semblent à l’abri de toute objection sérieuse.
- Après avoir préparé du sulfate ferrique d’une pureté telle que le cyanure ferrico-potassiqüe n’en troublait point la solution , et que cette dernière , bouillie avec de l’oxide cuivrique pur, ne renfermait plus aucune trace de fer en dissolution, nous en avons épaissi avec la fécule torréfiée des dissolutions marquant, les unes, 2° AB, les autres, 4 et 8°; nous avons ensuite imprimé ces dissolutions sur des échantillons de calicot qui furent immédiatement desséchés à une température de 45 à 50°, puis dégorgés dans un bain tenant en suspension de l’arséniate calcieo-potassique, et enfin teints dans un bain de garance, et tous ces échantillons nous ont donné des violets tendres, des violets foncés et des noirs dont les nuances bien nourries ne laissaient rien à désirer. Des essais en tout semblables, mais dans lesquels le sulfate ferrique se trouvait remplacé par le sulfate ferreux, nous ont fourni des résultats infiniment moins favorables tant sous le rapport de la nuance, qui était grise, que sous celui de la quantité de la couleur absorbée par les échantillons , et qui se trouvait raclée.
- Lorsqu'on emploie un acétate comme mordant, la théorie et la pratique veulent qu’on applique de préférence au tissu l’acétate ferreux, qui, en se décomposant sur la toile, passe peu à peu à l’état de sel basique qui s’oxide à l’air; et comme il était utile de rechercher dans quelles circonstances cette oxidation peut s’effectuer sans danger pour le tissu, car on n’a pas oublié qu’en traitant du ligneux , nous avons fait connaître l’altération qu’éprouve ordinairement la fibre en présence des substances en état d’oxidation, § 323, p. 311, M. H. Schlumberger s’est occupé de cette question, et rapporte à cette occasion le résultat
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- d’expériences qu’il a faites sur les k préparations ferrugineuses qui suivent, employées, les unes à 15° AB, les autres à 5° AB seulement :
- a. De l’acétate ferreux obtenu directement de la dissolution du fer dans l’acide acétique.
- b. Du pyrolignite ferreux brut.
- c. De l’acétate ferreux obtenu par la double décomposition de l’acétate plombique et du sulfate ferreux.
- d. La même dissolution, mais additionnée d’un excès d'acétate plombique.
- Après avoir imprimé ces diverses dissolutions gommées et non gommées sur autant d’échantillons qu’il en fallait pour étudier les différentes circonstances d’oxidation, il exposa les uns clans un lieu d’une température moyenne, à un air humide et à la lumière diffuse, les autres dans un endroit chaud, sec et obscur, d’autres enfin aux rayons du soleil et à toutes les variations atmosphériques , et laissa dans ces diverses conditions la moitié de chacun de ces échantillons pendant 6 jours, et l’autre pendant 21 jours , puis il les fit tous passer en botise, nettoyer et teindre ; alors il constata :
- 1° Que l’affaiblissement de l’étoffe n’a lieu généralement que sur les échantillons où l’on a imprimé des dissolutions ferrugineuses concentrées, et que dans un cas seulement cet affaiblissement se fait remarquer sur les étoffes imprégnées d’une dissolution marquant k° ;
- 2° Que la toile s’affaiblit avec l’un ou l’autre des k mordants concentrés mentionnés ci-dessus, mais moins cependant avec le dernier, qui contient un excès d’acétate plombique;
- 3° Que les mordants purs affaiblissent beaucoup plus fortement les étoffes que ceux qui sont épaissis par la gomme, l’amidon ou la fécule ;
- k° Que l’exposition aux rayons solaires favorisé dans un temps donné l’altération de l’étoffe , au point que les mordants
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- DES MORDANTS FERRUGINEUX.
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- faibles qui n’attaquent pas le calicot dans l’obscurité ou à la lumière diffuse le détériorent assez fortement au soleil ;
- 5° Que dans tous les cas l’affaiblissement du tissu ne se prononce qu’à partir du 3e au 6e jour, mais qu’à cette époque il est à peu de chose près ce qu’il est après le 21e jour du contact du mordant avec l’étoffe ;
- 6° Enfin que, suivant qu’on fait passer les échantillons en bouse à l'ébullition ou seulement à la température de 50'“, et qu’en les sortant de ce bain on les plonge ou non dans une dissolution étendue de chlorure de chaux, l’altération de la toile est plus ou moins prononcée , c’est-à-dire presque insensible si 1 on a dégorgé les échantillons dans un bain de bouse chauffé à 50° et si on ne les a pas fait passer en chlorure de chaux, et, au contraire , toujours fortement marquée quand on a fait passer les mêmes échantillons en bouse à la température de 1 ébullition ou qu’on les a immergés immédiatement en chlorure de chaux.
- Après avoir constaté ainsi, d’une part, que cet affaiblissement est dû à l’oxidation qui a lieu en raison de la quantité d’oxide ferreux qui se dépose sur la toile , et, d’une autre, qu’il est nul quand les mordants sont faibles, et très prononcé quand ils sont concentrés, M. H. Schlumberger l’explique par les effets consécutifs de la combinaison de l’oxide ferreux avec le tissu, circonstance dans laquelle il y aurait .dégagement de chaleur et d’électricité. Nous trouvons , quant à nous . l’explication de ce phénomène dans le fait de la production momentanée de 1 acide ferrique F, .qui, ainsi que nous nous en sommes assuré directement, détruit les tissus avec une grande énergie dès qu’il est libre en leur présence.
- Comme on est dans l’habitude d’ajouter certaines substances aux mordants à base de fer dans le but, soit de favoriser la fixation de l’oxide ferrique sur la toile, soit de prévenir une oxidation trop rapide du mordant, soit de s’opposer à sa dessiccation trop prompte, soit enfin de contribuer à en rendre
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- l’impression plus nette , nous devons en dire quelques mots ; nous aurons ainsi occasion de parler des recherches qu’a faites le fabricant dont nous venons de rapporter les expériences, pour se rendre compte de l’influence de ces substances sur les mordants ferrugineux forts et faibles.
- Les mordants ferrugineux pour noirs bon teint, imprimés à la planche, sont presque toujours additionnés d’un sel cuivrique (nitrate, sulfate ou acétate) , qui a pour objet de faciliter l’oxidation de l’oxide ferreux et de hâter la combinaison de l’oxide ferrique avec le tissu, et jouit, en outre, selon nous, de la propriété de former une combinaison avec l’oxide ferrique et de prévenir le passage de ce dernier à l’état où il a perdu en quelque sorte ses tendances chimiques.
- L’huile empyreumatique que renferme l’acide pyroligneux, et qui établit une si grande différence entre les acétates et les pyrolignites relativement à la promptitude avec laquelle ils se fixent, n’a d’autre objet que de ralentir l’oxidation et de prévenir l’action de l’acide ferrique sur l’étoffe.
- L’acide arsénieux, que nous verrons employer dans les genres violets et lilas, remplit ces deux rôles ; d’une part, il forme une combinaison avec l’oxide ferrique , auquel il conserve ses affinités chimiques , et, d’une autre , il ralentit l’oxidation et prévient directement ou indirectement l’altération de la fibre.
- D’après M. H. Schlumberger, le chlorure zincique qu’on introduit dans le mordant noir n’a pas d’action directe bien sensible sur cette préparation ; mais il combat la tendance des matières amylacées employées comme épaississants à se coaguler ; peut-être aussi prévient-il, en se combinant à l’oxide ferrique , la modification isomérique de ce dernier.
- Le chlorure ammonique et le nitrate potassique ont une action telle , que le succès obtenu par plusieurs fabricants dans certains genres d’impression tient particulièrement à l’introduction dans le mordant de l’uiie ou de l’autre de ces substances employées en proportion convenable. Leur effet paraît
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- être de tixer plus uniformément l’oxide sur le tissu, ce qui explique la préférence que donnait Haussmann à certaines préparations dans lesquelles il y avait, ainsi que nous nous en sommes assuré, production d’ammoniaque.
- Les chlorates potassique et sodique jouent un rôle à peu près semblable à celui du nitrate potassique.
- Ajoutés àl litre de mordant violet, 15gr. de saccharate calcique en rendent la nuance plus claire, d’abord parce qu’ils précipitent une partie de l’oxide, ensuite parce le sucre masque plus ou moins les bases salifiables, § 312. On obtient le même résultat avec le sirop de sucre (30 gr. par litre de mordant), avec le bitartrate potassique, avec l’acide tartrique, avec le jus de citron; l’action de tous ces corps est la même, § 275, p. 2Z|3.
- L’acide oxalique ne nuit point à la fixation du fer, et 15 gr. de cet acide par litre de mordant n’en changent pas la nuance. L’acide acétique ne lui est pas plus contraire, et même il est des genres où sa présence est nécessaire pour maintenir l’oxide en dissolution.
- Il est encore beaucoup d’autres substances dont l’action a fixé l’attention de l’habile coloriste de Mulhouse ; mais nous n’en parlerons pas ici ; nous nous contenterons de faire connaître les résultats des expériences qu’il a entreprises dans le but d’établir le degré d’oxidation le plus convenable pour obtenir des mordants ferrugineux les plus belles nuances solides.
- Il ressort des recherches de ce fabricant que, si pour des impressions noires ou violettes solides, on fait usage de pyrolignite brut fortement chargé d’un goudron qui maintient opiniâ-trément le fer à l’état d’oxide ferreux sur la toile, on n’obtient que de fort mauvais résultats à la teinture, tandis que le même sel mélangé d’une certaine quantité d’acétate, préparé par la dissolution du fer dans le vinaigre , n’en donne jamais que de très bons.
- A ces deux ordres de faits qui démontrent, l’un l’inefficacité d’un mordant trop énergiquement maintenu à l’état de sel 1er-
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- reux, l’autre, au contraire, l’efficacité du mordant qui peut h passer à un degré supérieur d’oxidation , M. H. Schlumberger en ajoute d’autres sur lesquels il s’appuie pour prouver qu’une oxidation trop avancée est toujours nuisible.
- Ainsi, par exemple, après avoir vaporisé des échantillons sur lesquels étaient imprimés des mordants violets et puce (mélange de fer et d’alumine), il a remarqué que ces échantillons une fois teints et avivés présentaient des nuances beaucoup plus rougeâtres que si les mordants n’eussent pas été soumis à l’action de la vapeur d’eau , qui, toutefois, lui paraît plus nuisible aux mordants puce qui renferment de l’alumine qu’aux mordants noirs à base de fer, et il en conclut que ce résultat est dû à une oxidation plus avancée ; mais il nous semble qu’ici il y a méprise sur le rôle de la vapeur d’eau , qui ne détermine , selon nous, aucun phénomène d’oxidation, mais simplement un changement d’état physique dû à la chaleur, qui rend indifférente une certaine quantité des oxides ferrique et alumi-nique qui sont fixés sur la toile, et produisent dans ce cas, mélangés avec le violet, l’oxide ferrique une espèce de brun, et l’oxide aluminique une nuance moins nourrie.
- D’autres échantillons également imprégnés de mordants et plongés, les uns dans une dissolution de bichromate potassique, les autres dans un bain de chlorure de chaux étendu et chauffé à Z|0°, n’ont pas donné de résultats meilleurs; les teintes des échantillons passés dans le bichromate étaient même plus rougeâtres que celles des échantillons passés à la vapeur d’eau, ce qui s’explique lorsqu’on se rappelle que toutes les fois qu’on plonge dans une solution de bichromate potassique une étoffe sur laquelle est imprimée un sel ferreux, il y a double décomposition suivie d’altération (voy. notre intr. à l’Et. de la ch., p. 390), et par conséquent formation d’un composé qui peut être représenté par une certaine quantité d’oxide chromique et d’oxide ferrique : or, ces deux oxides fonctionnant comme mordants et l’oxide chromique produisant des nuances brunes, il
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- n’est pas étonnant qu’on n’en puisse obtenir de beaux violets.
- Quant à l’action du chlorure de chaux, elle est très simple : elle modifie l’état physique de l’oxide ferrique sans en changer la composition.
- Prévoyant l’objection que les passages en chlorure de chaux et en bichromate potassique non seulement ont pour effet d’oxider le fer, mais encore, en raison des combinaisons particulières auxquelles ils donnent lieu, de modifier les mordants ferrugineux, M. H. Schlumberger s’est livré à d’autres expériences sur les mordants décrits p. 179, les a imprimés purs ou préalablement épaissis et a exposé à l’air les échantillons de toile qui en étaient recouverts,
- Les uns durant 6 heures,
- Les autres durant 24 heures, et les autres enfin durant 2 , 10 et 2 I jours.
- Il a vu alors : 1° que les mordants formés de pyrolignite ou d’acétate ferreux, non épaissis, produisent en teinture, après 6 heures d’exposition à l’air, des couleurs qui, considérées sous le rapport de l’intensité, sont aussi foncées que si on les y eût laissées durant 21 jours ; 2° que les mêmes mordants épaissis n’offrent que de légères différences en faveur de ceux qui sont restés exposés à l’air pendant 21 jours , différences qui disparaissent totalement lorsqu’on expose durant 10 heures au lieu de 6 ces mêmes échantillons à l’air avant de les teindre; 3° que les mordants dont 1 oxidation se fait en 0 heures, en 10 heures ou en 8 heures, donnent toujours à la teinture des teintes plus riches et plus pures que quand ces mordants ont séjourné à l’air durant 10, et à plus forte raison 21 jours , et que ces différences se font surtout remarquer avec l’acétate ferreux , qui, ne renfermant pas; comme le pyrolignite, une substance capable d’en retarder i’oxidation , présente toujours des teintes moins favorables; et il en a conclu que ce n’est pas de l’oxide ferrique ni de l’oxide ferreux qui se forme,
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- mais une combinaison rie ces deux corps, de l’oxide ferroso- | ferrique , en un mot, qui est identique avec celui qui existe dans la nature, et qui est connu sous le nom de fer magnétique , ou qui se produit lorsqu’on fait passer de la vapeur d’eau sur un fer rouge. Selon lui, cette combinaison jouirait d’assez de sta- I bilité pour subir, sans perdre aucune de ses propriétés teignantes, 1 l’action d’une température de 110 et même de 160°. S’il en était ainsi, en dissolvant cet oxide complexe dans- un acide ! avec les précautions voulues, on devrait retrouver dans la dis- j solution un mélange d’oxides ferreux et ferrique, qu’il est facile J de séparer de plusieurs manières, par exemple, en faisant bouil- i lir la solution contenant le mélange des deux oxides avec une i certaine quantité d’oxide cuivrique, qui a la propriété de pré- 1 c-ipiter l’oxide ferrique en s’emparant de l’acide qui le tient en I dissolution, tandis qu’il n’exerce aucune action sur le sel ferreux, dont la base est plus puissante (voy. notre intr. à l’Et. de j la cii., p. 361-368), et qu’on doit retrouver dans la liqueur; 1 mais à plusieurs reprises nous avons dissous dans le chloride ! hydrique pur le mordant ferrugineux fixé sur une toile moi- , dancée , et jamais nous n’avons rencontré d’oxide ferreux dans I la dissolution, après l’avoir fait bouillir avec l’oxide cuivrique; ) ce qui nous porte à croire que le fer y existe à l’état d’oxide I ferrique, combiné à l’acide phosphorique ou à l’acide arsénique, selon que dans l’opération du dégommage c’est la bouse de vache ou l’arséniate calcico-potassique que l’on a employé. 1 Autrement on s’expliquerait difficilement comment la toile mor-dancée a pu recevoir, dans les expériences deM. H. Schlum-berger, l’action du fer chauffé à 160°, sans que le mordant ait perdu la propriété de se teindre, ce qui serait inévitablement arrivé si le fer y eût existé à l’état d’oxide libre.
- En résumé, on peut avancer, sans crainte d’être démenti par ! l’expérience, que lorsqu’on applique sur le tissu des dissolutions de fer obtenues par l’acide acétique , en vue de leur faire jouer le rôle de mordants , il convient qu’elles soient à l’état 1
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- d’oxide ferreux, pour que, l’oxidation ayant lieu sur la toile, il s’y forme un acétate basique qui conserve à l’oxide ferrique ses propriétés chimiques et passe à l’état de phosphate ou d’arsé-niate dans l’opération du bousage. Il faut que cette oxidation soit lente et progressive ; car, si elle est brusque, on est exposé à voir le tissu s’altérer, ou l’oxide ferrique passer à cet état isomérique où il est pour ainsi dire devenu indifférent aux agents chimiques.
- Quant aux autres sels ferreux , tous les sels acides sont impropres à remplir le rôle de mordants, tandis qu’il en est autrement des sels neutres, attendu que l’oxide ferreux qu’ils renferment passant à l’état d’oxide ferrique en absorbant l’oxi-gène de l’air, ils ne contiennent plus assez d’acide pour former un sel neutre, et qu’il y a par conséquent formation d’un sel basique qui se fixe au tissu. C’est ainsi qu’on s’explique pourquoi le sulfate ferreux neutre qui séjourne sur du calicot lui cède toujours une certaine quantité de sa base, tandis que, quand il est acide , ce phénomène n’a plus lieu. Quant aux sels ferriques , tous ceux qui, par une cause quelconque, peuvent passer à l’état de sels basiques, deviennent alors de véritables mordants capables d’attirer les matières colorantes. Les expériences que nous avons rapportées p. 160-161, s'appliquent encore ici 5 mais il ne faut pas oublier que dans tous ces sels l’oxide ferrique n’existe pas au même état de condensation , que dans les uns, comme le phosphate et l’arséniate, il n’a qu’une teinte très faible, et que dans les autres, comme le nitrate, le chlorate et l’acétate, cette teinte est au contraire très intense : or, il est démontré que dans ce dernier état l’oxide ferrique , ayant peu d’affinité pour les matières colorantes , ne donne que de mauvaises nuances. Quand, par exemple, on imprime sur la toile une dissolution de nitrate ferrique, 1 oxide qui s’en sépare à l’état de sel basique se teint avec beaucoup de difficulté et ne produit que des teintes qui sont brunes au lieu d’être bleutées.
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- Quand le fer est en contact avec le calicot en présence de l’air humide , il produit, en s’oxidant, des taches de rouille qui se ! fixent sur la toile , et attirent à elles les matières colorantes, 1 Dans les mêmes circonstances , le sulfure ferreux offre le même résultat, soit que passant d’abord à l’état de sulfate par une 1 absorption d’oxigène, il se transforme sur-le-champ en sel basique en fixant une dose d’oxigène plus forte, soit qu’il ait ! directement le pouvoir de fixer par une double décomposition 1 une certaine quantité de matière colorante.
- L’acétate et le pyrolignite ferreux étant particulièrement employés comme mordants, nous n’avons pas à revenir sur la préparation de ces composés que nous avons donnée avec assez de détails, § 179,
- Des mordants de fer alcalins.
- § 478. Jusqu’ici il n’y a guère que Haussmann ( Journal de ï Physique, t. XLVIII, p. 369) qui ait employé comme mordants des dissolutions ferrugineuses alcalines. Il dissolvait le fer ou le sulfate ferreux dans l’acide nitrique et dans des conditions telles , qu’il y avait toujours , ainsi que nous l’avons constaté, formation d’un sel ammonique; la liqueur obtenue était ensuite saturée de carbonate potassique , qu’on y versait peu à peu ; le précipité qui se formait d’abord était bientôt redissous par un excès de carbonate potassique, pour donner lieu à un sel double qu’on décomposait p'ar les oxides alcalins qui en précipitaient l’oxide ferrique. Haussmann dit s’être servi avec succès de cette dissolution dans beaucoup de circonstances.
- Nous nous sommes appuyé de la propriété que possède le pyrophosphate ferrique de se dissoudre dans les alcalis , et particulièrement dans l’ammoniaque, pour composer un excellent mordant ferrugineux alcalin qui s’imprime avec netteté, et qui peut être teint immédiatement après son impression. Qu’on verse dans une dissolution de sulfate ferrique une dis-
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- DES MORDANTS FERRUGINEUX.
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- solution de pyrophosphate sodique , il y a formation d’un précipité abondant de pyrophosphate ferrique d’un blanc légèrement jaunâtre qui, recueilli et lavé, se dissout très bien dans l’ammoniaque. Cette solution une fois épaissie, puis imprimée , il ne faut plus que dessécher fortement l’étoffe pour déterminer une combinaison entre elle et le mordant. Quand elle a eu lieu, il suffit de rincer le tissu à l’eau et de le faire passer ensuite dans un bain de teinture en garance pour obtenir les teintes lilas et viol; ttes les plus pures ; et, chose assez remarquable et sur laquelle nous serons dans le cas de revenir plus tard, c’est que des toiles ainsi mordancées se teignent encore dans un bain de garance épuisé, où ne se teindraient plus des tissus mor-dancés à la manière ordinaire , résultat qu’il faut attribuer à la double décomposition qui s’effectue dans un semblable bain.
- § Æ79. Applications. Les mordants ferrugineux sont employés, seuls ou mélangés aux mordants aluminiques. Dans le premier cas, ils servent avec les matières colorantes rouges, à produire sur étoffe des gris , des lilas, des violets et des noirs ; avec les matières colorantes jaunes, des gris, des olives plus ou moins foncés virant au noir ; et avec un mélange de matières colorantes rouges et jaunes, une foule de nuances depuis le gris clair jusqu’au noir le plus foncé. Lorsqu’ils sont associés aux mordants aluminiques , les mordants ferrugineux donnent, avec les matières colorantes rouges , des nuances puce plus ou moins intenses tournant au noir; avec les matières colorantes jaunes , des jaunes plus ou moins olivâtres, selon qu’il y a plus ou moins de mordants de fer ; avec un mélange de matières colorantes rouges et jaunes, des couleurs brunes, feuilles mortes, bois pourri, qui varient à l’infini selon que l’on change les proportions respectives du mordant d’alumine et du mordant de fer, ou celles des matières colorantes dont se compose ce bain de teinture (Y. Teinture).
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- Des mordants à base d’étain.
- §480. L’ étain, en s’unissant à l’oxigène, donne naissance à deux oxides bien déterminés, dont l’un réagit à la manière des j bases puissantes, l’autre à la manière des acides, et qui, tous deux, fonctionnent comme mordants. On peut même dire que, de tous les composés métalliques, les combinaisons stannifères sont celles qui adhèrent aux tissus avec le plus d’énergie. La meil- I leure preuve qu’on en puisse donner , c’est qu’alors même qu’une laque à base d’alumine est déjà formée sur le tissu, on peut toujours en faire disparaître la base en totalité ou en partie, en plaçant l'étoffe qui est imprégnée de cette laque dans des conditions convenables en présence d’un composé d’étain. I Le choix entre un composé stanneux et un composé stannique est déterminé par la nature des étoffes et par celle des. couleurs ; que l’on veut y fixer. Nous ne traiterons ici que des conditions j où doivent se trouver ces composés.
- Dans ceux qui sont employés en fabrique , il en est a, où j l’étain oxidé fait fonction de base, et d’autres, b, où il fait : fonction d’acide.
- a. Composés ou l’étain oxidé fait fonction de base. Ces J composés sont de deux espèces : les uns à base d’oxide stan- j neux, les autres à base d’oxide stannique. Parmi les premiers, : c’est le chlorure stanneux qui est le plus généralement en usage ; il ne peut être déposé sur une étoffe sans lui aban- ! donner une certaine quantité de sa base, attendu que traité par l’eau il subit une décomposition partielle et se transforme en un sel acide qui reste en dissolution dans ce véhicule, et en un composé basique insoluble qui adhère-au tissu. Des fabricants utilisent fort souvent ce sel avec une certaine quantité d’acide pour préparer les calicots qu’ils destinent à recevoir l’impression des couleurs vapeur (voyez ce mot). Le chlorure stanneux employé de la sorte n’agissant que par une. double décomposition qu’il fait éprouver à l’eau , d’où résulte toujours j
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- DES MORDANTS STANMFÈRES.
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- une certaine quantité de chloride hydrique qui devient libre, il n'est pas rare de voir les étoffes, surtout les étoffes de coton , plus ou moins attaquées. Pour prévenir de pareils accidents, on peut appliquer avec succès à la fixation de l’oxide stanneux la propriété dont jouissent les acétates de fonctionner à la manière des bases. A cet effet, quand les pièces ont été foular-dées dans un bain de chlorure stanneux, on les fait passer dans un bain d’acétate potassique ou sodique , d’où on les retire en les exprimant à travers deux cylindres ; dans cet état, les étoffes imprégnées de chlorure stanneux et recouvertes d’acétate peuvent être desséchées sans danger.
- Bancrof employait, au lieu de chlorure stanneux , une dis-solution*de sulfate stanneux dans le chloride hydrique, qui se décompose encore plus facilement en présence des tissus. Voici comment on prépare cette dissolution :
- Sur 10 kil. d’étain en grenailles introduits dans un vase de porcelaine , de grès ou de verre, on verse 15 kil. de chloride hydrique du commerce exempt de fer, § 41. On ajoute peu à peu à ce mélange 7k,50 d’acide sulfurique à 66° ; il y a développement de chaleur, et l’étain est d’abord attaqué avec violence ; mais comme la dissolution se ralentit à mesure que la liqueur se concentre, pour la rendre complète, on chauffe le mélange au bain de sable jusqu a ce qu’il ne se dégage plus de gaz hydrogène. Abandonnant alors le tout au refroidissement, on obtient une masse saline qui renferme un léger excès d’étain, on décante la liqueur, on pèse la portion de métal non attaquée, afin de connaître la quantité qui en a été dissoute, et cette quantité une fois connue , on étend la liqueur d’assez d’eau pour que le poids en soit 8 fois celui de l’étain dissous , c’est-à-dire 72 kil., par exemple, s’il y a eu 9 kil. d’étain dissous.
- Ces composés stanneux (chlorures et sulfates), dont on consomme une grande quantité , sont souvent préparés dans les fabriques ; mais vu la difficulté de se procurer des vases de grès ii. 13
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
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- ou de verre qui supportent l’action de la chaleur sans se fendre, 1 on remplace ces vases par des chaudières en étain ; et comme ? ces chaudières elles-mêmes peuvent se fondre quand on les ] chauffe sans précaution, M. J. Fries a imaginé de faire étamer assez fortement une chaudière en cuivre pour que la couche d’étain eût quelques millimètres d’épaisseur, ce qui lui adonné deux chaudières concentriques et soudées, l’une de cuivre, qui ; résiste à l’action du feu, l’autre d’étain, qui préserve le cuivre .1 de l’action des acides. Toutefois en employant un vase de cette nature, doit-on avoir soin de ne pas y laisser séjourner le sel, surtout quand il est étendu, autrement l’étain de la chaudière déterminerait bientôt une réaction dans laquelle celui de la dissolution «serait précipité sous forme de beaux cristaux.
- On prépare encore ces composés en portant à la température de 100° au bain-marie une quantité quelconque d’acide sulfurique de Saxe, dans laquelle on fait dissoudre, jusqu’à saturation complète, du chlorure stanneux (sel d’étain). La dissolution prend d’abord la consistance d’un sirop épais et ensuite l’aspect d’un mortier durci. Cette préparation doit être conservée à l’abri du contact de l’air.
- Parmi les composés stanniques, il est une foule de préparations qu’on emploie comme mordants ou parties constituantes des laques qui sont appliquées sur les tissus , et qui renferment de l’oxide stannique pur ou mélangé d’oxide stanneux. On les désigne généralement sous le nom de compositions d'étain ou même de compositions physiques.
- En voici quelques uns :
- a. 10 kil. d’étain en rubans sont dissous avec précaution dans un mélange formé de
- *25 kil. acide nitrique et de S5 — chloride hydrique du commerce.
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- DES MORDANTS STANNIFERES. 195
- b. 10 kil. d’étain en grenailles sont dissous dans un mé-
- lange formé de
- 20 kil. chloride hydrique du commerce ,
- 20 — acide nitrique du commerce dans lequel on a préalablement fait dissoudre 5 — chlorure ammonique (sel ammoniac).
- Cette dissolution renferme du chlorure stannico-ammonique.
- c. 10 kil, d’étain en rubans sont dissous peu à peu dans
- 80 kil. d'un acide nitrique à 24°, dans lequel on a préalablement fait dissoudre 10 — sel ammoniac.
- d. 10 kil. d’étain sont dissous dans
- 40 kil. acide nitrique à 34°,
- 20 — chloride hydrique.
- 20 — d’eau.
- e. 10 kil. chlorure stanneux (sel d’étain) sont dissous peu
- à peu dans un mélange formé
- tantôt de
- 16 kil. chloride hydrique du commerce, ou de 8 — acide nitrique
- tantôt de
- e' 8 kil. chloride hydrique et de 3 — acide nitrique (W.)
- tantôt enfin de
- e" ü kil. chloride hydrique, ou de 7 — acide nitrique.
- /’. 10 kil. chlorure stanneux (sel d’étain) sont dissous peu à peu dans :
- 12 ,5 acide nitrique.
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- (j. On fait encore dissoudre dans un mélange formé de :
- 10 lui. acide nitrique et de
- 1 o — acide chloride hydrique autant d’étain que ces acides peuvent en réduire, puis on fait fondre à chaud dans cette liqueur préalablement décantée :
- \ — chlorure stanneux (sel d’étain du commerce).
- h. 10 kil. étain sont dissous avec précaution dans
- 19 kil. acide nitrique à 35°.
- \ 5 — chloride hydrique à 22° ; la dissolution opérée , on y ajoute :
- 2'\500 acétate plombique.
- Enfin on fait dissoudre peu à peu et jusqu à saturation, du chlorure stanneux dans de l’acide nitrique à 35 ou 37° AB. La dissolution qui en résulte a la consistance d’une gelée.
- On voit par ces exemples combien ces préparations varient dans leur composition : aussi nous pensons qu’il serait plus avantageux pour le fabricant de les faire directement en mélangeant du chlorure stannique à des doses convenables de chlorure ammonique. Quant à l’acétate plombique que l’on voit figurer dans l’une d’elles, il n’a d’autre objet que de diminuer l’action corrosive de l’excès d’acide qu’elle renferme.
- § 481. b. Composés ou l’étain oxidé fait fonction d’acide.
- Ces mordants sont d’un usage fréquent ; on les prépare en faisant dissoudre de l’oxide ou, pour plus d’économie, du chlorure stanneux dans l’hydrate potassique ou sodique. Ces bases forment avec le chlore des chlorures alcalins, et l’oxide stanneux mis en liberté se combine avec l’excès de base pour t donner naissance à un stannite soluble.
- Ce composé n’a que peu de stabilité ; deux causes puissantes tendent à le décomposer. La première réside dans l’action qu’exerce sur lui l’acide carbonique de l’air qui s’empare de la
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- DES MORDANTS STANNIFERES.
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- base alcaline et met en liberté l’oxirle stanneux, lequel, s’unissant lui-même à l’oxigène de l’air:, passe à l’état d’oxide stan-nique. La seconde tient à l’ébranlement de ses molécules; car alors même qu’il est à l’abri du contact de l’air, la molécule d’oxide stanneux se dédouble et se transforme en oxide stannique et en étain métallique d’après la formule 2 Sn O = Su O2 -+- Sn ; mais le dernier qui reste entier, tant qu’il n’est pas exposé à l’influence de l’air, s’oxide dès qu’il est en présence de cet agent, et passe peu à peu à l’état d’oxide stanneux d’abord , puis d’oxide stannique. Ainsi, en résumé, par. l’une ou par l’autre de ces causes, le stannite fournit toujours aux étoffes qui en sont imprégnées de l’oxide stannique. Du reste, ainsi que nous pourrons en juger, le déplacement de l’oxide est toujours favorisé par l’intervention de l’acide sulfurique qui, s’emparant de la base, met l’oxide en liberté et accélère son oxi-dation.
- Des fabricants, considérant, d’une part, que les toiles imprégnées depuis un certain temps de stannite contractent constamment une teinte jaune grisâtre, et, d’une autre, que c’est toujours , en définitive , de l’oxide stannique qui se fixe , remplacent le stannite par le stannate potassique ou sodique, qu’on prépare en substituant, dans la préparation que nous avons décrite, le chlorure stannique au chlorure stanneux ; mais nous devons faire observer que l’affinité du composé stannique est bien moins grande dans cette circonstance.
- Applications. On n’a que rarement recours aux mordants st.annifères pour obtenir des couleurs teintes ou dites g avancées ; on ne s’en sert que pour combattre les effets des mordants de fer (rouges rongeants) ou, après que la teinture est opérée, pour transformer par substitution une laque à base d’alumine en une autre laque à base stannifère; mais si l’emploi qu’on en fait est limité dans ce genre de fabrication, ils figurent dans presque toutes les couleurs dites application, et surtout dans les couleurs vapeur.
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- Dlî LA FABRICATION EN GENERAL.
- C’est l’oxide stannique qui donne à la matière colorante de la cochenille cette couleur écarlate qu’aucun autre oxide incolore ne peut lui faire contracter. Avec la matière colorante de la garance il forme une laque rouge feu, tandis qu’un mordant d’alumine ne produit avec la même matière qu’une laque d’un rose qui tire au violet.
- On se sert encore de quelques autres mordants pour fixer les couleurs aux tissus, des composés à base chromique, par exemple. Mais si l’oxide chromique isomorphe avec les oxides aluminique et ferrique est susceptible d’adhérer aux étoffes et d’attirer à lui les matières colorantes , il donne naissance par sa nuance d’un gris verdâtre à des laques dont les couleurs ne sont pas franches , ainsi qu’on le verra en examinant les teintes qu’on obtient de cet oxide en passant les toiles qui en sont imprégnées dans un bain de campêche, de Brésil, de garance ou de quercitron.
- Ces composés, de même que ceux de quelques autres oxides métalliques, n’étant pas d’un usage général, nous nous bornerons à en parler à fur et à mesure que l’occasion se présentera d’en signaler l’emploi ; par la même raison nous ne dirons rien ici du mordant organique gras qui joue un si grand rôle dans la fabrication du rouge turc , parce qu’en parlant de cette couleur particulière nous aurons à entrer dans tous les détails de ce genre de teinture.
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- PRÉLIMINAIRES DE l/lMPRESSION (DESSIN). 199
- CHAPITRE III.
- IMPRESSION.
- PRÉLIMINAIRES DE L’iMPRESSlON. - GRAVURE. - MACHINES ET
- APPAREILS A IMPRIMER. - PRÉPARATION DES COULEURS. ---
- DESCRIPTION DES OPÉRATIONS DE L’iMPRESSlON CONSIDÉRÉES DANS LEUR ENSEMBLE.
- Préliminaires de l’impression.
- § 482. Dessin. Nous touchons ici à une des parties les plus délicates de la tâche que nous nous sommes imposée, et nous devons nous empresser de dire que nous n’aurons pas la témérité de traiter cette question ; la seule chose que nous ayôns en vue, c’est d’assigner dans le cadre de cet ouvrage une place à cette importante matière, la première cause de la prospérité et de la décadence des établissements de toiles peintes. Ce n’est point assez, en effet, que le fabricant sache préparer avec économie de belles et solides couleurs , il faut encore qu’il possède le grand art d’en tirer parti par l’emploi de dessins raisonnés qui, tout en satisfaisant au goût si capricieux du jour, produisent les plus grands effets avec le nombre le plus limité de nuances , et offrent ainsi tout naturellement, avec plus de chances de réussite dans l’exécution , une économie notable de matière et de main-d’œuvre. Si un sentiment de délicatesse facile à comprendre ne nous faisait un devoir d’éviter toute espèce de personnalité, il nous suffirait d’analyser les phases de succès et revers de tel et tel établissement, pour faire ressortir l’influence du dessinateur en toiles peintes.
- A toutes les qualités du peintre qui sait produire des formes gracieuses, qui connaît l’effet du mélange des couleurs, le dessinateur de toiles peintes doit joindre, avec des notions précises sur les effets physiques qui résultent de la juxtaposition des matières colorantes, une connaissance approfondie de la fabrication; car s'il est toujours possible au
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- peintre de retoucher un tableau et par conséquent de corriger l’effet qu’une couleur “produit sur l’ensemble de son sujet, ]e dessinateur d’indienne ne jouit pas du même avantage : des couleurs de nuances déterminées lui sont données parle chimiste, et c’est à lui de prévoir à l’avance les modifications qui résulteront tant de leur juxtaposition que de leur superposition , à la suite des opérations de l’impression et de la teinture. D’autre part, si toutes les couleurs étaient de même nature et se fixaient aux mêmes conditions sur les étoffes, les opérations de l’impression des tissus se rapprocheraient davantage clu travail du peintre, puisqu’il n’y aurait plus qu’à placer l’une à côté de l’autre, à l’aide d’un nombre suffisant de formes, ou à superposer autant de couleurs que le comporterait le dessin ; mais comme il n’en est point ainsi, et que beaucoup de couleurs ne peuvent adhérer aux tissus que par des opérations distinctes et successives, tandis que d’autres ne peuvent même être mélangées sans se dénaturer réciproquement, le dessinateur doit être initié à toutes les conditions de la fixation de ces couleurs, afin de ne point établir un dessin dont les nuances seraient incompatibles avec les opérations nécessaires à cette fixation, et afin aussi d’être à même d’utiliser toutes ces réactions chimiques que le coloriste sait produire à la surface des étoffes et dont le peintre n’a point à se préoccuper. Nous avons donc d’abord à traiter ici d’une question purement physique ou de* l’influence qu’exercent les couleurs les unes sur les autres, et ensuite à exposer la théorie générale de l’impression.
- §â83. Partie physique. Dans un ouvrage spécial, non moins admirable par la science profonde de l’auteur que par la patience dont il a eu besoin pour recueillir les nombreuses observations qu’il y a consignées, M. Chevreul a réuni, sous le titre de Loi du contraste simultané des couleurs et de T assortim ent des objets colorés (1), tous les faits propres à guider ceux qui se
- (l) Paris *839, Pitois, Levranlt , Id.
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- livrent à l’application des couleurs, dans quelque but que ce soit d’ailleurs. C’est à cette source précieuse que le lecteur doit aller puiser le développement de principes que nous ne ferons en quelque sorte qu’exposer ici, le cadre de cet ouvrage nous interdisant de trop longs détails à ce sujet.
- 11 serait difficile de faire connaître l’époque à laquelle le peintre remarqua pour la première fois le changement qu’éprouve dans sa nuance une couleur rapprochée d’une autre, changement tel que la couleur qui, étendue sur la palette, ne laisse rien à désirer, ne répond plus à l’attente de l’artiste qui l’a déposée sur le tableau, modifiée qu’elle est par les teintes qui l’environnent. D’autre part, personne n’ignore qu’en fixant quelque temps une figure colorée détachée sur un fond d’une couleur différente, on en conserve une impression telle qu’on la voit encore lors même qu’on ne l’a plus sous les yeux, mais avec une autre nuance et sur un autre fond. Ce genre de phénomènes a occupé Buffon, le P. Scherfer, Rumford, Œpinus, Darwin, Le Prieur de la Côte-d’Or et enfin M. Chevreul, qui, en reprenant les travaux de ses devanciers, a prouvé que tous avaient confondu dans une seule classe plusieurs ordres de phénomènes essentiellement distincts, sur lesquels nous reviendrons après avoir rappelé quelques faits qu’il est indispensable de connaître pour en comprendre le développement.
- On sait qu’un faisceau de lumière solaire , en passant au travers d’un prisme de verre à base triangulaire, se décompose en un nombre indéterminé de rayons qui constituent l’image colorée qu’on appelle le spectre solaire, et qu’on peut ramener à sept groupes, savoir :
- Les rayons rouges.
- — orange.
- — jaunes
- — verts.
- — bleus.
- — indigo.
- — violets.
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- On sait aupsi que ces sept rayons réunis au foyer d’un verre lenticulaire se combinent pour reproduire de la lumière blanche; que la réunion
- Des rayons ronges, jaunes et bleus produit du blanc,
- Celle des rayons jaunes et rouges, de l’orange,
- Celle des rayons jaunes et bleus , du vert,
- Celle des rayons rouges et bleus , du violet.
- De là trois couleurs : le jaune, le rouge et le bleu, qu’on appelle primitives, parce qu’on peut toujours , en les réunissant, reproduire soit la lumière blanche, soit les divers rayons colorés du spectre solaire.
- On sait de même 1° que la lumière réfléchie par un corps blanc et opaque n’éprouve pas de modification dans la proportion des divers rayons colorés qui la constituent lumière blanche ; 2° que si la lumière qui tombe sur un corps est absorbée en totalité par ce corps comme elle le serait en pénétrant dans un trou parfaitement obscur, le corps paraît noir, et n’est visible qu’autant qu’il est contigu à des surfaces réfléchissantes qui l’éclairent par la lumière qu’elles lui transmettent ; 3° que quand la lumière tombe sur un corps coloré qui ne l’absorbe pas entièrement, il y a toujours réflexion de lumière blanche et d’une lumière colorée dont la nuance est en rapport avec celle du corps absorbant ; 4° enfin, que les rayons absorbés par les corps colorés étant réunis aux rayons réfléchis reconstituent de la lumière blanche. Ces rayons réfléchis sont dits complémentaires des rayons absorbés, et diffèrent suivant qu’un faisceau de lumière vient à tomber sur des corps diversement colorés.
- Les rayons bleu et jaune sont-ils C’est le rayon rouge réfléchi qui est absorbés, la couleur complémentaire.
- Sont-ce les rayons bleu et rouge, C’est le rayon jaune.
- jaune et rouge, C’est le rayon bleu.
- Est-ce le rayon rouge , —' jaune ,
- C’est le rayon vert. C’est le rayon violet.
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- PRÉLIM. DE L’iMPRESS. ( EFFETS PHYSIQ. DES COULEURS). 203
- Ainsi donc, chercher la couleur qui manque à un ou plusieurs rayons colorés pour former de la lumière blanche, c’est en cher-
- "AT
- cher la couleur complémentaire. Ces données une fois établies ,
- ‘ abordons les expériences qui servent de fondement au sujet que nous traitons.
- Quand deux bandes de même couleur, mais d’intensité différente, larges de 1 centimètre environ, sont placées parallèlement l’une à lVatre et d’une manière contiguë , elles sont toujours modifiées dans leur nuance et n’ont plus les mêmes teintes qu’elles présentaient vues isolément, ni même simultanément, mais à une certaine distance. Le phénomène général qu’on observe est celui-ci :
- La couleur des deux bandes est totalement changée au point de contact ; celle dont la nuance est du ton le moins élevé paraît beaucoup plus faible, mais non pas uniforme dans toutes ses parties; car tandis que les points qui sont dans un contact immédiat avec la bande la plus foncée sont toujours les plus clairs, la couleur des autres augmente graduellement de ton jusqu’à une certaine distance, où la bande reprend sa couleur réelle. La bande dont la couleur est du ton le plus élevé se modifie d’une autre manière ; car tandis que les points contigus à la bande claire sont plus foncés, la nuance des autres va diminuant graduellement d’intensité jusqu’à une certaine distance , où elle reprend son ton naturel.
- M. Chevreul appelle contraste cle ton les modifications que deux couleurs de même nature, mais de tons différents, éprouvent lorsqu’elles sont à côté l’une de l’autre. On comprendra facilement ces explications en jetant les yeux sur les bandes colorées ci-après, éch. n° 15, que nous devons à l’obligeance de M. Silbermann, imprimeur à Strasbourg.
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- Ech. 15. Contraste de ton.
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- § 484. Quand deux bandes de couleurs différentes, mais de tons
- manière contiguë, comme les précédentes, leurs couleurs produisent sur nos organes visuels d’autres impressions que si elles étaient vues isolément ou simultanément, mais distantes l’une de l’autre. Dans ce cas, la modification ne porte pas seulement sur l’intensité du ton , mais encore sur la composition optique des couleurs. Chacune d’elles, en effet, absorbe un certain nombre de rayons et en réfléchit d’autres, les complémentaires; or ces derniers, en réagissant, modifient la couleur qui se trouve en leur présence. C’est à cet ordre de phénomènes , qu’on ne doit pas confondre avec les précédents, que M. Chevreul donne le nom de contraste des couleurs, par opposition à celui de contraste de ton, et il a constaté par expérience que deux bandes de couleur différente, mais autant que possible d’intensité égale, se modifient comme suit :
- Orangé et vert.
- Lorsque Yorangé, dont la complémentaire est le bleu*, est juxtaposé au vert, dont la complémentaire est le rouge, l’orangé.
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- PRÉLIM. de l’impress, (effets phvsiq. des couleurs). *>05
- modifié par la complémentaire du vert, devient plus rouge et plus brillant, et le vert, modifié par la complémentaire de l'orangé , vire au bleu.
- Orangé et indigo.
- Lorsque l'orangé, dont la complémentaire est le bleu, est juxtaposé à l'indigo , dont la complémentaire est le jaune orange , l'orangé, modifié par la complémentaire de l'indigo, vire au jaune, et l'indigo, modifié par la complémentaire de l’orangé, vire au bleu.
- Orangé et violet.
- Lorsque l'orange, dont la complémentaire est le bleu, est juxtaposé au violet, dont la complémentaire est le jaune tirant sur le vert, l’orangé, modifié par la complémentaire du violet, vire au jaune, et le violet, modifié par la complémentaire de l’orangé , vire à l’indigo.
- Vert et indigo.
- Lorsque le vert, dont la complémentaire est le rouge, est juxtaposé à l'indigo, dont la complémentaire est le jaune tirant sur l'orange, le vert, modifié par la complémentaire de l’indigo, vire au jaune, et l’indigo, modifié par la complémentaire du vert, vire au rouge.
- Vert et violet.
- Lorsque le vert, dont la complémentaire est le rouge, est juxtaposé au violet, dont la complémentaire est le jaune tirant sur le vert, le vert, modifié par la complémentaire du violet, vire au jaune, et le violet, modifié par la complémentaire du vert, vire au rouge.
- Orangé et rouge.
- Lorsque l'orangé , dont la complémentaire est le bleu, est juxtaposé au rouge, dont la complémentaire est le vert, l'orangé, modifié
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- FABRICATION
- GENERAI
- complementaire au ronge
- ranthe, et le rouge, modifié par la complémentaire de l’orangé vire an jaune. \
- Violet et ronge.
- Lorsque le violet, dont la complémentaire est le jaune tirant sur le ] vert, est juxtaposé au rouge, dont la complémentaire est le vert, ] le violet, modifié par la complémentaire du rouge, vire à l’indigo , et le rouge, modifié par la complémentaire du violet, vire à l’orangé.
- Indigo et fouge.
- Lorsque l'indigo , dont la complémentaire est le jaune tirant à l’orangé , est juxtaposé au rouge, dont la complémentaire est le vert, l’indigo, modifié par la complémentaire du rouge, vire au bleu , et le rouge , modifié par la complémentaire de l’indigo, vire à l’orangé.
- Orangé et jaune.
- Lorsque Y orangé, dont la complémentaire est le bleu, est juxtaposé au jaune, dont la complémentaire est l’indigo tirant sur le violet, l’orangé , modifié par la complémentaire du jaune, vire au rouge, et le jaune, modifié par la complémentaire de l’orangé, vire au vert.
- Vert et jaune.
- Lorsque le vert, dont la complémentaire est 1 erouge, est juxtaposé au jaune, dont la complémentaire est Yindigo tirant sur le violet, le vert, modifié par la complémentaire du jaune, paraît plus bleu , et le jaune, modifié par la complémentaire du vert, paraît plus orangé.
- Vert et bleu.
- Lorsque le vert, dont la complémentaire est le rouge, est juxtaposé au bleu, dont la complémentaire est l’orange, le vert, modifié par la complémentaire du bleu, paraît plus jaune, et le bleu, modifié par la complémentaire du vert, tire vers l’indigo.
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- PRÉL1M. DE L’iMPRESS. (EFFETS PHYSIQ. DES COULEURS). 207 Violet et bleu.
- Lorsque le violet, dont la complémentaire est le jaune tirant sur le vert, est juxtaposé au bleu, dont la complémentaire'est Y orangé, le violet, modifié par la complémentaire du bleu, paraît plus rouge, et le bleu, modifié par la complémentaire du violet, paraît vert.
- Indigo et bleu.
- Lorsque Y indigo, dont la complémentaire est le jaune tirant à l’o-rangè, est juxtaposé au bleu, dont la complémentaire est l’o-rangé, l’indigo . modifié par la complémentaire du bleu , vire au violet, et le bleu, modifié par la complémentaire de l’indigo, vire au vert.
- Rouge et jaune.
- Lorsque le rouge, dont la complémentaire est le vert, est juxtaposé au jaune , dont la complémentaire est Y indigo tirant sur le violet, le rouge, modifié par la complémentaire du jaune , vire au violet, et lejaune, modifié par la complémentaire du rouge, viro au vert.
- Rouge et bleu.
- Lorsque le rouge, dont la complémentaire est le vert, est juxtaposé au bleu, dont la complémentaire est Yorangé, le rouge, modifié par la complémentaire du bleu , vire à l’orangé, et le bleu, modifié par la complémentaire du rouge, vire au vert.
- Jaune et bleu.
- Lorsque lejaune, dont la complémentaire est Y indigo tirant sur le violet, est juxtaposé au bleu , dont la complémentaire est l’o-rangé, lejaune, modifié par la complémentaire du bleu , paraît plus orangé, et le bleu, modifié par la complémentaire du jaune, vire à l’indigo.
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- Indigo et violet.
- Lorsque Y indigo , dont la complémentaire est le jaune tirant sur l’orangé, est juxtaposé au violet, dont la complémentaire est le jaune tirant sur le vert, l’indigo , modifié par la complémentaire du violet, vire au bleu , et le violet, modifié par la complémentaire de l’indigo, vire au rouge.
- M. Chevreul a constaté parle même procédé les modifications qu’éprouve une couleur selon qu’elle est contiguë au blanc, au noir et au gris, qui est la dégradation du noir ; mais comme le blanc ne produit que des modifications difficiles à saisir, nous les passerons sous silence , et nous ne ferons mention que de celles qui résultent de la juxtaposition des couleurs fixées sur fonds noirs et gris.
- Le rouge, sur un fond noir, paraît toujours plus brillant ; et comme sa complémentaire, le vert, s’ajoute au noir du fond, celui-ci paraît moins rougeâtre.
- L’orangé, sur un fond noir, paraît plus jaune et plus brillant; et comme sa complémentaire, le bleu, s’ajoute au noir, celui-ci devient bleuté.
- Le jaune, sur un fond noir, paraît plus clair et tire sur le vert ; et comme sa complémentaire, le violet, s’ajoute au noir, celui-ci devient violacé.
- Le vert, sur un fondnoir, vire faiblement au jaune ; et comme sa complémentaire, le rouge, s’ajoute au noir, celui-ci devient rougeâtre.
- Le bleu, sur un fond noir, devient moins sombre ; et comme sa complémentaire, l’orangé, s’ajoute au noir, celui-ci s’éclaircit aussi.
- La même chose a lieu pour l’indigo et le noir.
- Le violet, sur un fond noir, paraît plus brillant, plus clair et plus rouge, et sa complémentaire, le jaune, s’ajoutant au noir, l’éclaircit.
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- PRELIM. DE L’iMPRESS. (EFFETS PHYSIQ. DES COULEURS ). 209
- Placé sur un fond gris, le rouge paraît plus pur, moins orangé, et sa complémentaire, le vert, en s’ajoutant au gris, le rend verdâtre.
- Placé sur un fond gris, l’orangé est plus clair, plus jaune et plus brillant, et sa complémentaire , le bleu, en s’ajoutant au gris, le fait virer au bleu ou au gris d’argent.
- Placé sur un fond gris, le jaune paraît plus brillant, et sa complémentaire, le violet, en s’ajoutant au gris, le rend violâtre.
- Placé sur un fond gris, le vert est beaucoup plus brillant , plus jaune , et sa complémentaire , le rouge, en s’ajoutant au gris, le rend rougeâtre.
- Placé sur un fond gris, le bleu devient beaucoup plus brillant, quoiqu’en prenant une légère teinte verdâtre, et sa complémentaire, l’orangé, en s’ajoutant au gris, le fait virer à l’orangé.
- Placé sur un fond tfrotr, le violet paraît plus franc, plus pur et plus vif, et sa complémentaire, le jaune, en s’ajoutant au gris, le fait virer au jaune.
- M. Chevreul a en outre mis en rapport deux couleurs composées, ayant une couleur simple pour élément commun et a constaté : ..
- Que l’orangé et le vert, dont l’élément commun est le jaune, placés d’une manière contiguë, perdent l’un et l’autre une portion de cet élément, en sorte que l’orangé paraît plus rouge et le vert plus bleu ;
- Que l’orangé et l’indigo, dont l’élément commun est le rouge, placés d’une manière contiguë , • perdent l’un et l'autre une partie de cet élément, en sorte que l’orangé paraît plus jaune et l’indigo plus bleu.
- Tous les faits que nous venons de rapporter rentrent dans un groupe de phénomènes que M. Chevreul désigne sous le nom générique de contraste, simultané, qui, selon qu’il a lieu entre une même couleur de deux tons différents ou entre deux couleurs de nature différente, mais de ton égal, est dit dans le
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- premier cas contraste de ton, et dans le second contraste de couleur. Ces phénomènes de contrastes simultanés sont régis par une loi que M. Chevreul énonce ainsi :
- Dans le cas où l’œil voit en même temps deux couleurs con~ \ tiques, il les voit le plus dissemblables possible quant à leur I [ composition optique et quant à la hauteur de leur ton. L’énoncé de cette loi est accompagné d’une formule qui s’applique à tous 1 les cas (voyez page 15 de l’ouvrage cité).
- ^ /i85. Sous le nom de contraste successif des couleurs, cet illustre chimiste range tous les phénomènes qui ont lieu lorsque I les yeux, ayant fixé pendant un certain temps un ou plusieurs i objets colorés , aperçoivent encore, après avoir cessé de les regarder, les images de ces objets offrant la couleur complémen- ! ^ taire de celle qui est propre à chacun d’eux. C’est sans doute i à cet ordre de phénomènes qu’il faut rattacher les observations si intéressantes adressées au grand Euler dans une lettre de M. Wilson, de la Société royale de Londres. Le P. Becaria, ! ayant annoncé que les phosphores n’émanent pas la même lumière que celle qu’ils reçoivent par les verres différemment co- i lorés, le fait parut si étrange à M. Wilson, qu’il examina l’effet des rayons primitifs sur des phosphores de différentes couleurs, etvit,à sa grande surprise, qu’un phosphore, préparé pour donner : une lumière rouge, n’en donne qu’une très faible lorsqu’il a été éclairé par un rayon rouge, tandis que le même phosphore brille de la lumière rouge la plus vive lorsqu’il a été exposé à un rayon violet; qu’un phosphore bleu, éclairé par un rayon bleu, ne donne qu’une faible lumière bleue, tandis qu’éclairé par un rayon rouge il brille d’une couleur bleue très lumineuse. ( Journal de Physique.)
- §/i86. Enfin,sousle nom de contraste mixte, M. Chevreul comprend tous les phénomènes physiques qui résultent de ce fait que la rétine, quelque temps impressionnée par une certaine couleur, , voit ensuite, avec la complémentaire de cette couleur, la couleur nouvelle qu’un objet nouveau vient lui offrir ; la sensation perçue
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- est alors la résultante de cette nouvelle couleur et de la complémentaire de la première.
- A l’appui de la loi du contraste mixte, M. Chevreul indiqué les deux faits ci-après :
- Premier fait. Lorsqu’on a regardé longtemps une étoffe jaune et qu’on fixe ensuite une étoffe orange, nacarat ou écarlate, on trouve cette dernière sans feu, on la juge amarante, lie de vin ou cramoisie, parce que la rétine, frappée par le jaune, voit le violet qui est la complémentaire du jaune, et que dès lors tout le jaune de l’étoffe orangée , nacarat ou écarlate disparaissant, le nacarat ou l’écarlate paraît rouge ou tout au moins d’un rouge tirant sur le violet.
- Second fait. Si l’on soumet à l’œil, l’une après l’autre, quatorze pièces d’étoffe rouge de même nuance, les six ou sept dernières lui semblent toujours d’une couleur moins belle, par la raison qu’après avoir vu successivement sept ou huit pièces rouges, il éprouve la même impression que s’il eût vu durant le même temps une seule pièce de cette couleur, et il a, par conséquent, une tendance à voir la complémentaire du rouge, c’est-à-dire le vert, qui affaiblit nécessairement l’éclat du rouge des dernières pièces : aussi, pour n’être pas la victime des yeux de 1 acheteur, le marchand doit-il, après leur avoir soumis quelques pièces rouges, leur en présenter de vertes pour les ramener à I état normal. Si, au contraire, la vue du vert avait été assez prolongée pour leur faire dépasser cet état, les yeux auraient tendance à voir le rouge, et les pièces rouges qui leur seraient présentées alors leur paraîtraient plus belles que les autres.
- M. Chevreul ne s’est pas berné à exposer des lois et à faire connaître les faits sur lesquels elles s’appuient, il a encore discuté les différentes applications dont elles sont susceptibles. Ainsi, il expose les moyens de combattre les effets du contraste, de faire qu’une couleur apparaisse toujours la même, (luelle que soit la nuance du fond sur lequel elle est imprimée, enfin de rendre le blanc plus brillant et plus pur sur des fonds
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- différemment colorés. A cet égard, nous renvoyons le lecteur à l’œuvre de l’auteur, particulièrement aux pages 168-282 et 287, qui se rapportent spécialement à l’impression ; nous Y[n\ vitons aussi à lire les pages 89 à 99 qui traitent de la cons- ( traction d’une gamme hémisphérique, à l’aide de laquelle ou I peut représenter toutes les modifications des couleurs et con- : naître immédiatement la complémentaire de chacune d’elles. i
- Les trois tableaux ci-contre, extraits d’un ouvrage inédit de j M. D. Dollfus-Ausset, compléteront ce que nous venons de dire , et pourront être consultés avec profit à plusieurs égards. I Par l’un on jugera de l’effet des différentes couleurs simples ou I composées au milieu de fonds de nuances diverses ; par l’autre, ! des modifications de deux couleurs concentriquement juxtapo- ! sées sur un fond bleu ; par le troisième, de celles de deux I couleurs également concentriques , mais placées sur des fonds diversement colorés.
- Il y aurait encore à examiner l’influence qu’exerce sur les | couleurs qui sont placées les unes à côté des autres la formel qu’on leur donne ; car il est démontré que les mêmes couleurs groupées de la même manière produisent des effets différents selon qu’elles affectent des formes rondes, ovales , etc. Mais nous nous abstiendrons de traiter cette question , que nous n’avons point encore approfondie.
- § /|87. Partie chimique. Exposé théorique cle l’impression. Nous nous proposons, dans ce paragraphe, non seulement d’initier à l’ensemble de la fabrication , mais encore de prévenir les difficultés que pourraient présenter les détails des opérations de l’impression dont nous devrons nous occuper tout-à-l’heure. Il nous arrivera souvent, en effet, de remonter d’un cas particulier aux principes de l’art: or, comment apprécierait-on la valeur des divers raisonnements, si l’on ne comprenait les opérations de l’impression dans ce qu’elles ont de plus général ?
- En exposant l’historique de la toile peinte , nous avons fait connaître par quels moyens l’homme est arrivé à produire des
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- prêlim. de l’impress, (théorie de la fabrication). 213 figures, des images ou des empreintes, sur les étoffes dont il se revêt ; nous n’avons donc pas à y revenir, et nous nous bornerons à envisager ici la question dans ce qu’elle a d’applicable de nos jours.
- A part des procédés spéciaux dont il sera fait mention plus tard, l’œuvre du dessinateur est reproduite sur le tissu au moyen de blocs, de planches ou de cylindres en bois, en pierre ou en métal, sur lesquels le dessin est gravé tantôt en relief, et dans ce cas les surfaces, recevant la couleur par un moyen quelconque, transmettent l’image à l’étoffe par le fait seul de leur contact avec elle; tantôt, au contraire, en creux, et alors la couleur étant introduite dans les cavités, il faut, au moyen d’une pression suffisante, en rapprocher l’étoffe pour qu’elle reçoive l’empreinte de la gravure. De là deux genres d’impression , et partant deux genres de gravure, la gravure en relief et la gravure en creux, autrement dit en taille-douce.
- Si de la gravure nous passons a l’emploi que l’on fait des couleurs, nous voyons que toutes, quoique les unes soient préférables dans quelques circonstances, servent à l’impression sur une étoffe, tantôt d’une figure quelconque, plus ou moins régulière et qui est détachée, soit sur un fond blanc, soit sur un fond couvert ; tantôt', au contraire, de ces fonds couverts sur lesquels sont ensuite détachés des sujets blancs ou diversement colorés.
- Lorsqu’une figure est imprimée sur un fond blanc, deux cas peuvent se présenter :
- Dans l’un, qui est le plus simple , le sujet ne renfermant qu’une seple teinte, il n’y a de difficultés que dans l'application et la fixation de la couleur, à moins qu’on ne veuille par des effets de gravure, en rendant les traits plus ou moins profonds, produire des ombres , des doubles nuances, et suppléer ainsi à un plus grand nombre de couleurs.
- Dans l’autre, plus compliqué, le sujet renfermant plusieurs couleurs nécessite d’abord la décomposition de la gravure en autant de formes qu’il y a de couleurs, à moins que parmi
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- 2!/| DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- celles-ci il ne s’en trouve qui puissent être le résultat de |J superposition de deux nuances primitives, comme le puce, par| exemple, qui n’est que le produit de la superposition du violet! sur le rouge. Il importe ensuite de connaître l’ordre dans lequel ' les diverses couleurs doivent arriver sur la toile, tant pour ]a ; netteté de l’impression que pour la fixation de ces couleurs, sans! qu’elles s’altèrent réciproquement.
- Sous le premier rapport, qu’il soit question , par exemple I d’imprimer une rose en trois rouges bien tranchés, rouge foncé,! rouge clair, rouge rose, ou, en termes de fabrique, jfo. rouge A rouge et petit rouge; en supposant, d’une part, une bonne gravure, des planches se rapportant exactement, et, d’une autre, uni imprimeur intelligent ou une machine d’une exactitude rigou-j reuse, si l’impression se fait mécaniquement, les trois cou-; leurs viendraient se juxtaposer mathématiquement, chaque] contour d’une nuance serait contigu à celui de la nuance voisine , sans qu’il fût possible de constater soit des lignes super-l posées où se confondraient plus ou moins les deux nuances,! soit des lignes de séparation qui feraient' apercevoir le blancj du tissu ; mais cette exactitude n’est que théorique, et comme il est difficile, pour ne pas dire impossible, d’y arriver, le fabricant a toujours soin , dans des cas pareils, de faire graver ses planches destinées à l’impression des couleu s claires, de telle manière que la figure du fin rouge, toujours imprimée la première, soit légèrement recouverte par le second rouge et celui-ci par le rose. Si l’on procédait d’une manière contraire , ces trois rouges se fondant plus ou moins l’un dans l’autre, le dessin perdrait une grande partie de son mérite, l’exécution serait jmanquée.
- Sous le dernier rapport, qu’il soit question de combiner à la toile deux couleurs, dont les procédés de fixation soient incnmpai
- tibles l’un avec l’autre, qu’on veuille, par exemple, mettre du rouge de garance à côté de l’oxide ferrique, on imprimerait vai nement en premier lieu la couleur rouille de celui-ci, qui, faisan
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- fonction de mordant, attirerait à lui la matière colorante du bain de garance. De même on tenterait inutilement d’imprimer le jaune de quercitron avant le rouge de garance ou en même temps ; la matière colorante du quercitron serait en grande par-tie déplacée par celle de la garance, qui est plus forte, et ce qui en resterait sur letoffe disparaîtrait dans les opérations auxquelles on soumet le rouge pour le fixer et lui donner toute sa vivacité.
- Quand on détache une figure sur un fond couvert, il se présente encore des difficultés d’un autre genre. Si la couleur de la figure est assez foncée pour absorber celle du fond , en s’y superposant, elle peut être imprimée directement, à moins que les opérations destinées à la fixer ne soient de nature à altérer la couleur de ce fond. Si le contraire a lieu , si la couleur du fond ne peut être absorbée, il faut ou que cette couleur disparaisse sur tous les points que doit occuper la figure , ou que les parties blanches que la figure est appelée à recouvrir aient été préalablement réservées, ou bien, enfin, que la figure soit imprimée et fixée en premier lieu et la couleur du fond rapportée ensuite et de manière à l’encadrer aussi exactement que possible.
- On surmonte ces difficultés soit par une gravure appropriée, qui réserve les parties blanches représentant l’ensemble de la figure à détacher, de telle sorte que les teintes de cette figure ne se confondent pas avec la couleur du fond, qu’on applique celui-ci sur l’étoffe avant ou après l’impression du sujet ; soit par des effets chimiques ou mécaniques destinés , tantôt à prévenir la fixation d une couleur sur certains points du tissu qu’on désire conserver blancs, et c’est ce qu’on appelle imprimer des réserves, tantôt à enlever au tissu, pour obtenir un dessin dit enlevcu/e blanc, la couleur plus ou moins fixée qui s’y trouve uniformément répandue. Mais si par ces effets chimiques on parvient à réserver ou à enlever des parties blanches sur une étoffe colorée, là ne se borne pas le secours que la chimie prête au fabricant d’indiennes. Elle lui offre encore les moyens de préparer un certain nombre de cou-
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
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- leurs d’une composition telle qu’elles fonctionnent, suivant les circonstances, comme réserves ou comme enlevages. Supposons par exemple, qu’il s’agisse de représenter une jonquille sur un fond bleu, il y a plusieurs manières d’y parvenir. Admettons que l’impression se fasse en relief, deux planches , a et b, re_ présentant la figure de la jonquille, la première gravée en creux, la seconde gravée en relief, on peut : 1° imprimerie fond bleu avec la planche a ; la figure réservée dans cette planche figurera alors en blanc sur l’étoffe, et, à l’aide de la planche b, on rentrera la couleur jaune de la jonquille dans les parties blanches. Dans ce cas , si les deux planches ont été gravées avec soin et que le sujet en creux corresponde exactement à celui qui est en relief, si l’étoffe n'a pas trop varié dans ses dimensions par suite des traitements qu’on a dû lui faire subir pour fixer le fond bleu, si enfin l’ouvrier imprimeur est assez habile pour ne pas donner de faux coups de planche, le dessin jaune apparaîtra bien détaché et parfaitement contourné dans le fond bleu; dans le cas contraire, la couleur jaune, déviant un peu de la place qu’elle devrait occuper, laissera apparaître des lignes blanches d’un côté, et de l’autre en couvrira le bleu formant avec lui du vert. 2° Imprimer la figure de la jonquille avec la planche b, puis, cette couleur fixée, rentrer le fond bleu avec la planche a, et le succès de cette impression dépendra des mêmes conditions que dans le cas précédent.
- Que l’on s’aide , au contraire, d'actions chimiques, et à.l’avantage de n’avoir plus à craindre ces défauts d’exécution se joint celui d’une réduction de moitié dans la gravure , car on n’a plus besoin, en effet, que de la planche b , sur laquelle la jonquille existe en relief, et dont on se sert pour imprimer une couleur jaune , composée de telle manière que le bleu, qui recouvrira uniformément le tissu , ne prenne que sur les parties blanches. Le jaune ainsi imprimé, et jouant le rôle de réserve, est dit jaune réserve sous bleu
- L’opération peut encore se faire autrement, en appliquant
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- PRELIM. DE L IMPRESS. I THEORIE DE LA FABRICATION ). 217
- sur l’étoffe teinte uniformément en bleu une couleur jaune qui, elle-même ou par le concours d’un intermédiaire , détruise les parties bleues sur lesquelles elle sera déposée ; dans ce cas , la couleur est dite jaune enlevage.
- Quelquefois aussi on a recours à un moyen terme, qui est la réunion des deux genres d’opérations précédents. Une fois la toile teinte en bleu, on y imprime une couleur enlevage, qui, appliquée avec la planche b, produit du blanc, puis, l’étoffe bien rincée et séchée , on rentre du jaune avec la même planche sur les parties qui sont devenues blanches à la première impression ; ou bien on fait d’abord l’impression d’une réserve blanche avec la planche n, on teint le fond en bleu , et l’on rentre avec la même planche la figure jaune de la jonquille.
- En résumé, nous voyons que l'exécution de l’impression d'une jonquille sur un fond bleu peut avoir lieu :
- l°~Par l’impression du fond bleu et le rentrage de l’image dans les parties blanches réservées par la gravure ;
- 2° Par l’impression de cette image sur un fond blanc et le rentrage du fond bleu qui vient contourner cette image ;
- 3° Par l’impression de l’image en couleur jaune faisant réserve sous bleu et l’application uniforme de cette dernière couleur, qui, en se fixant sur les parties blanches , respecte les jaunes ;
- l\" En imprimant sur le tissu uniformément teint en bleu un jaune qui, par lui-même ou par le concours d’un agent, détruise les parties bleues avec lesquelles il est mis en contact et les remplace ;
- 5" En formant d’abord le fond bleu , puis en introduisant par deux impressions successives avec la même planche, en premier lieu du blanc et en second lieu du jaune, ou l’inverse, en imprimant avec la planche b une réserve blanche, et en teignant ensuite en bleu le fond dans lequel on rentre la couleur jaune.
- Les couleurs rentrures sont faciles à distinguer de celles qui par elles-mêmes fonctionnent à la manière des réserves ou des
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- 218 DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- couleurs enlevages, en ce que, quelle que soit l’habileté des ouvriers, il y a toujours des déplacements qui font tant soit peu paraître soit du blanc, soit des couleurs composées. Voyez les gros bleus enluminés, par exemple, où le rouge a été rentré dans le fond bleu. Dans ce genre, le dessin présente ordinairement des inégalités qui laissent voir autour du rouge, d’uu côté, des contours blancs , et du côté opposé, des lignes correspondantes de couleur brune, dues à la superposition du rouge sur le bleu , par suite du déplacement de la planche de rentrure. La même observation peut se faire sur les fonds noirs enluminés , où le rouge rentre dans le noir; on y découvre des zones blanches qui proviennent de la même cause. Dans les couleurs enlevées ou réservées, au contraire, rien de semblable n’a lieu; les nuances s’encadrent toujours parfaitement l’une dans l’autre, à moins qu’on n’ait pas su prévenir des actions chimiques qui, quelquefois, provoquent à la longue des altérations au point de la juxtaposition des couleurs, et déterminent ainsi des solutions de continuité. [Voyez Lapis enlevés et réservés.)
- Les échantillons ci-après donnent une idée de ces effets des couleurs enlevées ou réservées. L’échantillon n° 16 fait voir que
- IG. Jaune et bleu superposés.
- deux bandes bleues et jaunes qui se croisent forment du vèrt -au point de leur superposition.
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- PRÉLIM. DE L1MPRESS. ( THEORIE DE LA FABRICATION). 219
- Dans l’échantillon n° 17, la bande bleue qui coupe la bande
- 19. Bleu passant sur le jaune.
- jaune ne présente plus le même phénomène, soit parce que le bleu a été imprimé avant le jaune, et que par sa composition il a fait fonction de réserve sous jaune, en sorte que cette dernière couleur, appliquée en second lieu, n’a pris que sur les parties blanches, soit parce que la bande jaune a été appliquée d’abord, le bleu ensuite, et que celuir ci, renfermant des éléments destructeurs du jaune , l’a fait disparaître. La bande bleue de cet échantillon peut donc être envisagée comme bleu faisant réserve sous jaune, ou comme bleu enlevage sur jaune.
- L’échantillon n° 18 représente les deux mêmes couleurs, mais
- 1$. Jaune passant sur le l»Ieu.
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- I II
- Ri 1
- ^ i
- II!
- 220 DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- avec cette différence que la bande jaune coupe la bleue ; par conséquent il faut admettre ou que le jaune a été imprimé en premier lieu pour faire fonction de reserve sous bleu, en sorte que .celui-ci, appliqué ensuite, n’a pas pu le couvrir et ne s’est combiné qu’aux parties blanches , ou bien que si la bande bleue a été imprimée la première , le jaune imprimé en second lieu portait avec lui un élément destructeur du bleu, et apparaît pour cette raison comme s’il avait été appliqué sur un fond blanc. La bande jaune peut donc aussi être envisagée comme jaune réserve sous bleu ou comme jaune enlevage sur bleu.
- Indépendamment de ces effets chimiques, il en est d’autres, tout nouvellement connus, qui permettent de donner à quelques unes des parties d’un dessin sans attaquer le fond blanc. soit, une nuance plus claire ou plus foncée, soit une autre couleur, et qui sont appelés à jouer un grand rôle dans l’impression des tissus : ce genre est dit de conversion, expression qui représente assez heureusement les résultats que l’on obtient. L’échantillon ci-contre en donne une juste idée. On y voit, en effet, des
- ÎO. Couleurs conversions.
- bandes de cachou et des bandes olive qui, après avoir été imprimées sur toute la longueur de la toile, ont été coupées par des bandes transversales d’une substance qui possédait la double
- J pi
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- PRF.LIM. DE LIMPRESS. (THEORIE DE LA FABRICATION ). 221
- propriété de respecter les parties blanches et de foncer les nuances olive et bois, au point que les bandes olive clair sont devenues olive foncé, et les bandes de couleur bois clair, bois foncé. Des effets inverses pourraient être réalisés, c’est-à-dire que des couleurs olive et bois pourraient être transformées en des nuances plus claires. Cet exemple donne, ce nous semble, une idée nette des phénomènes que nous cherchions à faire comprendre.
- Ces effets chimiques, outre l’avantage qu’ils offrent au fabricant de pouvoir multiplier ses couleurs, lui rendent d’immenses services sous le rapport de l’exécution; car on peut considérer comme insurmontable la difficulté qu’il y aurait à juxtaposer, même mécaniquement, les quatre couleurs de l’échantillon n° 19, de manière qu’elles s’encadrassent toutes dans les filets blancs sans le plus léger déplacement. Ils diminuent, déplus , les dépenses, de gravure, puisqu’au lieu de 4 rouleaux gravés il n’en faut plus que 3, dont l’un , celui qui est destiné à l’impression de la bande transversale unie, est d’une exécution extrêmement facile.
- Pour qu’une couleur réponde à toutes les exigences de la fabrication et soit aussi avantageuse sous le point de vue de l’économie que sous celui de l’exécution , il faut qu’on puisse :
- 1° L’imprimer et la fixer sur une étoffe, et avec elle produire à volonté .
- Soit une figure sur un fond blanc ,
- Soit un fond couvert avec une figure blanche réservée par la gravure ;
- 2° La fixer uniformément et à volonté ou en entraver la fixation sur certains points, c’est-à-dire, produire avec elle des impressions réserves , ou bien, lorsque le tissu en est imprimé uniformément, y réaliser des impressions enlevages;
- 3° L’imprimer comme réserve sous un fond couvert quelconque ;
- 4° L’imprimer comme enlevage sur un fond quelconque;
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- 222 DK LA FABRICATION EN GENERAL.
- 5" Enfin, la convertir en une nuanee plus claire ou plus foncée, ou même en une autre nuance.
- Voilà, outre la vivacité et la solidité, quelles sont les qualités essentielles que le fabricant recherche dans les couleurs dont il fait usage; mais , il faut le dire, un très petit nombre des matières colorantes qui nous sont connues peuvent satisfaire à toutes ces conditions.
- Nous terminerons ces préliminaires en disant un mot de la nomenclature des étoffes imprimées.
- De tout temps on a consacré aux étoffes imprimées des noms spécifiques en relation avec les différences plus ou moins tranchées qu’elles présentent ; mais ces dénominations n’étant ordinairement fondées sur aucun principe scientifique ou de fabrication, ne sont, pour la plupart, qu’arbitraires et vides de sens. Ainsi on donnait le nom
- De calanca aux toiles sur lesquelles sont imprimés des dessins perses composés de noir, de violet, de 3 rouges, de bleu, de jaune et de vert, et quand une ou deux de ces dernières nuances manquaient, ce n’était plus que des mi-calanca;
- Y)'indienne ordinaire, aux étoffes imprimées de rouge et de noir, ou seulement de l’une ou de l’autre de ces couleurs ;
- De surate, aux étoffes imprimées de rouge ou de violet, ou de ces deux couleurs réunies ;
- Oepatenace, aux tissus sur lesquels le rouge était accompagné de bleu et de jaune;
- De Camay eux, aux étoffes sur lesquelles sont produits, à l’aide d'une gravure appropriée, des effets de triple nuance avec du rouge, du violet et du bleu ;
- De frangipane, à celles qui sont rayées de diverses couleurs ;
- De péruvienne , à des étoffes plus spécialement destinées à l’usage des hommes, où se trouvent imprimés de petits dessins à deux ou trois couleurs, dans lesquels le noir domine.
- Enfin, on a eu les genres meubles et mouchoirs , et befm-
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- PRÉLIM. DK LIMPRESS. (CLASSIFICATION DKS GENRES). 22.T
- coup d’autres dont il n’y a aucun intérêt à rappeler les noms.
- Si de toutes ces dénominations on n’a, pour ainsi dire, conservé que les deux dernières, et encore comme noms spécifiques, c’est qu’à mesure que la fabrication s’est éclairée , on leur en a substitué d’autres basés sur la science et qui expriment du moins une idée.
- Cldssijicafion.
- La classification des étoffes imprimées peut être envisagée sous deux points de vue : I. sous celui de l’exécution de la fabrication proprement dite ; II. sous celui de la forme qu’affectent les couleurs qui y sont appliquées.
- § /|88. I. Sm/s le jjoint de me de la fabrication , toutes les étoffes imprimées se divisent en deux classes, comprenant, l’une les genres simples, l’autre les genres composés.
- Les genres simples se subdivisent en deux :
- A. Le genre fond blanc, dans lequel rentrent toutes les étoffes blanches sur lesquelles est imprimé un dessin composé d’un nombre plus ou moins considérable de couleurs ; une fleur, un bouquet, etc. Ce genre lui-même se subdivise à son tour, soit d’après la nature des couleurs qu’on fait arriver sur la toile , et dont les unes n’y sont combinées que par teinture et les autres par application et à des conditions diverses, soit d’après le nombre et la fixation des nuances qui sont le produit, tantôt d’une seule et même matière coloranfe, de la garance, par exemple, tantôt de plusieurs. Ainsi l’on a les genres :
- l# Fond blanc garance / Fond blanc garancé simple.
- nu teint. ( Fond blanc garancé à double ou triple nuance.
- f Couleur d'application solide.
- 2° Fond blanc non ) Couleur d'application fixée à la vapeur.
- garancé. . „ .. .. [fixée mécaniquement,
- f Couleur d application )
- V ^ non fixee.
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- 224
- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- 3° La combinaison des deux genres ci-dessus constituant le genre Fond blanc enluminé, “ ' blanc, enluminage solide.
- vapeur.
- d’application.
- qui
- se divise en
- B. Le genre fond couvert avec dessins blancs, qui se sub-’ divise en :
- \o pond couvert avec dessin blanc réservé par la gravure.
- 2° Fond couvert avec dessin blanc réservé par une impression faite sur le tissu avant l’application du mordant ou de la couleur sur l’étoffe.
- 3° Fond couvert avec dessin blanc obtenu par une impression faite sur une étoffe mordancée.
- 4° Fond couvert, dessin blanc enlevé au moyen d’une altération qu’on fait subir à la couleur du fond par l'impression d’une substance chimique.
- Les genres composés ou ceux qui résultent de la combinaison des genres A, B, ci-dessus, se subdivisent en :
- C. Les fonds blancs A1 A2 A3, transformés en fonds ou mi-fonds couverts enluminés, fabrication qui peut avoir lieu de trois manières, savoir :
- La fabrication de A étant achevée ,
- Ou l’on applique sur toutes les parties qui doivent être respectées par la couleur du fond, une substance qui fait réserve sous cette couleur, et l’on procède à la teinture de ce fond ;
- Ou l’on rentre la couleur du fond au moyen d’une gravure dans laquelle le dessin fond blanc est naturellement conservé ;
- Ou l’on passe directement dans un bain de teinture et l’on obtient des couleurs complexes par suite de la superposition de la couleur du fond sur celle de A.
- D. Fonds couverts avec impression d’un dessin genre fond blanc. Dans ce genre on imprime une couleur foncée sur un fond clair, du noir, par exemple, sur un fond rose ou sur un fond bleu, comme il le serait sur un fond blanc.
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- PRKUM. DF. L’IMPRESS. (CLASSIFICATION' DES GENRES). 2*25
- E. Fonds couverts enluminés. La fabrication de ce genre se compose :
- 1° De celle d’un des genres B> B1. B1, Bî.
- 2° De celle d’un des genres A', A2, A'.
- Ainsi, dans un des fonds couverts B on rentre toutes les couleurs d’un dessin fond blanc A ou A' (noir enluminé, gros bleu enluminé).
- F. Mi-fonds ou fonds couverts avec dessin genre fond blanc imprimé en réserve. Dans ce genre, les mordants sont imprimés comme réserves sous le fond et teints lorsque celui-ci est achevé.
- ( l'oyez genre lapis. )
- U. Mi-fonds ou fonds couverts avec dessin genre fond blanc enlevé sur le fond. Dans ce genre, lorsque le fond est teint, on y imprime défe couleurs ou des mordants enlevages. (Yoyez lapis enlevés, rouge turc enluminé.)
- H. Enfin, comme genres qui rentrent dans l’une ou l’autre des fabrications précédentes, nous avons les genres conversions.
- Telles sont les divisions fondamentales qu’on peut, ce nous semble, établir, en ayant égard aux opérations de la fabrication. Il est d’autres sous-divisions que nous ferons connaître à mesure que l’occasion s’en présentera.
- § bS9. II. D’après les formes. Au premier abord, cette classification paraît tout-à-fait indépendante de la première ; toutefois un examen attentif de la matière fait bientôt saisir entre elles un certain rapport, car il est difficile de discuter l’exécution d’un dessin en laissant complètement de côté les procédés de fabrication.
- M. D. Dollfus-Ausset, qui a fait une étude toute spéciale de la classification des formes, a bien voulu nous fournir, sur ce point, quelques matériaux qui sont la base des développements qu’on va lire.
- Le problème que cet habile fabricant s’est posé est celui-ci : Trouver les règles au moyen desquelles on pourra toujours
- J5
- h.
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- 226
- DE LA FABRICATION EN GÉNÉRAL.
- classer un dessin à l’aide d’une formule très simple, et le dé-finir tant par les couleurs dont il se compose que par la nature des formes qu’affectent ces couleurs et la distribution de ces formes sur l’étoffe.
- Classification des couleurs. Sa classification des couleurs est celle qu’adoptent tous les peintres , avec cette seule différence qu’il donne à chacune d’elles, pour éviter les longueurs, les répétitions et les équivoques,, un signe à l’aide duquel une nuance est définie.
- Il reconnaît trois couleurs primitives :
- / R1 Rouge foncé. — Ponceau. — Gros rouy$
- i (fin rouge), j R2 Rouge cerise (2e rouge). V RH Rose.
- J1 Bouton d’or.
- ;J2 Immortelle.
- Le rouge =z R , qui se sous-divise en....................
- Le jaune =zJ, qui se sous-divise en.....................
- 'J3 Paille.
- / B‘ Bleu de France. — Gros bleu. | B1 Outre-mer. —• Bleu moyen. \B! Bleu céleste.
- Le bleu = B , qui se sous-divise en.....................
- Ces couleurs, combinées ensemble par deux ou par trois, donnent naissance à des couleurs binaires ou ternaires, qui sont ou pures, c’est-à-dire en accord parfait, ou mixtes, lorsque, cet accord n’existant plus, l’une des nuances prédomine.
- Couleurs binaires pures.
- R -j- J O ou Y Orange, ) qui se sous-divise en . . j
- . 0' Orange foncé.
- I 0 Orange moyen.
- O1 Orange clair. — Nankin.
- R + B
- L ou le Lilas qui se sous-divise en .
- / Ll Violet évêqub. — Lilas foncé. {L2 Lilas moyen.
- \L3 Lilas clair. — Hortensia
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- PRÉLIM. DE L1MPRESS. j ÇLASSIFIC4TION DES GENRES). 227
- J 4~ B =3 V ou le Vert qui se sous-divise en .
- V1 Gros yert.—>Vert—pré.
- V» Vert moyen. — Vert de Schéele. U* Vert clair. — Vert d’eau.
- ('ailleurs binaires mixtes.
- Ce sont les mêmes couleurs que les précédentes, mais avec excès de l’une ou de l’autre des couleurs élémentaires. On les représente par les mêmes lettres majuscules en faisant suivre celles-ci de la minuscule qui indique l’élément qui prédomine.
- ür =3 L’Orange rougeâtre , dans lequel domine le rouge.
- Oj — L’Orangé jaunâtre , — — le jaune.
- Lr zzz Le Lilas rougeâtre — — le rouge.
- Lb =3 Le Lilas bleuâtre, — — le bleu.
- Vj = Le Vert jaunâtre , — — le bleu.
- Vb = Le Vert bleuâtre, — — le bleu
- Couleurs ternaires pures.
- ! N1 Noir. — Noir noir. — Noir bleu. — R-J-J-f-BrrNoule Noir, ) Noir mat. — Noir brillant. qui se sous-divise en . . j N' Gris de fer.
- \ N! Gris perlé.
- Couleurs ternaires mixtes.
- V3 R = G ou le Grenat,|
- qui se sous-divise en .
- G' Puce ou Grenat foncé. Grenat moyen.
- ( G3 Grenat clair ou Tabac.
- Suivant que dans cette couleur ternaine on fait un peu varier le jaune ou le bleu, on a les nuances raisin de Corinthe , mordoré, etc.
- Lb -j- J = Bz ou le Bronze,( Bz< Bronze. combinaison du Lilas le 1 D , n Bleu et le Jaune, qui sei Bz; 0uïf' |Qus-di\ise en...........ré$épa.
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- 228
- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- Or B = Bn ou le Brun, / Bnl Marron.—Brun.—Solitaire.—Bistre combinaison de Y Orange) Bnî Boig rougeâtre avec le Bleu , j
- qui se sous-divise en . .[^ Noisette. — Pierre, etc.
- Des formes. M. D. Dollfus range en cinq groupes les formes sous lesquelles les couleurs sont déposées sur les tissus :
- Le premier, F>, comprendsPois. — OEil de perdrix. — Lentilles_____
- les formes simples . . .1 Ronds.—Ovales.—Picots.—Traits, etc.
- (a. Fleurs naturelles: OEillet, Rose, Jasmin, Iris, etc.
- mes iieurs qui se suuui- b. Fleurs de fantaisie. visent en..............le. Fleurs genre cachemire ou dans lesquel-
- les les contours sont en ligne droite.
- Le troisième, F-!, les for- Classiques,
- mes ornements, qui se j Gothiques, Égyptiennes subdivisent en.........\Mixtes et renaissance.
- Le quatrième, F4, à l’ex-/Les toiles d’araignées, les cellules des
- abeilles, les nids de guêpes, les diverses structures des corps. — Marbre.— Agate. — Granit. — Leurs formes cristallines, etc.
- Enfin le cinquième , F5, toutes les formes de fantaisie , ou celles dont on ne retrouve pas de types dans la nature.
- S’il y a des dessins qui ne représentent qu’une seule de ces formes, il y en a d’autres qui ën offrent un assemblage plus ou moins compliqué. Ces derniers sont dits complexes, et la réunion de leurs formules respectives en donne la composition.
- § Z|90. Disposition des formes sur les étoffes. Les formes dont se compose le sujet d’un dessin ne doivent pas être distribuées au hasard sur les étoffes ; il importe qu’il existe entre elles une harmonie de position tout comme il en existe une dans l’assemblage des lignes qui les constituent et des couleurs qui les revêtent. M. D. Dollfus prétend qu’en étudiant attentivement
- ceptiondes fleurs, toutesl les formes des corps de J la nature qu’on appelle/ types, comme...........\
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-
-
- PRÉLIM. DE LIMPRESS. (CLASSIFICATION DES GENRES). 229
- les effets d’un dessin (assemblage de formes), on en découvre quatre ordres différents :
- Les détachés,
- Les rayures ,
- Les carreaux,
- Les ramages.
- Nous représentons, par D*, D% D5, D‘, ces quatre ordres d’effets, et nous substituons, dans les figures ci -après, des points ou des traits aux formes qui pourraient être des fleurs, des ornements différemment colorés.
- D* se subdivise en :
- a. Détachés régulièrement (fig. 42j.
- • • • •
- • • •
- • • • •
- • • O
- • o • •
- • • •
- b. Détachés irrégulièrement (fig. 43)
- • •
- • •
- • • •
- • •
- • •
- • • •
- • • •
- • •
- • f f
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-
-
- T>È LA fAfflUCATÎOÿ EN GÉNÉRAL.
- c. Détachés régulièrement espacé? (fig. 44).
- » • i
- »
- e. Détachés irrégulièrement espacés (fig. 45).
- • •
- d. Détachés régulièrement serrés f. Détachés irrégulièrement (fig. 46). (fig. 47).
- • • • •
- • • • • • • • •
- 0 0 0 0 #•00 0 0 0 0 0 0 0 0 •000 0 0 0 0
- 0 0 0
- 000000 0 0 0 0 0 0 0 0 • • 0 0
- • ••/.*••
- 0 0 0 0 0 0
- 0 0 * • 0 0 0 0 0
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- PRÉLIM. DE t/IMPRESS. (CLASSIFICATION DES GENRES). 231 D* se subdivise en :
- a. Rayures droites ou longitudinales (lig. 18).
- b. Rayures transversales ( fig 49).
- ••••••••*
- c. Rayures diagonales ( lig. 50 ).
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- d. Rayures ondulées (fig. 51 )
- e. Rayures zigzags ( lig. 5i)
- f. Rayures Pékin, dans lesquelles de larges bandes colorées son séparées par des bandes blanches de même dimension (fig. 53).
- • 00 •
- 0 0 0
- 9 9 9 9
- O O O
- 9 9 9
- 9 9 9 9
- 8®fll
- • • •
- 0 0 0 0
- 0 0 0
- •-0-0 •
- 0 0-0
- 0 0 0 0
- 0 0 0 0
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- prélim. de l’impress. (CLASSIFICATION DES GENRES). 233
- g. Rayures écossaises. dans lesquelles une large bande est toujours accompagnée d'une bande plus petite (fig. oi ).
- h. Rayures composées (fig. 55)
- Ds, qui est le croisement des dessins rayures, se subdivise
- a. Carreaux réguliers ( fig. 36).
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-
-
- DE LA FABRICATION EN GENERAI
- b. Carreaux damiers ffig. 57 J.
- • • • » • a
- V*V
- • *t,É k
- • • a ©
- r. Carreaux losanges ( fia. 58
- d. Carreaux ondulés (fig. 59).
- • •••
- >•
- / :•
- ••• •••••
- ••••.
- • •
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- prÉlim. de l’impéesS. (classification- des genres). Ê85 e. Carreaux zigzags (fig. 60
- •••
- •% •* •*• •* iL
- •• v •• ?• O
- / Carreaux |>iîkiil ( lig. 61 ).
- • •
- y/.y.y.v
- v.v.*
- • • • • • • • • • • •••••••
- • • • •
- ••• ViV
- y •••••••
- • • • • • • • • • • • • • ••••••
- • •••••••••
- (j. Carreaux écossala^i^iT^r4
- • •
- • • • ••••••••
- • ••••••••••
- •a* • •••••••
- • • •••••••
- • • • • •••••••
- • O • â • • • 9
- • • m
- • • o • •
- • • •••••99 •• ,• • • • • • 6 • •
- • • • ••••• 9 • •
- • • • ••••••••
- _ • • • 9 a
- • • : • • •
- • • . • • •
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- 236
- DE LA FABRICATION EN GÉNÉRAL.
- D* se subdivise en :
- a. Ramage simple (fig. 63).
- •••••
- b. Ramage vermicelle (fig. 64).
- • ••
- ••••
- 9 ••
- • A ®
- :oc\S
- • 4»—^
- v. Ramage guirlande, dont nous ne reproduisons pas ici la ligure.
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- PRELIM. DE L'iMPRESS. (CLASSIFICATION DE9 GENRES. 237
- Ces modes de distribution se combinent-ils entre eux? on a des effets complexes et on obtient :
- Des Rayures détachées (fig. 63).
- • t é •
- i
- :
- Des Carreaux détachés ( fig. 66).
- ••
- • •
- • ' •
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- DE LA FABRICATION EN GÉNÉRAL.
- 238
- Des Ramages détachés (fig. 67).
- ••••••
- • •
- ••••*<
- Des .Rayures carreaux (fig. 68 ).
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- PRÉLIM. DE l'iMPRESS. (CLASSIFICATION DES GENRES). 2â9
- Des Rayurks ramages (fig. 69).
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- C’est avoir fait un grand pas, sans doute, et rendu un important service que d’avoir donné une classification à l’aide de laquelle toute personne, même étrangère à l’art du .dessinateur, peut se représenter la nature d’un dessin sans l’avoir sous les
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- 540 DE LA FABRICATION EN GÉNÉRAL.
- yeux. Qu’on décompose, en effet, la formuleD'a, F24, R J B V, d’après les règles rigoureuses que nous avons exposées, on trouve que le sujet est une fleur détachée qui a pour coloris du rouge, du jaune, du bleu et du vert. (Voyez genre gros bleu enluminé.) Toutefois ces distinctions ne reposent que sur les bases empiriques qu’ont toujours suivies les dessinateurs d’indiennes, et il est à regretter que M. D. Dollfus n’ait pas puisé de préférence les éléments de son travail dans les applications de la géométrie, car alors sa méthode n’aurait pas seulement créé un langage pour les dessinateurs, les coloristes, les fabricants , etc., elle aurait encore offert les plus grandes ressources aux premiers.
- Pourquoi, puisque toutes les figures sous lesquelles les corps se présentent à nos yeux se résument en lignes droites et courbes , ne pas rechercher quels sont les produits qui résultent do l’assemblage de ces lignes droites, employées d’abord isolément, puis combinées les unes avec les autres? Nous ne parlerons pas des effets qu’on peut obtenir de l’assemblage des lignes droites, selon qu’elles se coupent perpendiculairement, obliquement, sons tel ou tel angle ; ils sont trop bien connus; mais nous insisterons sur ceux que sont susceptibles de produire les lignes courbes.
- Supposons une série de cercles concentriques, 1, 2, 3, 4, 5, comme dans la fig. 71, tracés à une égale distance l’un de Fig. 74.
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- PRELIM. DE l/lMPRESS. (CLASSIFICATION DES GENRES). 2/jl
- l’autre et coupés par deux diamètres qui les partagent tous en l\ quarts de cercle ; en découpant tous ces quarts de cercle et en juxtaposant 2 quarts du cercle 5, et 2 autres autres quarts du cercle 1, on obtient l’ovale allongé fig. 72 ; en juxtaposant
- Fig. 72. Fig. 73.
- 2 quarts du cercle 5 et 2 quarts du cercle /j, on a l’ovale arrondi (fig. 73); enfin, en combinant les autres parties des cinq cercles découpés, on forme la fig. 7/i, ramage vermicelle. On pourrait, avec les mêmes quarts de cercle, produire beaucoup d’autres
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- 2h2 Î)E LA FABRICATION EN GENERAL.
- dessins, et il suffirait, pour en avoir un plus grand encore, de multiplier celui des cercles. Le dessinateur d’indiennes et même le fabricant devraient donc avoir dans leur cabinet un assortiment de cercles concentriques et de lignes droites coupées, les unes perpendiculairement à leur axe, les autres obliquement, mais d’après des degrés déterminés. Alors , une forme adoptée il n’y aurait plus, pour en trouver la distribution la plus favorable sur l’étoffe, qu’à procéder à la combinaison, soit des lignes droites entre elles, soit des lignes courbes, soit enfin des premières avec les secondes. Pour que ces bandes droites et courbes fussent d’un maniement plus facile, il conviendrait de les faire d’une substance peu sujette à se déformer ; en les noircissant d’un côté et en les blanchissant d’un autre, on pourrait les combiner dans le premier cas sur un fond blanc , dans le deuxième sur un fond noir ; et pour que les figures qui résulteraient de ces combinaisons ne se dérangeassent pas, on garnirait chaque pièce à ses extrémités de picots qui les fixeraient soit au papier, soit au tissu.
- DE LA GRAVURE.
- A91. L’art de graver sur bois remonte à la plus haute antiquité. On en doit la découverte au désir naturel à l’homme de transmettre à la postérité tout ce qui l’intéresse, et les immenses progrès à l’application qu’on en a faite à l’impression des tissus.
- Les Chinois, les Égyptiens et les Indiens, 'qui, de temps immémorial, représentent sur les tissus des dessins de différentes couleurs, n’ont jamais employé dans leurs opérations que le pinceau; on peut donc dire que l’application de la gravure à l’impression des tissus est une découverte moderne ; mais toutes les recherches faites jusqu’à ce jour pour découvrir dans quelle partie de l’Europe et par qui furent exécutées les premières impressions sont restées infructueuses.
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- GRAVURE F.N RfetlEU.
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- Ainsi que nous l’avons dit p. 213, la gravure se divise en gravure en relief, et en gravure en creux ou en taille-douce. La première se fait indifféremment sur bois ou sur métaux , la seconde sur métaux et sur pierre.
- De la gravure en relief.
- § 492. Dans le principe, la gravure en relief ne s’exécutait que sur le Itois ; avec le temps vinrent les perfectionnements, et l’on grava aussi en relief sur les métaux.
- Occupons-nous d’abord de la gravure sur bois, et, comme question préalable , de la nature du bois qu’elle exige et des précautions que réclame la préparation des planches.
- Les bois dont on se sert sont le buis et le houx, 1 ejioirier, le noyer, le tilleul.
- Comme le buis et le houx sont d’un prix élevé, difficiles à travailler , et ne se trouvent d’ailleurs jamais qu’en planches de -faibles dimensions, on leur préfère communément le poirier, à moins qu’il ne s’agisse d’impressions très délicates. Cependant, clans les impressions ordinaires et qui demandent de grandes planches, comme ce bois serait trop lourd, on se sert du noyer ou du tilleul, que leur pesanteur spécifique beaucoup moindre rend plus faciles à manier.
- Dans le choix du bois on doit avoir égard :
- 1° A son prix et à ses dimensions ;
- 2° A sa ténacité, d’où dépendent la finesse et la délicatesse de la gravure ;
- 3° A la manière dont il est impressionné par l'humidité, parce qu’un bois très sensible aux variations atmosphériques étant sujet à travailler, les planches qu’il fournit se voilant deviennent bientôt défectueuses ;
- 4° Aux genres d’impression que l’on veut produire, à la délicatesse et à la dimension des sujets.
- Quand on a choisi un bois convenable et qu’il a été suffisamment desséché par une exposition à l’air, on en débite
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- les billes en les sciant tantôt perpendiculairement à leur axe, de manière à utiliser toute la surface du tronc, et c’est ce que ron fait ordinairement pour le buis et le houx ; tantôt, au contraire, parallèlement à leur axe, pour les réduire en planches de 5 à 6 centimètres d’épaisseur , qu’on divise ensuite dans leur longueur, d’après la dimension du dessin, en ne conservant que les parties tout-à-fait saines. Les deux surfaces de chaque planche sont alors aplanies avec le plus grand soin, mais surtout celle que l’on destine à la gravure, et dont la fibre doit toujours avoir le moins de défauts et présenter le plus d’homogénéité.
- Comme les planches gravées se voilent ordinairement au contact des liquides quand elles sont trop minces, on leur donne autant d’épaisseur que possible. Dans les pays où le poirier est rare, on supplée à cette condition par un artifice qui, à l’avantage d’une économie de moitié au moins, joint celui de rendre les planches plus propres à résister à l’influence des corps qui en mettent les fibres en mouvement. On réduit l’épaisseur des planches de poirier à la moitié, et même au tiers de ce quelle devrait être ; puis, après les avoir aplanies , on fixe à la colle-forte, à la face qui n’est pas destinée à recevoir la gravure, une planche de chêne de la même dimension et également plane, en ayant soin de lui donner une position telle que sa fibre soit perpendiculaire à celle du poirier. A cette planche de chêne on en colle une autre de sapin et de même dimension dans un sens tel que la fibre, perpendiculaire à celle de la planche à laquelle elle adhère, est alors parallèle à celle de la palanche du poirier. Mais si ces planches, ainsi accouplées , sont plus légères que des planches de poirier, elles présentent l’inconvénient de ne pouvoir être redressées aussi facilement quand elles sont une fois déformées , car il suffit, pour ramener à son état primitif une planche de poirier qui a travaillé, de donner à propos un trait de scie sur celle de ses surfaces qui s’est voilée , de chauffer l’autre après l’avoir légèrement humectée , et quand elle est redressée d’y clouer, pour
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- la maintenir dans cet état, de petites traverses en fer ou en bois.
- Lorsqu’on s’est ainsi procuré les planches nécessaires à la gravure et que les surfaces, qui doivent recevoir cette gravure ènt été aplanies , on découpe , sur les surfaces opposées , deux cavités ou poignées qui permettent à l’ouvrier de les saisir et de les manier ; on y perce , en outre , du même côté , un trou d’environ 1 centim. de profondeur et de diamètre, destiné à les fixer sur l’établi du graveur ; ces planches passent alors entre les mains du metieur sur bois, qui est chargé de tracer, sur chacune d’elles, les traits de la couleur qu’elle devra imprimer, en observant la plus rigoureuse exactitude pour les repères, afin qu’il y ait à la fois continuité dans l’impression et encadrement parfait des rentrures.
- Le metteur sur bois commence par tracer dans les directions voulues, pour quelles se coupent perpendiculairement, des lignes parallèles également distantes l’une de l’autre, qui lui permettent d’assigner à chaque partie du dessin la place qui lui convient; alors, au moyen d’un papier végétal sur lequel on l’a calqué et en s’aidant d’une pointe, il transporte le dessin sur la planche et en colore ensuite les traits en rouge pour les rendre plus visibles
- On a fait plusieurs essais dans le but de diminuer les frais qu’occasionne cette mise en train de la gravure sur bois ; mais jusqu’ici ils n’ont réussi que pour les impressions à une couleur, qu’on peut relever et transporter immédiatement sur bois par des moyens plus ou moins analogues à ceux qui sont usités pour le transport des impressions lithographiques sur la faïence et la porcelaine.
- Une fois les parties du dessin tracées sur la planche, le graveur se met à l’œuvre.
- Au moyen d’une cheville en fer fixée sur un établi solidement construit et qui s’adapte au trou qu’on a percé à dessein dans la planche, celle-ci est maintenue en respect, tout en conservant
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- la faculté de tourner sur elle-même. L’ouvrier s’occupe alors de dégrossir le bois , puis découpe et vide son dessin en réservant popr la fin les parties les plus délicates. Les outils qu’il emploie à cet effet sont :
- 1° 2 ou 3 grosses gouges pour creuser et vider les planches;
- 2° 12 ou 15 plus petites , d’une dimension qui monte par de-grés, depuis une fraction de millimètre jusqu’à 7 à 8 millim., pour découper les plus petits contours. Ces gouges s’enfoncent dans le bois soit avec la main seulement, soit à l’aide d’un petit marteau dont on frappe avec ménagement;
- 3° Unepointe ou lame d’acier, assez semblable à une lancette ou à un ressort de montre auquel on aurait donné cette forme, et qui se trouve solidement fixé à un manche en bois par une forte virole en cuivre. C’est avec cette lame, qu’il a soin de ! choisir de la meilleure trempe et aussi tranchante que possible, ; que le graveur doit tracer d’une main vigoureuse les contours du dessin, sans ébranler la fibre du bois et sans y produire de déchirements , s’il ne veut manquer son but ;
- 4U Des bout-Rivant de toutes dimensions pour vider la gravure lorsque les contours en ont été tracés, Le bout-avant est un petit instrument recourbé comme une truelle, qui coupe à plat;
- 5n Enfin un drille, armé d’un foret et mû par un archet, pour percer des trous,
- Telle est en abrégé la manière dont on grave sur bois ; mais on conçoit facilement qu’un tel procédé ne peut fournir, quelles que soient l’adresse du graveur et la qualité du bois, des traits aussi déliés que les fils d’une dentelle ni des picots aussi fins que la pointe d’une épingle. Il est évident, d’ailleurs , qu alors même que le talent et la patience de l’ouvrier viendraient à bout de pareilles difficultés, ce tour de force resterait sans résultat, les premiers coups de planche devant faire tomber filets et picots. Mais si la gravure s’est perfectionnée avec les besoins de l’impression , on n’en est pas moins forcé d’avouer
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- que nos ancêtres, qui n’avaient pas comme nous la ressource du rouleau à imprimer, l’avaient poussée aussi loin qu’elle pouvait aller. Du reste, il est juste d’ajouter qu’une gravure qui au-trefois se payait 200 francs n’est pas estimée aujourd’hui plus de 20 fr.
- Le premier perfectionnement apporté à la gravure en relief sur bois a été la substitution des picots en métal aux picots en bois, qui ne gagnent jamais sous le rapport de la finesse qu’en perdant sous celui de la solidité. Ces picots en métal sont des" fils de cuivre rouge ou jaune, d’une longueur égale à deux fois la profondeur de la gravure, et amincis en pointe à l’une de leurs extrémités. Le graveur, muni d’une petite matrice dans laquelle s’enchâsse le picot, l’enfonce dans le bois jusqu’à la moitié de sa longueur, au moyen d’un marteau, en ayant soin que l’extrémité qui fait saillie ne soit jamais au-dessous du niveau de la gravure, mais sensiblement à la même hauteur. L’heureux parti que l’on a tiré de l’emploi des picots a bientôt conduit le fabricant à faire laminer des lames de cuivre jaune de différentes épaisseurs , à les découper et à les enfoncer dans le bois , en leur donnant la form« d’un ovale, d’un rojid, d’un contour, d’une feuille, d’une arabesque, etc. On est arrivé ainsi à produire sur bois des lignes continues ou brisées aussi déliées que possible, et qui résistent à tous les chocs de l’impression sans se déranger. Dans ces derniers temps on est allé plus loin ; au moyen de filières de laminoirs et de machines à gaufrer, on est parvenu à donner aux fils et aux lames de cuivre des formes tellement variées, qu’il suffit de les implanter dans le bois, convenablement associés , pour graver un dessin quelconque. On ne s’arrêta pas à cette première amélioration. On avait remarqué que, lorsqu’on imprimait des parties massives, les contours n’en étaient pas nets , qu’il y avait des bavures, que la couleur n’était pas répartie uniformément sur l'étoffe, soit que le bois ne s’en chargeât pas, soit qu’il ne la cédât pas également. Pour remédier
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- à ces inconvénients, on implanta dans le bois des lames de cuivre disposées de manière à former le contour de ces masses, et l’on en remplit le vide de feutre ou de vieux chapeau , d’où est venu l’expression de planches chapeaudèes. Quelque temps après cette disposition dispendieuse, on en a substitué une plus simple : la planche une fois gravée, on en imprégna les parties destinées à transporter sur l’étoffe des masses de couleurs d’huile de lin rendue siccative et bien épaissie , sur laquelle on répand, au moment où elle va se solidifier, de la tontisse (du, vet qui se détache des étoffes de laine passées à la tondeuse), qu’on tamponne avec un chiffon ; on laisse sécher et l’on obtient une planche qui rend d’aussi bons services que les planches chapeaudèes.
- Nous donnons ici, avec la composition d’un enduit pour le freutrage des planches, la manière de l’appliquer.
- Composition de l’enduit :
- On broie ensemble, avec le plus grand soin, sur une pierre à broyer :
- '1 kil. huile de lin siccative.
- I kil. carbonate plombique
- 0k,160 oxide plombique.
- 0k,062 essence de térébenthine.
- Répandant alors cette composition sur un châssis, ou y applique la planche à feutrer, que l’on retourne ensuite et qu’on saupoudre de tontisse à l’aide d’un tamis; puis, lorsqu’on a fait pénétrer doucement la tontisse dans le mastic en se servant d’un tampon, on enduit de nouveau la planche de mastic et on la presse légèrement sur une feuille de papier recouverte d’une légère couche de ce duvet. Quand le tout est desséché , ce quia lieu ordinairement au bout de quinze jours, on enlève, au moyen d’une brosse, la tontisse qui n’adhère point à la planche, et l’on détache avec une pointe en métal toutes les parties de la gravure qui pourraient avoir été engorgées.
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- En 1827, nous avons vu des planches gravées en relief par une méthode différente et plus avantageuse, en ce que le sujet pouvait toujours en être détaché en tout ou en partie et reporté sur une autre planche. Au lieu d’implanter les formes en cuivre dans le bois, on les soudait à l’étain sur une plaque en cuivre, fixée par des vis à une planche en bois ordinaire, et qu’on faisait passer sur une meule horizontale pour en rendre la surface gravée parfaitement plane. Quand un dessin ainsi établi avait cessé de travailler, on en dessoudait les formes , dont on se servait, ainsi, que de la plaque, pour de nouveaux sujets. Nous ignorons si ce mode de gravure, imaginé par un fabricant fort distingué, M. Lefèvre , qui habitait alors Chantilly, est ou non resté à l’état d’essai.
- Depuis la préparation des planches chapeaudées , la gravure en relief était restée stationnaire; on imprimait au rouleau tout ce que les sujets représentaient de plus délicat ; on n’avait donc aucun motif pour sacrifier les avantages que présente ce puissant moyen de fabrication à la gravure et à l’impression en relief, beaucoup plus dispendieuses et plus lentes; mais, il y a une douzaine d’années, une machine fut inventée, à l’aide de laquelle on réalisa mécaniquement toutes les impressions que , jusque là, la main seule de l’homme avait pu produire : nous voulons parler de \nperrotine. Comprenant toutes les ressources qu’offrait cette précieuse machine, quelques fabricants s’empressèrent de l’adopter, et une véritable révolution ne tarda pas à s’opérer dans la gravure en relief; car laperrotine, devant donner des coups de planche qui couvrissent la pièce dans toute sa longueur, entraînait à des frais de gravure tels, que beaucoup de chefs d’établjssement durent renoncer à l’employer, et, pressés par la nécessité, donnèrent suite à des tentatives faites depuis longtemps pour remplacer la gravure en bois par une gravure en métal, le cliché.
- Hoffmann, de Strasbourg, dont le travail manuscrit est déposé à la bibliothèque de cette ville, a été le premier à comprendre
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- toute l’importance qu’il y avait à relever des empreintes 5 mais, de même que le plus grand nombre des hommes de génie, et sans doute aussi à cause des événements politiques de l’époque à laquelle il vivait, il mourut, apres avoir épuisé sa fortune dans les recherches qu’il avait entreprises à ce sujet, sans avoir retiré aucun fruit de ses efforts et de ses veilles.
- Ses travaux datent de 1783, et en 1792 il sollicita un brevet d’invention.
- Comme il avait observé la lenteur de tout alliage fusible, surtout de l’étain et du bismuth, à se solidifier lorsqu’il a été liquéfié par la chaleur, il eut l’idée de fondre de cet alliage sur une plaque en fer et d’y appliquer, au moment où il allait se solidifier, une autre plaque gravée en creux, dans les cavités de laquelle , moyennant une pression convenable, il forçait cet alliage à pénétrer pour reproduire en relief le même sujet. Pour obtenir, par le même procédé, une gravure en creux, il dessinait son sujet sur une planche en cuivre avec de l’ocre épaissie à l’argile, puis , fondant l’alliage au degré où il est possible d’y plonger une carte sans la jaunir, il y appliquait cette plaque, et par la pression reproduisait en creux dans la plaque d’alliage fusible tous les traits dessinés avec l’ocre. Il assure s’être procuré ainsi des plaques métalliques qui lui donnèrent de belles épreuves en taille-douce.
- Plus tard, s’étant convaincu qu’il suffisait d’un petit nombre de formes répétées et différemment combinées pour produire les nombreux dessins, fleurs ou ornements adoptés dans l’impression des tissus, il pensa que le nombre de ces formes n’était pas tellement considérable qu’on ne pût s’en procurer des collections semblables à celles des caractères d’imprimerie, à l’aide desquelles on fût à même d’imprimer une grande variété de dessins , comme avec les 24 lettres de l’alphabet on imprime tous les mots. Il se procura donc ces formes primitives en cuivre et en bois, puis, formant une pâte terreuse d’un mélange d’argile et de plâtre, ramollie par un peu de gélatine, de fécule et de sirop de
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- gomme, il l’étendait eu lame sur une plaque de fonte, y imprimait le dessin voulu au -moyen de ses formes primitives pu secondaires, et obtenait de la sorte une matrice gravée ei. creux, dans laquelle il coulait, lorsqu’elle était bien sèche, son alliage de bismuth, d’étain et de plomb. Il parvint à graver ainsi des dessins mouchoirs qui pouvaient s’imprimer d’un seul coup.
- Ces résultats étaient assurément décisifs, et cependant on est resté longtemps sans pn faire aucune application en grand. Les fabricants anglais ont été les premiers à en tirer parti. En 1827, M. Fries, de Guebwiller, rapporta de la maison Dufay, de Dublin, des cachets en alliage fusible, qui sont déposés à la Société industrielle de Mulhouse5 mais, soit que le procédé n’ait pas été bien connu, soit pour d’autres raisons, ce n’est que dans ces dernières années qu’on s’en est procuré, et qu’on a porté la gravure en relief métallique au degré de perfection qu’elle a atteint sous le rapport de l’exécution et sous celui du prix de revient. Les moyens qu’on emploie aujourd’hui pour ce genre de gravure sont de deux espèces et diffèrent du procédé d’Hoffmann : on a des clichés en plâtre et des clichés en bois.
- § Il93. Clichés en plâtre. La fabrication de ces clichés se divise en 3 parties distinctes : i° la gravure proprement dite du cachet en bois, qui est toujours en relief ; 2° le moulage en plâtre, qui a pour but de reproduire en creux le sujet de cette gravure 5 3° lç clichage ou la reproduction en relief sur une planche métallique de ce même sujet.
- 1° Gravuredu cachet. Nous ne pouvons que renvoyer, ppur ce qui concerne cette opération, à ce que nous avons déjà ditp. 2/|3-2Zi7 ; mais nous devons parler de la préparation qu’il faut faire subir à la planche en bois, une fois qu’elle a été gravée , avant d y couler le plâtre, pour quelle ne se voile pas et que le plâtre n y reste pas adhérent. On fait fondre, à une température assez élevée, 2 parties d'huile et 1 partie de suif, et 1 on imprègne d a-bord de ce mélange, au moyen d un pinceau, la surface de la gravure, avec la précaution d en imb.ber les plus petites cavités.
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- Après cette opération, on couvre toute la planche d’une couche bien chaude de ce corps gras, qu’on y laisse séjourner durant une demi-heure, pour qu’il en pénètre toutes les fibres, Ensuite, pour enlever la graisse qui n’a point été absorbée, après avoir promené sur la gravure un pinceau de poil de chèvre légèrement chauffé, on y coule doucement et sans interruption une eau faiblement ammoniacale, puis de l’eau pure, afin de faire disparaître l’alcali qui attaquerait trop profondément le corps gras. Dans ces divers traitements, il importe surtout de ne donner aucun accès à l’air dans les pores du bois, pour prévenir les défauts qui en résulteraient dans le cliché. Si, malgré toutes les précautions, on n’avait pas atteint ce but, le plus sûr serait de recommencer l’opération.
- 2° Moulage en plâtre. Le cachet gravé et huilé est alors enchâssé dans un cadre en bois qui l’entoure, et dont les côtés débordent la gravure d’environ 2 centimètres. On remplit d’eau cette gravure, en s’assurant qu’il n’y reste pas d’air, et l’on gâche du plâtre de statuaire , ni trop épais ni trop clair, qu’on coule par-dessus. Le plâtre, par sa pesanteur spécifique, tombe naturellement dans toutes les cavités de la gravure; mais, afin qu’il les remplisse exactement, et déplace ainsi tout l’air et toute l’eau qui pourraient donner lieu à des boursouflures, il faut, avant qu’il se soit solidifié, donner au cachet quelques légers coups de marteau.
- Lorsque le plâtre n’a pas été gâché trop clair, 20 minutes suffisent pour qu’il soit pris et refroidi ; on le sépare aussitôt du bois avec une lame mince, à l’aide de laquelle on produit, aux quatre coins du cachet, un effort suffisant pour détacher la matrice sans la briser ; celle-ci relevée, on en moule une seconde, puis une troisième, et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’on ait le nombre de moules dont on a besoin pour couler les cachets en alliage fusible. Quand l’opération du moulage est achevée ; on place les matrices, par !\ ou 6, dans des cadres ou espèces de lingotières en fer, en réservant à la partie supérieure l’espace
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- nécessaire pour que le métal puisse les recouvrir d’une couche de quelques millimètres d’épaisseur qui fera corps avec la gravure. Ces cadres sont alors exposés à l’étuve jusqu’à ce que le plâtre soit parfaitement desséché (cette dessiccation exige 3 heures au plus) et que l’alliage qu’on y coulera puisse être mis en contact avec lui sans en vaporiser l’eau de constitution. Le degré de dessiccation du plâtre doit être d’autant plus élevé et plus parfait qu’on est dans le cas d’y couler un alliage plus chaud. Lorsque ces moules sont bien desséchés et pendant qu’ils sont encore chauds, on procède à la troisième opération , le clichage.
- 3° Clichage. On s’occupe d’abord de la composition de l’alliage binaire, ternaire ou quaternaire : de plomb, d’étain, de bismuth et d’antimoine, composition qui varie selon la dureté que l’on veut donner à l’alliage, la fusibilité qu’il doit avoir pour être coulé, la résistance qu’il doit offrir aux couleurs corrosives qu’il est destiné à imprimer, enfin , le prix qu’on veut y mettre. Cette composition arrêtée, on place les métaux dans un creuset de Hesse, de plombagine, et même , au besoin , dans un creuset en fonte de fer, et on les chauffe au rouge pour les allier, en y ajoutant un peu de suif, pour réduire les oxides qui pourraient s’être formés durant la fusion, et dont le mélange donnerait de l’épaisseur à l’alliage et occasionnerait des crevasses dans la gravure. L’alliage bien brassé est coulé pur et chaud dans une lingotière, d’où on le retire pour le fondre de nouveau dans une grande cuillère en fer munie d’un bec. Quand il est arrivé au degré de chaleur voulu pour pénétrer facilement dans les creux de la gravure sans opérer la décomposition du plâtre, on le coule sous forme de jet continu et sans interruption , pour prévenir l’action du l’air et son influence oxidante, dans les cadres qui contiennent les matrices en plâtre.
- Lorsque le métal, coulé dans les matrices, est refroidi, on sort les plaques des cadres , et on les sépare les unes des autres au moyen d’un trait de scie qu’on a soin de donner, de ma-
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- nière à ne les voiler que le moins possible et à prévenir ainsi les difficultés qu’il y a toujours à les redresser. Dès qu’elles sont séparées, on enlève le plâtre qui est resté dans la gravure-on en fait disparaître les traces par des lavages à la brosse, et il ne reste plus qu’à planer et ajuster les cachets pour en faire des planches propres à l’impression.
- Pour peu qu’on réfléchisse aux opérations par lesquelles on arrive à transformer une gravure en bois eh une pièce semblable, on se convainc sans peine que dans le cachet en métal, une seule des surfaces, celle qui est gravée, peut être plane, à moins qu’elle n’ait été voilée à sa sortie des moules. Quant à la surface opposée, comme son épaisseur varie suivant le-retrait qu’a éprouvé le métal en passant de l’état liquide à l’état solide selon la dilatation qu’a subie la lingotière et le degré de température auquel l’alliage a été coulé, il convient de la planer aussi et de la ramener à la dimension nécessaire pour que tous les cachets, fixés sur une planche en bois, présentent une surface uniforme.
- Si, en vérifiant à l’aide d’une règle la surface gravée du cachet, on y découvre des inégalités, après l’avoir renversée sur une autre surface bien unie, on donne avec précaution , et employant un tampon, quelques coups de marteau sur le dos, et particulièrement sur les points où l’on remarque de la convexité ; et si l’opération du tamponnage a été bien faite, il ne-reste plus qu’à planer la surface opposée : à cet effet on dispose tous les cachets en deux rangées sur la machine à planer, en coulant sur les côtés , pour les consolider, un mastic formé de 3 parties de colophane et de 1 partie de cire. La quantité de ces deux substances variera suivant que le mastic aura été fondu un plus grand nombre de fois et qu’il sera devenu plus sec, suivant aussi la température à laquelle on opère ; mais toujours devra-t-il satisfaire aux conditions suivantes : être assez tenace pour rendre les cachets adhérents à la machine à planer, et cependant assez dur pour se réduire en poudre sous
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- la lame tranchante , afin de ne point s’opposer à son action en l’engorgeant.
- Quand les cachets ont été bien consolidés et que le mastic est bien sec, on met en mouvement la première guimbarde (varlope) ou outil dégrossisseur, en ayant soin de ne pas produire d’effets trop brusques pour ne pns ébranler les plaques et les disloquer. On réduit ensuite les cachets au degré d’épaisseur convenable à l’aide du rabot àplanerfpuis on les fixe, au moyen de vis ou de clous, sur des planches en bois de noyer, dont la surface doit être aussi bien plane. Si l’épaisseur des planches est peu importante pour les impressions à la main, il n’en est pas de même pour celles qui se font à la perrotine, car dans ce cas l’épaisseur de ces planches , étant déterminée par l’espace qui leur est réservé dans la machine, doit être réglée d’après celle du cachet.
- M. J. Schlumberger jeune, de Thann, à l’obligeance duquel nous devons les renseignements que nous donnons ici sur le stéréotypage en plâtre, a fait des essais sur les alliages les plus propres à l’impression. Voici quelques uns de ceux sur lesquels il a opéré :
- No. Plomb. Étain. Bismuth. Anti- moine. OBSERVATIONS.
- 1 » 9,5 0,5 » Dur et sonore.
- 2 32 30 8 » Fusil), à 136°, un peu tendre, très mnlléa.
- 3 22 24 8 » Fusible à 1 -46°, plus dur que le n° 2.
- 4 )) 8 2 » Assez fusible, très cassant et très dur.
- 5 16 24 8 » Fusible à 130°, très dur et très malléable.
- 6 » 9,5 )) 0,5 Assez dur, très malléable.
- 7 10 40 » 1 Très dur, très malléable, excellent , mais moins fusible. Très dur, très malléable.
- 8 )) 9,5 0,25 0,25
- 9 5 3 8 )) Très fusible, très bon, mais cher.
- 10 100 0,25 )) 20 Moins cassan t que les caractères d'imprim.
- Cet habile industriel, après avoir fait couler un cachet de chacun de ces alliages, a composé de ces divers cachets une
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- planche avec laquelle il a fait imprimer une des couleurs 1^ I plus corrosives qu’on applique sur le tissu, le noir d’applica, lion sur laine : il a observé que tous les alliages qui contien ncnt du plomb prennent une couleur rouge fortement cui vreuse ; que ceux d’antimoine sans plomb deviennent légèrement rouges ; que ceux d’antimoine et de bismuth ne rougissent pas, mais , bien que ne donnant pas lieu, comme les premiers à un dépôt de cuivre qui se détache de temps en temps de la gravure, n’en sont pas moins sensiblement attaqués , puisque les picots diminuent considérablement d’épaisseur et de hau- • teur. Enfin, dans ces expériences, les alliages de plomb, de bismuth et d'étain se sont toujours le mieux conservés, et celui quia offert le plus de résistance estlen0 9; mais son prix élevé, en raison de la grande quantité de bismuth qu’il renferme, fait qu’on lui préfère le n° 5, qui est infiniment moins cher et satisfait assez bien à tous les besoins de l’impression à la planche. On doit, du reste, faire varier la composition de ces alliages selon les couleurs que l’on imprime, tout en ayant égard au prix de revient, pour ne pas induire le fabricant dans des frais trop considérables.
- Bien que ce procédé de clichage offrît sur la gravure en bois d’énormes avantages, il n’était pas cependant sans inconvénients ; il' exigeait, en effet, des dépenses de gravure assez fortes ; il ne se prêtait que difficilement à l’exécution des dessins délicats, surtout quand la gravure demandait un certain pied, car on comprend la difficulté, d’une part, de faire pénétrer le plâtre à une certaine profondeur dans le bois, d’une autre, de l’en retirer une fois qu’il est pris sans l’endommager ; de plus, la consommation déplâtré et de combustible nécessaires devenait d’autant plus coûteuse qu’il faut autant de matrices qu’on veut produire de cachets métalliques..
- Après beaucoup .de tentatives isolées et infructueuses, des. [ fabricants, dont nous ne pouvons citer les noms, ont trouvé le moyen d’obtenir les gravures les plus délicates avec bute
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- l’économie désirable, en perfectionnant un joujou. Les enfants creusent souvent dans le bois, soit avec des outils tranchants, soit avec des pointes de fer chauffées, divers dessins dans les cavités desquels ils font ensuite couler du plomb fondu qui en affecte la forme : c’est de ce procédé qu’on fait usage aujourd’hui. On coupe , d’une certaine épaisseur et perpendiculairement à l’axe, un bois très tendre, du tilleul, par exemple ; on le dessèche fortement et jusqu’à ce qu’il commence à roussir, tant pour lui faire perdre la majeure partie de ses propriétés hygroscopiques que pour le rendre encore plus tendre, en sorte qu’il suffit du plus petit effort pour y faire pénétrer une lame ou une pointe métallique.
- Ensuite, pour empêcher ces blocs de se déformer, et pour que le dessin qu’on y grave n’éprouve aucune modification dans ses dimensions, on les perce sur un ou deux points, de part et d’autre, mais toujours perpendiculairement à l’axe, avec une tarière, et l’on remplit ces trous d’un alliage qui, faisant office de clous, fixe toutes les parties du bois et en prévient le mouvement. Après avoir implanté sur ces blocs , à une certaine profondeur, des lames ou pointes en cuivre jaune, représentant le sujet à graver, on les entoure d’un cercle et l’on recouvre les parties en relief d’alliage. Ce métal, en s’alliant aux pointes de cuivre qui sont en saillie , leur transmet assez de chaleur pour que la partie qui est implantée dans le bois le carbonise , et il suffit alors de retirer la lame métallique à laquelle se trouvent soudées toutes ces pointes pour avoir une matrice au moyen de laquelle on coule autant de cachets qu’on peut en désirer. Par ce procédé , aujourd’hui généralement répandu, les frais de gravure sont tombés au douzième de ce qu’ils étaient d abord, et l’on exécute des dessins d’une délicatesse infiniment plus grande ; toutefois peut-il être encore quelque peu modifié, ainsi qu on peut en juger par les détails ci-après, que nous devons à 1 obligeance d’un de nos élèves et amis, M. E. "W itz , de Cornay.
- Dans ce procécé de clichage, qui nous paraît à la fois aussi
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- sûr qu’expéditif, l’attention doit se porter, comme dans celui au plâtre , sur trois points principaux qui sont : 1° la nature et Ja préparation du bois nécessaire ; 2° la gravure de ce bois ; 3° enfin, le clichage.
- 1° Nature et préparation du bois. Le bois de tilleul est celui qu’on emploie ; mais comme il importe au succès de l’opération qu’il soit bien sec, après avoir choisi des troncs bien sains. on les débite d’abord en billes de 0m,80 à lm de longueur, qu’on écorce et qu’on expose sous un hangar au grand air. Un an ou 18 mois après, on scie ces billes entranches de 0m,l environ d’épaisseur, que l’on fend par le milieu, afin d'empêcher le bois de travailler, si elles sont assez larges pour donner deux cachets, et qu’on laisse pendant un temps plus ou moins long, suivant le degré de siccité du bois, soit dans un séchoir d’impression au rouleau, soit dans tout autre endroit bien chaud. On rabote alors ce bois de pointe ou perpendiculairement à ses fibres, et quelquefois, pour être plus sûr qu’il ne se tourmentera pas, on y coule de l’alliage dans des trous qu’on a soin de percer sur les côtés [fig. Zr9, t).
- 2° Gravure du bois. Ces tranches ainsi préparées, on y exécute en fils et lamelles de laiton bien poli, dont tous les morceaux ont la même longueur, environ 0m01, et doivent être enfoncés àla même profondeur, ordinairement 0m003, le dessin qu’on a préalablement établi t' . On imbibe la surface du cachet ainsi gravé d’une eau acidulée, à raison de deux parties d’acide nitrique et d’une partie d’eau; on le fait sécher au grand air, mais non au soleil ; puis, après l’avoir mis en contact avec un alliage froid, préalablement fondu et étendu sur une plaque en fonte , on expose celle-ci à 'action du feu. L’alliage, en se fondant, communique au laiton
- Fig. 75.
- T
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- la chaleur nécessaire pour calciner le bois clans lequel il est implanté , et qui se trouve ainsi gravé. 11 convient de retirer le cachet de l’alliage, dès qu’une feuille de papier blanc, qu’on y a plongée en même temps, commence à se noircir. Quand il est refroidi, quelques coups de marteau , appliqués au côté du cachet opposé à la gravure, suffisent pour en détacher le laiton ; s’il en était autrement, on replongerait le cachet dans l’alliage et l’on recommencerait l’opération jusqu’à ce que l’on eût obtenu ce résultat.
- Quand tout le laiton est tombé , on vérifie, à l’aide du compas, la dimension du bois; s’il s’est resserré, on l’expose au grand air, mais dans un endroit qui ne soit pas trop humide; on le chauffe, au contraire, s’il s’est dilaté. Lorsqu’il a été ramené au rapport voulu, pour l’empêcher de se fendre au contact du métal chaud, on en imbibe d’un peu de suif, en ayant soin de ne pas boucher les empreintes du laiton, la partie gravée, qu’on doit en même temps entourer d’un carton dont l’épaisseur varie avec <^elle que l’on veut donner à la plaque du cachet en métal, et qui, après l’opération, doit être découpé de telle manière qu’on ne soit point obligé de rogner ce cachet pour l’assujettir sur la planche à impression.
- 3° Clichage. On surmonte alors le cachet t d’un entonnoir en bois, formé de deux parties a, b, que l’on resserre l’une contre l’autre au moyen d’un étau s ; on pose le tout sous un bâtis en bois c c où se trouvent deux vis m m, à l’aide desquelles on peut presser à volonté l’entonnoir sur le carton découpé qui borde le cachet, puis on verse dans cet entonnoir un alliage composé d’une partie bismuth sur deux ou trois parties plomb
- Fig. 76.
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- et deux parties étain, et chauffé à jaunir le papier blanc qu’on y plongerait. Cinq minutes après, cet alliage étant refroidi, on retire le cachet et l’entonnoir ; on sépare le cliché du cachet par quelques coups de marteau appliqués à la partie de ce dernier qui dépasse l’entonnoir ; on ouvre celui-ci en desserrant l’étau, et, à l’aide d’une scie en acier, on retranche du cliché toute la partie inutile de l’alliage qui s’y trouve adhérente , et qui a pris la forme de l’entonnoir qui la renfermait, Quand on a un nombre suffisant de ces clichés, on les cloue sur une planche à laquelle on a donné la forme que demande l’impression à la planche ou à la perrotine ; et remplissant la gravure de poussière de pierre ponce, on la polit au moyen d'une grande pierre de même espèce. S’il y avait de la bavure, on l’enlèverait au moyen d’une pointe de graveur. Souvent aussi cette même opération se fait en coulant de la colophane dans la gravure, afin de donner à celle-ci assez de solidité pour pouvoir être dressée au rabot ; lorsque la planche est plane, on enlève la résine, et on nettoie avec de l’essence de térébenthine
- Comme l’entonnoir en bois, dont on se sprt pour l’opération du clichage, est d’une forme particulière, nous croyons devoir en donner ici la description.
- On prend un morceau de bois, on le scie en deux moitiés a, b, fig. 77, dont on rabote avec soinlapartie sciée, pour que, serrées
- Fig. 77
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- l’une contre l’autre, elles se joignent aussi bien qu’il est possible. On perce ensuite, dans les quatre coins de chacune de ces faces,
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- quatre trous, et, dans les quatre trous de l’une, on enfonce à moitié quatre clous en fer ou en cuivre, qui doivent entrer dans les quatre trous de l’autre , quand on les juxtapose, et les empêcher toutes deux de se déranger. On creuse alors, dans les deux faces, la section d’un petit canal destiné à conduire le métal qu’on verse dans l’entonnoir e, jusqu’au cachet sur lequel il est posé et où il arrive par une foule de petits canaux horizontaux creusés à la base, comme cela est représenté par le plan a b. Il est important que ces conduits soient parfaitement symétriques sur les deux faces. Supposons maintenant les deux parties a, b, rapprochées et fixées par une guillaume, on verse l’alliage dans l’entonnoir. Cet alliage descend par le conduit vertical, arrive à la partie inférieure, puis, entrant dans les canaux horizontaux, se rend sur la face gravée du cachet en bois par ces petits canaux. Lès petits conduits ff sont établis pour donner une issue à l’air qui, se trouvant dans l’entonnoir ou sur la face du cachet au moment où l’on verse l’alliage, gênerait le mouvement de celui-ci et s’opposerait à ce qu’il entrât dans toutes les cavités de la gravure.
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- § h94. Ce genre de gravure, ainsi que nous l’avons déjà dit, ne s’exécute généralement que sur les métaux, particulièrement sur le cuivre jaune ou rouge, et quelquefois, mais rarement, sur pierre et sur verre.
- Lorsque, dans le cours du siècle dernier, les fabricants d’indiennes empruntèrent aux graveurs et aux imprimeurs en taille-douce les moyens de reproduire des dessins et des impressions sur l’étoffe, ces artistes employaient déjà la gravure au burin et à Y eau-forte, c’est-à-dire que , comme de nos jours, dans le premier cas, après avoir recouvert une plaque en cuivre d’un vernis et y avoir dessiné le sujet, ils traçaient sur le cuivre, avec un instrument tranchant (le burin), les traits plus ou moins forts dont se composait le dessin à graver, tandis que dans le second, lorsqu’ils avaient tracé ces mêmes traits dans le vernis au moyen
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- d’une pointe sèche, ils les réalisaient dans le métal par l’intervention .de l’acide nitrique, qui, en attaquant les parties mises à nu, respecte celles que recouvre le vernis, et par cette action chimique produisaient; jusqu’à un certain point, l’effet du burin avec cette différence, cependant, que l’instrument tranchant pou. vait être enfoncé plus ou moins dans le métal, selon la force que l’on voulait donner aux traits, tandis que l’acide, attaquant également toutes les parties de ce métal mises à nu, ne donnait jamais que des traits d égalé profondeur, tant qu’on ne l’avait pas fait agir à plusieurs reprises sur quelques uns.
- Le grand développement qu’a reçu l’impression des tissus, et surtout la découverte du rouleau, ont fait de la gravure pour cette impression un art pour ainsi dire distinct de celui qui lui a donné naissance. En effet, tandis que l’artiste consacre encore un temps long et précieux à l’exécution de l’ouvrage qu’il veut produire sur le papier, le graveur des fabriques, empruntant à la mécanique et à la chimie toute leur puissance, fait en un jour ce que le premier ne ferait pas dans un an ; de là vient qu’on peut donner pour 50 à 80 francs ce qui en coûtait 1,500 il y a une quarantaine d’années,
- Pour faire comprendre toutes les modifications que ces procédés de gravure ont subies, nous jetterons un coup d’œil rapide sur leurs perfectionnements successifs.
- Les machines employées dans l’impression en taille-douce ont été les premières appliquées à l’impression des tissus ; c’est donc la gravure des planches plates qui a subi les premières améliorations. Dans le principe, la gravure de ces planches ne différait en rien de celles des planches qui servent à l’impression des papiers : on graVait au burin ou à l’eau-forte, mais d’une manière beaucoup plus prononcée que lorsqu’il s’agissait d'imprimer sur papier. Les ombres s’obtenaient au moyen de légères courbes, qu’.on serrait et croisait, suivant la nature de ces ombres, pour produire les teintes nécessaires à l’effet du dessin. La presse dont on se servait ne permettant pas de rapporter,
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- chaque sujet était renfermé dans une planche et ne pouvait être répété ; on ne tarda pas à chercher les moyens de sortir de ce mode d’impression trop borné, et bientôt la presse fut perfectionnée au point que les rapports devinrent possibles mécaniquement et de la manière la plus exacte. On commença alors à graver de petits dessins qui se répétaient plusieurs fois ; mais comme il était très difficile, pour ne pas dire impossible, de les reproduire exactement de même dimension et de même profondeur sur toute la surface de la planche en cuivre, on eut l’idée de graver en relief ces petits objets ou leurs contours seulement, sur un poinçon d’acier doux, que l’on trempait ensuite pour le durcir, après que la gravure en était achevée. Moyennant ce poinçon, qu’on enfonçait à coups de marteau dans la plaque métallique , et sur des points déterminés à l’avance par des lignes qui coïncidaient avec les rapports du poinçon, les empreintes du sujet, répétées à volonté, étaient partout semblables, pourvu que le poinçon eût été également enfoncé. Après l’opération du poinçonnage, on polissait la plaque, afin de faire disparaître les bavures, et l’on employait le burin pour terminer la gravure. Plus tard, le poinçon, au lieu d’être enfoncé à coups de marteau, le fut par une presse à vis, et aux distances marquées par des diviseurs qui dépendaient de cette presse et faisaient marcher la planche en long et en large , suivant l’écartement demandé par le dessin.
- Les choses en étaient là lorsque s’opéra une grande révolution dans l’impression par l’introduction et l’emploi du rouleau. Ceux-ci furent d’abord gravés à la main ; mais la lenteur de ce moyen de gravure et, partant, la dépense à laquelle il entraînait, le firent bientôt abandonner ; il fut remplacé par deux procédés distincts, employés, l’un en France, Vautre en Angleterre. Lefèvre, dans le premier de ces pays, appliqua à la gravure au rouleau tous les procédés de la gravure à la planche plate, et grava des poinçons qui, au lieu d avoir une surface plane, comme ceux de ce dernier genre de gravure, avaient une surface concave qui correspondait à la convexité des cylindres; puis
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- bientôt, au moyen d’un tour à graver qu’il avait imaginé, il en fonça le poinçon à une profondeur donnée et égale sur toute la sur face 6es cylindres. En Angleterre, on eut l’heureuse idée de graver en creux un petit cylindre miniature en acier doux, appelé molette , qu’on trempait ensuite et pressait fortement contre une autre petite molette également en acier doux, à laquelle il transmettait, mais en relief, le sujet qu’on y avait gravé en creux-ce transport opéré, on procédait à la trempe de cette .seconde molette pour réaliser ensuite, moyennant une pression suffisante, un nouveau transport, mais cette fois sur le cylindre en cuivre, qui était ainsi bientôt gravé en creux sur toute sa surface.
- Tous ces perfectionnements portent, comme on le voit, sur l’emploi du poinçon , qui, primitivement employé comme un cachet et sur un point limité , a fini par être appliqué d’une manière continue.
- Le burin , au moyen duquel on donne des traits si nets et si vigoureux, devait aussi recevoir ses perfectionnements, et en effet, de 1823 à 1824, en Angleterre et en Suisse , on parvint à le faire mouvoir mécaniquement, ainsi que le rouleau, de manière à produire sur ce dernier tous les contours que depuis longtemps les graveurs de boîtes de montres obtenaient à l’aide de tours dits à guillocher. Mais pendant qu’en Angleterre le burin ne servait qu’à produire des traits sur la couche de vernis dont la surface du cylindre était recouverte, et à mettre en liberté le métal que devait ronger ensuite un acide, en Suisse, on attaquait directement la matière du rouleau par la pointe du burin.
- Les moyens de graver en creux sont donc les suivants :
- il0 A la main.
- 2° Mécaniquement, c’est-à-dire avec le tour à guillocher.
- La pointe sèche, qui met à nu les parties t
- ... . ,, .. \ \0 A la main,
- d un métal recouvert d un vernis, 1
- quon attaque ensuite à l’eau-forle, et * Méca"Temenl < «uilloché qui s'emploie................... .( Placide).
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- pendiculairement à l’axe du cylindre.
- 2“ Par un mouvement de va et
- d'une manière intermittente.
- ( 10 En enfonçant le poinçon per-\ pendiculairement à l’axe du
- Le poinçon , avec lequel' intermittente, on grave ...............
- \ vient (poinçon-molette).
- d’une manière (Gravure à la molette, qui est
- .continue . . . ( dite roulante.
- On se sert des mêmes moyens pour graver les plaques et les cylindres en cuivre; mais comme la gravure de ces derniers présente plus de difficultés, nous nous en occuperons spécialement.
- Gravure au burin.
- § 495. La gravure au burin, faite à la main , ne s’emploie plus que pour des genres particuliers, les meubles, par exemple , dont les dessins-étendus ne se composent pas de sujets répétés; encore a-t-on , autant que possible, recours à l’action , tant des acides que desmoyens mécaniques, pour économiser le temps et la main-d’œuvre. On se sert de l’acide toutes les fois qu’il y a de grandes masses à faire disparaître , en recouvrant toutes les autres avec un vernis ; on emploie, au contraire, les moyens mécaniques lorsque le dessin est chargé de beaucoup de gravure et surtout de beaucoup d’ombre. On commence par couvrir tout le rouleau d’un rnillepoints (voyez Gravure à la molette) gravé assez profond, et l’on calque le.dessin sur ce fond, ou plutôt on en marque les places blanches et les plus claires , et l’on referme les points avec un brunissoir (le cuivre rouge se prête très bien à ce genre de gravure ) ; cette opération achevée , on polit le rouleau à la pierre ponce , on grave à la main, et l’on renforce les ombres et les mates.
- § 496. Gravureauburin faite mécaniquement (guilloché). Ce genre de gravure,qui a eu pendant quelques années un immense succès, tant à cause de sa nouveauté que par le reflet qu’il donnait aux couleurs, a été emprunté aux guillocheurs de boîtes
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- de montres (1). D’après les renseignements qui nous ont été donnés à ce sujet, c’est dans l’établissement de MM. Yerdan père et fils , à Neuchâtel ( Suisse ) et à Wesserling, qU’q pris naissance. Qu’on se représente un cylindre placé sur un tour à chariot et mis en mouvement pendant qu’un burin fixe en est rapproché , il sera rayé dans toute sa circonférence. C’est là une des opérations les plus communes du tourneur, de laquelle il est facile de passer au genre de gravure qui nous occupe, car il suffit de mettre ce même cylindre en rotation sur son axe, et de }ui imprimer en même temps un mouvement de va et vient dans le sens de sa longueur pour que le burin, qui reste toujours fixe , y produise des traits continus en sillons ondulés Les tours dont on se sert sont dits tours à guillocher, et sont les mêmes que ceux dont on se sert pour graver au poinçon : seulement, on a substitué à la roue à diviser, placée dans ce dernier sur l’un des tourillons à l’extrémité du cylindre, une roue qui porte une rosette festonnée , fig. 78, suivant la nature Fig. 78 et le nombre des sinuosités que l’on veut produire, Un ressort avec contre-poids presse sur un des / bouts du cylindre , pour le rapprocher de la ro-
- V sette, tandis qu’une touche a ou b, qui entre dans
- r'â——les échancrures de celle-ci, l’en éloigne plus ou y moins brusquement, selon la profondeur de ces
- [ échancrures, la forme de sa propre tête, ter-
- . > minée tantôt en pointe , tantôt en courbe. Ainsi,
- Ky- par exemple, si l’extrémité de la touche se ter-
- "—U-———• mine en pointe, a, le feston de la rosette se reproduira sur le cylindre en lignes perpendiculaires formant zigzags ; si, au contraire, cette extrémité se termine par une courbe,
- (1) C’est un nommé Stramm , guillocheur de montres à la Chaux-de-Fonds (Suisse), qui, sur les indications et avec le concours de MM. L. Yerdan père et fils, a gravé, le premier, au commencement de l’année 1824, les cylindres guillochés.
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- b, et que le (rayon de cette courbe soit le même que celui de la courbe de la rosette, la figure de celle-ci se reproduira exactement sur le cylindre 5 si le rayon de la courbe de la pon te n’est que la moitié de celui de la courbe de la rosette, on atteindra toujours un feston régulier, mais plus petit.
- Peu de temps après cette découverte, on parvint, au moyen d’un mécanisme très simple, à enfoncer plus ou moins le burin dans le rouleau à graver, et à tracer ainsi à volonté soit des lignes parallèles et ondulées plus fortes ou plus faibles d’une ligne à une autre, en allant de la droite à la gauche , et vice versa , soit des lignes qui se renforcent ou s’affaiblissent à des points déterminés de leur longueur ; en un mot, on grava des fondus.
- Plus tard, comme les rosettes dont nous venons de parler produisaient toujours les mêmes ondulations, et que, à moins de les changer à chaque trait de burin, on ne pouvait décrire toutes les courbes désirables, on imagina de se servir du plan incliné, qui donne la facilité de tracer toutes les lignes depuis le trait droit jusqu’aux courbes les plus fortes. Qu’on se figure un cylindre suspendu, mais tournant bien rond et pressépar un contrepoids ou ressort, dans le sens de sa longueur, contre un plan incliné qui se trouve à l’une de ses extrémité et tourne lui-même, sur son axe ; toutes les ondulations déterminées par p. ^ le plan incliné se reproduisent sur le rouleau au moyen du burin ; et comme on peut faire varier à volonté l’inclinaison de ce plan, il est loisible au graveur de commencer ses festons par la ligne droite et de tracer, à côté, des lignes de plus en plus courbes , qui, après s’être rapprochées de la droite primitive, s’en écarteront pour engendrer, en continuant leurs ondulations, de nouveaux festons, soit dans le même sens, soit dans un sens opposé , fig. 79.
- Par un autre mouvement on arriva à faire trembler le filet ou à produire des ondulations plus ou moins brusques sur les traits.
- Tous ces perfectionnements avaient déjà donné à ce genre de
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- gravure une vogue telle que des cylindres, qu’on gravait en moins d'un jour, se vendaient jusqu’à 1,200 fr. ; d’autres les suivirent bientôt. On ne pouvait réserver de sujets en blanc par cette gravure, et cependant la fabrication réclamait de ces réserves pour pouvoir appliquer des enluminages à ce genre d’impression, qui jusque là ne se faisait que d’une seule couleur. Le sauteur ou patron fournit au graveur le moyen d’atteindre ce but. Le sauteur est un cylindre miniature en bois, sur lequel le dessin que l’on veut obtenir est gravé en relief, avec des parties creuses plus ou moins profondes Ce cylindre est fixé à l’une des extrémités de celui qu’il s’agit de graver, et en reçoit indirectement le mouvement. Pendant que ce mouvement alieu une pointe, placée perpendiculairement à l’axe , et qui frotte sur la surface du petit-cylindre , s’enfonce dans les traits gravés en creux, est relevé , au contraire, par ceux qui sont en relief, et communique toutes ses impressions de haùsse et de baisse au burin , avec lequel elle est articulée au moyen d’un levier combiné , en sorte que ce burin lui-même , tantôt, s'enfonçant plus ou moins dans le cylindre , y produit des traits plus ou moins profonds , tantôt, ne le touchant pas, y réserve des parties blanches.
- Après avoir ainsi trouvé la combinaison nécessaire pour relever le burin et l’empêcher de mordre sur des points donnés, on chercha et l’on parvint à le faire pénétrer dans le métal, à l’en faire sortir d’une manière insensible, à l’y faire o'sciller et à obtenir partout des lignes ondulées et coupées qui allaient s’affaiblissant.
- Enfin, on compléta ce genre de gravure par l’emploi du pentographe , à l’aide duquel une figure donnée est gravée en traits dont les dimensions conservent leurs rapports, ou s’allongent et s’élargissent selon les besoins.
- Le échantillons ci-après compléteront le court résumé que nous venons de donner.
- Le dessin de l’échantillon qui suit a été obtenu à l’aide d’un mouvement oscillatoire communiqué au cylindre, qui, re-
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- cevant l’action du burin fixe , s’est trouvé recouvert de lignes
- 90. Giiilloclié obtenu par le seul mouvement <lu cylindre.
- ondulées , lesquelles, en se réunissant en faisceaux, ont produit des plains. C’est là ce que le guillocheur appelle simple mouvement croisé à droite et à gauche, parce que le mouvement se transpose en montant et en descendant.
- 91. Guilloelié. avec traits ondulés et droits.
- L’échantillon ci-dessus représente la même figure produite par un simple mouvement du cylindre croisé à droite et à gauche, mais sur laquelle on a passé un trait droit qui y forme des losanges en coupant les lignes courbes.
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- îî@. CUiillochc avec traits croisés vers la gauche.
- Le dessin de cet échantillon est dû à un seul mouvement du cylindre, qui. au lieu de croiser à droite et à gauche, comme dans les éch 20, 21, croise simplement vers la gauche et est recouvert d’un trait droit.
- S3. CJuilloché par deux mouvements de cylindre.
- Pour réaliser ce dessin, on a communiqué au cylindre deux mouvements croisés, l’un vers la droite, l’autre vers la gauche.
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- • 4. Guilloclic par un mouvement dit burin.
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- mm
- mm
- mm
- mm
- Ici le cylindre n’a point oscillé, et les ondulations sont le produit d’un léger mouvement qu’on a communiqué au burin à l’aide d’un patron. '
- 95. Ciuill. par deux nionv. inipr. l’un au cyl., l’autre au liurin.
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- La gravure de l’échantillon n° 25 est le résultat de deux mouvements oscillatoires, dont l’un , plus fort, a été imprimé au cylindre dans le sens de son axe , et l’autre, plus faible, an burin , qui l’attaquait.
- 86. Guilloché sauté.
- Dans cet échantillon , les traits sont tous à égale distance et droits; c’est le burin , régulièrement soulevé à l’aide d’un patron , qui a permis de réserver le dessin blanc sur l’étoffe,
- 139* Guilloché sauté avec une passe «le lignes ondulées.
- Même gravure que l’échantillon précédent, avec cette différence qu’on y a fait une passe de lignes également distantes et légèrement ondulées.
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- SS. fîuilloché chiné sauté.
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- Dans cette gravure , les traits sont droits , très serrés , et le blanc a été réservé par les mêmes moyens que dans les deux échantillons qui précèdent.
- SW. Cîuilloché sauté.
- II.
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- L’effet de l’échantillon n° 29 est produit avec le burin, qu| est soulevé par un patron, mais de telle sorte que le trait s’allonge ou se raccourcit à volonté.
- 30. Guilloché sauté avec traits finissant en pointes.
- ki kl ki al lin Ml
- lit .1 m\
- Éch. 30. Traits droits moins espacés, et qui finissent en pointes moyennant la disposition du patron, qui éloigne peu à peu le burin du rouleau, après l’en avoir rapproché d’une manière graduelle.
- 31. Guilloché sauté à figure réduite au pantographe.
- La gravure fig. 80, s’obtient en faisant un mille-raies ondulé a sur toute la surface du cylindre, après quoi on pass
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- par-dessus lin mille-raie droit, avec la préeau- Fig. 80. tion de l’écarter un peu plus ou un peu moins.
- Ainsi, sur 10 filets ondulés, on en fait 9 ou 11 droits ; par cet arrangement, les lignes courbes se trouvent coupées à des distances de plus en plus grandes, et c’est ce qui produit des ombres.
- C’est à un des plus habiles guillocheurs d’Alsace, M. Ban-guerel, de Cernay , que nous devons ces divers échantillons.
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- 33. Guillocïié par combinaison de tous ïes mouvcm. connus,
- L’éch. 32 réunit tous les effets qu’il est possible d’obtenir dans ce genre de gravure ; nous le tenons de l’obligeance de M. D. Kœchlin Ziegler, de Mulhouse.
- Si le cadre de cet ouvrage le permettait, nous ferions voir comment, en faisant graduellement monter et descendre le point de repère de l’ondulation d’un trait, on obtient les ondulations les plus gracieuses sur toute la surface du cylindre et dans tous les sens ; mais nous étendre davantage sur ce sujet, ce serait nous écarter du plan que nous nous sommes imposé.
- De la gravure à la pointe sache , ou le métal est rongé par un agent chimique. (Gravure à l’eau-forte.)
- § Â97. Dans ce genre de gravure, il y a trois choses distinctes à considérer : la préparation du vernis, Y exécution du dessin, es moyens de ronger le métal.
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- Préparation du vernis. Le vernis est un composé destiné ù < réserver les parties du métal que ne doit pas attaquer l'agent chimique ; il doit jouir de la double propriété :
- 1° D’adhérer si fortement au métal que dans aucun cas la liqueur rongeante dont on se sert pour graver ne puisse, en s’infiltrant entre ce métal et les couches qui le recouvrent, attaquer les parties métalliques qui doivent être respectées •
- 2° D’être attaquable à la pointe sèche , sans qu’il se produise de gerçures qui provoqueraient les infiltrations qu’on a intérêt à prévenir, et en même temps sans qu’aucune partie du métal qui doit être découvert se trouve réservée.
- On a donné la composition d’une foule de vernis pour la gravure à l’eau-forte. Celle qu’employait Callot, dont la réputation dans cet art est connue , était formée de :
- 620 grammes d’huile de lin la plus claire,
- 80 —• benjoin en larmes ,
- 50 — cire vierge,
- qui, fondus au feu, étaient maintenus à l’ébullition jusqu’à réduction d’un tiers, et continuellement remués. Outre ce vernis, appelé vernis mou, Callot en préparait un autre dit sec, qui ne différait du premier que par une plus grande proportion de cire.
- Les expériences que nous avons faites nous ont prouvé que, lorsqu’il s’agit de tracer un dessin au trait sur le vernis, la préparation la plus favorable est la dissolution du copal dans l’essence de lavande , § 352 , p. 361. On obtient ainsi un vernis aussi mou qu’on peut le désirer , qui se dessèche et se réduit en lames douées de la plus grande adhérence au métal, sur lesquelles on peut tracer les traits les plus délicats , sans bavures et sans solutions de continuité.
- Lorsque le dessin ne doit pas être tracé à la pointe, on emploie avec avantage, tant sous le rapport de l’économie que sous celui de l’exécution, le galipot ; mais il faut seulement avoir la précaution de le fondre et de le passer à chaud à travers une mousseline fine, afin d’en séparer toutes les impuretés,
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- et d’ajouter toujours du galipot nouveau à celui qui a déjà été fondu, et qui, rendu de plus en plus sec par ces fusions réitérées , n’atteindrait plus le but qu’on se propose. Au lieu de nouveau galipot, on ajoute un peu de térébenthine et de cire.
- Exécution du dessin. Le dessin se fait à la pointe sèche ou par des procédés qui s’en éloignent plus ou moins. On le fait à la pointe sèche, ou à la main, ou mécaniquement; dansle premier cas, le métal est chauffé, après avoir été bien nettoyé, puis recouvert d’une couche uniforme de vernis qu’on enferme au moyen d’une grosse mèche imprégnée de cire, et l’on décalque le dessin sur cette surface noire, c’est-à-dire que, passant avec une pointe, mais à l’envers, sur tous les traits d’un papier sur lequel le dessin a été calqué ordinairement en rouge , et qu’on applique au vernis, on reporte sur celui-ci tous les traits rouges du calque ; alors, avec une autre pointe ou avec un diamant, on enlève le vernis sur tous ces traits , et le métal, mis à nu, est soumis à l’action de l’acide qui doit le ronger. Dans le second, on recouvre d’une couche de vernis d’excellente qualité le rouleau à graver , qu’on place ensuite sur le tour à guillocher, pour y produire, soit par une pointe en acier, soit par un diamant, tous les genres d’ondulations dont nous avons indiqué plus haut la formation en parlant de la gravure au burin, et il ne reste plus qu’à faire agir l’acide sur les parties métalliques mises à nu.
- On remplace quelquefois la pointe par un des moyens ci-après. Veut-on, par exemple, obtenir un dessin blanc sur un fond couvert : ou l’on trace ce dessin au pinceau avec le vernis même sur le cylindre, ou on le grave d’abord sur un cachet, à l’aide duquel on imprime ensuite le vernis sur une feuille de papier gommé qu’on applique sur le rouleau, puis, lorsque le vernis est sec , on humecte le papier pour le détacher, et le dessin, imprimé en vernis gras, se trouve transposé sur le cylindre. Quand, au contraire, le fond doit rester blanc et le dessin être gravé en creux, on imprime avec le cachet, au lieu de vernis , une solution concentrée de gomme , sur un papier imprégné de
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- cjalipot, qu’on transporte immédiatement sur le cylindre, où on le laisse sécher, et il suffit alors d’humecter le papier d’alcool chargé d’essence de térébenthine pour le détacher de la gomme puis de recouvrir le cylindre de vernis, de le dessécher et de le plonger dans une eau acidulée de vinaigre, qui, agissant sur les parties gommées, met à nu le métal réservé par elles.
- On obtient aussi des figures irrégulières, des sablés, des marbrures, etc., par des procédés qui ne sont que des imitations de ceux qu’on emploie pour produire quelques dessins sur le papier de reliure, sur la toile cirée, etc., dans lesquels des substances hétérogènes incorporées et maintenues en suspension l’une par l’autre , puis abandonnées à elles-mêmes ou traitées à la brosse , reprennent chacune leur position respective et don-nent les formes les plus bizarres. C’est ainsi qu’en incorporant du goudron à des dissolutions salines et en étendant uniformément ce mélange sur un cylindre, le plus léger coup d’une brosse a pour résultat d’accumuler le goudron sur certains points et la solution saline sur d’autres, de sorte qu’en desséchant le premier et en passant le cylindre dans l’acide, les parties où le sel s’est accumulé sont les seules rongées.
- On réalise encore des figures d’un autre genre en aspergeant le rouleau de vernis avec un pinceau ou avec une brosse. Toutes les parties couvertes de vernis sont respectées par l’acide, et les autres, au contraire , attaquées. Par une première aspersion on produit les plus grosses gouttes ; par une deuxième, des gouttes plus petites ; par une troisième ou même avec les barbes d’une brosse, le sablé ; ou bien, plaçant un rouleau préparé pour la gravure sur des tourillons , on lui imprime un mouvement lent, pendant lequel on l’asperge de vernis ; puis , lorsqu’il a reçu une couche d’éclaboussures , on le fait passer à l’acide durant quelques minutes, pour le laver ensuite, l’éclabousser de nouveau , le replonger dans l’acide, et ainsi de suite jusqu’à ce que Ton ait obtenu les effets désirés.
- Ces dessins sont dits fouillis éclabousses ou gicles.
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- L’éch. 33 est un dessin giclé.
- 3if. Fouillis gravé & l’acide.
- L’éch. 34 est aussi un dessin giclé, mais sur lequel on a d’abord réservé un ramage.
- 34. Fouillis gravé à l’acide avec blanc réservé.
- Ce genre de gravure est susceptible d’être varié à l’infini ; car rien n’empêcherait, par exemple, d’enrouler d’une façon régulière, de manière à produire des contours ou figures plus ou moins bizarres , des fils imprégnés de vernis ; ce vernis faisant fonction de réserve, les parties du métal qui n’en seraient pas
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- recouvertes seraient les seules attaquées. On pourrait, en outre après que le rouleau aurait été soumis à l’action de l’acide, détacher quelques uns de ces fils et mettre à nu les parties du métal qu’ils abritaient d’abord, en sorte qu’en passant de nouveau dans l’acide on rendrait plus profonds les premiers traits, qui continueraient d’être attaqués , tout en en obtenant de nouveaux, qui le seraient beaucoup moins. Userait facile de reproduire par ce moyen les dessins des mailles si variées du tricot et du filet. Enfin , rien ne s’opposerait à ce qu’on fît cristalliser des dissolutions salines sur la surface du rouleau, et, ces cristallisations accomplies , à ce qu’on recouvrît le tout de vernis : ce dernier ne prenant que sur les parties nues du métal, on obtien* drait encore la figure des cristaux en relief.
- Des moyens de ronger Je métal ou défaire mordre l'acide. Lorsque , après avoir recouvert un cylindre de vernis, on en a mis ainsi des parties à nu, on le place au-dessus d’une auge pleine d’un liquide , qui d’abord est de l’acide nitrique plus ou moins étendu selon l’énergie avec laquelle on veut que le métal soit attaqué, et ensuite une préparation saline , qui ne présente pas les inconvénients de l’acide nitrique employé seul ; car on sait (pie cet acide dégage des gaz qui incommodent toujours les ouvriers, et, soulevant à la longue la couche de vernis , ne conservent pas aux traits leur régularité. Voici la préparation la plus propre , selon M. Laugier, à pénétrer convenablement le cuivre sans endommager les contours du dessin :
- Dans 8 parties de vinaigre fort eu Wt dissoudre è chaui.
- 10 •— d’eau ,............)
- 4 — vert-de-gris, acétate bi-cuivrique, §240,bien pulvérisé, 4 — chlorure sodique,
- 4 — chlorure ammonique,
- 1 partie alun ; puis on filtre.
- Ordinairement les rouleaux de cuivre rouge sont gravés a
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- l’acide nitrique, et ceux de cuivre jaune par un mélange d’acide nitrique et d’acide acétique.
- Pendant que le cylindre est en contact avec l’acide, il faut qu’il soit soumis à un mouvement égal et continu, autrement il y aurait des inégalités dans la gravure; et, en outre, la liqueur corrosive, bientôt saturée par suite de son séjour dans les cavités du métal, ne le pénétrerait plus aussi profondément.
- La gravure à' l’eau-forte ne peut remplacer dans tous les cas la gravure au burin; mais, employée avec discernement, elle rend de très grands services aux graveurs , dont elle abrège de beaucoup les travaux.
- Gravure au poinçon.
- § /l98. Le premier tour à graver au poinçon a été inventé par M. Lefèbre, de Paris, qui exploita cette découverte durant plusieurs années. Ce tour se composait d’un banc en bois solidement construit, sur lequel reposaient deux poupées en fer garnies de coussinets, et sur ces deniers se plaçaient, par les deux extrémités de leur axe , les cylindres à graver. Entre ces deuxpoupées étaient fixés deux brocs, supportant une barre cylindrique en fer, et, vis-à-vis , une règle de même métal. Ces deux pièces servaient de guide à un chariot dans lequel s’adaptait une chapelle portant un baril où s’ajustait le poinçon gravé. Au-dessus du baril ou porte-poinçon était placée une vis qui servait à enfoncer ce poinçon dans le rouleau. Deux roues à division se trouvaient, l’une sur un des tourillons, l’autre à l’extrémité du chariot, et servaient, la première, à diviser le cylindre dans le sens de sa circonférence, et à y appliquer le poinçon autant de fois qu on le désirait sur des points déterminés ; la seconde, à diviser le cylindre dans le sens de sa longueur et à répéter l’opération du poinçonnage à distances égales dans le même sens. Ajoutons que ce tour servait aussi à tourner et à polir préalablement les rouleaux.
- Les poinçons, toujours de l’acier de la qualité la plus esti-
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- mée, étaient forgés et façonnés de manière à présenter, à celle de leurs extrémités qui devait être gravée, une surface concave On les rendait aussi tendres que possible, sans en dénaturer l’acier, en les renfermant dans une boîte en fer, remplie de poussière de charbon ou simplement de cendres. Cette boîte fermée d’un couvercle qu’on lutait avec de l’argile, était portée par une chaleur ménagée, à la température rouge, où on la maintenait durant une heure pour l’abandonner ensuite au re-froidissement le plus lent possible. Les poinçons, ainsi chauffés et refroidis, étaient assez doux pour pouvoir être gravés ; il fallait seulement, avant de procéder à cette opération, en user à l’émeri la surface concave contre la surface convexe du cylindre, en faisant tourner celui-ci sur son axe, afin de leur faire prendre la rondeur de la circonférence du rouleau à graver.
- Ces opérations préliminaires achevées, on décalquait le dessin sur le poinçon, pour le graver ensuite au burin , puis, afin de lui donner la dureté nécessaire pour marquer des empreintes sur le cuivre, on le plaçait dans une boîte en fer, en tout semblable à la précédente, mais entourée d’un cément composé de charbon animal et d’un peu de potasse, ayant pour objet de carburer l’acier, qu’on chauffait au rouge vif et qu’on maintenait à cette température durant 1 ou 2 heures. La retirant alors du feu, on en sortait les poinçons, qu’on trempait dans l’eau de rivière pendant qu’ils étaient encore rouges. Quant à la netteté des contours, on l’obtenait en usant les bords des poinçons à la meule, et finalement, pour qu’ils ne fussent pas trop cassants et sujets à se gercer, on les soumettait à l’opération du recuit, c’est-à-dire qu’après les avoir laissés sur une pince ou sur un fer chaud jusqu’à ce qu’ils fussent revenus à une couleur violette , on les plongeait dans l’huile pour compléter la trempe.
- Maintenant que le tour à graver et la confection du poinçon nous sont connus, quelques explications suffiront pour faire comprendre comment s’effectuait la gravure. Le poinçon gravé placé dans le baril, et la profondeur de la gravure déterminée
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- par un arrêt, on enfonçait l’instrument dans le rouleau, en commençant par une de ses extrémités et en le faisant tourner, à chaque coup de poinçon, au moyen de la division placée sur les tourillons, de la distance exacte qui devait séparer les empreintes dans le sens de la circonférence; alors, à l’aide de la division située à l’extrémité du chariot, on faisait avancer le poinçon de la distance qui devait séparer les empreintes dans le sens de la longueur, et l’on commençait une autre rangée, qu’on gravait, comme la première, sur toute la circonférence, en continuant ainsi jusqu’à ce que le rouleau fût poinçonné sur toute sa surface. Très souvent, quand le dessin le comportait, on gravait plusieurs poinçons à l’aide desquels on faisait des rentrures. Dans certaines gravures , il y en avait jusqu’à 20. Lorsque le rouleau avait été poinçonné , on le polissait à la pierre ponce d’abord, pour faire disparaître les refoulures du métal, et ensuite à la pierre cl'Orient, pour enlever les dernières aspérités. Les frais de gravure de ces rouleaux s’élevaient de 1,000 à 1,500 francs.
- Conformément à la division que nous avons adoptée, nous devrions parler ici de la gravure au poinçon faite sur le rouleau par un mouvement de va-et-vient (poinçon-molette) ; mais cette gravure rentre tout naturellement dans la gravure à la molette.
- Gravure à la molette.
- § 499. C’est aux graveurs anglais Perkins, Fairman, Heath , Loquet, qu’est due la découverte de la belle et intéressante gravure à la molette, qui ne fut connue et adoptée en France que beaucoup plus tard..Un Anglais, après avoir lait, sous ce rapport, des essais infructueux , dans la maison Hartmann, de Munster, se présenta, en 1820 , chez M. Haussmann, au Logelbach, pour recommencer des tentatives qui ne lui réussirent pas mieux , par la raison qu il n était pas graveur, mais qui suffirent pour convaincre • l’un des fils de M. J.-M.
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- Haussmann, dont nous avons si souvent prononcé le nom de avantages que ce procédé de gravure offrait sur celui de la gra
- vure au poinçon. Aussitôt, se mettant lui-même à l’œuvre en homme éclairé, habile et versé d’ailleurs dans la connaissance des machines, ce fabricant, en quelques mois , a triomphé de toutes les difficultés , et, dès 1822, tous les rouleaux de l’éta blissement du Logelbach étaient gravés à la molette. La même année, MM. N. Kœchlin frères importèrent d’Angleterre ce procédé , que chacun s’empressa d’adopter.
- Tel que nous l’avons défini, p. 26h , ce procédé consiste à graver en creux un petit cylindre miniature b , qui prend le nom de molette, dont le dessin est transporté en relief sur une
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- J
- autre molette , et de cette dernière sur le rouleau a , dont c représente la coupe au moyen du tour à graver sur lequel il repose par son axe d d. La préparation des molettes, le transport du dessin de l’une à l'autre, sont des opérations qui appartiennent essentiellement au graveur, à l’artiste proprement dit, tandis que l’opération qui a pour objet de reporter le dessin de la seconde molette sur le rouleau peut être confiée à tout ouvrier intelligent, qu’il soit ou non étranger au dessin et à la gravure, et qu’on appelle moletteur.- On ne doit donc pas confondre la gravure des molettes avec celle des cylindres : la première est une opération d’art, la seconde est toute mécanique.
- § 500. De la préparation et de la gravure des molettes. Outre le dessin , le graveur sur molette doit posséder toutes les connaissances qui se rattachent à l’art du graveur, afin de pouvoir s’aider de toutes les ressources qu’il présente. Il doit avoir à
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- sa disposition un tour à burin fixe pour tourner les molettes, un tour pour roder, une machine à relever (expression employée pour désigner l’opération par laquelle une molette gravée en creux transmet en relief cette gravure à une molette qui lui est opposée), un porte-molette [ 1), un autre pour graver au burin, pour enfoncer les petits poinçons et les picots dont il est dans le cas de se servir, et un autre pour graver au burin et achever son travail, des règles , de petites équerres, des marteaux, etc., enfin des assortiments de petites molettes-canevas avec dessins mille-raies , droites ou obliques , petits carreaux, mille-points, etc., qui sont à la gravure des molettes ce que sont ces dernières, quand elles sont achevées, à la gravure des cylindres en cuivre. En général, toutes les fois qu’une figure quelconque est sujette à être répétée dans un dessin, on la grave toujours en canevas, tant pour économiser la peine et le temps que pour obtenir plus d’uniformité dans la gravure.
- Les molettes, dont les dimensions varient depuis 0"'05 à 0m12, sont forgées d’acier fondu de la meilleure qualité , et ne doivent présenter aucun défaut, veine ou gerçure. On les chauffe dans une boîte remplie de charbon, avec les précautions que nous venons d’indiquer p. 282, pour les poinçons et dans le même but, c’est-à-dire pour rendre l’acier plus doux et plus tendre. Ordinairement on en cuit un certain nombre à la fois, afin d’en avoir toujours à sa disposition.
- Voici maintenant comment on procède à cette gravure :
- L’artiste commence par calquer le dessin sur du papier, en le rapportant de chaque côté ; il en prend ensuite les dimensions exactes , pour pouvoir déterminer celles de la molette dont il a besoin. Cette molette doit répondre, par sa circonférence, à la hauteur du dessin, et sa longueur ne dépasser que de quelque
- (l) Voyez les détails de ces machines dans l’excellent ouvrage de M. Armaingo, t. II, p*. 235.
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- peu la largeur de ce même dessin ; enfin elle doit être en 1 rapport avec le cylindre simple. Ce n’est donc qu’après avoir calculé ces dimensions qu’on peut faire un choix. On tourne alors cette molette à burin fixe, pour la rendre parfaitement cylindrique et du diamètre voulu, puis on la polit à l’huile et à la pierre du'Levant, et on la recouvre de cire ou d’un vernis pour pouvoir y reporter le calque sur toute la circonférence. Si ce calque a été fait au crayon ou à une couleur peu gommée, i] adhère au vernis, sur lequel le dessin se trouve naturellement tracé lorsqu’on relève le papier ; danfc le cas contraire, le graveur prend une pointe fine, suit tous les contours du dessin , et le calque sur l’acier même, moyennant de légers coups de marteau , en traversant de sa pointe le papier et le vernis. La molette est nettoyée avec une brosse et de l’essence de térébenthine , pour être ensuite soumise à la gravure, qui peut se faire soit au burin , soit au tour à gliillocher, soit au poinçon , soit à la petite molette-canevas, soit à l’eau-forte, soit enfin par le concours de ces différents moyens.
- Le sujet du dessin ne se répète-t-il point et recouvre-t-il à lui seul la surface de la molette : le graveur en trace au burin tous les contours, place ensuite les picots qui peuvent être nécessaires , en les produisant-, soit à l’aide d’une pointe qui en a la forme, soit avec une fraise triangulaire qu’il fait tourner au moyen d’une petite vrille, puis polit la molette, la termine au burin, et comme elle est toujours d’une longueur qui dépasse la largeur du dessin, trace, sur chacun des côtés , des picots particuliers qui servent en quelque sorte de points de repère et de soutien à la gravure , dans le report qui doit en être fait sur le cylindre. y
- Fig. -82.
- WM
- mm®
- Si le dessin , n’étant point assez grand pour recouvrir la molette, doit y être répété plusieurs fois , on grave des poinçons ou même de petites niolettes-eançms, des-
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- ÉÉiÉiiilr
- Fig. 84.
- Fig. 85.
- Fig. 86.
- tinées à le reproduire. Veut-on, par Fig. 83. exemple, graver un dessin picotage, comme ceux des fig. 82, 83, 84, on grave des poinçons en relief a , a , a , sur lesquels se trouvent 7 picots, et' en les enfonçant dans la molette, comme s’il s’agissait de graver un rouleau au poinçon, p. 283, on obtient des molettes-mères où ces picots sont gravés en creux.
- La fig. 85 représente un picotage semblable au précédent, mais renversé ; car il est facile de s’assurer que les 7 points du picot a, qui sont en relief dans les fig. 82,
- 83, 84, se trouvent ici gravés en creux, et, par conséquent, donnent le blanc de la gravure.
- S’agit-il d’un filet diagonal,^. 80 : OU l’on grave un poinçon a ou ligne oblique, que l’on répète sur toute la surface de la molette jusqu’à ce qu’elle soit recouverte ; ou l’on grave directement cette molette au tour à guillocher. Il en est de même pour le dessin zigzag, fiug. 87. On peut à volonté graver la molette sur un tour à guillocher ou graver un poinçon b , qui, répété , produira les zigzags a sur toute la circonférence et la longueur de la mo- à b
- lette.
- On obtient encore le dessin dentelle, fig. 88, en gravant en relief soit un poinçon a, soit un poinçon b; et en'‘répétant ces gravures, suivant une division très facile, on finit par couvrir la surface de la molette d’une très belle dentelle.
- Comme il est beaucoup plus simple de graver sur des surfaces. planes que sur des surfaces concaves ou convexes, Per-
- Fig. 87.
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- kins imagina de graver les matrices dont il avait besoin sur unr plaque d’acier doux, décarbonisée à sa surface, et decémen ' ter ensuite cette plaque pour transporter le dessin en relief sur la molette mâle (celle qui sert à graver le rouleau).
- M. Huguenin Côrnetz a fait une très belle application de ce procédé pour graver, avec le tour à guillocher, des dessins sphé roïdes concentriques et fondus, en traits continus ou tremblants A cet effet, il place une plaque d’acier sur le tour à guillocher ordinaire, dont on se sert pour graver les boîtes de montre, y produit les empreintes voulues, et les transporte en relief sur la molette mâle.
- On a exécuté la gravure des dessins ci-après en vue de suppléer, par des pleins et mi-teintes, au nombre des couleurs.
- 35> Gravure obtenue par la molette.
- Pour obtenir la gravure de l’éch. B5, on a d’abord recouvert, d’une manière très légère, à l’aide d’une molette-ccwzems, mille-points serrés, toute la surface de la molette préparée pour être gravée, etsur ce fond on a décalqué le dessin, qu’on a contourné ensuite avecle burin ; alors, à l’effet d’obtenir des teintes fondues ou des nuances qui vont en s’affaiblissant, on a renforcé tous les picots en les diminuant graduellement de force et de profondeur; puis la gravure a été terminée au burin ; mais , comme la molette
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- gravure en creux.
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- mère avait été complètement recouverte par les mille points qui en avaient endommagé les parties blanches qu’on désirait réserver, et qu’il est impossible de fouler et de brunir les creux de l’acier comme on le fait pour le cuivre, ce n’est qu’après avoir reproduit le dessin en relief sur la molette mâle qu’on a enlevé, avec le burin, les picots qui devaient disparaître.
- Le dessin de l’éch. 36 ci-après , gravé par M. Charles Ver-dan, graveur à Barcelone, donne une juste idée de toutes les difficultés que l’on est parvenu à surmonter dans la gravure à la molette.
- 36. Gravure à la molette, doubles teintes.
- On a commencé par graver le sujet, après en avoir exactement établi de tous côtés les rapports, sur une petite molette dont on a fait immédiatement le relief ou mâle, que l’on a trempé, pour le transporter de nouveau en creux sur une autre molette de dimensions telles, qu’elle pouvait recevoir deux fois le dessin, tant sur sa hauteur que sur ses côtés. Et en relevant cette seconde molette, on a eu soin de repasser avec exactitude autant de fois qu’il était nécessaire pour obtenir la profondeur désirée. Les parties mates ont été obtenues par des hachure fines et serrées faites au burin , et toujours assez basses pour que la racle ne les touchât pas une fois reproduites sur le cy-it. 19
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- lindre, parce qu’on a remarqué que la couleur des massifs s’imprime toujours plus également et adhère mieux à la gravure par le moyen de hachures fines et de fins picots que lorsque U cavités sont unies. La seconde teinte a été réalisée par des picots et le reste du dessin terminé au burin. Puis, cette molette-mère pouvant présenter quelques inégalités, on en a transporté le dessin sur une autre molette assez grande pour le recevoir cinq fois sur sa circonférence : or, comme il n’existait que deux fois dans la molette-mère, tous les dessins de celle-ci ont du repasser plusieurs fois dans ceux de la seconde, et en faire disparaître les inégalités.
- Ces exemples suffisent, pensons-nous, pour donner une idée de la manière de graver les molettes-matrices du cylindre. Cette gravure achevée, on les trempe comme les poinçons, c’est-à-dire qu’on les place dans des boîtes remplies d'un cément dont la qualité mérite d’autant plus d’attention que le résultat de lagra-vure en dépend presque entièrement Ce cément est composé ordinairement de charbon animal et de semelles calcinées, mêlés d’un peu de prussiate de potasse ou de cyanure de potassium, puis on les chauffe au rouge, on les plonge dans l’eau courante, et l’on en fait revenir la trempe, non pas au violet, mais à la teinte paille , pour conserver une plus grande dureté à l’acier. Après avoir gravé et trempé le cylindre-miniature, on passe au transport de la gravure, en d’autres termes, on relève les molettes. A cet effet, on a une machine dite à relever, qui est une espèce de laminoir où les molettes occupent la place des cylindres. Le graveur place la molette gravée sur les coussinets, et lui en oppose une autre préparée, c’est-à-dire tournée de la dimension voulue et préalablement adoucie par le recuit, et en les faisant tourner l’une contre l’autre sous une forte pression, force celle qui est trempée à s’enfoncer dans celle qui ne l’est pas, et à en refouler la matière dans ses cavités. Par des tours répétés avec une augmentation de pression , on obtient en relief, sur la seconde molette , l’image fidèle de la gravure en creux exécutée
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- sur la première. Alors, après avoir enlevé tous les picots appliqués sur les bords, les aspérités étrangères au dessin, on trempe la molette mâle de la même manière que les molettes-matrices , et le moleteur procède à la gravure du rouleau proprement dit.
- Le tour à graver, ainsi que tous ses accessoires, sont décrits Çjb dans le t. II, p. $00, de l’ouvrage de M. Armaingo. La construction de ce tour repose sur le même principe que celle des tours à graver au poinçon, avec cette différence que les premiers sont beaucoup plus solidement établis. La chapelle, ou porte-poinçon, est remplacée par le porte-molette, mis en communication avec un système de levier qui, au moyen de poids, presse la molette contre le rouleau et fait qu’à mesure que celui-ci tourne, elle en reçoit le mouvement et s’enfonce insensiblement dans sa masse. Après un certain nombre de tours et lorsque la molette ne peut plus s’enfoncer, on l’éloigne du rouleau ; relevant les leviers , on fait avancer le chariot pour commencer une autre rangée, et l’on continue ainsi jusqu’à ce que le rouleau soit complètement gravé. Cette première passe opérée, on procède au polissage pour enlever les bavures. Mais la gravure est loin d’avoir la profondeur voulue; elle n’est que marquée par suite de l’obstacle qu’oppose à la molette, au moment où la partie en relief s’enfonce dans le cuivre, la portion déplacée et refoulée de ce métal, qu’on doit toujours enlever avant de procéder aux passes suivantes. Il est presque inutile d’ajouter qu’à chaque passe il faut rentrer bien exactement la molette dans la première empreinte. Enfin , pour terminer l’opération , on repasse le rouleau à la main quand il présente quelques parties défectueuses, soit par suite du dérangement qu’aura éprouvé la molette à la trempe, soit du bris de quelques détails du sujet sur la molette mâle.
- Lorsqu’on passe des molettes gravées de petits sujets comme dans l’éch. 86, il convient, pour la plus grande régularité dans la gravure , de ne point faire avancer le chariot de toute la
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- longueur de ces molettes, mais seulement de la largeur d’un sujet, en sorte que, s’il se trouve cinq ou six fois sur la l0n gueur, les traits rentreront à plusieurs reprises l’un dans l’&utre comme des roues d’engrenage.
- En comparant la gravure au poinçon à la gravure à la molette , on voit que les traits s’obtiennent du premier coup et à la profondeur voulue avec le poinçon , tandis qu’il faut repas-ser à plusieurs reprises avec la molette. L’explication de cette différence se trouve dans la plus grande saillie du relief du poinçon qui empêche que la refoulure du métal n’en entrave l’action
- Après avoir passé en revue les différentes opérations de la gravure , nous présenterons quelques particularités destinées à les compléter.
- Lorsqu’on veut exécuter un dessin de grande dimension et détaché, on suit les procédés que nous avons exposés, mais on ne le grave que sur un des côtés d’une grande molette, puis, le rerelief obtenu, on l’applique contre le cylindre en cuivre et sur les points où le sujet doit figurer, en donnant simplement au cylindre, au lieu de le faire tourner, un mouvement de va-et-vient assez étendu pour que les deux extrémités de la gravure puissent s’y enfoncer, et de la première empreinte on passe à une autre comme s’il s’agissait de graver au poinçon , ce qui a fait donner dans ce cas à la molette le nom de 'poinçon-molette.
- Un genre qui, après la gravure au guilloché , a eu le plus de succès , est celui des fondus au rouleau. Cette gravure a été exécutée , pour la première fois, en 1826, par M. Huguenin Cornetz, qui était alors attaché à la maison Schlumberger Kœchlin. Voici le procédé qu’il employait d’abord : il gravait un rang de faibles picots sur la circonférence d’une petite molette qu’il plaçait ensuite à l’extrémité d’un levier gradué dans toute sa longueur comme une romaine, et sur lequel on pouvait faire mouvoir un poids. La molette appliquée sur le rouleau et le poids rapproché le plus possible de ce dernier, on faisait tourner le cylindre , et la molette produisait alors une empreinte à
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- peine perceptible. Après cette première rangée, on faisait avancer la molette au moyen du chariot juste de l’épaisseur d’un picot, et en même temps on éloignait le poids d’un certain nombre de degrés pour augmenter la pression, puis en faisant de nouveau tourner le cylindre, on obtenait une nouvelle rangée de picots un peu plus profonde ; on continuait ainsi à juxtaposer les rangées de picots, en augmentant progressivement la pression , jusqu’à ce qu’on eût atteint la plus forte profondeur; à partir de ce point on faisait toujours avancer la molette sur le cylindre, mais en diminuant la pression dans la progression qu’on avait suivie pour l’augmenter, et l’on produisait de cette manière des bandes mates dont les nuances allaient en s’affaiblissant graduellement vers les bords.
- Plus tard ce moyen de gravure a été remplacé par une molette , sur laquelle on grave directement le fondu, qui donne avec plus de régularité des traits infiniment plus prononcés , et permet en outre d’y faire entrer différents sujets et même d’y ménager des blancs.
- Après la gravure des fondus , vint celle des chinés, qui ne produisit pas moins de sensation, mais sans avoir le même succès dès son origine. Les premiers dessins de ce genre sont sortis de la maison Witz Blech, de Cernay, et la découverte doit sans aucun doute en être attribuée à la gravure des fondus; un accident, en produisant l’ébréchure de quelques uns des reliefs d’une molette qui servait à produire ces fondus, aura mis sur la voie Voici comment s’exécute la gravure de l’échantillon 37 ci-après : sur une molette on grave en creux, pour les transporter ensuite en relief, ou un seul trait ha- gg g9. ché b, ou plusieurs traits placés à côté les uns des autres a, fig. 89, puis on grave le rouleau à la manière ordinaire ; mais selon que le moleteur commence toutes ses rangées ou une partie seulement, en partant d’une même ligne parallèle à l’axe du cylindre , ou qu’il s’en écarte plus ou moins, soit en dessus , soit en dessous,
- A iB
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- 31?. Chiné à la molette.
- Mm
- ïil!
- Si?!
- il produit des effets de moire d’autant plus variés qu’on a eu la fig. 90. précaution de couper les lignes plus inégalement. |||jjA On comprend que si ces lignes, au lieu d’être aussi resserrées et aussi déliées que dans les figures ci-dessus, sont plus espacées et plus fortes, et qu’on ^ les fasse expirer aux extrémités, on obtiendra des effets, fig. 90, qui ne seront pas moins beaux.
- On est parvenu à faire ce genre chiné en lignes qui se coupent perpendiculairement l’une l’autre. A cet effet, on grave un chiné ordinaire sur toute la surface du cylindre, en faisant tourner celui-ci, qui entraîne la molette dans son mouvement; quand la gravure est terminée, on rend le rouleau immobile,on fait faire un quart de tour à la molette , et à l’aide du chariot on lui fait parcourir toute la longueur du cylindre, sur lequel on reproduit des traits perpendiculaires aux premiers. Cette passe achevée , on fait tourner le cylindre d’une division, on fait marcher de nouveau la molette dans le sens de la longueur, et l'on continue ainsi jusqu’à ce que le cylindre soit entièrement gravé. On s’explique facilement qu’il est possible d’obtenir de cette manière de petits carreaux réguliers. Que, par exemple, sur une
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- molette on grave quatre lignes parallèles et distantes de quelques millimètres, cette molette pourra servir à graver sur toute la circonférence du rouleau une série de bandes linéaires parallèles entre elles , et si ensuite on rend le rouleau immobile , en faisant subir à la molette un quart de tour, on reproduira en longueur tous les traits qu’on avait tracés sur la circonférence du cylindre , et les carreaux se trouveront parfaitement formés
- Avec des molettes sur lesquelles se trouvent gravées des lignes droites ou en zigzags a, a. fig. 91, 92, on peut graver toute la surface d’un cylindre par un nombre dépassés suffisant.
- La gravure à l’eau-forte a donné naissance à une autre espèce de gravure qu’on appelle fouillis. Cette gravure irrégulière a provoqué dans la gravure du rouleau l'emploi de moyens qui engendrent les formes les plus bizarres , mais se réduisent tous, en dernière analyse , à laisser courir au hasard une ou plusieurs molettes tantôt dans le sens de la circonférence, tantôt dans celui de la longueur du cylindre.
- Q.u’une molette de dix à douze millimètres de longueur, chargée de gravures , soit pressée sur un cylindre , et qu’après chaque tour on ne la laisse avancer que d’un millimètre, sans observer de rapports, les traits, en se confondant les uns dans les autres , donneront un véritable fouillis. On arrive au même résultat en faisant passer plusieurs molettes l’une après l’autre sur le même cylindre. C’est ainsi qu’on a ob- fig. 93 tenu la gravure figure 93, en faisant passer dans le sens de la longueur et de la circonférence du rouleau une molette avec de petits mats, et, pardessus , un petit ramage , picots broyés.
- On voit par la figure 9fi que deux molettes, l’une mille-raies et l’autre picotage irrégulier, appliquées soit sur uhe matrice a , soit directement sur le rouleau, produisent l’effet de la gravure ci-contre,
- fig. 94
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- Enfin, 1 échantillon 38 représente encore une gravure en fouillis qu’on a obtenue au moyen d’une molette gravée sur quelques millimètres de largeur, a, fig. 95. Si l’on fait avancer le chariot, qui la conduit juste de cette largeur, sans prendre aucun autre soin, il se forme des rapports accidentés : tantôt c’est un mat qui tombe à côté d’un blanc , tantôt deux mats ou deux blancs à côté l’un de l’autre.
- 3§« Fouillis à la molette.
- Lorsque les rouleaux sont gravés en dessins mille-raies, picotages , etc. , on peut avoir besoin d’y réserver des parties blanches. Dans ce but, on remplit les cavités de la gravure correspondantes au dessin qu’on désire obtenir, ou par la galvano-pîaslique, comme l’ont fait dans ces dernières années des graveurs anglais , en recouvrant le rouleau de vernis sur les points dont les cavités doivent disparaître, et en le plaçant dans une dissolution cuivrique , dont le cuivre , réduit par un courant galvanique, pénètre dans les cavités de la gravure et s’allie au métal, en sorte qu’il ne reste plus qu’à nettoyer le cylindre et à le brunir pour en rendre la surface bien unie ; ou par un autre procédé, qui consiste à couler du zinc au moyen d’un fer à souder, sur les cavités de la gravure, puis à plonger le cy-
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- lindre dans l’acide nitrique étendu, qui attaque toujours le zinc, après avoir préalablement réservé au vernis toutes les parties dans lesquelles on veut que ce métal reste allié au cuivre ; mais dans ce cas, pour s’opposer à l’action que l’acide nitrique exercerait sur le cuivre comme sur le zinc, on doit souder à l’une #des extrémités du cylindre une lame de plomb qui, plus électro-positif que le premier de ces métaux et moins que le second, prévient l’oxidation du cuivre sans mettre obstacle à celle du zinc.
- Un bon vernis à la laque, ou mieux encore au copal, dispense de recourir à ces divers procédés, en offrant un moyen sûr de réserver directement les traits les plus déliés d’une gravure.
- Comme tout ce que nous avons dit de la gravure en creux s’applique à la gravure sur pierre, dont on se sert pour l’impression des mouchoirs, nous 11e dirons que quelques mots de cette dernière.
- Lorsqu’une pierre a été taillée aux dimensions voulues et une de ses faces convenablement polie, -on dessine sur celle-ci, au vernis, les parties qui doivent rester blanches, et l’on attaque les autres à l’acide pour les graver en creux. On grave aussi directement sur la pierre avec un diamant, et l’on imprègne d’huile les parties non gravées, pour prévenir l’adhérence et l’effet corrosif des couleurs, qu’il est toujours possible alors de racler. On substituerait avec avantage aux pierres des lames de verre d’une certaine épaisseur, sur lesquelles on tracerait les différents dessins au diamant ou au fluoride hydrique.
- A toutes ces considérations sur la gravure en creux, nous devons en ajouter une autre qui ne nous paraît pas d’une moindre importance : c’est que le fabricant doit apporter la plus grande attention à la profondeur de sa gravure, et la régler selon la nature des étoffes qu’il imprime, celle de la couleur dont il se sert et la manière dont cette couleur se travaille. Ce serait vainement, en effet, qu’après avoir imprimé une étoffe de coton, 011 demanderait à la même gravure la même impres-
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- sion sur une étoffe de laine, qui exige deux ou trois fois plus de couleur ; ce serait en vain aussi qu’on tenterait d’obtenir la même nuance sur la même étoffe et avec la même gravure, au moyen d’un mordant d’alumine épaissi, dans un cas, à la gomme, et dans un autre, à l’amidon, le mordant épaissi à l’amidon exigeant toujours une gravure plus fine et moins nourrie,. parce qu’il donne constamment des teintes plus fortes que lorsqu’il est épaissi à la gomme. C’est pour n’avoir pas tenu compte de ces données de l’expérience que des manufacturiers ont cru longtemps qu’il était impossible d’obtenir , avec l’amidon , des nuances aussi intenses et aussi tendres qu’avec la gomme, et ont grevé par suite leur fabrication d’inutiles dépenses.
- MACHINES A IMPRIMER.
- Les deux' genres de gravure que nous venons d’examiner correspondent à deux modes généraux d’impression : l’impression en relief et l’impression en creux ou en taille-douce. Il y a encore quelques autres moyens de réaliser sur les tissus des dessins plus ou moins réguliers ; nous en ferons le sujet d’un appendice à cet article.
- De T impression en relief.
- § 501. O11 ne peut, avons-nous dit précédemment, assigner l’époque à laquelle ce premier genre d’impression a remplacé la peinture sur toile des Orientaux ; mais comme les Grecs , déjà avant la prise de Constantinople, imprimaient des images àl’aide de planches gravées en relief, et que de temps immémorial 'les Indiens appliquaient, au moyen de tubes appropriés, des réserves à la cire sur les toiles qu’ils teignaient ensuite à l’indigo, il est naturel de penser que c’est à la connaissance de ces opérations qu’on doit l’usage des blocs dont on se sert aujourd’hui, et qui ont fait disparaître le pinceau, qu’on employait encore au commencement de ce siècle pour enluminer certains genres
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- d’impression. Jusqu’à cette époque, l’impression en relief, sans avoir reçu aucune modification dans son essence, s’était cependant peu à peu améliorée par suite, tant du perfectionnement de la gravure que d’une connaissance plus intime des couleurs qui l’avaient rendue à la fois plus correcte et plus facile. De 1801 à 1803, des essais furent faits dans les environs de Paris pour rendre continue, par l’emploi de rouleaux gravés en relief, l’impression à la planche, comme on venait de rendre continue l’impression en taille-douce, par l’emploi de rouleaux métalliques gravés en creux ; mais ces tentatives n’obtinrent d’abord presque aucun succès, par la raison qu’un rouleau gravé en relief, sur lequel on dépose de la couleur, ne transmettant cette dernière au tissu qu’en produisant sur elle l’effet d’un laminoir qui l’étend plus ou moins, ne pouvait servir qu’à l’impression de figures grossières et sans contours réguliers.
- Le premier changement important qu’on introduisit dans l’impression à la planche en relief, fut de substituer aux petites planches, dont les dimensions exigent des rapports dans le sens de la longueur et de la largeur des pièces, des planches assez longues pour recouvrir l’étoffe dans toute sa largeur, et qui, se mouvant mécaniquement avec la plus grande régularité , assuraient aux rapports la plus grande exactitude; mais bientôt le développement donné à l’emploi des couleurs d application fit de jour en jour plus vivement sentir la nécessité de trouver des machines qui permissent d’imprimer plusieurs couleurs à la fois. Le résultat des nombreuses recherches entreprises dans ce but, tant en France et en Angleterre qu’en Allemagne , fut l’invention d’une de ces machines qui font le plus grand honneur au génie de l’homme , la perrotine découverte en 1834, qui porte le nom de son auteur , et qui a donné au fabricant le pouvoir d’imprimer les dessins les plus difficiles avec toute la précision et 1 économie possibles.
- D’après cet aperçu, les procédés d’impression en relief se réduisent :
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- DE LA FABRICATION EN GENERAL.
- 1° À l'impression en relief exécutée à la main.
- ta. D’une manière intermittente comme
- S dans l'impression à la main ( perro-tine et toutes machines qui s’en rapprochent).
- J b. D’une manière continue ou au rcu-leau(plombine, métier à surface,etc.).
- Machines à imprimer à la main.
- On imprime à la main en prenant, à l’aide d’une planche gravée en relief, la couleur préalablement étendue sur un châssis, pour en recouvrir l’étoffe, qu’on suspend ensuite à l’air, dans le but de laisser à la couleur le temps de se dessécher et d’éviter ainsi des rappliquages qui occasionneraient des taches ou maculations sur les parties blanches. Trois choses sont donc à examiner dans cette impression :
- 1° La table où elle s’exécute et tous les accessoires qui doivent en assurer la bonne exécution ;
- 2° Le réservoir ou baquet, dans lequel la couleur doit être étendue convenablement pour être transmise à la planche ;
- 3° Enfin ï ap>pareil de suspension qui doit assurer la prompte dessiccation des toiles recouvertes de couleur.
- La fig. 96 offre la réunion de ces trois parties : t, t re-
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- présentent le plan et une coupe verticale de la table à imprimer, portant, à l’une de ses extrémités et au point n, une bobine a, sur laquelle est enroulée la toile destinée à recevoir l'impression; à l’autre, mais à une certaine élévation, les roulettes ii, qui servent à la suspension de l’étoffe, et enfin , au-dessous, le chevalet g, sur lequel cette même étoffe est pliée après son entière dessiccation. S est le baquet où s’étend la couleur, et m, l’écuelle qui renferme la provision nécessaire au travail de la journée.
- Etudions ces diverses parties dans leurs détails, pour pouvoir les envisager ensuite dans leur ensemble.
- § 502. Table et ses accessoires. La table à imprimer se compose ordinairement d’un madrier en bois de chêne ou de hêtre, de 2m à 2" 50 de longueur, de 0'"55 à 0"’60 de largeur et de 0",42 à 0',15 d’épaisseur. Ce madrier est monté à la hauteur d’environ 1"' sur h à 6 pieds de 0,10 de côtés pour plus de solidité. La surface en est dressée au rabot avec une extrême exactitude, puis recouverte de deux tapis fins et bien unis de drap ou de serge, que l’on tend avec soin en en fixant les extrémités aux deux bouts delà table, de manière à pouvoir les ôter sans peine, soit pour les nettoyer quand ils sont chargés de couleur, soit pour planer la table quand le bois a travaillé.
- Cette table porte, à l’une de ses extrémités, une bobine chargée de l'étoffe à imprimer, que l’ouvrier déroule, au fur et à mesure qu’il avance dans son travail, pour l’étaler sur les tapis et l’y recouvrir de couleur par un nombre suffisant de coups de planche.
- Dans la figure que nous avons donnée , la pièce passe directement et sans tension sur les roulettes qui doivent la maintenir en suspension ; mais si l’on avait à imprimer des dessins délicats sur des tissus sujets à se tirailler en divers sens, il faudrait que les pièces fussent tendues, tantôt seulement dans le sens de leur longueur, tantôt dans les deux sens. Dans le premier cas, c’est ou un rouleau situé à l’extrémité opposée de la
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- table qui détermine la tension , oubien un râteau ou peigne fixé à chaque extrémité et portant une rangée d’aiguilles qui entrent dans l’étoffe ; dans le second cas , ce sont des aiguilles placées le long de chacun des côtés de la table, et sur lesquelles on fixe l’étoffe par ses lisières.
- Quand il s’agit d’imprimer des dessins d’une délicatesse extrême , comme certains dessins cachemire , sur des étoffes de laine et demi-laine surtout, on est contraint d’avoir recours à d’autres artifices. Sont-ce des châles, par exemple! On est oDligé de tendre le tissu dans tous les sens au moyen de cadres en bois, de la même manière qu’on tend une étoffe sur un métier à broder à la main. Sont-ce des étoffes pour robe! On les étend, dans leur largeur et dans leur longueur, sur une table de la longueur ordinaire d’une robe (12 à 15m), et l’on y applique consécutivement , sans en changer la position, toutes les couleurs dont se compose le dessin.
- | 503. Baquet ou réservoir à couleurs. Les baquets dont on se sert communément en France pour étendre les couleurs ne sont rien que des caisses formées de 5 fortes planches, dont/l pour les côtés et 1 pour le fond , solidement liées ensemble. La hauteur de ces baquets est d’environ 15 à 16 centimètres. Quant aux dimensions des côtés, elles sont réglées par celles des planches à imprimer; mais, en général, on leur donne 7 à 8 centimètres de plus en carré que n’en ont les plus grandes planches gravées [56 à 60). Ces baquets sont remplis à moitié d'une solution concentrée de gomme du pays ou de mucilage de farine de lin, qu’on appelle fausse couleur dans les fabriques. On dépose sur cette masse liquide et visqueuse une toile cirée, tendue et clouée sur les bords d’un châssis en bois, qui s’encadre exactement dans l’intérieur du baquet, et quiapour objet de prévenir le mélange de la fausse couleur avec la couleur proprement dite. Cette toile cirée est recouverte d’un drap fin, rasé, tendu et fixé sur un second châssis , qui doit à son tour s’encadrer dans le premier. C’est sur ce drap qu’un enfant, le tireur, muni d’une
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- longue brosse plate, formée de soies de cochon, étend la couleur le plus uniformément possible et dans tous les sens.
- En Angleterre, ce baquet carré est remplacé par un baquet cylindrique , d’une construction beaucoup plus économique, puisqu’il suffit de prendre de vieux tonneaux et de les scier par la moitié pour en faire, en les renversant sur leur fond, des baquets qui remplissent le même rôle que les caisses , toujours plus sujettes à se disjoindre. La toile cirée et le drap, au lieu d’être étendus sur des châssis carrés , le sont sur des cerceaux minces semblables à des couvercles de boîtes . Le tireur fait alors manœuvrer sa brosse circulairement et dans tous les sens.
- A ces dispositions fondamentales on en ajoute d’autres qui ont été nécessitées :
- a. Par la nature des couleurs, dont les unes sont sujettes à s’altérer au contact de l’air et les autres doivent être imprimées à une certaine température ;
- b. Par l’obligation d’imprimer plusieurs couleurs simultanément avec la même planche.
- a. Il est des couleurs, comme certains bleus d’application so lide , auxquelles l’oxigène fait éprouver de promptes modifications dès qu’elles sont exposées à l’air : or, comme l’opération du tireur, qui étend sans cesse sur son châssis une pareille couleur, ne tend à rien moins qu’à favoriser cette oxidation, c’est pour prévenir des altérations de ce genre que les fabricants anglais ont adopté l’emploi de châssis dans lesquels la couleur même à imprimer remplit le rôle de fausse couleur. Qu'on se repré-
- Fig. 97.
- sente une petite caisse en cuivre a, de 7 à 8 centimètres de hau-
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- teur, ayant des côtés en rapport avec ceux de la planche qui doit servir à imprimer la couleur ; cette caisse, en communication par sa partie inférieure , à 1 aide d’un tube muni d’un robinet r, avec un réservoir à couleur fermé , b, est coupée en deux, dans le sens de sa hauteur, par une étamine t. Quand on ouvre le robinet, la couleur qui arrive sous le châssis presse contre le canevas et tend à le traverser avec d’autant plus de force que la colonne dans le réservoir b est plus élevée ; le robinet, qu’on peut ouvrir et fermer à volonté, sert donc à régler l’écoulement de cette couleur.
- Lorsque des couleurs exigent, pour être imprimées convenablement, une chaleur supérieure à la température moyenne de l’air ambiant, comme certaines réserves grasses ou résineuses, certaines couleurs enlevages, les baquets doivent être disposés de telle sorte que les planches puissent en être chauffées et le bain de fausse couleur et la couleur même élevés au degré de chaleur nécessaire. La fig. 98 représente une disposition de ce genre.
- Fig. 98.
- Les deux baquets ordinaires Bft g, bmg, affectés au service de deux tables d’impression , et les deux petits bassins d, d, dans lesquels se trouve la couleur, plongent dans une caisse en cuivre a, chauffée à la vapeur. Les deux tubes t x, u, servent, l’un à l’introduction dans la caisse en cuivre de la vapeur qui arrive du générateur, l’autre à son expulsion et à celle de l’eau de condensation ; une plaque en cuivre c, qui sépare les deux baquets
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- et reçoit aussi l’influence de la vapeur, offre à l’imprimeur un moyen de chauffer sa planche quand il le croit nécessaire.
- A cette disposition on en pourrait substituer une beaucoup plus simple : on n’aurait qu’à placer le baquet à réservoir fig. 97 dans une petite caissette pleine d’eau, d’huile ou d’une dissolution de chlorure zincique, et chauffée par une lampe dont on réglerait la combustion pour maintenir la couleur à un degré de température constant.
- § 504. Jusqu’ici, en parlant des baquets où les couleurs sont étendues pour être imprimées, nous n’avons envisagé que l’impression d’une couleur unique ; mais le fabricant ayant intérêt à imprimer simultanément plusieurs nuances d’une même couleur ou plusieurs couleurs distinctes , beaucoup d’efforts ont été faits pour arriver à ce but, que les Anglais ont atteint les premiers _ Toutes les fois que les dessins se composent de formes espacées, et que -les lignes ou contours de couleurs diverses ne sont pas trop rapprochés, on emploie un baquet à compartiments, dont MM. H. Schlumberger et Scheurer ont donné le dessin (Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, t. XI, p. 43), et dont nous reproduisons ici le plan et la coupe perpendiculaire (Planche 11).
- Pour en comprendre la construction , il faut se représenter une série de petits châssis, dans le genre de ceux de la fig. 1, placés les uns à côté des autres en nombre égal à celui des nuances dont on veut charger la planche , et communiquant avec autant de réservoirs qu’il y a de couleurs différentes. Supposons, par exemple, qu’il s’agisse d’imprimer simultanément 4 couleurs : du vert, du rose, du jaune et du violet; 4 réservoirs a , a, a, a [fig. 1) formant les côtés du châssis , renferment une colonne de ces différentes couleurs , assez élevée pour exercer, par son poids, une pression de bas en haut sur les mailles de ce châssis et les imbiber. Dans cette figure , ces réservoirs communiquent, par des tubes en plomb b, b, b, b, avec des compartiments inférieurs c, c, c, où la couleur se rend
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- d’abord pour se distribuer ensuite par un nombre convenable de tubes d, d, d, d, sous l'étamine ou canevas du châssis dont les compartiments e , e , e , quant à leur nombre et à leur forme, sont déterminés par la nature du dessin que l’on imprime. Tous ces compartiments sont séparés par des bandes du même métal que le châssis, qui est ordinairement en plomb, sur lesquelles on applique l’étamine ou canevas , en l’y fixant, pour prévenir le mélange des différentes couleurs, par des lames également métalliques, qui sont clouées et mastiquées en dessus et en dessous. Quelquefois on remplace le châssis en plomb par un appareil en bois , d’une construction moins coûteuse, mais aussi moins durable. Il va sans dire que la couleur doit toujours être assez liquide pour couler librement par les tubes, ainsi qu’au travers des mailles de l’étamine du châssis , qui doivent toujours avoir assez de largeur pour en faciliter le trajet. Il est encore indispensable que, dans les réservoirs a, a, a, a, la couleur soit sensiblement au niveau du châssis et se borne ainsi à F humecter : si elle dépassait ce niveau en plus ou en moins, il y aurait, dans lepremier cas, une surabondance de couleur qui engorgerait la gravure, et dans le second, une pénurie qui ne permettrait à la planche de s’imbiber ni complètement ni uniformément.
- Les fabricants auxquels nous empruntons ces détails font avec raison observer qu’on peut se dispenser d’employer ces réservoirs intermédiaires c, c, c, qui compliquent inutilement l’appareil, et proposent un arrangement tel que le représente la planche enluminée , jîg. 2. Les réservoirs a, a, a, a sont conservés et munis à leur partie inférieure de tubes en caoutchouc b, b, b, qu’on peut diriger dans tous les sens, et qui, correspondant à ceux des compartiments , y font arriver directement la couleur qu’ils doivent transmettre à la planche. Ces tubes, garnis de robinets, restent invariablement fixés aux réservoirs a , a , a, a, et s’adaptent, à furet à mesure des besoins , à autant de compartiments que le comporte le dessin.
- § 505. Quand les figures d’un dessin, au lieu d’être espacées,
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- sont, au contraire, sous formes de rayons ou bandes rapportés parallèlement, on fournit la couleur à la planche avec moins de peine et plus d’économie. Si l’on veut, par exemple, imprimer six couleurs, on place chacune d’elles daps un des compartiments d’une petite caisse, où on les prend à l’aide d’un rouleau r,^. 99,
- Fig. 99.
- R
- sur lequel on a creusé des échancrures qui correspondent aux cloisons de ces compartiments, et avec lequel on les transporte sur le châssis ; toutefois, pour que les couleurs ne se confondent pas à mesure qu’on fait mouvoir le cylindre pour les étendre sur le châssis , ce qui arriverait immanquablement à la longue, on colle à la surface de ce dernier des bandes de carton imperméable a, b, c, d, e, d’une largeur égale à la distance qui doit séparer les deux couleurs et dans une position telle, que, correspondant aux échancrures du rouleau, elles n’en entravent pas le mouvement, et, en formant relief, empêchent les couleurs, refoulées par ce mouvement, de se confondre.
- Quand ces artifices, qui aboutissent tous en définitive à transmettre simultanément à la pi anche plusieurs couleurs ou nuances distinctes , auront reçu les perfectionnements dont ils sont susceptibles , ils offriront aux fabricants tous les avantages qui résultent d’une réduction considérable dans les frais de gravure et de main-d’œuvre et de l’exactitude de l’exécution ; on doit donc chercher tous les moyens de rapprocher, autant que possible, les couleurs sans qu’elles se confondent.
- § 506. Que si, au lieu d’avoir à prévenir la confusion des couleurs, on la recherche pour en produire des dégradations,
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- toute difficulté disparaît, et cependant ce n’est que par une espèce de hasard qu’on est arrivé au procédé à suivre pour obtenir des fondus ou ombrés.
- En 1818-19, M. Spoerlin, de Vienne, qui était parvenu à produire sur papier, au pinceau d’abord, puis à la brosse, qu’il imprégnait de diverses couleurs dans une caisse à compartiments , plusieurs nuances qui se fondaient l’une dans l’autre comme celles de l’arc-en-ciel, essaya, de concert avec M. Doll-fus-Ausset, de réaliser sur étoffe les effets de fondus que produisait déjà sur le papier la maison Zuber, de Rixheim. Au début de leurs expériences, ces deux fabricants s’efforcèrent de reproduire directement sur calicot, avec la brosse , des bandes de couleurs fondues ; mais ils désespéraient d’atteindre le but qu’ils s’étaient proposé, lorsque, après une longue et laborieuse journée d’essais, un contre-maître imprimeur, nommé Zaeslin , qui les aidait dans leurs travaux, leur adressa l’invitation , à laquelle ils se rendirent aussitôt, de déposer leurs couleurs sur le châssis pour les reprendre avec la planche, et telle est l’origine des fondus dans l’impression des tissus. Depuis lors on a modifié le procédé, mais on n’a rien changé au principe.
- Voici comment on les exécutait d’abord :
- Dans une petite caisse en fer-blanc ou en cuivre étamé, dont le fond était rétréci d’un côté seulement fig. 100, coupe V, on établissait, au moyen de lames de même métal, les compartiments i, k , l , m , dans chacun desquels on introduisait la couleur à déposer sur le châssis ; alors le tireur plongeait dans cette caisse jusqu’en c, d, une brosse a, b , d’une longueur égale à celle de la caisse, mais divisée en sections f, f, f, correspondantes à celles des compartiments et formant en quelque sorte un assemblage de pinceaux, et, en la retirant, la pressait sur le côté incliné pour la décharger de l’excédant de couleur qui retombait naturellement
- Fig. 100.
- A. E
- l I
- k K
- L 1/
- in m:
- U G
- V
- j a _______________fi ^
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- dans le réservoir, puis la promenait, par un mouvement de va-et-vient , sur un châssis a , b , c,d, de dimensions tout-à-fait semblables à celles de là caisse à compartiments, et y déposait ainsi, en i, k, 1, m, des traînées de couleur en relation avec l’épaisseur des divisions de la brosse ; mais pour que celle-ci ne pressât pas trop sur le châssis, ce qui aurait donné lieu à de trop fortes confusions de nuances, on la faisait reposer sur les bords de ce châssis par deux petites saillies a, b.
- Mais ce procédé n’offrant pas la facilité de déposer un grand nombre de couleurs sur un point limité, attendu que les pinceaux de la brosse devaient toujours être à une certaine distance l’un de l’autre pour ne pas se confondre, et ne permettaient pas d’appliquer constamment la même quantité de couleur sur des points déterminés du châssis, la brosse fut mise de côté et remplacée par l’appareil fig. 101, 102, 103, dont on se sert généralement aujourd’hui.
- a est une caisse destinée à recevoir les diverses couleurs qu’on
- Fig. 101. .
- c r
- veut déposer sur le châssis et qui se trouvent séparées par des cloisons c, c, dont le nombre augmente avec celui de ces couleurs. Jusque dans ces derniers temps, ces caisses étaient en cuivre étamé ou en fer-blanc ; par suite du grand développement donné au genre fondu et des dépenses qu’occasionnait au fabricant la nécessité de les changer en même temps que le dessin à imprimer, on y a substitué des caisses en bois ou en plâtre, mais ouvertes aux deux extrémités, et dont les compartiments sont formés par des lames de verre.
- Lorsque ces caisses sont en bois, on y trace à la scie sur les
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- côtes et au fond, des rainures parallèles dans lesquelles on glisse ces lames de verre , taillées aux dimensions voulues et bordées de trois côtés d’un mastic formé de colophane, d’un peu de cire et de térébenthine, qui sert à les fixer dans les rainures et à prévenir toute communication entre les compartiments. Dans cette circonstance, on opère absolument comme s’il s’agissait d’établir des piles à auges. (Voyez les divers traités de physique.)
- Veut-on une caissette en plâtre 1 Au moyen de 2 règles ajustées sur une surface plane, on forme un cadre des dimensions qu’on désire avoir ; on gâche alors du plâtre assez clair pour être coulé et donner la couche uniforme qui doit constituer le fond dans lequel les lames seront engagées sur toute leur longueur, puis de plus épais qu’on taille et façonne avec un instrument tranchant avant qu’il soit totalement durci pour former les 2 côtés de la caisse. Ce moulage achevé , après avoir fait sécher le plâtre dans une étuve, on y applique, avec un pinceau et pendant qu’il est encore chaud, un nombre suffisant de couches d’huile d^lin siccative ou de mastic fait de colophane et de cette même huile, pour le rendre inattaquable aux couleurs qu’on est dans le cas d’introduire dans la caisse , et pour mastiquer, de manière à intercepter toute communication entre les compartiments, les lames de verre qu’on y dépose pour les constituer comme dans la caisse précédente.
- Dans la/y. 102, b est une planche sur laquelle sont ajustés Fig -102.
- et tendus, comme les cordes d’un violon, des fils./,/, de cuivre, de lin, de chanvre, de coton ou de laine, dont le nombre correspond à celui des diverses couleurs qu’ils doivent prendre dans a caisse à compartiments. Quand ces fils sont en métal, ils
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- doivent être d’une grosseur en rapport avec la quantité de couleur qu'on veut déposer sur un point donné ; on les recourbe à angle droit à leurs deux extrémités, et l’on en cloue les deux bouts aux côjtés de la planche, pour qu’ils puissent plonger jusqu’au fond de la caisse à compartiments. Quand ils sont de lin, de chanvre, de coton ou de laine, on fixe sur les deux côtés opposés de la planche et dans le sens de la largeur, de petites bandes de cuivre d’égale longueur, pour tendre les fils que l’on fait passer de l’une à l’autre. Lorsqu’on veut déposer des quantités inégales de couleurs sur des points déterminés du châssis, il suffit d’employer des fils de chanvre à côté de fils de lin, des fils de coton à côté de fils de laine, des fils tordus à côté d’autres qui ne le sont pas , des fils isolés à côté de plusieurs fils assemblés. Mais au lieu d’étendre ces couleurs sur*le châssis avec üne brosse, comme on le faisait et comme on le fait encore dans quelques établissements, il vaut mieux se servir d’un rouleau. Nous devons ajouter qu’à ces différents fils des fabricants ont substitué avec succès des lames de cuivre taillées carrément.
- Dans la ficj. 103, d représente un baquet ordinaire sur le
- Fig. 103.
- châssis duquel s’enchâsse exactement le rouleau g, qui recevant du tireur, par les deux bras situés à ses extrémités, un mouvement de va-et-vient entre deux règles parallèles, n’éprouve aucune déviation dans sa marche, et, par conséquent, laisse les couleurs déposées sur le châssis à la place où les ont mises les fils. On peut même, quand les couleurs sont très multipliées, échancrer légèrement le rouleau sur les parties de sa circonférence correspondantes aux points de jonction de ces couleurs, afin que leur
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- juxtaposition ne s’établisse qu’en raison de la légère pression qu’exerce le cylindre dans le sens de sa longueur. On comprend qu’avec une semblable disposition il est facile de multiplier les couleurs dans un espace assez limité et qu’on trouve, dans l’emploi de fils d’espèces et de grosseurs diverses, la facilité de dégrader une nuance tout aussi bien qu’au pinceau, si ce n’est mieux. Dans les fabriques où on la conserve encore , la brosse doit frotter, par une de ses extrémités carrément coupées, contre une des parois bien droites du châssis , pour que le tireur, en la faisant mouvoir, étende la couleur dans la direction où elle a été déposée sur ce châssis.
- Indépendamment de ces procédés, par lesquels on forme les fondus en étendant en lignes droites des couleurs sur un châssis, il en «est d’autres dont on se sert pour les y appliquer en lignes plus ou moins courbes ou déviant, de la droite.
- Fig. 104.
- S’il s’agit de les appliquer en festons, on construit une caisse à compartiments, dont les cloisons recourbées i, i, z, i, z, représentent, par leur sinuosités, celles du feston ; ces cloisons sont faites alors d’une matière flexible, ordinairement de carton fin, bituminé, auquel on donne toutes les courbures désirables, et que l’on mastique dans la caissette comme il a été dit plus haut.
- Pour prendre de la couleur dans ces compartiments, on ajuste au fournisseur des fils métalliques d’une courbure correspondante,^. 105, au moyen desquels le tireur dépose sur le
- Fig. '! 05.
- châssis des couches colorées qui en présentent toutes les sinuo-
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- sites. Pour conserver ces couches, on les étend par un mouvement de va-et-vient avec une brosse, qui, au lieu de frotter
- Fig. 106.
- e-
- n nii7^njTn]ïïriïïïj)iüi^g^^j|iHq^^^^^|iNm^mïïTmggTïïTnmm^^^rr
- par l’une de ses extrémités contre l’un des cotés du châssis, comme dans la fig. 106, frotte et oscille dans le sens de sa longueur contre une règle en bois découpée e, qui reproduit toutes les ondulations des fils sur le châssis.
- On peut faire de ce principe une foule d’applications diverses. Ainsi, par exemple, rien n’est plus facile que de faire des compartiments constituant une série de cercles concentriques, dans lesquels on prend les couleurs avec des cercles en fil métallique , également concentriques, pour les déposer et les étendre sur le châssis, en faisant tourner circulairementla brosse autour d’un axe ou point central. On peut encore souder les uns aux autres de petits réservoirs, portant des becs terminés à leur extrémité en forme de sifflets, et garnis d’une étamine qui laisse suinter peu à peu la couleur promenée sur le châssis dans une direction déterminée par un moyen quelconque; cette boîte à compartiments permet de produire des fondus dans tous les sens possibles.
- Nous pourrions nous étendre bien davantage sur tous les moyens empWés ou qui pourraient l’être pour appliquer simultanément plusieurs couleurs avec la même planche; mais nous nous réservons de signaler les particularités qui se rattachent à ce sujet quand nous traiterons de la fabrication des genres. Nous présentons ici deux échantillons ( 39, /i0 ) , sur l’un desquels on a imprimé en fondu les couleurs de l’arc-en-ciel, et sur l’autre, une couleur fondue par les moyens décrits p. 312 à 313.
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- 39. Couleurs primitives imprimées en fondu.
- 40. ('(HiRni' fondue imprimée en festons.
- Pour terminer ce que nous avons à dire du châssis ou réservoir à couleur, nous devons parler de deux dispositions mécaniques qu’on y applique aujourd’hui.
- § 507. La première a été provoquée par l’emploi des longues tables à impression, sur lesquelles les pièces sont étendues, comme nous l’avons vu, pour recevoir immédiatement toutes les couleurs qui leur sont destinées , sans changer de position. On conçoit combien il importait que le baquet à couleur ne restât pas à l’extrémité de ces longues tables : outre la perte de temps,
- /
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- l’imprimeur était exposé à voir la couleur contracter, avant d’arriver sur l’étoffe, un commencement de dessiccation qui pouvait l’empêcher d’y adhérer aussi facilement; on a donc eu l’idée de rendre ces baquets mobiles, et à cet effet on place, le long d’un des côtés des tables, deux rails en fer, sur lesquels le tireur les fait avancer à proximité de l’imprimeur à mesure que celui-ci avance dans l’impression.
- § 508. La seconde disposition, toute différente de la précédente, a pour objet de remplir mécaniquement le rôle du tireur, en étendant la couleur sur le châssis ; de là le nom de tireur mécanique, donné aux deux appareils que nous allons faire connaître.
- Dans l’un, qui a été inventé par les Anglais et dont MM. Schlumberger et Scheurer ont donné la description [Bull, de la Société ind. de Mulhouse, t. XI), le baquet ordinaire, rempli de fausse couleur, au lieu d’être recouvert, à sa partie supérieure, d’un drap immobile, libre ou encadré (châssis), l’est, au contraire, d’un drap mobile et sans fin, qui circule d’un ré-servôir ou baquet à couleur , situé au-dessous de la caisse à fausse couleur, à la surface de cette dernière, où l’imprimeur applique sa planche fig. 107. g est une caisse en fer-blanc, de
- Fig. \ 07.
- 8 à 10 centimètres de hauteur et de 50 à 60 centimètres de côtés, remplie de gomme ou fausse couleur, et recouverte hermétiquement par une toile cirée, de manière à présenter une surface légèrement bombée, De cette surface on fait passer au-
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- dessous de la table qui sert de support à la caisse, par un mouvement régulier imprimé au cylindre s, un drap sans fin d, tendu par plusieurs autres cylindres r , r , r , qui, arrivant au-dessus d’un cylindre fournisseur b, s’y charge de couleur sur l’une de ses faces et, après en avoir abandonné l’excès à la racle m, revient à la surface du baquet, où l’imprimeur pose sa planche pour enlever la quantité de couleur qui lui est nécessaire.
- On reproche à ce tireur d’être d’une construction dispendieuse. Il exige, en effet, une grande transmission de mouvement , beaucoup de drap , et offre en outre de graves inconvénients dans l’impression des couleurs qui s’altèrent au contact de l’air, telles que les préparations ferrugineuses, etc.
- L’autre tireur mécanique, dû à MM. Dupasquier Roulet, de Neuchâtel (Suisse), n’a pas ces inconvénients , et présente, dans le plus grand nombre des cas, sur toutes les autres manières d’étendre les couleurs, des avantages qui doivent nécessairement, tôt ou tard , en généraliser l’emploi.
- Cet appareil, vraiment digne du nom qu’on lui donne, ne fait en définitive qu’étendre la couleur, en remplaçant la brosse et la main de l’ouvrier par deux règles en bois, qu’un mouvement mécanique des plus simples promène à la surface du châssis, et qui donnent à celui-ci la quantité de couleur nécessaire.
- Les deux fig. 108, 109, peuvent en donner une juste idée :
- Fig t08.
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- Fig-. 109.
- l’une en représente la coupe horizontale, l’autre la coupe verti-
- cale.
- a est un bâtis en bois, qui sert de support à la caisse ou baquet à couleur b.
- a, a est le châssis en bois qui porte le drap sur lequel la couleur doit être étendue.
- b, b est un autre châssis destiné à circonscrire la portion de drap sur laquelle la couleur doit s’étendre.
- e est une traverse horizontale en bois, servant de support aux deux lames articulées, d, cl, qui font office de règles. Ces règles sont formées chacune de deux pièces réunies par des charnières, de telle sorte que, pendant qu’elles frottent sur le châssis, celle qui se trouve en avant du mouvement, cédant au frottement sur le matelas de fausse couleur, s’incline et contribue ainsi à la répartition de la couleur , tandis que l’autre, qui suit le mouvement, reste dans une position verticale.
- g, g sont des montants verticaux , liés à la traverse e , qui passent dans deux mortaises ménagées dans cette traverse /?, où deux vis les maintiennent dans une position déterminée qu’on peut faire varier à volonté, suivant la pression que les règles d, d, doivent exercer sur le drap pour étendre la couleur.
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- c, c sont les côtés d’un chariot réunis par des traverses horizontales, portant à leurs extrémités deux galets en fonte h, h, fixés dans des mortaises et roulant sur deux bandes de fer légèrement convexes, situées sur chacun des côtés longitudinaux de la caisse b.
- p est un contre-poids suspendu par une petite corde à la partie postérieure du chariot. Son rôle est de ramener constamment le chariot à sa première place , lorsque, par un effort inverse, il a été entraîné à l’autre extrémité du châssis.
- k est une poulie à gorge et en bois, reliée au chariot par deux petites cordes qui passent sur les poulies i, i, i, i.
- ?2, n, autres poulies à gorge et en fonte, fixées sur l’arbre de la poulie k, sur lesquelles s’appuient les cordes qui partent du contre-poids p et de la poulie k.
- d, une table d’impression.
- I, une poulie dont l’arbre est fixé au pied de la table d, reliée à la poulie k par une corde, dont l’une des extrémités est fixée sur un point de la circonférence de la première, tandis que l’autre enveloppe de plusieurs tours la poulie ?2.
- c, pédale, placée à la partie inférieure de la table à imprimer, réunie à la poulie l par une corde qui enveloppe en partie cette dernière.
- f, petite table en bois, sur laquelle est placée l’écuelle de la couleur destinée à alimenter la machine.
- q, bobine en bois sur laquelle est enroulée la pièce à imprimer.
- Le mouvement de cette machine est facile à comprendre. Q.uand on a mis de la couleur entre les deux lames articulées, au moment où l’imprimeur vient de donner son coup de planche sur l’étoffe et qu’il retourne au baquet ou réservoir, il presse avec le pied sur la pédale c, qui, agissant sur la poulie /, met la poulie k en mouvement et attire le chariot d’une extrémité du châssis à l’autre; aussitôt le pied de l’imprimeur relevé, le contre-poids p, aidé d’un autre contre-poids fixé à la pédale,
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- réagit d’une manière inverse et ramène à sa première place le chariot, qui, en se promenant une seconde fois sur le châssis, y étend la couleur.
- Le contre-poids de la pédale est situé sur le côté opposé à celui où l’ouvrier pose le pied, et sa mobilité sur le levier qui le supporte donne le moyen de régler le mouvement de cette pédale de telle sorte qu’elle puisse se relever brusquement sans que l’ouvrier ait besoin de faire, pour la baisser, un effort trop fatigant.
- Ces dispositions convenables pour l’impression d’une seule couleur reçoivent quelques modifications pour celle des fondus. Dans ce cas, les racles à chariot, d, d, sont remplacées par des rouleaux de 0m03 de diamètre recouverts de drap, dont l’un , muni d’un rocket, roule pendant que le chariot se rapproche de la table de l’imprimeur, reste fixe, et traîne pendant que ce chariot effectue son retour ou exécute le mouvement déterminé par le contre-poids P. C’est encore au moyen de fils tendus sur une planche qu’on dépose les diverses couleurs sur le châssis , en les y étendant par un rouleau échancré lorsqu’elles sont trop rapprochées les unes des autres.
- Ce tireur mécanique a fait l’objet d’un rapport adressé à la Société industrielle de Mulhouse parM. H. Schlumberger, qui, après avoir examiné les diverses circonstances où il est applicable, trouve qu’il laisse à désirer :
- 1° Dans tous les genres de fabrication où, comme dans les genres cachemire sur laine, on fait souvent varier les couleurs, parce que la mise en train est plus difficile que celle du tireur ordinaire, où il suffit de substituer au drap qui sert à l’impression d’une couleur un autre drap encadré ou non ;
- 2° Dans ceux où le tireur doit aider l’imprimeur à étendre l’étoffe, à imprimer sur la table, comme dans 1 impression des tissus légers, organdis, gazes, balsorines, etc., ou des châles qui, tendus sur. des cadres, sont souvent trop grands pour être maniés facilement par une seule personne ;
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- ;>*)() DR LA FABRICATION EN GENERAL.
- 3° Dans l’impression de certains dessins, des picotages, par exemple, qui réclament des soins tout particuliers ;
- Zi° Dans celle des mordants qui s’altèrent plus facilement sur les grands châssis que sur les petits, comme les mordants ù base d'acétate aluminique faible et d’acétate ferreux : on sait que les premiers se décomposent en perdant leur acide et les seconds en passant à un degré d’oxidation trop élevé.
- Nous ne pouvons nous constituer juge de ces reproches ; mais toujours est-il que cette machine rend de très grands services dans plusieurs établissements, ainsi que, du reste , le rapporteur, M. H. Schlumberger, s’empresse de le reconnaître dans les termes suivants :
- « Malgré les inconvénients du tireur mécanique que nous » avons signalés, nous reconnaissons l’utilité de cet appareil » hors les cas exceptionnels que nous avons cités. 11 présente » une économie de main-d’œuvre, et produit un travail plus ré-» gulier que celui fait à la main. A ces avantages nous devons » ajouter qu’il y a beaucoup plus d’ordre dans les ateliers d’im-» pression où il n’y a pas d’enfants, et qu’on évite un grand » nombre de taches sur les tissus et d’autres petits accidents » que produisent très souvent les enfants tireurs. »
- D’ailleurs cette machine, n’eût-elle .d’autre avantage que d’éloigner de pauvres enfants de ces salles d-impression, où leur santé et leur moralité n’ont ordinairement qu’à perdre, cette considération devrait suffire pour déterminer tous les fabricants à l’adopter. On a donc lieu de s’étonner qu’elle n’ait guère été adoptée jusqu’ici qu’en Suisse et en Allemagne, surtout quand on songe qu’elle ne coûte que 50 francs d’établissement.
- Nota. Tous ces détails sur l’impression à la main étaient déjà imprimés lorsque nous avons eu connaissance d’une nouvelle disposition de tables et de châssis, qui à l’avantage de la suppression du tireur, dans tous les cas où l’on n’imprime pas de fondus, joint celui d’une plus grande rapidité dans l’exécution et d’une notable économie dans la main-d'œuvre. Cette dispo-
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- sition ist due à M. Paul Godefroy, de Saint-Denis, et c’est a M. Jean Schlumberger, de Thann, que nous devons de pouvoir en donner aujourd'hui la description à nos lecteurs avec la légère modification que ce fabricant distingué y a introduite.
- Tout le système est représenté dans son ensemble et dans ses détails Planche III.
- a , sont les pieds ou supports d’une table b, dont la construction est semblable à celle de la Jig. 96, p. 300; cette table peut avoir une longueur quelconque, mais elle doit être garnie sur ses deux côtés , dans le sens de cette longueur, de deux liteaux h, h, remplaçant les tringles en fer qui font fonction-de rails dans les tables deM. Godefroy : sur ces deux liteaux se meuvent, au moyen de roulettes r, r, r, r, r, des plateaux mobiles g, g, g, servant de supports à des baquets à couleur k, k, k, qui, cédant au plus léger effort, avancent ou reculent au gré de l’imprimeur, ou, si le genre d’impression l’exigo, du tireur placé sur l’estrade f, f.
- Dans la confection de ses baquets, M. Godefroy a heureusement combiné le système des baquets à réservoir, p. 303, avec celui des baquets à claire-voie qu'on employait, il y a plus d’un siècle, pour imprimer le bleu de pinceau, et qui n’étaient guère que des tamis qu’on renversait sur un bain de couleur qui en traversait les mailles et venait charger uniformément la planche par le seul effet de la pression de celle-ci sur le canevas. En voici la description :
- k est une caisse en bois dont les ais sont exactement joints et portant sur deux des côtés deux échancrures correspondantes l’une à l’autre , où s’engagent les deux traverses a, a , d’un châssis. C’est dans cette caisse, où l’on pratique à volonté des compartiments/(n° 1), qu’on introduit la couleur qui remplit en même temps le rôle de fausse couleur, puisque c’est immédiatement sur elle qu’on pose le châssis qui doit s’en imprégner pour la transmettre à la planche, et c’est par les ouvertures s, s, qu’on Ven retire.
- u.
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- c, c',sont clés châssis simples, formés d’un cadre en bois sur lequel on tend, en le clouant sur les bords, un tissu de mailles dont les dimensions doivent être en rapport avec la viscosité de la couleur. L’expérience a conduit M. Godefroy à adopter de préférence un tissu fait au régulateur d’une laine longue, lustrée , dite anglaise , et en fil double ou triple ; il convient qu’il n’y ait pas plus de 16 à 20 fils par centimètre carré, tant en chaîne qu’en trame. Un tel tissu a le double avantage de ne pas se feutrer et de conserver la tension qu’on lui a donnée en le clouant sur le châssis en bois ; la soie peut rendre le même service. Aux deux extrémités de ce châssis sont clouées les deux traverses a, a, qui lui assurent une position déterminée en s’engageant dans les échancrures du baquet k. Ces traverses portent à leurs extrémités des vis en bois m , m, qui tournent dans des écrous aussi en bois v, fixés au baquet, et qui servent à régler la hauteur du châssis, car, en faisant tourner ces vis, l’imprimeur, abaissant ou élevant le châssis, l’enfonce plus ou moins dans la couleur.
- d , e , sont des châssis à compartiments représentés dans une position renversée pour qu’on puisse voir l’échancrure correspondante à la cloison f du baquet k , n° 1.
- A l’effet de conserver le niveau de la couleur sur le châssis, une fois que la position de ce dernier est réglée, M. Godefroy a eu l’idée de fixer, moyennant des armures métalliques, sur ’un des côtés du baquet et aux angles opposés à celui où travaille l’imprimeur, des matras en verre remplis de couleur et renversés de telle sorte que l’orifice s’en trouve fermé par la surface du bain. Aussitôt que celui-ci baisse , l’air s’introduisant dans le matras y déplace une quantité de liquide égale à son propre volume.
- Comme la couleur a besoin d’être agitée de temps en temps, il y a dans chaque baquet une tringle y, qu’on fait mouvoir au-dessous du châssis sans avoir besoin de le soulever, et, d’autre part, pour égaliser la couleur à la surface de ce
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- châssis, on y promène de temps à autre un petit rouleau l simple ou multiple, selon le nombre des compartiments.
- Enfin , on fixe au plateau g du châssis, dans une position oblique, une planche p destinée à garantir le tissu des taches que pourraient y occasionner des gouttes de couleur, surtout du côté où l’imprimeur relève sa planche pour la transporter sur l’étoffe.
- M. Godefroy a appliqué le même système à l’impression des châles : seulement, la table étant ici de grande dimension et carrée, le plateau porteur du baquet repose par un bout sur un des côtés de cette table et par l’autre sur une traverse parallèle, en sorte que l’imprimeur n’a qu’à l’attirer à lui pour avoir toujours à sa portée le baquet à couleur.
- Cet appareil sert aussi à l’impression des fondus ombrés, qui a lieu alors en vertu du principe que nous avons exposé § 506. Les couleurs, d’abord disposées sur le châssis en petits picots , y sont étendues au moyen d’une brosse qui est mue par le tireur d’une manière régulière et dans un sens déterminé, puis l’imprimeur y applique sa planche, et pour que la prise de couleur se fasse constamment de la même manière, cette planche porte sur chacun de ses côtés deux cornes ou chevilles en fer, vissées dans le bois, qui, selon la saillie qu’on leur donne, l’éloignent de la distance nécessaire de l’un des côtés du châssis.
- § 509. Dessiccation.—Appareils de suspension des toiles imprimées. Pour maintenir dans un état de tension convenable les étoffes qui le demandent, pour la dessiccation de la couleur dont elles sont revêtues, on se sert de deux bobines sur lesquelles _ on les fixe par leurs extrémités, de telle sorte qu’elles se dévident de l’une pour s’enrouler sur l’autre , en passant sur un nombre suffisant de cylindres. Tantôt les pièces sont tendues dans le sens indiqué page 300, par des roulettes qui se correspondent en bas et en haut, et la toile vient s’enrouler, après avoir circulé sur des roulettes de plus en plus rapprochées du ceptre, sur une bobine qui s’y trouve. Par cet enroulage en coquilles
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- on étend et fait mouvoir le tissu sans mettre en plus d’un point la surface recouverte de couleur en contact avec les roulettes, qui pourraient enlever quelques portions de cette couleur et gâter l’impression en les reportant sur les parties qui doivent être respectées.
- Tantôt l’étoffe circule immédiatement au-dessus de la table à impression en lignes sensiblement parallèles, au centre desquelles elle s’enroule sur une bobine. Cette disposition, qui fait gagner beaucoup de place, a du reste, comme la précédente, l’inconvénient de forcer la toile à passer au-dessous d’un cylindre immédiatement après avoir quitté la table, ce qui, mettant la surface imprimée en contact direct avec celle du rouleau en bois, tend à donner lieu à ces rappliquages qu'il est si important d’éviter.
- Pour prévenir de tels accidents , des fabricants ont adopté ht disposition suivante . en quittant la table de l’imprimeur, la pièce recouverte de couleur circule en coquille et s’enroule ensuite sous cette table même. Le dessin, jfy. 110, représente la coupe d’une table ainsi disposée, qu’on emploie dans la maison Dpllfus-Mieg. M. Despouilly suit le même système, avec cette différence cpie chez lui on fait suivre à l’étoffe un moins grand nombre de circonvolutions.
- L’étoffe, enroulée sur la bobine c et tendue sur la table t, passe par-dessus les roulettes m, m, m, arrive sous la table en b' , de là en b, s’élève à la partie supérieure de cette table, qu’elle longe latéralement, redescend et revient de nouveau en b', mais au-dessus du premier pli, et se relève, en continuant ce trajet de circonvolutions, jusqu’à ce qu’elle arrive en n, où elle s’en-
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- roule sur une bobine. Il est inutile d’ajouter que les deux bobines extrêmes sont garnies de petites manivelles qui permettent de les mettre en mouvement, et de rochets qui en arrêtant leur marche maintiennent la toile à l’état de tension qui lui a été donné.
- Si, durant l’impression , beaucoup de fabricants conservent encore une position verticale aux pièces, c’est parce qu’ils trouvent, dans cet arrangement, toutes les facilités nécessaires pour inspecter et suivre le travail de l’imprimeur, dont les défauts échappent toujours lorsque les pièces imprimées et chargées de couleurs sont placées parallèlement à la table, soit en dessus, soit en dessous.
- Indépendamment de ces trois parties principales et essentielles de l’impression à la main, il y a une foule d'accessoires que nous ne ferons que passer en revue, parce que les nommer, c’est en donner l’explication.
- Ainsi l’imprimeur doit avoir à sa disposition, avec des brosses à tireur, d’autres brosses, qui lui servent à nettoyer la gravure de sa planche, lorsqu’elle est engorgée par la couleur ; une racle en bois, pour nettoyer le châssis, lorsqu’il est recouvert d’une croûte de couleur ; des maillets de poids inégaux, et ordinairement en bois ou en plomb, pour frapper plus ou moins fortement sur sa planche ; une règle et un compas à tracer, un compas ordinaire, des équerres , une pointe, soit pour déterminer les points des premiers coups de planche à donner sur la toile, soit pour vérifier si les picots des planches gravées, et qui servent de points de rapport, sont bien dans la position convenable ; enfin des marques ou cachets, pour imprimer son nom et celui de la couleur au chef de la pièce.
- Machines à imprimer en relief dune manière intermittente.
- § 510. Nous serions entraînés trop loin si nous voulions examiner une à une toutes les tentatives faites en vue de réaliser mécaniquement les impressions a la main; cette étude, d ail-
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- leurs, n’aurait d’autre résultat que de confirmer une vérité trop bien connue , mais dont on ne tient pas toujours assez compte, savoir : que dans ses recherches, l’homme s'éloigne d'autant plus du vrai et de Vapplication qu’il s'écarte davantage de la simplicité. Qu’au lieu, en effet, de bien se pénétrer de toutes les opérations de l’impression à la planche, afin de la rendre indépendante de la main de l’homme, on s’avise, comme on l’a fait, d’étudier le jeu d’une machine à draguer, pour substituer, ensuite , aux augets mobiles de cette machine, des planches qui reçoivent de la couleur et la transmettent à l’étoffe , en s’écartant momentanément de la circonférence de la roue en mouvement, certes la patience de l’inventeur d’une telle machine pourra exciter l’admiration, mais le résultat de ses efforts prouvera qu’il s’est fourvoyé 5 ses produits seront à peine comparables à ceux de l’art à son enfance.
- Toutes ces recherches cependant ne sont pas restées infructueuses : les deux machines que nous leur devons et que nous allons décrire, rendent journellement d’impor'ants services à l’impression. La première fonctionne aux environs de Paris, chez M. Despouilly, qui a eu l’obligeance de nous en donner le plan. On en rencontre plusieurs en Angleterre qui sont construites à peu près sur le même principe et connues sous le nom de machines de Watt.
- Dans cette machine, pl. IV, dont la fig. 1 représente une élévation et la fig. 2 une coupe par le milieu, nous trouvons d’abord, comme dans l’impression à la main, trois parties distinctes : une table fixe e , sur laquelle se donne le coup de planche, un baquet à fausse couleur, avec son châssis et son réservoir à couleur , un appareil simple, pour la tension et la suspension du tissu imprimé ; puis les dispositions mécaniques nécessaires a, pour faire mouvoir la planche dans une direction déterminée de telle sorte que chacun de ses coups se donne sur des parties invariables de la table ; b, pour faire avancer la pièce, après chaque coup de planche, d’une longueur égale à la largeur
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- de la gravure ; c, pour faire passer sous la planche, après chaque coup, le châssis sur lequel cette planche doit se recharger de couleur ; d enfin, pour imprimer un mouvement à tout le système.
- (XX) Bâtis servant de support à toutes les parties de la machine.
- a , bobine en bois sur laquelle est enroulée la pièce à imprimer.
- b, autre bobine d’où se déroule, pour aller s’enrouler sur b', ledoublier ou calicot qui sépare le tissu de la table e afin d’empêcher la couleur de salir le drap qui la recouvre.
- n, d , et d', d', sont les premiers des rouleaux, les seconds des embarrages ou règles élargisseuses, qui ont, les uns et les autres, pGur objet d’étendre le doublier et le tissu avant leur arrivée sur la table.
- e, table fixe, composée d’un fort madrier en chêne recouvert de drap comme une table ordinaire.
- F, planche mobile, d’une longueur égale à la largeur de 1a. pièce et d’une largeur qui varie entre 20 et 30 centimètres, adaptée à une monture en fonte, l, portant deux coulisses qui lui permettent de glisser dans les montants n, n.
- h, h, rouleaux d’appel ou de commande, mus par une chaîne à la Vaucanson , i, i, qui reçoit son mouvement du rouleau g.
- o, poignée qui sert à faire tourner la roue à rochet u.
- e , c, c , c , rouleaux de suspension , au moyen desquels la pièce imprimée circule en coquille et vient, attirée par les rouleaux de commande h, h, se plier dans une caisse t.
- g , rouleau garni d’aiguilles, portant à une des extrémités de son axe une roue à rochet u , qui fait toujours avancer la pièce et le doublier. d’une longueur égale à la largeur de la planche gravée, en décrivant un arc de cercle, m m' d’un nombre de degrés déterminé.
- p, p', p", poulies qui réagissent l’une sur l’autre et qui ont pour effet de soulever la planche. Un ouvrier imprime le mouvement à la première au moyen d’une manivelle.
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- q, baquet à fausse couleur.
- r, réservoir contenant la couleur qui sert à alimenter le châssis s. Ce baquet, avec son châssis et le réservoir, glissant dans une rainure, vient momentanément se placer sous la planche lorsqu’elle est soulevée, pour lui fournir de la couleur, et se retire pour reprendre sa position première lorsqu’on le laisse retomber sur la table à imprimer.
- Ces données établies, mettons en mouvement la machine pour en faire comprendre le jeu.
- Dès qu’on imprime un demi-tour à la poulie p, celle-ci réagit sur les poulies p', p'', la planche se soulève aussitôt , le châssis se place au-dessous, et l’ouvrier n’a qu’à laisser un peu du liberté à la poulie pour que la planche se pose mollement sur le châssis par un mouvement semblable à celui de l’imprimeur à la main quand il prend sa couleur. En même temps aussi, attirée par les rouleaux g et par le rouleau de commande ou d’appel h, ii', la toile et le doublier se déroulent des bobines a, b, passent entre les embarrages ou règles élargisseuses, et s’étendent sur la table dans une longueur déterminée par l’arc qu’a décrit la roue à rochet. Ce mouvement effectué, la poulie est abandonnée à elle-même, et la planche retombe par son propre poids, tout en déterminant par sa chute l’écartement du châssis, sur la table où elle imprime au tissu le dessin qu’elle porte gravé en relief, puis, lorsqu’elle a été relevée parmi bouveau mouvement imprimé à la manivelle et à la roue u, le tissu et le doublier avancent en s’éloignant de la table, le dernier pour aller s’enrouler sur la bobine b' , le premier pour descendre au-dessous de la table, prendre une direction horizontale et arriver enfin sur le bâtis à suspension muni de roulettes, où il circule en coquille et se plie de lui-même dans la caisse, après s’être parfaitement desséché.
- Comme les planches de cette machine sont de grande dimension et par conséquent les frais de gravure très chers, quand on \eut imprimer des dessins d’une gravure délicate et coin-
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- pliquée, on 11e l’emploie généralement qu'à l’impression de dessins peu coûteux, pois , carreaux, bandes , etc.
- En substituant au châssis qui existe dans la figure que nous avons donnée, un châssis à compartiments dans le genre de celui qui est représenté p7. 11, on peut réaliser, avec beaucoup de facilité et de précision, des impressions à plusieurs couleurs ; c’est du moins ce qu’on fait avec succès en Angleterre.
- Enfin , en déposant les couleurs sur le châssis à l’aide de fils tendus par l’un ou l’autre des moyens indiqués § 506, on imprime des fondus avec cette machine aussi bien qu’à la main.
- Comme c’est le tireur qui étend la couleur sur le châssis, il est toujours facile à l’ouvrier de diminuer ou d’augmenter à volonté la quantité qui doit en être fournie à celui-ci ; en outre , au moyen des contre-poids établis dans ce but, il peut régler la. pression de la planche sur le tissu selon la nature de ce dernier ; enfin, rien ne l’empêche, en 11e faisant point jouer la roue à rochet, de répéter plusieurs coups de planche sur le même point de l’étoffe , quand cette étoffe , ou la couleur qu’il doit y imprimer, le demande.
- Quels que soient la faible dépense qu’entraîne sa construction, les bons résultats quelle donne, tant sous le rapport de la netteté de l’exécution que sous celui de l’économie , et les avantages incontestables qu’elle présente, pour certains genres du moins, sur l’impression à la main. < ette machine est loin de pouvoir être comparée à une autre, la plus intéressante peut-être que le génie de la mécanique ait inventée : nous voulons parler de la perroiine.
- Cette machine, introduite dans les ateliers d’impression dès 1834, était loin de présenter alors les avantages quelle offre aujourd’hui. Si,, en effet, dès le principe, son auteur avait résolu le problème de faire mouvoir alternativement et régulièrement, sur des surfaces planes et placées horizontalement ou verticalement (tables), le drap et le doublier nécessaires à l’impression, la toile à imprimer et la planche gravée. s’il était parvenu a
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- fournir mécaniquement de la couleur a la planche, il lui restait encore deux grandes difficultés à surmonter, celles de se passer de l’ouvrier tireur et d’étendre mécaniquement la couleur • dans ces dernières années seulement, par des perfectionnements successifs, M. Perrot est arrivé à substituer avec succès un mouvement mécanique, à l’intervention jusqu’alors indispensable des tireurs à la main, dont le travail, dans la position gênée où ils se trouvaient, était toujours plus ou moins irrégulier, et enfin à faire marcher la perrotine tout à la fois avec un moindre frottement et une plus grande précision.
- Nous retrouvons, du reste, des tables où se fait l’impression ; des planches gravées, qui se meuvent dans une position déterminée et invariable ; des châssis mobiles et qui transmettent aux planches la couleur qu’ils reçoivent indirectement au moyen de rouleaux , des baquets ou réservoirs à couleur ; des baquets à couleur fixes et indépendants des châssis 5 un drap sans fin avec le doublier destiné à le préserver des empreintes que les bords des planches pourraient y produire ; le tout se mouvant par suite d’une combinaison mécanique qu’on ne peut se lasser d’admirer.
- Les planches Y et VI représentent, la première, une section verticale, la seconde , une élévation de la perrotine.
- a , bâtis en fonte, sur lequel sont fixées toutes les pièces de la machine.
- b, b, b, tables en fonte parfaitement dressées, sur lesquelles circulent le drap sans fin , le doublier, et enfin le tissu qui doit recevoir l’empreinte des planches.
- g , c, c, chariots portant, vissées sur des tiroirs ou porte-planches 3,3,3 fies planches gravées 2 , 2 , 2 , qu’ils font mouvoir alternativement sur le châssis à couleur et sur le tissu à imprimer, au moyen des manivelles 4 , ù, ù et 5 , 5 , 5 , dont les supports 6, 6, 6 reposent sur le bâtis a, et qui agissent, par l’intermédiaire de bielles, sur les balanciers 7, 7, 7, articulés avec les chariots c, c, c. Le chariot inférieur, qui est
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- dans une position verticale, prend, en vertu de son propre poids, un mouvement rétrograde réglé par un contre-poids.
- e, e, e, châssis mobiles articulés avec des bielles et recevant du moteur le mouvement qui convient à leurs fonctions. Ces châssis, dont le fond est plat et garni de drap, glissent dans des coulisses fixées aux côtés de la table et vont s’alimenter aux rouleaux fournisseurs, de la couleur qu’ils cèdent ensuite aux planches.
- f, f, F, réservoirs ou baquets à couleur, composés chacun d’un auget rempli de couleur et de deux rouleaux 8, 8, 8 et 10, 10, 10, dont les derniers (10, 10, 10), plongeant dans les augets , s’y chargent de la couleur pour la transmettre aux rouleaux 8, 8,8, recouverts de laine, qui la transmettent à leur tour aux châssis e , e, e , sur lesquels elle est étendue parles brosses fixes 9, 9, 9. Comme il importe de pouvoir faire varier à volonté la quantité de couleur à fournir au châssis, et par suite à la planche, les rouleaux \ 0, 10, 10 sont en relation avec une bascule (11), qui sert à les rapprocher ou à les éloigner plus ou moins des cylindres 8 , 8 , 8, et, par conséquent, à faire varier la prise de couleur.
- Drap sans fin, doublier et tissu. 1, 1, 1,1, rouleaux situés aux quatre angles formés par les tables b , b , b , et garnis de pointes ou aiguilles qui empêchent les toiles qu’ils conduisent de glisser, et assurent ainsi le mouvement régulier du tissu à imprimer, mouvement que déterminent les roues dentées 21, 21, 21, 21, fixées à l’extrémité de l’axe de ces rouleaux.
- g, rouleau qui sert à tendre le drap sans fin, et dont les deux bouts de l’axe reposent sur deux espèces de coussinets formant les extrémités de deux vis 12 qu’on fait mouvoir à volonté pour éloigner le cylindre et obtenir la tension qu’il convient de donner au drap.
- h, rouleau de tension et de suspension du drap et du doublier.
- k , rouleau de tension et de renvoi du drap, du doublier et
- du tissu à imprimer.
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- t , drap sans fin qui, clans sa course, embrasse la demi-circonférence du rouleau g , passe sur le rouleau h et derrière le rouleau de renvoi k , pour venir embrasser les cylindres 1, 1, 1, 1 et les tables b, b, b.
- l, ensouple d’où le doublier se déroule pour passer à travers les règles élargisseuses 13, tendu qu’il est par le rouleau h, et se réunir au drap sans fin en arrivant au rouleau k
- m , bobine cle laquelle se dévide , par le mouvement de la machine, le tissu à imprimer qui vient s’étendre, en passant au travers des règles élargisseuses 1 4, 14, 14, pour se réunir en k au drap sans fin et au doublier, dont il suit la marche jusqu’à ce que, parvenu au-dessus du rouleau g, il s’en sépare et se rende à l’étendage en suivant la ligne n.
- Mouvement. La machine est mise en mouvement, soit à l’aide d’une manivelle par le bras de l’homme, soit par un moteur, au moyen d’une courroie qui passe sur la poulie 18.
- Cette poulie a plusieurs diamètres pour donner plusieurs vitesses; elle est folle sur l’arbre de commande et porte des griffes dans lesquelles s’engagent celles d’un manchon lorsqu’on met la machine en mouvement.
- Mouvement de la toile. Ce mouvement ne peut être qu’intermittent, puisque l’impression l’est aussi : or, il importe qu’il soit tellement réglé que le tissu avance d’une quantité rigoureusement égale à la largeur de la planche gravée, et que sa marche s’effectue pendant que les châssis se chargent de couleur aux rouleaux fournisseurs 8, 8 , 8. Ce résultat est atteint au moyen d’un régulateur ou appareil à division 20. Les roues 21, 21, 21, 21, situées à l’extrémité de l’axe des cylindres 1, 1, 1, 1 et munies chacune d’un même nombre de dents, reçoivent leur mouvement d’une roue centrale également dentée, placée derrière la roue 20 qui reçoit elle-même celui auquel elle obéit et qui est alternatif d’une crémaillère droite 24, fixée dans une pièce en cuivre 25, et qui monte et descend alternativement, attendu qu’articulée par l’une de ses extrémités à l’un des rayons
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- de la roue 28 , elle forme manivelle. En faisant varier la position du point d’attache de la crémaillère sur le rayon 26, on change par cela même sa course, et l’on obtient le passage d’un plus ou moins grand nombre de dents de la roue 20, ce qui rend plus ou moins grande la course de la toile, qu’on règle d’ailleurs au moyen d’un encliquetage ou roue à rochet située en d. A chaque demi-tour de cette dernière, le levier 22 soulève le cliquet et désengrène les roues 21, 21, 21, 21 durant l'autre demi-révolution ; mais comme dans la marche de ces roues il y aurait inévitablement un mouvement de recul, pour le prévenir, on y adapte un frein composé d'une poulie montée sur l’arbre de l’axe de la roue 20 et d’un fil de laiton , qui, après avoir fait sur cet arbre un tour et demi à deux tours, est tendu par le poids 23, qui offre une résistance suffisante.
- Mouvement des chariots. Les chariots ou porte-planches sont mis en mouvement par les roues 27. 27, 27, 28, 28, 28 et par les roues 29, 29. Afin d’en faire varier la course à volonté, tant pour que les planches portent plus ou moins sur les châssis et s’y chargent à propos de couleur, que pour obtenir la pression qui convient à la couleur qu’on veut y déposer, il suffit d’éloigner ou de rapprocher du point 15, centre d’oscillation des balanciers du chariot, les points d’attache 16, 16 , 16 et 17, 17, 17.
- Mouvement des châssis. Le jeu des châssis résulte de celui de l’excentrique i, i, 30 , qui les fait avancer tous trois en mettant en mouvement un arbre diversement articulé avec eux.
- Quant aux cylindres fournisseurs, ils reçoivent leur mouvement d’un engrenage situé sur l’axe des cylindres 8, 8, 8.
- Essayons maintenant de faire comprendre la marche de la machine dans son ensemble.
- Lorsqu'une impulsion régulière lui a été imprimée et que les trois coups de planche sont donnés comme ils doivent l’être , c’est-à-dire simultanément, aussitôt trois mouvements ont lieu à la fois.
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- 1° L’étoffe s’avance d’une longueur de planche, et avec elle le drap et le doublier, de telle sorte que la portion d’étoffe qui quitte la troisième planche se trouve imprimée, celle qui se trouvait sous la deuxième marche du côté de la troisième, celle qui se trouvait sous la première du côté de la deuxième, et qu’une largeur d’étoffe blanche arrive en regard de la première planche.
- 2° Les. châssis prennent la place qu’ils occupent pl. V, c’est-à-dire que le premier s’élève, le second se dirige delà gauche vers la droite, le troisième s’abaisse, et, dans ce mouvement , tous trois pressent légèrement sur les rouleaux fournisseurs 8,8,8, auxquels ils enlèvent la couleur qui est étendue uniformément par les brosses 9, 9, 9.
- 3° Les chariots, par un mouvement en avant, portent, contre les châssis où elles doivent se charger de couleur, les planches qui reçoivent aussitôt de ces mêmes chariots un léger mouvement de recul, durant lequel les châssis dévient de leur position, puis, revenant contre ces derniers, se retirent après s’être appliqués sur une nouvelle surface de couleur.
- Alors, sous l’impulsion du mouvement central qui continue d’agir, les chariots prennent une autre direction, et les planches, poussées jusque sur les tables, impriment les parties de l’étoffe qui y est étendue. Ces mouvements se renouvellent autant de fois qu’a lieu l’opération que nous venons de décrire, avec cette différence toutefois que l’ouvrier est toujours maître de suspendre la marche du tissu, tandis que celle des planches et des châssis se poursuit, en sorte que la couleur peut toujours être réappliquée autant de fois que cela est nécessaire à la réussite de l’impression.
- En 18hh, M. Perrot a exposé une machine à imprimer quatre couleurs a la fois : le principe en est le même, le maniement aussi simple; l’établissement seul présente quelques difficultés.
- Dans la perrotine telle quelle est aujourd’hui, le fabricant trouve, avec une exécution beaucoup plus correcte des dessins
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- difficiles, une grande économie de main-d’œuvre. Les échantillons fonds blancs enluminés donnent une idée de la délicatesse des dessins que l’on imprime avec cette machine. Pour ce qui regarde l’économie de la main-d’œuvre, deux hommes impriment en trois couleurs, avec la perrotine, de mille à quinze cents mètres de calicot par jour, et font ainsi la besogne de plus de vingt-cinq imprimeurs et d’autant de tireurs.
- En outre, la perrotine a sur le rouleau un immense avantage au point de vue de l’exécution, en ce qu’elle permet d’imprimer sans peine toute espèce de dessin en plusieurs couleurs, sans que la première couleur soit endommagée par l’application de la seconde, celle-ci par l’application de la troisième, tandis que, dans l’impression au rouleau, il n’est pas possible d’imprimer tous les dessins avec un égal succès en plusieurs nuances, parce que la couleur imprimée en premier lieu, laminée en passant à travers les deux autres cylindres, se ternit, et contribue à charger les parlies qui doivent rester blanches.
- Enfin, en prenant des dispositions convenables, on est parvenu à imprimer, avec cette machine, les mêmes fondus qu’à la planche à la main. C’est la maison Blech-Steinbach qui a réalisé une des premières ce genre d’impression dans le sens de la longueur des toiles. A cet effet, on supprime les rouleaux fournisseurs 8, 8, 8, et même, pour plus de commodité, les baquets à couleur, et les tireurs, au moyen de fils -tendus ou de brosses divisées, prennent les couleurs dans une caisse à compartiments pour les fournir aux châssis, où elles sont étendues par les brosses 9, 9, 9. On imprime de cette manière de vingt à vingt-cinq nuances à la fois.
- De son côté, M. Perrot a trouvé une disposition qui permet d’appliquer la machine dont il est l’inventeur à l’impression des fondus. On remplace les baquets f, f, f, par des caisses de même dimension, dans lesquelles on établit, au moyen de lames de verre, autant de compartiments que l’on veut imprimer de nuances ou de couleurs, et les rouleaux 10, 10, 10,
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- par des rouleaux échancrés sur toute leur longueur aux points correspondants aux cloisons. Ces rouleaux, qui ressemblent à ceux de laficj. 99, p. 307, prennent les couleurs dans la caisse à compartiments , pour la transmettre aux fournisseurs 8, 8,8, auxquels on a eu soin de donner un léger mouvement de va-et-vient, afin de confondre les couleurs séparées et de faire disparaître ainsi les solutions de continuité ; ces fornisseurs les portent aussitôt sur le châssis, où elles sont immédiatement enlevées par les planches, les brosses 9, 9, 9, étant supprimées. Au lieu de cylindres échancrés d'une seule pièce, M. J. Schlumberger jeune emploie avec succès des disques mobiles et forés, fixés par un écrou à un arbre en fer qui leur sertd’axe. L’ordre et les dimensions de ces disques sont déterminés par le nombre et la quantité des couleurs que l’on désire appliquer sur un point donné de la surface de l’étoffe. Cette modification a cela d’avantageux que, moyennant un assortiment de disques, on peut composer un cylindre échancré de la forme que l’on désire et le défaire pour en construire un autre.
- Bientôt après la maison Blech-Steinbach, MM. Dollfus Mieg ont imprimé des fondus dans le sens de la largeur de l’étoffe; pour obtenir ce résultat, ils ont eu à surmonter une difficulté beaucoup plus grande, puisque les brosses ne peuvent plus être employées. Il leur a donc fallu, ou déposer les couleurs fondues sur les châssis par les moyens ordinaires, § 506, et les étendre à la main avec une brosse, mais dans un sens contraire à celui dans lequel agissent les brosses 9, 9, 9, ou déposer et étendre ces couleurs d'un seul coup, soit par un rouleau échancré, soit à l’aide de petits réservoirs à compartiments et à becs, avec lesquels on peut toujours étendre à volonté et dans tous les sens les couleurs sur le châssis.
- Il ne nous paraît pas sans intérêt de donner ici un échantillon des deux genres de fondus dont nous venons d’entretenir le lecteur ; nous tenons le second de la maison même de MM. Dol-fus Mieg.
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- 41. Fondus à la perrotîne en long.
- Machines à imprimer en relief d'une manière continue.,
- §511. Ces machines, appeléesplombines, paraissent avoir été inventées en France. Un nommé Ebinger, de Saint-Denis, près Paris, se fit délivrer un brevet d’invention sous la date du 16 juillet 1800, pour imprimer d’une manière continue avec des cylindres gravés en relief. Il se proposait, sans doute, d’imiter les fabricants anglais qui, depuis plusieurs années déjà, imprimaient mécaniquement d’une manière continue, mais dont les procédés étaient inconnus chez nous. En 1805, James Burton,
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- 49. Fondus î\ la perrotinc en travers.
- II.
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- ingénieur clans la maison Peel, à Church, appliqua également le rouleau en relief à l’impression des tissus, mais dans le but de le faire concourir à l’impression^ de plusieurs couleurs avec les rouleaux gravés en creux qù’on n’avait pas encore l’habitude d’employer avec succès pour les impressions à plusieurs couleurs.
- Les machines d’Ebinger, dont deux fonctionnèrent dès le principe à Jouy et à Beauvais, étaient très simples : on gravait un cylindre en bois f, des dimensions voulues, comme on grave les planches en bois ; puis on le plaçait sur deux montants au dessus d’un rouleau fournisseur a sür lecjuel la couleur prise du baquet r étant étendue par la brosse b; un mouvement convenable imprimé à la machine faisait dérouler d’une bobine h le tissu, qui passait au-dessus du cylindre gravé, était comprimé par un rouleau presseur g , et recevait ainsi l’impression.
- Cette machine , qui aurait pu , dans certains cas du moins, remplacer l’impression à la main, fut bientôt généralement abandonnée dans tous les établissements de France où l’on en avait fait l’essai. Plus d’une cause amena ce résultat : ces rouleaux en bois, cylindriques, quelque droits qu’ils fussent dans le principe, se déformaient toujours tôt ou tard plus ou moins, par l’action qu’exerçait sur eux la couleur humide dont ils étaient recouverts ; ensuite, les frais de gravure qu’ils exigeaient augmentant avec la délicatesse des dessins que l’on voulait obtenir, on ne s’en servait que pour des impressions grossières; enfin, comme on ne s’était pas rendu un compte exact des conditions dans lesquelles le rouleau devait se charger de Couleur,'les impressions étaient souvent défectueuses.
- Ces inconvénients ont été, en partie, surmontés en Angleterre, où cette machine fonctionne depuis plusieurs années, tant pour imprimer à elle seule des dessins que pour enluminer des dessins
- Fig. 111.
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- imprimés au rouleau gravé en creux. On y a remplacé la gravure sur bois par des cachets (clichés) en alliage fusible qu’on cloue sur les cylindres en bois, comme on le fait généralement pour les planches de la perrotine. Ce changement, outre qu’il apportait une grande diminution dans les frais de gravure, permettait d’obtenir des dessins plus délicats et plus nets, et enfin, le cylindre en bois recouvert de vernis, n’étant plus en contact avec la couleur, était moins sujet à se déformer.
- A cette modification les Anglais en ont ajouté une autre qui
- Fig. 112.
- n’est pas moins importante pour le succès de l’impression. Dans les plombines françaises , le cylindre gravé se chargeait directement de couleur sur un rouleau fournisseur ; la surface gravée n’était donc tangente qu’à un petit nombre de points de la couche de couleur étendue ; au contraire, dans les plombines anglaises ou métiers à surface, la couleur est portée par des cylindres du baquet ou réservoir sur un drap sans fin, où elle est ensuite uniformément répartie, et duquel la reçoit le cylindre grave qui se trouve en contact avec ce drap, tantôt par un point seulement de sa surface, tantôt par plusieurs points. La Jig. 112 donne une idée de cette disposition, r est un baquet à couleur dans lequel plonge le rouleau fournisseur a , qui transmet cette couleur à un rouleau supérieur b ,qui, à son tour, la reporte sur le drap sans fin n, n, tendu par les rouleaux c, e, où elle est également répartie par le rouleau n. Lorsque ce drap sans fin chargé de couleur arrive sous le cylindre gravé f, celui-ci se charge de la couleur dont il est imprégné et .l’imprime sur l’étoffe quand , obéissant à un mouvement approprié, elle passe entre lui et le rouleau presseur g.
- Toutefois cette disposition n’est pas aussi avantageuse qup
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- la suivante ; car le cylindre gravé , ne se trouvant que par des parties limitées de sa suri ace en contact immédiat avec la couche de couleur dans un instant donné, ne peut s’en imprégner assez uniformément. Dans la ficj. 113, ]e drap sans fin n reçoit encore la couleur du baquet r par les rouleaux a , b ; mais tandis que dans la figure précédente il est seulement tendu par deux cylindres c, e, dans celle-ci il l’est par trois c, e, e, en sorte que la gravure , au lieu de prendre la couleur sur la surface convexe du cylindre e , la reçoit entre les cylindres e, e , au point où le drap présentant une surface concave enveloppe une partie de la circonférence du rouleau v.
- Au degré de perfectionnement où est arrivée la perrotine, il est douteux que ces plom-bines continuent d’être aussi communément employées en Angleterre , où l’on s’en sert, non seulement pour enluminer des couleurs imprimées au rouleau gravé en creux, mais encore pour produire des impressions de dessins blancs et jaunes sur fonds bleus, qui imitent assez bien celles qu’on fait à la planche ; car, quelles que soient les précautions que l’on prenne, il y a toujours dans cette machine un vice auquel il est difficile de remédier : c’est que la couleur, appliquée sur le tissu par une surface courbe, étant toujours plus ou moins laminée et étendue, altère nécessairement plus ou moins la régularité des formes dont se compose le dessin.
- Appendice à T impression en relief.
- § 512. M. Silbermann, de Strasbourg, un des typographes les plus habiles de notre époque, a trouvé un nouveau genre d’impression pour lequel il a pris un brevet d’invention. En nous communiquant son procédé , il a bien voulu nous autoriser d’en dire quelques mots dans cet ouvrage, et nous le ferons avec
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- d’autant plus de plaisir eue nous croyons sa découverte applicable à l’impression des tissus , et que, selon nous , la connaissance du principe sur lequel il repose servira puissamment à expliquer et, par suite , à prévenir les accidents trop fréquents que présente l’impression au rouleau.
- Dans ce procédé on ne se sert plus d’une planche gravée en relief pour prendre de la couleur sur le châssis et l’imprimer sur le tissu, mais seulement du relief de la figure que l’on veut obtenir pour presser l’étoffe, par derrière, contre une planche plate et garnie uniformément de couleur, où les portions ainsi pressées par derriè e sont les seules qui prennent cette couleur,, tandis que les autres sont réservées par la frisquette, qui refoule l’étoffe dans les creux.
- Qu’il s’agisse, par exemple, d’imprimer un dessin représentant des pois o, o, o, o ; on découpe, au moyen d’un emporte-pièce, des ronds en carton fin, de la dimension qui convient; ces ronds sont fixés à la colle-forte contre une planche en bois ; alors on place l’étoffe entre cette dernière planche, sur laquelle elle est tendue, et une autre planche chargée de couleur; on soumet le tout à une pression convenable, et la couleur neprend que sur les parties de l’étoffe qui ont été mises en relief par les hausses de carton.
- Nous avons vu imprimer par ce procédé un bouquet de fleurs de fantaisie, dans lequel sept couleurs ont été appliquées avec la même planche et rapportées avec la plus grande exactitude, à l’aide de simples fragments de carton découpé collés aux points où le relief devait être produit . Rien ne peut donner une idée plus juste du degré de perfection auquel est arrivé M. Sil-bermann dans ce genre d’impression que l’échantillon 15, p. 20A.
- Avec la presse typographique, le problème de l’impression en relief par derrière est complètement résolu : rien ne l’atteste mieux que ces chefs-d’œuvre qui sortent des presses de M. Sil-bermann ; mais pour en introduire l’application dans les ma-
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- chines à imprimer les étoffes, il importerait de prendre quelques dispositions particulières, assez faciles d’ailleurs à réaliser.
- Ainsi, pour imprimer au rouleau les pois dont il vient d’être fait mention, il suffirait de découper le nombre de ronds voulus et de les coller sur un cylindre en bois ou en cuivre, puis de placer ce cylindre au-dessus d’un autre uniformément chargé de couleur, et de faire passer la toile à imprimer entre les deux-le rouleau f , faisant fonction de presseur par ses reliefs seulement, refoulerait les parties correspondantes du tissu contre le cylindre servant de châssis, où elles se chargeraient de couleur; mais comme on n’aurait pas la frisquette de la presse typographique pour préserver les parties qui doivent rester blanches, à l’effet d’empêcher le reste du tissu de se salir au contact du rouleau, il conviendrait de mettre en avant de ce rouleau un éy lin dre formé d’une substance très élastique, qui aurait pour effet de refouler l’étoffe dans les creux formés par les reliefs.
- La fig. 114 représenterait
- Fig. 114.
- ^ la coupe d’une semblable dis-|1 position : d serait le rouleau sur { lequel se trouveraient collés les
- reliefs en carton , b le rouleau refouleur, et c un cylindre chargé de couleur. Le tissu, se déroulant delabobineA, passerait d’abord entre les deux cylindres d, b, où les parties qui devraient rester blanches se-
- raient refoulées, et, enfin , entre n, c, où les parties correspondantes aux reliefs recevraient de la couleur.
- Ce peu de mots doivent suffire pour faire saisir le principe de l’invention de M. Silbermann et pour faire comprendre en même temps qu’elle n’est applicable qu’à des genres de dessins déterminés, qu’on ne peut songer, par conséquent, à l’employer à l’impression de dessins à formes trop déliées. Renfermée dans
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- ces limites, cette invention est encore susceptible de très belles applications. Ainsi, par exemple, si l’on voulait imprimer des bandes en fondus, on n’-aurait qu’à tourner ces bandes sur un cylindre en carton, en les faisant aller en expirant dans un sens quelconque, comme le représente, mais d’une manière exagérée, la fig. 115 : f serait Fig. 115.
- le cylindre qui servirait à presser le tissu contre une surface uniformément garnie de couleur où il se chargerait d’une quantité de cette couleur qui irait en s’affaiblissant, comme les échancrures. Pour obtenir des bandes en diverses nuances, on n’aurait qu’à déposer, au moyen d’une caisse à compartiments ou de toute autre manière, des bandes de diverses couleurs sur les rouleaux fournisseurs. Pour imprimer des rayures ou des carreaux. il suffirait de les produire d’abord en relief sur des cylindres en carton dont on se servirait comme rouleaux presseurs. On pourrait même produire de très beaux effets d’impression en plaçant, entre un cylindre presseur ordinaire et la toile à imprimer, un tissu à claire-voie, en métal ou en fil tordu ; toute l’étoffe à imprimer étant refoulée dans les mailles, il n’y aurait que les reliefs qui prendraient de la couleur, et l’effet des points saillants qui présentent des surfaces convexes se reproduirait par des fondus sur l’étoffe.
- De l’impression en creux dite en taille-douce.
- § 513. Ce genre d’impression est complètement différent de celui qui vient de nous occuper. Lorsqu’on a gravé en creux, sur une surface plane ou convexe, le sujet qu’il s’agit d’imprimer, un recouvre cette surface d’une couche uniforme de couleur qu’on fait pénétrer dans les cavités de la gravure et qu’on enlève, au contraire, des parties pleines aussi nettement que pos-
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- sible par différents moyens ; puis on force le tissu à imprimer, en l’appliquant contre la surface gravee avec une pression convenable , à pénétrer dans les cavités remplies de couleur et à recevoir ainsi l’empreinte du dessin.
- L’impression en creux se fait à l’aide, tantôt de planches planes, tantôt de cylindres. Intermittente dans le premier cas, elle est continue dans le second.
- 5} 51 h. De T impression en creux intermittente. Ce genre d’impression , qui doit naissance à l’impression en taille-douce, est plus généralement connu sous le nom d'impression à la‘planche plate. On n’est pas fixé sur l’époque à laquelle on commença à faire usage, dans les fabriques d’indiennes, de la presse qui sert à la reproduction des œuvres du peintre. Sans doute ici encore le fabricant qui l’employa le premier avait intérêt à dissimuler un procédé dont très probablement les belles gravures dites camayeux, qu’obtenaient les imprimeurs en taille-douce, lui donnèrent l’idée, puisque dans les plus anciennes tentures on retrouve les-impressions des mêmes sujets.
- Un Écossais du nom de Bell est, dit-on, le premier qui ait imprimé à la planche plate, vers 1770. Nous pensons que ce genre d’impression remonte beaucoup plus haut ; et ce qui nous porte à le croire, c’est l’impression , qui a évidemment été faite à la planche plate, d’une toile d’environ 80e carrés, qu’on voit à la bibliothèque de Strasbourg , et dont le sujet accuse une date plus ancienne, en même temps que le nombre des couleurs (violet et rouge garancé, bleu de pinceau), un progrès notable dans l’application des presses en taille-douce à la fabrication de l’indienne.
- Dans le principe, la machine à planche plate n’était autre chose que la presse de l’imprimeur en taille-douce, dont nous regardons comme inutile de donner le dessin : aussi les rapports étant extrêmement difficiles, parce qu’ils devaient se faire à l’œil, le fabricant était-il obligé de ne graver que de grands sujets détachés qui se trouvaient en entier sur une planche, comme
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- on peut le voir dans les vieilles tentures en camayeux. La manœuvre de ces premières machines se faisait à la main , et outre que la grandeur des planches la rendait très pénible, elle était d’une lenteur extrême. Bientôt on chercha et l’on trouva les moyens d’obtenir des rapports exacts, et de rendre la marche de l’impression tout à la fois moins difficile et plus rapide, en faisant mouvoir les planches mécaniquement. Par suite, les dimensions de ces planches furent considérablement réduites : au lieu d’avoir, comme celles qu’on employait dans le principe, 1 mètre et plus de longueur, elles n’eurent plus que 15 à. 20 centimètres, selon le sujet ; et cependant, tels sont les perfectionnements apportés à ce genre d’impression, qu'on fait aujourd’hui beaucoup plus de besogne avec ces planches réduites qu’avec les anciennes.
- La machine à imprimer à la planche plate se compose :
- 1° De deux rouleaux, faisant office de laminoirs, placés sur un bâtis en fonte et destinés à presser l’étoffe. Le rouleau supérieur est fixe et garni de plusieurs doubles de toile bien collée ; le rouleau inférieur, aplati sur un des points de sa surface, est mobile et peut être rapproché à volonté du rouleau supérieur ; il porte d’ailleurs un rochet qui arrête la planche lorsqu’elle a glissé entre les deux rouleaux et qu’elle doit rebrousser chemin. Ces rouleaux reçoivent le mouvement d’un moteur à l’aide d’une roue intermédiaire ;
- 2° D’une plaque en cuivre gravée, portée sur un châssis en fonte, qui, en roulant sur de petites roues, conduit la plaque entre les rouleaux ;
- 3° D’un réservoir à couleur, d’une racle, docteur ou lame d’acier, qu’on peut à volonté élever ou abaisser, et qui, durant le mouvement de la planche pour arriver en présence des rouleaux, enlève, en l’essuyant avec la plus grande rapidité, 1 excès de la couleur qui ne trouve pas à se loger dans les creux de la gravure ;
- 4° D’un drap sans fin tendu aux extrémités du bâtis en bois.
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- où les pièces et ce drap lui-même se dessèchent en passant sur un tuyau chauffé.
- Pour peu qu'on se pénètre bien du rôle que doit jouer le drap dans ce genre d’impression, on conçoit qu’il doit être aussi fin, aussi uni et aussi élastique que possible ; car sa fonction est de refouler le tissu dans les cavités dç la gravure et de le forcer à se charger de la couleur qui y existe : or, ce refoulement ne pourrait s’effectuer si le drap, au lieu d’être élastique, était résistant comme une lame métallique ou s’il renfermait des parties plus fortes et plus dures les unes que les autres.
- La machine une fois établie , l’opération en elle-même ne présente aucune difficulté. Après avoir été uniformément chargée de couleur, la planche, poussée par l’ouvrier, glisse rapidement sous la racle, qui en enlève l’excès de couleur, puis entre les deux cylindres , pendant que le cylindre inférieur offre sa surface plane au cylindre supérieur, jusqu’au point que détermine la roue à rochet. Alors le cylindre inférieur, en tournant sur lui-même, la saisit, et en lui imprimant un mouvement opposé au premier, la presse contre le rouleau supérieur, où elle est mise en contact avec le tissu et le drap sans fin. Lorsqu’elle sort d’entre les deux cylindres, l’ouvrier la ramène à lui, la charge de nouveau de couleur, et ainsi de suite.
- Au reste, pour donner au lecteur une idée plus juste de cette machine, nous reproduisons textuellement la description que nous en adonnée M.Huguenin Cornetz. (PL VII, fig. 1, 2, 3, h, 5.)
- „ a, a, a. B;Uis en bois reunis par des jumelles.
- bu'. Chariot qui porte la planche.
- b'. Chevilles en bois placées aux extrémités du chariot, à la portée de l’ouvrier.
- b. Galets fixés de chaque côté de la machine, réunis par trois arbres transversaux et qui servent de guide au chariot.
- c. Planche en cuivre gravée, amincie sur les bords et fixée sur la traverse en fonte du chariot par ses extrémités. Cette planche est en cuivre rouge de 5 à 6 centimètres d’épaisseur.
- u. Rouleau en fonte, coulé sur un arbre en fer qui tourne dans des coussinets fixes.
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- n'. Rochets à quatre dents placés aux deux extrémités de la table du rouleau, fig. 5.
- d. Étoile en bronze à quatre dents, fixée à l’extrémité de l’arbre du rouleau.
- d'. Petits buttoirs en fer forgé, fixés sur le chariot, et qui s’arrêtent contre les dents des rochets d'.
- e. Rouleau inférieur en fonte, coulé sur un arbre en fer, et présentant une partie plate, fig. 1.
- e. Coussinets mobiles du rouleau inférieur.
- f. Vis de pression qui rapproche le rouleau presseur de la planche.
- g. Plaques en fonte fixées au bâtis , portant les coussinets fixes du rouleau supérieur, les coussinets mobiles du rouleau presseur et les écrous des vis de pression.
- h. Levier en fer qui sert à ramener le rouleau supérieur au rapport.
- h. Buttoir fixé au levier h , et qui agit sur l’étoile d.
- k. Levier en fer placé sur l’extrémité de l’arbre du rouleau inférieur, et servant à faire tourner le rouleau supérieur lorsque l’impression commence.
- k. Buttoir fixé au levier k, et qui agit sur l’étoile d.
- î. Levier en fer fixé à l’extrémité de l’arbre du rouleau k, et qui agit sur le levier h pour ramener le rouleau supérieur au rapport, lorsque le buttoir i vient à pousser la corne du levier h qui fait elle-même agir le buttoir h contre l’étoile.
- i. Buttoir fixé sur le levier i, et qui agit sur la branche inférieure du levier h.
- l. Pièces en bois fixées au bâtis, d’un côté par un boulon , de l’autre par une équerre en tôle. Le trou pratiqué au bâtis pour le passage du boulon est allongé, ainsi que celui de l’équerre en tôle, afin que ces pièces puissent être réglées dans le sens de la longueur.
- l. Traverse en fer qui sert à soutenir la racle, quand celle-ci se trouve à l’état de repos , ou à l’appuyer lorsqu’on lui fait faire un demi-tour pour l’abaisser sur la planche.
- m. Racle.
- m, Vis qui sert à régler la racle.
- n, n. Châssis dans lequel se met la couleur.
- o, p. Rouleau et règles élargisseuses sur lesquelles passe la pièce avant de s’imprimer.
- s. Bobine sur laquelle est enroulée la pièce blanche.
- r. Volant pour donner le mouvement à la machine.
- I. Manivelle sur laquelle agit l’homme qui fait marcher la machine, v. Pignon de 11 dents. v. Roue de 2? dents.
- x. Pignon de 9 dents.
- y. Roue de 78 dents.
- s. Support des roues et du volant.
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- Fig. I. Coupe longitudinale par le milieu de la machine.
- Fig. 2. Coupe transversale suivant la ligne 1, 2 de la fig. 1.
- Fig. 3. Coupe horizontale suivant la ligne 3, 4 de la fig. 1.
- Fig. 4 et 5. Vue extérieure du mécanisme servant à ramener la planche au rapport.
- Jeu de la machine. Le chariot porte-planche étant placé de manière que la planche gravée se trouve au-dessus du châssis N, N, l’ouvrier placé en b', fig. 1, prend de la couleur du châssis avec une brosse et l’étend sur la planche, puis renverse la racle M, et repousse le chariot vers les rouleaux.
- La racle renversée enlève l’excédant de couleur, qui retombe dans le baquet , et le chariot continue sa course jusqu’à ce que les buttoirs d' [fig. 5), fixés exactement sur la ligne où commence la gravure de la planche, viennent toucher la dent du rochet d', qui, à l’état de repos , doit se trouver sur la verticale, comme l’indique la fig. 4. L’ouvrier, agissant alors sur le volant, fait tourner le rouleau e dans le sens de la flèche. Celui-ci porte sur l’un de ces tourillons un levier k dont le but-toir k vient frapper l’étoile d fixée sur l’arbre du rouleau supérieur d. De la sorte les deux rouleaux étant en marche, la planche que vient presser le rouleau inférieur est forcée de passer entre deux , et continue sa course jusqu’à ce que ce rouleau e ne soit plus en contact avec elle.
- La gravure de cette planche a exactement pour largeur 1 !\ de la circonférence du rouleau supérieur ; en sorte que, pour que le rapport soit conservé pour le coup de planche suivant, la seconde dent du rochet d'doit se trouver sur la verticale, lorsque le rouleau d cesse de marcher. Mais comme la planche est toujours un peu plus large que la gravure, l’espace parcouru par le rouleau sera toujours trop grand, et, par conséquent, il devient nécessaire que la seconde dent du rochet soit ramenée au point voulu. Les leviers I et LI produisent ce mouvement. En effet, que le rouleau inférieur,^. 4, continue sa marche, le levier k abandonne l’étoile c/, et la planche étant
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- poussée hors «de la ligne de contact, le rouleau supérieur reste immobile. Mais les dents de l’étoile cl et du rochet n' sont inclinées dans le sens du mouvement ; alors le rouleau inférieur marchant toujours, le buttoir i, du levier I, vient toucher la branche inférieure du levier h. Celui-ci tournant aussitôt sur son point d’attache, le buttoir h', fixé sur sa seconde branche, heurte la dent supérieure de l’étoile d, et fait rétrograder le rouleau d, ainsi que la pièce imprimée et le drap qui passent dessus. Or, il est facile de concevoir que si la place du buttoir i se trouve réglée de manière qu’il abandonne la branche inférieure du levier h, exactement à l’instant où cette branche fait arriver la dent de l’étoile d sur la verticale, le rouleau se trouve précisément dans la même position que s’il n’avait fait qu’un quart de tour, et par suite le second coup de planche arrive infailliblement au rapport.
- Reprenons maintenant la marche de la planche. Nous avons vu que cette planche se meut dans le sens de la flèchejicj. 1 ; il arrive donc un point où, n’étant plus en contact avec le rouleau, elle reste stationnaire. C’est à ce moment que l’ouvrier saisit le chariot par les chevilles//, l’attire à lui jusqu’à ce que la planche se retrouve au-dessus du châssis, et recommence la même opération que précédemment, c'est-à-dire étend la couleur sur la planche, renverse la racle (représentée à l’état de repos sur la fig. 1), et repousse le chariot jusqu’à ce que le buttoir vienne heurter la dent inférieure du rochetü'. Pendant ce temps, comme l’ouvrier qui tourne au volant n’a pas discontinué, le rouleau inférieur arrive à présenter sa partie plate du côté de la planche, et celle-ci, qui s’abaisse légèrement sur les galets dès qu elle n’est plus pressée, repasse entre les rouleaux sans en subir la pression, pour reprendre la position indiquée surlayù/. 1.
- Par ce procédé , on réalise des impressions d une délicatesse et d’un fini qu’aucun autre n’a pu donner jusqu ici. Cet avantage est dû, i°à ce qu’il permet de faire usage de couleurs plus épaisses et par conséquent moins sujettes à couler ; 2° a ce que la couleur
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- est raclée avec beaucoup de promptitude, et qu’il* est démontré que la planche se nettoie d’autant mieux que la racle passe dessus avec plus de rapidité ; 3° à ce que les planches passent entre les rouleaux avec la vitesse et la pression qui conviennent le mieux à la gravure, et surtout, 4° à ce que le tissu, qui a été engagé dans les cavités de cette gravure, en est relevé graduellement et sous un certain angle ; car cette dernière circonstance, en apparence insignifiante , a beaucoup plus d’importance qu’on ne le croit généralement, puisqu’il ne faut qu’imprimer avec une planche et relever l’étoffe plus ou moins brusquement sous tel oü tel angle, pour obtenir des résultats diamétralement opposés ; ce qui s’explique , si l’on veut faire attention qu’en définitive .ce sont deux corps qui s’en disputent un troisième, auquel ils adhèrent
- § 515. De l'impression en creux continue. La découverte des machines à imprimer en creux a exercé une si grande influence sur les destinées de l’industrie qui nous occupe , que nous ne saurions mettre trop de soin à en traiter la question historique. Plusieurs écrivains nationaux l’attribuent à un Français. Ainsi, dans un rapport fait à la Société d’encouragement à l’occasion de la machine de M. Perrot, il est dit, t. XXXVIII, p. 433 : » Vers l’année 1801, M. Oberkampf » essaya, dans sa belle manufacture de Jouy, d’imprimer » avec des cylindres de cuivre gravés. Ce nouveau mode -* d’opérer, que les fabricants de Manchester ne tardèrent pas « à adopter et à rendre aussi simple qu’expéditif, amena des » perfectionnements remarquables dans cette branche d’indus-» trie. » On lit encore, p. 538 des Leçons cle chimie élémentaires (Rouen, 1839) : “Jusque vers 1801, les inclienneurs n’avaient >• que ces deux moyens d’impression (la planche à la main et » la planche plate) ; mais à cette époque, le célèbre Oberkampf, » de Jouy, essaya, dans sa belle manufacture longtemps sans ” rivale, d’imprimer avec des cylindres de cuivre gravés. Ce » nouveau mode d’opérer, que les fabricants de Manchester ne
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- » tardèrent pas à perfectionner et à rendre aussi simple qu’ex-« péditif, causa une révolution dont les effets, dans laprospé-» rité de l’art, furent incalculables. » Dans un savant rapport fait à la Société industrielle de Mulhouse sur les machines à imprimer, M. Joseph Kœchlin émet une autre opinion et ne tranche point la question ; il s’exprime ainsi : » Pour faciliter » l’intelligence du texte , nous avons cru devoir vous soumettre ' ” aussi le dessin d’une des machines françaises appelées, du - nom de leur constructeur, machines Lefèvre. Nous n’en-” tendons pas par là attribuer l’invention de cette machine à » notre pays ; il est possible, il est probable même qu’en Angle-” terre la machine primitive ait été construite dans ce système, ” et que Lefèvre, en ayant eu connaissance, n’ait que le mérite ’• d’y avoir apporté quelques perfectionnements. » T. III, p. 258-259 du Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse.
- Ces remarques de M. Kœchlin rétablissent les faits dans toute leur intégrité et confirment le contenu de la lettre de M. Dollfus-Gontard, qui se trouve dans l’Introduction de cet ouvrage. Du reste, Pope, dans son Manuel des découvertes, annonce que, dès 1770, MM. Charles Tayler et Thomas Walker, de Manchester, imprimaient des tissus avec des cylindres en bois, sur lesquels les dessins étaient gravés en creux. L’auteur n’a, sans doute, pas été suffisamment renseigné : il est plus que probable que ces cylindres étaient formés de plaques de cuivre gravées, qu’on recourbait et qu’on soudait au point de jonction. Quelle que soit l’indécision qui règne à cet égard, il est parfaitement établi qu’en 1785, la maison Livessy, Hurgrave, Hall et compagnie, de Manchester, imprimait avec succès au rouleau gravé en creux, et il ne paraît pas moins certain que c’est à l’Ecossais Bell qu’il faut en attribuer la découverte 5 ce n’est donc que 15 ans plus tard qu’il a été importé en France.
- Comme les premiers cylindres gravés dont on a fait usage en Angleterre n’étaient rien que des planches plates, qu’on re-
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- courbait en forme de tubes et qu’on soudait dans toute leur longueur pour en unir les rapports et en former des cylindres, on peut, sans témérité, avancer que la première idée d’une machine à imprimer d’une manière continue a été donnée par la machine à planche plate; car, en définitive, les deux machines ont les plus grands rapports entre elles ; il n’y a de changé que layforme et le mouvement : la planche, au lieu d’être plane, est convexe, et au lieu d’être mue d’une manière intermittente, l’est d’une manière continue.
- A l’aide des premières machines qui furent inventées, et dont plusieurs sont encore en activité, on n’imprime qu’une seule couleur à la fois ; mais nous cherchions encore les moyens d on tirer parti, que les Anglais s en servaient déjà poui imprimei simultanément deux ou trois couleurs à la fois, et ils nous ont tellement devancés sous ce rapport, que , tandis que nous pouvons à peine aujourd’hui imprimer quatre couleurs en même temps, ils en impriment six.
- Nous ferons connaître d’abord les machines les plus simples, celles à une couleur, parce que leur etudenous aideia puissamment dans la description des machines plus compliquées ou a plusieurs couleurs.
- '*> Quoiqu’au fond toutes les machines simples soient construites sur le même principe, elles présentent cependant dans leurs détails quelques différences, qui, jointes à leur origine, les ont fait désigner par des noms spéciaux : on a les machines Lefèvre, ainsi nommées du nom du mécanicien qui, le premier, les a construites en France, et les machines anglaises ou de système anglais, qui rappellent leur origine ou les particularités qui le» distinguent des précédentes.
- Dans les unes comme dans les autres, on trouve :
- 1° Un rouleau gravé ;
- 2° Un autre rouleau dit presseur, parce que c’est en passant entre lui et le cylindre gravé que la toile est refoulée dans la
- gravure ;
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- Un système de leviers simple dans les machines de Lefèvre,
- composé dans les machines anglaises, qui presse les deux cylindres l’un contre l’autre 5
- h° Un baquet ou réservoir à couleur, qui fournit directement ou indirectement la couleur au rouleau gravé ;
- 5° Une racle, qui a pour objet d’enlever l'excédant de couleur et de nettoyer la surface du rouleau ;
- 0° Un drap sans fin, recouvert ou non d’un doublier, et dont le principal rôle est de faire pénétrer, par son élasticité, le tissu dans la gravure.
- I elles sont les parties essentielles de ces machines ; celles qui sont accessoires ressortiront naturellement de la comparaison que nous ferons des deux systèmes, après en avoir donné la description, que nous emprunterons au Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, t. III, p. 2/|9 à 274.
- Machines Lefèvre. Nous trouvons, dans la planche VIII , une élévation latérale de cette machine, et, dans lafig. 116, une coupe du rouleau presseur, du rouleau gravé , du réservoir à couleur, celle enfin du rouleau fournisseur. Les mêmes lettres sont employées dans la figure et dans la planche.
- a , bâtis en bois ou charpente de la machine. ^
- b , rouleau presseur en fonte de fer creux, qui est soumi^p l’action des leviers g, g.
- c, rouleau gravé en cuivre jaune ou rouge, sur l’arbre duquel se trouve une roue dentée.
- n, rouleau fournisseur, en bois ou en métal , recouvert d’un drap, et qui plonge dans le baquet ou réservoir à couleur, pour transmettre cette dernière au rouleau gravé. Ce rouleau n a aussi une roue fixée sur son arbre, et qui engrène avec celle du rouleau c.
- k, porte-racle ou bras fixés aux points e, aux deux extrémités du cylindre, sur chacun des bâtis de la machine, mais l’un en dedans, l’autre en dehors. C’est à ces bras qu’on ajuste et qu’on fixe, au moyen d’une vis o, la racle f, qu a 1 aide d une
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- vis de rappel on rapproche ou éloigne à volonté de l’axe du cylindre, selon que le diamètre de celui-ci varie.
- Fig. 416.
- g, g, leviers agissant sur le rouleau presseur.
- h, disques en fonte du poids d’environ 10 kil. , dont on augmente ou diminue le nombre suivant la pression que l’on veut obtenir.
- j , réservoir à couleur placé sur une planche k , qui repose, par ses deux extrémités, sur deux leviers en fer forgé l, l servant à éloigner et à rapprocher le baquet fournisseur du cylindre gravé. Le mouvement de ce réservoir est réglé par deux tringles n, n, dont les écrous en œillet i servent à élever ou à abaisser les leviers l, l.
- n , roue dentée fixée à l’extrémité d’un arbre et formant une espèce de treuil sur lequel vient s’enrouler la corde qui sert à soulever les leviers g, g. Cette roue reçoit son impulsion 'une petite roue à rochet, que l’ouvrier fait mouvoir à volonté à l’aide de la manivelle o.
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- p. bobine sur laquelle est enroulée la toile à imprimer.
- q, q, barrages ou règles élargisseuses, qui ont pour objet d’étendre le tissu à imprimer lorsque, se déroulant de la bobine, il se rend entre les deux rouleaux b , c.
- d, cl, drap sans fin qui enveloppe le cylindre presseur dans sa demi-circonférence, ainsi que d’autres rouleaux de suspension et de tension qui se trouvent dans le séchoir.
- Machine anglaise. Dans la machine perfectionnée par M, Rissler [pi. IX), a est un bâtis en fonte de fer avec traverses en fonte b, b, et barres d’assemblage en fer forgé c, c.
- d , supports des leviers primitifs.
- e, leviers primitifs, portant le rouleau presseur n et le rouleau intermédiaire m, qui sont articulés, à l’aide de tirants /, /. avec les leviers secondaires g, g.
- f, tirants en fer forgé, assemblés par une lanterne taraudée qui sert à régler le point d’action des leviers.
- g, leviers secondaires articulés avec les leviers primitifs et portant, à l’une de leurs extrémités , des leviers tertiaires h, sur lesquels on place un contre-poids i, qui sert à régler la pression que l’on veut obtenir.
- k, arbre fixé au plafond et sur lequel se trouvent trois poulies, dont les deux plus petites communiquent avec les leviers secondaires g, et la plus grande sert à soumettre ou à soustraire la machine à la pression.
- l , rouleau gravé en cuivre , placé au-dessus d’un réservoir à couleur y, qui s’élève ou s’abaisse à volonté au moyen d’une crémaillère 2, mue par la roue à rochet 3.
- m, rouleau intermédiaire en fer forgé. Ce rouleau, qui n existait point dans les machines anglaises primitives, a de 8 à JO centimètres de diamètre, est suspendu librement dans une coulisse, se règle, pour la parallèle, par quatre vis, et sert tout à la fois à diminuer la pression , à rendre l’impression plus nette et à réduire la force qu’exige la machine pour se mouvoir.
- n, rouleau presseur en fonte de fer.
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- o, porte-racle pour essuyer la couleur que le poids y fait presser contre le cylindre l.
- p , porte-contre-racle pour nettoyer le rouleau dont la vis z le rapproche de l. Cette pièce n’existe pas dans la machine française; une brosse en fait l’office.
- q , rouleau en bois , appuyant contre le drap sans fin cl qui lui imprime le mouvement.
- r, supports à bascule du rouleau q, qu’on peut presser à volonté contre le drap cl, cl, afin de l’amener au degré de tension désirable.
- s, peigne cylindrique ou vis à six filets divergents du milieu vers la droite et vers 1a, gauche , qui, porté par les supports r, reçoit son impulsion du rouleau q , moyennant une roue intermédiaire qui met en communication les arbres des pièces q et s,
- t, supports de la bobine u, où est enroulée l’étoffe à imprimer, ainsi que des barres élargisseuses v, v, v.
- x, vis qui sert à monter le cylindre presseur lorsqu’on veut laver ou nettoyer le cylindre gravé l.
- On voit, en faisant momentanément abstraction des différences qu’offrent ces machines dans leurs dispositions , que les impressions qu’elles produisent se font, comme nous l’avons dit, en vertu du même principe.
- L’une et l’autre étant prêtes à être mises en activité, c’est-à-dire le réservoir rempli de couleur, le cylindre gravé placé sur ses coussinets, la racle appliquée sur le cylindre dans la position qui lui convient, etc., le bout du tissu à imprimer est amené au-dessus du rouleau presseur, qui est immédiatement abaissé et bientôt soumis à la pression des leviers simples ou combinés; l’impulsion étant alors donnée au cylindre gravé, tout le système entre en mouvement d’une manière uniforme. L’étoffe, après s’être tendue dans le sens de sa largeur en passant à travers le cylindre d’embarrage, s’engage, avec le drap sans fin, entre les deux cylindres, y reçoit l’impression de celui qui est gravé, et, continuant son trajet, se relève avec ce même
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- drap pour se rendre dans le séchoir. Le rouleau gravé recevant continuellement, directement ou indirectement, de la couleur du baquet qu’on alimente au besoin, la racle et la contre-racle remplissent leurs fonctions, et ainsi, à moins d’accidents ou de défauts inhérents à la macnine, ce genre d’impression se fait sans interruption tant qu’il y a de l’étoffe enroulée sur la bobine, pourvu qu’on ait soin de régler le mouvement d’après la nature du dessin à imprimer, ainsi que nous le verrons plus loin.
- Après avoir démontré les points de ressemblance de ces machines, il ne sera pas difficile d’en faire saisir les différences. Il est d’abord une particularité qui, sans avoir une grande importance, mérite cependant d'être signalée ; c’est que le bâtis, qui est en bois et d’une construction massive dans les machines Lefèvre, est en fer dans les machines anglaises, et, occupant moins de place, les rend plus accessibles aux ouvriers ; ensuite :
- 1° Dans les machines Lefèvre, le système de leviers qui sert à presser les rouleaux est simple et demande beaucoup de poids, tandis que ce système de leviers, double dans les machines anglaises primitives, et triple dans le modèle perfectionné par M. Rissler, n’exige, pour donner la même pression, qu’un poids infiniment moindre. Cette différence ne l’envisage-t-on que dans la manœuvre qui se fait, soit au moment où l’on établit la pression sur les cylindres, soit à celui où on les y soustrait , elle assure tout avantage au système de leviers perfectionnés par M. Rissler, qui, demandant un poids moins considérable, facilite le travail des ouvriers et en diminue le danger. Il résulte des expériences de M. Rissler, qu’en plaçant son triple levier à l’extrémité des leviers secondaires, on obtient, avec un poids de 25 kil., une pression égale à 3,222 kil. (p. 251 de son travail), à laquelle s’ajoute encore le poids du rouleau presseur, qui, en moyenne, est de 350à 400 kilogr., et dont la pression est indépendante de celle que produisent les
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- leviers combinés; que si l’on considère, au contraire, ces chali-gements sous le rapport de' l’opération de l’impression en elle-mêine, on arrive aune conséquence opposée. On trouve que les leviers simples, constamment employés par Lefèvre, qui connaissait cependant l’effet des leviers triples, puisqu’il en a fait usage dans sa calandre, vibrent moins et partant donnent lieu à des impressions infiniment plus nettes.
- 2* La racle, dans la machine Lefèvre, a une position toute particulière : le cylindre qu’elle doit nettoyer est placé entre elle et son point d'appui, en sorte qu’alors même que le cylindre ne tourne pas parfaitement rond, la racle n’en produit pas moins son effet, attendu qu’elle s’élève ou s’abaisse d’