Précis de l'électricité
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- SQA.^t
- P E É C ï S
- D H
- L’ÉLECTRICITÉ
- Ëxtrait Experimental & Théorétique des Phénomènes éleâîriques
- PartÆbé Jacquet, Chanoine de St. J.à V.
- COLLECTION A.VCP.È SARTIACX
- VIENNE,
- CHEZ JEAN. THOM. deTRATTNERN,
- IMPR. ET LIBERAIRE DE LA COUR. MDCCLXXV.
- 7 n
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- SON ALTESSE ROYALE
- MADAME
- • L’ARCHIDUCHESSE
- MARIE-ANNE.
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- Ma »A MM
- La permifflon que VOTRE ALTESSE ROYALE veut bien m'accorder de faire paraître ce petit-ouvrageJour Ses Augujies au/pices, efl en méme-tems me marque de la pro-te&ipn qu’Elk accorde aux fçienççs £?* une bonté toute particulière dont Elle daigne réçompenfer mon travail ; Cette grâce ' efl doutant plus précieufe pour moi, qu'elle me fournit Poccd-. flou de tànoigner publiquement à
- m
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- VO TRE AL TESSE RO YALE la reconnoijjmce dont je fuis pénétre, le-très profond re/peét avec lequel je dois & je veux être toute nia vie
- MAL DA. MK DE VOTRE ALTESSE ROYALE
- U trè(-humble & tlis ohéiflint Serviteur L.S. Jacquet.
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- TABLE DES MATIERES
- A PaSL'
- vaut - propos.................... 1
- Notions préliminaires...................- 9
- De fattraction & répulfion électrique. 28
- De la vertu des pointe?................... 55
- De l'étincelle & de l’aigrette électrique. 69 De la Foudre & de quelques autres phénomènes relatifs aux nuages..... 82
- De la Bouteille de Leydc ou Renfort. 128 De la relation entre les deux fin-faces de la Bouteille de Leydc............ 166
- De féleétricité de la Tourmaline.... 208
- Des effets de féleétricité rélativement â la tranfpiration & à la circulation du
- fang.........................- *.... 213
- De l’électricité magnétique...............216
- De l’Eleétrometre........................ 224
- Du Syltéme de Mr. Simmer................. 228
- AVANT.
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- PRÉCIS
- D E
- L’ELECTRICITE,
- EXTRAIT EXPÉRIMENTAL ST THÉO-RÉTIQUE DES PHENOMENES ELECTRIQUES.
- a AVANT-PROPOS.
- e L’Eleétricité eft certainement aujourd’-\ n hui un des plus intéreflants fujets de la phyfique expérimentale :1e peuple cependant ne l’envifage encore que comme un objet de pure curiofité , d’ailleurs peu utile & fi myftérieux, qu’il croit que l'ef-prit hiunain ne peut l’approfondir. Son er-
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- Avant-Propos.
- reur à cet égard importe allez peu; mais ce qu'il y a de fâcheux, c’elt que parmi ceux qui font fortaudelfusdu peuple, la plupart, fi l’on en excepte ceux qui ont cultivé laphy-fique, penfent encore comme le petit peuple au fujet de l’Eledlricité. La leéture de ce petit ouvrage, s'ils daignent le lire, pourra peut-être les détromper: c’ell en leur faveur que j’ai été engagé à le faire imprimer. Peut-être fera-t-il allez d'impreilion pour dilïlper les préjugés, & convaincre tout homme capable de raifonner, que l’Eledlricité ell réellement un fujet auffi intérelfant pour le bonheur public , qu'il ell frappant par toutes les merveilles qu’il ne celle d'étaler à nos yeux.
- Je ne prétends pas ici au titre d’Autheur; puisque je n’ai fait que ralfembler dans un ordre plus fuivi & plus précis, ce que j'ai trouvé épars dans plufieurs autres 'ouvrages. Il n’y a à moi dans celui - ci que le choix des expériences éleétriques, avec l’ordre, l’enchai-nement & la liaifon, que j’ai cru devoir mettre dans les conféquences qui en réfultent rélativement à la théorie , & qui m’ont paru les plus convenables pour donner une idée jutle,précife & complette des principes fondamentaux de l’Eleétricité.
- C’ell dans les œuvres mêmes de Mr. Franklin, où j’ai principalement puifé pour former ce précis que je donne au Public. J’ai auffi eu recours à d’autres excellens ouvrages, & particuliérement à celui que Mr. l’Abbé Herbert Profeiïeur de phylique à Vien-
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- Avant-Propos.
- Vienne, nous a donné en latin en 1772. J’ai de même mis à profit plufieurs expériences & obfervations récentes & intéreffantes, que le favant Mr. d’Ingenhoufen médecin de LL. MM. I. & R. a eu la bonté de me communiquer.
- Les Anciens connoifToient la vertu at-traétive de l’ambre , qu’ils nommoient Electron , d’où eft dérivé le terme d'EleElricité; mais ils n’allerent pas plus loin ; & pendant plufieurs fiecles on ne fit aucun progrès dans cette partie de laphyfique: Ce ne fut qu’à la fin du fiecle paffé qu'on commença à la cultiver. On découvrit alors que l'ambre nétoit pas le feul corps éleftrique, c’eit â dire, qui fût doué de la vertu d’attirer les corps légers. On imagina de faire tourner des globes de foufre au lieu des pièces d'ambre qu’on tenoit à la main : on trouva aufll, qu’im corps une fois attiré par un corps éieétrifé, en étoit enfuite repouffé: enfin les étincelles électriques nechapperent pas à la vue des phyficiens de ce tems-là. Quelque tems après, Newton remarqua,qu’une glace dont on a frotté une furface, attire les corps légers par l’une & l’autre de fes furfaces: mais la grande vertu éleétrique du verre ne fut bien connue que par Hawksbéc qui écrivoit en 1709.
- Après la mort de ce Phyficien, on ne fit pendant l’efpace d’environ 20 ans, aucune découverte de quelque conféquence , & la fcience de l’Electricité parut languir pendant tout ce tems-là: mais en 1728, Mr.
- A 3 Grey
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- Avant-Propos.
- Grey fit revivre en Angleterre cette branche de la phyfique. On lui doit entre autres découvertes , celle du pouvoir des pointes. Mr. de Fay , vers le même tems , cultivoit en France cette fcience avec fuccès & l'enrichit de pluiieurs belles expériences. Enfin vers l’année 1742, les phyficiens d’Allemagne, d’Angleterre , de France & de Hollande, comme de concert, reprirent avec beaucoup de zele l’étude de l’Eledricité, & firent de grands progrès dans l’efpace de quatre ans, c’eft à dire, jusqu’en 1746. La découverte qui fe fit alors de la Bouteille de Leyde, la plus furprenante qui ait été faite en matière d’Eledricité, rendra cette année, fameufe à jamais, dans l’hiftoire de cette branche de la phyfique.
- On doit cette découverte à Mr. Cuneus, citoyen de Leyde , Mrs. Mufchenlroeck , fVatJbn, IVilfon, le Monier & l’abbé Nol-let travaillèrent enfuite avec beaucoup d’application , pour expliquer les phénomènes de cette Bouteille, & pour approfondir unfujet aufli intéreflant que l’étoit devenue l’Eledri-cité par l’expérience de Leyde.
- Vers le même tems ÎEleüricité médicale prit naiflance en Italie, où il parut peu après, une foule de rélations circonftanciées des grands effets, que l’Eledricité avoit produits dans la guérifon de diverfes maladies. Mrs. Pivati à Venife, Ver ali à Bologne & Bianchi à Turin firent beaucoup valoir cette nouvelle, branche de l’Eledricité. La méthode de ces Meilleurs, confiftoit à faire opérer les
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- Avant-Propos.
- remedes par le moyen de l’Eledricité, fans que les malades Ment obligés de les prendre par la bouche. Les uns vouloient qu'on renfermât les drogues dans le globe de verre que l'on frotte : d’autres les plapoient dans 1» main de la perfonne qu’on éledrifoit: d’autres enfin, trouvoient qu’il valoit mieux les faire entrer dans la Bouteille de Ley de, en.les mêlant avec l’eau de cette Bouteille. L’en-thoufiafme pour l’Eledricité médicale pafla enfuite aux autres pays : mais lorsque ces nouvelles & fingulieres méthodes de guérir les maladies eurent été tentées & examinées avec plus de foin, tant en France qu’en Angleterre , elles perdirent tout leur crédit; parce quelles ne produifirent point les. merveilleux effets qu'on avoit tant vantés. Le dodeur Bianchini ProfefTeur de médecine à Venife,écrivit même contre les trois méthodes propofées , & convainquit pleinement tous les favans de l’Europe de la futilité de ces méthodes, par l’évidence des faits & des raifons qu’il allégua.
- Mais ce feroit précipiter fou jugement, fi l’on en concluoit, que l’Eledricité ne peut nous être d'aucun fecours dans les maladies ; car il eft certain, qu’il y en a plufieurs aux quelles fou adivité peut s’appliquer avecfuc-cès. Mille faits bien avérés prouvent que l’Eledricité a opéré les plus belles cures, lorsqu’il s’agifToit dé paralyfies partielles, d'engorgemens d'humeurs, de douleurs Viatiques, de rhumatifmes fimples ou gouteux, de contractions ou raideurs de nerfs, d’ob-A 3 ftruc-
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- Avant-Propos.
- ftruétions, de maux de dents violens, enfin lors qu’il étoit queftion d’ammener à fuppu-ration, ou de diiïiper fans fuppuration des tumeurs opiniâtres on a même vu réuffir Meétrifation fur des fourds, des aveugles & dans différentes fortes de fievres intermittentes. Mrs. Jallabert à Geneve, Sauvage & l’ab-bé Nollet en France » JViijbn & IVilfon en Angleterre, Franklin en Penfylvanie, Zetzel à Upfal, Velfe à la Haie,& fur-tout de Haen à Vienne, fe font particuliérement diflingués par une heureufe application de l’Eleétricité dans ces maladies. On auroit cependant tort de croire, que l’Eleétrifation efl toujours un remede fur & efficace dans ces fortes de maux: mille exemples ont prouvé le contraire : Ainfi il paroit qu’il en efl de l’Eleétri-cité médicale, comme de tous les autres re-medes , qui n’operent heureufement, que lorsque la maladie fe trouve dans un certain degré & dans les circonftances analogues & rélatives à leur vertu falutaire.
- Les progrès que l’Eleétricité faifoit vers le meme tems dans fes autres branches, ne furent pas moins confidérables. Le nombre des phénomènes électriques s’accrut fi fort de jour en jour, qu’on fe crut enfin allez avan-cé dans l’Eleétricité , pour en donner les principes & une théorie qui l’élevât au rang des fciences.
- Mr. L’Abbé Nollet fe mit le premier fur les rangs, en nous donnant fon fyftêmeXAF-fluence & à Effluence. Cet habile phyficien avoit beaucoup contribué par fes recherches,
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- Avant «Propos.
- aux progrès que l'EleAricité avoit déjà faits dans ce tems- là: ainfi, il eft inconteftable qu’on lui eft infiniment redevable à cet égard. Quant à fon fyftême, on ne lui a pas les mêmes obligations: On adopta cependant presque par-tout fes principes; parcequon étoit perfuadé que fa théorie alloit expliquer tous les phénomènes de l'Eleékricité. On fetrompoit: fon fyftême eft tout-à-fait infuffifant pour développer & concilier une foule de phénomènes. C’étoit à Mr. Franklin qu’ étoit réfervée la gloire de nous pré-fenter des principes folides, féconds ,& capables de nous guider fûrement dans la recherche des caufes des différens phénomènes éleftriques. Les expériences & les découvertes que fit cet habile phyficien à Philadelphie en iyjo, lui frayèrent le chemin au fyftême lumineux qu'il nous a donné fur ce fujet. L'accueil favorable que toute l'Europe favante a fait à la théorie de cet illuftre Amériquain, en feit afTez l'éloge. Les phy-ficiens françois mêmes , fi prévenus autrefois en faveur du fyftême de Mr, l’Abbé Nol-let, font aujourd'hui les admirateurs de la théorie de Mr. Franklin , & avouent que fes principes font én Ele&ricité , ce que font ceux de Newton dans d'autres branches de
- llplu théorie de l'Eledricité foyïliw &»«<-tivc, & l'analyfe de la Bouuitli de Lffle firent les objets des premiers écrits de Mr. Franklin : mais la plus belle & en même tems, la plus utile découverte pour le genre humain, A 4 que
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- Avant-Propos.
- que ce favant ait faite, c’efl celle de la ref-femblance parfaite qu'il y a entre le tonne-re ou plutôt la foudre & l’Eledtricité. Ce fut après avoir fait cette découverte, qu’il nous apprit la maniéré de nous garantir de ce redoutable météore.
- Les phyficiens de l’Europe, éclairés & excités par les belles découvertes qui s’étoient faites en Amérique, s’emprefTerent alors de reprendre avec un nouveau zele l’étude de l’Eleétricité : leurs recherches furent heureu-fes, & tournèrent encore à la gloire de Mr. Franklin ; puisque toutes les expériences qu’ils imaginèrent, & les nouveaux phénomènes qu’ils découvrirent, fe trouvèrent toujours d’accord avec fes principes. On doit mettre au nombre de ceux qui fe diftin-guerent le plus dans cette vafle carrière, le P.Beccaria, Mrs.Canton, Wilfon, fVilke,Laval, SauJJure, Æpinus , Priefiley &c. mais il faut mettre à la tête de tous ces illuftres phyficiens, Mr. l’abbé Noilet, qui même en combattant jufqu a fa mort, la théorie de Mr. Franklin, n'a pas peu contribué à étendre les connoifTances électriques: enfin Mr. Franklin lui - même nous a encore donné depuis, un grand nombre de belles expériences, & y a joint des obfervations fi lumineufes, qu’on peut regarder aujourd’hui l’Ele&ricité, comme une des plus brillantes & des plus intéreffantes parties de la phyfique expérimentale.
- NO-
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- Notions Préliminaires.
- NOTIONS PRELIMINAIRES:
- Le mot SEleftricité déligne en général les * effets d’une matière très fluide & très fubtile, différente par fes propriétés, de toutes les autres matières fluides que nous con-noiffons. Les phyiiciens lui ont donné le nom de Fluide-éleftrique ou de Feu - éleïïrique, & conviennent tous, que chaque corps a la portion précife de ce fluide qui lui eft convenable, pour que le corps foit dans fon état naturel: mais cette portion de fluide n'eft pas toiiiours en raifon de la maffe ou du volume des corps; les uns en ont fouvent plus que les autres, par la feule raifon, que leur nature eft différente. Tant que la quantité de ce feu qui eft naturelle à un corps, n'eft point altérée, c’eft à dire, ni augmentée ni diminuée, fon feu éledrique ne fe manifef-te en aucune maniéré & ne tombe pointfous nos fens : mais il eft des circonftances, où un corps raffemble une plus grande quantité de ce fluide éledrique, que celle qui lui convient dans fon état'naturel; & il en eft d’autres, où il perd une partie de ce fluide qui lui eft naturel; & c’eft dans ces deux occa-fions, que ce corps préfente à nos yeux les phénomènes les plus finguliers. Si ce corps a une furabondance de feu éledrique, pour lors il eft dit, éledrifé en -plus, ou pojitive-rrient: mais s’il fe trouve dénué d’une partie A S du
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- io Notions Préliminaires.
- du feu,éledrique qui lui eft propre, dans ce cas, il eft dit, éledrifé tn-moins ou négativement.
- On reconnoit qu'un corps eft éledrifé, imo. à l’attradion & à larépulfion qu’il exerce fur d'autres corps. 2do- aux étincelles qui en partent accompagnées d’un craquement. 3ti°- à un petit zéphir que l'on fent, quand on approche la main ou le vifage de la pointe ou d'un angle d’un corps éledrifé. 4». à l'odeur de foufre ou de phofphorequi fe fait fentir pendant l’éledrifation.
- Tous les corps ne s’éledrifent pas par la même voie. Les uns s’éledrifent par le frottement , & les autres en touchant feulement â d’autres corps déjà éledrifés, ou en en approchant de fort près.
- On a donné aux fubftances qu'on ne peut éledrifer que par le frottement, le nom de corps - cleBriques; telles font le verre, la porcelaine , la réfine, le foufre, la foie &c : & l’on nomme corps non - cleiïriques, ou corps conduflenrs, les fubftances qui s’éledrifent par le fimple attouchement d'autres fubftances déjà éledrifées: on peut aufli leur doimer le nom de corps transmettans; tels font tous les métaux, l’eau, les corps vivans &c.
- n.
- Pour éledrifer un corps dit,eleSlrique,tel qu'eft le verre, il ne s'agit que de frotter un tube de verre, ou un verre à pied avec une main bien feche ou avec un morceau de peau ou de drap : par ce frottement on fournit à la furface du verre frotté, une plus grande quan-
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- Notions Préliminaires. «
- quantité de feu éledrique quelle n'en avoit avant le frottement; C’eft que par l’adion de ce frottement, le feu éledrique de la main frottante eft non feulement excité,mais encore attiré & raffemblé fur la furface du verre qui a été frottée ; d’où il réfulte que cette furface fe trouve alors éledrifée en* plus. (*)
- III.
- Les corps non - éleüriques ou transmettant, tels que font les métaux, s’éledrifent d’une toute autre maniéré; il fuffit pour cela qu’ils touchent à un autre corps quelconque qui eft déjà éledrifé. Ainfi quand un tube de verre a été éledrifé, fi on préfente à ce tube un corps transmettant, alors le tube éledrifé lui communiquera l’éledrieité; parcequ'il lui fera part de l’excès de fon feu éledrique;
- &
- (*) On a obfervé, lors qu’on éle&rife un tube de verre, que l’éleâricité s’étend & fe propage peu II peu fur toute la furface du verre , quoiqu’on n’en ait frotté qu’une partie : mais cette propagation fe fait très len-
- II faut encore remarquer, que l'éleftricité en fe répandant ainS fur toute la furface du verre , quoiqu’on n’en ait frotté qu’une partie , diminue Si proportion qu’elle s'éloigne de l'endroit oîi le verre a été frotté. C'elt à Mr. Wilcke qu’on doit cette obfemtion.
- Ce qu'on vient de dire rélativement au verre, doit aufli s'entendre de tous les antres corps électriques, tels que font le foufre, la réfine , la cire d’efpagne , la foie &c. foit qu’on les éleftrife en-plut, foit qu’ea !w éleftrife en-moins.
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- iz Notions Préliminaires.
- & par*là le corps transmettant fe trouvera éledrifé en - plus, pourvu qu’il ne communique pas avec une grande fuite d’autres corps; car dans ce cas, le corps transmettant éle&ri-fé par l’attouchement du tube, transmettroit à ces autres corps le feu éle&rique que le tube de verre lui auroit communiqué: d’oîi il fuit, qu’un corps transmettant, tel qu’eft un corps métallique, communique & transmet à l’inftant même, l’éle&ricité qu’il a reçue , aux autres corps transmettons avec les quels il a quelque communication, foit immédiate , foit médiate : & c’eft de là que les corps non-électriques font auiïi nommés , corps conducteurs ou corps transmettant. Ainfi un corps transmettant eft celui, qui ayant reçu l’é-ledricité par le fimple attouchement de quel-qu autre corps éle&rifé, la communique de même par le fimple attouchement à tout autre corps transmettant.
- Il faut encore obferver,que l'éledricité en paflânt ainfi à tous les corps transmettons qui communiquent les uns aux autres, fe partage & fe divife entr’ eux, à peu-près dans la proportion de leur furface refpédive ; car telle eft la nature du fluide éledrique , qu’il cherche toujours à fe mettre en équilibre fur la furface des corps fur lesquels il peut fe répandre.
- Mais il n’en eft pas de même, lorsqu’un corps transmettant, comme eft un morceau de métal, étant éledrifé , n’a de communication qu’avec des corps électriques, tels que font le verre, la foie, la refîne &c. Car pour lors,
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- Notions Préliminaires. ij
- lors, le corps transmettant éleélrifé ne transmet fon électricité ni au verre, ni à la foie, ni à aucun autre corps éleElrique: La raifon de cela efl, que les corps éleSlriques ne peuvent être éledrifés que par le frottement & non par l’attouchement: de là il fuit, qu'un corps transmettant, tel qu’ eft le métal, s'il eft foutenu par un corps éleElrique, tel qu’ eft le verre ou la foie, fe trouve comme ifolé rélativement à fon éledlricité: & de là vient aufli que les corps éleSlriques font aufii nommés , corps ifolans : Ainfi pour qu’un corps transmettant puiffe être éledrifé & rendu propre à donner des fignes de fon éledrifation, il faut abfolument qu’il foit foutenu par un corps éleElrique qui eft toujours un corps ifolant.
- IV.
- On a imaginé des machines éledriques très commodes,( fig. i.) au moyen desquelles on peut éledrifer les corps éleSlriques & les non - éleSlriques ou transmettons. Ces fortes de machines fe réduisent communément à fixer un globe de verre ou de porcelaine entre deux pointes, & à le faire tourner fur fon axe, de façon que la main ou un couffin de peau frotte continuellement contre l’équateur du globe.
- Au lieu d’un globe de verre ou de porcelaine , on peut fe fervir d’un globe de foufre ou de cire d'efpagne ou de réfine.
- Mr. i’lngenhoufim a imaginé une autre ef-pe ce de machine éledrique : il nous a appris, qu’au lieu de globe on pouvoit employer
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- 14 Notions Préliminaires.
- un difque de glace de miroir qu'on fait tourner verticalement entre quatre couffins de peau (fig. 2.); & l'on a trouvé que ces disques étoient préférables aux globes de verre ou de porcelaine.
- On peut aülfi fe fervir d’une efpece de tambour de velours ou de quelqu autre étoffe de foie, qui tourne fur fon axe. Enfin on emploie de même avec fuccès un disque de carton bien fec & bien verniffé, qui tourne verticalement entre quatre couffins de peaux de lievre. C'eft auffi à Mr. i'Ingen-houji» que nous devons ces deux dernieres inventions. J’ai vu chez lui une machine éledrique garnie d'un difque de carton dont l’effet étoit prodigieux. Le difque avoit quatre pieds de diamètre & donnoit des étincelles qui avoient un pied de longueur. L’inconvénient d’une machine éledrique de cette façon, efl que le carton s’imbibant peu à peu de l’humidité de l’air, perd infenfible-ment fa propriété de corps élcftrique, & devient parconféquent tout-à-fait hors d’ufage. Des globes ou des difques de bois bien déf-féché au four & enfuite frit dans l’huile bouillante, font de - même un bon effet; mais ils ne font pas de durée; iis fe détériorent peu à peu, parce qu’ils s’imbibent auffi de l’humidité qui fe trouve dans l’air.
- Pour completter une machine éledrique, il faut y adapter un Conduüeur : on entend par - là une groffe verge ou barre de fer bien unie & arrondie, d’environ un pouce d’épaif-feur,fur deux ou trois pieds de longueur: au lieu
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- Notions Préliminaires. iy
- lieu d’une barre de fer , on peut fe fervir d’un tube de fer-blanc ou de laiton, ou fi l’on veut, d’un tube de carton doré ou recouvert d’une feuille d’étain. On donne à ces fortes de tube telle grofleur & telle longueur qu’on juge à propos. Pour adapter un pareil tube, ou Condufteur, à la machine électrique , on le fufpend horizontalement à deux cordons de foie, de maniéré qu’il fe trouve au deflus du globe de verre ; & l’on attache à ce tube une petite houppe de fils métalliques , dont les extrémités touchent l’équateur du globe de verre : à la place d’une pareille houppe, on peut fe fervir d’une chaînette de laiton , dont les deux bouts doivent auffi repofer fur le globe de verre. Au relie, il faut avoir la plus grande attention que le conduéteur foit parfaitement ifolé, c’ell à dire, qu’il ne touche à aucun autre corps transmettant ; fans quoi, on ne parviendroit pas à l’éleétrifer: c’ell pour cette raifon qu’on le fufpend à des cordons de foie. Si le conduéteur n’avoit qu’un ou deux pieds de longueur, on pourrait, au lieu de le fufpendre à des cordons de foie, le faire repofer fur un corps ifolant.
- Quand la machine éleétrique eil con-ftruite avec un difque de glace de miroir; alors le conduéteur doit être formé en demi-cercle, & il faut armer fes extrémités de deux ou trois pointes fort aiguës, & placer le conduéteur de façon , que les pointes fe trouvent à une ou deux lignes de diftance de la furface de la glace (fig. 2.)
- Quand
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- 16 Notions Préliminaires.
- Quand tout eft arrangé de la forte, & qu’on fait tourner le globe de verre, le feu éledrique qu’il excite dans le corps frotteur, fe raffemble fur la furface de ce globe, & celui-ci le communique auflitot au conducteur , qui par - là même, eft éledrifé en - plus ; puisqu'il fe trouve alors chargé d’une plus grande portion de feu éledrique, que celle qui lui convient dans fon état naturel.
- Il eft affez ordinaire , pendant qu’on éledrife ainfi un condudeur, qu’une odeur de fouffe qui s’exhale, foit du globe, foit du corps frotteur, fe Me fentir à tous ceux qui font près de la machine éledrique. Ce phénomène a toujours lieu quand la machine eft bien animée & que le tems eft favorable à 1’ éledricité.
- Obfervez, que fi le condudeur avoit quelque communication avec le plancher, ne fut-ce que par le fil de fer le plus délié, alors le globe frotté lui transmetroit de mê-fon feu éledrique; mais ce feu ne s’arrête-roit pas au condudeur ; car il pafieroit fur le champ au plancher & aux autres corps transmettons qui communiquent avec lui.
- V.
- Les métaux tiennent le premier rang parmi les corps transmettons : c’eft à dire, que les métaux font de tous les corps connus , ceux qui s’éledrifent le plus promptement par l’attouchement, & qui transmettent enfuitele plus facilement le feu éledrique aux autres corps transmettons. Après les métaux,
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- Notions Préliminaires. 17
- on convient généralement, que l’eau & les autres fubftances liquides font les meilleurs corps transmettans. On met dans la troifie-me claffe presque toutes les parties animales vivantes : Enfin il faut ranger au nombre des corps transmettans, tous ceux qui participent etjTquelque façon à la nature métallique ou aqueufe, par l’humidité ou par les parties métalliques que ces corps peuvent contenir. Mais il faut obferver, que ces corps font plus ou moins transmettans, à proportion qu’ils ont plus ou moins d’humidité ou de parties métalliques. De là il fuit, qu’il pa-roit y avoir entre les métaux & l’eau un rapport effentiel, que l’on ignoroit ci-devant; puisque fi- l’on parvient à dépouiller un corps transmettant de tout ce qu’il a d’humi--dité ou de métallique, il cefle aufiitôt d’être un corps transmettant, & paffe dès lors dans la clafTe des corps éleÜriques.
- Voyons à préfent quels font les corps qui forment la clafle des corps éleÜriques ou ifolans ; car on peut leur donner indifféremment un de ces noms.
- En général toutes les fubftances vitrées & les réfineufes font des corps éleÜriques ; c eft à dire, qui ne s’éledrifent que par le frottement : Ainfi le verre, la porcelaine, le criftal,les pierres précieufes , la réfine, les gommes, les vernis, la cire d’efpagne & la cire ordinaire font des corps éleÜriques. Il faut encore y ajouter la foie, le foufre, la B laine,
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- Ig Notions Pkeliminaires..
- laine, le poil, la plume & toutes les parties animales parfaitement défféchées ; de même que le papier, le carton & le bois déiféché au four & enfuite frit dans l’huile bouillante.
- Tous ces corps font appellés éleElriquts, parce qu’ils ont la même propriété que l’ambre nommé EleElron par les anciens; car étant frottés, ils attirent de même que l’ambre , les corps légers qu’on leur préfente.
- Ces mêmes corps éleSlriques font'aufli dits, corps ifolans; parce que ne pouvant être éledrifés que par le frottement, ils ne reçoivent pas l’éledricité des corps éledrifés qu’ils foutiennent, & ne peuvent pas par-conféquent la transmettre plus loin ; d’où il fuit, qu’un corps transmettant éledrifé & fou-tenu par un corps éle'clrique, n’eft pas plus en état de transmettre fon éledricité, ‘ que s’il étoit réellement ifolé généralement de tout autre corps.
- VII.
- Quand un Corps ékclrique , tel que le verre, a été éledrifé en-plus par le frottement , il transmet le feu éledrique au corps transmettant auquel il touche, ou qu’on lui préfente de fort près ; mais il faut remarquer qu’il ne lui en communique qu’une très petite partie; car ce n’eft précifément que celle qui fe trouve fur l’endroit du verre qui a été touché : & de là vient, qu’on peut en même tems, ou fucceffivement, tirer un grand nombre d’étincelles éledriques d’un tube
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- Rotions Préliminaires. 19
- tube de verré éledrifé par le frottement, pourvu qu’on le touche chaque fois dans un endroit différent.
- C’elt cette obfetvatiôn qui a fait imaginer les machines électriques, au moyen des quelles le globe de verre j en tournant fur fon axe, préfente fucceiïivement au conducteur toutes les parties de fa circonférence qui ont été éledrifées en frottant contre le coufl'm.
- viii.
- L’expérience a appris, qu’il y a plufi-eurs fortes de fubftances qui peuvent fe'rvir de corps frotteurs : [mais lorsqu’il s’agit d’un globe de verre ou de porcelaine, il paroit que les métaux font les plus propres ; & c’eft pour cela qu’on a contume d’imprégner le couffin frotteur d’une poudre de craie mêlée de mercure amalgamé avec de l’étain. Plufieurs perfonnes frottent le globe avec la main; elle eft en effet, quand on l’a bien feche, un des meilleurs corps frotteurs qu’on puiffe employer; mais je me garderai bien de confeiller cette méthode, parce qu’elle eft dangereufe : fi le globe qu’on frotte de la main, fe trouvoit défedueux, ou qu’il n’eut pas été refroidi dans la verrerie avec toutes les précautions requifes, on courroit le plus grand rifque de le voir crever & éclater en mille pièces avec la plus grande impétuo-fité.
- On a- obfervé que le foufre frotté eft toujours négatif, à moins qu’il ne foit frotté B 2 con-
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- 20 Notions Préliminaires.
- contre du métal; car dans ce dernier cas il devient pojitif.
- Que le bois féché au four & frotté avec une étoffe, devient négatif.
- Que le verre dépoli & frotté avec une peau de lievre ou de chat, eft toujours né-
- e“if-
- Mr. Wtlcke qui a fait ces obfervations, remarque encore que le verre poli & frotté s’éledrife toujours pojitivemcnt ; il inféré de là, que le verre eft de toutes les fubftances connues , celle qui attire le mieux le fluide éledrique.
- Cependant Mr. l’abbé Herbert a obfervé que le verre poli devenoit conftamment négatif, lorsqu’on le ffottoit avec la peau d’un chat tigré que nos fourreurs nomment Çyper - Katze. -
- Le même abbé ayant fait avec foin un grand nombre d’expériences fur les corps qu’on peut frotter les uns contre les autres, nous a donné dans fon ouvrage fur l’éledri-cité une lifte, par laquelle on voit d’un coup d’oeil, l’efpece d’éledricité qu’ acquiert chaque corps compris dans cette lifte, lorsqu’on le frotte contre quelqu’ autre corps de cette même lifte. Je ne ferai ici mention que des corps qu’on frotte le plus commodément les uns contre les autres ; l’arrangement dans lequel ils font placés , eft tel, que chaque corps frotté avec un de ceux qui le fuivent, s’éledrife toujours en-moins, & qu’il s’éledrife en-plus lorsqu’on le frotte avec un de ceux qui le. précédent.
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- Notions Préliminaires.
- ï°. Les métaux,
- z». Le foufre.
- 2°' La colafane. ; ' '
- 4°- La cire d’efpagne.
- 5°' La foie.
- 6°- Le papier bien fec,
- 7°. La peau préparée par le chamoifeur.
- La laine.
- 9o- Le poil d’ours, de loup, de lievre, de chat.
- io°- Le verre.
- ilo- Le criflal de roche & les pierres précieufes.
- 12°. Le poil de chat moucheté, dit, (Typer - Katze.
- Obfervez par rapport au métal & au foufre , que leur éleélricité varie quand on les frotte l’un contre l’autre , félon qu’on les frotte avec plus ou moins de force.
- Quant à la foie, la noire & celle qui eft teinte d’une couleur minérale s’éledrife négativement , quand on la frotte avec la foie teinte de couleur d’une autre efpece.
- Enfin il faut remarquer, que les corps eleElriques frottés avec des corps de la même efpece, & qui ont chacun un degré égal de chaleur, ne donnent aucun figne d’électricité.
- Mr. l’abbé Herbert a outre cela obfervév, que dans ces fortes d’expériences, il falloît toujours avoir l’attention , que les corps qu’on veut frotter l’un contre l’autre, aient une chaleur égale; fans quoi il arrive fou-vent que le corps qui auroit dû acquérir une B 3 élec-
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- 22 Notions ^Préliminaires,
- éledricité pofitive, s’éledrife négativement. Il a aulli remarqué qu’eu augmentant la force du frottement, il arrivoit de même allés fou-vent, que le corps frotté, qui d’abord s’é-toit éledrifé en - plus, per doit enfuite fon électricité pofitive à mefure qu’il s'échauffait plus que le corps frotteur, <Sç même. qu’il palfoit de l’éledricité pofitive à une négative, tandis quç.ls corps frotteur devenoit pofttif, de négatif qu’il étoit au commencement de l’élect trifation.
- •On trouvera encore dans l’ouvrage latin que Mr. l’abbé Herbert nous a donné fur la théorie de l’éledricité , beaucoup d’autres obfervations fur le même fujet; il eft entré à cet égard dans un grand détail, & l’a traité ayec la plus grande exaditude.
- On a dit plus haut, que lorsqu’un corps éleclriqne, tel qu’ eft le verre, a été éledrifé par le frottement, & qu’il eft enfuite touché par quelque corps transmettant, comme feroit le doigt, on a dit, dis-je » que ce doigt n’enleve au corps frotté que la feule partie d’éledricité, qui fe trouve à l’endroit où le verre a été touché par le doigt, & que toutes les autres parties de la furfacedu verre frotté retiennent l’éledricité qui leur a été communiquée par le frottement.
- Il n’en eft pas de même d’un corps transmettant:, tel qu’eft un condudeur métallique qu’on a éledrifé; car dès qu’on le touche du bout du doigt, on lui enleve toute, ou près-
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- Notions Préliminaires. 23
- presque toute fou électricité. Mais fi au lieu de préfençer le : doigt à ce condudeur éledrifé, on lui préfentoit un peut corps jfolé, qui à caufe de la modicité de fa fur-face, ne put abforber qu’une petite portion de l’électricité du condudeur, dans ce cas, çe dernier confervera la plus grande partie de Ton éledricité, & continuera par confé-quent d’ètre éledrifé, quoiqu’un peu moins qu’auparayant. En un mot, dès qu’un condudeur éledrifé touche à un corps transmettant quelconque , toute l’éledricité qu’il avoit açquife, fe met en équilibre , en fe divifant proportionellement à la furface du condudeur & à celle des corps qui le touchent imédiatement ou médiatement: ainfi, fi le condudeur a été éledrifé en - plus, il partage l’excès de fon feu électrique avec les corps auxquels on le fait communiquer ; & s’il a été éledrifé en-moins, les corps aux quels on le lait communiquer, lui donnent autant de leur feu éledrique naturel, qu’il lui en faut pour en avoir, relativement à fa furface, une quantité égale à celle que confervent les corps qui l’ont touché.
- X.
- Un corps eft dit éledrifé en-plus oupo-Jitivement , lorsqu’on lui a communiqué une furabondance de feu éledrique ; enforte qu’il en. a une plus grande quantité que celle qui lui convient dans fon état ordinaire & naturel : mais il faut outre cela obferver, .que le corps qui n’a que fa portion naturelle JB 4 de
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- 24 Notions Préliminaires.
- de feu éleiftrique, eft auffi confidéré comme élecftrifé en-plus rélativement à quelqu’ autre corps, qui fe trouveroit élecftrifé en-moins, c’eft à dire, qui n’auroit pas tout le feu éleiftrique qui lui eft propre dans fon état naturel.
- Par la même raifon, un corps qui apré-cifément fa portion naturelle de feu életflri-que, doit être confidéré comme élecftrifé en-moins , rélativement à un autre corps qui a au de là de fa portion naturelle de feu électrique , c’eft à dire, qui eft élecftrifé en-plus.
- Ainfi, le même corps qui fe trouve dans un état d’élecftricité naturelle, eft en même tems confidéré comme élecftrifé en - plus , & élecftrifé en-moins: car il l’eft en-plus, rélativement aux corps qui ont une moindre quantité de feu éleiftrique que celle qui leur appartient dans leur état naturel ; & il l’eft en-moins , rélativement aux corps qui ont au delà de leur portion éleiftrique naturelle.
- XI.
- Quoiqu’il y ait différentes efpeces de corps éleclriques, on ne fe fert cependant ordinairement dans les machines éleiftriques que du verre ou de la porcelaine ; parce que de tous les corps éleftriques, le verre & la porcelaine font les plus propres & les plus commodes pour faire les expériences relatives à l’élecftricité. Le verre a cependant auffi fes inconvéniens ; le plus grand eft, qu’il eft fort fufceptible de l’humidité , & que lorsqu’elle s’y eft attachée , elle le met hors
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- Notions Prelt-minaires. 25
- hors d’état d’exciter & de raflembler le feu électrique, quelqu’ effort qu’011 fafle pour le bien frotter : C’eft que lorsque l’humidité s’eft attachée au verre, il paffe en quelque façon au nombre des corps transmettons, qui, comme on l’a déjà dit, ne s’éleétrïfent point par le frottement : donc on frotte alors inutilement le globe de verre: il en faut dire autant de la porcelaine. Dans cette circori-ftan.ce , le meilleur moyen eft de chauffer lentement le verre pour en diffiper l’humidité , & de le bien efluyer avec un linge propre & bien fec : mais fi l’athmofphere ou l’air de la chambre eft humide, le même inconvénient renaitra hientôt.
- XII.
- Un verre humide n’eft pas plus propre à fervir de corps ifolant, qu’à exciter l’éleétri-cité lorsqu’on le frotte: Cependant on fe fert fort fouvent du verre pour ifoler les corps transmettons ; c’eft qu’il y a un moyen de le garantir de l’humidité. Pour cela, il faut enduire le verre d’une couche de cire d’efpagne; car il s’en faut beaucoup que l'humidité s’attache & adhéré aufll fortement à la cire - d’efpagne qu’ à la furface du verre. On en ufe de même avec'les Renforts, dits communément, Bouteilles de Leyde , quand on veut les conferver dans un état propre à recevoir & à retenir toute l’éledricité dont on veut les charger ; c’eft dans cette vue qu’on enduit de cire-d’efpagne toute la par-
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- 2(5 Notions Préliminaires.
- tie du renfort iqui n’eft pas couverte, d'une feuille métallique.
- Les cordons de foie, n’importe de quelle couleur, &, la réfine font auili très propres à ifoler; de là vient, qu’on place fur un gâteau de réfine les perfonnes qu’on veut ifo-1er afin de les pouvoir éledrilér, & .qu’on fufpend ordinairement les condudeurs à des cordons de foie. La cire ordinaire, fi elle n’eft pas parfaitement purifiée, eft moins propre à ifoler que les corps dont on vient de parler; &; outre cela, elle a le défavan-tage que la poufliere s’y attache tellement, qu’il n’eft presque pas poflible de l’enlever ; d’où il arrive, que la cire devient encore par là moins propre à fervir de corps tfolant-XIII.
- L’air pur eft aufli un corps éleftrique & ifolant; autrement aucun corps transmettant environné d’air, ne pourrait être éledrifé ni en-plus ni en moins: car fi on efiayoit de l’é-ledrifer en-plus, l’air emporterait aüffitôt tout le feu éledrique qu’on communiquerait au corps transmettant', & fi l’on vouloit l’é* ledrifer en - moins, on prendrait de même une peine inutile; parce que l’air fuppléeroit d’abord au feu éledrique qu’on lui aurpit enlevé.
- Il.faut cependant obferver, que l’air cef-fe en quelque façon, d’être un corps électrique, dès qu’il n’eft pas fec & pur ; car lorsqu’il eft chargé de vapeurs, il enleve fucçefliVement lè feu éledrique ralfemblé fur la
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- Notions Préliminaires. zy
- la furface des corps éledrifés en-plus, & il en communique à ceux qui font éledrifés en-moins. Il ne faut donc pas être furpris, fi les machines éledriques ne produifent point ou presque point d’effet, lorsqu’elles font placées dans un appartement humide , ou dont l’air efl chargé de vapeurs, ou d’exha-laifons, .qu de fumée, ou de poufliere, Plus l’ajr eft fec,pur&condenfé, plus il eft favorable pour faire les expériences électriques, XIV.
- * ....Quand on éledrife en même teins deux corps inégaux en maffe ou en folidité, mais égaux en-furface, l’un & l’autre recevront à péu près la même quantité de feu électrique : de là il fuit, que la quantité qu’en reçoit un corps par l’éledrifation, eft à peu près en raifon de la furface de ce corps: aiufi il importe affez peu qu’un condudeur foit maffif on creux, qu'il foit d’un métal foli-de ou fimplement de carton recouvert d’une légère feuille métallique ; puisque la portion du feu éledrique qu’il peut -.ecevoir eft beaucoup plus rélative à fa furface, qu’ à fa folidité : d’où il fuit encore, que plus les condudeurs font gros & longs, plus on peut leur communiquer de feu éledrique, & par-conféquent plus l'étincelle qu’on en tirera fera grande, forte & impétueufe.
- Au refte il faut bien diftinguer l'intenfité de l'éledricité d’un corps, de la quantité de fon feu éledrique : fi l’on éledrife en même tems deux condudeurs , dont l’un ait une fur-
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- furface double de celle de l'autre, dans ce cas, un de ces conducteurs recevra le double de feu éledrique ; mais fon électricité ne fera pas plus grande que celle de l’autre; car ils auront l’un & l’autre un degré égal d'éleCtricité; il en eft à cet égard, de l’é-leCtricité comme de la chaleur; deux corps inégaux en maffe peuvent avoir un degré de chaleur égal, quoique l’un, à caufe de l’excès de fa maife, ait abforbé une plus grande quantité de feu que l'autre.
- DE LA RÉPULSION ET DE L’ATTRACTION ÉLECTRIQUE.
- ___ XV.
- Le feu ou fluide électrique eft formé de parties qui ont la propriété de fe re-pouflër les unes les autres, & de fe fuir. On remarquera fenfiblement cette propriété des parties du feu électrique dans deux corps légers, qui ont chacun une plus grande quantité de ce feu que celle qui leur convient dans leur état naturel. Deux petites boules de fureau ou de liege, fufpendues à deux fils de foie, s’éloignent l'une de l’autre, (Fig. i. A.) auflitôt qu’on leur communique une plus grande portion de matière ou feu électrique, foit en les faifant toucher à un verre éleCtrifé par le frottement, foit en les por-
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- Attract. et Repuls. 29
- portant fur le conduéleur auquel le globa frotté a communiqué l'éleélricité.
- Le phénomène d’un petit jet d’eau élec-trifé qui s’élance d’un fiphon, (Fig. 3. A.) confirme bien_ ce fentiment; puisque l’eau éleétrifée en jailliflant, fe divife impétueu-fement en un grand nombre de rameaux qui s’écartent les uns des autres, & qui en retombant, s’éparpillent à deux ou trois pieds à la ronde.
- On obferve le même phénomène dans le filet d’eau qui s'écoule d’un entonnoir dont l’ouverture inférieure ell fort étroite ; car dès qu’on éleélrife l’eau de cet entonnoir, le filet d’eau qui en fort, fe fépare en forme de|cône; parce que chaque goutte fait alors un effort pour s’éloigner des autres: (Fig. 4. A.) Mais lorsqu’on enleve le feu éleétrique à l’eau en y plongeant le doigt, le phénomène ceffe, & le courant fe réunit & fe raf-femble.
- Une houppe de fil, ou même une aigrette de verre fufpendue à un conduéleur, prouve la même chofe ( Fig. 5. ) ; car dès qu’on éleélrife le conduéleur, les fils s’éloignent & s’écartent les uns des autres, & ne fe rapprochent que lorsque par l’attouchement du doigt, on a enlevé au conduéleur toute l’éleétricité qu’on lui avoit donnée.
- On fe convaincra de même que les parties du fluide éleélrique doivent avoir la propriété de fe repoufîèr, fi l'on obferve avec quelle promptitude & avec quelle vivacité, tous les petits corps légers s’éloignent d'un con-
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- conducteur, aulïitôt qu’ils ont été ëlèdflféÿ en allant toucher le conducteur. Il ne s'agit pour obferverce phénomène, que de laif-fer tomber fur un conducteur éledrifé, de la fciure de bois ou du fon, oü des brins de feuilles d’or battu, ou de papier»
- C’elt encore par la même raiiôn que les cheveux d’une perfonae ifolée, tenant la main fur le condudeur, fe dreifent fur la tête par l’effort qu’ils font pour s’écarter les uns des autres, (Fig. 3. B.)
- XVI.
- Lorsqu'on éledrife un corps transmettant , le feu électrique ne pénétré point ou presque point dans la folidité intérieure du corps; mais une partie du fluide adhéré à la fuperficie du corps éledrifé, & le relie forme au tour du corps, une athmofphere éledrique d’autant plus confîdérable qu’on l’éledrife davantage. (Fig. 6. PI. II.) Le témoignage de nos fens confirme ce fentiment ; puisque, lorsqu’un condudeur e(l éledrifé» & qu’on lui préfente le revers de la main ou le vifage à la diftance d’un pouce & demi, on fent une impreflion, comme fefoit celle d’une toile d’araignée : or une femblable impreflion ne peut gueres être attribuée qu’au fluide éledrique qui fe trouve entre le condudeur & la main ou le vifage»
- Le phénomène de cette athmofphere efl une fuite naturelle de la force répulfive dont les parties électriques font douées ; car la quantité naturelle de. feu éledrique dont un • corps
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- corps transmettant eft pourvu, doit en vertu de fa force répulfive, repoufTer tout autre feu électrique , & par fa réfiftance, l’empêcher de pénétrer dans l’intérieur du corps quon éledrife : Ainfi il faut bien que l’excès du feu éledriqlie qu’on lui communique en l’éledrifant, relie fur la fuperficie du corps & forme Une athmofphere au tour de lui.
- Il faut cependant obferver, que la force avec laquelle les parties du fluide éledrique s’écartent les unes des autres , par la propriété quelles ont de fe repoufier réciproquement , fe trouve modifiée & tempérée par une autre force, qui retient le fluide électrique au tour de la fuperficie du corps élec-trifé: car l’expérience paroit prouver bien clairement, que les corps ont la propriété d’attirer à eux le fluide éledrique ; ou fi l’on veut, qüe le fluide éledrique fe porte de fa nature vers les corps : Ainfi c’eft de la combinaifon de ces deux forces oppofées, que réfulte l’athmofpere éledrique qui environne toujours les corps éledrifés.
- XVIII.
- De là il fuit, que le fluide éledrique a cette analogie avec tous les autres fluides, que fes parties fe repouflent mutuellement pour fe mettre en équilibre; & qu’en même tems, il eft puiffamment attiré par les autres corps, qui le retiennent & le fixent fur eux, autant que leur propriété attradive le leur per-
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- 32 Attract. et Repuls.
- permet. C’eft ainfi que l'air fait toujours tout Ion effort poilible pour fe mettre en équilibre, & qu’il eft en même tems attiré, abforbé & enchaîné par la plûpart des autres corps dans lesquels il s’eft infinué. Il en eft de même des vapeurs de l’athmofphere qui fe repouffent mutuellement , jusqu’à ce quelles fe foient mifes en équilibre, & qui en même tems font fortement attirées par le verre, le bois, les pierres &c, & s’y attachent très fortement. On peut en dire autant des exhalaifons des corps odoriférans, & de tous les autres fluides éleétriques.
- XIX.
- Il eft une troifieme caufe qui contribue à former l’athmofphere éleétrique au tour des cprps qu’on éleétrife, favoir, l’air dont cha^ que corps fe trouve environné: car comme l’air eft un corps originairement eleBrijue & ifolant, le fluide éleétrique ne peut pas y pénétrer i d’où il arrive, que l’air le fixe fur la fuperficie des corps éleétrifés, par la réfiftan-ce & l’obftacle qu’il oppofe à fa diifipation, ou plutôt à la force répulfive dont le fluide éleétrique eft doué & par laquelle jl faitf tous fes efforts pour fe mettre en équilibre.
- Au refte, comme la denfité de l’air n’eft pas toujours la même, la réfiftance qu’il oppofe au fluide éleétrique, varie auffi; & de là vient, que l’athmofphere des corps élec-trifés eft quelquefois reflerrée dans des bornes plus étroites, & que d’autres fois, elle s’étend davantage : mais à la longue tout le
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- feu élëdlriqne eft enfin abforbé par les vapeurs , les exhalaifons & les autres matières qui nagent dans l’air : cette diflipation du feu éledlrique eil plus ou moins prompte, félon que l’air ell plus ou moins chargé de petits corps étrangers.
- On vient de dire que le fluide éledlrique fait tous fes efforts pour fe mettre en équilibre ; il fuit de là, que fi un corps a plus d’é-ledlricité qu’un autre, ils doivent partager ce furplus dès qu’ils fe toucheront, & qu’ils doivent partager tout le feu éledlrique que l’un a de plus que l’autre , proportionelie-ment à leur furface : car les corps étant doués de la faculté d’attirer à eux le fluide éledlrique, il faut que ce fluide, en vertu de cette attradlion, fe partage entre ces corps félon la proportion de leur furface ; fans quoi il ne parviendroit pas à fe mettre en équilibre.
- On obfervemême que cette force attractive des corps, de même que la propenfon du feu éledlrique à fe mettre en équilibre dans les corps, font telles, qu’il fuffit quelque fois qu’un corps foit placé dans l’athmof-phere d'un condudleur éledtrifé, pour que celui - ci lui communique une partie de fon éledlricité furabondante.
- Préfentez de près à un condudleur élec-trifé en-plus, deux petites boules de fureau ou de liege fufpendues à des fils de foie, de façon que ces deux boules fe touchent, mais C fans
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- fans pouvoir toucher le condudeur; & vous obferverez en fort peu de teins que ces deux petites boules s’écarteront l’une de l’autre : elles relieront même ainfi écartées, lorsque vous les aurez éloigné du conducteur ; preuve certaine quelles fe trouvent éledrifées en-phis; ce qui ne peut avoir lieu que parce quelles ont abforbé une partie de l’athmof-phere éledrique du condudeur.
- XXI.
- Il paroit fort vraifemblable, que comme les corps ont la faculté d’attirer à eux le fluide éledrique, que ce dernier a de même la propriété d’attirer les corps à lui ; enforte que l’attradion ell mutuelle. Ce fentiment eft fondé fur ce que nous voyons, que les corps légers & mobiles s’élancent avec beaucoup de précipitation fur un corps éledrifé, pour lui enlever une quantité d’éledricité proportionelle à leur petite furfàce. Ainfi un petit corps léger, tel qu’eft un fil de lin, ou une feuille d’or battu, s'élance fur le condudeur éledrifé, parce que ce corps léger ell attiré par l’athmofphere éledrique du condudeur : mais comme ce corps léger attire auffi le fluide, il femble que le conducteur entraîné par fon fluide , devroit aufli s’approcher du corps léger; & c’ell ce qui arriveroit en effet, fi l'un & l’autre avoient une égale facilité de fe mouvoir : mais comme le condudeur ell fixé ou lourd , il ne s ébranle point ; parce que l’attradion du
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- corps léger eft trop modique pour vaincre la force d'inertie qui retient le Conducteur.
- Si l’on préfente le doigt à ufl conducteur léger & fufpendu , il s’approchera du doigt; parce que celui-ci attire dans ce cas l’athmofphere d’un corps, qui étant fort mobile, peut lui même être entrainé par fon athmofphere vers le doigt qu’on lui préfente. Mais dans la fuppofitiôn que l’un & l'autre corps, tant l’éledtrifé que le non-éleétrifé, fuflent légers & fort mobiles, pour lors ils feront chacun une partie du chemin pour s’approcher ; parce que dans ce cas, la force attraélive du fluide électrique & celle du corps non - éleCtrifé, fe trouveront dans une circonftance favorable pour pouvoir agir efficacement l’une fur l’autre.
- De là ilparoit que l’éleClricité nous préfente des phénomènes fort analogues à la vertu magnétique ; puisqu’on voit l’aiguille aimantée attirer la limaille ou une autre aiguille non-aimantée ; & qu’on voit de même un morceau de fer quand il eft affez con-fidérable pour n’être pas mû facilement, attirer à fon tour l’aiguille aimantée : enfin puisqu’on obferve auffi que deux aiguilles fufpen-dues, dont une feule eft aimantée , feront chacune une partie du chemin pour s'approcher l'une de l'autre, pourvu quellesfoient d’un poids égal &. également mobiles.
- Sufpendez -une petite boule de liege ou de fureau à un fil de foie ; préfentez cette C 2 pe-
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- petite boule à un conducteur éleCtrifé , de façon quelle puifle aller le toucher : alors cette boule s’élancera fur le conducteur, s’é-leétrifera en le touchant, & presque dans le même inflant, elle fera repouffée & s’éloignera le plus quelle pourra de l’athmofphere éledrique du conducteur ; car ayant elle-même acquis une athmofphere électrique, elle eft entrainée par fa propre athmofphere qui s’éloigne de celle du conducteur ; parce-que ces deux athmofpheres fe repoulTent réciproquement.
- XX11I.
- Si l'on préfente au conducteur éleCtrifé en -plus deux petites boules de fureau fufpen-dues chacune à un fil de foie,de façon quelles fe touchent, elles s’élanceront de même vers le conducteur & s’électriferont ; enfuice, non feulement elles s’en éloigneront, comme la petite boule de l’expérience précédente ; mais elles s'écarteront auffi l’une de l’autre ; parce qu’ ayant chacune une athmofphere éleétrique pofitive, elles fe trouveront entraînées, à caufe de leur légèreté, par léurs propres athmofpheres qui fe repoulTent l'une l’autre.
- Par une raifon contraire, ces petites boules^ fe rapprocheront l’une de l'autre, dès qu’on en touchera une du bout du doigt; car la boule touchée perdant par cet attouchement , fon éledricité pofitive , fe trouve alors éleCtrifée en - moins rélativement à 1 autre boule qui continue detre éleCtrifée
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- en-plus. Ainfi ces deux petites boules fe trouveront alors dans l’état requis pour s’attirer mutuellement; & c’ell en effet ce qui arrive ; car elles fe rapprochent l'une de l’autre pour fe toucher. Le phénomène n’en relie pas là ; un moment après, les deux boules s’écartent de nouveau , mais moins qu’auparavant : en voici la raifon ; les deux boules, après s’être touchées, fe retrouvent de nouveau cledrifées en-plus , ainfi elles doivent encore s’éloigner. Enfin fi par des attouchemens réitérés , ori enleve avec le doigt toute cette éledricité furabondante, elles cefferont de s’écarter & relieront réunies l'une à l’autre.
- XXIV.
- De tout ce qu’on vient de dire il fuit, que c’ell ime loi générale de l’électricité, que toutes les fois que deux corps, dont les éledricités font hétérogènes, c’ell adiré, inégales, fe trouvent en préfence l’un de l’autre , ils doivent d’abord s’attirer & s’approcher , fi leur péfanteur ne les empêche pas d’obéir à leur attradion mutuelle ; & après s’être touchés, ils doivent fe repouffer.
- Comme il y a une loi générale relative aux corps dont l’éledricité efl hétérogène ou différente, il y a auili une loi générale pour ceux qui ont des éledricités homogènes, c’ell à dire , parfaitement égales. En vertu de cette fécondé loi, deux corps dont les éledricités font égales, c’ell à dire, qui ont chacun une éledricité pofitivs au même degré,
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- ou une négative auflî au même degré, fe re-pouiïeront & s’éloigneront l'un de l’autre,fi leur légéreté & leur mobilité le leur permettent.
- XXV.
- On a expliqué , pourquoi deux corps éledrifés en - plus , au même degré , s'écartaient l'un de l’autre; on a ajouté, que fi ces deux corps fe trouvoient éledrifés en-moins , ils s’écarteroient de même l’un de l’au-. tre. Le fait eft très certain & nous le prouverons par les expériences les plus manifef-tes: mais il n’en eft pas pour cela moins difficile d'expliquer ce phénomène. Plu-fieurs phyficiens l'attribuent à l’attradion des corps voifins, qui dans ce cas doivent être confidérés comme éledrifés en-plus, relativement à ces deux boulettes, que nous fup-pofons avoir été éledrifées en - moins : car, di-fent ces phyficiens, puisque l’éledricité des boulettes & celle des corps voifins font hétérogènes, c’eft à dire d’efpece différente, les corps circonvoifins doivent attirer les boulettes.
- On a déjà donné la maniéré d’éledrifer un corps pofitivement ; voyons à préfent comment on peut 1 eledrifer négativement, c’eft à dire, comment on lui enleve la part d’éledri-cité qui lui. convient dans fon état naturel : Pour cela, il ne s'agit que de l’ifoler & en-fuite l’approcher de fort près du couffin frot-.
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- teur d’une machine électrique ; mais il faut dans ce cas, que ce couffin frotteur foit auffi ifolé : Pour lors, dès qu'on fera agir la machine électrique, le couffin frotteur fournira fon propre fluide électrique au globe de verre, & deviendra par là électrique en-moins; ce qui le mettra dans le cas d'attirer à lui le fluide naturel du corps qui lui ell préfenté : C’eft ainfi que ce corps fe trouvera enfuite électrifé en-moins; puisqu’une partie de fon fluide électrique naturel paffie alors au couffin frotteur: il y a encore d'autres façons d’éleétrifer un corps négativement ; mais cc n’eft pas encore ici la place d’en faire mention.
- XXVII.
- Les effets de l'électricité font toujours proportionels à la différence des électricités; c’eft à dire , que plus il y a de différence entre les électricités de deux corps, plus grands auffi feront les effets qui en réfuteront.
- Sufpendez une petite boule de liege au conducteur & une autre au couffin frotteur ifolé: Après cela, électrifez le conducteur, & préfentez à la boule de liege fufpendue par un fil de lin au conducteur, une autre petite boule de fureau fufpendue par un fil de foie: pour lors il eft certain, que ces deux boulettes s’avanceront l’une vers l'autre , & que dès qu’elles fe feront touchées, elles s’écarteront ; parce que toutes deux, après l’attouchement feront électrifées en plus.
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- Si enfuite on préfonte cette meme boule de fureau éledrifée en-plus, à la boule de liege fufpendue au couflin frotteur ; dans ce fécond cas , les deux boulettes s’attireront de même ; mais cette attradion fera beaucoup plus prompte & plus vive: parce que la différence d'électricité de ces deux boules eil beaucoup plus confidérable dans ce dernier cas que dans le premier;car dans cette derniere expérience la boulette fufpendue au couffin, eft négative & celle qu’on lui préfente eft pofitive. Ces deux expériences prouvent donc que les effets de l’éledricité font proportionels à la différence des éledricités dont deux corps font pourvus. Cette vérité fera encore mife dans un plus grand jour, lorsque nous en viendrons aux phénomènes rélatife à la Bouteille de Leyde.
- XXVIII.
- Si entre deux timbres (Fig. 7. PI. II.) dont l’un eft ifolé, parce qu’il eft fufpendu par un fil de foie, vous placez' un petit battant qui foit aufli fufpendu à un fil de foie, ce petit battant ira frapper alternativement les deux timbres, auffitôt que vous éledriferez le condudeur qui doit communiquer avec le timbre ifolé ; & ce jeu continuera aufli long tems qu'on éledri fera le condudeur.
- Les propriétés d'attradion & de répul-lion dont le fluide éledrique eft doué, font la raifon de ce phénomène. D’abord le timbre ifolé qui eft éledrifé en-plus, parce qu’il communique avec le condudeur , attire à lui
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- lui le petit battant, lequel après s’être élec-trile par l’attouchement du timbre, en eil aufl’.tot repouiïé & enfuite attiré par l'autre timbre non-ifolé qui fe trouve dans un état d'éledricité naturelle : Ainfi le petit battant vole à ce fécond timbre, lui communique tout le feu éledrique qu’il avoit reçu du timbre ifolé, & fe retrouve par là dans fon premier état, & par conféquent dans le cas d’être attiré derechef par le timbre ifolé, qui e(t toujours éledrique en-plus, pareequ'on continue deledrifer le conducteur. Ainfi le petit battant vole encore au timbre ifolé, s’éledrife une fécondé fois, eft enfuite re-poufTé & attiré de nouveau par le timbre non-ifolé; & ainfi de fuite, aufli longtems qu’on éledrife le condudeur.
- Si au lieu d’un feul timbre non-ifolé, on en fufpend plufieurs au tour du timbre ifolé, & qu’entre ce timbre ifolé & chaque autre timbre non-ifolé, on fufpende de petits bat-tans avec des fils de foie, (Fig. 8- Pl- II.) dans ce cas, on aura un carillon allés amu-fant & même harmonieux, fi l’on a foin d’accorder les timbres par tierce ou par quinte.
- Le phénomène d’une découpure ou d’un morceau de papier, (Fig. 9. A. Pl. II.) qui danfe & fautiile entre deux plaques de métal , dont l’une eft fufpendue au condudeur, eft tout - à - fait analogue au phénomène qu’on vient de rapporter; puisque l'un & l'autre s’expliquent de la même façon. II arrivera même que le morceau de papier, s’il eft dé-
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- cera. entre les deux plaques métalliques & reliera fufpendu en l'air ; car les deux plaques l’attirant à elles avec des forces égales, il doit relier fufpendu entre elles pour obéir à ces forces oppofées. Ces phénomènes réfultent de ce que le morceau de papier e(l terminé par deux pointes ou deux angles, dont l’un ell plus aigu que l'autre , (Fig. 9. B. Pl. II. ) on faifira mieux la raifon de ces effets , après que nous aurons expliqué la vertu des pointes rélativement à l’éledri-cité.
- XXIX.
- Si l’on porte la flamme d’une bougie dans l'athmofphere d'un condudeur éledrifé, elle ell auffitôt repouffée, parce quelle s’é-ledrife en entrant dans l’athmofphere du condudeur: mais fi la flamme communique à quelque corps non-éledrique, comme par exemple à une clef qu’on lui préfente, alors la flamme s’approche du condudeur, parce quelle ne peut pas acquérir l’éledricité pofi-tive. Le phénomène change encore, fi je fais enforte que cette flamme étant entre le condudeur & la clef, fe trouve à peu près à une égale diftance de l’un & de l’autre ; car alors la flamme fe divifera (Fig. 10. Pl. II.) de façon qu’une partie s’inclinera vers le condudeur & l’autre partie vers la clef. Ce dernier phénomène ell comme les deux premiers , conféquent aux principes que nous avons pofés ; car la flamme étant moins élec-trifée que le condudeur, doit s’en approcher,
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- eher, & fe trouvant en même tems plus élec-trifée que la clef, celle-ci doit l'attirer: or pour que la flamme puifle obéir en même tems à ces deux attradions oppofées, il eft néceflaire qu’elle fe divife.
- XXX.
- Il eft des circonftances où le même corps qu’on éledrife, acquiert d’un côté une électricité pofitive , & de l’autre une éledricité négative. L’expérience qui fuit en fera la preuve. (Fig. n. PI. II.).
- Ayez deux condudeurs A & B, que l’on puifle approcher l’un de l’autre ou les fépa-rer à volonté : faites d’abord qu’ils fe touchent par une de leurs extrémités , & approchez enfuite un tube de verre frotté près du condudeur A ; puis éloignez en le con-dudeur B, en l’écartant avec un fil de foie qui y eft attaché ; & vous trouverez que le condudeur A fera éledrifé négativement, & le condudeur B ,pofitivement: en voici la rai-fon ; pendant que les condudeurs fe touchent, l’athmofphere du tube force le feu éledrique naturel du condudeur A, de refluer fur le condudeur B ; ainfi ce dernier doit fe trouver pojttif & le premier négatif.
- On peut faire la même expérience avec deux petites réglés de métal ou de bois, dont chacune eft pofée fur un verre à pied.
- De là il fuit, que fi l’on approche le doigt d’un tube frotté, que le doigt s'élec-trifera en-moins-, parceque l’athmofphere du tube éledrifé par le frottement, repoufle dans
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- dans le bras le fluide électrique propre au doigt. Mr. Canton a imaginé des expériences qui ne permettent pas de douter de la réalité de ce phénomène : voici en quoi elles confiftent.
- XXXÏ.
- Pofez fur un verre à pied bien propre & bienfec, ( Fig. 12. PI. II. ) une petite réglé de bois de 5 à 6 pouces de longueur & large d’environ un pouce: fufpendez à une de fes extrémités, au moyen de deux fils de lin très fins, deux petites boules de fureau : il faut avoir l’attention que ces fils de lin foi-ent bien liffes & fans filandres ; on fera meme bien de les tremper auparavant dans de l’eau falée afin qu'ils 11e fe déifechent pas ; car s’ils devenoient trop fecs, ils pafleroient au nombre des corps électriques.
- Par l’arrangement qu’on vient de pref-crire, les petites boules de même que les fils de lin fe trouveront bien ifolés au moyen du verre à pied qui foutient la petite réglé. Après cela, frottez avec la main, ou avec un morceau d’étoffe de foie noire, un autre verre à pied propre & bienfec; préfentez ce verre ainfi frotté aux petites boules, & elles s’élanceront dans le moment vers le verre frotté, s’y éledri feront engins, en feront enfuite repouffées ci s’écarteront l’une de l’autre. Ce qu’011 a dit jusqu’ici fuffit pour expliquer ce premier phénomène.
- XXXI1.
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- XXXII.
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- Frottez de nouveau le verre à pied, & préfentez le à l’autre extrémité de la fusdite réglé, fans cependant la toucher; dans ce cas l’atmofphere du verre frotté agira fi fenfiblement contre l’athmofphere éledrique de la petite réglé, qu’elle l’obligera par fa vertu répulfive, de s’éloigner & de fe retirer en grande partie vers l’autre extrémité de la réglé & même de paffer jusqu’aux deux petites boules; Ceft cequon remarquera fenfiblement dans les deux boules; car devenant par là encore plus éledriques quelles ne l’étoient, elles s’écarteront aufiî davantage l’une de l’autre.
- XXXIII.
- Frottez de nouveau le verre & préfentez le à quelque diilance des boules déjà éledrifées en-plus-, pour lors les boules fe rapprocheront ; car l’athmofphere du verre frotté agiflant fortement contre l’athmofphe-re des boules éledrifées, forcera le fluide éledrique furabondant de ces boules de fe retirer & de refluer vers la réglé : Ainfi les boules fe trouvant par là privées de leur fu-perflu éledrique , fe rapprocheront : mais dès qu’on retirera le verre frotté, elles s’écarteront de nouveau, parce que le fluide éledrique, qui avoit été forcé de s’éloigner de ces boules, retournera à elles pour fe mettre en équilibre.
- XXXIV.
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- Eledrifez, comme on la déjà die, les deux petites boules avec le verre frotté, & dès qu’elles fe feront écartées, préfentez le verre frotté à l’extrémité de la réglé qui eft oppofée à l’extrémité qui foutient les petites boules , & touchez en même tems du bout du doigt cette extrémité à la quelle les petites boules font fufpendues ; puis retirez le doigt & le verre frotté. Dans ce cas, les deux petites boules fe trouveront éledrifées négativement ; parce quelles auront perdu par l’attouchement du doigt, non feulement leur fluide électrique furabondant, mais de plus une partie du feu éleétrique naturel de la réglé qui avoit été repoulfé jusqu’à ces petites boules par l’adion répulfive de l’athmof-phere du verre frotté.
- Pour fe convaincre que ces petites boules , qui continuent de s’écarter l’une de l’autre , font éffedivement dans un état d’électricité négative, il faut leur préfenter le verre frotté ; & l’on obfervera qu’elles s’élanceront fur le verre ; preuve certaine que leur éledricité eft négative; puisque fi elle étoit pofitive,ces petites boules devroient s’éloigner du verre frotté.
- XXXV.
- Les deux boulettes 'étant ainfi éledrifées en-moins, fi vous préfentez le verre frotté à l’extrémité B,c’efl à dire, à celle qui eft oppofée à l’extrémité qui foutient les boulettes, elles
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- elles fe rejoindront, parce que l’athmofphe-re du verre frotté agiffant par fa force répul-five fur l’extrémité B de la réglé, obligera le peu d’éledricité qui fe trouve encore dans la réglé, de refiuer vers les boulettes ; ce qui les rétablira dans leur état naturel; d’où il fuit qu’elles doivent fe rapprocher.
- Ayez encore un autre appareil fembla-ble au premier; c’eft à dire, un fécond verre à pied, pour ifoler une autre petite réglé, à la quelle font attachées deux boulettes de fureau fufpendues par des fils de lin. Elec-trifez les boulettes du premier appareil négativement , & celles du fécond po/itivement : puis faites enforte que les extrémités B & B des deux réglés fe touchent: dans ce cas, les boulettes éledrifées en-plus communiqueront leur fuperflu éledrique aux boulettes éledrifées en - moins, & par là elles fe trouveront les unes & les autres rétablies dans leur état naturel. Cette expérience fait bien voir que les boulettes du premier appareil étaient ef-fedivement dans un étatd’éledricité négative.
- XXXVII.
- Après avoir éledrifé un appareil en-plus & l’autre en - moins, difpofez les de façon que l’extrémité B de chaque réglé fe trouve à trois pouces environ de diftance l’une de l’autre: Frottez le verre à pied, & approchez le des extrémités B & B ; alors les boulettes éledrifées en-moins fe rapprocheront,
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- & celles qui l'étoient en-plus, s’écarteront encore davantage l’une de l’autre : Mais dès que vous retirerez le verre frotté, vous ob-ferverez un effet tout contraire; car les boulettes éiedrifées en-plus fe rapprocheront, .& les autres s'écarteront de nouveau. Cette alternative peut fe répéter plufieurs’fois.
- XXXVIII.
- Il y a une fécondé maniéré deledrifer négativement un appareil; (Fig. 13. PI. IL) Mettez le verre frotté fur le milieu de la réglé, de maniéré que le pied de ce verre fe trouve en haut; portez enfuite en même tems un doigt fur chacune des extrémités de la réglé; puis retirez les doigts, & enlevez auflitôt le verre frotté de deflus la réglé; par cette opération les boulettes fe trouveront éiedrifées négativement. Ce qu’on a dit jusqu'ici, fuffit pour eii voir la raifon.
- Placez les deux appareils de fayon que les extrémités B & B fe touchent ; frottez le verre à pied ; pofez le fur l’une des deux réglés, le pied en l’air, ou approchez le de fort près des extrémités B & B ; touchez du doigt l’extrémité A de la réglé qui ne fou-tient point le verre frotté: retirez enfuite en même tems le doigt & le verre frotté ; & les quatre boules, qui s’étoient d’abord écartées par l'adion de l’athmofphere éleétrique du verre frotté, continueront de s’écarter ; mais ce fera alors l’effet d’une éledricité négative.
- XL.
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- Attract» et Repuls. XL.
- Placez les deux appareils de maniéré que les extrémités B & B fe touchent ; po-fez le verre frotté fur l’une des deux réglés, & les quatre boulettes fe trouveront éledri-fées en-plus. Après cela, éloignez un appareil de l’autre , & tous deux continueront encore de donner les fignes d’une éledricité pojitive. Otez le verre frotté qui eit flzr une réglé, & dans l'inftant même fes deux boulettes pafferont d’une éledricité pofitive à une négative , tandis que l’autre appareil continuera d’être dans un état d’éiedricité pofttive. Vous en relierez convaincu, fi vous préfen-tez le verre frotté à l’extrémité B de la réglé qui foütenoit ce verre ; car vous obferverez que les boulettes fe rapprocheront; ce qui ell une preuve quelles dévoient avoir une éledricité négative. Mais fi vous préfentez le même verre frotté à l’extrémité B de l’autre appareil, fes boulettes s’écarteront davantage; ce qui prouve que leur éledricité étoit pojitive.
- XLI.
- Placez les deux réglés l’une fur l’autre $ mais de façon que leurs extrémités fe trouvent oppofées; c’eil à dire, que l’extrémité A d’une réglé, foit fur l’extremité B de l’autre réglé. Frottez le verre à pied; pofez le, le pied en l’air, fur la réglé fupérieure; puis touchez du doigt l’extrémité d’une réglé & retirez en même tems le doigt & ce verre D froc-
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- frotté: dans ce cas, les quatre boulettes, qui d'abord s’étoient écartées, parce quelles étoient éledrifées en-plus, continueront dé s'écarter, parce quelles fe trouvent alors élec-trifées en-moins. On s'en convaincra en pré-fentant le verre frotté à ces boulettes ; car elles s’élanceront avec vivacité fur le verre.
- Ces différentes maniérés d’éledrifer en-moins, que nous venons de rapporter, font bonnes pour des expériences en petit, c’efl â dire, quand iln’eft queftion d’éledrifer que des corps légers & fort mobiles : mais pour produire le meme phénomène fur des corps plus confidérables par leur mafle, on a recours à d’autres méthodes: on en a déjà donné une, qui eft de préfenter un corps ifolé au couffin frotteur ifolé d’une machine éledrique; nous allons en donner une fécondé & c’efl; la plus commode.
- XLII.
- Adaptez à la machine éledrique un globe de foufre ou de réfine au lieu d’un globe de verre ou de porcelaine ; car alors le con-dudeur & les autres corps ifolés qui communiqueront avec lui, s’éledriferont en-moins. La raifon de ce phénomène eft, qu’un globe de foufre ou de réfine en tournant fur fon axe, au lieu de tirer le fluide éledrique du couffin frotteur pour le faire paffer au condudeur , tire ce fluide du condudeur meme, & le transmet enfuite au couffin frotteur.. Telle eft la propriété du foufre frotté, de l’ambre, de la cire d’efpagne , des
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- réfines, de la foie & même de presque tous les corps éleflriques, à la réferve de ceux qui tiennent à la nature du verre & du cri-ftal. Cette découverte s’eft faite à Philadelphie en 1752. nous donnerons plufieurs expériences qui ne laifleront aucun doute fur la réalité de ce phénomène.
- XLIII.
- Les globes de verre dont on a coutume de garnir les machines éleétriques , font d’autant moins propres à ralfembler le fluide éledrique, qu’ils font moins purs, c’eft à dire, qu’ils contiennent plus de matière étrangère au verre. Il eft auiïi fort vraifemblable que la grande vertu éledrique du verre dépend en partie du plus ou du moins de fufion & de cuiffon des différentes matières qui entrent dans la compofition du verre: car on a obfervé que des verres formés de la meme malfe, mais plus tard les uns que les autres, n’étoient enfuite rien moins qu’ également éledriques.
- Pour connôitre fi un globe ou tout autre verre, eil propre à une machine éledrique, il ne s'agit que de le bien fécher, & de le frotter enfuite avec la main ou un morceau de peau ; fi après cela, il attire facilement les corps légers qu’on lui préfente, c’eft une preuve qu’il eft de la bonne efpece.
- XLIV.
- Tout le monde fait que l’eau chauffée par le feu ordinaire, s’élève & fe diilipe fa-
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- cilcment en vapeurs. Le même phénomène a lieu lors qu’on éledrife l’eau fortement: C’ell qu’en éledrifant l’eau, l’attradion, en vertu de laquelle les molécules d’eau adhèrent les unes aux autres, fe trouve trop foi-ble pour rélifter à la force de répulfion qu’-acquierent ces mêmes molécules par l’éledri-fation ; d’où il arrive que ces molécules d’eau fe dégagent de la mafle d’eau éledrifée ; parce quelles en font repoufféesavec allez de force pour être obligées de s’en éloigner. Mais comment les mêmes parcelles d’eau peuvent-elles fe foutenir enfui te dans l’air? Le Voici ; chaque parcelle détachée de la fur-face de l’eau, forme conjointement avec l’athmofphere éledrique qui l’environne, Un volume allez étendu pour être plus légère qu’un femblable volume d’air , ou du moins pour être en équilibre avec lui ; ainli il n'ell pas étonnant que l’air puilTe foutenir les vapeurs. Les phyficiens fe font donné beaucoup de peine pour expliquer ce phénomène ; mais tout ce qu’ils ont imaginé à ce fujet, s’eft toujours trouvé peu fatisfai-fant ; c’eft qu’on ne pouvoit en donner une explication plaufible, que lorsqu’on conndi-troit les principes & les propriétés de l’électricité.
- On conçoit aufli, lorsqu’on eft au fait de l’éledricité, que les molécules ou vapeurs d’eau, fi on les fuppofe eledrifées, ne doivent point fe réunir dans l’air, puisqu’ étant éledrifées, elles fe trouvent pourvues d’une force de répulfion qui les' tient éloi-
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- gnées les unes des autres,aufli longtems que le feu électrique furabondant ne leur eft point .enlevé.
- Quant au phénomène qui ramène enfuite fur la terre en forme de pluie ou de neige, ces mêmes vapeurs d'eau, qui s’étoient élevées dans l’air en forme de brouillards ou de nuages, nous remettons à en parler, lorsque nous expliquerons la part que l’éledri-«ité peut avoir à ce fécond phénomène.
- On a du obferver par tout ce qu’on a dit jusqu’ici , que l'attradion & la répul-fion font les deux principaux refïorts que la nature emploie, pour produire les phénomènes finguliers que nous préfente leledri-cité. Si ce fyftême a enfin prévalu, c’elt qu’on explique en effet avec beaucoup de netteté, au moyen de l’attradion & de la répulfion , presque tous les phénomènes éledriques,
- XL VI.
- Il eft vrai que nous ne remontons point à la caufe de ces propriétés, que nous regardons comme les deux pivots fur lesquels roule tout le méchanisme de Téledrieité; mais de ce que nous n’expliquons pas, par quel méchanisme antérieur le fluide éledri-que fe trouve doué de ces deux facultés, il ne s’en fuit nullement qu’on foit fondé à re-jetter leur exiftence, Il y a mille chofes dans la nature, dont les faits démontrent
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- l’exiftence, & dont le méchanisme eft cependant inexplicable. Qui pourroit douter qu’un corps en mouvement n’ait la faculté de communiquer à un autre corps qu'il rencontre , une partie de la force qui le fait mouvoir ? Le fait eft certain : mais eft - on jamais parvenu à expliquer par quel méchanisme fe fait cette communication ? Les phy-ficiens nous ont donné les loix précifes que les corps obfervent dans la communication du mouvement; les physiciens nous donnent de même aujoud’hui les loix que le fluide éledrique obferve rélativement à fes facultés d’attradion & de répulfion dont housfup-pofons qu’il eft; doué, comme les phyficiéns fuppofent que les corps mus font doués de la faculté de communiquer & de recevoir le mouvement.
- Au refte, nous ne difconvenons pas que les phénomènes éledriques attribués à l'at-tradion ou à la répulfion, ne puifient être l’effet d’un méchanisme tout différent dé la force attradive ou répulfive. L’Etre fuprê-me a pu fans doute produire les effets de l’é-ledricité par un autre méchanisme que nous ignorons. Ainfi en expliquant les phénomènes éledriques par l’attradion & la répul-fion, on ne prétend autre chofe, fi non que ces phénomènes font tels, qu’ils feroient les mêmes, fiDieu avoit jugé à propos de donner effedivement au fluide éledrique la force attradive & répulfive que nous lui attribuons. Nous ne défignons donc autre chofe fous le nom d’attraèlion & de répulfion, fi
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- De la Vertu des Pointes. 5-5-
- non qu’on obferve dans les divers phénomènes éledriques, que les corps s’approchent ou s’écartent les uns des autres félon certaines loix générales & confiantes, comme fi le fluide éledrique étoit réellement doué de la force attradive & répulfive telle que nous la lui fuppofons.
- J3Ê LM VERTU DES POINTES.
- On a déjà dit qu’il fuffifoit fouvent de mettre un corps dans l’athmofphere d’un autre corps éledrifé, pour que celui-ci communiquât au premier une partie de fon éledricité.
- Il faut obferver à ce fujet une propriété bien finguliere des corps terminés en pointe, (Fig. 14. PI. II.) foit que la pointe fe trouve dans le corps qui doit recevoir l’é-ledricité du condudeur, foit que le conducteur lui même finiffe en pointe, foit enfin que l’un & l’autre foient terminés en pointe : Dans chacun de ces trois cas, non feulement laf communication de l’éledricité de l’un à l’autre fera plus prompte ; mais elle aura même lieu, lorsque les deux corps en quef-tion feront éloignés d’un ou de deux pieds l’un de l’autre; Telle efl la vertu des pointes , qu’elles pompent l’éledricité avec force, même dans un afiez grand éloignement, D 4 lors
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- De la Vertu
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- lors qu’elles font dirigées vers un corps élec-trifé. Si on tient en main une aiguille, & qu’on dirige fa pointe vers un conducteur, alors, quelque peine qu’une autre perfonne fe donne pour éleCtrifer ce conducteur, elle n’y réuflira pas ; parce que la pointe préfen-tée au conducteur à une allez grande diftan-ce, lui enlevera d’abord toute l’éleCtricité que lui a fourni le globe frotté. Il eft vrai que la pointe de l’aiguille ne s’éleCtrife pas non plus dans ce cas : en voici la raifon: l’aiguille communique à la main, la main au relie du corps, le corps au plancher , & ainfi de fuite ; de là il arrive, que foute l’éleCtricité que la pointe de l'aiguille pompe, fe répand de même fur tous ces différens corps auxquels elle touche imédiatement ou médiatement: Voilà pourquoi l’éleCtricité fe trouvant ainfi fubdivifée & partagée presqu’à l’infini, ne peut pas être fenfible dans l’aiguille : Mais cette électricité feroit fort fenfible , fi l’aiguille ou la perfonne qui la tient en main, fe trouvoit ifolée. Quand on fait cette expérience dans l’obfcurité, on obferve très bien la vertu des pointes, fur-tout fi elles ne font pas ifolées ; car on apperçoit dif-tinCtement que la pointe de l’aiguille eft lur mineufe & rayonnante. Cette lumière fixée à la pointe, eft ce même fluide électrique, qui après avoir quitté le conducteur , fe porte fur la pointe, dans laquelle il ne peut entrer qu’en convergeant & èn fe con-dent
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- denfant affez pour devenir fenfible à nos yeux. (*)
- J’ai dit plus haut, que le condudeur communiqueroit de même fon feu éledri-que à un autre corps .qu'on lui préfenteroit à la diftance de quelques pieds, fi c’étoit le condudeur qui fut pointu, & non le corps qui lui eft préfenté à la diftance de quelques pieds. C’eft qu' alors la propriété de la pointe, eft de pouffer au loin le feu éledri-que dont elle eft furchargée. Ce phénomène eft une fuite de ce qu’on a déjà dit, que les parties du feu éledrique fe repouffoient les unes les autres: Car dans le cas propofé, rathmofphere électrique du condudeur eft D 5 né-
- (*) Obfervez qu'on a fuppofé dans cette expérience, que le condufteur recevoir une éleftrifation pofitive du globe frotté. Si au contraire ce condufteur fe trouvoit adapté à une machine propre à l’éleôrifer négative-ment, on appercevrolt de même le feu élcftrlque à l’extrémité de l'aiguille; mais dans ce dernier cas, le feu eleftrique partirait de la pointe de l’aiguille pour paffer au condufteur.
- Je dois en même tems avertir ici le leftcur une fois pour toutes, que lorsque dans le cours de cet ouvrage j’explique la nature, les propriétés St les loix de l’éleftridté en général, je me contente le plus fouvent d’en donner des exemples par des phénomènes d'une eleftricité pofitive'. Mais il faut fe fouvenir, que tout ce que je dis alors de l’éleftricité pofitive , doit autii s’appliquer à la négative, à moins que je ne rellreigne expreffément l’explication que j'en donne & l’exemple q«e j’en rapporte, à la Coule ^leftficité pofitive.
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- néceffairement plus confidérable fur la pointe, que fur aucune autre partie de fa furface. (Fig. 6.) Outre cela cette portion de feu électrique qui forme l'athmofphere de cette pointe, eft retenue avec moins de force par la pointe, que ne l’eft l’athmofphere corref-pondante à toute autre partie de la furface du conducteur : d’où il fuit, que l'effort par lequel les parties du ftùide éledrique fe repoulfent mutuellement, doit être plus confidérable & plus efficace à la pointe, que dans toute autre partie de la furface du conducteur: Ainfi il n’efl pas étonnant, que l’athmofphere de la pointe du conducteur fe porte à une bien plus grande diftance.
- Enfin fi le condudeur & le corps qu’on lui préfente, étoient l’un & l'autre terminés en pointe, il en réfulteroit encore le même effet, avec cette différence, que l’effet fe-roit alors plus prompt ; parce que deux cau-fes concourroient à produire le même effet ; c’efl à dire, à faire paffer le fluide du condudeur éledrifé au corps qu’on lui préfente-roit; mais dans le cas que l’éledricité du condudeur fût négative, pourlors ce feroit la pointe du corps qu’on lui préfenteroit de loin, qui lanceroit le fluide électrique fur la pointe du condudeur.
- XL VIII.
- Je viens de dire, que quand un conducteur terminé en pointe a été éledrifé en-plus, l’athmofphere éledrique eft plus confidérable fur la pçinte, qu’en aucun autre endroit de fa
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- fa furface ; & qu’outre cela, l’athmofphere de cette pointe eft moins retenue par cette même pointe, que l’athmofphere de toute autre partie du condudeur. Cela mérite d'être prouvé : mais avant de le faire,
- Il faut obferver que toute athmofphere éleétrique prend toujours la forme du corps quelle environne. Si dans un air calme on émiette de la réfine feche dans une cuiller bien chauffée, & qu’on préfente enfuite la fumée de cette réfine fous un condudeur éledrifé, on obfervera que la fumée qui s’élèvera, fera attirée par le condudeur & s’étendra également fur toute fa furface. Cette fumée s’arrange ainfi tout-au-tour du condudeur, parce qu’elle eft attirée de toutes les parties de fa furface, & elle y demeure fixée par la même raifon ; car fans cette at-tradion elle fe difiiperoit bien vite. Il en eft de même de l’athmofphere éledrique; mais le phénomène feroit tout différent avec la fumée d'une chandelle ou d’un bois em-brafé & fumant: c’eft que cette forte de fumée étant chargée de différentes parties aqueufes , eft d’abord attirée & enfuite jre-pouffée, emportant avec elle la portion du feu éledrique que le condudeur lui a communiqué, De là il fuit, qu'il n’eft point étonnant qu’on ne parvienne pas à éledrifer un condudeur, quand il eft expofé à une fumée humide ou chargée de molécules non-éleStri-ques. Il fuffit même de fouffler fur un condudeur pour qu’on ne puifTe l’éledrifer; parce que cet air foufflé eft chargé de molé-
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- cules aquetifes qui font attirées par le condudeur , & qui en étant enfuite repoulTées, emportent en s’éloignant, tout le fluide électrique du condudeur.
- Celapréfuppofé,prouvons à préfent que l’athmofpere éledrique elt plus confidérable à la pointe du condudeur que fur toute autre partie de fa furface, & que cette ath-mofphere eft plus foiblement retenue par la pointe, que ne refU’athmofphere correfpon-dante à toute autre partie du condudeur. XLIX.
- Soit le conducteur éledrifé ABCDE repréfenté, (Fig. 6.) avec fon athmofphere éledrique. A la fimple infpedion de là figure, il eft aifé de remarquer que l’athmof-phere L M K qui répond à la pointe C, eft beaucoup plus étendue & plus confidérable que l’athmofphere eorrefpondante à toute autre partie de la furface du condudeur. Il eft de même bien clair, que cette athmofphere L M K n’eft attirée & retenue que par le feul point C; puisqu'il n’y a aucun autre point dans la furface du condudeur , qui foit plus à portée & plus voifin de cette athmofphere: Or fi toute cette quantité de fluide éledrique n’eft retenue & attirée que par le feul point C, il eft vifible que ce point C ne peut l’attirer, que proportionelle-. ment à fa furface , qui étant fort modique, ne peut aulli exercer qu’une attradion très foible.
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- Ce que je viens de dire du point C, doit de même fe dire de tous les angles du conducteur ; par exemple , l’athmofphere A. I. X. S. appartient au feul angle A; car c’eft fur ce feul angle A, que repofe toute cette partie de l’athmofpljere : Or l’athmofphere de ce feul angle A èft aufli confidérable que celle de toute la furface A E ; ainfi la fur-face de l’angle A étant plus petite que la fur-face A E, l’athmofphere de l’angle A doit être moins fortement attirée par cet angle, que ne l’eft l’athmofphere de toute la furface A E: donc un corps non - éleflrique préfenté à cet angle A, lui enlevera plus facilementfon athmofphere, qu’il n’enlevera celle de la fur-face AE; & ae plus il enlevera cette athmofphere de l’angle A à une plus grande di-ftance de cet angle, que celle qui feroit re-quife pour qu'il pût enlever l’athmofphere de l’athmofphere A E.
- Il faut encore obferver, qüe la quantité de l’athmofphere électrique LMK qui a pour bafe le point C, a fon extrémité M à une bien plus grande diftance du point C, que le refte de l’athmofphere du conducteur ne l’eft des pointes qüi lui fervent de bafe : d’où il fuit encore , que 1‘eXtrémité M de cette athmofphere eft moins retenue par la bafe C, que toute autre partie de l’athmo-fphere ne l’eft de fa bafe correfpondante: Car la force d’attraCtion eft toujours en raifon in-verfe de la diftance; c’eft à dire, qu’elle eft d’autant moindre que la diftance eft plus
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- L.
- La vertu d’une pointe dans un conducteur, pour pouffer au loin le feu éledrique, eft fi grande, qu’il n’eft même pas néceffaire qu’on lui préfente quelque corps non - éleElri-que; car le feu éle&rique s’échappe de lui même dans l’air par la pointe du condudeur: en voici la raifon; c’eft que l'air, quoique originairement éledrique , eft presque toujours chargé de vapeurs ou de poufliere; & c’eft fur ces petits corps étrangers à l’air, que la pointe du condudeur fortement éledrifé, pouffe une partie de fon athmofphere élec-
- Pour rendre en deux mots tout ce qu’on vient d’expliquer ; le fluide éledrique s’échappe aifément des pointes; parce que la force avec laquelle un condudeur terminé en pointe, retient fon feu éledrique, eft toujours proportionelle à la grandeur de la bafe fur laquelle fon athmofphere eft placée : or l’athmofphere de la pointe n’a qu’une bafe très modique; donc la force qui la retient doit aufii être très foible ; donc cette athmofphere s’échappe facilement.
- Au refte ce n’eft pas feulement l’athmo-fphere dont la pointe eft chargée, qui s’échappe du condudeur, pour paffer au corps transmettant qui lui eft préfentée ; car dès que cette première portion de l’athmofphere éledrique a quitté la pointe, une autre portion de cette athmofphere fuccede & remplace la première. Cet effet eft une fuite de la
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- la fluidité & de Iarépulfion mutuelle des parties du feu éle&rique : Ainfi l’athmofphere de tout le conducteur continue de couler iuc-eeflivement vers la pointe, jusqu’à ce que le tout foit épuifé par le corps transmettant qui l’attire. Partons à préfent à la vertu deâ pointes des corps non - cleiïrifës.
- U.
- Les pointes des corps nm-éleSlrifes, ont une propriété toute oppofée à celle des corps éle&rifés; car elles attirent puiflamment & à une grande dirtance le fluide éle&rique d'un condu&eur éleârifé : voici la raifon qu’on peut donner de ce phénomène.
- Le corps trüBimfttantnon-éle&rifé & pourvu d’une pointe qu’on préfente de loin au condu&eur, réunit dans fa pointe toute fa force attra&ive; parce que cette force doit fe réunir fur l’endroit qui eft le plus à portée d’agir : Ainfi toute la force attra&ive du corps transmettant non - éle&rifé , en fe réunifiant dans la pointe, doit être plus grande que fi elle reftoit dirtribuée à toutes les parties de la furface de ce corps; parce qu' étant ainfi dirtribuée, elle ne pourroit pas agir toute entière d’auffi près, & parconféquent avec autant d’éfficacité fur le condu&eur, que fi la totalité de cette force étoit réunie dans la feule pointe, qui eft la furface du coips la moins éloignée du condu&eur.
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- LII.
- Il en eft de la pointe d’un corps non-éleétrifé, comme de la pointe d’un clou, qui eft plus en état de pénétrer dans le bois, lorsqu’on le chafle avec un marteau, qu’il ne le feroit s’il n’avoit pas de pointe , quand même on le frapperait avec la même force. C’eft qu’en frappant fur la tête d’un clou pointu, toute la quantité du mouvement fe réunit dans la pointe, qui en même tems a l'avantage de ne trouver qu’une foible réfif-tance ; puisque le bois ne lui oppofe que la réfiftance d’une très petite furface ; réfiftan-ce, qui eft moindre que celle qui lui oppo-feroit le bois, fi le clou n’étoit point affilé en pointe; car dans ce dernier cas, le clou aurait à vaincre la réfiftance d’un plus grand nombre de parties de bois.
- LUI.
- Voici encore une autre comparaifon qui n’explique pas mal le phénomène des pointes d’un corps non-éleéfrifé. Quand je veux arracher les crins de la queue d’un cheval, j’en viens à bout facilement, fi j’emploie fuc-ceffivement ma force contre un feul crin; c’eft à dire, fi je les arrache un à un: mais je ferais des efforts inutiles, fi je prétendois en arracher une poignée avec la même force; parce que cette quantité de crins m’oppofe-roit beaucoup plus de réfiftance que ne peut faire un feul crin ; vû que l’adhérence totale de tons les crins réunis, eft plus grande que celle
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- celle d'un feul crin. L’application de cette comparaifon n’eft pas difficile à faire.
- Quoi qu’il en foit, il eft très certain que les pointes attirent à elles le feu éledrique d’un conducteur éledrifé; & quand même l’explication précédente, ou toute autre que les phyficiens pourroient donner , ne fatis-feroit pas pleinement, le fait n’en feroit pas moins inconteltable ; puisque fa réalité ne dépend pas de l’explication qu’on en peut donner. Mille expériences nous démontrent l’attraétion fpéciale des pointes ; jsn voici une qui me paroit décifive. //
- f’M-’tâéU^u4èt4T£&t-
- Prenez une grande balance de Cuivre dont le fléau ait au moins deux pieds de longueur, & dont les cordons qui foutien-nent les baffins, foient de foie ; ( Fig. 15. Pl. II. ) fufpendez cette balance au plafond, de forte que les baffins fe trouvent à un pied du plancher: fichez enfui te un poinçon de fer fur le plancher, de maniéré que quand les baffins tourneront circulai rement par le détortillement de la ficelle qui foutient le fléau , ils paffent par deffiis le bouton du poinçon en décrivant leur cercle: Cela fait, éledrifez un de ces baffins en établiflant une communication entre ce baffin & le conducteur. On pourroit auffi éledrifer ce baffin en lui appliquant le crochet d’un renfort chargé. Tout étant ainfi difpofé, faites tourner le fléau par le détortillement de la ficelle qui foutient la balance, & vous obferve-
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- rez, dès que vous aurez oté la communication du badin au conducteur, que le badin éleétrifé s’abbaidera en padant au dedtis du poinçon , & s'il s’abbaiffe fuffifamment , il lancera une étincelle au bouton du poinçon.
- Mais fi l'on fixe verticalement une aiguille fur la tête de ce poinçon, ou même fi l’aiguille eft fixée, la pointe en haut, fur le plancher près du poinçon, le badin éleétrifé ne s’abbaidera pas en padant par deflùs ; mais il déchargera fon feu éleétrique en ii-lence fut la pointe de l'aiguille.
- • Dans*1&'premier cas, le badin s’abaide; parce que le fluide ëleét¥iqiÆ,-dontfc l'adhérence au badin eft trop >£®ïtepouV\pWm>ir s’en détacher dans l’éloignement où il fe trouve, entraine le badin par l’effort qu’il fait pour obéir à l’attradion du poinçon.
- Dans le fécond cas, le badin lance le feu éleétrique fans s’abaifler; parce que la pointe de l’aiguille ayant une force attraéti-ve plus grande que n'eft l’adhérence du fluide éleétrique au badin, 'enleve ce fluide au baf-fin à une plus grande diftance, & parconfé-quent, fans que le badin foit pour cela obligé de s’approcher de plus près de l'aiguille. Nous aurons encore lieu de parler de cette ingénieufe expérience de Mr. Franklin, lors qu’il s’agira de donner la raifon, pourquoi les nuages éleétrifés s'abaident vers la terre avant de lancer le feu éleétrique; & pourquoi des perches terminées en pointe & fort élevées peuvent nous garantir de la foudre.
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- Quand on place un morceau de papier découpé en pointe (Fig. 9.) entre deux plaques de métal, dont l’une eft fufpendue au conducteur , on obfervera , pourvu qu'on tienne la plaque inférieure à une jufte di-ilance fous celle qui eft fufpendue au conducteur, que le morceau de papier ne s’élancera pas jusqu’à la plaque fupérieure; mais il danfera Amplement fur la plaque inférieure , faifant quelque fois des fauts plus élevés. La raifon de ce phénomène eft, que le morceau de papier découpé en pointe, s’électrife par la force attractive de la pôinte la plus aigue, fans être obligé de fe porter jusqu’à la plaque fupérieure pour lui enlever le feu électrique. Lorsque ce morceau de papier a été ainfi électrifé de loin, il fe retrouve attiré par la plaque inférieure, & après lui avoir communiqué le feu qu'il avoit reçu de la plaque fupéri etire , ( ce qu’il fait dans un inftant, parce que la partie inférieure de ce papier eft auffi découpée en forme de pointe) il s’élève de nouveau un peu, pour s’électrifer derechef du feu de la plaque fupérieure, qu’il rend enfuite, comme auparavant à la plaque inférieure ; & ainfi de fuite. On voit par cette explication, que la danfe apparente du morceau de papier, n’eft dans le fait, qu’une alternative d’attraction, tant de la plaque fupérieure que de l’inférieure.
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- Il arrive fouvent que des corps fort légers, comme font des fils de lin ou des brins de feuilles d’or battu *. après s’être portés vers le conducteur éleétrifé, s’y attachent & n'en font point repoufles : la raifon de ce phénomène eft., que ces corps légers touchant au conducteur par une fuperficie plane & unie, laiffent échapper par de petites pointes imperceptibles toute l'électricité que le conducteur leur a communiquée : Ainfi., quoique ces petits corps reçoivent le feu électrique, ils ne fe trouvent point électrifés; parce que le feu qu’ils enlevent au conducteur s’échappe au même inftant, fans former d'ath-mofphere électrique au tour de ces petits corps.
- LVII.
- Préfentez un petit vafe de verre plein d'eau au conducteur électrifé, dont la pointe eft dirigée de maniéré, quelle fe trouvepré-cifément vis - a vis la furface de l’eau contenue dans le vafe de verre qu’on tient fous cette pointe. Dans cette expérience, la partie de l'eau qui eft directement fous la pointe à la diftance de quelques lignes, s’élèvera d'abord fenfiblement ; mais dès que l’eau aura été électrifée par ce moyen, l’élévation ceffera, & il fe formera dans le même endroit de la furface de l'eau une cavité fenfible 5 parce qu’ alors les parties du fluide
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- Pointes,
- éledrique du condudeur & celles de l'eau doivent fe repouffer. v-,
- Mais fi cette même eau corantuniquoit par un fil de fer à la main de la, p.erfonne qui tient le vafe, ou fi cette même-eâi* iétoîi dans un vafe de métal, elle refteroifcéoaftamment élevée dans l’endroit diredement ©ppofé à la pointe; car alors, l’eau ne devenant point éledrique, parce quelle neféroit p.asifolée, fe trouveroit toujours attirée, par la .raifon que l’éledricité du condudeur .& celle de l’eau continuer oient d’être hétérogènes, c’eft à dire, d’efpece différente. On-ôbtiendroit le même phénomène,, fi le condudeur étoit éledrifé négativement ; puisque dans cette dernière fuppofition les éledncités-fëtoient auffi hétérogènes. . . • -.r
- DE L'ETINCELLE ET DE L’AIGRETTE ÉLECTRIQUE.
- LVILI,
- L’étincelle éledrique n’ell exitée,,. que lorsque deux corps, qui s’approchent l’un de l’autre à une diftance convenable, ont chacun une éledricité différente, c’ell à dire, dont l’un a plus de feu éledrique que l’autre. Il arrive fouvent qu’on obtient l’étincelle , lorsque les deux corps font à la diftance de plufieurs pouces l’un de l’autre : au refte la diftance requife pour obtenir une étincelle, eft E 3 tou-
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- 7© De l’etincellb et
- toujours proportionelle à la différence plus ou moins grande de l'éleCtricité des deux corps. La force & la vivacité de l’étincelle eft de même proportionée à la différence de leur éieélricité : Ainfi plus l’une des deux électricités'fera confiderable, plus l’étincelle fera forte ,T vive & partira à une plus grande diftance. Si le corps qu’on préfente à un conducteur étoit éleCtrifé en-moins, l’étincelle partiroit encore de plus loin , & feroit aufli plus vive & plus forte. Obfervez aulîi, que plus le conducteur éleCtrifé aura de fu-perficie, plus l’étincelle qu’il donnera, fera longue, vive & forte; j’en ai vu un de carton chez Mr* d‘Ingenhousz qui donnoit des étincelles d’une force prodigieufe ; elles s’e-Iançoient à près d’un pied de diftance fur l’articulation du doigt qu’on préfentoit à ce conducteur. -
- LIX.
- L’étincelle électrique n’eft rien autre cho-fe, que le fluide électrique convergeant & condenfé, qui fe précipite avec une extrême viteffe de la fuperficie du conducteur fur cel-le d’un autre corps, qui n’a que fa portion * naturelle d’éleCtricité, ou qui en a moins, que celle qui lui convient dans fon état naturel : mais pour que ce phénomène ait lieu, il faut que ce dernier corps foit affez près du conducteur éleCtrifé, pour qu’il puiffe attirer fortement l’éleCtricité de ce conducteur. De là il fuit, que l’étincelle part du conducteur au quel je préfente le doigt, par la même rai-
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- raifon, que le conducteur communique fon feu électrique à une boulette de fureau qu’on lui préfente. La feule différence qu’il y a entre ce%deux phénomènes eft, que dans ce dernier cas, on n’apperfoit point le fluide électrique qui palfe du conducteur à la boulette, au lieu que ce fluide eft vifible, lors qu'il s’élance du conducteur fur le doigt. Cette différence vient de ce que les petits corps préfentés à l’athmofphere d’un conducteur , en lui enlevant une portion de fon feu, ont une trop petite fuperficie, pour que le conducteur puiffe leur communiquer une grande quantité de feu électrique; car il ne peut leur en transmettre que proportionelle-ment à leur furface: or une petite quantité de ce fluide ne peut pas former un courant allez confidérable & allez condenfé pour devenir vifible. De là il fuit, que pour obtenir une étincelle du conducteur éleCtrifé, il faut que le corps qui lui eft préfenté, ait une furface affez grande pour abforber tout le feu condenfé d’une étincelle. Il fuit encore de là , que comme une boulette de fureau ifolée s’éleCtrife, lorsqu'on la met clans l’athmofphere d’un conducteur éleCtrifé, tout autre corps non - ékftrique & ifolé s’éleCtrife de même en recevant l’étincelle du conducteur.
- J’ai dit que l’etincelle étoit formée par le fluide électrique, qui fe condenfe en convergeant & fe précipite fur le corps qui l’attire ; on en fera convaincu en fe rappellant ce que j’ai déjà dit, que le fluide électrique forme une athmofphere au tour de tout corps E 4 qui
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- qui eil eledtrifé pofitivement, & que cette athmofphere eft fortement attirée par le corps non-éledtrifé qu’on lui préfente: d’où il arrive, que le fluide éledtrique doittfe diriger vers le point du corps non - éledtrifé qui elt le plus proche & le plus à portée de l’ath-mofphere du condudteur : or ce fluide ne peut pas fe diriger vers un même point fans converger & par conféquent fans fe con-denfer.
- LX.
- Placez vous fur un gateau de réfine, ou fur quelqu’ autre corps ifolant ; portez enfui-te une main fur le condudteur & tenez de l’autre un vafe de métal où il y ait de le-fprit de vin tiede (Fig. 16. PI. III.) après cela, faites éledtrifer le condudteur & pendant qu on l’éledtrife, qu’une autre perfonne préfente le doigt à l’efprit de vin, & auffitôt il partira de cet efprit de vin éledtrifé une vive étincelle qui y mettra le feu. Si la perfonne qui a préfenté le doigt à l’efprit de vin, tenoit elle-même le petit vafe métallique à la main, & que celle qui eft ifolée, y portât le doigtç l’effet feroit le même, à cette feule différence près, que l’étincelle, dans ce dernier cas, partiroit du doigt & non de l’efprit de vin.
- Lorsque le feu éledtrique traverfe un corps, il agit fur le feu commun contenu dans ce corps & le met en mouvement ; de-forte que fi ce corps a une quantité fuffifan-tes de ce feu commun, le corps s’enflamme :
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- voilà pourquoi une fimple étincelle éledrique met le feu à l’efprit de vin , pourvu qu’il foit tiede &redifié: mais s’il étoit aqueux, pour lors il faudra une plus forte étincelle pour l’enflammer.
- Quand le tems eft très chaud, un bon efprit de vin s’enflamme fans avoir été chauffé : Cela arrive lorsque le thermomètre de Mr. de Reaumur monte au 18 degré. Un peu d’efprit de vin verfé dans le creux de la main eft communément affez chauffé par la main, pour s’enflammer,! par une étincelle éledrique, pourvu que l’efprit de vin foit redifié. L’éther prendroit feu encore plus facilement.
- LXI.
- Sufpendez au condudeur plufietirs fioles de verre ouvertes par les deux extrémités, & accrochées les unes aux autres par les fils de fer qui font fixés à chacune de ces extrémités de ces fioles; (Fig. 17.) mais il faut obferver , que ces fils de fer doivent être prolongés dans chaque fiole, enforte que leurs extrémités fe trouvent à la diftance d’un demi pouce l'une de l’autre: on doit auffi garnir d’un bouton métallique les extrémités de ces fils de fer, qui fe trouvent dans l'intérieur de la fiole. Tout étant arrangé de la forte, éledrifez le condudeur & vous appercevrez dans chaque fiole des étincelles brillantes qui pafferont d’un bouton métallique à l’autre, auffi longtems que vous élec-triferez le condudeur; obfervez, qu’il faut
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- que la derniere fiole communique avec le plancher; ce qu’il eft facile de faire en acro-chant une chainette à cette derniere fiole.
- LXII.
- Quoique le fluide éledrique ne foitpour l’ordinaire vifible , que lors qu’il pafTe en forme d’étincelle du condudeur à quelqu-autre corps non - éledrifé ; cependant il arrive aufli fouvent que ce fluide devient vifible fans éclater comme une étincelle.
- Un récipient vuidé de l’air groflier, pa-roit tout rayonnant de lumière , auflitôt qu’on l’éledrife. Pour bien appercevoir ce phénomène, il faut faire cette expérience dans l’obfcurité. Quant, à fon explication, voici celle qu’on en donne: En éledrifant la furface extérieure du récipient,, le fluide de la furface intérieure en reçoit une fi vive impreflion qu’il eft repoufle de cette furface: Si le récipient n’étoit pas vuidé de fon air groflïer, on n’y appercevroit point de lueur ; parceque l'air du récipient empêcheroit le fluide éledrique de s’écarter de fa furface: Si au contraire le récipient étoit parfaitement vuide, la lueur du feu éledrique ne pourroit de même avoir lieu; parce que dans ce cas, le fluide ne trouvant aucun obftacle, pourroit s’éloigner de fa furface fans faire aucun effort & fans être obligé de fe conden-fer. Mais il n’en eft pas de même lorsque le récipient n'eft pas parfaitement vuidé de tout air; car dans ce dernier cas, la petite portion d’air qui eft reliée dans le récipient, eft
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- eft fuffifante pour faire de la réfiftance au fluide, qui fait effort pour s’éloigner de la furface; & cette réfiftance efl; telle, que ce n’eft qu’en fe réunifiant & en fe condenfant que ce fluide vient à Jiout de la furmonter: C'eft donc uniquement parcè qu’il eft forcé de fe condenfer qu’il devient vifible.
- On vient de dire que le fluide électrique communiqué à la furface extérieure du verre, repouffoit avec force celui de la fur-fàce intérieure: ce n’éft pas ici le lieu d'en donner la preuve. On parlera amplement de cet article, lors qu’on en fera à l’explication de la Bouteille de Leyie.
- LXIII.
- Le Baromètre nous préfente le même phénomène que le récipient dont on vient de parler. Lorsque le Baromètre eft parfaitement purgé d’air, & qu’on l’agite pour exciter le frottement du mercure contre le verre, on n’apperçoit aucune lumière dans la partie fupérieure du tube qui eft parfaitement vuide de tout air: mais lors qu'on a laiffé entrer une ou deux bules d'air feulement, dans cette partie fupérieure du tube, cette partie fera toute lumineufe, dès qu’on agitera le mercure du Baromètre, ou qu'on portera cet infiniment fur un conducteur élec-trifé. La lumière qu’on apperfoit dans cette occafion, eft allez femblable à celle que donne le phofphore.
- Les Amples tubes de verre, lors qu’ils font vuidés de leur air groflier, font le. mê-
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- me effet, auflitôt qu’on les lait toucher au conducteur éledrifé. On a auffi coutume de former une efpece d’étoile avec de fembla-bles tubes; & cette étoile devient brillante &. rayonnante de feu dans toutes fes branches, chaque fois qu’on l’éledrife.
- On apperpoit encore le même phénomène , dans un tube de verre au quel on donne une forme ondoyante, comme celle d’unfer-pent : (Fig. i8- ) On laiffe dans ce. tube une petite colonne de mercure d’un pouce de hauteur, & dès qu’on fait couler ce mercure d’un bout à l’autre de ce tube qui elt vui-de d’air, tout le tube devient lumineux, & il femble qu’une belle flamme en parcourre toute la longueur , chaque fois qu’on fait couler le mercure d’une extrémité à l’autre.
- LXIV.
- Quand on éledrife un condudeur terminé en pointe émoufTée & arrondie de la grof-feur environ d’un gros pois , on obferve dans l’obfcurité, pour peu que le tems foit favorable à l’éledricité, que cette pointe émoufTée poufle le feu éledrique en forme d’une belle aigrette lumineufe, ou d’un cône enflammé & rayonnant, dont le fommet fe trouve à la pointe arrondie du condudeur. Ce phénomène eft un effet de la vertu que la pointe a de pouffer au loin l’excès du feu éledrique dont elle eft chargée.
- Quant à la forme conique de cette aigrette, elle réfulte en partie de la propriété répulfive dont les parties du fluide éledrique font
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- font douées & en partie de la réfiftance que lui oppofe l'air environnant : & comme la denfité de cet air varie ; puisque dans certains tems il eil plus condenfé & dans d'autres plus dilaté, comme aufli plus ou moins chargé de vapeurs, il arrive de même, que cet air oppofe tantôt plus & tantôt moins de réfillance au feu électrique : d’où il fuit, que la grandeur & la vivacité de l’aigrette ne font pas toujours égales.
- LXV.
- On obferve encore lorsqu’on préfente le plat de la main à la pointe émouffée du conducteur à deux on trois pouces de diftance, que l’aigrette redouble de vivacité & s’épanouit davantage : C’eft que dans ce cas là, la main attirant fortement le feu éleétrique, en redouble nécefiairement l’écoulement. (Fig. 19.)
- Pour remarquer bien fenfîblement 1 attraction de la main, préfentez la de côté à la pointe émOuflee du conducteur, & vous obferverez toujours que l’aigrette s’inclinera pour arriver à la main, foit que vous la pré-fentiez un peu plus haut que la pointe du conducteur, ou un peu plus bas, foit encore qu’on la préfente à la droite , ou à la gauche de cette pointe émoufTée : preuve certaine, que la pofition de la main détermine la direction du courant électrique qui s’échappe de l’extrémité du conducteur.
- LXVT.
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- On vient de dire, qu’en préfentant le plat de la main à l'aigrette, celle-ci s'épa-nouiffoit davantage; c’eft à dire, que la ba-fe du cône lumineux augmentoit de circonférence ; la raifon en eft, que la main fe trouvant à portée de cette aigrette lumineufe, chaque point de la furface de la main qu'on lui préfente, attire le fluide éledrique ; & celui-ci, pour obéir à toutes ces attradions particulières, eft forcé de diverger ; d’où il réfulte, que la bafe de l'aigrette doit devenir plus grande.
- On obferve précifement le contraire, fi au lieu du plat de la main, on lui préfente feulement l’articulation d’un doigt ou l’anneau d'une clef; car alors la bafe de l'aigrette diminuera fenfîblement ; parce que le fluide éledrique au lieu de diverger , fera forcé de converger pour fe rendre à la fur-face de l'articulation du doigt qui lui eft pré-fenté.
- LXVTI.
- Préfentez à la pointe émouffée d’un con-dudeur éledrifé un tube de verre frotté; dans ce cas, à mefure que vous approcherez de plus près le cilindre,de la pointe du con-dudeur, vous arrêterez davantage l’écoulement de l’airrette qui s’échappe. Ce phénomène fait oien voir, que les parties du fluide éledrique fe repouflent les unes les
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- Si l’on frotte la pointe d’un condudeur avec du bon phofphore anglois & qu’on élec-trife enfuite le condudeur, les parties phof-phoriques éledrifées s’échappent & s’écartent les unes des autres : mais dès qu’on tire une étincelle du condudeur, ces mêmes parties , qui s’étoient déjà échappées, rebrouf-fent chemin & reviennent au condudeur, qui doit alors les attirer; parce qu’il rieft plus éledrifé pojîtivement. Cette expérience doit fe faire, comme toutes les précédentes, dans l’obfcurité: elle fait toucher au doigt la ju-ftefle des principes & des loix qu’on a donnés touchant l’attradion & la répulfion électrique , de même que fur la vertu finguliere des pointes-
- LXIX.
- lorsqu’on a fortement éledrifé un condudeur , on peut tirer de quelqu’un de fes angles une longue étincelle, qui en s’échappant de cet angle , traverfe l’air & prend une diredion en Zigzag, {Fig. 20.) pour s’élancer fur l’articulation du doigt qu’on lui préfente à quelques pouces de diltance. Mais quelle eil la raifon de cette diredion en Zigzag ? voici celle qu’on en peut donner. Une colonne d’air d’un diamètre égal à celui de l’étincelle éledrique, fe trouve inter-pofée entre le corps qui lance l’étincelle & celui qui la reçoit: l’étincelle doit donc agir fur cette colonne d’air & celle - ci étant un corps
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- corps non-transmettant, doit réagir fur l’étincelle : Ainfi il y a de part & d’autre une ré-pulfion réciproque. Or l'adion de l'étincelle & la réadion de la colonne d’air doivent néceflairement rendre la colonne d'air plus denfe; & devenue plus denfe, elle doit re-pouffer encore plus fortement l'étincelle; puisque la réaction ou répulfion des corps élaftiques elt toujours proportionelle à leur compreiïion. Ce point une fois établi, il en réfulte, que lorsque la colonne d'air a ainfi acquis par fa condenfation un degré de force répulfive fuffifant, l’étincelle eft alors forcée de détourner fa diredion, & de prendre fon chemin à côté de cette colonne, où l’air voifin n’étant point encore comprimé, lui oppofe moins de réfxilance. Mais dès que l'étincelle a pris fa nouvelle diredion fur la colonne d’air la plus voifine, elle agit fur cette colonne comme fur la première; enforte que cette fécondé colonne fe comprime & fe condenfe de même, & parvient comme la première à foire aflez de réfiftance à l’étincelle, pour la forcer de fe détourner une fécondé fois ; & ainfi de fuite. C’efl ainfi qu’on explique le Zigzag de l’étincelle éledrique, qui en changeant plufieurs fois de diredion, jusqu’à ce quelle ait enfin atteint le corps qui l’attire, paroit à cet égard avoir beaucoup d’analogie avec la diredion de la foudre, qui s’élance de même en Zigzag d’un nuage jusques fur la terre.
- On peut objeder, que l’air étant très fluide, la colonne fur laquelle tombe l’étincelle ,
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- celle, ne devroit point fe condenfer ; puisqu’ étant très fluide, il devroit céder fa place fans réflftauce en fe retirant vers les colonnes voi fines; vil qu’il paroit qu’il lui feroit plus facile de refluer latéralement, que de fe condenfer fuffifamment pour s'oppofer au pairage de l’étincelle.
- Cette difficulté ne feroit pas fans force, fi le fluide éledtrique avoit la lenteur & le peu d’adlivité de l’air. Celui-ci a befoin d’un tems fenfible pour fe répandre uniformément ; puisque dans fa plus grande vitelfe, il ne parcourre qu’une lieue d’allemagne en 5. minutes. Il n’en eft pas de même de la propagation du fluide éledtrique : fa propagation ell: presque inftantanée ; puisque ce fluide fe porte dans un tems imperceptible à des ditlances incomparablement plus grandes. Or ce tems imperceptible ne fuffifant pas à l’air- pour refluer, il doit être comprimé & condenfé par l'excès de vitelfe que l'e-tincelle a fur celle dont l’air eft fufceptible pour refluer latéralement. Cette réponfe eft confirmée par l’expérience : car quand on fait palfer l’étincelle au travers du vuide, elle eft toujours droite, au lieu quelle part en Zigzag, fi le récipient n’eft point vuide d'air.
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- DE QUELQUES AUTRES PHENOME NES RÈLATIVS AUX NUAGES. LXX.
- En conféquence d’un nombre infini de belles expériences faites depuis environ 26. ans, pour approfondir la nature & les propriétés de l'électricité, il paroit aujour-dhui comme décidé, que la foudre elt un effet de l’éleétricité. Les phyficiens modernes conviennent presque généralement que le feu de la foudre eft un feu éledrique con-denfé, lequel partant de quelque grand nuage éledrifé en-plus, s’élance avec impétuofi-té fur un autre nuage & quelquefois fur la terre : mais pourquoi ce feu éledrique foudroyant prend-il cette diredion? c'eil que le nuage ou la terre attire ce feu puiflam-ment chaque fois que l’un ou l’autre fe trouve dans un état d’éledricité moindre,. que celui où fe trouve le nuage qui lance la foudre pendant un orage. Cette opinion elt très fondée; car on trouve tant d’analogie entre l’étincelle éledrique & la foudre, qu’on ne peut s’empêcher de regarder l’une & l’autre comme des phénomènes dç même natu-
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- re ; puisqu’ils ont exactement les mêmes propriétés: En effet,
- i°- Le feu de l’étincelle & celui de la foudre font lumineux & fort éblouiffans.
- 2<>- La rapidité de l’un & l’autre eft extrême.
- 3°- L’un & l’autre éclatent dans l’explo-fion avec un bruit & un craquement fubits.
- 40. L’un & l’autre ont une direction en Zigzag.
- ' y°- L’un eft l’autre déchirent & brifent le corps autravers duquel ils paffent.
- 6». L’un & l’autre tuent les animaux.
- 7°- L’un & l’autre fondent les métaux.
- 8°- L’un & l’autre communiquent le mag-nétifme à l’acier.
- 9°- L’un & l’autre ont l’odeur de foufre.
- io°- L’un & l’autre allument les fubftan-ces inflammables.
- n°. L’un & l’autre fe diflipent & difpa-roiffent presquau même inftant qu’ils éclatent.
- 12®- L’un & l’autre trouvent dans le métal un paffage fi facile, qu’ils fuivent tous fes détours, plutôt que de paffer en ligne droite au travers d’un autre corps.
- 13®- L’un & l’autre enfin, font fortement attirés par les pointes.
- Cette derniere découverte, comme plu-fieurs autres dont nous parlerons, appartient inconteftablement à Mr. Franklin qui la fit en 1749. Cette idée , d’attirer fueceffivement le feu de la foudre par des pointes, fe pré-fenta à fon efprit, en réfiechiffant fur toutes F 2 les
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- les autres propriétés communes au feu élec* trique & au feu de la foudre.
- LXXI.
- On conçoit allez, que fi les nuages fe trouvent effectivement éledrifés en - plus & qu’ils s’abaiffent allez vers la terre, pour que leur diltance foit moindre que la force attractive de la terre, (qu’on fuppofe dans un état d’éledricité naturelle, ) il doit néceffaire-ment arriver, que le feu éledrique furabon-dant des nuages, converge vers l’endroit de la terre , qui fe trouvera alors le plus à portée du nuage éledrifé en -plus.
- Mais fi aucontraire , le nuage en quef-tion fe trouvoit- éledrifé négativement, rélati-vement à la terre, on concevra encore aifé-ment, que le feu de la foudre doit de même éclater; parce que dans ce dernier cas, elle s’élancera de la terre fur le nuage. Enfin s’il arrivoit qu’un nuage éledrifé en-plus fe trouvât à portée d’un autre nuage éledrifé en-moins, dans ce troifieme cas, qui eft le plus ordinaire, il eft clair que le feu de la foudre partira du nuage pofitif pour fe précipiter fur le nuage négatif. Tout cela eft très conféquent, & eft fondé fur les principes & les notions que nous avons déjà détaillés.
- Mais quelle preuve a-t-on que les nuages ont en effet fouvent une éledricité d’une ef-pece différente de celle de la terre ? Rien n’eft mieux prouvé que ce point ; mille expériences l’ont rendu certain : celle que fit Mr.
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- Mr. Franklin avec un cerf-volant fuffîvoit feule pour ne laifler aucun doute à cet égard: elle fut faite à Philadelphie en 1749.
- Mr. Franklin foupç onnoit depuis quelque teins, que la foudre n’étoit qu'une forte étincelle électrique lancée fur la terre par les nuages orageux qui fe trouvoient furchargés du feu éleétrique; mais ce n’étoit là qu'une conjecture. Comme ce Phyficien connoiffoit le pouvoir des pointes pour attirer le feu éleCtrique, il imagina qu’on pourroit s'éclaircir de l’état des nuages, rélativement à l'électricité , en élevant des pointes aiïez haut pour que leur action s’étendît jusqu’aux nuages; mais comme il n’avoit alors ni le tems ni la commodité d’éxécuter lui -même cette expérience, cet ingénieux Amériquain y fuppléa fort fmguliérementf Fig. 21. Pi. III.) il mit fur un cerf- volant un fil d’archàl dont la pointe étoit dirigée vers le ciel : il y attacha une longue ficelle, & au premier orage qui furvint à Philadelphie, il fit ufage de fon cerf-volant: dès qu’il fut élevé, & fur-tout après que la corde eut été mouillée par la pluie qui tomba en même tems, Mr. Franklin tira beaucoup d’étincelles d’une clef qu’il avoit attachée au bout de la ficelle. C’eft ainfi qu’il réalifa l’idée hardie qu’il avoit conçue de tirer le feu des nuages orageux, au cas qu'il fe trouvafTent en effet éleCtrifés, comme il l'avoit conjeduré. Il fit plus, il chargea des renforts à cette clef; il alluma de l’efprit devin & fit plufieurs autres expériences électriques avec autant de fuccèr.
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- qu’on peut en avoir en fe fervant d’une machine éledrique. Après une expérience aufti décifive, tous les Phyficiens furent forcés de convenir que l’identité- du feu éledrique & de celui de la foudre étoit complètement démontrée. Le ledeur qui fouhaitera de s’in-ftruire plus à fond des autres expériences ré-iatives à la formation des orages & de la foudre, ne peut mieux faire que de recourir à l'ouvrage du P. Beccaria. Ce célébré Phyficien a donné fur ce fujet de très-belles expériences & des obfervations très- curi-eufes.
- Voyons à préfent comment Mr. Frank-lin explique la maniéré dont les nuages peuvent s’éledrifer.
- LXXII.
- L’océan eft un compofé d’eau qui eft un corps transmettant & de fel qui eft un corps électrique. Lorsque par l’agitation de la mer, les particules aqueufes & falines fe frottent les unes contre les autres, le feu éledrique eft raffemblé fur la furface de l’eau, & on l’apperyoit même à chaque coup de rame dans l’écume des vagues. Pendant une tempête toute la mer paroit en feu. Ce font là des faits que perfonne ne contefte ; mais qu’en réfulte-t-il? le voici.
- Les molécules d’eau repouiTées de la fur-face par l’effort de la répulfion éledrique, fe détachent de là maffe commune, emportent le feu éledrique avec elles, & vont former des nuages éledriques en s’élevant dans l’ath-
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- l'athmofphere; & ces images retiennent en-fuite le feu éledrique, jusqu’à ce qu’ils puif-fént le communiquer aux autres nuages qu’ils rencontrent dans l’athmofphere.
- Quant aux nuages qui font formés par les vapeurs de la terre, ils ont moins de facilité de. s’élever ; parce que ces vapeurs retombent promptement & facilement fur la terre d’où elles s’étoient élevées;car n’ayant point d’excès de feu éledrique, qui puifTe repoufler les-,molécules aqueufes & les forcer de s’écarter les unes des autres, ces mêmes molécules fe rencontrant par l’agitation de l’air, fe raffemblent, fe forment en gouttes & retombent enfuite à caufe de l’excès de leur pefanteur.
- Il n’en eft pas de même des nuages formés par les vapeurs delà mer; car ces vapeurs étant "pourvues, comme on la dit, d’une grande quantité de feu éledrique, je foutiennent mieux dans l’athmofphere & s'élèvent meme plus haut ; parce que leur effort répulfif ne permet pas à leurs molécules de fe réunir. Mais lorsque ces nuages de mer font enfuite poulfés par les vents & portés du milieu de l’océan fur le continent, ils perdent bientôt leur feu éledrique ; parce qu’ils le communiquent aux nuages de terre qu’ils rencontrent, ou à la terre même qui l’attire fortement, lorsque ces nuages fe trouvent par leur peu d’élévation à la portée de l’attradion terreflre; d’où ii arrive, que les molécules d’eâu de ces nuages, après avoir ainfi perdu l’excès de leur feu éledrique, fe F 4 ré-
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- réunifient & devenues plus maffives & plus pelantes par cette réunion qui en forme des gouttes, retombent quelque- fois en petite pluie & d’autre fois en greffes ondées, félon que le nuage perd lentement ou précipitamment fon feu éledrique.
- Il eft encore d’autres circonftances qui nous donnent le phénomène de la pluie. Lorsqu’un nuage de mer fortement éledrifé en-plus , en rencontre un terreftre dont l’é-ledricité eft abfolument ou rélativement négative, dans ce cas , la foudre éclate & le nuage de mer après avoir lancé fon feu électrique fur le nuage terreftre, fe réfout le plus fou vent en une forte pluie. La commotion ou fecouffe donnée à l’air par l’éruption fubi-te du feu éledrique, contribue beaucoup dans cette occafion à précipiter les eaux; parce que ces fortes de fecouffes rapprochent les molécules d’eau dont le nuage étoit formé. Telle eft fouvent la caufe de ces chûtes foudaines & abondantes de pluie qui fur-viennent après les grands éclats de tonnerre. On expliquera plus particuliérement ci-après, par une expérience affez curieufe, le mécha-nifme qui réfout les nuages en pluie.' Voyez le parag. (155.)
- LXXIII.
- Lorsqu’il fait dans un pays une grande chaleur, l’air inférieur fe raréfie & s'élève; l’air fupérieur au contraire, étant plus froid & par conféquent plus denfe & plus pefant, doit defcendre; or dans ce mouvement ou cou-
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- Gourant d’air, les nuages fe rencontrent ;ainfi fi les uns font éledrifés & que les autres ne le foient pas, les éclairs qui fuccedent font bientôt appercevoir le feu éledrique quipaf-fe d’un nuage à l’autre : tout le ciel paroit alors s’enflammer par le redoublement des éclairs qui font fuivis de grands éclats de tonnerre ; parce que la foudre en s’élançant, choque l’air impétueufement. Mais fi pendant cet Orage quelques nuages fortement éledrifés, foit en-plus foit en-moins, s'abaif-fent affez pour fe trouver à la portée de fat-tradion terrellre, alors c’eft fur la terre même que la foudre s’élance avec le plus horrible fraeas. Enfin l’orage finit ordinairement par de grandes pluies qui rafraichiffent toute l’athmofphere. Tels font les phéno» menes que les grandes chaleurs oecafionnent aflez fouvent,
- LXXIV.
- L’expérience avoit déjà appris à l’antiquité la plus reculée, que les endroits les plus élevés, comme les hautes montagnes, les tours &c. étoient plus expofés à être frappés de la foudre que les lieux moins élevés: mais les anciens en ignoroient la caufe. Les Ph-yficiens modernes à qui les vrais principes de l’éledricité font familiers, ne trouvent aucun embarras à en donner la raifôn.
- Les fommets des montagnes, des tours, des clochers, des mats, des arbres &c. font par leur hauteur plus à portée des nuages éledrifés; Ainfi il eft tout naturel que ces
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- fomraets étant plus proches des nuages, attirent aufli plutôt & avec plus de force le feu éledrique de ces nuages.
- Outre cela, ces fommets fe trouvant en quelque façon comme ifolés dans l’air, font autant d’éminences qu’on peut confidérer comme des efpeces de pointes, vers lesquelles le feu éledrique fe porte avec d'autant plus de force, que ces pointes font plus élevées & plus aigues. Il fuit de - là, qu’il eft plus fur pendant l’orage de relier en pleine campagne, que de fe mettre à l’abri fous un arbre ; fur-tout s’il eft fort haut ou agité par le vent.
- Il femble d'abord, que puisque ces efpeces de pointes que forment les fommets des édifices fort élevés, attirent à elles avec force le fluide éledrique des nuages, on auroit dû en conclure , qu’il feroit à fouhaiter qu’on n’élevât le moins que pofiible, de ces fortes d’éminences. MaisMr. Franklin, connu pour un des plus profonds fcrutateurs de la nature de 1 eledricité, en a jugé tout au-trement:& fes expériences nous ont convaincu, que rien n’étoit plus efficace pour fe garantir des funeftes effets de la foudre, que de placer de longues pointes métalliques fur les édifices, avec la précaution d’y attacher un gros fil de fer ou une chaîne qui aboutifle à un ruiffeau, ou à l’eau d’un puits, ou à quelques pieds de profondeur dans le fein de la terre,
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- En effet, la vertu des pointes, tant pour attirer de loin que pour repoufler au loin le feu éledlrique , étant un fait certain, il eft tout naturel qu’en élevant des barres de fer terminées en pointe dorée , afin que la rouille ne les endommage pas, il eft tout naturel dis-je , que ces pointes pompent en filence &' fucceffivement une grande partie du feu des nuages, & qu’elles les en déchargent long-tems avant qu’ils foient fufiïfam-ment abaiffés pour lancer la foudre fur la terre : enforte, qu’au cas même que les nuages continuaffent de s'approcher vers la terre, ils feroient alors privés de l’excès de leur feu éleétrique & par conféquent hors d’état de lancer la foudre; ou s’il leur en reftoit encore, cet excès feroit trop modique , pour former un courant de feu capable de s’élancer avec la force de la foudre. Au relie , il eft fort égal que ce foit le nuage qui foit éleclrifé en-plus, ou que ce foit la terre. Dans l’un & l’autre cas, les pointes de fer dont on arme les fommets des édifices, font également utiles : car fi c’eft la terre qui eft éleélrifé pofitivement, rélativement aux nuages, les pointes préviennent de même la foudre qui s’élanceroit de la terre fur le nuage; parce quelongtems avant que ies nuages s’approchent alfez près de la terre pour attirer le feu éledlrique terreftre, c’ell-à-dire, pour donner lieu à l’éclat de la foudre, les pointes ont déjà pouffé affez de feu éledtri* que fur les nuages, pour que ce qu’il en relie à la terre, foit à peu près en équilibre avec
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- avec celui que les nuages auront reçu par les fusdites pointes.
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- On objedera fans doute, que les fom-mets des montagnes ou des édifices étant comme on l’a dit, des efpeces de pointes fur lesquelles la foudre paroit tomber de préférence, il réfulte de-là, que les barres de fer pointues placées fur les édifices, bien loin de pouvoir garantir de la foudre, elles doivent au contraire être plus propres à la diriger fur ces édifices ; puisqu'elles attirent plus fortement le fluide éledrique des nuages.
- Mais il faut obferver que la force attractive du fommet d’une tour ou d’un édifice eft bien différente de celle d'une pointe aigue qu’on place fur ce fommet. Lorsque les nuages font à une trop grande diftano: pour lancer la foudre fur la terre , les fom-mets des tours ne peuvent pas non plus leur enlever l’excès de leur feu électrique, mais leur attradion eft cependant fuffifante pour obliger les nuages de s’abaiffer & d'arriver enfin à la diftance requife, pour que ces mêmes fommets fe trouvent allez proches des nuages pour attirer, â caufe de leur proximité , le feu éledrique des nuages avec une force capable de l’obliger à palier, par une explofion générale & fubite , du nuage fur les fusdits fommets. l’Expérience Rivante éclaircira ceci davantage.
- Après avoir éledrifé un condudeur léger & tellement fufpendu, qu’il foit fort mobile,
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- bile, préfentez le doigt à ce condudeur à la diftance de quatre à cinq pouces; de forte que la force attradive du doigt, à caufe de cet éloignement, foit trop foible pour faire partir une étincelle du condudeur. La force àttradive du doigt n’eft cependant pas alors fans effet; car quoiqu’elle ne puifle pas tirer une étincelle, elle agit cependant fur le condudeur avecaffez de force pour l’obliger de s’approcher du doigt & d’arriver à la diftance précife, où la force attradive du doigt fera fufiifante, à caufe de la proximité du condudeur, pour faire partir l’étincelle: voilà exadement l’effet que produit l’attraction d’un fommet d’une tour ou d’un édifice fur les nuages-éledrifés.
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- La pointe aigue d’une barre de fer placée fur une tour & communiquant avec l’eau d’un ruifleau, produit des effets tout à fait différens de ceux dont on vient de parler.
- En premier lieu, la pointe d’une barre de fer attire de fort loin & avec tant de force le feu éledrique du nuage, qu’il paffefuc-ceflivement avec la plus grande rapidité du nuage à la pointe, fans pour cela que le nuage foit obligé de s’approcher de la terre: d’où il fuit, que dans le cas même, où ce nuage s’abaifferoit, on n’auroit point à redouter le coup de foudre; puisque la pointe auroit déjà privé le nuage de la plus grande partie de fon feu éledrique.
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- En fécond lieu, on eil affiné que le fluide électrique pompé par la pointe, fe transmet à l’inftant jusqu’ à la mer, fans qu’il foit à craindre, qu’il s’arrête dans la barre de fer: c’efl là un avantage très confidérable; car la barre de fer, fe trouvant par là continuellement dans un état négatif, rélative-ment aux nuages, peut fans interruption tirer avec la même force le feu électrique des nuages. Au relie, il efl d’autant plus effen-tiel que le feu électrique ne s’engorge & ne s’accumule pas dans la barre de fer, que fi cela arrivoit, il pourroit s’amaffer une telle quantité de feu électrique dans la barre, qu’il en réfulteroit une alTez forte explofion pour tuer celui qui s’en approcheroit, ou pour mettre le feu à quelque matière inflammable qui fe trouveroit à portée de cette explofion.
- Outre cela, fi le feu électrique s’engor-geoit dans la barre, la pointe celïeroit dès-lors de pomper le feu électrique du nuage ; d’où il arriveroit que le nuage électrifé venant à s’abaiffer à caufe de l’attraction des autres corps terreftres, ianceroit fur eux la foudre, auffitôt qu’il feroit arrivé à la di-ilance requife pour produire cet effet.
- C’ell pour prévenir ces fâcheux accidents qu’on a foin de garnir la barre de fer d’un gros fil d’archal, qui aboutiffe à l’eau d’un ruiffeau ou à celle d’un puits ; parce qu’on fait .que les métaux & l’eau font les corps les plus propres à transmettre promptement le fluide électrique: Enfin le gros fil de
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- de fer dont on garnit la barre terminée en pointe, a encore un avantage ineftimable; C’eft que dans le cas même où un nuage élec-trifé en-plus fe trouveroit allez près de la terre, & encore aflez pourvu de feu électrique furabondant, pour être en état de lancer la foudre fur cette barre de fer, il n’en réfulteroit rien de fâcheux ; car tout ce qu'il pourroit en arriver , feroit que la foudre fondroit peut - être l’extrémité de la pointe & le gros fil de fer, & iroit enfuite fe perdre dans l’eau ; car il eft certain que la foudre ayant une fois atteint le métal, ne s’en écarteroit pas pour palier à d’autres corps: d’où il fuit, que la foudre dans ce cas, ne feroit pas plus de mal que fi elle étoit tombée immédiatement dans l’eau.
- Tels font les avantages d’une barre de fer terminée en pointe & placée fur une tour ou fur quelqu’ autre édifice plus élevé que les autres. Cent expériences en ont déjà conftaté la réalité.
- LXXVIII.
- Qu’on fe rappelle l’expérience rappor tée au Parag. 54. où l’on a dit, que lorsque le bafiin éledrifé d’une balance pafle au deflùs d’un poinçon fiché fur le plancher, ce baflin s’abaifle pour s’approcher du poinçon, & lui lance enfuite , lorsqu'il en eft allez près , fon feu éledrique furabondant. Qu’on fe rappelle aufii la fuite de cette expérience où il eft dit, que fi l’on fixe une aiguille fur le poinçon , fo baflin éledrifé ne s’abaifle plus
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- alors vers le poinçon ; mais qu’il communi» que en-filence & fort promptement tout fon feu à la pointe de l'aiguille, fans qu'on ap-perçoive la moindre étincelle.
- Le baflin éledrifé repréfente le partage d’un nuage, & le poinçon fiché fur le plancher ell l’image du fommet d’une tour ou de quelqu’ autre édifice. Ainfi l’on voit par cette expérience, que lors meme que les nuages éledrifés partent fur les fommets des montagnes ou des clochers à une trop grande dillance pour les frapper, ils ne laiflent cependant pas d'être attirés & forcés de s’a-baiffer, jusqu’à ce qu’ils foientà la dillance précife qui leur eft convenable pour lancer la foudre.
- Enfin on remarque par la même expérience , que l’aiguille fixée fur le poinçon, ou même fur le plancher à coté du poinçon, tire en filence le feu du baflin à une dillance plus grande, que celle qui ell requife pour donner l’étincelle, d’oit il arrive que le poinçon n’en efluie point le choc. Après une femblable expérience , qui ne voit pas que les pojntes élevées comme on l’a dit, fur les édifices, font très-propres â les garantir de la foudre? puisque ces fortes de pointes tirent fans relâche & en filence le feu éledri-que des nuages orageux.
- LXXIX.
- Mr. Franklin rapporte dans une de fes lettres imprimées dans fee oeuvres, qu’étant à Newbury dans la nouvelle-Angleterre l’an-
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- née 175J , il avoit obfervé que la foudre qui étoit tombée fur un clocher de bois haut de 140 pieds, avoit mis en pièces toute la pyramide de bois haute de 70 pieds; que la foudre étant enfuite arrivée à un fil de fer de la grofieür d’une aiguille à tricoter, qui étoit attaché au marteau d’une cloche & qui répondoit à l’horologe placé 20. pieds plus bas, avoit fans s’écarter, fuivi ce fil de fer jusqu’à l’horloge, paflant avec le fil de fer par les trous de deux planchers, fans y produire d’autre effet que d’agrandir Un peu ces trous. Ce même fil de fer, étant enfui-te dirigé horizontalement le long d’un plafond en plâtre jusqu’ auprès d’une muraille, le long de laquelle il defcendoit pour fe rendre à l’horloge, la foudre avoit exactement fuivi la inême route, fans rien endommager dans le batiment, à cela près, qu’on voyoit une trace noire & fale , large de quelques pouces, fur le plâtre du plafond fous lequel pafîoit le fil de fer, & le long du mur de haut en bas. La foudre qui étoit ainiî arrivée à l’horloge, fans faire aucun dégât, palfâ de même fans rien déranger jusqu’à l’extremité du pendule de l’horloge: mais enfuite, depuis cet endroit jusqu'au pied de la tour, le batiment fut crevaffé & tellement endommagé , que les pierres furent arrachées du mur de fondation &jet-tées à la ditlance de 20. à 30. pieds. Quant au fil de fer dont on a parlé, l’on n’en retrouva rien, hors un morceau d’environ deux pouces de longueur qui pendoit au manche G du
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- du marteau deftiné à frapper les heures fur la cloche, & à peu près autant qui tenoit à l’horloge : tout le relie étoit fauté en l’air ou avoit été fondu & probablement diflipé en vapeurs. Tels furent les effets de ce coup de foudre : furquoi Mr. Franklin fit les obfervations fuivantes.
- io. Que la foudre dans fon palfage au travers d’un batiment, quitte le bois pour palfer dans le métal quelle rencontre, & que du métal elle ne repalTe point au bois ou à d'autres corps, tels que font les pierres , les briques, le plâtre &c., que lorsque le feu éleélrique de la foudre ne trouve plus de métal auquel il puifie s’attacher.
- Que la quantité de matière fulminante qui tomba fur ce clocher , devoit être bien grande à en juger par les effets , tant fur la pyramide de bois placée au defïus de la cloche, que fur la partie inférieure de la tour au defTous du pendule de l’horloge.
- 3e- Que quelque grande que fût la quantité de cette matière fulminante, elle fut cependant conduite toute entière par un petit fil de fer, fans que rien s’en foit écarté; puisque rien ne fut endommagé depuis la cloche jusqu’à l’horloge.
- 40. Que fi le fil de fer qui fut fondu, avoit été plus gros, il feroit de même relié entier ; puisque le pendule dont la gvolfeur égaloit celle d’une plume à écrire, 11e fut point endommagé.
- S°- Qu'il paroit très vraifemblable par toutes ces circonftances,. que fi on eut adapté
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- té un fil de fer depuis la girouette jusqu’à terre, ce coup de foudre 11’auroit caufé aucun dommage au clocher, quoique ce fil de fer eut peut-être été lui même détruit, s’il avoit été trop mince.
- Les obfervations de Mr. Franklin furent bien confirmées dix ans après ; car le même clocher ayant été réparé & garni d’un fil de fer qui s'étendoit depuis la girouette jusqu’à terre, les nouvelles publiques nous apprirent en 1765, que le tonnerre étant encore tombé fur ce clocher, il fut conduit jusqu’à terre par ce fil de fer, fans Faire aücün dégât dans le clocher.
- Au refte, plufieurs autres phyficiens ont eu depuis oceafion d’obferver les mêmes effets, ou du moins d’aflez femblables , dans différens édifices fur lesquels la foudre étoit tombée : ainfi il n’eft pas étonnant, que tous ceux qui ont fait quelque étude de l’éleélri-cité, foient aujourd’hui généralement d’accord avec Mr. Franklin , fur les avantages que procurent les moyens propofés par ce favant, pour garantir les édifices des fuueftes effets (le la foudre.
- Afin de ne|laifTer aucun doute fur la vertu finguliere dont eft douée une barre de fer terminée en pointe, pour attirer la matière fulminantedes nuages, voici l’expérience que le génie fertile & inventif de Mr. Franklin imagina encore à Philadelphie: plufieurs fa-vans de l’Europe l’ont enfuite répété avec le
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- même fuccès. Dreflez en rafe campagne une longue perche garnie de haut-en-bas d'une chaine de fer & furmontée d’une pointe métallique qui ait deux ou trois pieds de longueur ; ( Fig. 22. PI. IV. ) Mais il faut que cette perche foit parfaitement ifolée; par conféquent il faut qu’elle repofe fur un corps électrique, tel que peut être un bloc de verre, ou un gros gateau de rétine: en-fuite , pour arrêter cette perche dans une ii-tuation verticale, placez autour d'elle à huit ou dix pieds de diltance , trois grands poteaux , formant enfemble un triangle dont la perche occupera le centre : ces trois poteaux foutiendront la perche au moyen des cordons de foie qni paflent de cette perche aux trois poteaux. Après cela, placez à la hauteur de fix ou fept pieds, deux timbres à côté de la perche ; mais de façon que l’un de ces timbres communique avec la perche, & l’autre avec la terre : entre ces timbres placez enfuite une boule de métal fufpendue par un cordon de foie ; de maniéré que cette boule fe trouve à la diïtance d’environ un pouce de chaque timbre dont un feul eil ifo-lé, parce qu’il n'a de communication qu’avec la fusdite perche : le tout étant ainfi arrangé, auffitôt que le tems fe difpofera à quelque orage & que quelque nuage fe trouvera au delTus de cette perche, fa pointe en attirant à elle le feu éleétrique de ce nuage, s’élec* trifera & en même tems les timbres fe feront entendre , & continueront de fonner auili long
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- long tems que la perche éledrique pompera la matière fulminante du nuage.
- Ce phénomène e(t parfaitement analogue à l’expérienqe que nous avons rapportée au Parag. 28. par laquelle un conducteur élec-trifé fait carillonner deux timbres dont, l'un n’a de communication qu’avec le conducteur. Ici la perche ifolée & furmontée d’une, pointe de fer tient la place du condudeur&n’en différé, que parce qu’elle eil éledrifée par le feu que lui fourniifent les nuages, au lieu que le condudeur eft éledrifé par le frottement d’un globe de verre. Au furplus il eft très important d’obferver, que les effets que peut produite une perche éledrifée, different beaucoup par leur intenfité de ceux que nous préfente un fimple condudeur d’une machine éledrique. La perche éledrique, telle <jue peut être celle dont nous venons de donner la defcription, fait en grand ce qu’un condudeur ordinaire ne peut faire qu’en petit ; il l’on s’approchoit d’une pareille, perche, lorsqu’elle fe trouve éledrifée par l’orage, l’étincelle quelle lanceroit, pourroit être fi forte qu’on courroit le même rifque que fi l’on étoit touché par un coup de foudre ; car ce ne feroit pas feulement tout le feu éledrique contenu dans la perche, qui s'élance-roit fur la perfonne qui s’en approeheroit de trop près ; mais encore tout celui que cette perche attire dans ce moment là; parce que dans ce cas, la rapidité de ce fluide feroit telle qu’il arriveroit au même inftant que l’étincelle partiroit de la perche*
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- Si l’on veut tirer des étincelles de cette perche éledrique fans aucun danger, il faut lui préfenter une baguette de métal à la quelle on aura adapté un manche de verre ; on fera encore très fagement d’attacher à cette baguette un fil de fer qui aboutifle jus-r qu'à terre; en ufant de ces précautions on ne court aucun danger ; parce que dans ce cas -, le feu éledrique paflera de la baguette au fil de fer, & ira enfuite fe perdre dans le fein de la terre.
- Il fuit de là , qu’une perche éledrique élevée de la maniéré dont on vient de le dire, nous avertit toujours exadement de l’o* rage qui s’avance au delfus de nous; car alors les timbres ne manquent jamais de fe faire entendre. Nous fommes de même inftruits du moment auquel le danger de l’orage celle; parce q «'alors ilseeflent- aufli à Imitant même de tonner.
- On peut aufli indépendamment des timbres, bbferver pendant la nuit l’éledricité des nuages qui partent au zénith de la perche; car alors on apperçoit un bouquet de feu à l’extrémité de la pointe : ce phénomène n’a lieu que parce que la colonne de feu éledrique qui part du nuage, doit néceflairement converger & fe condenfer pour aborder la pointe aigue qui l’attire avec force.
- Au relie, quoique l’objet de ces fortes de perches ne foitpas de garantir de la foudre les lieux où l’on les place, cependant on peut aufli les faire fervir à cet ufage ; il ne s'agit pour- cela que d'établir au moyeu d'uq
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- d’un gros fil de fer, une communication entre la perche & l’eau d’un ruifieau ou d'un puits; il fuffiroit même que le gros fil de 1er attaché a la perche defcendit à un ou deux pieds dans le feirt de la terre. C’etl ainfi qu’on peut avoir à fon choix, ou une perche de garantie contre les effets funeftes de la foudre, ou une perche qui dès qu’on l’ifo-iera en ôtant toute communication, fera propre à nous donner les mêmes phénomènes que nous donne un condudeur éledrifé au moyen de la machine éledrique. Mr. d'ingen-houfz médecin de LL. MM. Imp. & Rov. éléva il y a quelques années près de Vienne, une perche femblable fervant à ces deux ufa-ges : elle eft placée près du moulin à vent de Benzing village fitué à un coup de fufil du château de Schônbrunn,
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- On a été pendant quelque tems dans l'opinion que les nuages orageux étoient communément éledrifés en-plus ; mais l'expérience nous a enfuite détrompé à cet égard; car on a reconnu depuis, que les nuages étoient le plus fouvent éledrifés en - moins ; d’où il fuit, que c’eft presque toujours la terre qui lance la foudre fur les nuages, & non les nuages qui la lancent fur la terre. Nous avons expliqué la maniéré dont on croyoit que les nuages qui fe formoient des eaux de la mer, s’éledrifoient en'plus. Mais il s’agit à préfent d'expliquer pourquoi les nuages orageux font le plus fouvent éledrifés
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- négativement ; voici ce que Mr. Franklin a penfé à ce fujet.
- D’abord il croit que les divers corps ont une plus giande quantité de feu éledlrique, ou une moindre, félon les circoqftances différentes où ils fe trouvent; c’eft à dire, le-> Ion que leur furface eft plus ou moins grande , ou plutôt, félon qu’ils font plus ou moins condenfés, ou plus ou moins raréfiés : Ainfi la même quantité de feu éledlrique qui eft propre à une goûte d’eau , pour quelle foit dans fon état naturel, ne lui fufftt plus quand cette même goûte d’eau raréfiée en vapeurs, fait portion d’un nuage ; car comme cette goûte d’eau dans ce nouvel état, eft alors extrêmement dilatée, & quelle a par-conféquent beaucoup plus de volume & de furface, elle exige aufli une bien plus grande quantité de feu électrique, pour quelle en ait toute la quantité naturelle qui lui convient dans fon état de vapeurs,
- C’eft en partant de cette hypothefe, ou plutôt de ce principe, que Mr. Franklin parvient à faire voir, pourquoi les nuages orageux font ordinairement éledtrifés en-moins.
- L’eau, dit Mr. Franklin , eft au fluide éledlrique ce que-l’éponge eft à l’eau. Quand on trempe une éponge dans l'eau, elle s’en imbibe proportionellement à la quantité & à la grandeur de fes pores; c’eft à dire, proportionellement à la furface de fes pores. Lorsque l'éponge eft comprimée, comme fes pores ont alors moins de furface, parce qu’ils font reiïerrés les uns contre les autres, elle ab-
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- abforbemoins d’eau; mais quand cette éponge eft dilatée, fon état naturel, eft alors de pouvoir en abforber davantage. 11 en eft du feu éleélrique comme de l’eau que l’éponge abforbe. Quand une portion d'eau eft dans fon état ordinaire de denfité, il y a auiïi une certaine quantité de feu éleétrique qui lui eft naturelle ; car dès qu’elle en reçoit davantage, elle celle dès lors d’être dans fon état naturel, puisqu’ alors elle devient électrique en-plus. Mais quand cette même portion d’eau eft raréfiée en vapeurs & forme un brouillard ou un nuage, dans ce cas, comme fon volume & fa furface font confi-• dérablement augmentés, ce nouvel état exige une plus grande portion de fluide éleétri-que, pour quelle en ait alors toute la quantité qui convient à toute fa furface : donc fl çette même portion d’eau n’avoit dans fon état de vapeurs, qu’autant de feu éleétrique qu’elle en avoit dans fon état primitif de condenfation, cette portion d’eau doit alors fe trouver dans un état négatif d’éleétricité ; puisque dans ce cas, elle en a une moindre quantité que celle qui convient à fon nouvel état de dilatation & de raréfadion. Voilà comment Mr. Franklin explique le. méchanis-me qui rend les eaux, éledriques en - moins, lors qu’elles s’élèvent en vapeurs pour aller former les nuages. Mais ce célébré phyfi-cien ne s’eft pas qontenté de nous donner fes conjedures fur ce fujet; il les a appuyé d’une expérience qui fait toucher au doigt, qu’un même corps qui fe trouve fucceflive-G 5 ment
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- mont avoir différons degrés de condenfatiou, on do dilatation, devient auili plus ou moins électrique, felou que lit furface dimmi nue ou augmente.
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- Placez fur le plancher un verre à pied (Fig.'23. PI. IV.) & fur ce verre une tafie de métal, dans laquelle vous mettrez quelques brades d’une chainette de cuivre. Attachez à une des extrémités de cette chainette un fil de foie qui s’élevant jusqu'au plafond, paffe fur une poulie & redefeende à vôtre main; de forte que’vous publiez à vôtre gré, élever la chaîne hors de la ta.Te & la laifler retomber dans ce vafe; après cela, fufpen-dez au plafond avec un fil de foie un petit flocon de coton, de maniéré qu’il touche le côté de la tafie. Tout étant ainfi difpofé, éleétriféz le gobelet, en lui fourniflant une étincelle du conducteur, ou en la lui donnant avec le crochet d’un renfort chargé ; & dans le même inftant le petit flocon de coton fera repoufie à plufieurs pouces de diftance: élevez enfuite lentement la chainette hors de la tafie, & vous obferverez qu’à mefure que vous l’éleverez, l’athmofphere éleélrique de la tafie dimminuera fenfiblement ; car le flo-eon de coton fe rapprochera de plus en plus de la talfe: ce premier phénomène prouve clairement que l’augmentation de furface qu’on procure à la chainette en la déployant, dimminue fenfiblement l'éleétricité de la tafie; puisque lè flocon s’en rapproche à mefure
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- qu'on éleve ccttc chaînette. Au refte cette diminution d’éledricité n'eit point occafion-née par quelque diihpation du fluide électrique : la tafle & la chaînette confervent tout ce qu’elles en ont reçu par l’étincelle; nous en donnerons la preuve dans un moment. Ainfi l’unique raifon qui occafionne la dimmi-nution de l’éledricité dans la tafle, eft que le fluide électrique s’étant répandu fur une plus grande furface, il doit moins y en avoir fur chaque point de cette furface augmentée, qu’il n'y en avoit avant le développement de la chaînette ; puisqu’ alors fa furface étoit beaucoup moindre,
- Voici une nouvelle preuve de ce qu’on vient de dire; après que le flocon fe fera rapproché de la tafle , faites y rentrer la chaînette , & vous obferverez qu'à mefure qu'elle y rentre, le flocon de coton s’éloignera davantage de cette tafle. Ce dernier phénomène fait encore voir fenfihlement que la tafle acquiert un excès d’éledricité à me--fure que la furface de la chaînette devient moins confidérable.
- Obfervez encore que la tafle & la chai-nette fe trouvent fi complettement éledrifées par l’étincelle qu’on leur communique, qu’il n’eft pas pofllble de leur en donner une fécondé: mais dès qu’on éleve la chai nette l’éledricité communiquée s’affoiblit telles ment, en fe répandant fur une plus grande furface, que la tafle fe retrouve de nouveau en état de recevoir une étincelle. Ce troi-fieme phénomène confirme parfaitement tout
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- ce qu'on vient de dire; puisqu’il prouve encore fort clairement que la taire & la chai-nette font plus électriques, lors quelles ont une moindre furface, quelles ne le font lorsque par le développement de la chainette, leur furface ell augmentée. C’efl; ainfi que dans une même expérience, Mr. Franklin a fait voir trois phénomènes qui démontrent également, qu’un même corps pourvu d’une certaine quantité de feu éledrique, ell plus ou moins éledrifé, félon que fa furface dimmi-nue ou augmente.
- L’expérience dont on vient de parler, réufllt encore mieux, fi au lieu d'une chainette, on fe fert d’une longue bande de papier doré qu’on roule autour d’un petit cilindre de bois.
- Mais quelque plaufible que foit l’hypo-rhefe de Mr. Franklin pour expliquer l'électricité négative des nuages, on lui oppofe cependant une difficulté à laquelle on n’a point encore répondu: C’eft Mr. Franklin lui même qui a formé cette difficulté contre fa propre hypothefe ; ce qui ne fait pas pioins l’éloge de fon caradere, que fes ouvrages font celui de fon efprit; puisqu’il préféré le progrès des fciences à la gloire qu'il pourroit tirer de l’invention-d’une hypothefe fi ingé-nieufe& fi plaufible, contre laquelle onn’au-roit peut-être jamais fait l’objedion quil propofe lui même.
- Si l’eau, dit il, étant réduite en vapeurs, fe trouve avoir une moindre éledricité que celle qui lui convient dans cet état de di-
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- dilatation,pourquoi ne tire-t-elle pasde la terre tout ce qu’il lui en manque, au moment que réduite en vapeurs elle quitte la furface de la terre : puisqu’alors elle en elt encore allez proche pour attirer ce fluide? voilà la difficulté que.ce phyficien oppofe à fon propre fyftcme, & qui jusqu'ici ell reliée fans réponfe. Cependant elle ne paroit pas allez grande pour faire rejetter l’hypothefe de Mr. Franklin ; car de ce quelle n’explique pas tout, il ne s’en fuit nullement quelle ne foit pas fondée. Quoiqu'il en foit, on explique du moins allés plaufiblement par l’expérience deMr. Franklin, comment un nuage s’éleétrife en-plus , lorsque par l’aétion des vents ou par quelqu’ autre caufe, il fe trouvera comprimé & condenfé de façon, qu’il ait moins de furface qu'il n’en âvoit : cette explication s’accorde avec l’expérience qu’on vient de rapporter pour expliquer l’éleélricité négatvve des nuages. Ceux qui ne cherchent dans cet ouvrage que des hypothefes fondées fur des expériences, feront bien de paf-fer le paragraphe fuivant.
- LXXXIII.
- On a dit plus haut, que Mr. Franklin. avoit d’abord penfé que l’éleélricité pojitive étoit communiquée aux nuages par les eaux de là mer, qui s’élevoient en vapeurs après avoir été éleélriféesen-p/us par le frottement de l’eâu contre les fels de la mer. Mais comme cette hypothefe contredit celle que nous
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- venons de rapporter, Mr. Franklin imâgiûâ cnfuite qu’on pourroit attribuer leledricité pofîtive des nuages au frottement des particules d'air contre les arbres, les montagnes & la furface de la terre; parce que ces molécules d'air, ainfi frottées, pourroient comme autant de globes de verre, raflembler le feü éledrique fur leur furface & le transmettre enfuite aux vapeurs qui fe trouvent dans l'air. Cette hypothefe eft ingénieufe ; mais bien loin d'être appuyée par l'expérience* elle paroit y être toute contraire ; puisque quelque peine qu’on ait pris pour agiter l’air de toute fagon, on n’a jamais pu éledrifer un corps par ce moyen. On n’a pas été plus heureux en agitant dans des vafes l’eau de mer * ou l’eau douce dans laquelle ôn avoit fait diffoudre des Tels de toute efpece.
- Mr. Franklin toujours inépuifable dans les reiTources que lui offre fon genie, imagi* na une troifieme hypothefe ; ce phyficien, après avoir obfervé par plusieurs expérien» ces, que. le fluide éledrique ne s’attachoit point à l’air pur, qui fait donc, conclut - il de là, s’il n’y a pas au deflus de nôtre ath-mofphere une région de feu éledrique, d’où dans de certaines circonftanees, quelques portions de ce feu s’abaiffent allez pour éledri-fer en-plus les nuages les plus élevés?, peut-être même, continue Mr. Franklin, les aurores boréales ne font-elles que des Courans de fluide éledrique dans cette région qui eft plus élevée que nôtre athmofphere. C’eft ainfi qu'à cet égard, nous en fommes encore
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- à des peut-être. Peut-être en faurons nous davantage avec le teins; car peut-être encore , le hazard nous apprendra-1-il, ce que la méditation & les expériences ne nous ont point encore découvert. Peut-être aufli, eft ce là un de ces fecrets de la nature qui farpaffent tous les eflorts de l’efprit humain. Mais quelqu incompréheniible que foit le méchanifme qui éledrife les nuages, foit en-plus , foit en - moins, le fait n’en eft pas pour cela moins certain, & eft fuffifant avec les principes de Mr. Franklin , pour expliquer d’une maniéré fatisfaifante le phénomène de la foudre , de même que l’efficacité d’une perche de garantie contre les terribles effets de ce météore.
- LXXXIV.
- La relation du fait que je vais rapporter , confirme encore on ne peut pas mieux, iéfficacité de ce préfervatif que nous devons à Mr-. Franklin. Cet événement eft tiré d’une lettre de Mr. Kinnersley qui fe trouve inférée dans les oeuvres de Mr. Franklin.
- .Un marchand de Philadelphie qui avoit élevé fur fa maifon une verge de métal pour la garantir delà foudre, ayant foUpçonné, que le feu du tonnerre étoit effectivement tombé fur cette verge pendant un orage qu’on éprouva dans cette v.lle en 1760,Mr. Kinnersley & le même marchand examinèrent l’état de la verge de métal après cet orage, & ils trouvèrent que le fil de laiton, que le marchand avoit fait placer fur le fommet de la
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- la verge, & qui avoit io pouces de hauteur lorsqu’on le plaça fur cette verge, étoit diminué de la longueur de deux pouces & demi, & que fa pointe qui étoit très fine, fe trouvoit alors émouflee. Outre cela , Mr. Kinnersley obferva que ce même fil de laiton étoit dans fa partie inférieure plus gros qu’il ne devoit l’être; d’où il étoit aifé de conclure , que la partie fupérieure ayant été fondue par le feu de la foudre, avoit coulé & formé plus bas une efpece de calote rabo-*eufe & irrégulière : Ce fut là le feul vellige de fon paffage que laiffa la foudre en tombant fur la maifon de ce marchand : c’efi que les autres corps qui fe trouvèrent fur fon paffage étoient fans doute d’afiez bons conducteurs pour ne lui point permettre de s’écarter, jusqu’à cequ’elle fût arrivée au fein de la terre où elle alla fe perdre»
- LXXXV.
- Perfonne ne doute certainement, que la foudre n’excite le feu dans les matières inflammables. Quant aux autres matières auxquelles le feü ne prend point, comme l'eau, il paroit que le fluide fulminant dégage les parties de feu que l’eau peut contenir, & que ces particules de feu dégagées agiflent enfuite avec tant de force, quelles échauffent l’eau au point de la réduire en vapeurs. C’ell à cette rédudion fubite de l’eau en vapeurs , qu’il faut attribuer les phénomènes finguliers de la foudre fur les arbres, les pier-, res, les murs &c. tout le monde eonnoit la force
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- extrême des vapeurs de l'eau ; lorsqu'on les chauffe dans un vafe bien fermé, rien n’eft capable de réfiller à leur effort impétueux; il n’eft donc pas étonnant que l’humidité renfermée dans le bois ou dans la pierre, brife & faffe éclater ces corps,, quand le feu de la foudre dilate tout à coup leur humidité, au point de la réduire en vapeurs.
- LXXXVI.
- Si après avoir chargé une Bouteille de Leyde de tout le feu éledrique dont elle eft fufceptible , (*) vous faites tomber cette charge d’éledricité fur un petit tube de verre , ( Fig. 24. PI. IV. ) auquel on a adapté deux fils de fer qui entrant dans l’intérieur du tube, ne fe trouvent qu’à la diftance d’une ou deux lignes l’un de l’autre, ce tube fou-tiendra très bien toute l’explofion de la bouteille de Leyde. Mais fi on avoit rempli d’eau ce même tube, dans ce cas, ilferabri-fé
- C*) On appelle Bouteille de Leyde, un vafe de verre qu'on a trouvé moyen de remplir d’une grande, quantité de feu éledrique, lequel on peut enfuiie lancer tout - à - la - fois au travers d’un autre corps ; fi l’on emploie dans ces fortes d’expériences des Bouteilles Je Leyde d’une grande capacité, l’explofion pourra être affez forte pour tuer un homme. C’eft ainfi qu’on efl parvenu à produire artificiellement des effets analogues , à ceux que produit la foudre. On donnera plus bas une explication plus détaillée de la Bouteille de Leyde.
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- fé en mille pièces qui fe difperferont dans toute la chambre, & l’on ne retrouvera aucune trace de l’eau qu’il contenoit , parce-qu’elle aura été réduite en vapeurs.
- Si au lieu de remplir d’eau ce même tube , on l’emplit d’encre, & qu’on pofe ce petit tube fur une feuille de papier blanc, l’explofion fubite & violente du feu électrique mettra de même en pièces le petit tube, & l’on ne découvrira pas la moindre tache d’encre fur le papier. Cette expérience qui eft du P. Beccaria nous fournit l’explication des plus violents effets de la foudre.
- On la voit fendre & partager de haut en bas les plus gros arbres ; quelquefois elle en arrache de groffes branches; fouVent elle hache ces branches & les réduit en bûchettes fort menues; c’eft que les canaux de la feve étant autant de petits tubes contenant un fluide aqueux, la foudre réduit fubitement ce fluide en vapeurs, & l’effort que font en même tems ces vapeurs pour fe dilater, eft fi impétueux qu’il fend l’arbre, le déchire, & le met en pièces.
- Il eft de même très-vraifemblable, que le dommage caufé par la foudre aux murs de pierres ou de briques, provient aufli de la fubite & violente dilatation de l’humidité qui fe trouve dans la pierre ou dans le mur : Or une perche de garantie prévient tous ces fâcheux accidens.
- Maiscen’eft pas làlefeul avantage qu’une perche de garantie nous procure. Il y a des efprits , fur lesquels l’appréhenfion de la fou-
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- foudre fait une impreffion fi forte, qu’ils fe trouvent très malheureux, chaque fois qu’ils entendent gronder le moindre tonnerre: Des perches de garantie élevées fur les divers clochers d’une Ville , raflùreroient & tranquilliferoient beaucoup ces fortes de per-fonnes, qui dans un tems d’orage font je crois, les plus malheureufes créatures qui exigent fur la terre. Les angoifes que la peur leur fait ïouffrir, font ii exceflives, qu’on pourroit prefque dire que celui qui les en délivreroit,. leur rendroit un plus grand fervice, que celui qui les garantiroit de la foudre en les laifiant en proie aux terreurs & aux détrefles: d’où il faut conclure, que les perches de ga-garantie contribuent encore plus au bonheur du genre humain, en le tranquillifant, qu’en le garantilfant de la foudre, laquelle pour le dire en partant, devroit nous donner moins de frayeur que le danger de l’apoplexie, de la fievre chaude, & de cent autres accidens journaliers, qui font périr beaucoup plus de perfonnes que la foudre.
- On a fait une obfervation eiïentielle touchant la vertu des pointes, c’eft quelles font d’autant plus efficaces pour pommer le feu éledrique, que leur extrémité eft plus Taillante, c’eft à dire, quelle eft plus diftante des autres corps terreftres. Ainli une perche de garantie peu élevée aura bien quelque utilité; mais il pourroit bien arriver , quelle ne garantît pas pleinement les bâtimens fur H a lef-
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- lefquels elle feroit placée. Si vous voulez vous convaincre de la réalité de cette obfer-vation, préfentez la pointe d’une aiguille à un conducteur qu’on éleCtrife, & vous remarquerez que moins la pointe débordera le pouce & le doigt qui la tiennent, moins elle fera propre à attirer le feu du conducteur. Si vous la faites faillir d’un pouce, elle tirera le feu du conducteur avec aflez de for-i ce ; mais fi elle eft encore plus faillante fans être plus près, elle l’attirera fi fortement qu’il ne vous fera pas poffible de tirer la moindre étincelle du conducteur ; aucontrair re, fi vous retirez cette aiguille entre les doigts, de façon que fa pointe ne les déborde pas, fa vertu attractive fe trouvera réduite à rien.
- Lxxxvm.
- Si l'on a fufpendu à un conducteur qu’on éleCtrife, plufieurs brins de coton pendant les uns aux autres, (Fig. 25. PI. V. ) dès qu’on préfente le bout du doigt au flocon inférieur, on apperçoit que tous ces flocons s’allongent pour s’approcher du doigt. Ceft ainfi que les corps terreftres forcent les nuages orageux de s’abaifler & de s’approcher plus près de la terre, & par là ils arrivent enfin à la diftance requife pour lancer l’étincelle foudroyante.
- Mais fi au lieu du doigt, on préfente aux brins de coton la pointe d’une aiguille faillante, ces brins de coton s’éloigneront de cette pointe & fe rapprocheront du conducteur,
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- teur ; parce que la pointe de l’aiguille ayant pompé dans un moment la plus grande partie de leur feu électrique, ils cefient d’être attirés par la pointe, & remontent vers le conducteur, parce que la forceattradive qui les en avoit éloigné, n’a plus lieu.
- Ce qui arrive dans cette occaffion aux flocons de coton auxquels on préfente la pointe d’une aiguille, arrive de même aux nuages éleétrifés , quand on a élevé une perche le garantie bien pointue & bien Taillante ; car elle attire en peu de tems une fi grande quantité de feu éleétrique des nuages, que ceux-ci déchargés de l’excès de leur feu, bien loin de continuer de s’abaifTer, s’élèvent de nouveau; parce que dans ce cas, la force attractive de la terre ne peut plus avoir lieu: d’où il réfulte que l’élancement de la foudre n’eft plus à craindre, tant parce que ces images ne font plus à la diltance convenable pour produire cet effet, que parce qu'ils font déjà privés de l’excès de leur feu électrique,
- LXXXIX.
- Obfervez qu’il peut arriver & même qu’il arrive allez fouvent que la foudre éclate , avant même que les nuages orageux éle-Ctrifés, foit en-plus, fait en-moins, fe trouvent à la ditlance convenable pour lancer leur matière fulminante immédiatement fut la terre, ou pour que la terre la lance immédiatement fur les nuages négatifs. Voici la raifon de ce phénomène, qui paroit da-H 3 bord
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- bord contredire les principes que nous avons établis.
- De petits lambeaux de nuage fufpendus en l’air entre le nuage orageux principal & la terre, fervent dans ce cas de conducteurs intermédiaires à la foudre, laquelle s'avançant de l’un à l’autre, parvient enfin par leur moyen à la diftance requife pour frapper les corps terrellres. Nous ferons voir plus bas que la Bouteille deLeyde nousdonne un phénomène très analogue à celui là ; puisqu’on peut la décharger complettement, lors même que la communication qu'on établit entre fes furfaces , eft formée par une fuite de corps qui ne fe touchent pas les uns les autres; c’eft que dans ce cas, le feu éledrique s’élance d’un corps à l’autre en franchi (Tant l'intervalle qui eft entr eux.
- Mais lorfqu’on a élevé une perche de garantie, le danger n’eft plus le même ; puif-que fa pointe aiguë & faillante attire bientôt tout le feu éledrique dont les fusdits lambeaux de nuage font furchargés : d’où il arrive qu’ils font eux-mêmes enfuite attirés par le principal nuage orageux , & qu’en s’éloignant ainfi de la terre, ils laiflent un aflez grand efpace entr’ eux & les corps terrellres, pour que ceux-ci ne foient plus à la portée du choc froudroyant.
- La même chofe doit arriver fi le nuage orageux eft négatif & la terre dans un état d’éledricité pofitive : car alors la pointe d’une perche de garantie lancera bien vite le feu éledrique terreftre fur les petits nuages inter-
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- médiaires; enforte que ceux-ci s’éledrifant par là en-plus, feront auflitôt attirés par la mafie du principal nuage négatif, auquel ils fe réuniront, & lai fieront par conféquent de même un afiez vatle intervalle entre la terre & le grand nuage, pour que la foudre ne puifie plus avoir lieu.
- C’eft une propriété effentielle au fluide éledrique de fe répartir également dans les corps, ’ afih de fe mettre parfaitement en équilibre. Cependant on a déjà dit plufieursfois que la terre fe trouvoit fouvent dans un état négatif, c’eft à dire, quelle avoit fouvent une moindre portion de feu éledrique que celle qui lui convenoit dans fon état naturel. Ce phénomène n’ell pas rare en effet; c’eft qu’il eft des circonftances qui peuvent occa-fionner une inégalité de répartition de ce feu dans les différentes parties de nôtre globe terreftre; par exemple, lorfqu’un nuage bien chargé vient à paffer près de la terre, il repoufie & cliafie la quantité naturelle d’éledricité répandue fur la fuperricie des bâtimens, des arbres, des tours, de navires &c. & met par là ces corps réellement dans un état d’éledricité négative', d’où il arrive, que ces corps terreftes hâtent la chûte de la foudre, parce qu’ étant dans un état d’éledri-cité négative, ils attirent plus puiffammentles nuages & par conféquent la foudre. Dans ces circonftances , une perche de garantie eft également très - avantageufe j puisqu’étant H 4 alors
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- alors de même dans un état négatif, )'a pointe redouble de force pour épuifer l'électricité des nuages orageux.
- XCI.
- On a dit que l’éledricité des nuages étoit tantôt politive & tantôt négative. Pour découvrir l’état de l’éledricité des nuages, il faut avoir une de ces perches de garantie dont on a parlé: cette perche doit êtrebien ifolée, & garnie de timbres, comme on l’a dit plus haut. Pour lors, dès que les timbres commenceront à fe faire entendre, palfez un tube de verre frotté près du timbre attaché à b perche de garantie : fi le nuage eft négatif, la fonnerie s’arrêtera ; parce que le tube frotté fournira au timbre le feu éledri-que qui lui manque dans cette occafion. Mais fi l’éledricité du nuage & par conféquent celle de b perche fe trouvoit pojitive, dans ce cas, b fonnerie continuera & même redoublera de vivacité. L’expérience fuivante indiquera aufli l’état de l’éledricité des nuages.
- XCII.
- Sufpendez une petite boute de liege à un fil de foie, de façon qu’elle foittout-près du bord du timbre communiquant à la perche de garantie ifolée ; & vous obferverez dès que l’orage éledrifera cette perche, foit en-plus, foit en moins, que les timbres fe feront entendre & que la boule de liege fera reposée & fe tiendra éloignée du timbre: •alors prenez un bouchon de verre de flacon
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- à tête ronde ; frottez cette tête pour l’éle* drifer , & enfuite préfentez la à la boule de liege; fi léledricité du nuage eft pofitive, la boule de liege fera repouffée du bouchon aufli bien que du .timbre ; mais fi e]le eft négative, la petite boule de liege volera vers le bouchon. Ces phénomènes n’ont pas be-foin d’explication , puisqu’ils font les confé-quences immédiates des principes qu’on a établis.
- Après que nous aurons expliqué la Bouteille de Leyde, nous donnerons une troifieme méthode très propre à faire connoitre l’état d’éledricité des nuages; cette derniere façon eft préférable aux deux premières, parce qu’elle garantit du danger de recevoir le choc d’une étincelle, qui pourroit faire une trop forte & très - douloureufe impreflion.
- XCIII.
- Tout ce qu’on a dit jufqu’ici eft certainement bien fuffifant pour démontrer l’utilité des perches de garantie: il eft donc bien étonnant, que nos villes fe trouvent encore privées d’un fecours aufli efficace , rant pour prévenir les effets funeftes de la foudre, que pour tranquillifer un grand nombre de citoyens que chaque orage fait pâlir d effroi. Rien certainement ne feroit plus à propos que d’élever de ces fortes de perches fur chaque clocher; il faudroit fur-tout en placer fur les magafins & les moulins à poudre. Ce qu’il en couteroit pour cela eft trop peu de chofe pour que cette dépenfe puiffe balancer H s les
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- les avantages qu’elle jnous procureroit. Si ce petit ouvrage efl: affez heureux pour mériter quelque attention à cet égard, je ne doute pas, que nos villes ne le trouvent bientôt pourvues de ces falutaires perches; parce que je fuis perfuadé, que plus on examinera ce point interreflant de la phyfique, plus on le convaincra de l'avantage qui doit réfulter de l’éxécution de ce que je propofe. (*) En attendant, pour etre moins expofé aux effets de la foudre, on ferâ bien pendant les orages d éviter de fe mettre près d’un miroir & de toute dorure de cadre, de lambris ou de meubles. La place la plus fure eft au milieu de la chambre ; pourvu que ce ne foit pas fous un luftre foutenu par une chaine ou une baguette de fer. Il y aura encore plus de fureté des'affeoir fur une chaife placée fur plu-
- (*) J’ai élevé il y a deux ans une femblable perche de garantie fur lechateau de Holiefchau en Moravie ; elle eft formée d’un arbre de fapin furmonté d’un barre de fer de trois à quatre pieds de longueur ; 8t cette barre eft terminée par une pointe de laiton fi rt aiguë. La hauteur de toute la perche eft de 40. pieds ; elle eft placée fur la tour de l’horloge du chateau La partie de cette perche qui eft de bois, eft recouverte en entier de feuilles de fer blanc foudées les unes aux autres. Le bas de cette perche eft garni d’un cercle de fer auquel eft accrochée une chaine femblable à celles dont on fe fert dans l’arpentage : Cette chaine défcend le long de la charpente intérieure & enfuite extérieurement le long d’un mur, d'oit elle va aboutir à un grand puits qui Jl’eft qu’ à deux pas du mur dans le coin de la cour.
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- plufieurs matelas ou lits de plume au milieu de la chambre ; car comme le crin & la plume ne font rien moins que de bons conducteurs , le feu de la foudre qui tomberoit fur quelqu'autre endroit de l’appartement, ne quittera ni le mur ni le plancher, ni aucun autre corps, pour pafTer aux matelas ou aux lits de plumes. Mais la fituation la plus avantageufe feroit de fe coucher dans un hamac ou lit branlant à la façon desAmcriquains; on fufpend ces fortes de lits avec des cordons de foie à égale diftance des quatre murs de la chambre.
- XCIV.
- On croit allez généralement qu’il eft bon de fermer les fenêtres pendant l’orage : cependant ce ne fera jamais par la fenêtre que la foudre entrera dans une maifon, à moins que les portes & les fenêtres ne foient dif-pofées de façon qu’il y ait un courant d’air libre; & même dans ce cas, il n’eft pas vrai-femblable que la foudre fuive ce courant: La raifon en eft que la foudre eft attirée parles corps qui peuvent lui fervir de conducteurs : Or l’air n’eft point de ce genre, donc la foudre fe portera moins fur l’ouverture d’une fenêtre que fur les corps mêmes; & parmi ces corps, elle s’attachera préférablement à ceux qui font de meilleurs conducteurs, tels que font les métaux & l’eau. C’eft par cette raifon que Mr. Franklin penfe que les édifices qui ont leurs toits couverts de cuivre ou de plomb avec des goutieres de
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- de métal prolongées jufqu’à terre, 11e font jamais endommagés par la foudre; parce que lorsqu’elle tombe fur ces toits, elle paiTe dans les métaux fans s’en écarter : d’où il arrive que le relie de l’édifice refie intaél.
- xcv.
- On a coutume pendant les orages de fonner les cloches de nos temples ; mais l’Eglife en prefcrivant la bénédiélion des cloches pour nous garantir des effets des orages, permetauiïi à la prudence humaine le choix des momens où il convient d’ufer de ce préfer-vatif, qu’elle nous accorde: or il paroitpar beaucoup d’expériences qu'il n’ell point à propos de fonner les cloches quand l'orage ell précifément au deffus du clocher. Voici ce qu’on trouve à ce fujet dans l’hiftoire de l’académie des fciences de Paris à l’année 1719. Il y ell dit, que *Mr. Des Landes fit favoir à l’académie, que la nuit du 14. au 15-. d'avril 1718. la foudre étoit tombée fur 24. églifes depuis Landernau jufqu’à St. P61 - de - Leon en Bretagne; que ces églifes étoient précifément celles où l’on fonnoit les cloches ; & que la foudre avoit épargné celles où l’on ne fonnoit pas ; fi ce fait, que je ne puis garantir que fur l’authorité que j’ai citée, ell réel, il pa-roit que dans le cas où l’orage ell tout - à - fait perpendiculaire, ce n’ell pas l’intention de l’Eglife qu’on ufe dans ce moment là du pré-fervatif fpirituel, qui confidéré comme caufe phyfique & félon les loix delà nature, pro-vo-
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- voqueroit dans cette circonftance le malheur dont on voudroit fe garantir.
- Quant à la raifon pour laquelle dans certains cas le mouvement des cloches peut attirer la foudre fur le clocher même, voici celle qu’on en donne: Le mouvement des cloches agite & ébranle l’air environnant, &de cette agitation, il doit en réfulter un courant d’air qui vient remplacer celui qui ell fucceffivement écarté par le mouvement des cloches: or un pareil courant d’air offre à la foudre un pafiage tout frayé & d’autant plus aifé, que ce courant, en le précipitant lui même fur le clocher, oppofe moins de réûftance à la foudré : ainfi il eft tout naturel que le feu du tonnerre fuive la direction de ce courant d’air.
- C’efl par la même raifon, que lorsqu’on eft furpris en campagne par un orage vertical , il faut bien fe garder de courir pour fe mettre à l’abri ; parce que par là on donne lieu à un courant d’air qui vient remplacer celui qu’on a écarté par la courfe. On fait que les feux folets courent après ceux qui les fuient; c’efl; que celui qui court, laifle derrière lui une forte de vuide, fur lequell’air le plus voifin fe jette dans Tintant, & occaf-fionne par là un courant d’air qui entraine le feu folet; enforte qu’il paroit courir après la perfonne qui fe fauve pour l’éviter.
- Enfin il ell; auffi très-dangereux de fe mettre à l’abri fous un grand arbre agité par le vent pendant l’orage ; parce que l’agitation des branches occalionnée par le vent, don-
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- donne lieu à un courant d’air propre à déterminer la direction de la foudre fur l’arbre même.
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- Les navigateurs parlent beaucoup du feü St.Elme. On appelle ainfi de petites flammes que l'on voit fur mer dans les tems d’orage aux pavillons, aux mats & à toutes les par* ties Taillantes du vaiffeau. Cefl; le même feu que les anciens nommoient Caftor & Pollux. On fait actuellement que ce feu n’eil autre chofe que le feu électrique attiré très - fortement dans un tems d’orage par les vergues, les mats & les pavillons du navire, lorsque ce fluide abonde dans les nuages ; car ces flammes ne paroiflent jamais que dans un tems d’orage. Il arrive aufii fort fouvent qu’on entend pétiller ces feux, & faire des éclats comme des pétards; & c’eft là une marque d’une furabondance extrême de feu électrique dans les nuages, d’où les pointes du navire le tirent avec la plus grande force ; & il elt bien vraifemblable que fans ces pointes qui abforbent fuccefllvement le feu des nuages, il éclateroit tout-à-la-fois fur le vaifleau par un violent coup de foudre.
- Mais ce n’eft pas feulement fur mer que l’on voit paroitre de petites flammes à l’extrémité des corps pointus élevés dans l’air. L’hifloire ancienne nous fournit plufieurs exemples de feux qu’on a vus pendant les orages à l’extrémité des lances ou des piques des légions Romaines. Séné que & Jules-
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- Ïes-Cefar en font mention. L’hilloire moderne rapporte auiïi plufieurs phénomènes de ce genre : Mais le plus remarquable de tous, eft celui qu’on obferve à Plauzet en Auvergne, depuis un tems immémorial. Dans les grandes tempêtes accompagnées de nuages noirs & d’éclairs fréquens, les trois pointes de la croix du clocher paroiflent environnées de flammes, & les habitans du lieu aiïûrent, que quand on apperçoit ce phénomène, la tempête n'eft plus à craindre. Il eft à croire, que fi cette croix communi-quoit par de bons conducteurs à quelque ruiffeau, le danger de là foudre feroit encore bien moins à craindre. Enfin il n’eft pas rare de voir une petite flamme ou lumière fur la tête des enfans & quelquefois fur la tête des adultes. On en obferve aufli de pareilles fur la crinière des chevaux, lorsqu’on les étrille. Cette efpece de feux folets eft de même facilement excitée chez certaines perfonnes quand on frotte leur cheveux. Le même phénomène s’apperçoit encore fur les chats, qui s’éleétrifent lorsqu’on pafle la main fur leur poil. Les anciens regardoiënt comme un feu facré les petites flammes qui pa-roiflent fur la tête des enfans & en tiroienf d’heureux préfages.
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- DE LÀ BOUTEILLE DE LEYDE OU RENFORT.
- XCVII.
- La Bouteille de Leyde elt une bouteille ou un autre vafe de verre, (Fig. 26.) dont les deux iurfaces font armées, c’ell à dire couvertes d’un corps transmettant. On arme la furface extérieure d’une bouteille, en y appliquant des feuilles d’or battu ou d’étain: mais il faut avoir foin de lailfer tout au tour de la partie fupérieure de cette fur-face , une marge de quelques pouces qui ne foit point recouverte de feuilles métalliques.
- Quant à la furface intérieure du vafe, on peut l’armer de différentes façons : les uns l’empliffent d’eau commune jusqu’ à la hauteur de la feuille métallique extérieure; d’autres l’empliffent de limailles de fer .-Mais le meilleur fera d’appliquer fur la furface intérieure, comme fur l’extérieure, des feuilles d’or battu ou d’étain, en laiffant de même, tout au tour du bord intérieur , une marge de quelques pouces fans aucune armure: mais il faut avoir l’attention de faire en forte, que les deux armures foient de même hauteur & que l’une n’éxcede pas l’autre. Il faut encore obferver de ne point laiffer de bavures ou de franges à ces armures ; parce-que ce feroit leur laiffer des efpeces de poin-
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- de Leyde ou Renfort. 129
- tes par lesquelles le feu électrique s’échap-peroit facilement.
- Pour completter une Bouteille de Leyde , il faut mettre au fond du vafe une chai-nette , dont une extrémité foit accrochée au condudeur lorsqu'on voudra charger, c’efi: à dire éleCtrifer cette Bouteille de Levde, à laquelle on donne auiîi le nom de Renfort (Fig. 26. A. PI. IV.)
- Il y a encore une autre efpece de Renforts très commodes , & même qui font né-ceffaires pour certaines expériences: cc font des bouteilles de verre blanc & peu épais ( Fig. 26. B. ) : on garnit leur furface , tant l’intérieure que l’extérieure, de feuilles de métal, comme on l’a déjà dit : après cela, il faut adapter à l’orifice du col de la bouteille un bouchon de liege : un gros fil de laiton traverfe ce bouchon, & porte à une de fes extrémités une chainette qui défcend jusqu’ au fond de la bouteille; l’autre extrémité de ce fil de laiton paffe en dehors & etl recourbé en forme de crochet ou d’anneau , ou garni d’un bouton métallique.
- Enfin on donne aufii le nom de Renfort à un carreau de verre, (Fig. 27.) dont on a armé les deux furfaces avec des feuilles de métal, en laiffant tout-au-tour des deux armures une marge de quelques pouces fans la garnir de feuilles métalliques. Obfervez que pour bien armer ces carreaux, de même que les autres Renforts, il faut que les feuilles métalliques foient exactement appliquées fur le verre, de façon qu’on n’v ap-I per-
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- perçoive ni plis, ni rides, ni billes d’air; 011 a coutume de fe fervir d’eau gommée pour coller ces feuilles de métal fur le verre.
- Quand il eft queltion de charger la Bouteille de Leyde ou Renfort, on la pofe fur la table, de maniéré que fon crochet touche le conduéteur; ou fi l’on veut, on prendra ce Renfort à la main en le faififiant par l'armure extérieure, & on appliquera fon crochet au conduéteur ; car tout le feu éleétri-que qui fera communiqué à ce dernier, paf-fera fuccefiivement dans l’intérieur du Renfort, jusqu’à ce qu’il en ait abforbé toute la quantité dont il eft fufceptible.
- La maniéré de charger un carreau de verre eft toute aufii fimple ; Il ne s’agit que de le mettre fur la table & de faire enforte que le conduéteur, au moyen d’une chai-nette communique avec la furface fupérieure du carreau de verre.
- xcvni.
- Le Renfort a différentes propriétés.
- i°* Il peut recevoir une bien plus grande quantité de feu éleétrique que tout autre corps quelconque ;& quand ce feu y a été ralfemblé, il peut produire de très-vio* lens effets.
- 2°- Un Renfort conferve & retient fort long-tems le feu éleétrique qui a été communiqué à fa furface intérieure, fur-tout quand on le pofe fur un corps ifolant après avoir été chargé.
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- 30. On ne peut décharger en même tems Un Renfort, c’eft à dire, enlever en un in-ftant tout l'excès du feu éleétrique qui a été transmis à fa furface intérieure , qu'en établif-fant une communication entre la furface intérieure & l’extérieure; & pour-lors il fe fait une violente explofion à laquelle on donne le nom de coup foudroyant, de commotion ou de choc éleElrique.
- 40. Quand on a chargé en-plus la furface intérieure d’un Renfort , il arrive toujours que fa furface extérieure fe trouve alors élec-trifée en-moins; & cela à proportion de la quantité de feu éleétrique que la furiàce intérieure a reçu du conduéteur: enforte que fi cette derniere furface a reçu quatre fois plus de feu éleétrique qu’elle n'en avoit dans fon état naturel, la furface extérieure dans ce cas fe trouve avoir quatre fois moins de feu éleétrique quelle n’en polTédoit avant qu’on éleéltifàt le Renfort.
- 50- On peut à fon choix éleétrifem-plus la furface intérieure du Renfort ou fon extérieure ; & quand on éleétrife cette derniere» alors c’eft la furface intérieure qui pafle à une éleétricité négative • car elle perd autant de fon feu éleétrique naturel què la furface extérieure en reçoit au de-là de ce qui lui eft propre dans fon état ordinaire.
- 6°- On ne peut jamais charger un Renfort lorsqu'il eft ifolé; d’où il fuit que pour charger un Renfort, il faut que la furface oppofée à celle qu’on éleétrife, communique avec le plancher.
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- 70. Si l’on place un Renfort fur un corps ifolant, (Fig. 28. )tel qu’eftungateau de réline , de maniéré que fon crochet ne foit qua quelques lignes de dillance du condudeur, dès qu’on éledrifera ce dernier, le crochet du Renfort recevra une étincelle du conducteur , & l’on en recevra une autre fur le doigt qu’on préfentera en même tems à fon armure extérieure à la dillance de quelques lignes.
- 8°- Quand un Renfort a été chargé, & qu’on le pofe enfuite fur un corps ifolant, dans ce cas, fi l’on touche alternativement le crochet & fon armure extérieure, l’un & l’autre donneront aufli alternativement des étincelles.
- Telles font les principales propriétés du Renfort: On les verra dans un plus grand jour par les expériences que nous rapporterons.
- XCXIX.
- Pour charger un Renfort, il n’ell pas ab-folument néceflaire qu’il y ait une communication établie entre fon crochet & le condudeur: la dillance de l’un à l’autre fût-elle d’un pied & même encore pius grande, ( Fig. 29. A. ) le Renfort s’eledrifera très -bien, fi le condudeur efl terminé en pointe aiguë : mais il faut obferver que le crochet du Renfort doit être vis - à - vis de la pointe du condudeur.
- On parviendra de même à charger le Renfort, fi au lieu d’un condudeur pointu,
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- •n einployoit un Renfort dont l’extrémité du gros fil de laiton ne fût point formée en crochet, mais en une pointe aiguë & inclinée vers le condudeur. (Fig. 29. B.) Dans le premier cas, le condudeur pouffe & lance le feu éledrique fur le crochet du Renfort; dans le fécond cas , la pointe du Renfort attire avec force le feu éledrique ,du condudeur. Ce qu’on a dit plus haut fur la vertu des pointes, fuffit pour l’explication de ce phénomène.
- C.
- On doit la découverte de la bouteille de Leyde à Mr. Cuneus citoyen de Leyde ; jl la fit par hazard en 1746, un jour qu’il répétoit quelques expériences qu’il avoit faites avec Mr. JWufchenbroeck , Profefieur de phyfique de la même ville. Mr. Cnneus ayant communiqué à ce célébré Profefieur la découverte qu’il venoit de faire, ce dernier répéta plusieurs fois la même expérience , & fut le premier qui la fit connôitre par une lettre qu’il écrivit à Mr. de Réaumrr, membre de l’académie des fciences de Paris. Voici comment Mr. Cuneus fit cette découverte fans y penfer. (Fig. 30. PI. IV. )
- Il s'étoit propofé d’éledrifer l'eau d’une bouteille ; dans cette vue, après avoir empli à moitié cette bouteille d’une eau commune, il là prit d’une main en l’empoignant par le bas, de façon que fa mâin étoit appliquée à la partie du verre qui répondoit à celle où fe trouvoit l’eau contenue dans
- I. 3 cet-
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- cette bouteille: Mr. Crneus fit enfuite entrer dans la bouteille un fil de métal qu'il avoit accroché au condudeur, ayant l'attention que ce fil de métal trempât dans l’eau. Tout étant ainfi arrangé, il fit éledtrifer le conducteur afin d’éledrifer l’eâu de la bouteille, n’ayant certainement aucun foupçon du coup foudroyant dont il âlloit être frappé : en effet, il n’eut pas plutôt porté la main au gros fil de métal dont une partie trempoit dans l’eau de fa bouteille , qu’il en partit une vive étincelle accompagnée d’une fubite & fi forte explofion, qu’il fe fentit frappé violemment dans les poignets, les coudes, les épaules & même dans la poitrine; & c’eft cette fubite & violente fecouffe qu’on nomme le coup foudroyant ou commotion élec*
- CI.
- La nouvelle d’une découverte fi extraordinaire s’étant répandue dans le monde fa-vant, les phyficiens de chaque pays s'em-preflërent de la répéter ; elle excita même la eüriofité du peuple. L'empreflement que tout le monde témoignoit de faire ou de voir cette finguliere expérience , frit fans égal; tant on avoit peine à croire tout le merveilleux qu'on en racontoit. L’expérience de Leyde étoit le fujet des conventions à la ville & à la eour ; enfin les chofes .allèrent au point, que l’éledricité, qui jus--ques-là avoit été renfermée dans les cabinets des phyficiens , fe donna en fpedacle
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- pour de l’argent ; des gens avec des machines à éledricité s’établirent dans les foires, & coururent les villes & les provinces pour fatisfaire l'envie que l'on avoit par tout de voir cette célébré expérience.
- Cependant les phyficiens redoubloient de foin pour tâcher de découvrir la caufe phyfique de ce phénomène ; mais fi leurs recherches furent alors infrudueufes poür le but qu’ils fe propofoient, elles ne laifferent pas toutefois que de fervir à étendre les connoiflances relatives à cette fàmeufe bouteille ; puisqu’ils y découvrirent d’autres propriétés , qui pour être moins frappantes que la commotion éledrique, n'en font pas moins fingulieres ik dignes de notre atten-
- CII.
- La Bouteille de Leyde ou Renfort n'eft fufceptible que d’une certaine quantité de feu éledrique, & quand on lui a une fois fourni cette quantité, on ferait des efforts inutiles en elfayant de lui en communiquer une plus grande portion. Cependant on peut augmenter à volonté la force & la violence du coup foudroyant: il ne s’agit pour cela que d'employer de plus grands. Renforts ou d’en augmenter le nombre. Si l’on en emploie plufieurs , il faut que le conducteur ait une communication avec chaque furface intérieure de ces Renforts ; & toutes les extérieures doivent communiquer enfemble : on peut établir cette derniere communication
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- 136 De la Bouteille
- •avec une chaînette arrangée de façon qu’elle touche à l’armure extérieure de chaque Renfort.
- cm.
- Si l’on employait aflfez de Renforts ou d’afiez grands, pour que la totalité de leur furface intérieure fût équivalente à 40 ou 50 pieds quarrés, l’explofion de ces; Renforts, ou .fi l’on veut le coup foudroyant qu’ils donneraient en les déchargeant tous à la fois, ferôiPd-une telle violence qu'il pourroît tuer un homme fur le champ.
- On peut cependant fans aucun danger faire des expériences de cette force, pourvu qu’on foit très-attentif à lâ maniéré dont il faut décharger les Renforts. L’explofion ne peut avoir lieu qu’en faifant communiquer le crochet d’un de ces Renforts avec l’armure extérieure de ce même Renfort ou de quelqu’ autre : Or pour établir cette communication fans aucun danger, on fe fert d’une baguette de laiton (Fig. 31. Pl. V.) recourbée en demi - cercle, & dont il efl à propos de garnir chaque extrémité d'un bouton métallique. On commence par appliquer un des boutons de cette baguette à l'armure extérieure du'Renfort; puis on incline fon autre extrémité jusqu’à ce quelle touche ou le conducteur ou le crochet du Renfort : Mais il faut bien obferver qu’il n’y ait jamais qu’une feule main qui agifle ; car s’il arrivoit quon formât le cercle de la communication en touchant de l’autre main le conducteur ou le
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- le crochet du Renfort, celui qui auroit cette témérité feroit à coup-fiir foudroyé; parce que toute l’explofion fe feroit alors au travers de fon corps : C’eft que dans ce cas, tout le feu éleétrique raflemblé dans l’intérieur des Renforts, ne pourroit fe rendre à l’armure extérieure qu en paffant par le corps de celui qui feroit l’expérience de cette maniéré. Nous ne tarderons pas à faire voir par des expériences décifives, que rien n’eft plus réel & plus certain que ce paffagè du feu éleétrique d’une furfàce à 1 autre ail moment que fe fait l’explofion ; car c’eft un fait inconteflable, que lors qu’on charge un Renfort, il arrive toujours que la furfàce oppofée à celle qu’on éleéirife en-plus, s’é-leétrife en-moins dans là même proportion que l’autre a été éleétrifée en-plus-’, c’eft à dire, que l’une des furfaces perd autant de fon éleétricité naturelle que fautre en reçoit du conduéteur au de-là de celle qui lui convient dàns fon état ordinaire;
- C’eft encore un fait certain ,' que nous prouverons aufïi par des expériences, que dès qu’on donne lieu à l’explofion d’un Renfort par la communication qu’on établit entre les deux armures oppofées, l’équilibre fe rétablit aufiitôt dans l’une & l’autre furfa-ce du Renfort; la raifon en eft, que la fur-face éleétrifée en-plus lance alors avec impé-tuofité tout l'excès de fon feu éleétrique fur la furfàce oppofée, qui étoit privée d’une quantité de feu éleétrique précisément égale à celle de cet excès; Ainfi quand le corps
- T H’n.
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- d'une porfonne forme la communication entre les deux furfaces, l’excès du feu eleétri-que d’une furface ne peut fe rendre à l’autre qu’en traverfant le corps de celui qui forme cette communication : d’où il fuit, qu’on doitreflentir la- commotion électrique, chaque fois qu’011 touche d’une main au crochet, d’un Renfort chargé & de l’autre à fon armure extérieure. Ainfi pour éviter ce choc électrique , il faut toujours fe fervir d’une baguette recourbée avec laquelle on puifle toucher en même tems à l'armure extérieure &au crochet- du Renfort ; alors le feu électrique pafTera d’une furface à l’autre fans s’écarter de la baguette, parce qu’il prend toujours le chemin le plus court pour arriver à fon but.
- Ce n’eft pas feulement dans les expériences en grand , telle qu’ ell celle dont on vient de parler, qu’il faut fe fervir d’une baguette recourbée, & ufer de la précaution de n’employer jamais qu’une main, lorsqu’il s'agit d’établir une communication entre les furfaces des Renforts qui ont été chargés: il eft auflt très à propos d’en agir de même, lorsqu’il n’etl queftion, que de décharger un feul Renfort d'une grandeur médiocre; puisque l’explofion d'un tel Renfort ell toujours très - lenfible & fort déplaifante, fur-tout quand on a la poitrine foible ; car c’etl toujours dans les parties du corps mal conftituées & les plus foibles, qu’on reffent le plus vivement la commotion éleétrique.
- CIV.
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- PE ï-eyde ou Renfort, 139 CIV.
- Obfervez qu’afin d’éviter le choc éle* étriqué, il faut toujours fe fervir d’une baguette de métal pour établir la communication entre les deux furfaces d’un Renfort: c’eft que l’expérience a appris, que de tous les conducteurs propres à transmettre le feu électrique, le métal eft toujours le meilleur & le plus fur. Il n’en eft pas de meme de plufieurs autres fubftances, qui quoiqu’elles foient du nombre des corps transmeltdns, ne font cependant nullement propres à transmettre la charge d’un Renfort d’une furface à l’autre ; telles font par exemple, le bois, une cordé mouillée , & même un glaçon, quoique ces fubftances, dans toute autre oc-cafion, puiiTent très'bien transmettre le fluide électrique. La dorure d’un livre peut bien la première fois transmettre la charge d'un Renfort ; mais elle ne le fera pas une fécondé fois; c’eft que la continuité de l’or ayant été interrompue & fes parties défunies par la violence de la première explofion, le feu électrique ne peut palier la fécondé Ibis qu’en fau-tant au travers de l’air de l’une à l’autre parce!-le de la dorure; or cet air réfiftechaque fois au courant du feu électrique , & par cette réfiftance, l'affaiblit enfin allez pour empêcher l'explofion fimultanée, fubite & totale du feu électrique contenu dans l’intérieur du Renfort,
- CW
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- 140 De la&Bouteillk
- CV.
- Lorsque pour quelque expérience qui éxige une . .forte explofion , on emploie plufieurs Renforts à la fois, il faut, autant que pollible, choifir des Renforts de meme grandeur, & s’il fe peut , d’un verre de même qualité; autrement, il arrivera fouvent que les Renforts les, plus foibles fe calTeront eu voulant les charger tous complettement.
- On a aulïi remarqué que les verres, les plus minces étaient les meilleurs, non feulement pour fervir de Renfort, mais encore pour être employés à exciter l’éleélricité par le frottement : on en dira, la. raifon • ci: -après.
- On a dit plus haut, que le moyen dega-rantir le verre de l’humidité qui s'y attache aifément, étoit de le couvrir d’une couche de cire d’Efpagne, pour le rendre.parlàplus propre à fervir de corps, ifolant: on fera très-bien d’en ufer de même avec les Renforts, en couvrant, toute la fur face du verre qui n’eft point armée, tant l'intérieure que l’eXr térieure, d’une couche de cire à cachetter ; par là on coupe plus fûrement toute comrriu-nication d’une furface à l’autre; ce qui eft eflentiel 4 tout Renfort pour qu’il puilfe être chargé.
- Quand on a donné au Renfort toute la charge dont il eft fusceptible & qu’on continue de l’éleétrifer, dans ce cas il arrive affez fouvent que le Renfort fe décharge de lui même par une explofion auli violente quefu* bite, à alors le verre du Renfort fe brife & la
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- la matière éledrique pafle d’une furface à l’autre par le petit trou que la violence de l’explofion fait dans le verre: au relie le verre eil toujours percé dans l’endroit qui ell le plus mince ou le plus défedueux. Il faut mettre au nombre des défauts du verre les bules d’air & les grains de potafle ou de gravier qui s’y trouvent allez fouvent.
- On doit encore remarquer, que des Renforts qui avoient été chargés plufieurs fois complettement, fe font enfuite brifés lorfqu’ils 11’avoient pas encore la moitié de leur charge. Peut-être cela n'arrive-1-il que parce que quelque petit défaut qui fe trouve fur une des furfàces du verre , augmente chaque fois qu’on charge le Renfort, jusqu’à ce qu'enfui il foit tel, que le verre n’elt plus en état de s’oppofer à l'effort que fait le feu éledrique contre la furface du verre. Je-pafle aux expériences rélatives au Renfort.
- On a parlé ( Parag. XXVIII. ) d’un carillon éledrique mis en mouvement par un condudeur qu’on éledrife : on aura un phénomène tout femblable, fi après avoir chargé un Renfort, on le place fur une table , & qu’on établifie une communication entre fon crochet & le timbre ifolé du carillon ; ( Fig. 32. PI. V.) car à l’inllant même qu on établira cette communication, le jeu alternatif des timbres fe fera entendre, & ce jeu continuera pendant plus d’une demi-heure fi le Renfort ell bien chargé. U y a cette
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- 14a De la Bouteille
- différence entre cette expérience & celle qu’on a rapportée ( Parag. XXVIII. ) que celle qui le fait au moyen du feül conducteur , exige qu’on continue de l’électrifer aliffi long- tems qu'on veut que le jeu des timbres fe faffe entendre ; parce que les timbres abforbanc promptement tout le feu du conduéteur, il faut fans ceffe lui en fournir de l’autre pour entretenir le jeu des timbres. Mais quand cette expérience fe fait avec le Renfort, la grande quantité de feu éleétrique qui s’y trouve raffemblé, fuffit pour entretenir ce jeu. Un Renfort bien chargé & qui communique avec le conducteur, peut de même nous présenter le phénomène d’une découpure qui danfe & fautille entre deux plaques de métal.
- CVI.
- Ëmpliffez à moitié d’efprit de vin Une cuiller ou un petit vafe de métal; laites un peu chauffer cet efprit & placez le fur le conducteur qui communique avec un Renfort : (Fig. 33. ) electrifez le conducteur pour charger ce Renfort ; prenez à la main une chai-nette , dont une extrémité doit communiquer à l’armure extérieure du Renfort, & attachez à l’autre extrémité de cette chaînette une clef ou un gros fil de laiton garni d’un bouton de métal; puis préfentez ce bouton à l'efprit de vin au centre du vafe, & dès que vous ferez à quelques lignes de dillance de la liqueur, le coup foudroyont éclatera & allumera l’ef-prit
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- prit de vin : mais il faut avoir foin pour le fuccès de cette expérience, que la chaînette , la main & le gros fil de laiton ou la clef fe trouvent toujous aufli éloignés que poflible, des bords du vafe qui contient l’efprit de
- Si l’on tenoit la chainette dune main, & que de l’autre on portât l’anneau de la clef fur l’efprit de vin, fans avoir attaché la chai-nete à la clef, alors l’étincelle électrique & le coup foudroyant partiroient de même; mais la perfonne qui opéreroit de la forte , recevroit une très-forte commotion; parce que l’explofion fe feroit au travers de fon corps.
- On peut encore faire la même expérience de la maniéré fuivante ; fufpendez au conducteur un fil de laiton de quelques pouces de longueur & dont l’extremité foie garnie d’un bouton métallique: (Fig.34.Pi.V.) éle&rifez le conducteur au quel vous aurez adapté un Renfort; enfin préfentez l’efprit de vin à ce bouton, & l’étincelle qui en partira, mettra le feu à l’efprit du vin. Il faut dans cette expérience que l’armure extérieure du Renfort communique par une chainette à la cuiller ou petit vafe qui contient l’efprit de vin.
- cvm.
- Couchez une main de papier fur une petite piece de métal, qui au moyen d’un fil de fer communique à l'armure extérieure d’un R en-
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- 1^4 LA Bouteille
- Renfort de la capacité de huit à dix pots ; puis après avoir chargé complètement ce Renfort, portez l’extrémité d’une baguette de métal garnie d’un bouton , fur la main de papier, préeifémeut au delfus & vis-à vis delà fusdite piece de métal, & inclinez enfuite cette baguette de façon qu’elle aille toucher le conducteur ou le crochet du Renfort ; & dans le même inftant le coup foudroyant partira & percera la main de papier de part en part, laiflant la marque de fon pafTage fur chaque feuille par le trou quelle y aura fait.
- On auroit cependant tort de s’imaginer que le même coup foudroyant produiroit fur le corps humain un effet tout femblable à celui qu’il fait fur une main de papier. Il eft vrai que la commotion feroit terrible & très-douloureufe; mais elle n’iroit pas jusqu’à déchirer, à percer & à altérer notablement la texture des parties du corps humain quelle traverferoit : en voici la raifon ; Les corps vivans font de bons corps transmettais & fort perméables au feu éledrique ; ainfi celui-ci peutpaffer au travers fans les déchirer. Les os& les cartilages paroilTent être les parties qui lui oppofent quelque réfiftance, & de là vient fans - doute, que c’eft fur les articulations & les jointures que la commotion éledrique fait le plus d'impreffion. Quant à la main de papier, comme c’eft un corps élecïrique & par conféquent imperméable au fluide éledrique, fon imperméabilité s’oppo-fe fi'fortement au paflage de ce fluide, que
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- ce n’eit que par fou impétuofité, laquelle fur-pafle la force d’adhérence des parties du papier, qu'il s’ouvre enfin un paflage en brifant & en écartant les parties de chaque feuille de papier.
- CIX.
- Ayez deux petites pièces de verre d’un pouce quarré de diamètre, qui foient unies, afin qu’elles puiflent être appliquées exactement l’une fur l’autre ; mettez entre ces deux pièces de verre une petite feuille d’or battu d’une ou deux lignes, & qui foit allez longue pour déborder d’un pouce de chaque coté : liez ces pièces de verre avec du fil pour qu’ elles joignent bien enfemble: puis faites paf-fer le coup électrique par cette même feuille d’or renfermée entre les deux pièces de verre, & la véhémence de l’explofion fondra tellement ce métal, qu’on en trouvera plufieurs petits brins fi bien incruftés dans les pores du verre, qu’il ne fera paspoflible de les en détacher, même avec la pointe d’ur canif.
- Il arrive aufli fouvent que les deux petites pièces de verre fe brifent & éclatent en morceaux; c’eft que tout le feu électrique qui part du renfort, ne pouvant paffer à la fois au travers de la feuille d’or , à caufe de fon extrême ténuité, une partie de ce fluide fait en même tems un aifez grand effort contre les pièces de verre, pour les brifer. Peut-être aufli qu’une partie de la feuille d’or étant réduite en vapeurs dans la fufion du métal, l’ef-
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- Bouteille
- 1-5.6 De la
- fort fubit de ra dilatation agit aflez fortement fur le verre pour le faire éclater.
- Au lieu de deux pièces de verre, fi l’on emploie deux petites pièces de bois, on trouvera de même que la feuille d'or aura été fondue en partie : on remarquera outre cela que par la fufion de ce métal, le bois aura été noirci & comme brûlé dans tout l’efpace qu* occupoit la feuille d'or.
- Quelques obfervations avoient fait croire à Mr. Franklin , que c’étoit par une fufion froide qu' étoit fondu un fil de fer ou une f euille d’or battu, au travers de laquelle on a fait palier le coup foudroyant d'un grand Renfort ; mais il fut détrompé par l’expérience que Mr. Kinnersley fit àfafollicitation; la voici.
- Il fufpendit un fil de laiton long de 24 pouces, & attacha au bout inférieur un poids d’une livre; il déchargea enfuite au travers de ce fil de laiton un alTemblage de plufieurs Renforts, qui avoit plus de 30 pieds quarrés de verre armé. Par cette violente explofion le fil de laiton fut rougi dans toute fa longueur & devint d’un pouce plus long qu’il n'étoit. Une fécondé décharge le fépara vers le milieu, & il fe trouva avoir, quand les deux bouts furent rapprochés, quatre pouces déplus qu’il n’en avoit avant la première explofion des Renforts. *
- Cette expérience prouve bien que le feu électrique, quand il elt dans un violent mouvement , produit une véritable chaleur dans las
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- les corps qu’il traverfe, & que lorsqu’il les fond , ce n’eft point par une fulion froide. Cet allongement ne put en effet avoir lieu, que parceque la grande chaleur communiquée au fil de laiton, le rendit affez mol pour que le poids d’une livre pût le forcer de s'allonger. Quant à la rupture, elle prouve que le laiton étant devenu encore plus mince, ne fut plus en état de foutenir la chaleur de la fécondé explofion, fans entrer en fufion.
- Pour ce qui eft des fufions froides, que l’on dit avoir été produites par le feu de la foudre, comme celle d’une épée dans fon fourreau, fans que ce dernier ait été endomagé, ce font autant de faits qui ne font pas affez authentiques pour qu'on n’en puiffe pas douter. Il eil bien vrai que plulieurs écrivains rapportent de femblables événemens ; mais aucun n’a cité le témoignage de quelque per-fonne d’un affez grand poids pour nous garantir la vérité de ces faits.
- D’ailleurs on peut expliquer l’événement d’une épée fondue dans fon fourreau, fans être obligé de recourir à une fufion ffoide ; puisqu’il eft très pollible, qu’il n’y ait eu que la fuperficie de l’épée qui ait été réellement fondue : Or dans ce cas, il ne feroit pas fort merveilleux que le fourreau fat refté intact, quoique la fufion ne fût rien moins que froide: en voici la rai fon; c'eft que cette légère fuperficie étant en contadt avec le refte de la maffè métallique, qui étoit reliée froide, perdit trop promptement toute fa chaleur pour produire la brûlure du fourreau ; puisque la
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- durée de la fufion ne fut alors que d’un inf* tant.
- CXI.
- Remplirez de poudre à tirer un petit tube de verre long environ de 15 à 16 lignes: ( Fig. 34. pl. V.) Faites entrer dans chaque ouverture de ce tube un fil d’archal, de maniéré que leurs extrémités fe trçuvent à la diftance de quelques lignes l’une de l’autre, faites paffer le coup éledrique au travers de ce petit tube rempli de poudre bien ferrée ; & dans le même inftant, cette poudre prendra feu, & la violence de l’explofion fera éclater le petit tube de verre en mille pièces. Cette expérience exige aufli un très grand Renfort; & même il arrive quelquefois qu’ un feul ne fuffit pas. Les deux fils d’archal qu'on fait entrer dans le tube, forment la communication entre les deux furfaces du Renfort ; car il faut qu’un de ces fils de fer communique à fon armure extérieure, & que l’autre, au moment que l’explofion doit fe faire, communique avec le crochet du même Renfort. Au refte, il efl fort vraifemblable que c’efl la dilatation de l'air & des vapeurs de la poudre qui fait éclater le petit tube au moment de l’inflammation de la poudre.
- CXII.
- Si après avoir chargé plufieurs gros Renforts, on fait pafler le coup foudroyant par les deux extrémités d’une petite aiguille à coudre, elle fera aimantée & aura toutes les propriétés d’un aimant artificiel. Cet effet
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- parait analogue à ce qui arrive aux croix des clochers ; car on prétend avoir obfervé que les orages, en les frappant de la foudre, leur ont fouvent communiqué le magnétifme. On trouvera plus bas des éclairciflemens rélatifs à cette expérience.
- CXIII.
- Rien n’eft plus facile que de rendre vifi-ble le feu éledrique qui s’échappe de la fur-face intérieure d'un Renfort pour palier à l’armure extérieure. Attachez à l’armure extérieure une longue chaînette de fer ( Fig. 35. pl. V.) ; & portez enfuite fon autre extrémité fur le condudeur ou fur le crochet du Renfort que vous aurez chargé 5 & au même moment vous pourrez appercevoir le feu éledrique tout le long de la chaînette, qui paraîtra alors étincellante dans toutes fes parties.
- CXIV.
- Si l’on éledrife un Renfort ordinaire aufïï long-tems qu’ il le faut pour le charger, on pourra' diftribuer la commotion éledrique à une rangée de perfonnes qui fe tiennent par la main, leur nombre fût-il de cent, et même encore plus confidérable. (Fig. 36. pl. V.) il fuffit pour cela que celui qui eft à un bout de la rangée, communique avec l’extérieur du Renfort au moyen d’une chaînette, & que celui qui eft à l’autre bout de la même rangée, touche le condudeur avec le doigt ou avec un fil de fer ou de laiton ; car au moment de l’attouchement .le coup foudroyant K 3 par-
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- partira, & tous ceux qui fe tiennent par la main, retiendront la commotion & feront en même téms un mouvement involontaire &con-vulfif, qui indiquera l’impreflion que la commotion aura faite fur leurs corps. (*)
- Si l’on vouloit garantir de la commotion une perfonne de cette rangée, la chofe fera facile ; pour cela, il faut que cette perfonne au lieu, de donner les mains à fes voifins, ait elle même entre fes mains une chainette ou un fil de laiton, dont fes deux voifins tiennent chacun une extrémité: (Fig. 36. pl. V.) par là cette perfonne évitera le coup foudroyant; parce que dans ce cas, le feu éleétrique prenant toujours le chemin le plus court pour fe rendre à fon but, ne s'écartera point de la chainette pour palier au travers du corps de celui qui la tient entre fes mains ; puisqu'il feroit par là un détour qui alongeroit fon chemin: de là il réfulte, que le coup foudroyant paffera entre fes doigts fans y faire la moindre impreflion.
- Il
- La commotion éleflriquc efl toujours proportionelle à 1a grandeur des Renforts & à la force de la charge: fi le Renfort eft petit ou peu chargé, on ne reffentira le choc qui dans les articulations des doigts & des poignets: fi la charge elt plus forte, il fe fera ternir dans les bras & principalement aux coudes; & fi l’on augmente encore la charge, la commotion paffera aux épaulés, à la poitrine & même jusqu'aux genoux. Au relie il y a des perfor.nes beaucoup moins fenfibles que d’autres au choc éleétrique : la diveriité des tempe ramens, des confiitutions, & des organes plus ou moins de'licats, en eil vraifcmblablcment la principale
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- Il y a plus, fi ou fai Toit faire à cette chai* nette plufieurs tours autour du corps ou autour du bras , on feroit encore privilégié; car on ne reTentiroit point U commotion éleétrique. C’ell que dans ce cas, le feu éle-étriqui fuivroit tous les détours de la chainet-te fans jamais s’en écarter. Ce phénome pa-roit d’abord contraire à ce qu’on vient de dire, que le coup foudrovant prenoit toujours la voie la plus courte pour fe rendre à l’armure extérieure du Renfort ; mais il faut ob-ferver que cette même loi efl fubordonnée à une autre loi, en vertu de laquelle le feu éleétrique s'attache toujours aux meilleurs corps transmettans, préférablement à ceux qui le font moins, quelques détours qu’il foit forci de faire pour arriver à fon but : or la chair nette elt un corps transmettant bien fuparieur au corps humain: donc le feu éleétrique doit plutôt faire tous les détours de la chaînette, que de prendre fon chemin au travers du cens, qui cil beaucoup moins perméable au feu électrique que ne l’eft le métal.
- cxv.
- Le tableau magique elt un carreau de verre préparé en forme de Renfort, qui lorsqu’il a été chargé , donne la commotion à celui qui le tient d’une main, & qui de l’autre s’avife de toucher à l’image appliquée fur l’armure fupérieure , ou qui veut enlever la piece de monnoie placée fur cette armure. On a coutume d’enchaiTer ce taaleau dans un cadre de bois, dont le revers elt garni d’une
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- bande de feuille d’étain, qui communique par un fil de laiton très-fin à l'armure inférieure du carreau de verre; en forte que celui qui tient ce cadre d’une main , communique par là avec Cette armure in férieure ; ainfi, dès qu’on s’avife de toucher de l’autre main à l’armure fupérieure de ce tableau, le feu éle-drique ne peut s’élancer d’une armure à l'autre pour fe mettre en équilibre , fans traver-fer le corps de la perfonne qui tient le cadre d’une main, & touche de l’autre à l’image ou à la piece de monnoie placée fur l’armure fu-périeure du carreau de verre,
- CXVL
- On prépare encore des tableaux magiques d’une autre façon, en appliquant fur le revers d’un carreau de verre encadré, une peinture ou une découpure qui repréfente deux Cavaliers qui fe battent au piftolet. Le cadre eft garni de deux anneaux qui fervent à le fufpendre à deux clous, à chacun desquels eft attaché un fil de laiton, dont l’un communique à l’armure extérieure du Renfort, & l’autre arrive allez près du conducteur, pour qu’on puilTe le lui faire toucher quand on veut. Outre cela, il faut appliquer fur le revers de la découpure deux petites bandes de feuilles d’étain, dont chacune doit aboutir à un des anneaux fus - dits, & dont les deux autres extrémités fe trouvent vis-à-vis l'une de l’autre à la diftance de trois ou quatre lignes: il faut aufll avoir foin que le bout d’une de ces petites bandes métalliques fe trouve
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- précifément fous l’extrémité du piftoletrepré-fenté par la découpure. Tout étant ainfi arrangé, on charge le Renfort qui communique au conducteur ; puis on porte fur ce conducteur le fil de laiton dont on a parlé; & dans le même inftant on apperçoit une vive & brillante étincelle qui part de l’extrémité du piftolet. Le feu électrique devient vifible en cet endroit, parce qu’il franchit alors le petit efpace quifépare les deux extrémités des petites bandes d’étain qui font collées derrière la découpure. Ce phénomène amufe & furprend beaucoup ceux qui ne font point verlés dans l’éledtricité, fur - tout quand on a eu la précaution de cacher derrière la tapifierie ou autrement , les deux fils de laiton qui fervent à former la communication entre les furfaces du Renfort.
- Obfervez que ce phénomène a de l’analogie avec l'étincelle qui part du conducteur électrifé, lorsqu’on lui préfente le doigt ; puisque le feu électrique ne devient demêmefen-fible à la vue, qu’au moment qu'il franchit l’efpace qui fe trouve entre le conducteur & le doigt.
- CXVII.
- Le phénomène par lequel celui qui ouvre une porte , foit pour entrer , foit pour fortir, fe donne lui-même la commotion électrique , n’a de merveilleux que le foin & l’art avec lesquels on dérobe à fes yeux les communications qu’il a avec les furfaces du Renfort au moment qu’il ouvre la porte (Fig. 37.
- K 5 pl- V.)
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- PL V.) Car alors il communique fans s’en ap* percevoir, avec l’extérieur du Renfort par le moyen du fil de fer cloué fur le plancher, précifément dans l’endroit où fes pieds doi« ventfe trouver lorsqu’il ouvre la porte. Outre cela, il part de la ferrure un fil de far qui s’élève plus haut que la porte; en forte qu’au moment qu'on l’ouvre, ce fil de fer va choquer une petite boule de métal fufpendus à un fil de fer qui s'étend.iusqu'au conducteur, avec lequel il communique fans toucher à aucun autre corps transmettant, parce qu’il etl fou-tenu par des cordons de foie.
- Ainli celui qui ouvre la porte , communiquant par les pieds avec l'extérieur du Renfort, & établiffant avec la main qui ouvre la porte, une autre communication avec la furface intérieure du Renfort, il fe donne néceflairement lui même le coup foudroyant ; puifque le feu éledrique dans ce cas, tra-verfe tout fon corps, en pàfiant de fa main à fes pieds pour fe rendre à l’armure extérieu-du Renfort.
- cxviii.
- Le phénomène par lequel on donne la commotion à celui qui s’aflied fur un tabouret, ou fur un canapé préparé pour cette expérience , eft le même que celui qu’on vient d'expliquer dans le paragraphe (CXIV.) & ne paroit fi Singulier, que parce qu’on a de même l’attention de ne point laifler ap-percevoir les communications établies avec les furfaces du Renfort : il ne s’agit pour cela que
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- que de cacher fous l'étoffe du tabouret deux fils de laiton, qui dépendant enfuite le long des pieds du tabouret jusqu’au plancher, touchent dans cet endroit à deux autres fils de laiton, dont l’un communique à l’extérieur du Renfort & l’autre eft tellement dirigé , qu’on peut commodément le faire toucher au Conduéteur, au moment qu’on veut donner la commotion à la perfonne qui eft aflife fur le tabouret.
- CXIX.
- Voici encore un phénomène affez plai-fant ; c’eft un petit canon de métal qui étant placé fur un carreau de verre armé des deux côtés, fait feu vis-à-vis un but, huit ou dix fois par minutes, aufli long tems qu’on éleétri-fe le conduéteur communiquant par une chai-nette avec l’armure fupérieure du carreau de verre. Il faut obferver que le but qu’on place à un demi - pouce de diftance de la bouche du petit canon, doit communiquer avec l’armure inférieure du carreau de verre. Ce phénomène a aufli de l’analogie avec l’étincelle qu’on tire d’un conduéteur en lui pré-fentant le doigt, & avec le phénomène du tableau magique dont le petit pillolet en découpure fait feu.
- cxx.
- Prenez un jeu de cartes & mettez entre chaque carte une petite feuille d’étain d’un pouce en quarré ; liez enfuite ce jeu de cartes avec du fil, de façon que les cartes s’ap-pli-
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- pliquent bien les unes contre les autres: élee-trifez fortement le Renfort adapté au con* dudeur ; puis faites palier le coup éledrique au travers de ce jeu de cartes, comme on l’a dit, pour le faire palier au travers d’une main de papier: li l’on examine enfuite ce jeu de cartes, on obfervera que la première & la derniere carte feront les feules qui aient été percées par le coup foudroyant, & que toutes les autres cartes intermédiaires feront restées intades.
- Avant que d’expliquer ce phénomène, il eft à propos de faire obferver qu’un jeu de cartes, quand il eft bien fec & propre, eft un corps élettrique, mais non de la meilleure efpece. Cela pofé , voici la raifon de ce phénomène.
- La première carte eft percée par la véhémence du feu éledrique condenfé , qui s’élance en très grande quantité fur un feul point de cette carte ; & c’eft même par la raifon que cette carte eft un corps eleSlriqiu, quelle eft percée & déchirée ; car n’étant point perméable au feu éledrique, celui-ci doit ia brifer & la trouer pour fe faire un paflage. Il en eft de cette première carte , comme d’une grande glace, qui quoique imperméable à l’eau, eft cependant brifée par l’impé-tuofité d'un jet d’eau qu’on dirige fur elle au moyen d’une de ces pompes dont on fe fert pour éteindre les incendies.
- Le feu éledrique , après avoir percé la première carte, doit éledrifer en - plus la pre-
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- première feuille métallique ; enforte que chaque partie de cette feuille fe trouve éledtrifée; par conféquent ce même fluide doit enfuite agir fur tous les points de la fécondé carte qui répondent à la feuille métallique; &par cette adtion, il arrive que le fluide s’infinue au travers de cette fécondé carte, en paflant par les pores & les interftices dont cette carte abonde: ainfiiln’eftdutoutpointétonnant, que cette fécondé carte relie intadle ; car il faut la confidérer à peu près comme un taffetas que le feu éledlrique traverfe aifément fans le déchirer , par la feule raifon qu’il peut paffer par fes interftices.
- Lorsque le feu éledlrique a ainfî traverfe la fécondé carte, ilélectrife la fécondé feuille métallique comme il a éledtrifé la première, & paffe enfuite au travers de la troilieme carte; & ainfi de fuite jusqu’à la demiere, à laquelle il fait un trou comme il en a fait un à la première. Il déchire & perce cette derniere carte, parce qu après avoir éledtrifé la derniere feuille métallique, il fe réunit & fe condenfe de nouveau pour agir contre le point de cette carte qui lui préfente le chemin le plus court pour arriver à l’armure extérieure du Renfort : ainfi cette derniere carte eft percée, parce que toute l’adtion du feu éledtrique fe portant fur un feu! point de la carte, l’adhérence des parties de cette carte , lui oppofe une trop faible réfiftance pour pouvoir furmonter l’effort impétueux avec lequel le feu éledlrique s’élance fur ce point de la carte.
- CXXI.
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- Quelque vraifemblable que foit l’explication qu’on vient de donner ; en voici une autre qui felou moi, ne l’eft pas moins. On a dit que le jeu de cartes étoit un corps eleBrique; mais peut-être n’eft il un corps de cette efpece que dans certaines circonftances, & que dans d’autres, il doit être plutôtcon-fidi'ré comme un corps transmettant; en forte qu’il en feroit des cartes rélativement à 1’éle-dricité, comme d’un vafe de bois rélativement à l’eau & au mercure : un vafe de bois eft imperméable à ces deux liquides pour l’ordinaire ; mais fi l’on adaptoit ce même vafe de bois avec du maftic fur l’orifice d’un récipient ouvert par le haut, l’eau ou le mercure qu’il contient, pafiera au travers du fond du vafe, dès qu’on fera le vuide ; parce que dans ce dernier cas, le poids del’athmofphere fait un effort affez puiffant fur l’eau & le mercure, pour qu’ils s’ouvrent un paffage au-travers du bois.
- Il en eft de même, je penfe, des cartes; elles font imperméables à l’éledricité ordinaire , telle que peut être celle d’un fimple condudeur qui ne communique point à un Renfort : mais lorsque ces cartes fe trouvent ex-pofées àl’explofion violente d’un Renfort, leur propriété de corps éleBriqite fe trouve trop modique & trop foible pour réfifter à l’impetuofi-té d’un feu de cette efpece: ainfi rélativement à la force de l’explofion éledrique, les cartes ceffent detre imperméables, & deviennent
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- à fon égard des corps transmettant: Il n’eft donc pas furprenant que ies cartes intermédiaires ne foient pas déchirées.
- Quant à la première & la derniere carte qui font percées te déchirées, il faut attribuer cet eH'et à l'extrême condenfation & à la grande violence du courant éleélrique, qui porte toute fon impétuolité fur un feul endroit de ces deux cartes; cela eft fi vrai, que le même coup éleétrique prodniroit un effet tout femblable, même fur Ips meilleurs corps tranfmettans , tels que font les métaux. Lorsqu’on fait palier le coup au-travers de quelques feuilles d’or battu ou d’étain , le feu éleélrique perce & déchire ces feuilles avec tant de violence, que les petits lambeaux en font écartés & jettés S’à te là: il ne faut donc pas être furpris, que les deux cartes fus-dites, étant des corps bien moins tranfmettans que des feuilles d’or, fubifient le même fort.
- CXXII.
- Mettez fur la platine d’une machine pneumatique un récipient ouvert par en haut & recouvert d’une platine de cuivre, au travers de laquelle pafle un gros fil de laiton qui peut monter & défcendre, & dont l’extrémité inférieure efi: terminée par un bouton: faites défcendre ce fil de laiton jusqu’à ce que fon bouton touche une carte placée fur la platine dans le récipient: établiriez une communication de la platine à l’armure extérieure du Ren-
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- Renfort ; attachez auffi à la partie fupérieure du gros fil de laiton fus-dit, uneehainetteou un fil de fer qui puiffe aller toucher le conducteur. Le tout ainfi arrangé, fi l’on décharge le Renfort, en faifant toucher la chai-nette au conducteur, le feu CleCtrique percera la carte pour pénétrer à la platine, & de-là à l’armure extérieure du Renfort.
- Mais fi avant de faire cette expérience, on a pompé l’air du récipient, alors la carte ne fera point percée ; c’eit quelle oppofe plus de réfiltance au palfage du fluide électrique, que n’en oppofe l’air raréfié qui eit reité dans le récipient: ainfi le feu éleCtrique au lieu de pafTer au travers delà carte, glif-fera fur elle pour aller trouver la platine.
- Dans la première expérience la carte elt donc percée, parce que le feu éleCtrique trouve plus de facilité à la déchirer, qu’il n’en trouve à gliffer fur elle au travers d’un air, qui n’étant point raréfié, oppofe trop de réfiltance à fon palfage : mais tout le contraire arrive dans la fécondé expérience.
- CXXIII.
- En général il elt vrai de dire que le feu éleCtrique pouffe par l’explofion d’un Renfort , prend toujours la voie la plus courte pour fe rendre à l’armure extérieure, dans toutes les occafions où les corps qui fe pré* fentent à fon palfage, font également transmettant. Ainfi fi l’on attache à l’armure extérieure d’un Renfort deux fils de laiton inégaux
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- gaux, en longueur, & qu’on porte enfuite les deux autres extrémités de ces fils de laiton en mêmetems fur le conducteur, tout le fluide éleCtrique paflera par le fil de laiton le plus court.
- Mais il faut remarquer, que nous fqp-pofons ici que la grofleur de chaque fil de laiton eil fuffifante pour être propor-tionée à la quantité de tout le feu électrique qui part à la fois de l’intérieur du Renfort ; car 11 l'on fe fervoit de fils de laiton trop fins, dans ce cas, le feu électrique fe divifera & paflera par les deux fils de laiton; la raifon en eft, qu’un fil métallique trop mince ne fuffit pas pour recevoir à la fois tout le feu éleCtrique lancé, par l’explofion d'un Renfort qu’on a chargé complètement.
- Obfervez encore que fi on faifoit cette expérience avec deux chainettes, dont l’une fût plus courte que, l’autre, il arrivera fou-vent que le feu éleCtrique fe partagera de meme, & prendra fon chemin par l’une & l’autre chaînette. En voici, je crois, la raifon: une chaînette n’eft point un c.orps continu ; elle eft plutôt un corps interrompu que le feu éleCtrique ne peut parcourir que par fauts & par bonds, en franchiflant au travers de l’air, les petitsintervales qui fe trouvent entre chaque chaînon ; ainfi ne pouvant couler fur la chaînette avec autant de facilité qu’il le feroit fur un corps continu , il eft tout Ample qu’il fe partage aux deux chainettes afin d’être moins retardé dans facourfe.
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- On aura encore le même phénomène en faifant paffer le coup électrique par deux rangées de perfonnes qui fe tiennent toutes par la main, & dont l’une eft plus longue que l’autre: c’eft à Mr. l’abbé Herbert que je dois cette obfervation : j’en ai fait moi même l'expérience avec Mr. de Hingenhousz il y a quelques mois, un jour que nous nous trouvâmes enfemble chez Mr. l’abbé Herbert.
- CXXIV.
- Il eft outre cela à propos de faire ob« ferver, que l’explofion impétueufe du feu électrique pourroit être fi confidérable, qu' alors la direction de ce feu ne feroit plus dépendante du plus ou du moins de transmet• tance ou de perméabilité des corps qui fe trouveroient fur fon palfage. Il arrive en effet, que lorsque le feu électrique s’élance en très grande quantité & avec une force ex-trême, il s’ouvre un paffage même au travers des corps- eleclriques de la meilleure efpece, plutôt que de fe détourner pour prendre fon chemin par de bons corps transmettant. C'eft que dans cette circonftanee, le corps éleSlrique, tel que feroit une glace fort épaiffe ou un grôs gateau de réfine, lui oppofe moins de réfiftance, que celle qui feroit requife pour changer la direction impétueufe de ce feu électrique; ainfi en vain on prétendroit fe garantir de la foudre en fe couvrant de glaces épailfes ; car comme il V a une difproportion immenfe entre l’impé-tuofité de tout le feu concentré dans la foudre
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- dre & la force d’adhérence des pârties d’une glace, il eft bien naturel que la foudre bri-fe la glace, plutôt que de changer fa direction & de prendre une route qui alongeroit fon chemin & l'éloigneroit du but vers lequel elle a été lancée.
- La rapidité avec laquelle le feu électrique palfe de l'intérieur du Renfort à l’extérieur , eft un autre phénomène qui étonne .-fa viteffe eft fi prodigieufe , quelle paroit inftantanée, lors même que ce feu électrique eft obligé de parcourir un fort long efpace avant de pouvoir arriver à l’armure extérieure. On a fait des expériences en Angleterre par lesquelles il confie qu’une perfonne communiquant à l'armure extérieure d’un Renfort, & tenant de l’autre main un fil de fer de là longueur de 12260. pieds, frit frappé du coup foudroyant, au moment qu'on porta l’autre extrémité du fil de fer fur le crochet du Renfort.
- Il en eft de même de la propagation ordinaire du 'feu électrique : car lorsqu'un corps éleCtrifé vient en contacft avec d’autres corps transmettans, le feu électrique fe transmet de même en un inftant aux corps les plus éloignés. O11 a ifolé un fil d’archal de là longueur de 5000. pieds; une perfonne ifolée & placée à côté de la machine électrique tenoit à la main une extrémité de ce fil de fer, qui partant de là, paffoit de cio-
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- des cordons de foie, & revenoit enfuite en rentrant par la fenêtre, aboutir près de la machine éledrique : l’extrémité de ce fil de fer portoit un petit globe d'yvoir, fous lequel on avoit placé à la diftance de fix ou huit lignes, un papier chargé de charbon en poudre. Tout fe trovant difpofé de la forte , on éledrifa le condudeur & aufiitôt que la perfonne ifolée porta fur le condudeur le fil de fer quelle tenoit à la main, dans le même inflant, fans qu’on obfervat le moindre intervale, le charbon en poudre s'élança fur le globe d’yvoir. On peut juger par là de l'extrême viteiTe avec laquelle fe fait la propagation du feu éledrique : il n’eft pas pof-fible d’apprécier fa rapidité; peut-être égale-t-elle celle de la propagation de la lumière, qui parcourt en une fécondé un ef-pace égal à près de 30 diamètres de la terre , c’eil; à dire plus de 50000 lieues d’Allemagne.
- On a déjà dit plufieurs fois que l’eau étoit un fort bon .corps transmettant : l’expérience Suivante le prouve de la maniéré la plusdécifiye.
- Mr. Franklin étant à Philadelphie, enflamma de l’efprit de vin en faifant palier le coup foudroyant au travers de l’eau d’une rivière : ( Fig. 38. Pl. V. ) Voici comme il arrangea cette expérience : Il ficha dans l’eau même, fur chacun des deux rivages au bord de la riviere,une verge.de fer. haute de.qua-
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- tre à cinq pieds; en forte que ces deux ver* ges fe trouvoient vis - à • vis l'une de l'autre; à l’extrémité de l’une de ces verges , dont le bout fupérieur étoit coudé à angle droit, il attacha un gros fil de fer long de quelques pouces & terminé par une petite boule de métal, fous laquelle fe trouvoit, à la diflan-ce de quelques lignes, un petit bafiin rempli d’efprit dé vin. De l’autre coté de la rivière Mr. Franklin avoit placé un grand Renfort & avoit attaché à fon armure extérieure un long fil de fer, qui partant au deflfus du lit de la riviere fans toucher à l’eau, abou-tiffoit à l'autre rivage, où il étoit accroché à la queue du petit baflin qui contenoit l’ef-prit de vin. Tout fe trouvant dans cet état, Mr. Franklin, après avoir chargécom-plettement fon Renfort, en préfenta le crochet à la verge de fer qui étoit fur le bord de la riviere, & dans le même inftant le feu éledrique parta au travers de l’eau de la rivière jusqu’à la verge de fer qui fe trouvoit fur l’autre bord, & la petite boule de métal qui pendoit à cette verge, donna une étincelle qui enflamma, l’efprit de vin : après quoi le feu éledrique fuivit la diredion du fil de fer attaché à la queue du baflin, repaf* fa à l’autre rivage & fe rendit ainfi à l’armure extérieure du Renfort.
- Mr. Franklin, après cette première expérience, tua un dindon d’un coup foudroyant, le fit enfuite rôtir devant un feu allumé par le feu éledrique & dina avec fa compagnie: On but pendant le repas à la iànté des
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- plus célébrés électriciens dans des tartes éleo-tri fées & au bruit d’une artillerie ou batterie éleétrique,
- On entend par une tarte éleCtrifée, un petit vafe de verre fort mince, empli à moitié de vin qu'on a éleCtrifé comme on élec-trife la Bouteille de Leyde, Cette . tarte étant portée adroitement aux levres, donne un petit choc électrique, fi l'on a eu foin de fe rafer de près & de ne pas refpirer fur la liqueur.
- Nous donnerons plus bas l'idée d’une roue électrique de l’invention de Mr. Franklin; elle pourroit, dit il, dans de pareilles occafions fervir de tourne - broche électrique pour faire rôtir une piece de volaille.
- DE LA RELATION ENTRE LES DEUX SURFACES DE LA BOUTEILLE DE LEYDE,
- cxxvir. ;
- Quand on a chargé en-plus la furfhce intérieure de la Bouteille de Leyde ou Renfort, la furface oppofée, c’eft à dire l'extérieure, fe trouve toujours éleCtrifée négativement; parce quelle eit alors privée d'une portion de fon fluide naturel, proportionel-lement à la quantité furabondante dont la furface intérieurs a été furchgrgée; d’où il fuit
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- fuit qu’on tente inutilement, de donner à l’in* térieur du Renfort une plus grande portion de feu éleétrique, chaque fois qu’il n’en peut plus fortir de la furface extérieure; & c’eft là ce qui arrive quand le Renfort ,eft parfaitement ifolé, ou quand le verre eft extrêmement épais. Dans ces .deux cas, on ne peut jamais parvenir à charger un Renfort, par la feule raifon, que le" feu éleétrique naturel de la furface extérieure ne peut pas alors être forcé de s’éloigner de cette furfa-çe. De là il réfulte encore, qu’on ne peut plus pouffer de feu éleétrique dans l’intérieur du Renfort, dès que fa furface extérieure a perdu toute la portion de ce feu qui lui étoit propre dans fon état naturel. Enfin un Renfort éleétrifé ne peut rien perdre du feu qu’on lui a communiqué, à moins que la furface extérieure n’en reçoive préci-fément autant.
- Dès qu’on établit une communication entre les deux furfaces d’un Renfort, le. feu éleétrique fe remet à l’inftant en équilibre dans les deux furfaces ; parce que par cette communication on permet à tout l'excès du feu éleétrique dont l’intérieur du Renfort fe trouve furchargé, de palier fubitement à la furface extérieure : d'où il arrive, que l’une & l’autre furface fe trouvent rétablies dans leur état naturel & que le Renfort elt déchargé.
- Mais fi au lieu d'établir cette communication entré les deux furfaces, on porte fou-vent le doigt fur le crochet d'un Renfort L 4 non-
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- non-ifolé, on enlevé alors fucceflivement par ces àftouchethehs réitérés tout le feu cou-tenti dans le Renfort; parce que la furface extérieure reprend alors chaque fois qu'on tôüche au crochet , précifément autant de feu éleétrique que le doigt en enleve à l’intérieur du Renfort ; & ce font les corps transmettons fur lesquels repofe le Renfort, qui rendent à la furface extérieure le feu qui lui manquoit.
- Mais ce n’eft plus cela, quand le Renfort eft ifolé; dans ce cas, il nous donne un tout autre phénomène ; nous en parlerons plus bas.
- 'Au relie tout ce qu’on vient de dire ré-lativement aux deux furfàces d'un Renfort, doit auffi s'entendre des deux furfaees d’un carreau de verre garni ou arihé â la maniéré des Renforts.
- . Il réfulte de tout ce qu’on vient de dire.^ que le-plus & le-moins font merveilleufe-hren’t combinés & balancés dans un Renfort. Cèttè rélation fi finguliere furpafTe jusqu’à préfent tous les efforts que l’intelligence humaine a faits pour en rendre raifon.
- On a prétendu expliquer ce rapport, en difant, que le fluide éleétrique qui abonde dans l’intérieur du Renfort, fait par fa propriété répulfive un fi grand effort contre la furface extérieure, que ce fluide, fans pouvoir pénétrer au travers du verre, force cependant le fluide qui eft propre à la furface extérieure, de s’éloigner de cette furfacè ; enforte quelle fe trouve alors dénuée defon
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- propre feu éledrique naturel à proportion que la furface intérieure en raffemble une plus grande quantité.
- .Je ne m'arrête pas à préfent à cette ex* plication; parce que j’aurai occafion d’y revenir. Partons aux expériences qui nous font connoitre les moyens dont Mr. Franklin sert fervi, pour faire l’analyfe du Renfort : car c’eft ce favant phyficien, qui par une fagacité fupérieure , nous en a développé les propriétés, les effets, & les phénomènes myftérieux.
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- Nous n’avons parlé jusqu'ici que des Renforts dont on éledrifoit la furface intérieure. Ou peut auffi quand on le fouhaite, éledrifer leur furfaee extérieure au lieu de l'intérieure ; mais alors cette derniere fe trouvera éledrifée en-moins & l’extérieure le fera en-plus : & c’eft là ce qu'on appelle charger un Renfort négativement : voici la maniéré dont cela s’éxécute.
- Prenez en main le Renfort par fon crochet & préfentez fon armure extérieure au eondudeur qu’on éledrife : ( Fig. 39. PI. VI.) après cela, pofez le Renfort, en le tenant toujours par le crochet, fur un corps ifo-lant; puis retirez la main, & alors vous pourrez fans dangêr l!èmpoigner par fon armure extérieure & le pôfer fur une table ; Mais obfervéz toujours bien foigneufement, qu’il n’y ait jamais qu’une main qui agiffe à la L ? * fôis,
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- fois, pour ne point vous expofer à toucher en meme tems aux deux furfaces du Renfort.
- Voici encore une autre méthode pour charger un. Renfort négativement. Mettez le Renfort fur un corps ifolant (Fig. 40. Pi; VL) établirez une communication du condudeur à l’armure extérieure du Renfort, & tou. chez en le crochet avec le doigt auffi long-tems qu’on éleétrifera le condudeur pour charger la furface extérieure de ce Renfort; après cela, ceflez de toucher le fufdit crochet, & pour lors vous pourrez prendre ce Renfort à la main par fon armure extérieure fans craindre de recevoir la commotion : mais fi votre dèlfein étoit de le prendre par fon crochet, ayez bien foin que l’autre main ne touche pas à l’armure extérieure ; fi - non vous recevrez le coup foudroyant.
- Après avoir pofé fur la table un Renfort chargé négativement, comme on vient de le prefcrire, faififlez par l’armure extérieure un autre Renfort éleétrifé à la maniéré ordinaire , & approchez les deux armures extérieu. res des deux Renforts l’une contre l’autre; (Fig, 41. Pl. VI.) puis inclinez le Renfort que vous avez en main, de façon que fon crochet, qui doit être recourbé à angle droit, aille toucher le crochet du Renfort négatif qui eil fur la table ou que vous tenez de l’autre main; & au moment que ces deux Crochets feront fur le point de fe toucher ,, vous entendrez un grand éclat & les deiix Ren-
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- Renforts fe trouveront déchargés : mais fou-venez vous qu’au moment que vous rapprochez les deux crochets l’un de l'autre,il faut que les deux armures extérieures foient en contaCt en même tems : faute de cette précaution vous recevriez le coup foudroyant au travers du corps.
- cxxx.
- On peut éleCtrifer en même tems deux Renforts, l’un pofttivement & l'autre négativement : Pour cela, il faut ifoler le couffin frotteur de la machine éleétrique, en l’arran-ge'ant de façon qu’il foit porté & foutenu par un corps ifolant : Après cela faites élec-trifer le conducteur, & pendant qu'on l’é-leétrife, préfentez d’une main au couffin frotteur le crochet d’un Renfort, & de l’autre main préfentez au conducteur le crochet de l’autre Renfort : par là l’intérieur de ce dernier Renfort s'éleétrifera en - plus , & l'intérieur du premier s’eleCtrifera en - moins. C’eft que le couffin frotteur étant ifolé, fournit au conducteur le feu qu'il puife dans l'intérieur du Renfort qui lui efl préfenté ; ce qui doit néceffairement rendre négatif l'intérieur de ce Renfort.
- Il eft encore une maniéré plus fimple d’é» leCtrifer en même tems deux Renforts, l’un en-plus & l’autre en-moins. Empoignez d'une main l’armure extérieue d’un Renfort, & de l'autre main prenez le fécond Renfort par fon crochet; puis préfentez au conducteur l’armure extérieure de ce dernier, & le crochet
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- chet de celui que vous tenez par fon armure extérieure ; par là vous chargerez l’intérieur de celui-ci & l’extérieur. de fautre : ainii l'un fera chargé pojitivsment & l’autre le fera négativement. - ‘y-
- CXXXI.
- Sufpendez au plafond avec un fil de foie une petite boule de fureau de la grofleur d'une noifette; ou fi vous voulez , une araignée faCtice, (Fig. 42.Pl. VL): chargez en-fuite deux Renforts, l’un pofitivement & l’autre négativement: Pofez ces Renforts fur une table à la diftance d’un pied & demi l’un de l'autre, & de façon que la boule de fureau fe trouve exactement entre les deux boutons des Renforts : alors vous verrez voltiger la boule de fureau, d'un Renfort à l’autre pendant des heures entières; e’eft à dire, jusqu'à ce que la boule de fureau, par fes at-touchemens alternatifs, ait enlevé à l’intérieur d'un de ces Renforts tout l’excès de fon feu éledrique, pour le transmettre à l’intérieur négatif de l’autre Renfort. Obfervez qu’il faut fufpendre la boule de fureau de façon quelle ne puifle aller toucher que les deux boutons des Renforts. Après tout ce qui a été dit, cette expérience s’explique d’elle-même. Je pafle à celles qui démontrent encore plus particuliérement, que la furface extérieure d’un Renfort dont on a élec-trifé en-plus l’intérieure, elt réellement négative.
- CXXXII.
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- ue Leyde ou Renfort. 173 CXXXII.
- Placez un Renfort éledrifé à la maniéré ordinaire fur un gateau de réfine; alors fi vous prëfentez' à fon crochet une petite boule dé liège fufpendue à un fil de foie, cette boule fera d’abord attirée, puis repouffée. Abaiffez enfuite cette même boule ainfi élec-trifée, de façon qu’elle fe trouve vis-à-vis l’armure extérieure du Renfort, & elle fera attirée par cette furface. Il faut donc que l’extérieur de ce Renfort foit négatif', car s’il étoit pofitif, le liege éledrifé feroit également repouffé par cette furface comme par le •crochet.
- CXXXÏII.
- A un fil de fer qui s’élève Verticalement fur la table (Fig. 43. PI. VT.), & dont la partie fupérieure efl un peu recourbée , fufpen-dez un'fil de lin à la diftance d’un demi-pouce de l’armure extérieure d’un Renfort chargé à la maniéré ordinaire & placé fur un corps ifolant : puis touchez avec le doigt le crochet de ce Renfort à plufieurs reprifes; & vous obferverez i qu’à chaque attouchement le fil de lin fera attiré : Ceil que l’armure extérieure du Renfort attire ce fil pour lui enlever autant de feu éledrique que vous en enlevez au crochet par l’attouchement du doigt.
- CXXXIV.
- Adaptez à l’extérieur d’un Renfort un fil de fer terminé par un petit bouton de métal, (Fig. 44. PI. VI. ): ce fil de fer doit s’élever
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- verticalement jusqu’à la hauteur du crochet, & ne doit en être éloigné que de trois ou quatre pouces. Eledrifez le Renfort à 'l'ordinaire & poiez le enfuite fur un corps ifo-lant. Portez une boulette de liege fufpen-due à un fil de foie, entre le crochet du Renfort & le bouton métallique du fus:dit fil de fer; voici quel en fera l’effet; la petite boule de liege s’élancera continuellement de l'un à l’autre, jusqu’ à ce que toute la charge du Renfort foit épuifée. C’eft que la boule de liege transmet chaque fois le feu éledrique qui lui eft communiqué par le crochet, à l'armure extérieure du Renfort, & c’eft. par là que l’équilibre fe rétablit entre les deux fur-faces.
- cxxxv.
- Après avoir placé un Renfort éledrifé fur un gateau de réfine, (Fig. 45. PL VI. ), ayez un gros fil de laiton recourbé en forme de demi-cercle ; appliquez une extrémité de ce fil de laiton à l’armure extérieure ,du Renfort; puis approchez par degrés fon autre extrémité, du crochet de ce Renfort, mais fans le toucher ; & vous appercevrez le feu éledrique qui s’élancera fucceflivement du crochet fur le fil de laiton, jusqu’à ce que l'équilibre foit rétabli entre les deux, furfaces.
- Mais fi on fait d’abord toucher le fil de laiton au crochet du Renfort, & qu’on approche fon autre extrémité, par degrés, vers l'armure extérieure, on appercevra un cour* vaut de feu qui paffera de cette extrémité à
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- l'armure extérieure dû Renfort : enfin fi le fil de laiton vient, à toucher en même tems le crochet & l’armure extérieure, l’équilibre fe rétablira fur le champ par une forte ex-plofion.
- CXXXVI.
- Placez vous fur un gateau de féfine, & touchez du doigt le crochet d'un Renfort éle-drifé, qu’une autreperfonne placée fur le plancher, tient à la main; & chaque fois que vous toucherez le crochet, vous vous éledriferez vous-même en-plus ; enforte que tous ceux qui font préfens à cette expérience, pourront tirer de vous une étincelle, en. vous touchant du bout du doigt. C’efi: que le feu électrique vous a été transmis par le crochet, & que la main de celui qui tient le Renfort en fournit la même quantité à fon armure extérieure.
- Mais on aura un phénomène tout contraire , fi placé fur la réfine vous tenez vous même à la mâin le Renfort éledrifé, & que quelqu’autre perfonne non-ifolée en touche le crochet ; car dans ce cas, vous ferez électriié en-moins & vous pourrez tirer une étincelle de quiconque fera fur le plancher. . Dans cette derniere expérience, le feu éledrique du Renfort pafTe du crochet à celui qui y porte le doigt, & votre main en fournit la même quantité à l’armure extérieure ; donc vous paifez à une éièdricité négative.
- CXXXVII.
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- CXXXVII.
- Placez fur un corps ifolant un livre recouvert d’un papier doré (Fig. 46. PL VI.-); mettez fur ce livre un Renfort éledrifé à l or-dinaire; & fi enfuite vous en touchez le crochet du bout du doigt, le livre s’éledrifera négativement; parce qu’il aura fourni à l’armure extérieure du Renfort , autant, de feu électrique que vous en aurez enlevé de l’intérieure en touchant au crochet. Vous pourrez vous convaincre que le livre eft élec-trifé en-moins, en lui préfentant une petite boule de fureau, que vous aurez auffi éledri-fée en-moins de la maniéré qu’on l’a dit au- paragraphe XXXVIII.
- Après cette première expérience, Otez le Renfort de delfus le livre doré, & le tenant à la main, préfentez en le crochet à un autre livre' pareil & pofé de meme fur un corps ifolant; par là, vous éledrifez ce fécond livre en-plus. Approchez enfuite les deux livres dos contre dos à la diftance de deux ou trois pouces, & vous obferverez qu’ une boulettè de fureau fufpendue à un fil de foie entre ces deux livres, s’élancera plufieurs fois fur eux alternativement.
- CXXXVIII.
- Placez fur un fupport ifolant un livre in-quarto, dont la couverture foit bordée & ornée de plufieurs filets d’or; (Fig. 47. PI.VI.) pofez fur un coin de ce livre un morceau de plomb portant un fil de fer qui s’élève en s’inclinant;
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- cli'nant : pins mettez fur le meme livre à l'op-pofite du fus-dit morceau du plomb, un Renfort chargé : preflez la partie faillante du fil de fer avec un. bâton de cire d’Kfpagne, afin que ce fil de fer puiffe toucher le crochet du Renfort; & pour lors l’explofon vous fera appercevoir une très vive étincelle, & les filets d’or de la couverture du livre brilleront tout-au-tour comme de petits éclairs. Cette expérience doit fe faire dans l’obfeurité ; elle prouve vifiblement que le feu éleétrique pafTe de l’intérieur du Renfort à l’armure extérieure : & outre cela, que le feu éleétrique fe di-vife & fe partage, lorsque les corps conducteurs qui doivent le transmettre, ne font pas des corps continus ou qu’ils ont trop peu de furface.
- CXXXIX.
- Si l’on applique l’un à l’autre les crochets de deux Renforts éleétrifés à l’ordinaire, il n’en réfultera ni choc ni étincelle. (Fig. 48. Pl. VI. ) Mais fi vous pofez un de ces Renforts fur un corps ifolant, & que vous le fai-fifliez enfuite par fon crochet ( Fig. 49. Pl. VI. ) , l’explofion aura lieu & vous recevrez le coup électrique, dès que vous porterez fon armure extérieure fur le crochet du Renfort que vous tenez de l’autre main. Tout cela eft conféquent aux principes que nous avons établis , & ne demande point d'explication ultérieure.
- Gbfervez que pour prendre impunément à la main par le crochet un Renfort éleétrifé, M fans
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- fans lui rien faire perdre de fon feu électrique furabondant, il faut toujours commencer par le placer fur un corps ifolant, & enfui-te après avoir retiré la main, le prendre par le crochet.
- CXL.
- Pour varier l’expérience précédente, chargez d’abord deux Renforts également, l’un pojîtivement, & l’autre négativement ; c’eft-à-dire, l’un par le crochet & l’autre en éledri-fant fon armure extérieure ; puis tenant ces deux Renforts en main, l’un par le crochet négatif, & l’autre par fon armure négative, appliquez l’armure pofitive du premier au crochet pofitif du fécond, & vous n'aurez ni étincelle , ni choc, ni explofion. ( Fig. jo. PI. VI.)
- Mais fi vous pofez fur un corps ifolant le Renfort négatif que vous tenez par fon crochet, & que vous le releviez enfuite en le fai-fiffant par l’armure extérieure ; dès que vous appliquerez les deux crochets l’un à l’autre, (Fig. 51. PI. VI.), vous appercevrez une vive étincelle ; l’explofion aura lieu dans les deux Renforts ; vous recevrez la commotion & l’équilibre fera rétabli dans les deux Renforts. Obfervez qu’il n’y a aucun danger dans ces expériences, quand on a l’attention de ne charger les Renforts que foiblement ; car alors la commotion qu’ on reçoit eft peu fenfible.
- Si l’on Aippofe qu’il n’ y ait qu’un de ces deux Renforts qui foit éledrifé, & qu’011 fai-fiffe
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- fi fie d’une main l’armure extérieure du Renfort éleCtrifé & chargé complettement à 1* ordinaire , & que de l’autre main on empoigne l’armure extérieure de celui qui ne l’eft point du tout, ( Fig. 52. PI. VI. ), alors le phénomène feroit encore différent; car dans ce cas, dès qu’on appliquera les deux crochets l'un à l’autre, on reffentira une demi - commotion, & les Renforts auront chacun une moitié de charge ; puisque dans cette occafion l'un doit fe décharger à demi, & l’autre recevoir une demi-charge.
- CXLI.
- Sufpendez au conducteur plufieurs Renforts égaux en grandeur; mais de façon que l’un pende à la queue de l’autre; (Fig. 53. Pl. VI. ), & que l’armure extérieure du dernier communique avec le plancher : après cela éleCtrifez le conducteur, & un nombre de tours de roue égal à celui qu’il faudroit pour charger un feul de ces Renforts, fuffira pour les charger tous. (*) En voici la raifon. Le feu électrique qui eft chaffé de l’armure extérieure du premier Renfort, paffe au crochet
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- (*) Tous ces Renforts feront chargés ; mais non pas également ; car il n’y aura jamais que le premier, qui le fera complettement ; le fécond le fera moins que le premier ; & le troifieme moins que le fécond ; & ainft de fuite, à la réferve du dernier qui fe trouvera toujours plus chargé que les Renfort» interné.
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- du fécond & fert à charger ce Renfort qui ell à la queue du premier ; & ce qui e(l enfuite chaffé de l’armure extérieure de ce fécond. Renfort, fert de même à charger l’intérieur du troifieme Renfort, & ainli de fuite. Delà il réfulte, qu'on peut charger par la même opération plufieurs Renforts ; parce que tout le fluide éleétrique qui eft forcé de s'éloigner de la furface extérieure , charge la furface intérieure du Renfort qui fuit ; puisque ce feu doit paffer à fon crochet.
- Au relie cet arrangement de Renforts n’augmente pas la force de l'explofion, lorsqu’ on les décharge tous à la . fois ; car un Renfort n?étant chargé que par le feu de l’autre, on n’a jamais que la charge d’un feul Renfort.
- Mais quoique ces Renforts ainfi réunis ne foient pas capables de produire une plus forte explofion, lorsqu’on les décharge tous à la fois, que ne le feroit un feul Renfort, qu’on auroit chargé de la même maniéré; cependant on peut faire enforte, que leur charge foit réellement équivalente à celles de plufieurs Renforts qu’on auroit chargés fé-parément : pour cela , détachez ces Renforts les uns des autres : puis faites communiquer tous leurs crochets enfemble , & établiflez de même une communication entre toutes leurs armures extérieures : dans ce cas, il ell certain, que fi l’on fait communiquer un de leurs crochets avec une des armures extérieures, la violence de l’explofion & du coup foudroyant fera confidérablement augmentée.
- Il
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- Il en ell de ces Renforts comme d’un long cordon, qui ne pourroit foutenir qu'un poids de 20. livres; mais qui étant coupé en cinq parties, en foutiendroit cent; parce que chaque morceau féparé fera foui en état de porter un poids de vingt livres.
- Obfervex que pour charger tous les Ren-fors fufpeiidus à un conducteur , il faut que la furface extérieure de chaque' Renfort perde autant de feu électrique que fa furface intérieure en a reçu : on peut donc inférer de cette expérience, qu'il n'y a réellement pas plus de feu éleétrique dans un Renfort, lorsqu’il eft chargé, qu’il n’y en avoit lorsqu’il ne l’étoit pas.
- Obfervez encore que pour charger ces Renforts, il faut que la furface extérieure du dernier communique avec le plancher; car li le feu électrique de cette furface ne pouvoir pas être transmis plus loin, aucun des Renforts ne pourroit être chargé ; parce qu’aucun d’eux 11e pourroit transmettre à fon fuivant le feu électrique de fa furtace extérieure: d’où il fuit, qu’un Renfort qui ell parfaitement ifolé, ne peut jamais être chargé, vu qu’il 11e peut transmettre le fluide éleétrique de fa furface extérieure à d’autres corps transmettons.
- CXLII.
- Un Renfort qui a été chargé, fe trouve dans une efpece d’état violent ; car fa furface intérieure, que je nommerai la furface A, eft tellement furchargée, quelle elt tou-
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- te difpofée à rejetter l'excès de fon fluide éleélrique: l'autre furface au contraire, que je nomme furface B , étant dépourvue du feu éleélrique qui convient à fa nature, en eft affamée & parconféquent toute prête à en recevoir autant qu’il lui en manque : mais cette derniere furface B ne peut en recevoir, que l’autre furface A n’en rejette ; & celle-ci n’en peut rejetter à moins que celle-là n’en reçoive tout autant dans le même inflant.
- Voici une comparaifon qui rend ce phénomène allez fenfible ; lorsqu’on bande un arc avec effort, il faut, pour qu’il puiffe fe rétablir dans fon état naturel, que le coté convexe qui a été bandé & tendu, fe reffer-re, & que le côté concave qui a été reflerré, s’étende : fi l’un de ces deux effets rencontre un obftacle, l’autre ne fauroit avoir lieu.
- Obfervez que le reffort de l’arc eft également éiallique, foit qu’il foit bandé, foit qu’il ne le foit pas. On ne lui donne point l’élafticité en le bandant; tout ce qu’on fait alors, c’ell détendre les parties d’un côté& de refferrer les parties de lautre ; & par là on met l’arc dans un état de violence capable de le faire agir avec beaucoup de force pour reprendre fon état naturel.
- Il en eft de même du Renfort} on n’augmente point la portion de fon feu éleétri-que en l’éleélrifant ; mais on fait enforte qu’un côté en a plus que l’autre, & par là on met le feu éleélrique dans un état de violence capable d’agir avec force pour rétablir
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- blir l’équilibre dans les deux furfaces du Renfort.
- CXLIII.
- La force totale du Renfort réfide dans le verre même, & non dans la garniture ou armure en contaét avec la fuperficie du verre. L'armure intérieure ne fert qu’à communiquer le feu éleétrique à la furface intérieure du verre ; & l'armure extérieure n'eft def-tinée qu'à recevoir le feu éleétrique qui eft repouffé de la furface extérieure du verre : nous en allons donner la preuve par l’expérience qui fuit.
- Soit un Renfort en forme de bouteille ordinaire; empliffez ce Renfort d’eau commune jusqu’à la hauteur de l'armure extérieure ; chargez cette bouteille ; puis enlevez le bouchon avec fon crochet, & après avoir faifi cette bouteille par fon armure extérieure, verfez toute l'eau quelle contient, dans une autre bouteille femblable armée par dehors & ifolée. Enfin prenez cette demiere bouteille à la main & plongez dans l’eau quelle contient, un fil de laiton : dans ce cas, vous ne recevrez point la commotion éleétrique ; donc le feu éleétrique ne réfidoit pas dans cette eau.
- Après cette première expérience, revenez à la première bouteille, & empliffez la d'une eau fraîche ; prenez cette bouteille à la main, & portez de l’autre main un fil de laiton fur l’eau de cette bouteille. Dans ce fécond cas, il fe fera une explofion & vous M 4 ref-
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- repentirez le choc électrique : donc la force de la bouteille réfidoit uniquement dans le verre: l’eau qu’on y a verlée , ne fervoit dans cette occafion que de corps conducteur ou d’arinure, pour faire paffer tout l’excès du feu raffemblé fur la fuperficie intérieure du verre, à la furface extérieure du même verre.
- On peut faire avec un carreau de verre une expérience allez femblable à celle qu’on vient de rapporter: pofez fur la main un carreau de verre; mettez fur ce carreau une feuille d’étain ou une plaque de métal quelconque, & électrifez cette plaque qui doit être plus petite que le carreau de verre : Si enfuite vous touchez cette plaque du bout du doigt de l’autre main,vous recevrez le choc électrique.
- Après cette première expérience, faites en une fécondé : prenez deux plaques de métal & mettez entre deux un carreau de verre qui déborde ces plaques de quelques pouces: enfuite pofez ce carreau ainfi armé, fur la main; & après que vous aurez fait éleétrifer la plaque fupérieure , enlevez la adroitement, au moyen de trois fils de foie que vous y aurez attachés. Par cette dernière opération, le feu électrique qui pourvoit encore fe trouver fur cette plaque, fera enlevé avec elle,& le verre ne donnera plus que.de petites étincelles dans les endroits où l’on le touchera du doigt de l’autre main.
- En-
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- Enfin replacez adroitement furie carreau de verre la même plaque métallique qu'on aura déféleélrifée en la touchant du bout du doigt : alors on recevra la commotion dès qu'on portera le doigt de l’autre main fur cette même plaque. Cette fécondé expérience prouve bien clairement que la force du Renfort réfide uniquement fur la fuperficie du verre, & que les armures ne font requi-fes, comme l’armure desaimans, que pour réunir les forces des différentes parties, & les raffembler dans l’endroit qu’on fe propofe. Car il faut obferver, que c’eft une des propriétés des corps transmettans, que tout le corps reçoit ou donne dans un inlîant tout le feu électrique qui eft donné ou enlevé àquel-qu’ une de fes parties ; & c’eft par cette rai-fon, qu’il fuffit de toucher en un feul endroit chaque armure d’un Renfort chargé, quelque grand qu’il foit, pour enlever à la furface intérieure tout l’excès de fon feu, & le rendre au même inftant à la furface extérieure. On a déjà dit que la force ou l’im-pétuofité de l’explofion étoit proportionelle à la grandeur des Renforts. Mr. Dalibar.i avec une glace de 35 pouces de hauteur & d’autant de largeur, dont les deux furfaces étoient armées, a fouventpercé jusqu’à 160 feuilles de papier.
- CXLV.
- On a fait mention, (paragraphe CXXVT.) d’une roue inventée par Mr. Franklin : cette roue ne reçoit & 11e continue fon mouve-
- M s ment
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- ig<5 De la Bouteille.
- ment de rotation que par la feule force de leledricité. Voici en quoi confifte le médian i fine de cette roue, à laquelle Mr. Franklin donne le nom de tourne- broche éleélrique ; parce qu’on pourroit, dit - il, la faire fervir à tourner la broche. (Fig. 54. PL VI.) Une fléché de bois élevée perpendiculairement, traverfe le centre d’une planche mince de figure ronde & d’environ douze pouces de diamètre : l’extrémité inférieure de cette fléché qui eft de fer, eft terminée en pointe, & repofe fur une plaque de métal; la partie fupérieure de la même fléché eft auiïi de fer & fe trouve foutenue dans une fituation verticale en traverfant un petit trou pratiqué dans une plaque métallique. Environ 30 rayons d'égale longueur, faits d’un carreau de vitre coupé en bandes étroites , forcent horizontalement de la circonférence de la planche fur laquelle ces rayons repofent; enforte qu’ils excédent les bords de cette planche d’environ quatre pouces. Sur l'extrémité faillante de chacune de ces bandes de verre eft fixé un petit dé de laiton. Lorsque tout eft ainft difpofé, on place près de la circonférence de cette roue, un Renfort éleétrifé à l’ordinaire: alors le crochet ou le bouton du Renfort attire le dé le plus proche , & commence ainfi à mettre la roue en mouvement: le dé à fon paflage reçoit une étincelle & eft auflitôt chaffé; car ayant été éleétrifé par cette étincelle , il doit être repoufTé. Cependant un autre dé s’approche du bouton du Renfort, & en eft de
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- de même attiré, puis éleétrifé & enruite re-poufTé comme le premier dé. La même choie arrive fucceffivement à tous les autres dés. Après que tous les dés ont paffé de la forte devant le bouton de ce Renfort, le mouvement de la roue devroit ceffer, parce que le bouton du Renfort ne peut plus attirer les dés, vû qu’ils font tous éleélrifés. Mais on obvie à cet inconvénient en plaçant près de la même circonférence un autre Renfort chargé négativement : car alors tous les dés que le Renfort pnfitif a éleélrifés & enfui te repoufles plus loin, fe trouvent de nouveau attirés les uns après les autres par le Renfort négatif, & cette fécondé attraction double & accéléré le mouvement de la roue. Outre cela, les dés en paflant devant le bouton de ce Renfort négatif, lui lancent non feulement l’excès de leur feu éleétrique, mais encore une partie de leur feu naturel ; ainfi ces dés après avoir palfé devant ce Renfort négatif, fe trouvent éleélrifés en-moins, & parconfé-quent encore plus propres à être attirés une fécondé fois par le Renfort pofitif C’eft ainlî que le mouvement de la roue continue auf-û longtems que l’éleélricité des Renforts n’eft pas épuifée. Au refte cette roue accéléré tellement fa marche qu’elle fait douze ou quinze tours dans une minute.
- CXLVI.
- On peut aulïi faire une roue éleélrique . qui tourne d’elle même , fans recevoir Ion mouvement d'aucune force étrangère ; & c’eft
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- en cela qu’elle paroit plus finguliere & plus foi-prenante : elle eit contlruite fur les mêmes principes que celle donc on vient de parler: en voici la defcription, (Fig. 5-5.
- PI. VII.)
- Prenez un difque de verre mince de 18 pouces de diamètre, doré des deux côtés , à qn efpace de deux pouces près, qui 11e doit point l'être au tour des bords tanc Jupérieurs qu’ inférieurs. Au centre de ce difque de verre, il faut malliquer de chaque côté une demi-boule de bois doré, & au centre de chaque demi-boule fixez un gros fil de laiton de 8 à 10 pouces de longueur qui formera l’axe du difque de verre qui doit tourner horizontalement. La pointe inférieure de cet axe repofe fur une piece de cuivre maltiquée fur un morceau de verre ; & l’extrémité fupérieure du même axe traverfe un trou pratiquée dans une piece de laiton qui eft aufii maftiquée fur un morceau de glace de quelques pouces de diamètre & percée d’un trou. Il faut avoir foin de garnir l’extrémité fupérieure de cet axe d’un bouton de cire, afin que le feu éledri-que ne s’échappe point par cette extrémité.
- Sur la table qui foutient cet appareil, font fixés circulairement douze petits piliers ‘ de verre , à la diftance d’environ quatre pouces l'un de l’autre, & l’on met un dé de laiton fur le fommet de chaque pilier: après quoi on place fur le bord du difque de verre une balle de plomb, qui doit communiquer par un fil d’archal ou autrement à la do-
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- dorure fupérieure du difque : à fix pouces de diftanee environ de cette balle, on en place une fécondé fur le même difque ; mais cette demiere balle doit communiquer par une bande de feuille d’étain avec la furface dorée inférieure du difque. Tout ayant été ainfi arrangé, on établit une communication entre le plancher & la partie inférieure de l’axe du difque, & enfuite une autre entre le eondudleur & l’armure fupérieure du même difque ; puis on éledrife cette armure jusqu’ à. ce quelle ait fa charge complette: enfin fi vous otez la communication établie avec le conducteur, comme aufii celle du plancher avec l’armure inférieure du difque, la roue commencera à s’ébranler, & la balle éleétrifée eh-plus s’avancera vers le dé le plus proche, l’éleétrifera en paflant, & en fera enfuite repouffée & forcée de s’en éloigner : Pour lors le dé de ce premier pilier fe trouvant éledrifé par l’étincelle qu’il a reçue, attire la fécondé balle qui eft éledrifée en-moins, parce quelle communique à la furface négative du difque, & lui lance l’excès de fon feu éledrique, & même quelque chofe de plus; ce qui eft caufe que ce dé pafTe alors d’une éleâxicitépofitive à une électricité négative.
- Ce qui arrive à l’égard de ce premier pilier, arrive dé même fnccefiivement aux autres onze piliers ; enforte que le difque de verre tourne avec beaucoup de viteife pendant une demi-heure, foifant 20 tours dans une minute; ce qui fait 600 tours ;& ne cefte que
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- que lorsque le feu éleétrique fe retrouve ea équilibre fur les deux furfaces du difque. La balle qui communique à la furface fupérieure du difque, donne dans cet intervale aux dés 7200 étincelles, & l’autre balle, en paffant de même fucceflivement devant les mêmes dés, en reçoit tout autant.
- Il faut avoir l'attention que les piliers & les dés fe trouvent dans un cercle régulier , afin que les balles de plomb pafTent toujours à une petite diftance de chaque dé.
- Si au lieu de deux balles de plomb, on en plaçoit huit fur le difque, qui communi-quaflent alternativement avec la furface fupérieure & inférieure, la force ou la viteffe de la rotation augmenteroit confidérablement; mais fon mouvement ne durerait pas fi long-tems.
- En appliquant une pareille roue à un fyftême de Copernic, toutes lesplanettes feraient leur mouvement au moyen de l’électricité; & qui fait, dit Mr. Franklin, fi le-ledricité n’eft pas en effet le puiffant moteur des planètes de notre monde?
- Si au moyen d’une femblable roue, on venoit à bout de faire tourner fur fon axe le globe de verre d’une machine éleétrique, & que le conduéteur adapté à ce globe continuât d’éleétrifer la furface fupérieure du disque, ii parait que la rotation ne cefferoit point: du moins continuerait-elle aufli long-tems que le tems feroit allez favorable à l’é-leétricité, pour que le globe frotté pût élec-
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- trifer le conducteur & la furfàce fupérieure du difque.
- Il faut obferver dans l’expérience qu’on vient de détailler, que chaque étincelle tirée de la furface fupérieure du difque doré, fait un trou dans la dorure, & quelle la déchire en s'élançant fur le dé d’un pilier: on peut inférer de là, que le fluide éleétrique n’eft pas accumulé fur cette dorure ; mais qu’il l’eft fur la fuperficie du verre même.
- Mr. l’abbé Herbert Profefleur de phyfi-que à Vienne , vient d’éxécuter les deux roues éledriques dont j’ai donné la delcrjp-tion ; elles different cependant en quelque chofe de celles de Mr. Franklin; mais elles font conltruites fur les mêmes principes; & il paroit que les changemens que ce Profef-feur a jugé à propos d’y faire, contribuent à faciliter la rotation.
- CXLVII.
- On a déjà fait voir par quelques expériences, que deux corps qui font éleCtrifés en-moins, fe repouffent mutuellement, comme ceux qui font éleCtrifés en-plus: en voici une nouvelle preuve.
- Placez une boule de métal fur un corps ifolant, & faites enforte qu’une petite boule de liege fufpendue par un fil de foie, vienne toucher la boule métallique. Prenez un Renfort à chaque main dont l’un foit éleCtri-fé par le crochet, & l’autre par le côté extérieur. Approchez le crochet éleCtrifé pofi-tivement de la boule de métal, & il leleCtri-fera
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- fera en-plus & le liege fera repouffé : enfuite portez fur la boule de métal le crochet du Renfort éleétrifé en - moins , & cette boule lui lancera une étincelle; après quoi le liege fe rapprochera de la boule. Mais fi l’on porte une fécondé fois ce crochet négatif fur la boule de métal, pour en tirer une nouvelle étincelle; dans ce cas , la boule de métal, après avoir donné une fécondé étincelle, fe trouvera elle-même éledlrifée en-moins , & le liege fera repouffé.
- Si après cette première expérience, on revient au Renfort éleétrifé en-plus, & qu’on en applique le crochet à la boule métallique éleétrifée en-moins, il partira de ce crochet une étincelle, qui rendra à la boule le feu éleétrique dont elle avoit été privée par l’étincelle qu’elie avoit lancée au crochet négatif: ainfi cette boule fe retrouvera rétablie dans fon état naturel, & parconféquent le liege fe rapprochera de la boule.
- Enfin donne7. à cette boule de métal une fécondé étincelle avec le crochet éleclrifé en-plus , afin de lui donner une furabondance de feu éleétrique, & dans i’inftant même le liege fera encore repouffé. On peut répéter cette expérience tant que le feu éleétrique 11’a pas repris fon équilibre dans les furfaces des Renforts.
- CXLVIII.
- Il eft un moyen de charger l’intérieur d’un Renfort avec fon propre feu éleétrique; c’aft à dire de faire pafifer dans l’intérieur du Ren-
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- Renfort le feu éledrique qui elt propre à fa furfaee extérieure: Pour cela,
- Etabliffez le couffin frotteur fur un corps jfolant; alors s’il n'y a point de pointes fines , de filamerts, ou de poils fur le couffin, (à quoi il faut bien prendre garde) vous ne pourrez tirer du condudeur que fort peu d’étincelles j parce que le couffin étant ifolé,ne peut lui fournir qu'une très petite quantité de feu éledrique: ainfi on tenteroit inutilement de charger un Renfort en-plus, en en pré-fentant le crochet au condudeur. Mais on parviendra à charger ce Renfort, fi après l’avoir fufpendu au condudeur, l’on établit une communication entre fon armure extérieure & le couffin ifolé ; ( Fig. 56. PI. VII. ) car dans ce cas, le couffin frotteur tirera de l’armure ex-térieure du Renfort tout le feu éledrique né-ceflaire pour éledrifer l’intérieur du même Renfort : ainfi il fera chargé de fon propre feu ; puisque nul autre ne peut y entrer, tandis que le couffin relie ifolé.
- Cette expérience prouve bien fenfible-ment l’imperméabilité du verre , & eft en même tems bien propre à démontrer, qu’un Renfort ne contient pas plus de feu quand il a été chargé , que lorsqu’il ne letoit pas encore. Elle fait voir outre cela, de la maniéré la plus claire, que ce n’etl qu’en privant la furfaee extérieure du Renfort de fon feu éledrique naturel, c’eft à dire en la rendant négative , qu’on parvient à charger fa furfaee intérieure d’une plus grande quantité de feu éledrique,
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- De la Bouteille CXLIX.
- Quelques phyficiens ont fouteau que le fluide éledrique pouvoit pénétrer dans le verre & pafl'er au travers de fa fubftance pour fe rendre d’une furface à l’autre : mais ce fentiment paroit peu vraifemblable ; cent expériences prouvent même le contraire; celle de Mr. Priejlley eft une des plus décifives.
- Il éleclrifa un tube de verre intérieurement & le fcella enluite hermétiquement; Après l’avoir laiflé dix mois dans cet état, il l’ouvrit & ayant verfé dedans, une certaine quantité de fines dragées de plomb, il trouva qu’il contenoit encore une fort bonne charge; car il reçut une commotion confidé-rable ; d’où il conclut que les furfaces de ce verre étant refiées éledrifées, l’une en-plus & l’autre en-moins pendant un efpace de dix mois, le fluide n’avoit pu paffer d’une fur-face à l’autre, & parconféquent que le verre étoit imperméable au fluide éledrique.
- Quoiqu’il en foit, il eft cependant certain que le verre perd fa qualité d’imperméabilité, quand on le chauffe fortement; fans doute, parce que la chaleur dilate alors aflëz fes pores,pour qu’ilsIaiffent un paflage libre au feu éledrique. Pour en être convaincu , faites l’expérience fuivante.
- Mettez de l’eau bouillante dans une bouteille d’un verre mince , revêtue en dehors d’une feuille de métal, & il ne fera pas pof-fible de charger cette bouteille ; parce que tout le fluide éledrique que vous lui com-muni-
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- iminiquerez, patte, félon toute apparence, au travers du verre avec beaucoup de facilité.
- On a mis une femblable bouteille à une autre épreuve, en effayant de faire palier au travers, toute l’explofion d’un Renfort d'une grandeur médiocre ;& l’effet répondit parfaitement à l’attente ; car toute l’explofion tra* verfa librement la bouteille fans l’endommager d’aucune façon: mais lorsque cette bouteille fut entiéremen refroidie, on vint aifé-ment à bout de la charger comme à l’ordinaire.
- Obfervez encore que lorsque le verre eft trop épais, l’eau bouillante ne fuffit pas pour le rendre perméable au fluide éleétri que. Un verre trop épais n’eft de même, rien moins que propre à fervir de Renfort; parce que l'épaifieur du verre empêche le feu électrique qu’on veut communiquer à l’intérieur du Renfort, d’agir allez puifiamment fur celui de la furface extérieure, pour obliger ce dernier de s’éloigner de fa furface. Mais lorsqu’il s’agit de fe procurer un bon corps ifo-lant, l’epaifleur du verre ne peut qu’ être avantageufe.
- CL.
- Quoique tous les corps électriques ne puif-fent être éleétrifés que par le feul frottement; cependant ce frottement opéré à l’égard de plufieurs, des effets très oppofés à ceux qu’il produit à l’égârd des autres. Je m’explique; un globe de verre, de porce-
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- laine, le criftal & toutes les fubflanccs vi-trées, lorsqu'on les frotte, pompent le feu éleCtrique du couflin frotteur pour le transmettre au .conducteur. 11 n’en eft pas de même des autres c -rps éleSlriques, tels que font la foie, le foufre, la cire défpagne, l'ambre, la réfuie, le bois déflëché au four & quelques autres : toutes ces fubttances étant frottées, pompent le feu électrique du conducteur & le transmettent enfuite au couflin frotteur; enforte quelles éleCtrifent le conducteur négativement; & lorsque le couflin eft ifolé, elles éleCtrifent ce dernier positivement. Cette découverte s'eft faite à Philadelphie, & eft fondée fur les expériences fuivantes.
- CLI.
- Adaptez un globe de verre à l'extrémité d’un conducteur , & un globe de foufre à l'autre extrémité du même conducteur ; (Fig. 57- Pi- VU. ) Si l’on met enfuite les deux globes en mouvement, on ne tirera aucune étincelle du conducteur, à moins que l’un des deux globes ne tournât plus lentement, ou qu’il ne fût pas aufli efficace que l’autre; & même dans l’un & l’autre cas, l’étincelle qu’on tirera du conducteur 11’aura de force qu’à proportion de cette différence; enforte que fi on faifoit tourner les globes avec une viteffe égale, s’ils font égaux en bonté, ou fi l’on faifoit tourner plus lentement celui qui a le plus de vertu, le conducteur feroit hors d’état de fournir une feule étincelle; parce que le globe de foufre lui enie-
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- enlèverait exactement tout le feu électrique que le globe de verre lui aurait communiqué. Obfervez encore que dans ce cas, les couffins s’ils étoient.ifolés, auroient des électricités contraires ; car celui du globe de verre ferait négatif, & celui du globe de fou-fre ferait pofitif
- CLII.
- Ayez deux machines électriques, l’une garnie d’un globe de verre, & l’autre d'un globe de foufre. Electrifez à leurs conducteurs les crochets de deux Renforts, l’un au conducteur du globe de verre, & l’autre au conducteur du globe de foufre. Sufpendez une boulette de liege à un fil de foie & portez cette boulette entre les crochets des deux Renforts: alors vous obferverez que le liege fera alternativement attiré par ces crochets, & qu’il continuera de jouer, allant d’un crochet à l’autre, comme s’il fe trouvoit entre deux Renforts chargés par un globe de verre , dont l’un auroit été éle&rifé par le crochet & l’autre par l'armure extérieure.
- On aura une fécondé preuve, que les crochets des fus-dits Renforts font réellement éleélrifés, l’un en-plus & l’autre en-moins, fi celui qui tient ces deux Renforts en main par leur armure extérieure, approche leurs crochets l’un de l'autre ; car il recevra la commotion éledlrique, à moins qu’il n’ait l’attention de faire communiquer en même tems les deux armures extérieures.
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- CLIII.
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- ig8 De la Bouteille CLIII.
- Si l’on éleCtrife un Renfort avec un globe de verre, & qu’il faille par exemple ioo tours de ce globe pour le charger complet-tement ; alors ioo femblables tours d’un globe de foufre déchargeront ce Renfort, & ioo autres tours du même globe de foufre le chargeront de nouveau ; mais cette derniere charge fera négative : Cette expérience fup-pofe une égale bonté dans l’un & l’autre
- CLIV.
- Si un globe de foufre &un globe de verre , adaptés à une machine électrique, ont chacun un conducteur particulier, (Fig. 58-Pl. VII. ) & qu’on fufpende à l’un des deux conducteurs un Renfort, dont l’armure extérieure communique par une chainette à l'autre conducteur , dès qu’on mettra ces deux globes en mouvement, le Renfort fe chargera; car le globe de verre éleCtrifera en -plus, & celui de foufre éleCtrifera en-moins : donc fi le Renfort eft fupendu au conduCteua du globe de verre, l’intérieur du Renfort fera éleCtrifé & chargé en -plus ; mais s’il'eft fufpendu au conducteur du globe de foufre, l’intérieur de ce Renfort fera éleCtrifé en-moins.
- Lorsqu’on a parlé de l’aigrette électrique on a fait obferver, que quand on éleCtrife avec
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- avec un globe de veri'e un conducteur terminé en pointe émouffée , il en partoit une aigrette divergente en forme de cône, dont le fommet tient au conducteur & la bafe au corps qu’on préfente à quelque diftance de la pointe. Le phénomène eft tout différent quand on éleCtrife le conducteur avec un globe de foufre ; car dans ce cas, on n’ap-perçoit qu’une aigrette mince & courte.
- Si l’on éleCtrife avec le globe de verre un conducteur dont l’extrémité eft arrondie, & qu'on lui préfente la pointe d'une aiguille, ( Fig. 59. PI. VII. ) alors le feu élecftrique qui s’élance du conducteur fur cette pointe, au lieu de diverger, par oit converger pour arriver à la pointe de l'aiguille; & l’onn'ap-perçoit qu’une aigrette fort mince & très courte.
- Mais on obfervera le contraire fi le conducteur eft éleétrifé avec le globe de foufre ; car alors l’aigrette s’allonge & devient plus divergente , ayant la bafe du cône quelle forme, du coté du conducteur.
- La différence de ces aigrettes prouve, que lorsque le conducteur eft éleétrifé par le globe de verre, l’aigrette part de ce conducteur ; & que lorsqu’il eft éleCtrifé par un globe de foufre , l’aigrette fe porte fur le Conducteur: d’où il fuit, que dans ce dernier cas le conducteur fe trouve dans un état deleCtricité négative.
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- CL VI.
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- CL VI.
- L’expérience que nous allons rapporter a beaucoup de rapport à ce qu’on a dit, lorsqu’on a expliqué l'influence de l’éledri-cité fur les nuages; on n’en a point fait alors mention ; parce quelle fuppofoit la connoif-fance de la Bouteille de Leyde dont on n’a-voit pas encore parlé.
- Il s'agit dans cette expérience d’expliquer en quelque façon, le méchanifme qui réfout les nuages en pluie, lorsque le feu électrique palfe d’un nuage éledrifé en-plus à un autre nuage refpedivement éledrifé en-moins.
- Ayez deux difques de laiton ou de carton de deux pouces de diamètre; ( Fig. 60. Pl, VII. ) Du centre & au tour du centre de chaque difque, lufpendez avec des fils de foie longs de dix-huit pouces, fept petites boules de bois. Ces boules ainfi fufpendues formeront trois à trois des triangles équilatéraux , dont chacun aura pour fommet la boule qui fe trouve au centre. Trempez les boules de ces deux difques dans l’eau & retirés les auflitôt ; alors chaque boule humectée d’un peu d’eau, repréfentera l’air chargé des vapeurs de l’eau, Eledrifez un de ces affemblages de boulettes, & vous obferve-rez que fes fept petites boules fe repoufTe-ront l'une l’autre, & que les triangles s’élargiront.
- Dans la fuppofition que les deux affem-blages de fept boules chacun, repréfentent deux nuages, dont l’un eft éledrifé en-plut &
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- & l’autre fe trouve dans fon état naturel, fi vous amenez ces deux affemblages allez près l’un de l’autre, pour qu’ils fe trouvent dans lafpliere de l’attradion éleétrique, ils s’attireront l'un l'autre, & après le contad, vous verrez les boules qui s'étoient éloignées, fe rapprocher ; car voici ce qui arrive dans ce cas.
- Auffitot qu’une des boules éledriféess’eft approchée d’une autre boule non éledrifée, elle lui communique en la touchant, une partie de fon feu éledrique, & dans le même moment ces deux boules fe féparent, & revoient chacune à une autre boule de leur propre afiemblage, l’une pour communiquer à fa voifine le feu qu’elle à reçu, & l’autre pour en.recevoir; car cette derniere fe trouve alors dans le cas d’être attirée par une autre boule de fon afiemblage, qui pofiéde encore tout l’excès du feu éledrique qu’elle a reçu .* il fe fait donc alors une fécondé communication du feu éledrique;puis une troifieme, & ainfi de fuite. Ce qui fe parte dans cet afiemblage éledrifé , arrive de même dans l’autre ; ainfi les boules de chaque afiemblage donnent & reçoivent alternativement le feu éledrique, jusqu’à ce qu enfin l'équilibre fe trouve rétabli dans l’un & l’autre; c’eft à dire, jusqu’à ce que le feu éledrique foit également reparti aux boules de chaque afiemblage: mais tout cela fe fait avec une telle vitefle qu’elle paroît inftantanée: or dans la collirton, ces boules fe heurtent, & par le choc elles fecouent & N s font
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- font tomber leur eau en petites parties ; ce qui repréfente la pluie.
- Il faut obferver ici , que quoique les nuages éledrifés, & ceux qui ne le font pas, foient fouvent à une trop grande diftance pour s’éledrifer les uns les autres, ils ne laif-fent cependant pas de s'attirer & de fe rapprocher en peu de tems : c’eft que la fphe-re de l’attradion éledrique s’étend beaucoup au de-là de la diftance requife pour donner ou recevoir le feu éledrique ; ainfi c’eft fouvent l’attradion éledrique qui raf-femble les nuages, & lorsqu'ils fe font une fois fufhfamment approchés, le feu éledrique paffant alors d’un nuage à l’autre, yoc-cafionne entre les parties de chaque nuage, des colliL ons & des chocs propres à en former des goûtes, qui par leur poids, font en-fuite forcées de retomber en pluie fur la fur-lace de la terre.
- CL VII.
- De tous les phénomènes éledriques que nous préfente le Renfort, celui dont nous allons parler eft certainement un des plus finguliers, (Fig. 61. PL VII.)
- Ayez deux appareils de timbres arrangés comme on l’a dit au paragraphe XXVIII. Placez entre ces deux appareils fur un corps ifolant, un Renfort éledrifé ; puis au moyen de deiix fils de laiton, établirez une communication entre le timbre ifolé d’un appareil & le crochet du Renfort; & une autre communication entre le timbre ifolé du fécond
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- feond appareil & l’armure extérieure du même Renfort : après cela , touchez avec le doigt un des fils de laiton, ou ce qui revient au même, le crochet du Renfort ou fon armure extérieure ; & dans le même inftant un des appareils fe fera entendre par le jeu de fes timbres, & ce fera toujours celui qui n’a point de communication avec votre doigt; ainfi, fi vous touchez l’armure extérieure ou le fil de laiton qui y eft attaché, ce fera l’appareil qui communique au crochet qui fe mettra en jeu; au lieu que fi vous touchez le crochet ou fon fil de laiton, ce fera l’appareil qui communique à l’armure extérieure qui fe fera entendre. Le merveilleux de ce phénomène 11e fe borne pas là ; car fi vous retirez le doigt pour le porter du crochet à l’armure extérieure, ou de cette armure au crochet, le jeu des timbres paffera fur le champ d’un appareil à l’autre. C'eft ainfi que par des attouchemens alternatifs, les appareils jouent alternativement ; & c’eft toujours celui avec lequel le doigt a une communication, qui cefle de jouer.
- Mais fi on s’avifoit de toucher en même tems aux deux fils de laiton qui communiquent aux timbres, dans ce cas on porteroit la peine de fon imprudence; puisque on re-cevroit alors le coup foudroyant, & par-là l’équilibre de feu éledrique fe trouveroit rétabli dans les deux furfaces du Renfort. Ce dernier phénomène furprend moins , parce qu'il eft une fuite de la théorie qu’on a donnée du Renfort.
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- Quant au jeu alternatif des appareils, on conçoit allez pourquoi les timbres qui répondent au crochet du Renfort, fe mettent enjeu, lorsqu’on touche à la furface négative du Renfort. Mais pourquoi l’autre appareil qui répond à cette furface négative,commence-t-il à jouer, auflitôt qu’on porte le doigt fur le crochet? Le voici; en touchant au crochet on intercepte fon attraélion; d’où il fuit que le jeu de l’appareil qui répond à ce crochet doit cefier : outre cela, par l’attouchement du crochet, on lui enleve fuccelli-vement fon feu éleétrique, & l’on force parla même, la furface négative du Renfort, d’attirer le petit battant de fon appareil pour en tirer autant de feu éleétrique que le crochet en communique au doigt de celui qui le touche,
- CL VIII.
- Prenez plufieurs carreaux de verre armés & garnis à la maniéré des Renforts, & pofez ces carreaux les uns fur les autres: éleétvifez le carreau fupérieur, & vous obfer-verez que fa furface inférieure fe trouvera éleélrifée négativement ; cela elt conféquent aux principes que nous avons établis. Mais ce qu’il y a de fingulier dans cette expérience, c’efl: que la furface fupérieure du fécond carreau fera en même tems aufli éleélrifée en-plus, & fa furface inférieure le fera en-moins ; & ainfi de fuite de tous les carreaux; deforte que la furface fupérieure de chacun de ces
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- carreaux fera éleétrifée pojitivment, & l’inférieure négativement.
- Cette expérience s’explique comme celle qu’on a rapportée, (parag. CXLI.) par laquelle on a éledtrifé piulieurs Renforts fus-fpendus à un conduite ur & pendant l’un à la queue de l’autre.
- Obfervez que lorsqu’on touche alternativement du bout du doigt les furfaces d’un pareil carreau ifolé, la furface touchée donnera chaque fois une étincelle : ainfi ce phénomène eft précifément le même que celui qu’on a rapporté ci-deffus dans l’expérience des timbres qui jouent alternativement.
- CLIX.
- On a déjà dit plufieurs fois dans le. cours de cet ouvrage, lorsqu’il étoit queftion du Renfort, que toute fa force réfidoit dans le verre même & non dans fa garniture ou armure. Les preuves qu’on en a données, font certainement d’un grand poids ; mais celle que nous devons à Mr. Wilcke eft convainquante. Elle confifte dans un carreau de verre que Mr. Wilcke eft venu à bout de charger comme un Renfort, fans le fecours d’aucune armure ; Pour cela,
- Adaptez au conducteur une pointe de métal fort aigue; puis ajuftez une autre pointe à l’oppofite , qui ne foit éloignée de la première que d’un pouce & qui communique avec le plancher. Pallez un carreau de verre entre ces deux pointes, & faites que les différentes parties du carreau, parlent
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- fuccelïivement entre ces pointes pendant qu’on éledrifera le conducteur: vous viendrez à bout par ce moyen, de charger le carreau aufii parfaitement que s’il étoit armé.
- Pour donner la commotion avec ce carreau, on le pofera fur la main d’une perfon-ne ifolée, & enfuite une autre perfonne ifo-lée de meme , mettra une main fur la fuperfi-cie fupérieure de ce carreau , ehforte que les deux mains en faffent toute l’armure. Si après cela, les deux fus-dites perfonnes établif-fent une communication entr’elles , en fe donnant chacune l’autre main, elles recevront la commotion électrique.
- Au lieu d’armer ainfi ce carreau avec les mains, on peut l’armer avec des plaques de métal: pour le faire commodément, placez d’abord le carreau ëledrifé fur un verre à pied; puis pofezadroitement par- deflus une plaque de métal fur laquelle vous aurez attaché un bout de cire-d’efpagne, afin de ne point toucher la plaque avec les doigts. Cela fait, pofez un autre verre à pied fur cette plaque, & retournez enfuite le tout, de façon que le verre à pied inférieur fe trouve en haut fur le carreau: enfin ôtez ce verre & mettez fur le carreau une autre plaque métallique: en armant ainfi ce carreau,on augmentera le nombre des points de contad des armures avec les deux furfaces du carreau, & parconféquent aulli la force de la commotion qu’on recevra, fi l'on touche en même tems à ces deux armures.
- Il
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- Il eft évident qu’il n'y a dans cette expérience que le carreau de verre qui ait été éleélrifé; ainfi le pouvoir de donner le coup éleétrique réfide dans le verre même, &non dans fon armure, qui ne fert qu’à réunir & à raffembier tout le feu éleétrique dans l’endroit qu’on a touché.
- CLX.
- Quelques phyiiciens ont alluré qu’on pouvoit donner la commotion électrique, même avec l’air; c'eft à dire, qu'en armanr les deux furfaces d’une couche d’air de bons corps trammettans, on pouvoit en former un Renfort propre à donner la commotion électrique. Ces phyficiens ont prétendu prouver leur opinion par l’expérience fuivante.
- Prenez deux planches quarrées & minces qui aient environ trois pieds de diamètre ; recouvrez toutes les furfaces de ces planches de feuilles d’étain ou de papier doré: fufpendez ces deux planches avec des cordons de foie, de maniéré que leurs plans foient parallèles & à un pouce de diftance l’un de l’autre: adaptez à chaque planche un fil de laiton , dont l’un communiquera avec le conduéteur, & l’autre avec le plancher. Après cela , faites agir la machine éleétrique, & lorsqu’une de ces planches fera éleétrifée , retranchez la communication de l’autre planche avec le plancher; fi enfuite vous portez un doigt fur la planche éleétrifée & en même tems une main fur l’autre planche , vous recevrez la commo-
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- De L’electricite
- tion. Dans cette expérience, l’air dit-on, tient la place d’un carreau de verre, & les deux planches font l’office des armures.
- Mais il me femble que cette expérience n’eft pas aulîi décifive, que l’ont penfé quelques phyficiens: Car je crois qu’on pourroit l’expliquer de la même maniéré qu’on a expliqué le phénomène rapporté au parag. XXX. En effet, pourquoi ne pourroit - on pas dire que l’athmofphere électrique de la planche éleétrifée en-plus, a repouffé le feu éleétrique naturel de l’autre planche, & la éleétrifée par-là négativement ? car dans ce cas, dès que je touche à ces deux planches en même tems, j établis une communication en- • tr’elles; ainfi il eft tout fimple, que le fluide éleétrique de la planche éleétrifée en - plu!,... paffe avec impétuofité au travers de mon corps, pour fe mettre en équilibre dans les deux planches.
- DE L'ÉLECTRICITÉ DE LA TOURMALINE. CLXI.
- e verre n’eft pas le feul corps, dont les
- furfaces oppofées puiffent être en même tems éleétrifés, l'une en-plus, & i’autre en-moins. La Tourmaline a la même propriété; elle a même cet avantage fur le verre,
- qu’on
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- de la Tourmaline. 209
- qu’on n’cft point obligé, pour l’éleélrifer de la forte , d’armer fes furfaces , comme on fait celles du verre;d’où il fuit que la Tourmaline peut être confidérée, dans certaines circonftances, comme un Renfort naturel, c'eft à dire, préparé par la nature même.
- La Tourmaline eft une pierre encore peu commune; la première qui parut en Europe , y fut apportée au commencement de ce fiecle. On dit que les Hollandois la tirent de l’isle de Ceylan. Cette pierre eft transparente : quand on la chauffe dans la cendre, ou dans l’eau bouillante, & qu’enfuite on feiïùie pour la fécher, une des faces de cette pierre fe trouve alors éleétrifée en-plus, & l’autre face l’elt en-moins: mais pour cela, il faut que les faces de cette pierre aient été taillées convenablement; c’eft à dire de façon, que toute la partie de la pierre propre à le* iecSlricité pofitive , fe trouve fur une face & que la partie propre à féledricité négative, fe trouve exactement fur la face oppofée.
- Pour bien appercevoir les phénomènes de cette pierre , on l’enchaffe de maniéré, qu’elle puiffe tourner fur fon axe : par là on aura la facilité d’éprouver en même-tems Vé-ledricité oppofée de chaque face. Lorsque la Tourmaline eft ainfi montée dans une bague , la chaleur du doigt eft fouvent fuffifante pour lui donner une électricité capable d’attirer & de repouffer les corps fort légers.
- CLXtl
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- De L'elkctricite' CLXII.
- Faites chauffer la Tourmaline dans de l'eati bouillante ou dans de la cendre chaude; approchez la enfuite d’une très petite boule de fureau fufpendue à un fil de foie : alors fi vous présentez à cette petite boule la face pojitive de la Tourmaline , la petite boule seledrifera en-plus, & vous en demeurerez convaincu , en préfeutant la meme petite boule au crochet dun Renfort éledrifé à l’ordinaire ; car elle fera auffitôt repoulfée par le crochet.
- Après cette première expérience, pré-fentez l’autre face de la Tourmaline à la même boule de fureau qui eft éledrifée en-plus, & cette boulette fera attirée par cette furfa-ce ; ce qui prouve que cette furface eft nèga^ tive ; puisque fi elle étoit pofitive, la petite boule feroit repoulfée.
- CLXIII.
- Après avoir fait chauffer la Tourmaline comme auparavant, préfentez fon côté néga* tif à une boulette de fureau, qui le trouve dans fon état éledtrique naturel. Dans ce cas, la boule fera d’abord attirée; puis re-* pouffée; mais elle fe trouvera éledrifée en-moins ; car fi on lui préfente le côté négatif d’un Renfort chargé, elle fera repoulfée.
- CLXIV.
- Ayez deux Tourmalines ; fufpendez en une à un fil de foie, & faites la chauffer
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- de la Tourmaline. 211
- dans l'eau bouillante; chauffez de même l’autre Tourmaline, & efluyez légèrement l’une & l’autre i après cela, approchez celle que vous tenez à la main de celle qui efl fufpen-due : dans ce cas, fi vous avez préfenté le côté négatif de celle que vous tenez à la main au côté négatif de l’autre, cette derniere fe retournera d'abord pour préfenter fon côté poftif au côté négatif de la pierre que vous avez en main , & s’en approchera enfuitê pour la joindre.
- Après cela, préfentez le coté poftif de la Tourmaline que vous avez en main , au côté pnfttif de celle qui efl fufpendue, & celle-ci fera repouffée, fe retournera avec vivacité; puis s’approchera pour appliquer fon côté négatif au poftif de la Tourmaline que vous avez en maim
- Tous ces phénomènes ne permettent pas de douter que la Tourmaline chauffée, n’ait iin côté poftif & un autre négatif.
- Obfervez que ces phénomènes paroiffent avoir beaucoup d’analogie avec ceüx que préfente un aimant fufpendu à un fil, & auquel on préfente alternativement les differens pôles d’un autre aimant ; car les effets fe-roient exactement les mêmes.
- CLXV.
- On a dit que la Tourmaline étant chauffée s’éleétrifoit en fe refroidiffant: elle s’é-ledrife de même par le frottement. Mr. Canton a encore obfervé que la Topaze du Brefil avoit la même propriété que la Tour-
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- De L’electricite'
- maline ; & Mr. Vilfon a trouvé enfuite que d’autres pierres précieufes s’éledrilbicnt aufli de la même maniéré.
- CLXVT.
- L’expérience fuivante, que Mr. i'ingen-housz fit il y a quelque tems en ma préfence, prouve encore, on 11e peut pas plus fenfi-blement, que la Tourmaline étant chauffée, a une de fes faces pufitive & l’autre négative. Voici en quoi confifte l’appareil de cette nouvelle expérience ( Fig. 62. Pl. VII. )
- Sur un pied ifolant, tel que peut être un morceau d’un bâton de cire d'efpagne, fixez horizontalement deux fines épingles recourbées de façon, que leurs pointes qui prominent, foient oppofées l’une à l’autre, & fe trouvent à la diftance environ de trois ou quatre lignes l’une de l’autre: les têtes des épingles doivent auiïi déborder & fe trouver à la même diftance l’une de l’autre. Après cela, faites enforte qu'une très-petite boule de fureau, fufpendue à un fil de foie très fin, fe trouve entre les deux fus-dites têtes d’épingles. Enfin , après avoir fait chauffer la tourmaline dans l’eau bouillante, ou dans la cendre chaude , placez cette Tourmaline entre les deux pointes des épingles , de maniéré que chacune de ces pointes fe trouve vis-à-vis l’une des faces de la Tourmaline: par cet arrangement, l’une des pointes fe trouvant oppofée à la face pojîtive de la Tourmaline, & l’autre à la face négative, la petite boule fufpendue entre les deux tê-
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- de la Tourmaline.
- 213
- res des épingles, le mettra en jeu en allant alternativement de l’une à l’autre, jusqu’à ce que l’équilibre éledtriqne foit rétabli dans les deux furfaces de la Tourmaline. Ainfi cette expérience préfentera le même phénomène dont on a parlé au paragraphe CXXXI, où l’on a obfervé qu’une boule de fureau joue entre les boutons de deux Renforts, dont l’un eft chargé positivement & l'autre négativement , auffi long-tems que l’équilibre n'eft pas rétabli dans l’un & l’autre Renfort.
- DES EFFETS DE L'ÉLECTRICITÉ RELATIVEMENT À LA TRANSPIRATION ET À LA CIRCULATION DU SANG.
- CLXVIT.
- Les expériences de Mr. l’abbé Noïïet pa-roilfent décilives pour prouver que l'é* leétrieité augmente fenfiblement la transpiration dans les animaux. Voici celles qu'il a faites pour s’en affiner.
- Il choifit plufieurs paires - d’animaux de diverfes efpeces & entre autres, des chats, des pigeons, des pinçons & des moineaux: il les pefa enfuite tous féparément , & en éle&rifa un de chaque paire pendant cinq ou
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- •2i4 Des EîfEETS UK l’elect.
- fix heures de fuite : après quoi il les pela de-nouveau. Le chat éledrifé fut communément de 65 à 70 grains plus léger que l'autre. Le pigeon de 35 à 38 grains. Le pinçon & le moineau de 6 à 7 grains. Il répéta enfuite les mêmes expériences, en éledrifant l’animal de chaque paire qui n’avoit pas été élec-trifé la première fois ; & malgré quelques petites différences qui fe trouvèrent dans les réfultats, l'animal éleétrifé fut conflamment plus léger que l'autre.
- Mr. l’abbé Nollet calcula enfuite quelle quantité chaque animal avoit perdu de fon poids par l’éledrifation; & il fe trouva qu’elle avoit enlevé au pinçon près d’une 50,,. partie de fon poids , & au pigeon la 140c. partie.
- Après ces expériences, il en fit une autre fur un jeune homme & fur une jeune femme de l’age de 20 à 30 ans. Après les avoir éledrifé pendant cinq heures de fuite, il fe trouva que ces perfonnes avoient perdu plu-fieurs onces de leur poids, plus qu elles n’en auroient perdu , fi elles n’euifent pas été éledrifées. Il obferva de plus que ces per-fonnes n’en éprouvèrent aucune efpece d’im commodité ; elles fe trouvèrent feulement un peu épuifées , & elles avoient gagné de l’appétit; d’ailleurs elles ne fe fentirent pas-plus échauffées, & il ne parut en aucune far Çon que leur pouls en fût accéléré.
- D’autres phyficiens curieux de s’affûrer par eux-mêmes , fi l'éledricité n’accéléroit point le mouvement de la circulation du
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- SUR LES COUPS V1VANS. 2IJ
- l'ang , obferverent foigneufement chacun à part, fur le mouvement d’un pendule , la duiée de cent battemens d’artere ; enfui te ils seiedriferent l’un après l’autre pendant un quart d’heure, & après avoir compté le nombre des battemens de leur artere, ils le trouvèrent augmenté d’environ un feptieme : ainfi celui à qui le pouls avoit d’abord battu 72 fois dans une minute , éprouva 84 battemens d’artere après l’éledrifation. Cette expérience fut faite en 1749. Mais d’autres phyficiens ayant fait depuis les mêmes expériences , ne trouvèrent point une accélération aufli feniible dans le pouls.
- On a aufli éledrifé des plantes: Mr. Jal-làbert & quelques autres phyficiens, après avoir examiné l’effet de l’éledrifation fur les végétaux, fe convainquirent par leurs expériences , que l’éiedricité hâtoit & augmen-toit la végétation des plantes.
- Obfervez qu’il 11e s’agilfoit dans toutes ces différentes expériences que d’une fimple éleélrifation ; o’eli à dire de l’éiedricité que peut acquérir tout corps transmettant , lorsqu’il communique à un condudeur qu’on éledrife.
- Les effets de l’éiedricité font bien différents lorsqu’on y emploie là Bouteille de Leyde; car ils font alors, comme on l’a dit plus haut, proportionels à la force de l’ex-plofion. Au refte il n’èfl pas douteux que la commotion éledrique réitérée à plufieurs re-prifes, n'ait opéré les plus belles cures, quand on a ffu en proportioner la force convenable
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- De lElectricité
- à l’efpece & au degré de la maladie. Les médecins verfés dans l’éledricité, fe fervent dans ces occafionsd’un Renfort préparé de façon qu ils donnent au choc électrique le degré de force précis qu’ils jugent convenable; ils peuvent même le modérer à un point qu’on peut 1 appliquer aux yeux, comme cela s'ell fait affez récemment à Vienne avec fuccès.
- DE L'ELECTRICITE MAGNETIQUE.
- CLXVIII.
- Les phénomènes électriques que nous avons rapportés, cauferent fans doute la plus grande furprife aux phyficiens qui en firent la découverte : mais de quel étonnement ne durent pas enfuite être frappés, ceux qui s'apper-çurent lespremiers, que l’éledricitéavoitaufli des rapports avec le magnétifme.
- Si l’on fait palier le coup éledriquepar une petite aiguille au moyen d’un Renfort confidérable, on donnera à cette aiguille la vertu & la diredion magnétique ; c’eft-à-dire, qu'elle fera mife par là en état d’attirer la limaille de fer, & de diriger l’une de fes extrémités vers le Nord, & l’autre vers le Sud, fi on la met à flot fur l’eau. Cet effet produit fur une aiguille, paroit expliquer ce qui eü arrivé à plusieurs croix de fer placées fur des clochers fort élevés ; car on a plufieurs relations, qui afiurent qu’on a trouvé de ces for-
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- Magnétique. 317
- fortes de croix, qui étoient aimantées: fi le fait efltel qu’on le rapporte, il eft bien vrai' femblable que ces croix ont pu être magnéti-fées par la foudre qui leur aura été lancée par quelque orage éiedrique. Quoiqu’il en foit, voici la maniéré dont il faut s’y prendre pour communiquer à une petite aiguille tou-tes les propriétés d’un aimant artificiel.
- Prenez, une petite aiguille, &.placez la de façon que l’une de fes extrémités foit tournée vers le Nord, & l’autre vers le Sud : élec-trifez en fuite plufieurs grands Renforts , & faites palier le coup éiedrique par l’aiguille, de maniéré qu’il entre par une extrémité, & qu’il refforte par l’autre. Obfervez que cette expérience éxige une explofion très-forte & très-violente; & c’eft là la raifon pour laquelle il faut y employer plufieurs grands Renforts. Mr. Franklin fefervoit de deux jarres dont chacune avoit une capacité de dix à douze pots.
- On a obfervé que le bout par lequel le feu éiedrique entre dans l’aiguille, devient le Sud de cette aiguille aimantée; car cette extrémité fe dirige alors toujours vers le Nord.
- Si l’aiguille avoit déjà été aimantée auparavant avec un aimant artificiel, & qu'on fit entrer le coup éiedrique par 1' extrémité de l’aiguille qui feroit tournée vers le Sud, dans ce cas, les pôles de l’aiguille changeront; car après 1‘explofion des Renforts, on trouvera que cette même extrémité fe dirigera vers le pôle du Nord. Obfervez que cette derniere expérience éxige une explofion encore plus forte que l’expérience précédente;
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- 2i8 De l'Electricité'
- car il eft plus facile d'aimanter une aiguille en l’éledrifan , que de changer par l’éledrifa-tion, les pôles de celle qui ell déjà aimantée.
- CLXIX.
- L'hypothefe de Mr. Franklin fur les rapports que le magnétifme a avec l’éledricité, eft très-ingénieufe. Il nous apprend lui-même qu’il en a l'obligation à Mr. Æpinus académicien de Petersbourg, lequel lui en a donné la première idée. L'extrait fuivant tiré d’une lettre que Mr. Franklin écrivit en 1773 au tradudeur de fon ouvrage, fuffira pour donner une idée de l’hypothefe de ce célébré phyficien.
- i°- Il exifte un fluide très fubtil , dit fluide magnétique, dans toute efpece de fer, & ce fluide eft également répandu dans toute fa fubftance, à moins quil ne foitforcé à l'inégalité par un pouvoir fupérieur à la force d'at-tradion, dont toutes les parties du fer font également douées,
- 2°- La quantité naturelle de fluide magnétique , contenue dans un morceau de fer, peut y être mife en mouvement, au point de fe trouver plus raréfiée dans un endroit, & plus condenfée dans l'autre; mais ce fluide ne fauroit en être tiré par aucune force qui nous foit connue : ainfi la totalité d’un morceau de fer ne peut point être mife dans un état négatif, c’eft-à-dire, qu’il ne peut jamais avoir moins de ce fluide qu’il n’en a naturellement. On ne peut pas non plus y en introduire une plus grande quantité , pour le
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- le mettre par là dans un état pofitif. Delà il fuit, qu’à eet égard le fluide magnétique propre au fer, a beaucoup de rapport au fluide éleétrique contenu dans le verre.
- 30. Obfervez, que comme on doit bien diftinguer un corps cleÉlrique d’un corps éleElrifé, il faut de même ne pas confondre un corps magnétique avee un corps magnèift ou aimanté. Le premier efl celui qui a fa portion naturelle de fluide magnétique répartie également à toutes fes parties; mais le corps magnétifé ou aimanté, eft celui dont le fluide magnétique efl; inégalement réparti aux parties de ce corps.
- 4°. Le fluide magnétique contenu dans une barre de fer tendre ou mol, eft mis en mouvement & fe partage inégalement, lorsque les extrémités de cette barre font tournées vers les pôles magnétiques de la terre ; parce que dans ce cas, fon fluide magné-? tique eft attiré ou pouffé facilement d’une des extrémités à l'autre ; ce qui continue aufli long-tems, que la barre de fer demeure dans la même pofition ; enforte que l’une de fes extrémités eft alors magnétique en ? plus , & l’autre magnétique en-moins: mais cet aimant paflager ceflfe de l’être, dès qu’on lui lait changer de fituation, en le tournant à 1’EJi ou à l'Oueft ; car alors fon fluide magnétique fe remet en équilibre en fe répandant également dans toutes les parties de la barre de fer,
- 50- Si le fer eft durci, comme l'acier, fon fluide magnétique eft plus difficile à être mis en mouvement; il faut alors ui;e force plus grarn
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- grande que le magnétifme des pôles de la terre pour l'émouvoir. (*) Mais lorsqu’une fois le fluide magnétique a été poufl"é & dirigé d’une extrémité vers l'autre, il ne lui eft pas facile de rétrograder, & voilà pourquoi une barre d’acier devient un aimant durable, dont un pôle eft aimanté en - plus, & l’autre
- 6° Une grande chaleur étant capable de dilater la fubftance de l’acier, en écartant les parties les unes des autres, le fluide magnétique trouve alors des paffages allez ouverts pour fe remettre en équilibre}; après quoi la barre ceiïe d’être un aimant.
- 7°- Une barre d'acier non aimantée, & mife dans une pofition, telle que ta prend l’aiguille d’une bouflole, devient un aimant durable, auflitot qu'après l’avoir chauffée, on faitenfortequelle ferefroidiffefubitement. La raifon en eft, que tandis que cette barre étoic dilatée par la chaleur, fa quantité naturelle de fluide magnétique a été facilement mife en mouvement par la vertu magnétique du pôle terreftre , & pouffé d'un bout de la barre à fautre; & qu’enfuite l’endurciflement & la condenfation produits par le refroidiffement fu’bit, fixent ce fluide dans la direction que la chaleur de la barre lui avoit permis de prendre; de maniéré, qu’il n’a plus, après le refroidiffement, la liberté de retourner à fa
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- fa première place pour fe remettre en équilibre dans toute la barre.
- 8°- Une barre d’acier non aimantée, & mife dans une direction parallèle à l’axe de la terre, peut aufii être aimantée, lorsqu’on frappe cette barre d’un bout à l’autre à grands coups de marteau. En voici la raifon: c’eft que les violentes vibrations qu'eJTuie alors la barre d’acier, en fecouent tellement les parties , qu’il en réfulte des interftices fuffifans, pour laifierun paiTage libre au fluide magnétique, qui eft attiré & pouffé d’un bout de la barre à l’autre par l'action du pôle magnétique de la terre. Mais jufques là , la barre d’acier n’elt qu’un aimant partager, & elle ne devient un aimant durable, que lorsque les parties de l’acier ceiïent d’être en vibration ; parce que la réunion de ces parties qui fe rapprochent les unes des autres, fait difparoitre les interilices dont on a parlé, & ne permet plus au fluide magnétique de fe répandre dans toute la fubllance de l’acier.
- 90, Un choc électrique qui traverfe une aiguille mife dans une pofition femblable, en dilate les parties pour un moment, & en fait par là-même un aimant durable, non en lui donnant le magnétifme , mais en donnant la liberté au fluide magnétique de l’aiguille, de fe mettre en mouvement, & de fe porter en plus grande quantité vers l’extrémité propre par fa fituation à être aimantée en-plus. Ainfi la production du magnétifme pofitif dans cette aiguille, n’elt qu’accidentelle à l’électricité; puisque toute autre caufe, qui auroit donné
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- le même degré de chaleur paffagere à cette aiguille, y auroit produit le magnétifme poji-tif& le négatif, tout aufli bien que le choc électrique.
- io°- Il réfulte de là, qu’il n’y a pas réellement plus de fluide magnétique dans une barre d’acier aimantée , qu’ il n y en avoir avant qu’elle le fût : fa quantité naturelle eft feulement déplacée, attirée & pouffée d’une extrémité à l’autre par la vertu magnétique du pôle terreftre. Et de là vient qu’un bon aimant, ou une forte garniture d’aimans artificiels, peut changer des milliers de barre d’acier en alitant d’aimans, fans leur rien communiquer de fon propre magnétifme; puisque cet aimant ne fait alors autre chofe, que de mettre en mouvement par la fridion, le fluide magnétique qui fe trouve déjà dans ces barres d'acier.
- ii°- Enfin quelque grande que puifle être ia vertu magnétique de l'aimant artificiel, dont on fe fert pour aimanter une autre barre d’acier, on ne peut jamais faire d’un certain morceau d’acier qu’un aimant d’une certaine force déterminée ; & cette force eft toujours rélative à la puiffance que peut avoir ce morceau d’acier, pour retenir le fluide magnétique dans la diredion qu’il a été obligé de prendre. Or cette puiffance eft différente & limitée très-diverfement dans chaque efpece d’acier; ainfi il ne faut pas s’étonner, que deux barres d’acier d'égale grolfetir & femblables en tout par leur extérieur & aimantées de la même façon avec le même aimant, acquièrent
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- rent cependant fouvent une force & une vertil magnétique très-différente : car il fuffit pour cela, que l'une de ces deux barres foit d’une efpece d’acier différente de celle de l'autre barre. *
- Au relie Mr. Franklin ne nous a point détaillé les différentes expériences, qui l’ont conduit à l’hypOthefe, dont on vient de donner le précis. Si ce favant a rencontré jufte, il eil clair qu’il n’y a point d’analogie & de rapport entre l’éleéhicité & le mag-nétifme.
- Quoiqu’il en foit, voici une expérience, que j’ai vu faire, il-y-a peu de tems, à Mr. d’Ingenhoufz: il me femble quelle prouve affez feniiblement que le fluide magnétique efl tout-à-fait différent du fluide électrique.
- Mr. d’Ingenhoufz, après avoir choifi deux corps légers, mobiles & également fufcepti-blés de magnétifme^t d’éledricité, commença par les magnétifer, & ces corps fe repouf-iérent aufiitôt l’un l'autre en vertu de la force répulfive qu’ils avoient reçue par le magné-tifme. Il éleétrifa enfuite ces mêmes corps, & la force delà répulfion éledriqueles força de s'écarter l’un de l’autre à une diftance encore plus confidérable.
- Après cela Mr. d’Ingelhoufz enleva à ces deux corps leur vertu magnétique , & leur éloignement dans le même inftant diminua exaélement d’autant que la force magnétique les avoit d’abord forcé de s’écarter l'un de l’autre; enforte que leur éloignement fe trou-va par là réduit au feul degré de force ré-
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- pulfive que l’éledrifâtion leur avoit communiquée.
- Enfin Mr. A'higenhoufz ayant de nouveau magnétifé & éledrifé ces deux corps, il leur enleva leur éledricité, & leur répulfion électrique cefia aufiitôt : car leur éloignement diminua alors précifement d’autant que la force éledrique les avoit écarté ; de façon que s étant un ppu rapprochés, la dillance de leur éloignement fut réduite au degré de force répulfive communiquée par le magnétifme.
- Il paroit bien par cette ingénieufe expérience , que le fluide magnétique n'a rien de commun avec le fluide éledrique ; car s’ils étoient le même fluide, on ne pourroit en enlever un, fans enlever l'autre en même
- DE L'ÈLECTÈoMETRE.
- CLXX.
- On donne le nom d'Eledrometre à un infiniment qui fert à mefurer la force de. l’éledricité. Cet infiniment eft particuliérement utile & même néceflaire aux phyficiens qui s’occupent de nouvelles recherches fur l’éledricité; puisqu’ils font fouvent dans le cas, qu'un degré d’éledricité de plus ou de moins, leur donne des phénomènes très-difFé-rens de ceux qu’ ils s’étoient propofé dans leur expérience. Ainfi pour obtenir le phénomène
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- De l'Electrometre.
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- nomene qu’ils ont en vue, il faut qu’ils aient un moyen de s’affûrer du degré d'éleétricité précifément requis & propre à l’expérience qu’ils fe propofent de faire.
- C’eft dans cette vue qu'on â imaginé des inftrumens pour mefurer la force de Î’éleétricité tant pofitivc que négative: Cet inftrumant eft d'autant plus indifpenfable pour certaines expériences délicates, que i’intenfité de l’électricité varie fouventd’un moment à l' autre. L'air, félon qu’il eft plus fec ou plus humide-, qu’il devient plus chaud ou plus froid, qu’il eft plus ou moins chargé de vapeurs ou d’ex-halaifons, occafionne de grandes différences dans la force de l’éleétricité. Un bon Elec-trometre obvie à tous ces inconvéniens i puisque dans quelque cas que fe -trouve l’éleétricité , on peut toujours connoître le degré précis de fa force au moyen de cet instrument.
- Il eft très-vraifemblable que les différentes opinions des phyficiens fiir divers phénomènes .éleétriques, n’ont eu lien, que parce que les uns ayant fait leurs expériences avec une plus forte éleétricité que celle qu'avoient les autres, ils ont eu des réfultats quelquefois tout oppofés. UnEleétrometre les eut bientôt mis d’accord ; parce qu’il leur' auroit fair voir, que la différence qui fe trouvoit dans les phénomènes qu'ils avoient obfervés, n’é-toit que l’effet des dîfférens degrés d’éleétricité , avec lesquels ils avoient fait la même expérience.
- Ou
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- On a imaginé des Eledrometres de différentes façons ; celui dont , nous allons donner la defcription, efl aifé à conftruire.
- CLXX.
- Süfpendez (Fig. 63. Pl. VII. ) une petite boule de fureauà un fil de. lin très-fin & très-délié* & ie plus égal que vous pourrez trouver; fufpendez ce même fil de lin avec un peu de cire d'Efpagne au centre d’un carreau ou difque de verre de quatre pouces de diamètre ; ce carreau de verre efl foutenu de coté par un petit montant de bois auquel il efl mafliqué. Au delïous du carreau de verre, placez verticalement une petite plaque ou difqüe de métal de deux pouces de diamètre: fixez ce difque métallique fur un pied ifolant, & faites enforte que la petite boule de fureàit fufpendue, touche le centre du difque métallique. Enfin établirez une communication âu moyen d'un fil'de laiton* entre ce difque métallique & le condudeur. Tout étant ain-fi arrangé, dès que vous ferez agir la machine éledrique , la petite boule de fureau s’é-ledrifera auffitot, & s'éloignera du difque de métal ; & fon éloignement fera toujours pro-pOrtionel à l’intenfité de l’éledricité, que le condudeur aura été en état de communiquer au difque métallique & à la petite boule. Si l'on colle fur la marge du difque de Verre une petite bande de papier qui foit graduée, c’efl*à-dire, divifée à la maniéré d'un quart-1 de-cercle, pour lors en obfetvant à quel degré! le fil de lin répond, lorfque la petite boule
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- De L'ELECTROMETRE. 22?
- boule de fureau s’éloigne de la plaque de métal, on connoitra par là-même le degré précis de l’éloignement de la petite boule, & par conséquent celui de la force & de l’inten-lité de l’éle&ricité.
- clxxi.
- Mr. le Rey eft l’inventeur d’un Eleélro* métré d’une autre efpece, qui eft aufli très-fini-pie & très-commode. Cet inftruntent eft conftruit de la maniéré fuivânte. (Fig. 64, PI. VII.) ^
- Dans un grand gobelet de verre bien ifolé & plein d’eau, on fait plonger une de ces fioles auxquelles on a donné le nom de pefe-liqueurs, dont le long col ou plutôt le tube eft gradué. Le gobelet fe recouvre) d'une plaque métallique percée à fon centre d’un trou de 3 ou 4 lignes de diamètre , a-finque le col de la fiole puiffe paffer à travers très-librement. La fiole doit plonger dans l'eau à une certaine profondeur, & doit être leftée de fapon. que fon extrémité inférieure foit fort près du fond du vafe, fans cependant y toucher: enfin on adapte au tube de la fiole une plaque circulaire de laiton fort mince, d’un pouce de diamètre, & l’on fait enforte que cette petite plaque parallèle au couvercle du gobelet, ne fe trouve qu’ à une ligne de diftance de la plaque qui couvre ce gobelet. Quand il ell queftipn de faire ufage de oet Èledrometre, on établitau moyen d’un fil d’archal, une communication entre le çondudenr & le couvercle du go-
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- belet. Ainfi, dès qu'on fait agir la machine éleétrique, on éleétrife en même-tems le couvercle du gobelet & la petite plaque fixée fur le tube de la fiole : d‘ où il arrive que les athmofpheres, tant du couvercle que de la petite plaque, fe repouflent l’une l'autre ; & comme la petite plaque eft mobile, fon ath-mofphere l'oblige de s'élever & de s’éloigner de celle du couvercle. Or cet. éloignement ne peu? avoir lieu qu’en faifant remonter la fiole par conféquent cette élévation de la fiole; fera proportionelleà la force de l’électricité, qui aura été communiquée tant au couvercle qu’à la petite plaque fixée fur le tube : & comme le tube eft gradué , il fera fort aifé d’obferver le nombre de degrés dont la petite plaque fera remontée.
- DU SYSTEME DE M. S1MMER.
- CLXXII.
- M
- r Simmer n'admet point cette électricité que Mr. Franklin dit être tantôt pn/itive
- & tantôt négatives mais il fuppofe qu'il y a deux fluides éleétriques, qui quoique très-difFérens l’un de l’autre , ont cependant une forte affinité entr’eux. Dans ce fyftême, les deux fluides s’attirent l’un l’autre , & en même-tems les particules de chacun de ces flui-
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- des fe repoufient, comme dans le fyflême de Mr. Franklin.
- Mr. Simmer fuppofe encore, que les deux fluides qui font la bafe de fa théorie , font attirés par tous les corps ; ainfi ces fluides exillent enfemble dans chaque corps ; parce que la force avec laquelle les corps retiennent ces deux fluides, balance celle que les particules propres de chacun d'eux peuvent avoir, pour fe repouffer mutuellement & fe fuir: d’où il réfulte que les deux fluides fe trouvant alors en équilibre entre ces deux forces oppofées, ne peuvent donner aucune marque de leur exillence, & conf-tituent par là-même, le corps dans fon état naturel.
- Enfin Mr.. Simmer fuppofe, que le frottement de certains corps met ces deux fluides en mouvement, & que par ce mouvement , la "propriété qu’ils ont de s'attirer & de s’unir, fe change alors en une force ré-pulfive, qui les oblige de fe fuir & de fe réparer l’un de l’autre. Mr. Simmer a donné à l’un de ces fluides le nom d’e'eSlricité vitrée, & à l’autre celui d’électricité réjineufe. Ainfi félon l’opinion de ce phyficien anglois, lorsque ces deux électricités font excitées par le frottement, l’électricité vitrée qui appartient au couffin frotteur, paffe au conducteur, & la rejineufe de ce même conducteur pafle au corps frotteur; deforte que par cet échange, le conducteur & le corps frotteur ont toujours la même quantité de fluide électrique, avec cette feule différence, que chacun d’eux n’en
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- a alors que d’une feule efpece; ou s’ils en confervent encore de chaque efpece, cha-cun d'eux fe trouve en avoir plus d’une efpece que de l’autre; mais dans l'un & l’autre cas, le conducteur & le couffin frotteur font dits éleïïrifés ; le premier d'une électricité vitrée & le fécond d’une électricité réfineufe.
- Quand un corps fe trouve dans cet état d’éleàricité, l’efpece de fluide dont il eft fur-chargé , fe manifefte d’abord par la propriété dont fes parties font douées, de fe re-poufTer mutuellement, & de faire en même tems tous leurs efforts pour rejoindre l’autre efpece de fluide, qui par le frottement avoit été forcé de s’en féparer. Ainfi dans ce cas, fi l'on approche l’un de l'autre deux corps qui foient électrifés de la même efpece d’életri-cité, par exemple, d’une électricité vitrée, il eft clair que ces deux corps doivent fe repouffer; puisqu'il eft de la nature des parties du fluide vitré, de fe repouffer ; il faut en dire autant de deux corps éleitrifés d’une électricité réfineufe.
- Mais le phénomène change, fi l’on pré-fente un corps furchargé de l’électricité vitrée, à. un autre corps dans lequel l’électricité réfineufe domine; car alors les deux corps s’attireront mutuellement, parce que leurs fluides étant hétérogènes, c’eft à dire, d’ef-pece différente, ils feront en vertu de leur attraction réciproque, leurs efforts pour fe rejoindre; & cette réunion aura lieu en effet, dès que ces deux corps fe toucheront, ou qu’on établira une communication entr’ eux ;
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- eux; car dans le même inftant,fi l'on fuppo-fe que ces corps aient des électricités oppo-ïées parfaitement égales, leurs fluides électriques fe repartageront également aux deux corps, & fe retrouveront dans le plus parfait équilibre après ce partage.
- Selon cette théorie, toute étincelle éledrique eft compofée de deux fluides d’ef-pecé différente qui coulent en fens contraire, & forment un double courant. Quand par exemple , je préfente le doigt à un conducteur , que je fuppofe chargé d'une éledricité vitrée, alors je lui en enleve une partie, & je lui donne une portion égale d’éleélricité réfineufe. Quant à mon corps, 11 je le fuppofe ifolé, comme il fe trouve alors avoir moins d’éledricité réfineufe & davantage de vitrée qu'il nen avoit avant le départ de l'étincelle, il fera dans ce cas éledrifé d’une éledricité vitrée : mais li mon corps n’eft point fuppofé ifolé, alors il ne s'éledrifera point par cette étincelle ; parce qu’au moment qu'il communique fon éledricité réfineufe au conducteur, le plancher en fournit auflitôt à mon corps une quantité égale, en échange de l’éledricité vitrée que mon corps a reçu du condudeur & qu’il rend auili fur le champ au plancher.
- Quand je préfente au condudeur le crochet d'un Renfort que je veux charger; dans ce cas, le coté extérieur du Renfort communique au couilîn frotteur,& l’intérieur du même Renfort communique aij conducteur. Ainfl l’éledricité réfineufe de l’intérieur P 4 du
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- du Renfort, eft transmife au condudeur, lequel la transmet enfuite au couflin frotteur, & celui-ci au côté extérieur du Renfort. Mais dans le même tems, le côté extérieur du Renfort donne fon éledricité vitrée au couflin ffotteùr, d'où elle palfe au conducteur, & de ce dernier à l’intérieur du Renfort: deforte que toute l’éledricité vitrée de l’extérieur du Renfort eft portée à fon intérieur , & que toute la refineufe pafle au côté extérieur du Renfort.
- Lorsque ces deux fluides font ainfi réparés, ils s’attirent très-fortement l’un l’autre à travers la fubftance du verre interpofé, fans cependant pouvoir fe joindre; parce qu’ils ne peuvent pas traverfer la fubftance du verre : mais dès qu on établit une communication entre les deux furfaces du Renfort, alors ces fluides fe précipitent l'un fur l’autre avec la plus grande violence, & dans l’inftant même, le Renfort celle d’être éleétrifé, parce que l’équilibre fe trouve alors rétabli fur les deux furfaces ; vu que chacune rend à l’autre l’ef-pece de fluide, qu’elle en avoit reçu par l’é-ledrifation.
- Tels font les principes fondamentaux du fyftême de Mr. Simmer : fi l’on veut s’en inf-truire plus à fond, on peut confulter l’hiftoi-re de l’éledricité par Mr. Priefiley.
- On ne peut difconvenir que l’hypothefe de Mr. Simmer ne foit très-ingénieufe ; elle quadre d'ailleurs fort-bien avec les phénomènes éledriques que nous connoiflons ; elle explique en particulier de la maniéré la plus
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- plaufible, les expériences relatives à la répul-fion réciproque , qu’ on obferve entre deux corps qui ont chacun une électricité négative : il me femble du moins, qu’à cet égàrd, la théorie de Mr. Simmer eit plus fatisfaifante que celle de Mr. Franklin.
- Cependant la plupart des phyficiens donnent encore la préférence à l’hypothefe de leleCtricité pofitive & négative, à caufe de fon admirable fimplicité. En effet l’hypothefe de Mr. Simmer parott trop chargée de fup-pofitions : car outre qu il admet deux fluides électriques d’efpece differente, -il fuppofe encore (fans en donner une raifon fatisfaifante) que ces deux fluides ont la propriété de s’attirer réciproquement ; mais qu’enfuite cette même propriété attractive, fe change tout-à-coup en une propriété répulfive, auflitôt que ces fluides font excités par le fi-ottement. Rendre raifon des phénomènes électriques par une pareille fuppofition, n’ eft-ce pas expliquer des effets par une caufe encore plus myfférieufe & plus inexplicable que ne le font les effets-mèmes qu' on veut expliquer ?
- Au refte, quelque foit la différence qui fe trouve entre le fyltême de Mr. Franklin & celui de Mr. Simmer, ils ont du moins cela de commun, que les conféquences que leurs auteurs en déduifent, fe trouventparfaitement d'accord avec l'expérience. Ainfi il en elt de l’éleCtricité, comme de la gravité & du mouvement des corps, dont on connoît très-bien les loix; quoiqu’on ne foit pas plus d’accord fur la première caufe de ces loix qu' on ne
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- l'eft fur la première caufe des loix confiante* & connues qu’obferve l’éleétricité.
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- Je finis ce périt traité par faire obfer-ver que l’éleétricité eft un champ trop vafte pour qu’on ait encore pu le cultiver en entier. La branche de l’éleétricité médicale, fi je l’ofe dire, ell encore au berceau ; l’on ell cependant déjà très-alluré de fon efficacité par la guéri fon de diverfes maladies quelle a opérée: mais ce qu'on en fait jusqu’à préfent, eft encore trop vague; parce qu’on n’a pas encore rafiemblé allez d’obfer-vàtions à cet égard, pour favoir avec pré-, cifion quand & comment il convient d’ufer de ce remede.
- Il feroit fans doute à fouhaiter que d’habiles gens fe vouaffent à ce travail trop négligé jusqu’ici. Mais ce n’efl qu’à des hommes d’une fagacité confommée, & aufli vertes dans la théorie de l’éleétricité- que dans fart falutaire d’Hypocrate, qu’il appartient d’entrer dans cette vafte carrière; fans cela, il’ n’y a point de progrès à efpérer, & l’éleétricité médicale en reliera vraifemblable-ment où elle en eft encore ; c’eft à dire, qu’on continuera de l’appliquer au hazard comme ci-devant , & même au rifque, en l’employant à contre-tems, de voir fouvent empirer le mal au lieu de le guérir. Mr. d'Ingenhousz que nous poTTédons ici, depuis que fon mérite diitingué.l’a placé au nombre
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- DE L’eLECTRICITF.’MEDICALE 2?5
- dres, feroit fans doute très en état de raiffir dans ce genre de travail :fes talens & fesvai-tes connoiflances, particuliérement dans les fciences qui peuvent être rélatives à l’é-ledtricité médicale , enfin fon goût marqué pour les obfervations, ne permettent pas de douter,, qu’il n’enrichît cette branche de l’éle&ricité de découvertes intéreflantes , fi jamais il fe déterminoit à ÿ confacrer fes mo-nrens de lôifir.
- F I N.
- (*) Mr. Hiltenlrand ancien Frofeflcur de Philofophie, vient de me communiquer les Notes qu'il a faites à différons articles de ci Précis fur leleFhicité : Elles m'ont toutes paru intereflanles & quelques unes, né-ceflaires ; mais je n'ài pu en profiter ; parce qu’on en étoit,déjà à l’impreflion des dernleres feuilles, lorsqu’il me les a communiqué. Cependant le Public n’en fer* pas privé 5 puisque Mr. Hiitcnbratld Ce propofe de les faire imprimer avec la traduftion allemande qu'il à bien voulu faire de inon ouvrage, à mefure qu’on l’imprlmoit.
- Il feroit à fouhaitcr qu’au lieu de le traduire, il nous en eut donné un de fa façon fur lé même fu.iet : fon habileté dans tout ce qui fait l’objet de la phyfi-que expérimentale & en particulier dans ce qui concerne l’éleôricité, eft un bon garant de la fuptiiorité avec la quelle il
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- Fautes à Çorri
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- ligne.
- p. Ci.
- p. 6t. 1
- p. 6Cj. 1
- p. 69. 1
- P. 7°- 1
- 31. d'ittgenhoujin 13. d‘ Jngenhoufcn 13, électriques 30. l'athmofphere a 6. pointes
- 25. dont l’un 4. eft
- 13. parcourra 2. repouffer
- llfez à'Ingcnhouf -. lif. d'JngenhouJi lif. éla (tiques lif. la furface lif. points
- lif. lorsque l’un lif. font lif. parcourt lif. pouffer
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