Les douze livres touchant la discipline militaire
-
-
- DOVZE LIVRES
- DE ROBERT YALTVRIN
- touchant la difcipline Militaire
- TRANSLATEZ DE LANGVE
- LATINE EN FR^sfN C OTSE
- Par Loys Meigret Lyonnois.
- AV ROY.
- A PARIS,
- *
- Chez Charles Perier, demourant en la rue fâin<5t Iean de Beauuais, à l’enlêigne de Bellerophon.
- 1 5 5 5-
- Auec priuilege du Roy.
- Page de titre n.n. - vue 1/480
-
-
-
- n
- f
- S
- S .
- L i j
- ’>
- K
- ni
- .«i
- .'S
- \,J
- WJ
- •s4
- .«prMji
- vs
- >>
- H‘.
- '"*v
- {
- '. - 1
- " ’
- O
- l+mt
- U]
- .11)
- ‘ m
- d)
- **.' *(
- V-
- v->
- i— ;
- , )
- R
- •t£
- V
- H~ -*
- (V
- ~J
- . i
- (
- m'
- J
- trj
- t~- I»
- Q
- f-,
- D-j
- M
- o1
- ,. 4
- ,f>
- r » k 1
- K.;
- **Ï4
- «n
- ;>
- O
- K
- >•?
- i
- O
- a
- O
- v«<
- r.
- ^y „ Ivjjiiv. if ",,.f-V-v .'C /'
- Gm* s:. •
- mfs^AV? •' . 'CMtc&SF ’ifSis.. \k .\„v v„ ,
- * •
- -n
- P# ’
- fl >ÿ>*•..:
- 4 ,M- ''. . '
- ^1
- !'n M! !
- 'Iwip. ^ ,‘,W .
- •--V 'V
- ;j\r?v' ;
- ,,.;J ;’.M:,.,':. t;.,-':'lj{ .
- ; t> s ~i
- ' hp*
- 1 J
- .. .v^.^prWWWW ;J.>> mJ)i:
- '::;Ki' mm ’ <‘v;,'ÿ''S**1‘
- . a i|,;' ' \ \ /
- J, :<<
- _. . jV« ,1» *• V‘
- ' ',('
- !î! MÛ
- >iiii !!, :1
- ili'M ,-r, ' ' .'
- 4,-4' j n
- IvJ' •'• J—'
- •' ' <</ .. ; ' 1, ;> ,. f . *
- '^"'V ..i :
- fat 'v- -K-.r!., . %'-ï;ü y
- !l ' (;
- ^1 .
- . \
- i
- 1 • r>,\
- tr*
- i—
- o.1
- n
- T
- •'a
- r-1
- -r
- 4;
- '<< J /»
- >. c-
- , ' 'y , >
- f;
- y r
- p.n.n. - vue 2/480
-
-
-
- AV ROY.
- I la cognoiffance naturelle, & commune à tous hommes delalov diuine conciliant le bien, & défendant le mal, confortée de la creinte d’vne iufte, 6c fêuere peine, & vengeance, eut peu(Sire) d vn bon remord refraindrc,& arre-iler court noftre prompte, &indomtableconcupifcence, ou que ce grant iubilé irreuocable de la remillion de noz pechez donné par la ciemence, 6c grâce diuine, 6ç publié à fon de trompe par les quatre herauz Euangeliques, eut efté par vne entière, 6c ferme foy receu de tout le monde, toutes iniuftices, & outrages euffentefté fuppri-mez,& tous Princes,& Potentaz releuez d’vn inlûpportable trauail,& foli-citude,&horsde gransennuiz,& periîs.Mais commepourl’infàtiable délit de la volupté mondaine & délices, l’entendement, & la raylonfoient mal obciz,& fuiuiz, il eft auenu qu’au lieu d’vne mutuelle iuftice, l’iniufti-ce a audacieufement prins pied entre les hommes, tant par cauteleuzes pa-Lations de droit, que par violances publiques, 6c effrontées. A celle caule les hommes autant bons, quemauuaislêntans la foibleftè deleurs forces priuées pour relifter à ce commun mal,& péril,ont par vne certaine proui-dence diuine auile d’en drelfer des publiques en leurs contrées: eftabliflans Roys,ou autres Poteraz pour leur côduite, douez d’authorité & pouuoir, pour fuyuant la raifon 6c équité vuyder tous differens entre leurs fubieds, refraindre & punir le dol, la malice, efforts, & outrages de ceux que la crainte,& menaffes des blindes loix n’ont peu diffuader, 6c retirer de leurs furieufes audaces.Ce que conliderânt faind Paul a abonne raylôn ordoné (efcriuantauxRomains) que toute perlonne lîiyuant l’ordonnance diui-neporte obeiffanceaux princes,& autres magiftras, côlèillantau demeurant de bien viure,à qui ne les voudra craindre.-comme qui ne portent pas les armes fans caulè.Combien que li les Potentaz n’euffent efté forcez qu’à les emploier à la punition, 6c vengeance des delids, & offences priuées dentre leurs lubieds, elles euffentefté la plulpart du temps oyliues,& au danger de la rouille,pour la crainte d’vne punition ineuitable, que la foi-bleffe,& inegalleté d’vne force priuée au pris de la publique peut facilement perlûader à l’outrecuydé,6c l’epouanter,& refroidir en les audacieu-fes entreprinfes.Mais apres que 1 auaricc & ambition (vices inlàtiables)ont embraie les çueurs des Potentaz au moien de leurs grandes forces à vn ar-dâtdelirde richeffes, 6c Empires demefurez:alIors les armes iadis ordonna ij
- p.n.n. - vue 3/480
-
-
-
- nées pourlaconfèruation dvneiuftice commune, fè font décoché, 8cde-bandé furieufèment furies etrangers aucc toute violance, & cruauté, que l’iniufticede la guerre a de coutume de forger: de forte que pour entendre à la defenfe d eux, de leurs principautés, ôc fubie&s, leurs forces n’ont plus eu grand loyfîr ne repos,quelque repit,oupluftoft reprinfèdehalay-ne qu’en donnent labftinence, ou trefues : ny ne les a iamais peu rendre fî aflèurez vne paix tant bien iurée qu’on voudra, qu’vnc crainte epouanta-blc de fon effrayant & périlleux retour ne les ayttrauaillé,5c forcé à vn plus grant entretenement de forces, que ne requiert raffeurance du gouuerne-ment de leurs prouinces. De la eft prouuenuë la diligence des hommes en l’inuention de nouuelles armes tant pour la defenfe,& conferuation d'eux, de leurs maifons,ôc pays,que pour courir fus, & pourchaflèrvne ruine à leurs ennemiz Et comme fmallement la necefïîté ayt trouué tous les arts, celle de la guerre comme la plus perilleufe ôc mortelle a preffé les hommes de dreffer quelque obfèruance de loix, 6t ordonnances pour faconduitte, lefquelles gardées font de grant profEt,ôc confèquence: comme auiour-dhuy on le peut voyr en cefte discipline militaire entre les gens de guerre François, de la quelle toute la France vous recognoift premier autheur 5c confèruateur: ayant ia fi bien profité, que comme par cyauant la nation Françoifedenuée d’elle eut faiél quelque perte delà réputation, elle l’a au moien de voftre diligence recouuré fî apparante,foit pour les courfès,ecar-mouches,batailles, defentes de places, ôc forts,ou pour affauls tant en gens de pied,que de cheual, qu’il ne te treuue auiourdhuy peuple fî agguerri qui n’en redoubte le rencontre. Car quidonne bon ordre au payement de la fouldecomme vous l’auezfaiét ,1e donne aufïi à l’obeiffance du fbuldat: fans laquelle il eft impoflîble d’en tirer feruicerde forte que de tant plus qu’vne armée fera grande, de tant plus terafa ruine & confufîon lourde: tout ainfîque nous le voyons auenir en toutes autres choies grandes ôc mafïiucs,efquellesles fondemens,ou forces defaillcnt:veu que comme les fînancesfoientlesnerfs,àbonnerayfononlestientôceftimelcs forces de la guerre : Et combien que la paye deut eftre vn fuffifânt moien pour contenir le fbuldat en l’obteruance des ordonnances d’elle: la hardieffe toutefois accompaignée,ôc confortée de force eft aitee à te debofcher,& déborder en toutes façons d’outrages,pilleries,detrouffes,voleries,& violemens, fî la frayeur d’vne prompte, ôc feuere execution de iufticc ne la tient de près,la réfrénant, ôc arreftant quafî comme d’entraues. Laquelle toutefois fè trouuera foible ôc fans cfFeéi, fî la pourfuite dépend des coufts, ôc fraiz delaperfonneoffenfee-.commcqui pluftoftliurera aux delinquans aftcu-rance que crain te de peine en leurs mesfaiéts, veu qu’il n’eft gueres d’hommes de iens, qui ne préfèrent vne pacience en leur perte , ou outrage a vne nouuelle depenfè , pour le defèfpoir qu’on a de la recourfè , 5c qu’vne vengeance eft de bien petite refourfè, ôcrecompente.-iointque combien que le vouloir yfoit bon, ôc prompt, il eft toutefois le pluffou- ^
- p.n.n. - vue 4/480
-
-
-
- uendins moien,& pmlfcnce. Eftant donquesl’obeifTancc des fouldats af-fcuree, .1 ne rcfte plus a vn chef qu’vne bien auifée conduite qui eft vne chatgeprefque miupporcabled lefperit de HiÔme, tant foie il vif, prompt fubti, & vigilant : d’autant que la guerre tient en hazard tout ce que l’hô-me a le plus cher, comme les biens, la vie, & l’honneur. Voylâ font vient que cous les iours on rumine tous moiens de ruzes, & inuentions nouuel-les, d ont on le peut auifer pour offenfèr 1 ennemi, & le ruiner • ny n’cft fi petitaduertifTement auquel vn fage capitaine ne prefte loreiile. A celle caufêj Sire voyant voftre bon vouloir, & diligence en I’eftabliflèment &c exercitation de l’art militaire, i’ay prins la hardieffe de vous vouer & ad^ drefTer celle prefente tranflation des douze liures que Robert Valmrin a compofé, faifant vn recueil de la difciplinc militaire ancienne tirée des fauans,¬ables autheurs, tant Gréez,que Latins refperant bienque la ledure ne vous fera pas feulement aggreable pour le defir que communément tout homme aaeia cognoifTancede l’antiquité: mais aufli pour le contentement que vous y trouuerez en quelque dodrine, & quelques notables auertiffemens non moins neceffaires au temps prêtent,
- quiîz furent onques pour le meflier delà Guerre.
- Au demourant Sire le prie Dieu autheur de^ous biens, & de toutes grâces, de donner par * fa clemence fi bon ordre à tous voz affaires, qu’en menant vne vie faine, longue, & profpere, vous & voftre peuple puiftiez toufiours enpaixluvdô' ner tonte
- * louage,
- &
- loy
- re.
- De Paris ce z 8 de Mars 1554
- Voftre trefhumbie & obeiftant fubied LoysMeigret.
- p.n.n. - vue 5/480
-
-
-
- AV LECTEVRS.
- E vousemerueiüe^ pasfi en cefie tranjlation françoifie 'vous trouue% quelques claufes perfeéles, ou imperfeÛes delai fiées en la ngue latine.Car comme]/alturïn ayt pourfiuiui les fignificatiosi& expofitions des vocables latins militaires fia pour leur donner autbonté, 0* prouuerl'vjdge, allégué bien fiouuent des paffiages tronque^, pri% en autheurs bien approuue% • fians au de-mourant auoir le plujjouuent egard d la fiubfianceperfieéîe du texte.Parquoy ie n'auoy pas befiing de les tranfiater, combien que i'en ay traduit quelques vnes.fiAu regard de ladtuerfité des rimes d'ont ivfemefimement d'vne fiortlibre en fies finalles, enten-de% que comme en brochant cefie tranjlation te laïfjajfe quelques poèfies a traduire tufiques a la reueue) d'vn defir quont tous homes defie ha fier, ne fufians quafi quebofi cherpour venir,(-r voir la findeleurentréprinfiefiefiauenu quenltfiantles Odes de ce tant admirables & renommé poète Ronfart, ten ay decouuert de mefime,qui mont enhardi a faire le fiemblable: d'autant que ce fier oit a luy d'en fiuer le premier: mefimes qu’vn tranfiateur ne fiaroit cercher, ne fiayder de trop d'aifiancespour rendre fion euure de tant plus facile, & entendible. ^Au demourantiay trouué ce fi Autheur JAdturin d’vne imprefiton fi corrompue mutilée, que quelquefois de defiefioir d’vne honnora-
- ble pourfiutefiêpenfié de faire Vne tacite retraite : comme qui preuoyoye parla leflure, le temps plus long, çy le labeur plus ennuyeux a reparer les fautes, que ie n’en ay employé au refie de là tranjlation : quoy que ie confejfe franchement, & rondement, en y auoir laifié ( oultre Us incognues) aucunes de mon fieu, pour n auoir peu conieélurer le fins, ou bien b Autheur, duquel il a tiré finauis.^Aufitnefe fault il pas emerueiller fi les anciens ecriuains,& imprimeurs en la langue latine font tumbe% en telles corru-ptelles/'ignorance ou bien d'vnetropgrandeprefitmption de leur fiujfitfiance,Veu quau-iourdhuy nous voyons les nofires faire le fimblable d nofite nés, mefimes en nofire langue maternelle. Penfans de vray les aucuns d'eux auoir beaucoup meilleure cognoijfance,& expertance vfiage de la langue françoifè, il% corrigent bien fiouuent les euuresd’au-
- truy,corne fil% enauoient à porter le reproche:& ce non feulement en l'Orthographie, de laquelle il’g fvjurpent toufiours Fauthorité, mais au fit es mutations des vocables.
- Parquoy té auifié apres auoir faiélla leélure de cefie prefiente imprefiion de drejfirvntraiélé des fautes principalles > & difftrilles d corriger de prime face : commtfies tant par leur ignorance, que parleur prefiumption.
- p.n.n. - vue 6/480
-
-
-
- Table des chapitres contenuz es douze liures
- DE ROBERT VALTVRIN.
- Liure premier.
- U première & fécondé fource de l'art militaire : de quelles nations il ef premièrementfont , &pourquoy il a eflé ainfi dift. chap.j.feuilk.i.a
- Quef ce que l'art militaire, CT en combien de parties il ejl dijlribuéfélon la doBrine d'Iphicrate. chap.ij.fenil, z.b
- Des lettres, CT de beaucoup de chofes dignes de mémoire, de ceux qui fy Jont adonnes?. chap.iij.feuil.i.a
- Liure fécond.
- Que la cognoiffance de Philofophie CT des hijloires porte de merueiUeux proffiB% a ce fie difcipline, & que bien grande Capitaines ont eferit hijloires. chapj.feuil.^.a De £ éloquence,& de quel profit elle eîl en ce fart. chap.ij.feuil.u.b
- Des Poètes,quelfruiBen Vient,quel^ fontreceuables,quel:£ danables. chap.iij.f. 14.a Delà mufique, CT quelle acointance elle a auec l’art militaire.. chap.iiij.feuil.ij.4
- De l’Arithmétique & Geometrie militaire. chap.vfeuil. 1 p.b
- Liure troifielmc.
- De F^sdBrologie ,Cy diuerfe façon pour preuoir les chofes futures ,fil en eft au-
- chap.jfeuil.zi.a
- cm art-
- Liure quatriefme.
- Des Lobe.
- De la Medecine.
- Del’sxercitation de laguerre,Sc de celle decheud.
- Du repos des gens de guerre.
- Liuré cinquiefme.
- chap.j.feuiL$o.a chap.ij.feuil.^.h chap.ïtjfueil. ij.b chap.ïiij.fueil.41.4
- Des quatre effeces de vertu%, CT de leur departement, CT qud% chefs? de guerre en ont efétenus^ exceüens. chap.j.f. 4z.b
- Des auiz des chef:? d'armes,que les Grec% appellet Stratagème%, & des propos diB% auant,durant,CT apreslaguerre fagement,de bonne grâce ër rencotre. cha.ij.f^j.b
- Liure fixiefme.
- La façon des ancies pour fgnifier CT mener la guerre, CT pourpaffer accotd.ch.j.fçy.a Delà forme d'euoquer, Cr vouer. chap. ij.f,60.4
- De la religion des anciens capitaines d’armées. chap.iij.f 6i.b
- Que la guerre efoitvneckof f ceremonieufe , que nul nef oit receuau nombre fans frment. chapàïij.f. 6 z.b
- De quel temps premièrement lefrment de la guerre a efé d’vn accord ycluntaire prins
- ~ iiij
- p.n.n. - vue 7/480
-
-
-
- entre les gens de guerre transféré aux Tribuns ,gy àvne legale afhon d durement,
- cbap.V.f.6zb cbap.vj.f.6$.d chap.vïf.fi.6^.b chap.Viif.fi.6^.b cbap. ix.fi. 6j.a cbap.x.f. 6j.b
- gy que cest qutl^ iuroyent.
- Lesparoües du Tribun de s gens de guerre,quand ilfalloitfaire leuée.
- Que leferment des cheffdeguerre efioit l’ele nation du feeptre.
- Le moyen de diuerfis nations a leuergens de guerre.
- Du chou des chenaux.
- Le moyen des nations a élire vn chef.
- Tordre de marcher en bataille félon ladifciplme Gercque & Romaine, chap.xjfjo.a Diuerfe maniéré de dreffer batailles. chap.xïjf.jo.b
- Liurefèptiefmc.
- Des périlleux, ce si a dire malheureux ou infâmes tours d'aucuns moys, gy du temps idoine àla guerre. chap.j.fi.jjb
- De ïaftete d'vn camp. cbdp.if.fj 9. b
- Delà recognoiffance de la contrée ennemie, gy de la multitude vouloir, entreprinfe, gy confetl. chap.iijf.80.a
- La forme d’vn camp,gy les façons de faire de ceux qui en ont la charge. chap.iïq.f8i.b Quel'g homes on doit enuoyer pourparlemeter auec les ennemy s fillefault.ch.vf.%ib De quelle prudence on donparlementer auec l’ennemy. chap.vj.fi.8yb
- Qupn doit auoir égard aux armes des ennemys. chap.vijf.8y.a
- Que la multitude des armées doit eflre confderée, d’au fiant que grandes armées ont e fié rompues gy deff.ai fies d’vne bienpetite. chap.viijf.^y.a
- Ouon doit decouurir la fantafe des afiiege^. cbap. ix fi 8 6.a
- Qufil efl de faite filament qu on afiiegevn camp. cbap.x.f 86.a
- Oue quelque fin de guerre qui foffre,elle ne doitiamais eftre delaifiée. chap.xif. %j.a Qutl efl de faire fi âpre s la bataille perdue,onfefiietté dedans vnfon.chap.xijf.8j .a Qujl efl de faire la ou les ennemys veinewg en bataille nonî point de retraifle.
- cbap.xiijfSjb
- Que l’auis de plu fie ur s capitaines ne fl pas de pour future les fuyans opiniâtrement mfques a vne extreme ruine. cbap.xiiijf. 8%.a
- Oujlfiault auoir l’ennemypar efclaïg.ny n efl rien tant bien fiant à vn cbef,que le retard em et gy difiimulation-.ne rien moins que la hafiiueté gy témérité.cha.xvf.88..b Ofiil fiault auifier que parvne gloire on ne tombe en péril, gy ruine, au moyen d’vne bonne fortune. chap.xvjf.89.b
- Oueles apparat^ des banquet^ fi doiuent euiter en vn camp. chap.xv1j.f90.a
- Quelles chofes font neceffaires tant pour bailler fieesurs, que pour le tirer, fil aillent que noftre armée fioit enfermée d’vn camp , ou de places fortes , ou quelle afiiege quelquvn. cbap. xviij.fi. y. a
- Liurehuitiefme.
- Des vocables Latins anciens gy excellens d’vne dignité publique en l’an militaire.
- p.n.n. - vue 8/480
-
-
-
- Liure neufiefme.*
- Quett ce que ïa guerre, gy en quantes manieres,gy d’ou font dénué* les autres \oca-\hles des armées, & quelles font les caufs des bataillons, gy de leurs denomï-\ nations. chap.ff.u6.a
- * Liure dixiefme.
- Desabit^d’ontvfoient anciennement les Romains, auec les noms,defiu4tion,O1 interprétation diceux. " ; chap.j.f. 131.&
- Desarmes,gydela fourfe duvocable. \ ckap.ijf.i^.a
- Des-armes defqùelles nousfommes corners. chap.iij.f. i^^.b
- Quelles armes font propres au combat, gy quel% noms ont les injlrumens de guerre.
- chap.iiij.fi^.b
- Liure vnziefme. 1
- Delà guerre marine, gy du temps que premièrement les Romains lexercèrent, gy dit premier qui a ejlédigne du triumphe marin. ~chap.j.f ij6.a
- Quel bots ett le plus conuenant à nauires. ^ chap.ij.f.ijj.a
- Quil fault auotr efgard au temps de la coupe gy de la lune. chap.ïij.f.ijj.b
- Des doux d'ont il fault ajfemblerle bajhment d'vn nauire, gy quel% doiuent ejlre.
- chap.iiiff.iyS.a
- D upremier vfage des nauires, gy de leur forme receuè entre les anciens,leurs noms, gy du premier qui à part a tramé les moyens de les conduire. chap.v.f.ijZ.4
- Le nombre des vens,leurs nomsyaifons, gy ejfeêhg. chap.vj.f.i 81 .a
- La matinale Afltologie félon ïobfetuaüon du foleil,gy de la lutte, & des autres efailles ,gy des pdf ions des Elemens. cbap.vij.f.iS^.b
- Les remedes de ceux qui font enpéril. u ' chap.Vuj.f i%6.b
- Ce quon doitfaire auantque de tirer à l'ennemy. cbap. ixfiüj.d
- Ce qui ejl necejfaire au rencontre des deux armées. chap.x.f. 18 j.a
- Intentions dignes de memoyrepourpajfer nuterts. ckap.xj.f.1%%.4
- Quelles armées par mer, oupar terre ontejlé merueiUeufe met grades, chap.xij.f 15)4.4 Des grandes prouejjes des gens de guerre , tant par mer que parterre, qu'on récité chap.xüj.f\çyj.à
- Comparaifon delà gloire auec le parragm gy excellence des chefç. chap.xiiij.f.199.4 Peines diuerjès des foldas habandonnans leur enfeigné, gy defobeijjans d leurs capitaines. ' chap.xv.f zoS.b
- Liure douziefmc.
- Destriumphes,gyquecett,gy d'ouile Avenu. chap.j.f.zi^a
- Des trophées , gy de leur origine , (y en quoy il% font différent du triumphe .
- chap.iff.ziyb
- Diuers genres de triumphe s, félon la diuerfté des peuples gy nations, cbap.iiff.zt^.a Que les tnumphes nettoient pas ottrote% à tous , gy quel;£ il’Z ettoient.
- chap.iiijf. z\\.b
- Les paremens, gy ornemens des triumphans. chap.v.fzi 5 .b
- p.n.n. - vue 9/480
-
-
-
- La fdçon des Romains en leurs triumpbes. cha.'vj.f. ztï.b
- Lesloixtoucbantlèscoronnes. cbap.Vij.f. zi8.a
- Les honneurs esperfonnespriuees. " cbap.\iïj.f. zzz.a
- Lesferuices d'aucuns Vitforieux & triumpbas renome^parjûrnoms.cbap.ix.f.zz^.a Les recompences des anciens,pour les prouejjes. cbap.x.f.z 2.5.4
- Lesjihres renomme^ non feulement pour la mémoire descbef^viuans: mais aujü des trejpaffe%, & fubfequemment des Columnes, Obelifques, Vyramides, arc%, bouchers tableaux (y Vafès pour cela edife^. chap.xj.f.zzô.b
- Les folenmte% des ieu%. cbdp.xïj.f.zz$:b
- Les oblations des princes failles aux Dieux du butin des guerres. cbap.xitj.f.z$z.b.
- FIN DE LU T JB LE.
- Pour euitcr les répliqués d’vn mefme nombre, tant es chapitres, fèuil-Jetzque pages. Les chapitres font lignez de nombre françoys. Le feuillet, du nombre latin. Et les pages par a. & b pour première & fécondé. - ' '
- Les fautes notables,pour la première page lifez a,& pourla fécondé b«
- Lifez au feuillet 6 a, ligne 33, reucftement fp.a,l.i<J,enfregnions f.i 2,b,1.2i, comme qui eft. f.î3,b,1.3 1,Gréez ce.f.xô’.b.l 1 <?,oftez aufsi. f.i 8,b,1.S,apprendre: £2 1,3,1.19,8c.la. f.aÇjbjl.d', cè qu’il ne,& 1 8 A rgiucs.fi 2 8,a,l. 18,entre le(quelles.b,I.7,fi ceft.f.32,b,1.24,dénomination.£33,a, ParthcsÜ34,a,en rapoftilIe,mente,pourir.erito, & b,1.44,Mcnarre. £.40,2,1.3 i,bancaues. £42,3, l.Z3,bien de ceftc.f,45,b,1.27,cft la louange,& I.41 ,corruptclle.f. 50,3,1.23,etaché.8t I^d.dit qu’il, b,I.X4,ceux aufquels.fi 5 3,bjl23,de tant plus f 5 5,b,l-.4i ,fante.f.‘5 7,a,I. î.baricaues. f.5 9,b,I 3 4,ces hommes.ou ces.& I.41 .terreftres.fi 6 c ,a,l. 2 2 ,n’auoir.l. 2 8 ,arencs.f.6 5 ,b,l. 13,1e ronfler.fi 6 6,b,l. 2 5. aiumenti2.f 7 i,a,1.1 ,& font,& 1.2.commcfit,b,1.3,recouurera.f 72,a,1 3fi.campaigne.f.73,a,l,4.com-bat,ordonnât. & l.S.departir.f 74,b,1 35,bancs de barba,pour feccaignes.f 78,a,I.17. reftituerent, & 1.25,Maxon.b,1.7,fe font mal.f.79,b,I.33,verrues f.81 ,b,!.i 9,1k font. 1 28.es quatre.f.8 5.b 117. emeuz.f. ico,a,1.4,Ccreales.f. 1 o 8 ,b,l. 3 3,par ce q ui. £ 10 9, a. a Troye.b.oftez ordônées.fii io,a,l.z8, effacez, l’apoftille, & aiouftez au texte apres malice, ou(multitia). & I.41, mettez en apoftillc (Cela n’eft pas obferué entre les Francoys : Caron n’employe pas gueres fouuent les gens de guerre a tels a&es,)f. 11 1 ,a,l.22,Vutfins.fi 112,b,l.29,de quinze.f x 14,3,1. d, façon, f. 11<?,a,l.1 x,denominatiôs. f 11 7,2.1,22,Pentachlum.fi 18,b.l.i 7,ûx vingts.f 119,3,1 .43,eftayes.fi 12o,b,1.2d, mefehans, pour, f. 123,0,1.17,peignoirî.i9. Tout cc.&I-3<>, Patuluque. f. 12ç,b,1.29, foixantefeize.f. 129,b,1. 7. Volfimes.f. 130,3,1 43, fit fonner.f. 132,b;l 40, Capitaines, eftoit.fi 134,a, 1.5, combat feroit bj.5 o, bamere f.i<7,b,l.2 8 ,Sons de boucliers f i 5 7,b,l-9,l’œil, f. 176.1.1 o, Hauffer.f 18 4»a,l. 1,Tonne. b,I.i,& qu’en f.20 i.b,l. 11,venu. f. 21 o,a,1.3, troupes pour bandes, f. 2 17, ^1.37, qui a efté vnc coutume obferuée.f.2 i9,a,l. 18,profeription.f,223,b, I.41,fus.f. 22d,b,l. i5,enpliz d’vne.f. 230,b, 1-37. Chacun an.
- p.n.n. - vue 10/480
-
-
-
- Extrait du pnuilege du Roy.
- Par grâce py priuilege du Roy,il efi permis py ofiroié d Charles Perler, Libraire iuré py Imprimeur en nojlre vniuerfîtéde Paris, d’imprimer,ou faire imprimer, tant de foys,py en tel nombre que bon luy femblera,ce prefènt hure,intitulé Les dowpe liures de Robert Valturin, tranjlate% de Latin en Françoys,par Loys Meigret Lyonnois: & font failles inhibitions & defences parlediflSeigneur, a tous autres Libraires py Imprimeurs ô* perfonnes quelconques,de ri imprimer,ne faire imprimer,vendre ny diftribuer,en fes pais,terre s,& fieigneuries,autres que ceux qu'aura imprimé,ou fai fiimprimer ledifl Perler : py ce durant le temps py terme de dix ans, d commencer du iour py datte que ferontparacheue% d’imprimer lefdifi^ Hure s fur peine de confifcation des liures qu'il% imprimeroyent,py d'amende arbitraire, applicable audift Seigneur. Et outre ce ledifl Seigneur, tant pour cefe mure quepour autres contenues py mentionnées en fefdifies lettres, en mettant au commencement, ou a la fin,en brief py au vray (fur peine d’encourir crime de faux) le contenu en fief-diéles lettres de priuilege , veut py luy plaifl quelles [oient tenues pour fùffi-famment fignifiéesd tous libraire s imprimeurs, py autres : py foitcelâde telef-fefipy vertu , que fi lefdifies lettres leur auoyent elle expreffement fignifiées py montrées: fatif que en cas de débat ou contredit, ledifl expofant fera tenu leur montrer, py exiber, leprefint original, py d'iceluy leurs en bailler coppie, à leurs deffens:py ce par exprès mandement dudifi Seigneur, à tous ces iufliciers, py officier smonob fiant oppofitions ou appellations quelconques,mandemens,ordonnances, refiri fiions, defences, eflabliffemens de cours py iurifdi fiions, py lettres d ce contraire sdefdi fies defences tenans comme plus d platn efi contenu py déclaréparlef difies lettres de priuilege, fur ce données a Paru le, 15. Mars 15 5 4 Parle Confiai
- De CourUy
- p.n.n. - vue 11/480
-
-
-
- îv>T
- -JZf-
- l- V-
- ?
- ’= ê' V
- ' ' v ’i
- ~ *n.v
- ;
- tVÛ». V”V.-r; Ci,\~V i vA~hèO vj'^ÿi'^iïc'^51. î& T^X^-'^ÿïv'*
- $'• t:t: t %?.’. :;o ^wsiV^uj £<; $**&&« sy.-.-:^ .y-.*'
- ^ . ** *• . # _ i • . _ . - ' . *
- Câ.i î:r^ - • •'••’ “*•
- tv^vù-à Vfûi ‘tv‘ .v'^îaTi K‘ rr.Svl ÿ •;,"" . nK-;•'; *: r~'•*••>*. ÿ*
- N., ^ \». j * * ' ' v •„ - ^
- tz.r.:-.-k\ v$z\&. • râ^'v' '' ’--' •^-'V’ »K;-
- ysh'^v^^wi^î-A'. v.:i^î‘t*!r«v,iv,c^«\*» \j y _r - '^5
- Vj>.Wÿ«^tû syyvy xkvs »^<«y-'-v /S •: v?: ’, r *v.«-Vdù-- y*
- ?:v; ,^y,-.- . y-; y nï^:* :
- . / 1 - V’ _.â. -
- * SvV"»
- ^r-.-tf ' v^ïsîV*7,^'V>.:.lTify— » • -y vV^ry-r* y
- *f \ ’, * 2 - ' .• .w
- V/.v*tfti.tY!V.,;' '; . ' y. 'Y. -.::Siy( --:ÿ'^ih /
- -*-rnv;:Vy*:r. .' '* v;^' ' yyyy y.yYy v, " yyyYyd.T y^vr; •y.&yn
- î' V/.~ ,î;mr-"r.. '-'^fc. ;?* ‘.vv , t-A’j';''\"- A‘*ri^6*î*. •-.• ‘‘y: V.V--•"?*.
- r.- y sur^ssn «Y f sr" ?S ' r. v-.*„ v^yyi-Ytt nv'w^ *»{ '. ' '••:,. y. y-'ÿyû ' •-•»' ~?;f;''' v^mia yiv *-.• •* -\ iy\ïn -i. .îri: :
- '**/• :; *. Â- '- r': ' "'‘-'rvu/ ^ i :^-i; v'^’v >»îv.V-; ;î
- • ^xil;.:. ' ^ .•:: t,;w • v,'j.;
- •~.. * V>; ^•.t'4-r'i-y',-
- - • / ; > U: •
- ^î.bÿ.iD'^Çi : •• *,
- 'A '•i-ï-v-r
- - o \ ï Kryzy
- i *.«s'ar/fe- • y-r-y-n-y:- -x yxiÿyP&ï ' *
- ♦-I* vy-y-à.:-' <~:;r ixj
- i ."J. CJ» luTl-. ..y v> t I^Æxî.-: ,
- .: y-vSçèî -:
- X j Viyy^ y
- h.i
- i.
- /:
- çV ->;••;.'^s.^'--., i
- Ïi^f—js-ï '-Î.Î.
- c
- •ÿ« • :V:'•’••'
- c
- p.n.n. - vue 12/480
-
-
-
- X
- LES DOVZE LIVRES DE
- ROBERT VALTVRIN DE L’ART MILI-taire, Vouez au Magnanime & Renommé Prince Sigifmond Pandulphe Maleteftc,Trcfêxcellent Roy de Rimene,
- Chef toujours vi&orieux. Tranflatez de Latin en François par Loys Meigrct Lyonnois.
- LIVRE PREMIER.
- De U première & fi coude fiurfi de l’art militaire; de quelles nations il eft premièrement firty,& pourquoy il a efté a 'tnjî dift. CH^PITPj: PREMIE.](.
- O M M E il {oit tout commun entre tous les hommes de noble eftime,qui fôubz la guide de Xcnophon & de Cicéron ont efté d’vn vif & excellent entendemét, que la force de l’hôme de foy par trop foible & frefle,ne foie pas fuffifante pour pouuoir embrafler tous les affaires commodes a la vie tat à la maifbn que hors,& qu’elle a befôin d’ayde-.il eftma-nifefte que raffemblée du malle & de la femme a efté raifbnnablemét dreflee par nature: acellefinqu’il fen fiftvnecompagnietrefproffitable,&mefmementne-ccftaire à la vie: & que ce loudain prinft de lvn qui bien fbuuét defaudroit en l’autre. Et comme outre plus on euft à viure es mailons, & non pas corne du commenccmét en plain champ, il a efté neccflaire que l*vn fuft dehors aux champs, qui par fon trauail& induftrieprocuraft lcsfruidz& alimens pour les ferrer à couuert: & que la ou ilz fèroyent acquiz & arriuez a la maifon, il en fuft vn autre qui les gardaft amaffés pour l'vfàge ncceffai-re à la vie: A bon droibt donques eft 1’induftrie de la femme dônée par nature pour le ménagé de la maifbn, & toute celle de l’homme au fbing & trauail des champs & forein pour porter la faim, le veiller, le chaud, & le froid aueques les voyages & peines de la paix & guerre , & des autres meftiers, & fourniture de la foulde. Et pourtant nature a créé les hommes plus hardiz que les femmes : d’autant qu’il eftoit quelques fois neceflairc àcculxqui confèruoycnt leur vie dehors & aux champs, de repouflervn outrage a force d’armes. Laquelle maniéré d’hommes les vns ont appelle
- A
- p.001R - vue 13/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- les defenfès du pais & gens de guerre : les autres, gardes : les aucuns les ont appelez Soldatz par vnplus commun vocable, dont il auient que ceft art militaire, qui a efté procréé de bons & honneftes principes pour la cômo-dité de la vie ièlon nature es compaignies & amas des hommes aftemblcz par raift>n(que les noftres appellent Cité)fêmble auoir efté liuré & oélroyé pour le lâlut & vtilité des hommes. Or comme ie confidere à part moy les choies anciennes ia delaiftees & abolies de la memoyre des hommes, ie ne puis bie entédre pourquoy on a attribué l’origine de ceft art aux edifieurs de villes,ou bien aux Gouuerneurs d’elles. le treuuc de vray que les fourfès de ceft art ont efté merueilleuièmet anciennes,& inuentées long temps au parauant l’édification des villes,& desloix, & auparauantl’vlàge du fer & du cuyure:foit qu’elles ayent prins leurs racines de ce gràd Iuppiter,lequel Platon deferit eftre accompaigné au ciel de l’armée des dieux auecques les clpritz ayans les gouuerneurs,Prefe6lz,& Preuoftz,ou bien à ces hommes ignares & engendrez de terre,comme le recite le Poëte.
- Es champs le chef leua de la race terreflre: Ou bien naiz par quelque corruption , ou par quelque autre moyen fans pere ne mere, & confèruez fins cognoiflance de droiét,ne de beaucoup de chofês:attendu qu’en ce temps la il n eftoit nul droiét naturel ne ciuil misenefcrit,nenuIzcommence-més de fàpience,ny n’eftoyét les diftentions, dilcordz,inimitiez, ne guerres commacées. Car comme dit Ceiàr le Germanique en la poëfie Aratée. » La rage encor riauoit l’eftë facqué cruelle,
- 3> Ny entre les par en s eïloit dïfcord cogneu.
- ne mefines aux eftrangers veu qu’il n’eftoit pour lors aucunes efpées pour degainner, attendu que la peine augmentée de conuoitifê,rage,malice, Sc mefchanceté a prins perfe&ion par forfaiétz,pilIeries,rapines,meurtres,6c cruauté. Le mefticrbellique ne fèmbloit pas fans propos ainfi di&& appelle par Horace a caulê des Bellues : d’autant qu’à la façon d’elles ilz com-batoyent alors pour les viures & caucrnes qu’iîz auoyent pour maifôns, à ongles & dens:ou bien d’autant que la diftention d’elles eftoit mortelle.
- 3 3 Quand premiersfur les cj^mps Vindrent les anmdulx
- 33 P ourle s gites çy gland ces muets & brut% troupeaux
- 33 Qomhatoïent d’ongf &poïns,puis aux haélons le cours,
- „ Puis aux armes foudain forcé fut le recours.
- Si les premiers n’euftènt r^piené du commencement ceft art procédé d’entrée de nature,& alors rud^ & prefque fortuit,à vne difeipline, & à l’cx ercice d’experience,comme ont fait les Afsiriens, lefquelz ont efté les premiers qui certainement ont mené la guerre à leurs confins -, combien que non gueres cruelle ne trop rude,d’autant que les peuples eftoyent encores bien neufz pour y refifter, ne n eftoyent en grâd nombre,ne fort peuplez, attédu que c eftoit mille ans apres le deluge deNoé,lors que le Roy Ninus fils de Belus (auat lequel ie ne treuue rien es Iiures elcript d’excellent) a mis loubz fbn obeiflance ceft Egiptien Vefor,& Tanée Roy de Scytie menans
- la guerre
- p.001V - vue 14/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE I. *
- la guerre aux nations loingtaines,fàns chercher domination,mais tât feulement la gloire de leurs peuples(i’excepte toujours les contens de la feule victoire) aufsi a-il toutes les nations & peuples depuis les limites de la Syrie iufcjues a lextremité de la Lybie: auquel temps ilz commécerent à fen-tredreffer embufehes, & facquérir gloire par le fàng humain : ou comme les Abantes, Iefquelz feulement eurent 1 art de combatre de près , & outre tous autres, de venir au côbat de main a main auecq l’ennemy. Car comme dit Antiloche:
- X es dru% arc% il% ne tendent ou tirent coups de fonde, jVy ne donnefur merles cruelles batailles Le fier Marsicar de près a la roïdeur d’effe'es On vuide le combatfont fur tous ontvfé Les vaiîlans en bataille & fiers Megrepontoi’g.
- Ou bien comme les Candoys,Ie païs defquelz a eu le premier renom ert rames & fléchés, ou bien comme les Chalibes qui ont efté lesplushardiz de toutes les nations bélliqueiifès : par Iefquelz a efté le fer premièrement fouillé & mis en œuure :ou bien(commeilfêmbleaHefiode)parceulx de Candie, qui ont efté appeliez Daétyles Idées. Les autres donneront cefte gloyre, partie aux Aphricains, partie aux Theflalins, du nombre defquelz les Centaures habitas au long du mont Pelion, ont premieremét monftré à côbatrc a cheual & de volter à toutes mains.Mais quant aux Aphricains, d’autant qu’ilz ont efté les premiers qui contre les Egiptiens ont combatu à cours ballons, qu’ilz appellent Phalanges, il fen trou liera qui debatront au contraire, comme les Doces, les Medes,& Thraces : Iefquelz on tient fi certain auoir toufiours eftéfi gés de guerre, qu’on dit commünemét, Mars cftre nay entre eulx.D’autre part les Gaulois querelleront cefte gloire contre ceulxcy,comme leureftant à bondroiét deuë rveuquepar l’auisdes Druides; ilz fê diet eftre tous naiz à la guerre parleur pereDitis,auquel toute la force & nature terreftre eft dediée : ne fbuffrans venir publiquement deuant eulx leurs enfans que premièrement ilz n’ayent Page fùfFifant pour le fais de la guerre. Les autres 1 attribuerontaux Athéniens, d’autant que leu r Cité(dont il n’cft rien plus renommé en la Grece) dépend de Minerue princcflè& decfle,inuentricc de la guerre,& des armes,laquelle on appelle en Grec Àâ»m, comme qui belliqueufê ôrfâgejatyoulu elire la région telle, qu’elle portail les homes telz qu’elle eftoit. Plusieurs finallemét la lairront aux Lacedemoniés,ladifcipIine defquelz il eftmanifeftc(àfin que ielaifte les autres)parlesexéples de f Maharbal exceller capitaine, & par Xantippe yCjCar_ combien elle a efté profitable en l’exercice de la guerre.De vray par l’indu- thaginen-ftrie de ce Xantippe foldat ou capitaine, il fut tué trente mille Romains, eftantleur chef Régulé prins,auec le nombre de cinq centz cheuaulx. niiConis* Hannibàl aufsi en la fecôde guerre Punique, apres eftre pafle par les Alpes faâionis en Italie, faydant de ceft autre Lacedemonien pour guide, auecq vne ar-mée prefte, hardie, & prompte a la guerre, a (comme Ion dit) tué plus de Liuio*
- A ij
- p.002R - vue 15/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- deux centz mille hommes du peuple Romain, & prins plus de cinquante mille. Par la conduide duquel (ie me tais du demourant) c’eftoit faid des Pvomains apres celle tant grande & merueilleufement epouuantable def-faide aux Cannes,fi le retardement d’affaillirla ville de Rome,n’y euft fait obftacle,& que l’an de la guerre en vn fi grand trouble d’affaires,ne fuft retourné d’vne lôguc demeure quafi comme reffufeité de mort a vie. Lequel finallement apres manié en toute diligence,n’a pas feulement procuré aux Romains la principauté de tous leurs voifîns,comme Sabins, Hetrufques, Latins, Hernicains, Volfques, & Auronqucins, & de tous les peuples de l’Italie : mais d auantage les a fait Roys & Seigneurs de prefque toutes les nations & peuples effranges du rond de la terre.
- QV’EST CE QVE VJRT MILITJ1RE, ET EN
- combien de parties il ejldiftribuéfélon la doftrine d'ipbïcrate : £7* comme il ejlparfaift en trois cbofès,toutainfîque les autres arts:par nature, doflrine}& exercitation: & comme il ejl de bejôin a cil qui auecq glojre veult commander aux autres, entendre à plujîeurs exercitations des art% nobles. Cbap. 11.
- ’A R T militaire eft vne certaine partie ciuile,& meftier fort honorable, pour en defen dant côfcruer les autres parties de la puifi-fànce ciuile,&qui mefmement eftneceffairc félon nature:& pourtat a bonne raifon forcée à ce mefmes par diuers exemples, de diuers temps,par chois & fêrmét.Ceft art donques eft (comme dit Iphi-crate)departy en gens de pied & de cheual,bataillons & chefz.Les gens de pied tiennent la fêmblance des mains, ceulx de cheual despiedz,le bataillon du pis, & de la poidrine:au regard du Capitaine,il tiét celle de la tefte: lequel,comme dit Ariftote, eft comme l’entendement ou l’efprit. Oultre plus ccft art eft acomply de ces troys chofcsj de la nature,dodrine^& exercitation. Parla fource de nature les hardis font engendrez des bons & har-diz. La vertu des peres eft es taureaux & cheuaulx, ny n’engendre l’aigle le. debile pigeon,comme dit Horace. Mais qui doute que la dodrinc & in-ftitution ne foit de grad fêcor.rs a ceft art ? veu que iadis on ait donné grad honneur aux batailles vuidées par toute maniéré d’artifice des artz nobles, corne quafi a vne pepinicre de Capitaines & Chefz : & que noz anceftres auoient de coutume de bailler a ceulx qui alloient à la guerre des gardes & maiftres pour les dreffer la première année. Ce que aufsi le Prince des Poètes n’a pas oublié en fà poëfic de Pallas,difânt:
- Soubs taguyde mener le meftier de la guerre,
- Euure de Mars molefte.
- Au demourant lavigueurde l’vfage& exercice eft tel, que le coeur des combatans eft toujours preft au combat, & ardant à la bataille : la ou fi tu mènes vn nouicc de guerre tu le trouueras tenant de la femme:& combien que coutumièrement fon âge le rende plusroidc quen’cft le viel foldat,
- touteffois
- p.002V - vue 16/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE I. 3
- toutefFoisle vieil foldat montrera le chemin aux autres,comme qui eft aguerry.Veu que comme fbuuenteffoisontranfporte lesbleflez hors des troupes, nous voyons le ietine homme de guerre & mal aguerry pallir au moindre foupfon de playe auec vn cry par trop efféminé : la ou tu verras le vieil foldac aguerry & endurcy aux coups, & qui blejfïe rapportera bien forment la vidoyre. Et quoy qu’il foit quelquefFois rudement repoulfé, battu,& portépar terre,tu le verras derechef reuenirau combat dédaignât les chirurgiens & leurs emplaftres. Comme dônqucs ces trois chofês foient neceffaires pour vnparfaiétmaniment de ceft art,qui font (comme pous auons dit)nature,dodrine,& cxercitation, il eft: neceffaire que celuy fbit côfbmmé en toutes chofês,qui fê voudrapreferer aux autres. Parquoy il eft neceffaire que le chef de guerre foit ingénieux, docile, & prompt en toutes difciplines,& en la cognoiffance desinftitutions des anciens,ny ne peut la vigueur de l’entendement fans difcipline, & exercitation de plu-fieurs chofês grandes,ne la difcipline aufsi denuée d’efprit,& exercitation, rendre vn Chef parfaict.Et fi quelques vns le penfent autrement,ilz fabu-fent beaucoup^ font en bien grand erreur. Et comme il ne fbit nul art,ne difcipline fi parfaire qui n’ayt aufsi befbin de l’ayde des autres difciplines comme en ce meftier, auquel on entend continuellemét aux inftrumens, veu que les vns aguifênt leurs pointons,!dards,& fléchés,les autres enten- tLegôte-dent à proportionner & compaffer les baliftes, & fêorpions, & que les au-cuns font empefchez a ouurer des mordz, & â toutes ces autres chofês qui fagittis. concerna l’accouftrement des homes & des cheuaulx,il ne fault pas trou-uer eftrange fi ie fîiys d’auis qu’à ceft art militaire il y a beaucoup de beaux enrichifTemens de pîufieurs bônes & nobles fciences, aufquclz il fault entendre.Soit donqucs premieremét le Chef homme de letres,& qu’il fuyue les preceptz merueilleufêmet fàlutaires de la philofophie,qu’il ait aufsi plu fleurs & diuerfês hiftoyres en memoyre, fans ignorer aufsi l’art d’oratoyre & poétique : & qu’il ait félon fbn pouuoir la cognoiflànce de la Mufique Arithmétique,Geometrie,des raifons des eftoilles,& du ciel. Qu’il entende aufsi la différence des droiétz & Ioix de diuerfês nations,fans dédaigner la cognoiffance de medicine : & que finallement il fadonne du tout à la Iuite,& àfàulter,& à l’exercice &paffetemps des gens de guerre, & finallement aux autres chofês militaires, pourles couronnes & triumphes, comme qui font fort neceffaires, & qu’il foitainfi,en voycy fubfêquemmenË les caufês.
- DES LETTRES, ET DE BEJFCOVP DE
- chofês dignes de mémoire, de ceulx qui Jÿ font adonnéChdp. III.
- L fault fur toutes chofês qu’vn Chef d’armée foit lettré & bien apprins.Car les lettres luy fêruent d’vn bien grand fêcours, & de forces bien auantageufês à dreffer fâ façon de viure, & pour acquérir vne gloire en augmentant à iamais la mémoire de fes
- p.003R - vue 17/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- prouelfes. le rfentends pas des lettres vulgaires,ne de ces lourdes & barbares, defcpielles faydent auiourd’huy les Chefz d armees : mais de celles qui font nobles acompaignées de la foiènee de plufieurs choies. Car celuy qui ne fera ainfi inftruid, n’entendra point les ordonnances de ceulx qui ont elcrit,ne luffilàmment les exemples de ceulx dont on elcrit.Pour lelquelles acquérir,il fault ananttoutes choies quel’entendemétfoittrempé & qualî commeabbreuuéparledeuoird’vnbonmaiftre,vcu quenoftrediligence & folicitude eft neceflaire : & que le temps & l’heure le rencontrent quelque fois, aufquelz il fault fe déporter de la guerre, veu qu’elle ne le mene pas toufiours,& que chafcun a iour & nuid quelque loylir,auquel tu peux garder lamaifon & eftre lèul auecques les anciens amys, i’entéds les liures. Ce que confiderat Philippe Roy des Macédoniens trelTage, bailla fon fiîz Alexandre à Ariftote, Prince pour lors des Philofophes, pour par fus tous autres maiftres, aufquelz il en auoit baillé la charge, luy apprendre les lettres.-^ fin qu’il facquift celle excelléce de littérature, & érudition,dot nous auons maintenant parlé. Ce que ce Roy la lî prudent n’euft pas fait, fi ce n’euft efté qu’eftât baillé par fon frere Alexandre en oftage aux Thebains, il auoit efté inftruid l’elpace de troys ans par Epaminondas vaillant Capitaine & excellent philofophe : ny n euft vn fi grand Philofopbe prins celle charge, fi les lêmences des bons artz n euffent deu cftre traidées d vn bon précepteur. Pour laquelle choie les lettres qu’il a elcrit a Ariftote touchant fon fils,font encores en nature, de celle teneur.
- 3) Saches que i’ay eu vn fils, dont ie rends grâces aDieu, nonpas tant 33 pour là naiffance, que d’autant qu’il eft nay de ton temps. Car i’elpereà „ 1 auenir,qu’eftant nourry & enlèignépar toy,illè trouuera digne defocce-,3 der à nous & à noftre Régné.
- O lamerueilleulèment lâge parolle,& digne d’vn fi grandprince:quia penle fon fils de tant digne de lucceder àl’auenir àla courone & au régime d’vne fi grande charge,qu’il lèroit dreffé es lettres & Iciences. Aulfi auint il ainfi : veu que de là nature premièrement par la conuerlàtio'n,puys par la dodrine &enlêignementd'vnfi grand philofophe ce Roy eftantparé,a fait de forte qu’on le penfoit eftre engédré de Dieu & aluy fort lèmblable. Car foudain qu’il fut hors d’enfance & mis foubz le gouuernemct d’Ari-ftote Tenace de cinq ans, & depuys foubz celuy de Califtenes il a (alïaillac tout le mode) battu innumerables nations & armées d’ennemys, Ce failànt cognoiftre par tout le rôd de la terre par fos vidoyres. Et comme en ce téps t tego là il trauatllaft d’armes prefque îtoute l’Afie,preffant de près de batailles ôc cômun?° via°yres ce fipuiflant Darius Roy de Perle & Medie, on peut par ces pre-fentes,voir en quant grâd eftime il auoit les lettres,& combien d’honneur il leur a fait. De vray durant ces fi grands affaires ilelcriuità Ariftote des lettres par lelquelles il le plaignoit ainfi.
- " Ce n’eft pas bien fait à toy d’auoir mis en lumière les Iciences Ipecula-« tiues : car en quoy d’orelhauantfurpalTeronsnoiislesautres,filesdilcipli- .
- nés
- p.003V - vue 18/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE I. 4 „ nés efquelles nous auons efté dreftèz commencent eftre à tons communes?
- Car quat àmoy, i’aymeroye beaucoup mieulx exceller en do&rine, qu’en armées ôc opulences.
- Parauenture que celle parolle lent fbn homme conuoiteux&enuicux attirant tout a Ion profit, mais aufi la conieclure en eft plus aifie, en quât grand’ eftime il a eu les lettres, veu que ne portant point mal enuis d auoir es autres choies des compediteurs, il ne pouuoit en elles loufirir vn emula-teur.On peut aufi aifiment cognoiftre quelle folicitude de dreffer fin entendement & quel délira eu Antigonus excellent Roy des Macédoniens par Perfée & Philonide lès précepteurs, & par les cholès qui corne dit Apol IoniusTyrius,onteftéefirittesdeZenoîparluyenceftefirtc. fLcgoab
- 33 Antigone à Zenon Salut .le penlè bien te palier en fortune & gloyre: c°^°ad 33 au regard des difciplines & artz nobles & de la parfaire félicité dont tu 33 iouys,ie me lèns beaucoup moindre que toy. Parquoy i’ay auile te prier de 33 veniramoy,meperfiadantquetunemefouffriroispoint eftrefruftré en.
- 33 mes prières. Et pourtant efforce toy en toutes fortes de me faire ioyr de ta 33 compagnie, tenant pour certain que tu ne feras pas feulement mon pre-« cepteur, mais auffi enfemblement de tous les Macédoniens. Car il eft cer-33 tain que qui endo&rine le Roy des Macédoniens, & le dreffe à la vertu*
- 33 inftruit aulïî fis fibie&z à la magnanimité & preudhommie: attédu que le 33 plusfouuétileftneceflàireque lesfùbieétz deuiennettelz qu’eftleurChef.
- Ny n’a fins propos (fi nous croyons à Homere prince des lettres) le Roy Peleus baillé fin fils Achilles (comme Ion dit) en charge à Phénix pour autre caufi, afin qu’accoutumé à l’exercice non feulement de bien parler, mais aulsi de bien faire, il acquift & creuft toulioursen honneur.
- Qu’a fait Themiftocles , lequel i’ofe bien dire entre tous les preuz du fing Grec auoir efté le plus renommé, & le plus ruzé & fige Capitaine de toutelaGrece?N a-il pas eu des précepteurs pour apprendre lesfiiences?
- Et combien que f Stefimbrote les tienne auoir efté Anaxagore,& Meliffe + le pnilofophe : en recherchant touteffois bien la raifin des temps, par la- brotus^, quelle il eft certain auoir failly, il fimble qu’on doyue auoir plus de foy EmmTces aMnefiphile, comme qui le dit auoir efté difiipledePhrcarée,pour tantImbr0“ fiulement apprendre la difiipline,que nous appelions Art militaire: combien qu’au parauat fi confiant défi nature,il l’auoit dédaignée. Au regard de Dion le Syracufiin,Platon l’a dreffé en toute façon de difciplinesd’aue-nement duquel vne Epiftre de Dionyfius le plus ieune a Iuy, montre de quant gran d defir il a requis, & en quelle eftime il a eu, comme qui en ce temps la a plus ayméles eftriptz d’Architele Pythagorée, que de nul autre . L’opinion aufi de Platon a eu longuement grade authorité entiers les anciens,lequel eftoit d’auis que lors les Republiques firoient bienheureu-fis quâd les Philofiphes regneroient,ou quad les Roys philofopheroient.
- Ny n’a Ifocrates inftruit d’autres ars Timothée grand Chef de guerre & treffçaliant homme, fils de Conontrefixcellent Capitaine. Quelle eftoit
- A iiij
- p.004R - vue 19/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- l’érudition d’Epaminondc grand Philofbphe & Capitaine? quant grande l’auons nous entendu auoireflé en luy? N’en donne Ion pas l’honneur à Lyfîas le Pythagorien?Au regard d’Archefilae,homme bien entédu en Part militaire,& inuenteur des combatz fur mer,nous i’auons cogneu tellemét ententif a 1’eftude des lettres, qu’il le repofoit de tous les affaires fur Euripide le Tragique. A la mort duquel le Roy n’eftant allez fàtiffaid: de faire les mifes & depéfès funèbres, a publicquemét donné a cognoiftre par la rafure de la barbe,&: la tonfure des cheueux,la grande douleur qu’il auoit conceu en fon cœut. Nous auons auffi entédu que Pyrrhus Roy des Epirotes grâd homme de guerre, n a pas feulement leu les hures, mais a d auantage eferit beaucoup de bôs auiz de Part militaire. Hannibal excellent Chef des Car-taginoys homme tant grand & tant caffé pour les guerres, a auffi(comme Ion ditjemployé quelque temps aux lettres, eftant au camp : comme qui oultre le Sylenefeftaydé es lettres Grecques de SoftlaeLacedemoniépour dodteur.On dit auffi que les Mufës vierges marcherét en camp auecq’ leur pere Liber,lefquelles donnoient grand paffetéps a ce Capitaine, les voyant bien apprinfès.esfciences : lequel auffi le pédagogue Silene nourriffeur & dreffeur des bons artz a enfûiuy,& luy a fait beaucoup d’honneur, tat pour la vertu que pour la gloyre, & meftier de la guerre. Tu ne t’emerueilleras point de Mitridates Roy de la grande Turchie, Capitaine de grand renom, aianta Page de foixante & douze ans toufiours auecq’ foytousPhi-lofophes de grand’excellence, eftant auffi grand ou plus en toutes manières de feiences, que nul de fès predeceffeurs. Au regard des Capitaines Latins,ou bien des Princes Romains,combien que parauanture,ilz ne fôient pas égaux en feauoir aux eftragiers, ilz ont touteffois prefque tous efté doutes & excellens en lettres.Cato de vray,qui a efté le premier de toute la race Porcienne de la plus grande viuacité d’efprit, eftimoit chofè bien excellente d’eftre bien apprins es lettres: mais on peut bien iuger combien tard, par ce que ia au parauant inftruit es lettres Latines, il a efté ia vieil enfèigné par Q^. Ennius es lettres Grecques eftant Prêteur en Sardaigne : tellement que non feulement il a efté receuable en celle ancienne éloquence,art ora-toy re, & hiftoriographie, mais a auffi efté grand Iurifconfiilte, & merueil-leyfèment ardant en toutes lettres rdefquelles combien que vieil (comme nous auons dit) il ait prins Peftude,il a touteffoisfi bien proffité en elles, qu’à peine fè trouuera il chofè des difeiplines Grecques, ne Latines qui luy ait efté incogneuë. Et combien qu’vn autre Catô,fon fûcceffeur,& de plus frefehe mémoire, fuft d’vne plus tardiue apprehenfion des lettres & difeiplines,eftant touteffois dreffé premièrement fôubz la charge de Sarpedon, & du philofbphe Antipater de Tyrie, il entra en vn fi infâtiable defir de lire, que comme vn deuoreur de liures, & mefmement des Stoiques, il ne fè contenoit ne en fon priue, ne en la Cour, mefmes contre la folle opinion d.u peuple quand le Sénat faflèmbloit, qu’il ne les eut enueloppez dedans farobbe,pour nourrir fon efprit,quafi comme de quelque viande d’humanité,
- p.004V - vue 20/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE* LIVRE I. 5
- nité,fans rie défaillir au deuoir deu à la Republique. Nous liions aulïi que Scipion l’Affricain & premier s’eft retiré du meftier de la guerre& de la République aux lettres:& combien qu’il ne foit point demouré de témoignage de Ion elprit, & qu’il ne fen trouue rien par eferit, nous Içauôs bien tou-telFois qu’il n’a point exercé le meftier de la guerre làns lettres & làns les Mules Pieries. Car comme dit Claudian de luy. a Je s co fié s efloit, £7* à tomes alarmes
- 3> Le feauant Enritus fe rencontrott en armes.
- Et comme de bonne heure iltriumphaftreuenantde la conqueftede Cartage, il voulut que le Chef d’Ennius fut couronné d’vne Martiale cou ronne de Laurier, tout ainli que le lien .Et li dauantage ordonna (que tu confefferas beaucoup plus grand & elmerueillable) que la ftatueôe effigie du mefhie Poëte, fuft aftife es monumens & lèpulchres de la race des Cor-nelins : & que ce nom tant glorieux, ou bien la dépouillé rauie de la tierce partie du monde, fut leuë furie chemin auccq’le tiltredu Poëte :penlânt que la memoyrc de lès geftes ne fe pourroit efteindre, fi lalumiere de ce di-uin Poëte y efteit côioinëte. Paul Emile apres auoir lubiugué Perlée, meit peine de tout Ion pouuoir,que lès enfans fuflènt dreftèz en ladilciplineRo maine en laquelle il auoit efté apprins: & comme a celle caufe il euft requis les Athéniens de luy enuoyer vn philolbphe bien eprouué pour fes enfans,
- & pour aufti dôner ordre au triumphe de la f vi&oyre, les Athéniens éleu-1 Le§° rent le philolbphe Metrodore 1’affeurans eftre en lès deux Ibuhetz homme proviao-trelèxcellent. Ce qu’aufli Paul iugea eftre véritable: & non cotent de ce,fil m auoit quelque relâche des affaires publiques,il lè trouuoit a leur leçon eftat enflambé d’vne merueilleulè amour en l’érudition de lès enfans. On dit que IulleCelâr n’a iamaispaffé vniourlânsle&ure-.lequel comme nous auons entendu Ibuuenteffois feft trouué au college des Poëtes pour les cô-muns eftudes,quad il luy eftoit loylible, & qu’en lès fort fâcheux voyages,
- & au fort de lès guerres, il elcriuoit & lilbit des liures, diëloit, & donnoit audicnce.Le diuin Celâr Augufte,fils du diuin Iulle a(comme Ion dit) lui- .
- uy de fi grand delir les erres de Ion pere, que liant prelque opprimé de loul-cyz infupportables de la guerre & de l’empire,& aftiegé des embulches des coniurez, il lè relèruoit des heures, & momens, ny ne laiffoit perdre inutilement aucun temps,faydant d’Apollodore de Pergame enlèigneur de lettres, & non content de ce,il a eu pour apprendre diuerlès Iciences oultrele Philolbphe Sperarée& Afinin Pollion,ValereMeffala, Parie, & Geminus tous excellens Orateurs,Virgile & plufieurs autres poëtes de ce temps la, le fùyuans &tenans là table toute làvie:& beaucoup plus par vnegratieulè conuerfation, & humaine façon deviure,queparvne fubieëlion : & me£ mement Horace comme nous l’auons leu en lès œuures,clcriuant ainfi de 1by à Iule Flore.
- U <yiux armes encor neuf la fureur de la guerre
- jj Chiile ma joulfé} inegaUes aux forces
- p.005R - vue 21/480
-
-
-
- 5>
- JJ
- 33
- 33
- Si
- 3>
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- ROBERT VALTVR1N
- Du grand Ce far ^4ugu fie: & là les Philip peins Me ldtfferentyparquoy depauureté t audace Js/Ta forcé faire vers3comme bas gy a pennes Bptgne'es3denuéde tous biens paternel Aulfi a il eu Ouide dilànt ainfi.
- ^Au tour que de Juba magnanime les forces Delojdttes Cefar rompit viélorteux Es limites Ly biques ,alors Ce far mefloit Chef CT meglorifie auo 'tr eflé Tribun Soubs luy:carfur ma charge ilauoit le regard.
- Ce fieçre îay aquis parla guerrey&enpaix T u me l'as procuré efiant decemuiral.
- Combien que finalement l’eflimant indigne de là compagnie, il le relégua en Scytie, la ou il mourut, duquel banniflement il plcint par ces pa-rolles la rudefle & longueur.
- Vay ia d\n quinquennal en Scy tic te face Fourny tvn autre aufiiprefque du tout fepaffe.
- Orfortune fobfiine, demie reueche Maliàeufement tous mes defirs empecke*
- Par le moyen donques de ces autheurs de la langue Grecque,& Latine, lelquelz Augullelifoirfouuent,ilcomprenoitdegrand ardeur les choies lèruansparvne dodrine ou exemple à l'érudition & bonne façon de vie d’vne dilcipline priuée ou publique/Tenat donques ces choies en memoy-re,il lesfoloit la ou l’affedion le requeroit remonftrer Ci bien de mot à mot à lès amys, & au camp à ceulx de là cognoilïànce, ou bien aux Magiftratz Prouinciaux, & des villes, qu’il leur perfuadoit que telles choies ne luy a-uoient pas ellépremicrement en recommédation, mais aulfi aux anciens. Finailement ilnefeftpas acquis moindre renom des elpritz du rencontre de telz autheurs ôc Içauans hommes en vn melme temps, que de toutes les légions Romaines .Mais quel aulfi grand bien luy ont peu rapporter ces trente cinq races du peuple Romain, ou bien tant de légions belliqueulès, comme feulement a fait Maro de là poëlîe heroique, ou bien Horace de la lîenne auecq la Lyrique pour la durée de Ion renomrCar quât aux légions elles font peries auecques leur Chef, au regard de lès nobles faidz, ilz font encores en ellat par la louenge des poètes pour ne faillir iamais. Lucain a euvne merueilleufe excellence d’entendement, & vne cognoilïànce fort grande des lettres ôc de toute l’ancienne philofophic Academique, auecq vne éloquence de bône grâce, & a vefeu auecq l’amitié & côpaignie d’Antioche rAfcalonite,homme.de grand,fubtil Stmerueillculèment dode artifice de bien dire, D’vne melme amour âülfi P.Craflè entra en vne lî grande ardeur de la langue Grecque outre la Latine, lors que Conful ilpalfa auecq vne armée en Afie contre le Roy Ariftonique pour le deffaire, qu’il la cogneut enticrcmét par lès parties eftant diuifée en plufieurs elpeces: qui
- fut
- p.005V - vue 22/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE I. c
- fut vne choie qui procura vne merueilleufè amour de tout le camp. Ny ne treuue que ce tant heureux 5c bien fortuné Sylla,ne Pompée mefme grand Capitaine,ne Q_. Fabius,ne M.Brute,ne Traian,ne Adrian,ne Maxime, ne finalement Marc Antoine Aurelc (lequel pour lapourfuitedes lettres 5c fapience, a efté dit Philofophe)ayent efté eftrâgés de celle tât noble co-gnoiffance des lettres:veu qu’il foit mémoire qu’ilz ont efcrit des oraifons, epiftres,& liurcs. Aufii t’effe vn merüeilleufèment grand honneur, ô Sigif-môd Prince magnanime, de lire beaucoup,ouyr beaucoup, difputer aufii, 5c de patiemment fouftrir vne contradiction:& que corne tu ayesgrâd fça-uoir,& par grâce diuine toutes femêces de tous ars a l’opinion cômune de chacun, de touteffois apprendre tous les iours quelque choie es heures libres, 5c de te trouuer es aflemblées tat publiques que priuées à deuifèr auec les làgesrprendreplaifir aufii es grandes 5c fubtiles queftions 5c railons des choies naturelles,fauorifèr les orateurs, 5c poëtes de bo entendemét de ton téps, les enrichir 5c honorer : rhabiller les eglifès,& y dreflèr les librairies a tes propres couftz 5c defpens,en me donnât, 5c a autres plufieurs la charge de cercher les liures,qui feront non feulement proffitables à ton téps, mais aufii âl’aucnir. Et pourtant ienefçay,ne n’entends bonnement fil eflrien qui puifle cflre meilleur,ne plus digne à vn grand Chef 5c Prince pour fon immortalité : mefinement qu'en ton ieune âge tu fèmbles auoir acquis ces trois chofès, qui font déniées à plufieurs en leur viel âge, comme de faire quelque grade chofè 5c noble,q les autheursfùffifàns efcriuët de toy,ce que plufieurs tat poëtes que orateurs, & hifloriographes fontîou bien en efori-uant quelque chofè que la poflerité Iifè : comme font vn grand nombre de rithmesen langue maternelle deschofèshumaines,&diuines,quetuas efcript, 5c qui ia font cogneues par plufieurs régions 5c côtrées: ou bien en édifiant quelque grand édifice,corne efl la noble fortercflè, ou bien le plus grâd chafteau faidfc en ton nom,auecq vne excelléce telle de rufè 5c artifice de guerre,que fà beauté,afliete,& ordonnance attrayent 5c forcent à bône raifon non feulement les citoyens de le contépler,mais aufii tous ceulx qui iettent leur veue deflus. De vray on voit tout autour la plaineda beauté du lieu gifl en rempars egauz : ayant premièrement du cofté de la ville en fon tour la forme de ceintre.Ny n’efl pas croyable la profondeur du renefce-met, lequel eflat en tallu à la forme d’vne pyramide,depuis le pied du fondement a vne fort grande cpefleur iufques au haut, auecq vne hauteur de cinquante piedz:& au deflus de terre foixante canonnières,& autât au dedans,ordônées par certains efpaces, efquelles on afliet des balifles âpierres & fléchés pour repoufler les effortz des ennemis, 5c toute fèdition ciuile,fi quelquefois il auenoit. Le deflus a tel efpace 5c epeflèur, que plufieurs au rcncôtrer ne fè donnét point d’empefohemët. Le premier fofle & celuy du dedans,qu’vne fontaine continuelle replit,a cent piedz de large,& plus de trentecinq de profondeur. Le tour de toute la maflè,qui efl faiél de brique & pierre de taille,a en fon circuit trois cents cinquante pas. Au regard de
- p.006R - vue 23/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- l’autre cofté, & qui eft for le derrière,qui tire en quarré, le verger & le mur de la ville y eft auec double pont : aufli eft vne tour d’vne largeur incroyable pour fa defenfè auec grandes munitions, ôc vne porte couliffe de fer: H y a aufli vne grande place au dedans, & vn puy auec les loges ordonnées merueilleufémét bien d’vn cofté & d’autre & leurs gardes.Orace chafteau la ville en frôt,& a a fa première entrée vn rampart auec fa garnifon: & vne porte bien eftroitte : fubféquemmët font deux tours fort epeffes fur le foffé faiéles quelque peu d’artifice, eftât l’vne de couleur verte, l’autre de violet, auec vn double pont leuis de boys : apres lequel paffé on treuue vne certaine grande place tout autour de la maffe, laquelle eft pleine de terre iettée pour le rapart du premier mur. La hauteur du fécond mur eft de cinquante cinq piedz, & fon epeffeur de vingt. Il y a fix tours de quatre vingt piedz de haut pleines de terre,depuis leur fondemét fort efpes iufques prefque au fefte. Parquoy elles font de trete piedz plus hautes que ce mur. Au fommet & fefte d’vne chafoune tour l’epeffeur eft de quinze piedz : la ou for les collez de chacune d’elles font fèize logis des mortepayez ordônez egaleméc & percez dehuiélcanonnières pourtierpierres & fléchés.Oreft au milieu de ce mur a dextre vne bien belle pierre de marbre quarrée, qui comme les vers chatent en lettres d’or, dénotent Sigifmôd Pandulphe eftre l’autheur de ladicte mafTerfubfequemmét vn portail fort riche a main gauche fé mô-treaceulx qui entrent vn peu à main fêneftre , de marbre graué, &polyà l’vnglejd’vn bel artifice: for l’amortiffemét duquel eft vn elephat d’albafire Indien pour anciennes armories des Maleteftes paré tout auto ur de beaucoup d’or,& du nom de Sigifmond Pandulphe,fon autheur,auec aucunes grades lettres fplédiflantes. Au milieu de tout l’efpace de la placey a vn certain mur trauerfânt qui fêparc la fortereffe & ces deux flancs de fon aire du puy,& d’vne maifon de charpéterie:côtre lequel eft afîife ta maifon Royal-îe bien eleuée, qui n’eft pas depuis fon fondemét d’afliete fi carree, comme elle eft fpatieufé,auec le rencôtre de troys portes, & leurs dangereufés cou-lifTes,ioind les marchecouliz, & la fîerte des defenfes auec leur garde, plu-fieurs chabres,vn puy fort profond,auec aufli vne triumphante montée,Se vne fâlle pleine de toutes maniérés de baftôs,& artillerie,& qui eft pareillement d’vne hauteur efpouuétable, corne qui furpaffe les fommetz des plus hautes môtaignes,auec vne veue bien auat dans la mer. Finallement ie ne puis palier ce que du comencement i’ay délibéré, veu que ce n’eft pas feulement la tutelle & fàuuegarde de la ville & fortereffe d$ Rimene, mais aufli vne vraye merueille de la magnificéce Italienne. Et comme toute la maffe foit creufe & garnie de plufieurs faillies & auenuës par lefquelles les gés de guerre peu uêt fortir fur la ville par des poternes fans eftre decouuerts de nu 1 des citoyens,& à fin aufli qu’elle puiffe eftre hors de toute batterie,& de tra hifon, il y a au dehors vn autre foffé fort grand auec eaueviue, tout ainfî qti’vne riuiere,qui eft vn ouurage d’vn bien grad Sc excellent entendemét: car d’vn cofté & d’autre elle eft tout autour forte d’vne grofle muraille auec
- les
- p.006V - vue 24/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE." ' LIVREE 7
- Ce s flânez & rampars,& au demourant elle ell dreflfée dés le fondement de tours de merueilleufo epefleur aucc fos petites canonnières, comme defllis nous auons dit, a fleur d’eau & de terre : & les loges des mortepayes,ioinc l’ordre de la menue artillerie & du trait,d’vne fi grande force,& d vn ordre tant merueilleux de l’elpace d’entre les deux foflez pour loger tous les gens de pied & de cheual:de forte que les continuelles batteries des engins ne la pourront corrôpre,ne la force de l’artillerie l’abbatre: ny ne Içauroit on dire, fi la force de celle place, ou là beauté fera plus admirable aux homes. le laifle les édifices foins & honorables dediez aDieu. Ielaiffeaulfi le téple de Fortune, Senegalle, auec les autres villes que tu as réedifié : les bourgades que tu as dreffé,lesfortereffes bafties,& infinies autres telles chofos,quima nifeflent ton nom par lettres. En quoy fi nous teparragononsaux autres Princes & Roy s de noftre temps, tu foras à bône raifon dit les palier tous en toute façon delouenge,& mefmement d’autant que celle louengc a des ra cines fort amples,ellant fi folide & ferme qu’elle ell pour durer a iamais:de forte quelle ne pourra ellre corrompue de vieillelfe,ne par Toubliance des homes ellre effacée de lamemoyre. Combien dôques ell louable & digne d’ellre enlùyuie celle tienne vie,& de ces princes qu’hores nous auôs nommez,Iefquelz ont employé leur formelle,& la force de leur âge pour le païs, & leurs derniers ans à leur proffit,fuy uaut ce qu’en ordonnent les loix, qui veulent que les vieillars viuent en reposîCombien auflï ell blâmable & de-tellable celle de Licine & de Domician Cefor, & d’aucüs autres,lelquelz la fortune a préféré aux autres en richeffes,& lieuren gloyre & dignité de lla-tuës de leur race : lelquelz au contraire infâmes par leur vice, appétit, non-challance, oyfiueté, vilennie ont efté perduz ? De vray le premier auoit de coutume d’appeller les lettres, l’apollume, le venin, & la pelle publicquc. Nous auons entendu,que quand l’autre elloit las de la compagnie des homes, ou qu’il fo fachoit de quelque honelle affaire, &; qu’il fo vouloir décharger de celle cure & Iblicitude, & predre quelquepaffe temps, il fo reti-roit foui en fo chambre chacun iour, & la enclos il ne faifoit que predre des mouches par la piqueure d’vn poinfon bien pointu.Parauenture aulfi ell il excufoble côme de race rullique : car combien qu’il foit monté iulques à la dignité Ceforée, il n’auoit pas touteffois par la delpouillé fo nature prelque champellre & fouuage. Car ce dit d’Horace ell vray, la fortune ne change point la race. Paraueture deuroit on pardoner à cellui- cy celle entreprinfo Ci orde, & à fotant abominable occupation, & à l’auenement delà Principauté auquel ilpaffoit fon temps en telle volerie,fil eull employé le relie dutempsàeuures dignes de renom, & qu’il ne fofull donné à cognoillre plus odieux d’vne plus grande haynne par ces exécrables vices de celle vacation tat dîjgne de moquerie.Que diray-ie plus ? Tu ne trouueras nul Capitaine Romain qui foit exemple aux autres,excepté le foui Cn.Marin, ou bien M.Marcel, qui ait efté ignorant les lettres, & qui excepté le foui Licin (duquel nous auons parlé, n’aguercs) n’ait approuué l’ellude des lettres, &
- p.007R - vue 25/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- qui n’en ait fait grand’ eftime les pourfiiyuans de grand defir. Or que les Chefz,Princes,&: Roys de noftre téps crient, & fè mocquêt tât qu’ilz voul-drôt,lignifias ia guerre a la vertu & aux lettres : ôc qui d’vn feint dédaigné-ment couurentlalourderie deleurelprit,ou bien leur pareflè & lâcheté: le t’o Ce bien dire hardimét Sigifmond, que les liures & lettres eftoyét ancien-nemét les meubles Royaux & vencrables,& paremés des Chefz ôc Princes. Et pourtant Pififtrate eft loué en cela qu’eftant Roy des Athéniens,il fut le
- f>remier qu’on a dit auoir liurépubliquemét, ôc en cômun à Ce s citoyens là ibrairie pour la liredaquelle de rechef eftant augmentée lôigneufemét par les Athéniens,Xerxes leur ofta,ayant réduit la ville lôubz làpuiflànce:& la fit tFanlporter en Perle : ôc depuis long téps apres le Roy Seleuce, did Ni-canor, la fit (comme il eftoitrailônnable) trâlporter en Grece à la Cité des Athenies.Le loing ôc vn certain plailîr d’alfembler les liures de diuerlês nations^ artZjl’auâça tant en plufieurs, qu’Alezâdre, ôc lès luccelfeurs prin-drent fantalie de drelfer librairies.Par ce moyen on a cerchéJ& fait vn bien grad nombre de liures, & prefque incroyable en Egipte. Car on dit qu’à la première guerre Alexandrine,ainlî qu’on ruinoit la ville,& que les nauires parauanture furent brûliez par les gens du lècours eftant Celar didateur,il en fut confumé quarante mille,ou bien comme ie treuue autre part,quatre cents mille,ou bien corne dilènt Orolè & Seneque,lêpt céts mille prelques, ou bien lèlon l’auis de Aulus Gelius, & Amian Marcellin lêpt céts mille vo lûmes que les Roys Ptolemées auoyent compole d’vne grande diligéee : & ce d’autât que la flabe gaigna le quartier de la ville, auquel pour lors eftoit ferré vn certainement nnguliermonumét de la vigilance,ôc eftudedesan-ciens.lequel Tite Liue dit auoir efté vn ouurage excellent de la grâce & lô-licitude des Roys:côbien que Seneque le reprend ne le dilànt pas eftre l’ou urage de la grâce & cure des Roys,mais d’vne curieufè fuperfluité, & non encores pour cela, mais d’vn qui fè glorifie follement en îpedacles exquis. Les richefles Royalles touteffoisexcufênt parauanture aucunement le did de Tite Liue,& le faid de Ptolomée,& d’autant qu’il auifè pour l’auenir au bien publicq,& qu’il dône ordre à l’immortalité de fi grandz homes : mais encor eft il en cela merueilleufèmét louable, qu’il a fait traduire d’vne grade diligéce& depenfè,de langue Hebraique en Grecque,par homes éleuz, les Saindes efcritures,non feulement vtiles,mais aufti fort neceflaires.Plu-fieurs aufti des Chefz & principaux de la ville de Rome ont enftiiuy la mefi me cure & amour d’afiembler liures: defquelz Emilie Paul a efté le premier apres la defFaitte de Perfè trefpuiflant Roy des Macédoniens: & depuis Lu-culle, de la dépouillé Pontique: apres IefquelzIulleCcfar,baillât la charge à Marc Varron de recouurer, drefler, & publier les plus grandes librairies qu’il lêroit poftible des deux langues. On loue aufti en ce Domitian que côbien qu’au commencemét de fon Empire, il dedaignaft les artz nobles, il dôna touteffois ordre de reparer les librairies côfiimées par feu, auec vne recerche de toutes pars des exemplaires par homes enuoyez en Alcxàdric,
- qui
- p.007V - vue 26/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVREE 8
- qui les doubleroyent & corrigeroycnt. On tient à grand merueille par fus tous autres vne fémblable métion d’Azinim Pollion à Rome : lequel fut le premier qui en dédiant les librairies Grecques & Latines, a fait à la République des hommes ingénieux. Au demourat ie ne fçauroye pas bien dire; fil en a efléla au parauit d’autres,& en plus grâd nombre de liures: ou bien en Alexandrie 3e Pergame,lefquelz ontàl’enuie drelîe deslibrairies.Quât aux priuées,ie ne dy pas de celles qui fegalét,ou bien furpaffent les Royaux appareilz,mais feulement les autres: nous liions de Serein Samonique,home de grande do£trine,mais de plus grand fbing enuers les belles lettres grand nombre de liures,qu’il auoit fbixante deux mille volumes : lefquelz tous en mourat il laiffa à Gordian le plus ieune:au pcre duquel il auoit eflé fort grâd amy.qui fut vn noble threfor,& vn héritage excellent d’vn cœur noble & façon humaine. le fuis d’auis que ceulx qui ont à eflre Chefz, &: Capitaines doyuent diligemmet cercher, & auoir à plaifîr celle abondance de lettres Grecques & Latines: comme vn fort grâd & perfaiét bien aux hommes. le fuis forcé de côféntir â Corneille Celfé,qui dit que la fàpience efl le fupreme bien:& le fupreme mal la douleur du corps: vcu que fâ raifon ne me femble point hors de propos. Car corne nous foyons(ainfî qu’il dit) compofèz de deux parties,qui font l’ame & le corps: defquelles la première efl la meilleure,& le corps la moindre : le fupreme bien efl le meilleur de la meilleure partie:& le fupreme mal le pire de la moindre. Or efl la fàpience le meilleur de l’ame,& la douleur le pire du corps : comme dôques la douleur foit le fupreme mal,le fçauoir aufli efl le fupreme bien de l’nomme. Sas doute donqueseome ie penfe on conclud que fi aucuns la peuuent acquérir,non pas pour oflétation,mais pour l'honneur,& dignité, & pour la cô-modité & vtilité du pais,ceulx là certes me fémblent pouuoir facilemet attendre la félicité,& béatitude. Au regard des autres biens humains,ilz font bien petitz & minces, côferez à ceflui-cy, & fort éloignez dé la dignité ôc excellécedeluy. Iefçay bien Sigifmond,quetu diras que c’efl vne trefbelle chofé de commader à plufieurs: mais la face de l’Empire efl beaucoup plus belle que paifibîe : & d’ont il n’efl aucune côdition plus curieufè,ne moins libre:ne d’auâtage plus férue félon l’auis de Seneque.Les dardz & pointons tiennent de toutes pars leur vie de près : l’efpée leur efl toufiours à la gorge: ilz font en crainte de leurs gardes,& fuïte,preflz atout faire,comme qui la fureur,ou pauureté, ou bien l’auarice militaire irrite facilement à toute façon de mefchanceté. Pertinax ne fut point tué d’autre que de fés foldatz, âufïi le furet les deux Maximins pere & fils. Ainfi auffi le fut Balbin,& Ma-ximimaufîi fut Probe Chef bien renommé : & femblablement Gratian & Valentinian le plus ieune,trefbos freres. Cefl autre fut trahy par fés Iegiôs, & Valentinian le futparfon compagnon .Autres aufli innumerables, in-uincibles de leurs ennemys,ont eflé deffaiélz par leurs armées:& ont trou-ué pour bourreaux ceulx qu’ilz appelloyent leurs foldatz, & compagnons, & amys. Ioint aufli que toute façon d’age efl dédaignée en la principauté:
- B ij
- p.008R - vue 27/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- tout homme vieil Iêmble eftre inhabile, on charge la ieunefte de furie. La dignité de race eft belle .-mais quelle autre chofe y voit on que quelque louenge procédât des mérités des parés ? Les richeftes font choies precieu-lês,mais ce font dons extérieurs de la rauiftante fortune : lelquelles donnée torment en leurs pourchas:& apres eftre acquifes,leur récréation effemine, & fi enflambe la conuoitifè:auec ce que fortune les brouille,& trouble àlà fantafie. Or les liure-elle â qui bô luy Iêmble, & les iette à ceulx qui les ont. Puis de rechef elle les rend quâd bon luy iêmble â ceulx qui n y ont point d’eiperance.-iôuffrant aufti iâns autre egard,ne choys,le bon & le meichanc eftre participans d’elles. Il eft vray que la gloyre,eft entre toutes choies fort noble & gratieuiê : mais aufti eft elle inconftate, & fubieéte à beaucoup de perilz: comme qui eft vn bienfait beaucoup plus iouuent de fortune, que de vertu.Ny n’eft rien plus vain comme dit Tneophrafte : dont il n y a rien plus pernicieux,â l’auis de Iuuenal.La gloyre de vray de quelques vns a au-treffois ruiné le païs: aufti a le dèfir de louenge, & de tikre. La beauté de la forme eft plaiiànte,mais c eft vn bié, ou frefle, ou bien (comme dit Ouide) fans puiftance : laquelle Bion dit eftre vn bien forain, & Theophrafte vne déception couuerte.Socrates l’a appelle vne tyrannie de petitte durée: Pla-ton vn priuilege de nature.-Carneades vn régné ibIitaire:Thcocritc vne rature d’yuire; Iuuenal vne florette ioudain paftée,dilânt:
- » Or hafte fort /es pa% la bafliue florette,
- » Fort brieue portion de ce fie pduttre vie:
- » Pendant que nom beuuons,çy* que nom deflrons
- a Bouquets y fenteurs & filles 2 nofh'e defeeu lors
- « Nom furprent la VteiUejfe.
- La bonne fiinté eft plaiiânte, mais aufti vne reiouiftance eft mal auifee, qui a de coutume rendre les iouiiTansnonchallans &inconfiderez, & le plus ibuuéc d’attraire maladies : deiquelles la côfideration d’vne débilité iè fuft détournée. La force eft defirable.Or n’eft il nulles forces du ièul corps, qui ne fafoybliftent & confiiment,ou de trop grad trauail,ou dvne grofte maladie,ou bien de la vieillefte, qui mine toutes choies. Voyla comment vne force d’vn mallêcret a vaincu Hercules donteur des nations, & inT uincible par les hommes-Ainfi aufti vn arbre Ièul entr’ouuert, & fort bran-chu a arreftéMilon le Crotoniate,luyteur fort renommé, & l’a offert â la gueule des belles fauuages. Au demourant, la dilêipline des lettres, & des cholês humaines coniointes auec la vertu, Iêmble pouuoir décliner & fuir toutes ces incommoditez:car ne cas, ne fortune,ne calomnie, ne maladie, ne armes,ne la peuuent amoindrir,ne la vieillefte la corrôpre : au contraire combien que toutes autres cholêsloyentfubiettes au. temps, leslculzmo-numens des lettres r’aieuniffent de la longueur du temps.
- Fin du premier liurc.
- p.008V - vue 28/480
-
-
-
- LE SECOND LIVRE DE ROBERT
- VALTVRIN DE L’ART MILITAIRE.
- Que la cognoijjdnce de Philofopkie 3 & der kifloyresporte de merueiÜeux projfit.% a cejle difaphne, que bien
- grande Capitaines ontefcnt htjloyres.
- >fOMME donques il foit plufîeurs eftudes de lettres félon !j cequemousauonsdit, ô Sigifmond Pandulphe Chef in-j uincible,qui peuuent apporter aux Chefz gloyre,& honneur : la cognoiffance tant excellente de la Philofophïe 6c des hiftoyres de tout temps fera en ceft art merueilleufe-mèntdefirable. De vray aufïi tous hommesdod:es,&ex-cellens,qui ontiamais grauement & Iâgementparlé,departent tous larai-fon de la vie,de forte qu’vne partie gifë en documës, 6c inftitutions,&; l’autre es hiftoyres. Or comme ceft autre f attribue la raifon, & la loy de viure, liurantlesdeuoirs des hommes, 6c que ceft qui eft hônefte, ou infante,ou vtile,quellechoféfoit decenteachafcun, quelle non :& quelle mette en auant les autres choies recerchées d’vn vif entendement, fi touteffois elles font feules déclarées, elles emeuuent plus lentement les cœurs des lifans, auec vne eftime d’eftre impofîibles de fai cl : mais la ou l’hifloyre,excellent tefmoing des faiëlz & des téps vient en place,elle dreffe aucuns flambeaux 8c eguillons, de forte, qu’il efl tout manifefte que les fantafies des hommes ainù tiedes fenflambent merueilleufémët à vn defîr de gloyre 6c d’immor-talitépar la memoyre des faiëlz excellens,au regard de ce que les documës de Pythagoras, Democrite, Platon,d’Ariflote, & du refie des Philofophes commandent : comme que nous nous iettions aux griefz tormens, 8c aux gradz periiz de la vie,q nousn’enfreindionspointlafoy iuréeàl’ennemy, que nous ne troublions point les conuenaces,& accordz de guerre pafTez, leurs parolles feront trouuées bonnes : mais la ou il faudra mettre la main à la pafte,le cœur f amollira, il fefpouuantera,& deffaudra : fi aufïi aiicon-traire tu mets en auant l’execution de Brutus à chaffer Tarquin, ou bien la magnanimité & force de Scipion Nafique contre Tyberius Gracchus, ou bien M. Attile RegulejGafïin Sceue Centurion, ou bien le foldat f C. Aei-lius,ou L.SiciniusDentatusTribun delà cômune, ou bien vn certain Cy-negirus, extraiclz quafi comme tefmoings, des monumens des hiftoyres: ou eftl’homme de fi laehe courage,ne fi amorty,qui ne femeuuc a l’exemple d’eulx,&: nefemployepourlaconfèruationdu païs, 6c àfonpropre fà-lut,& des liens,en dédaignant le péril,& la mort?Voyla côme les trophées de Mycialde ont eueiildThemiftocle. Ainfî aufïi ont efté les autres emeuz d’enfuyure lesexcellens.Capitaines, comme les Alexadres,les Scipions,les Sabins,les Gâtons,les Régulés,les Curforins,Ies Valeres,les Marcellins,les
- B iij
- f C,Aei-Iius pro Atilius ex Sactonio,
- p.009R - vue 29/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Emiles,& finallement les Gefars,& autres innumerables,d vne incroyable ardeur pour le commun renom de leur vertu. Au-demourat fi on veult regarder l’autre force de l’hiftoyre, nous la trouuerons pouuoirdreffer aux Chefz vne bien fuffifànt eftime en leurs auiz,auec vne prudence aux affaires de la guerre. Si donques nous voulons r amener en memoyre les proëf-fes des anciens, & que nous trouuions grandes Republiques, & excellens Royaumes,& peuples fort puiffans de nations diuerfês auoirefté augmentez, & renduz floriffans par vn bien fàge côfcil de la vieilleffe, d’autant que les vieilles gés femblent parla longueur du temps auoir beaucoup feeu , & veu,par vn rôdement de plufieurs pais,auec 1 expérience : en quelle eftime deuons nous auoir les hommes ftudieux & fâchans toute l'antiquité? aux-quelz les geftes font cogneuz, non pas d’vnfcul Sénat, & empire fcul, ne d’vn fèul agc,mais de toutes nations,prefque,& de tout temps ?Toutes lesquelles chofês noftre Cicéron donnant la diffinition de l’hiftoyre a exprimé en ce peu de parolles.L’hiftoyre eft le temoing des temps,la lumière de vérité, la vie de memoyre, maiftreffe de la vie, & meffagere de l’antiquité. Par laquelle diffinition tu entendras les raifbns des temps,les fai&z des homes,] a vie d’vn chacun,la nature,la formera penfée,les confêilz,les façons de viure, les œuures eftranges de nature, les euenemens de fortune contre toute efperance. A quoy aufli fêruira cefte façon d’eferiuains,corne vn bien & équipage de guerre,bien noble,& exceller, lefquelz il fault lire, & auoir en main pour la neceffité de la paix, & pour le temps de la guerre. Or entre les eftrangers Hérodote eft le premier auec Thucidide. Hérodote de vray eftant fôldat à la guerre de Perfê, lors que Xerxes defeendit en armes en la Grece, a montré par l’hiftoyre, qu’il a eferit fort élégamment,quel il a efté en cefte façon de parler. Thucidide n’en a pas fait moins : car côme il euft quelque temps hanté la guerre, il Ce meit finallement à eferire l’hiftoyre en laquelle il a efté fi excellent, que combien que (on renom en guerre ne fuft point incogneu,il feft toutefois acquis beaucoup plus de loz & gloyre de cefte maniéré d’eftude,qu’il n’a fait parles armes. On pourroit auffi dire le fèmblaWe de Timothee fils de Conon,lequel,côbien qu’il fuft Capitaine, aperfai<ftement& élégamment eferit l’hiftoyre. Mais encores(qu a mon auistutrouueras eftrangè,fitu n’as leu Probus)HannibalChef desAphri-cains tat renommé, & enueloppé de tant & fi lourdes guerres, a laiffé eferi-uant en lettres Grecques lesfaiétzde Cn.Manilius Volon en Afie,pour quelques tefmoignages de fon loyfir,fôlitude,& entendement. Iofèphe de raceluif, & Capitainedela Galilée,prinsparVefpafian, ôdaifféafonfils Tite venant de HierufàlemàRome, n a il pas offerfaux Empereurs pere & fils toute la guerre que les Iuifz ont mené auec les Romains, la plus cruelle, & la plus rude de toutes autres,qu’il a deferit en fêpt liures?N’a-il pas mérité vne ftatue? le laiffe les autres liures des antiquitez depuis la création du monde iufques au quatorziefme an deDomitianCefàr,efcritzparluy(cô-me aucuns le dient) en langue Latine, & clegance d’oraifon tous telz que
- nous
- p.009V - vue 30/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE II. 10
- nous les auons. Il en eft, qui le penfént les auoir eférit en lettres Grecques, & que depuis ilz ont elle tournez de Grec en Latin par Ruffin Aquilegéfe, félon l’auis d’aucuns: & félon celuy de quelques vns, ce a efté par autres. Quelques vns aufîi de noz Capitaines apres auoir hanté la guerre,ont efté enmefme propos que les eftrangers,de ne confumertout leur temps en armcs,fétranfportansparfoysdes affaires de la guerre à la vacation deshi-ftoyres:& des hiftoyres au meftier de la guerre. Parquoy M.Portius Cato, lequel bien fôuuent les homes doétes appellent par honeur pour la différence,maintenant l’ancien,ores le fuperieur,quelque fois le maieur, & fou uenteffois Prince de la race Porcie, &c Cenforin, a efcrit les liures des origi-nes,ouuragefort noble & fort ample: & auquel font plufieurs hiftoyres,& témoignages de l’antiquité,autant que nulle autre part, dot il en a fait fept, defquelz le premier codent quelles chofes ontefté faictcs parles Roys Ro-mainsdç fécond & le tiers les fondateurs d’vne chacune ville de l’Italie,leur commancement & origine, dont il a fèmblé auoir efcrit les liures des origi nés: Le quart codent la première guerre Carthaginoyfé : le cinqiefme la féconde, terrible, & mémorable que Carthage eut au ec les Romains fbubz la conduite d’Hannibal. Au regard des guerres, qui ont efté de fbn temps vuydées, le fixiefme & féptiefme les recitent iufques a la Preturc de Sergius Galba,en expofânt aufîi les faits de l’Italie, & de l’Efpaigne, qui féroyet ou fémbleroyent dignes d’admiration. Le temps paffé aufîi a loué iufques au ciel a merueilles le noble Capitaine QTabius,lequel aufîi a efcrit l’hiftoy-re Romaine, & duquel on dit les oraifons auoir efté fort fémblables a celles de Thucididc: combien qu’il a eu beaucoup plus grand renom par la peintrerie que par les lettres. Par mefines raifbns aufîi nous auons entendu que Sy lia a réduit par efcrit lesproeffes deLucullepour la memoyre des hommes : & mcfmes a celuy qui euft peu polir l’hiftoyre par commetaires auec vne plus grade richeffe en gioyre d’oraifbn . Lafblicitude en elle aufîi delulle Cefâr a efté entre tous autres bien grande: car il a mis telle diligence à faire les comentaires des guerres Gauloyfés, & de la ciuile Pompciane (de vray il a ainfî intitulé fés liures)qu’il a eomprins en chacun la guerre de chafcun an : tellemet qu’il a efcrit fépt liures de la guerre Galliqu e, & troys de la ciuile Pôpeiane : aufquelz fépt premiers, Hirtim a aioufté le huitief-me apres fà mort. De vray il a fupplié entièrement furlafinleschofésqui deffailloyét de la guerre de la Gaule par vn liure. Et a la fin font troys liures de la guerre Alexadrine,de l’Aphricane, & de celle de l’Efpaigne, defquelz Suetoneefcriuain ancien & noble,dit l’autheur incertain, d’autant qu’aucuns les penfént auoir efté eferitz par Hirtim,les autres par Oppie. Au de-mourant Hirtim dit en fà préfacé du huitiefme liure de la guerre Gallica-nefeomme i’ay dit) que ces troys aufîi des guerres que Cefâr a faieft en Alexandrie, fémblent indubitablement eftre eferitz par luy : lefquelles chofés foyent diètes par moy comme vrayes & approuuéespar le témoignage de Hirtim & Suetone : quant aux iafcriptions elles ne le treuuent pas moins
- B iiij
- p.010R - vue 31/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- faulffs que diuerfès,d’autant que les vns les intitulent de Iulle Cefàr,les aucuns de Iulle Celle, quelques vns de Hirtim, plufieurs de Suetone : & non ffulemét ceulx la, mais aufïi tous ceulx que ie nommay des geftes de Cefàr qui font iufques au nombre de quatorze. Dient touteffois ceulx la ce que bon leur ffmblera, au regard de nous,nous auôs fuiuy Hirtim,Suetone. Au mefme temps de Cefàr, Azinim Pollion home de renom pour le trium-phe Dalmatique,ne ffmble pas deuoir eftre delaiffé:& combien que de Ion eloquéceil ne foit aucun temoignage,ileft touteffois memoyre qu’il aefté excellét effriuain d’hiftoyre. Quant à Marc Varron, qui comme il eft certain,^ hanté la guerre,les liures qu’il a effrit {bigneufêmêt,de la defcription des temps, & de l’age du païs, monftrent manifeftemét quel proffit il a fait ala Republique Romaine. Qu’effe de noftre Cicéron grand orateur & Ca pitaine ? N’a-il pas apres auoir fuiuy les guerres fi bien honoré celle façon de.lettres,qu’il a efcrït les geftes de fon téps,& a vfe ^examiné de lire,toute 1’hifloyre de Cyrus effrite par Xenophon .Priffus Cefàrienff recite aufïi qu’il a.effrit des Annales,& des liures de Cofmographie, dot il fefttrouué quelque relie. Il en a cfté aufïi d autres outre ces Romains Princes & Capitaines braues ,:grandz & de grande nobleffe : lefqueîz ayans fobiugué tout le mode,n’ont point dédaigné celle façon d’effrire.Mefmes Oétauien Au-gufte,&: Claude Oétauien,de vray a effrit treize liures de ffs faiélz eftat en Efpaigne à la guerre de Biffaye:au regard de Claude,il commença à effrire hiftoyres en fbn adolefféce, à la perfùafîon de Tite Liue, & à l’ayde de Sul-picetôt comme durant fa principauté, il ait comprins beaucoup de matières,parcelle maniéré d’cffrire,commençant fbn hiltoyre au meurtre & de-ces du di&ateur Cefàr,il a laiffé ffr la première matière deux liures, & fur la derniere quarate &c vn.Nous auons aufïi entédu,que Hadrian a eu fî grande affection dtr renom de fçanat,& d’hiftoriographe, qu’il a effrit des liures de fes faiclz,les liurant a ffs familiers & libertins pour les diuulguer en leur nam . finalement Gordian le plus vieil, a affembléen liures de proff les louanges de tous les Antonins du temps paffé, aufïi a-il l’Antoniade,c’efl a diré qu’il a effrit-la vie & les guerres d’Antoninus Pius, & d’Antoninus Marcus en trenteliures,& en vers fort elegans,leurs fai&z tant publicques quepriuez .le me tay d’autres innumerables autheurs en hiftoyres,fans lefquéizies excellons faiélz des Roys & ducz tat Gréez que Latins du tout fuffent périls,ou bien d’vne perpétuelle oubliâce affoupiz en tenebresÆt a fin que le propos ff tourne au renom des plus grandes citez, ne fuft ia bien confiimée Troye à cauff de fbn feu ? ne le fuffent aufïi Thebes & Micenes, Lacedemone, Athènes,Corinthe, & Birff de Carthage, ôdesmurailles de l’ancienneBabylone? Queferoit ce finallement de Fvome mefme, iadis la feule gioyre du mode, & la naiffance &c domicile de fi excellens-hommes? Elle .ne ffroit rien fans doute, fi elle n’eftoit refluffitéepar les effritures de leurs faiélz tât Grecques que Latines. Par ce fful moyen de vray les muëtz parler enffmbledes abffns fontpreffns,ôe les mortz viuét.La vie des mortz
- (dit
- p.010V - vue 32/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IL u
- (ditCicéron)confifteen lamemoyrcdes viuans, dont ilauient qucnous cognoiffôs mieulx les choies, hors noftre âge & memoyre, pourueu qu’elles foyent manifeftées parexcellens autheurs, que celles qui font de récente memoyre : attédu que ceulx qui ne veirent oncques Rome, cognoiflènt toutefois les Romains renômez,& leurs faidz magnificques, fi bien qu’il femble auoir mieulx cogneu prefque les chofès, que ceulx qui de tout tëps font venuz de la race. Finalement,il n’eft rien plus conuenable pour aller & nauiger diuerfès contrées que la cognoifïance des régions terreftres, & maritimes:veu qu’elle defcrit non feulement les campaignes, boucages,fo reftZjbuiffons,montaignes,riuieres,lacz,mareftz,portz,&: mers,mais aufti tant de contrées,& villes du mode,&: feigneuries epanduës,& les diffonan tes & differentes langues des peuples : de forte que tu ne penfèras point les lire mieulx de la bouche & entédcment que de î oeil. Parquoy comme dit Horace,Vlixes nous a propofe vn excellent & vtile exemplaire.
- Lequel donteurde Troye a d\ne prouidence
- JSeu beaucoup de citez,0* des hommes Cvfance:
- En drejfantfon retour par mer il a fouffert
- Souuent beaucoup de maulxfd grande péril% offert.
- Sur la mefme matière aufîi l’inflitution d’Alexandre,me fèmble fouuen-teffois fàge,& digne de memoyre : lequel au manimét des guerres faydoit de l’auis des fàges confêilIers,hiftoriographes,& des vieilz foldatz,gens de bien &: cognoiflans les lieux, a fin que fi le temps paffé, quelque tel affaire euft efté bienvuydé,il eprouuaft par expérience, ou bien qu’il y auifàft mieulx,& plus lagement. Aufïî eft excellent l’amonneftemét de Demetrie lePhaleréeaPtoIemée l’Egiptien de lire les liures,efquelzlesdeuoirsdes Roys & des princes renômez aueques leurs vies & meurs eftoyét reduidz par efcrit,en les lifànt d’vne grande affedion fans les lâcher de fès mains. A quoy n’eft pas moins conuenable ce que nous auons trouué auoir efté ob-fcrué par Scipion l’Aphricain,homme diuin, lequel n’euft pas tat employé de foing & peine à la ledure de Xenophon:en laquelle la viedeCyrus eftoit(comme on difoit)contenue,fil n’euft penfe quelle euftefté en guerre,ou en paix de bien grand proffit. Ny ne témoigné ce Cato le vieil,auoir efcrit de fa main a fon fils les geftes amplement pour autre caufè,finon à fin qu’elles luy fufient proffitables, & en ayde, tout ainfi que font les fimula-cres en la maifon,de la vertu des maieurs.Corne donques ces chofès foyent telles,nous ne penfons point qu’il puiflè eftre aucun capitaine excellent & perfaidjf’il ne fèprefènteinftruid&apprinsenlacognoiffance&dodri-ne de ces chofès, pour bien conduire les charges qui luy feront propofees, fil n’aauffi non feulementouy,leu, &:fè foit acouftumé es chofès que les plus fâges de noz anciés ont témoigné par leur efcriture du bien & du mal: de mepnfèr la pecune, augmenter la gloy re ,tompre les conuoytifès, bien dreffer les meurs des hommes, prendre le péril & la mort pour le defir d’vn bon renom : mais aufti fè foit longuement exercité en elles, & ait de toute
- p.011R - vue 33/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- memoyrede l’antiquité cogneu leurs exemples, & depuis cogneuz retenus, tenant pour certain que Pythagoras, Democrite, Zenon, Chrifippe, Plato, Ariftotc, Tite Liue, Salufte, H erodote, Thucidide, Ephore, Theo-pompe,&les autres (âges n’ont pas moins fait que filzeuffent conduit les armées, euffent eu les dignitez, ordonné loix, & qu’il ne leur fault pas fèu-lement liurer les palmes & couronnes, mais aufïi dccerner triumphes, ôc les eftimer dignes d’eftredediez entre les dieux.
- DE L'ELOQUENCE, ET DE QVEL proffit elle eft en ceft an. Chapitre I.
- L eft befoin,fi ic ne me trompe d’aioufter à ceft art,ce bien parler, que le poëte des poètes appelle perfuafion,Royne de toutes cho-r lès, & beaucoup plus fameufê, & plus noble que l’hiftoyre. Mais côme il foit deux manières d’oraifon, & qu’en l’vne (oit le deuis, & en l’autre la contention. Il n’y a point de doute que la contention de l’oraifon n’ait plus de force a la gloyre, car c’eft celle que nous appelions cloquëce.ll eft vray qu’il eft incroyable de dire combien vn langage doulx & affable gaigne les cœurs des hommes. On trouue des lettres de Philippe à Alexandre, d’Antipater a Caftandre, d’Antigone a fôn fils Philippe,au-quelz on commande que par vn gratieux langage ilz gaignent la benïuo-lence de la multitude,& qu’ilz adoulcifïent les gens de guerre en les appel-Iant gratieufèment. Au regard de la harangue quife fait par remontrance à la multitude, elle enflambe fouuentcffois vne gloyre vniuerlêlle, de forte, qu’ardans d’vn grand defir,ilz ont en horreur l’iniquité, l’auarice, la luxure, la nonchallance,parefle, & méchanceté : Elle fait aufïi que les refroidiz, lâches, &etonnezdepaour faiguillonnentàlavertu, eftime,honeur, & gloyre, & qu’ilz entrent en meilleure efperâce,& fantafie. Et combien que telles chofês ne fbyent decouuertes particulièrement que par ceulx qui co-gnoiffent les natures des hommes,& toute la force d’humanité, & les eau-les parlefquelles les fantafies font emeuës, ou r’abatuës, lefquelz nous fça-uons eftre les Philofophcs, &auquelz & principalement celle charge eft deuë, le courroux touteffois & la mifèricorde, & toute émotion de cœur, font ie ne fçay commet en la puiflance des Orateurs, defquelz nous ne fai-fons point de doute, que l’eloquence ne foit tenue de tout le peuple bien heureufè,& bien fortunée,& eftimée comme chofèDiuine : veu que nous fçauons que par elle,les Tyrans ont efté bien fouuët chaffez & tuez, & que lesdifeordzenont efté appailêz,l’enuie pacifiée,les mutins &fèditieux tuez : & que plufieurs en ont efté eleuez aux honneurs, & gouuernemens grandz, & plufieurs villes aufïi gaignées: Ce que les choies auenues au téps pâlie montrent auoir efté : aufîî le témoignent les exemples d’hommes ex-cellens,&des nobles Repub. Et a celle fin que noftre propos face foypar ceulx qui en ces chofès ont eu grad pouuoir:qui doute ce que nous fçauôs
- auoir
- p.011V - vue 34/480
-
-
-
- DE L’A HT MILITAIRE. LIVRE IL n
- auoir efté faiéfc par Luce Brute,homme d’ancienne race,lequel a chaflevn fi puiflant Roy,& retiré la cité d’vn ioug perpétuel,n’a peu autrement eftre fait que par vngratieux 5c affable langage,& d’vne eloqueuce militaire,5c propre à gens de guerre? Qui ne Içait aufli qu’vnpeu apres la chafle des Roys,Menenin Agrippa homme grand appaifâ par le moyen de hareguer la commune eftant en armes,eguillonnée de diuers outrages,& en dilcord auec les gouuerneurs près ie riuage de la riuiere d’Anien, tenant ce mont Auentin,qu’on appelle Sacre,duquel témoigné Pifo ? Nous pouuons bien aufli tenir du nombre de ceulx cy, Apius Claudius,homme copieux, cafle de vieillelfe,& aueugle: lequel porté en litiere par la place à la court par les enfans, apres auoir ouy les choies que Cyneas auoit bien did au Sénat, 5c gratieulèment lorsque Pyrrhus ofîroitdeliu rance des captifz,& lècours pour lùbiuguer l’Italie,ne reqüerât pour ces chofes que leur amy tié, 5c feu-reté aux Tarétins,fut caulè au moyen d’vne magnifique harengue,que co-bien que la plus part d eulx y entédit, ilz ne receurét toutefFois ceft accord depaix,cômequiauroiten foy beaucoup d’infamie,& d’embufche. Nous pourrons abonne raifon dire M.Tulle Cicéron perfaid en l’excellence de bien dire,tant en deuis, qu’en remonftrancesdequel a défiait Verres home melchant 5c trelâudacieux parles armes : 5c étonné làns armes Catelin accompagné d’vne force cruelle, pour entreprédre toutes choies, 5c l’a chafle délibérant de mettre la ville a feu,& a làng : 5c a lâuué d’vne euidente ruine les mailonsfies téples, 5c la forterefle du Capitole de Rome, les Dieux do-meftiques des gens de bien, &finallement tout le*corpsde l’Empire. Par-quoy abonne railon(comme dit Pline)il a efté le premier, qui entre tous a cité appelle pere du pais, comme qui premier a en robbe longue mérité lé 1
- triumphe,& l’honneur de bien parler, eftant pere de l’eloquéce,& des lettres Latines : 5c qui a acquis le plus grand hôneur de tous les triumphes,de tant que la gloyre eft plus grade d’auoir etendu les limites de I’entendcmét Romain,que celles de l’Empire: 5c d’auantage il dit que Celâr leDidateur iadis Ion ennemy a elcrit telles choies de luy,prenat foy par le f témoigna- f j^e§°>ex gc del’ennemy. De l’eloquence duquel Celàriepenlèquenulaucunemét jnimjelî bien apprins ne doit eftre en doute, combien de pouuoir elle a eu entre les etiam pro gens de guerre: comme qui a efté égal aux plus Içauas Orateurs,ou bien les ”“m,cu a pafle en eloquence.'tellemét qu’acculant Dolobella il a fait le deuoir d’vn perfaiét Orateur, 5c plus que ne requiert celuy d’vn homme de guerre : de laquelle acculàtion il lè plaint,de ce qu’on luyvoloitvne bien bonc caulè , par la defenlè de L.Cotta. Par lequel mot de voler,extorquêre,il a(comme il lèmble a Valerejexprimé la vertu de l’eloquece.Car ce mot la a la force telle que ceft accule fembloit auoir efté foudain rauy non pas d’vn lien Ieger de parolles, mais d’vn bien lèrré 5c indilfoluble, la ou il eftoit vaincu par l’eloquence de Celàr:apres laquelle occafion il a efté indubitablement(cô-me dit Suetone)tenu entre les plus gradz patrons. le pourroyc reciter aufli en quelles batailles là harangue a tellement enflambe les cœurs des gens de
- p.012R - vue 35/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- guerre, quoublians tous perilz ilz fe iettoyent aux combatz, ioyeux 8c de-. libérez {quelles mutineries aufli d’vne merueilleufè armée il a appaifé?8c quants milliers de foldatz en armes a-il féul ôc (ans armes efpouuanté de fa parolle?de forte qu’en paracheuant fà harangue il fen eft trouué qui au féul cil de l’euil tédoyentie col,& autres qui les chargeoyent : ny ne fé trouuoic homme qui fit côplain£te,finon quela narration fuft longue.Nous auons aufli entendu qu’Augufle entre autres plufîeurs grâces de fônefprit 8c en-tendemét, ne dedaignoit point cefte paternelle éloquence, que nous auôs maintenant recité.Car comme il eft efcrit de luy,en pourfuyuât vne façon de parler elegante, 8c modérée, ilaprins principalement peinede donner proprement à entendre fa conception,en fe mocquant de fesamysqui eftoyét afié&ez à vocables neufz,8c obfcurs. Il redargua aufti fôn ennemy comme infénfe en efcriuat chofes qui féroyent de plus grand’ admiration, que d’intelligence aux ccoutans. Il ne m’eft pas aufti raifonnable de paflér en filence AfiniusPoIIioenefcriuantde l’eloquécedesexcellenscapitai-nes:lequel(à celle fin qu’on cognoiffe chacun auoir fon iugemét) Seneque autheur trefnotable ordonne entre les deux plus eloquens Latins M.TulIe Cicéron,& Tire Liue. De vray il met trois princes d’eloquence, lefquelz il fémble vouloir preferer à tous autres en vne certaine cpiftre, tenant Pollio pour le fécond : le langage duquel il tient different à celuy de Cicéron,corne il eft rude,fàutellant, 8c qui cotre ton cfperace demeure court. Si quel-qu’vn reccrche l’eloquence de Portius Catho a plaider vne caufé, tu le diras en ce temps la auoir acquis vne grande gloyre de l’art oratoyre: comme qui a fait tant d’oraifbns de toute forte,tat pour foy que pour autruy, 8c cotre :&atellementperfùadé,que.nonfânscauféilaefté à Fvomeappelléle Demoftene Romain: la ou aufti il feft acquis par fur tous autres comme a Iuy propre, d’auoir efté quarante quatre fois accufé, & qu’onques homme nefutfifbuuentcerché a’enuie & menées d’ennemyz, r’aportant toutefi fois vidioyre & abfolution. Comme donques il eut certaine cognoiflance de laforce 6c nature de l’eloquence,il difoit, en animant laieuneffe de cou rageufèment combattre, que les ennemys font le plus fouuét plus toft ren-uerféz 6c défiais par la parolle que par l’efpée :8c aufti de cryz plus toft que de main.Si par autre moyen l’cloquéce excellente 6c notable de L.Craflus ne nous eftoit cogneuë,nous la pourrions bien decouurir, en ce que Cicéron plourant es liures de l’orateur fà mort d’vne grande magnificéce, le recite auoir toufiours furpafle tous autres en éloquence,6c foymefmes, quelque peu de iours auant fon trefpas.il recite aufli qu’apres fa mort,luy & autres a l’enuis font retournez au lieu, auquel de n’agueres il auoit mis le pied épris de la douîceur ôc memoyre de fon langage que de n’agueres il auoit ouy de luy,ôc comme pour derechef l’ouyr. Il dit d’auantage que Crafle a efté fcul en cela finguher, que toutes les fois qu’il haranguoit, autat de fois fémbloit il parler plus profondementjôcd’inuention.Or n’ayie pas trouué eftrange, attédu le peu de cognoiflance qu’a le commun de fà renommée,
- d’aioufter
- p.012V - vue 36/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IL 13
- d’aioufter deux tefmoignages de Cicéron, auxquelz touchant ce propos fault croyre plus qu’à nulz autres.Ie le trouue de vray auoir elcrit en ces pro près termes. Quand Craffus haragiloit,ne fut onques fi arrogat qu’il cipe-raftpouuoirfaireleféblabie:&en vn autre palPage apres auoir ouy tous ora teurs, ie fuis d’auis, & penlè qu’onques home n’eut tât,ne fi grâdz enrichefi lèmés de bien dire corne Crade.Il tefmoigne aufiï d’Antoyne. De vray,corne il ait dit en vn certain lieu parlât de l’vn & de l’autre enféble, qu’ilz ont efté excelles par fur tous, tât en defir delçauoir, que d’entendement,& doctrine, & perfai&z en leur art,de forte que la grâce de haranguer ne deffail-loit point à Antoyne,ny ne regorgeoit en CralTe,iI dit touteffois en vn autre palTage, que de tous ceulx qu’il auoit ouy, Antoyne eftoit le plus éloquent: laiflànt quafi tou t de gré en doute, à quel collé fabbailferoit la balance de fi grand los. Il eft vray que le renô d’Antoyne, auquel le iour de là mort a dôné grad auantage lèmble eftre mieulx cogneu.Car corne en celle torméte Mariane, ou ne le trcuuoit aucü port de milêricorde, les borreaux ay as charge de le tuer fulfent arriuez à là mailbn, le regardas, & que les vns aux autres s’entredonnoyent la charge & l’honneur de le tuer, fon lâgage fut de fi grade grâce, ou bie quelque Déellè de perfùafiô, que lors qu’il cô-méça à parler,tous les gens de guerre,fors vn Annius,adouciz de là parolle remirent leurs elpées aux fourreaux lâns coup ferir, ia nues, & drelfées, tü-hans lôudain d’vne grade fureur en vne grade milêricorde. Or eftl’aéle de l’orailbn de grad effeCt pour perfuader, duquel Cicéron à fait mentton en fon Orateur,& en autres Iieux;car corne il defendoitla caulè criminelle de M. Aquilius, qui auoit efté ConlûI,& capitaine bien renôméentiers le Sénat, 6c le peuple, eftât finalement Ipolié de tous honneurs, & ia viel tombé aux extremitez de ladeceptiue fortune, & qu’il le leuaftaumylieude l’ardeur de l’orailbn tout difforme & craffeux,& en delfirant fa chemilê oourrie, &monftrâtauxiugesIes cicatrices de ion pis iadis noble & pour ors pitoyable, & en fe tournât vers Marin, qui eftoit en la copagnie,îe luy prcientaft auec maintes larmes pour auoir pitié de fon iadis collegal, il à émeu toute l’aftiftence à milêricorde. Mais à fin que noftre propos turnbe fur les forains, delquelz nous ne nous pouuons paffer en celle façon de de-uis,Pififtrate viét maintenât en ieu, côme auquel eft deu le premier lieu de l’eloquéce militaire: car il eft certain que floriffant d’vne éloquence exaui-lê, les Athéniens l’ont fouffert regner fur eulx, en luy offrât de leur bon gré l’Empire: & à celle fin qu’il ne féble auoir efté faiCt plus par inauertéce que par bô auis on le peut côieélurer par là, & melmement lors que Solon pre-uoyant de lôgue main la corône de Pififtrate predre naiflance, eut alféblé le peuple lê môtrant en public armé d’vne cuirace & d’vn bouclier, & qu’il eut manifefté lès effors & embûches méchantes,&: corne depuis delaiffât le païs apres s’eftre defarmé en la prelênee de la Court, il eut nauigé de cour roux en Egiphte, puisenChipre, &par apres arriué àCrefus, & de là en Arménie, & qu’il fut auerty non feulement du cômencement de Pififtrate
- C
- p.013R - vue 37/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- en la coronne, mais auftï de fa perfeuerance, il leur fit remontraces par let-„ très de cefte teneur.Si par voftre lâcheté vous endurez grandz outrages ne „ vous en prenez point aux Dieux, côme qui les vous auez procuré, & auez „ engagé la liberté pour fouffrir vne dure lèruitude : au demourant chacû de ,, vous chemine en renard, vous elles tous d’vn elprit volage & fol : de vray „ vous vous amulèz au parler d’vn homme & à fon langage diuers, & plein „ deruzes & tromperies,fans Içauoir confidererlafin des choies. Pericles aufti luccelfeur de cefte coronne, & éloquence, luy fut fi lêmblable a bien dire, que qui l’oy oit penfoit ouïr ceft autre, h par fortune il l’eut quelque autreffois ouy: Mais en cela fut Pericles plus excellent que Pififtrate, comme quilêcourutfon éloquence d’armes, eftant à ceft autre elle lèule fuffi-lànte pour conlèruer Ion Empire, auquel il régna long temps, & magnifiquement. Il le tint de vray quarante ans, durant lequel temps il a mené les affaires ciuilz &de la guerre lâns armes. Si eft ce vn cas merueilleux, que comme ilharanguoit au dclàuantage du bien public, armé d vne forte éloquence, il ait touteffois eftébien voluntiers ouy de tout le peuple. Qu’a fait Alcibiades filz de Clineas, &chef des Athéniens tant par mer que par terre? Ne le dit on pas auoir efté fi éloquent, & eftre peruenu à vne fi grande gloire du meftier de la guerre,que la louenge de l’vn fèmble com battre en cecheflaauec celle de l’autre, pour l’excellence? Lequel entant que touche les autres a eu la parolle fi bonne, que par bien dire nul autre ne luy a peu faire telle. On peut aufli voir au Neftor Homérique cefte force &puiffance deparolle, & harangue beaucoup plus clairement quafi qu’en vn bien grand mirouer: car comme les deux columnes de toute l’armée fuffenten diffention, qui font Agaménon puiffant Roy, &Achilles grand homme de guerre, il y auoit faute d’vn homme, delà bouche duquel partit vneparolleplus doulce que miel, & qui fuft renommé d’vne grande prudence, pour appaifer l’orgueil d’Atrides, & adoulcir la fierté de Pelide, & qui par authorité les détournait, les amoneftant par exéples, & appailànt d’vn gracieux langage. Côme auflï(ainfi que dit le mefme Homère) Agaménon mit en auât,prefont l’affemblée des Gréez, que dormant il auoit veu pour dreffer la bataille. Neftor le failânt àcroyre alarmée ne l’a pas moins fecouru de fon éloquence, que le relie de la multitude de lès armes & forces. Parlamelmeraifon ce tant excellent chef de la Grece, nedefiroitpas lêulementineiamais^finous croyons aCiceronjdes gens de guerre lèmblables àAiax,mais bien a Neftor comme fages.Et que fi celaiuyauenoit,ilne feroit point de doute que Troye ne fuft bien toft ruynée. Acecy fertaulficeSocratiqueXenophon,quieftimoit vne trefi-bonne choie d’auoir des Tribuns ou Capitaines de gens decheual pour-ueuz d’eloquence,ou bien auoir des harangueurs idoenes es affemblées du cap,pour par vne crainte épouuater les gés de cheual & de pied,au moyen de la vertu d’vne riche parolle, à celle fin qu’ilz l’amédent : & qu’au furplus ilz les appaifent, & ramènent à la raifon, filz font quelques fois mutinez.
- Ny
- p.013V - vue 38/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IL i
- Ny ne fouloit finalement pour autre caufe ce Roy Pyrrhus Capitaine tant jfocre dire, que Cineasauoitprinsplus de Villes de parolle, que luy par force, finon que fiiyuant l’auis d’Euiipides la harangue mene à fin tout ce que les armes ne peuuent perfaire*
- DES POETES, QJ'EL F Rj'l C TE N
- vient,qucl^fîntreceuables,queh^damnables. Chapitre IL %Ommedonques les Poëtesfoyétprochains des orateurs, & que 11 le temps paflfé les Roys & excellens Capitaines auoytnt de coutume àl’entreprinfê d’vne guerre depremierement fâcrifier aux Mufes, comme àcelles qui auoyèntlamemoyre des difciplines &: iugemens, afin qu’aifement & promptement elles leur veinfient au fè-cours en vn péril, ôc que les prouëffes des côbattans fufient rendues dignes de memoyretnous Tommes d’auis qu’on les doit lire & ouyr,àfin qu’ilz demeurent totallement fichez en l’entendement : mefmemët d’autant qu’ilz ont apparence de doctrine, & fapience. Au demeurant comme ilz fbyent beaucoup, ôc diuers comme les Tragiques, Fadeurs, Epiques, Lyriques, Iambiques, & Dythirambiques, & qu’àl’auis d’aucüs les vns font reprou-uables, eftàs les autres en eflime,il fault pourplus aifement difeerner quelz font dignes d’eftre Icuz,& quelz reiettables,faire vne déclaration par ordre de diuifion. Tous poètes donques ont feint des fables pour tant feulement donncrplaifir à l’oreille, ou bien par éloquence prendre meilleure voye de Vie. Ôr contentent fur tous autres merueilleufêment bien l’oreille les farfès & moralitez, dont ie n’ay pour celle heure que dire pour eulx, finon que lesanciësRomains,(auxquelles Tragédies & Comédies n’euffétiamais peu approimer leurs mefchancecez es efeharfaux, & theatres)ne les eufïènt ïamais fôufFert, fi la coutume de viure ne le fouffroit,prenant fon commé-cemët aux fiicrifices diuins du pere Liber, & d’Apollo, LaTragedie & Comédie de vray ont prins leur fource d’eulx : & a ellela Tragédie nôméede mefine que l’Hymne fâcré du pere Liber: veu que corne cefl Hymne cha-toit les prouëffes & louenges du pere Liber, la Tragédie auffi ne reprenoit que les vices des hommes grands & puiffans: ou bié elle efl auffi ditte pour la grandeur de la voix, laquelle ren forcée des repereuffions concaues,fern-ble faire tel fon qu’il ne fèmblc prefque pas eflre d’homme. Elle efldreffée fûrpiedz debout, d’autant que fi quelqu’vn d’entre les pafleurs auoit eflé aggreable pour vne telle voix on luy donnoit vn bouch : ou bië l’eferiuain de la poëfie efloit entre autres dons paré d’vn bouch,ou bié d’autât qu’vne peau de bouch pleine de vin efloit vn don folennel aux chantres, ou bien les iouëurs auat l’vfâge des mafques trouué par Aefchille, frottoyét leur vi-fiige de lie. La lie de vray efl appellée en Grec pour ces caufès, doques la Tragédie a prins fon nô. Par feblablemoyé auffi corne lôgtéps apres on celebrafl à Apollo Nomi,ou Ariflée,e’efl à dire au Dieu des pafleurs & Vil ^lrorumi lages,desfefles & ieuz inuëtez au long des Villages, Bourgades, métairies,
- C ij
- pro vjcmo rum.
- p.014R - vue 39/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- & carrefours du païs Athénien,la ou les villageoyz lâutellâs fe mocquoy et des faicftz humains enplaifans vers, & queTHymne lâcré à Apollo eftoit vn chant quon appelloic Comedie, par vn nom(comme ie péièjcompofé de KcùpHç & <Sii village & châfon,ou bien de qui eft autant a dire que
- banqueter en chantant, on a de couftume aufli de reciter la des vers mor-dans, comme es folennitez de Liber: lefquelz toutefois nereprendroyent que les vices des villageoyz & pauures gens, deiquelz eftoit mefmement faiété cefte façon d’affemblée au païs des Gréez. Il fut suffi premièrement permis par la loy que la Tragédie,& Comedie diroyentquafi comme par ieu,ce qu’elles voudroyent,& qu’elles parleroyent de qui bon leur fèmble-roit par nom & furnô auec vne {âge & plaifànte reprehenfion bien ordonnée, & auec vne dignité deparolles, & vtilité de corriger les façôs de viure, qui fut de grand proffit en ce temps la, d’autant que chacu lè dônoit garde de faillir,pour la paourd’eftremocqué publiquement for vntheatre. Mais âpres que le peuple par les victoyres, & premièrement celuy d’Athenes, & par apres l’Italien commença élargir lès terres & villes, & que par la multitude des citoyens les menées & vices prindrét croiffiance, & que les poètes de tant plus aigremét reprenoyent, veu la matière des vices,tellemét qu’ilz venoyét iuiques aux nobles,& que fans eftre en rie offenfèz ilz reprenoyét non feulement les mefehas & mutins de la Republique. Mais aufli aucuns gens notables par leur vertu, & dignité, tellemét que Neuius fouuéteffois mordoit, &ouItrageoit les Metellins:la nobleffie indignée fit vne loy, qu’ame ne reprint en nommant, comme dit Horace.
- 33 Le plaifanter tadis a ejîé bien receu,
- 33 Influes a ce que rude il commença tourner
- 33 En manifejle rage: & fans peine courir
- 33 Par les matfons bonne fies en menajfes, alors
- 33 Les feru^fe plaignoyent d’\me telle motfure,
- 33 C eulx qui nejloyent atteints auoyent la mefme cure
- 33 Comme d’vn mal commun: auquelfutejlablie
- 33 Pour ne mefdire en carmes \ne loy auecpeine.
- Et comme par quelque téps ilz fè teuffient à caufè de celle loy & peine, & qu’ilz ne compofâffent rien, eftans detourbez de l’ancienne coutume, ilz ont de rechefinuété vne nouuelle façon de compofèr. La de vray commença la Satyre, laquelle a prins Ion nom des Satyres, que nous fçauôs bie eftre toufiours es ieuz,Dieux lubriques: aucuns lapenfènt maI,auoir d’autre part prins Ion nom. Cefte Satyre fut doneques telle, qu’en elle eftoit la poëfie, auec vn ieu rude & filueftre des vices des citoyens, fans touteffois nômerame parfon nom:quifutencores vne façon de Comedie qui porta dommage aux poètes:d’autat que les plus puiffans citoyens les fubfonne-rent auoir deferit leurs fai&z au pire, & les auoir diffamé de leur poëfie. Pourceftinconuenient donques ilz ont cfté contrain&z dedelaiffcr la Satyre, & d’inuenter quelque autre maniéré de vers,c’eft a dire inupnter de
- nouueau
- p.014V - vue 40/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE, LIVRE IL 15
- nouueau la Comedie : ce que les Gréez ont voulu eftre plus communémët licite, combien qu’il fuft trop effronté,voyans les reproches des vices eftre aggreables a leurs dieux, & que les mefchancetez non feulement des hommes, mais aufli des dieuxmefrnes fuffentrecitées fur les efcharfaux,foit qu’elles fuffent controuuées par les poëtes, ou bien vrayes, & qu elles fuf-fènt iouées es théâtres par ceulx qui les adorét:que plufta dieu quelles fêm-blaffent feulement dignes de rifée, & non pas d’eftre enfuyuies, fuyliant ce did de Terence, pourueu que de la mefchaceté du plus que bon Iuppiter, il enflambafl la malice de la ieuneffe.Que feront de vray les ieünes gentilz hommes, & filles voyans telles choies fê faire fans honte,& affedueufèmét eftre veues des hommes? Ne feront ilz pas parla auertiz de ce qu’ilz peuuët faire, & enflambez de luxure, que la veuë fur toute chofê émeut? Il eft vray que les Romains memoratifz de leur honneur & chafteté, n’ont point fait d’hôneur à les iouëurs de telles farfês a la façon des Gréez, & ont tenu ceft artdeieuz & toute farfêpour infâme :& voulu cefte maniéré d’hommes n’eftre pas feulement priuée de l’hôneur des autres citoyes, mais aufli eftre par vne fêntécede Cenfêur effacée des racesrcombien que defîa ilz fuffent preffez d’vne pernicieufè religion: tellement qu’ilz honnorôyent les dieux qu’ilz voioyentauoir voulu telles infamies defatfes leur eftre confàcrées. Car combien que la les ieuz de mufîque, & les didz d’vn temps de parfaire prudence ayent fleury, l’age touteffois fubfequent méfiant les chofês de rifee a attiré les inuentions des anciés a vices, & par vn efprit perdu tourné aux voluptez du corps cc <^ue par plaifir auoit efté honneftemët inüen-té: dont il eft auenu que peu a peu les honneftes difeiplines fuyans la compagnie des mefehans fé fùftraioyent de la, auec vne côfideration pudique, qui eftoit vne chofê fâgementfaide.Car quelle autre chofê apprennent, & émeuuentles mouuemens dehontezdes iouëurs defârfês ,finonconcu-pifcëces,les corps defquelz eneruez d’vne marche & habit féminin feîgnec par geftesimmodeftesles femmes impudiques?Qüedirayiedes contre-faifêurs plaifâns qui ont vnedifciplinedemauuaifê vie & de toute impudence feignans les humains, lefquelz apptennét a adultérer par leurs feintes, & en feignant les paillardifês ilz dreffent les hommes aux vrayes?Mais fl lesfarfêurs n’eftoyent point receuz aux honneurs, il fêmble bien raifon-nablequeles poëtes autheurs de telles fables, aufquelz aufli eft défendu par la loy des douze tables de ne toucher a l’honneur des citoyens*ne fbyét pas moins repoulfêz qu’eulx.Platon aufli donnant la vraye forme de la cô-dicion de la cité, qu’il a feint pour eftre d’vne bonne façon de vie, & d’vn bon eftat, a efté d’auis de chaffer tous les poëtes de la cité corne énnemyz* (exceptant touteffois Homere lequel il confêille deuoir eftre traidé hon-norablement, en luy dédiant vn temple, & rependant fus des fènteurs)que par fortune ilz ne ruinent par leursfables la vraye opinion d’vn DieU,com-me qui fouffroit mal enuis les outrages faidz aux Dieux, ne que les cœurs des citoyes fufféc abufêz & corrônuz de telles ledures. Les Lacedetnoniës
- C iij
- p.015R - vue 41/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- autti ordônàs d’ofter de leurs villes les liures du Poëte Archiloche , ont ap-prouué quelque chofodeféblablerd’autàtqu’ilz en eftimoyétlaledure eftre bien peu modefte, chatte,&; pudique, ny n’eftoit point vne feméce de vertu, mais plus toft vne ruïne & corruptiô de la ieunefle, & qui drefte le chemin a toutes villennies. A ceulx cy fontprochains autti ceulx qui doulx à ouyr font au demeurant pleins d amorcemens, & d’infâmes amours,liuras la loy de toute laftiueté& intempérance, comme on tient Marfe Pedon, AEdiuie,Zetulicie,Portie,TeieLacedemonien,Meminie,Titys,Cynna, Cornifice, Anfor, Hortenfo,Seruie, Galle,Catulle,Calue,Properfo,Tibul-le, Apice, Lefbia femme, & finalement Ouideleplus lafcifdetous auec M. Valere Marcial: & tout ce que des poëfies Melices, ou Lyriques, & Dithyrambiques fora de mefme, comme qui fomblera eftre dit de trop grade licence & lafoiueté:veti que les liures de tous ceulx cy fomblet mieulx drefo for le meftier de Venus,que l’exercice ne les loix de Mars. Car à la vérité ilz amoliiïent de leur doulceur les coeurs des homes de bien grade hardiette, les effeminans de forte, qu’ilz ne font pas foulement leuz, mais autti appris & retenuz. Comme doncques il foront îoindz a vne mefchante difoipline de defordre durant toute la vie,ilz eneruent toutelavercu.il y en a d’autres qui font Epiques,Iefquelz fomblent plus approcher auec vne fiipreme force d’eloquence & preexcellëce de poëfie, à vne vraye & perfaide façon de vie parplufieurs& grandes guerres mémorables & vuidées parexcellens Capitainesfoubzhonneftesfeintes, & couuertures des chofos : combien que quelquefois ilz fo dégorgent en faidz villains & folles. Ceulx cy font ceulx qui epouuâtent & etonnet de diuersfopplices & peines les mefohas, & qui difont ceulx au contraire monter au ciel purs, fans paflion,&bien heurez par les mérités de leurs vertuz, & eftre rauiz d’icy en quelques champs fortunez, pour là iouyr d’vn merueilleux plaifir: qui aurôt efté iu-ftes & bons, & qui pour le pais auront porté plaies & coups : autti forôt les Prelatz qui auront mené vne vie chatte, & les Poëtes portans reuercnce à Dieu, auec parolles conuenantes àluy: ou bien qui pour auoir inuécé les ars ont rendu leur vie honnorable.Et combien qu’il fen rencontre vn bon nombre de cette condition, Homere & Virgile touteffois viennet les premiers en place, comme les plus renommez de tous. On pe ut de vray voir en Homere quelle eftoit la prouidence des chefz à la guerre, quelle rufe ou hardiette es foldats, quelle maniéré d’aftuces deuoit eftre euitée ou dreflee, quelle finalement eftoit la remontrance,quel confoil & quelle maniéré. Eneas ayant la conduitte des citoyens en vn combat auoit repoulfé viue-ment les Gréez iulques dedans leurs camps,& comme il prefontaft de trop grande hardiette toute l’armée à leur fort, Hedor accourt Iuy remontrant de ne fo hafter, & d’auoir l’œil par tout, difont que le chef d’vne armée ne doit pas tant eftre hardy quefoge. Penfo Sigifmôde & rumine à par toy de quel eftime eft digne vne telle parolle, mefmement partie de ce tant hardy Hedor. Au furplus ne reprend pas autti Iris dedâs le mefme poëte, Atrides,
- ou bien
- p.015V - vue 42/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IL ig
- ou bien comme autres difènt,vn longe à luy enuoyé le trouuant endormy, enluy remontrant que celuyn’auoit pas à dormir, auquel le falut de tant de peuples 8c nations efl donné en charge, 8c auquel finalement git lapro-uidence de fi grands affaires ? Au demeurant ce grand Vlixes 8c Diomedes ne font ilz pas choifiz comme gens de confèil, d’ayde, d’entendement, de main, de cœur, & d’armes: la ou aux affaires douteux 8c defèfperez il fault élire des efpies qui au repos de la minuiét entrent dedas le camp des enne-mys ? Quiconque donquesveultdeuenir grand harangueur & capitaine, 6c qui defire eflre fèmblable à Achilles, ou a Agamemnô,quilfèiette en la dodrine de ce poète, l’ayant continuellement en fès mains: ce qu’on dit auoir eflé faiél par Alexadre, comme on peut voir par fès epiflres. Ce Roy certes ardant de lire, ôc de fçauoir aperfaidement apprins l’Iliade fbubz Ariflote: laquelle il auoit de coutume eflimer,8c appeller la prouifion de l’art militaire,& de falloir ordinairement auecfon poignard couchée fbubz fo oreiller, 6c qui au refie a dôné a cognoiflre en quel eflime il auoit Homere, en ce mefmement que comme entre les dépouillez de la defaitte de Darius, il eut trouué vnebouete de lenteurs enrichie d’or, 8c de pierreries, 6c que fès amysluyenenfèignoyentdiuers vfâges,plus tofl(ditil)foit elle employée a la garde des liures d’Homere,àfin qu’vn ouurage tant précieux d’vn entendement humain tant grandfbit confèrué en vn riche artifice. Au refie peut il rien deffailliràMaro fuyuat prefqueen tout Homere, d’ont nous auons maintenant parlèda poëfie duquel efl fans doute nô feulement la prouifion, mais auffila difcipline de toutle meflier prefque de la guerre, fèruant au temps de guerre, 6c de paix. Et combien que par le commencement de fbnœuurediuine cela fbit affezmanifefle,onle voittou-teffoisprincipalementparceulx qui de plus près recerchent fà fantafie. Car fi tu demandes vne forme de iuflicemilitaire, 8c vn commandement de chefredoutable,Brutusfoffriraincôtinentàtoy,puys Torquate auec fès rigoreufès verges, ôc d’auantage auec fès cruelles dolloueres : puniffans griefuement leurs enfan s pour le païs, 6c pour la difcipline du meflier de la guerre. Si tu cerches la magnanimité, Horace Codes fè prefèntera, lequel s’arreflant fur vn pont de bois, a oféôcpeu tenir bon cotre l’ennemy, combattant Porfènna, 6c fon armée menant vne forte guerre cotre les Romains: 6c combattit pour la confèruationdupaïs,iufques ad ce qu’on eut rompu le pont a fès talons. Si tu quiers des particuliers facrifices pour ofler les pcrilz publiez, les Decies y font tous preflz, a fin que mourans 6c paci-fians l’ire des dieux par leurfàng, l’armée Romaine fufl deliurée. le me tais de la viéfcoire de Camille, contre les Gauloys, 6c des renommées proueffes deCoffus, aufIifayiedelafbbrieté de Fabrice 6c de Curie auec leur ru-deffe 6c côtinéce : du temporifèment de QTabius, ôc d’affezautres telles chofès, non moins notables tant en guerre qu’en paix,qui me viennent en memoyre: lefquelles toutes n’ont point efléincongneues au poete Clau-diandifimtainfi.
- C iiii
- p.016R - vue 43/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- ROBERT VALTVRIN
- Pendant ton douillet âge aux mufesfoitton cœur Et pour enfuiure lis, ny ne ceffe iames De parler aueq toy la Grecque ancienneté Et au fila domaine: & chefs anciens recerche.
- Tu t’accoutumeras aux guerre s auenir, iAu tempspafié Romain ta recourfe feras.
- Si la libertéplaifi, tu t emerue'tlleras De Brute: & fi blafmant d’aucun la trahyfon,
- La peine de Metin bien le Jatisfera.
- Si la rigueur trop grande,efi tri fie, de Torquat Confidereles meurs: &fi bonne efila mort Expofée, aux mourans Deciesporte honneur.
- Si la confiance qui ers, Codes fiprefentant Opres le pont rompu bien tetenfiignera,
- Ou de Mutin la flambe: & quel efi le regard Du temporifement, Rabin: & aufii d\n bon chef Le deuoirmonfirera Camil,parla defaitte Des Gauloys: par cecy ton cognoifi qu'aux bienfait^
- Nulle fortune nuyt: la cruautépunique Teprolonge ô Régulé v» renom eternel.
- Ses ennemyz Caton vainq de fit de fortune:
- On aprent quelpouuoira lapauuretéfibre,
- Pauure efi oit lors Curin que les Roy s veinquit d'armes,
- Et Fabricin, quant torde Pyrrhus dédaignait.
- Or courbéSarranin a la Ville charrue,
- Desborreaux les Cabanes cfioyent environnées,
- Etaux portes de fitulxjes fejfeaux attache%.
- Par le conful efioyent les gerbes recueillies,
- Et les champs laboure^parle vefiu de pourpre.
- Détaillant donquesle refte de nozpoëtesi’en nômeray aucun deseftra-gers, & propofëray premieremétTirthée poete & chef des Lacedemonies pour la poëfie duquel, eftant pronuncée en PafTemblée on a combattu fôu-daind’vn fi grand cœur les Meflanes en les vaincant, qu’a peine futilon-ques bataille de fi grande fureur : côbien qu’au parauât les Lacedemonies deffaits en bataille, &epouuatezpourleperil,eftoyëtd’auisdenecôbat-tre plus.Me tairay ie de Thucidide, lequel côpofêur de Tragédies les Athe niés r appellerét apres l’auoir bany,eftat leur chef:& depuys troublez d’vne grade torméte de guerres ilz éleuret auec bône raifbn deux Capitaines, qui furet Pericles,hôme de grande vertu, 8c Sophocles côpofêur de Tragédies: Lefquelz diuifas leur armée en deux ont faiétdegaftd’vnbiégradpaïs des Lacedemoniens, 8c ont ioint à l’Empire des Atheniés beaucoup de Villes d’Afie. Maispourquoy metay iede Diopite 8c Meneftée,Leofthene 8c CharedemeîNe fçauôs nous pas bië qu’ilz ont par ces artz 8c coguoiflancc
- du meftier
- p.016V - vue 44/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IL i
- du mefiier de la guerre acquis honneur en gouuernant la Republique, à la façon de Pericle, Ariftide, & Solon,comme entièrement perfaitte & drefi lëe, & propre tant a la guerre qii’àlapaix?vnchafiun d’eulx comme dit Archiloche fimbloit digne du Dieu Mars, & des gratieufis mules de He-Iicon, comme quid’vn continuel exercice faifoit les deuxmeftiers. Finalement lespoëtes font en fi grandereuerence aux plus fiuuages,&àau-cunes nations barbares, comme aux Galates,la fureur donnant lieu à la fipience:aulfi porte fi grande reuerence Mars aux Mules,que quand les ar-méesl’entr’approchent en ordonnance de bataille les elpées au poing, & les dardz lancez, nonfiulemerit les amys, mais aulïi les ennemys cell'ent à leurentr’arriuéeau combat.
- DELA MVS IQJ'E, ET OJT ELLE <ytQ-cointdace elle a auec l’art militaire. Chapitre II IL
- A dilcipline des chats, & melure qu’on appelle Mufique n’eftoit pas moins requifi que l’enuie Ôc excellence de bien dire. De vray elle eftoit parfis mefures & nombres vneadrelfe pour modérer parraifonles meurs nobles de lame, & quelque éguillon pour f émouuoir & pour induire vne viuacité quafi furieulê & hardie.Car comme celle dilciplineloit diltribuéeen modes, tons, & nôbres, loudein aulfi que l’accord,qu’ilz appellét harmonie de Ions diuers eft drftinâ:,les fanta-fies des ecoutans, le dilpofint aulïi à vn chafiun d’eulx, aux vns polement, & moyennement,comme au Dorique, que tous confelfent confiât & ferme, & auoir vne façon virile autheur de prudence &chafteté: aux autres rudement, comme à celuy qu’ilz appellent Phrigie, lequel émeut,tralpor-te & rauit le cœur au combat, l’enflambant à fureur de telle lorte qu’il fim-ble eftre infinie, comme il eftefirit de Pythagoras, lequel par vn chant du Spondée, a rendu l’entendement raflis d’aucuns ieunes hommes violens & furieux incitez par celle autre maniéré de Ion. Car comme ilz vouloyét bruflerlamailon de quelque femme qu’il aimoyent& rompre les portes, Pythagoras auerty que celle ieunefie eftoit en furie, rauie du fô des Huiles, & du ton de Phrigie fins vouloir defifter, quelques perfuafions queplu-fieurs eulfent commencé, ordonna de changer la mode,& a par la pefan-teurde tons abatu leur furieulê concupilcence .On dit le femblable de Timothée de Miles,lequel eftant en vn banquet d’Alexandre, & chantant ce ton que nous appelions Phrigie a tcllement(comme Ion dit)émeu le Roy, qu’il courut aux armes,le ramenant de rechef àla compagnie & au baquet par vn changement de ton. On dit que le mefme Alexandre mit la main aux armes au chant de Xenophon. Il eft d’autres tons appeliez par vocables de diuerfis langues, comme l’EoIic,qui appaifi les fâcheries du cœur, & procure lommeil aceulx qui ialônt appaifiz.Iafis aguifi l’entendement aux hebetez, & fait que ceulx qui lônt alfommez d vn defir terreftre, défi-
- p.017R - vue 45/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- rent les choies celeftes.Le Lydie a efté inacnfcé contre les trop grandes fbli-citudes & fâcheries de l’efprit, le réparant d’vne retraite, & fortifiant de dele&ation. Il fault dire le femblable aux accordz, veu que les vns rendent la vie plus confiante,les autres plus emeuë,les vns font les mouuemës plus gratieux, les autres plus violentz:d ont il auient que les mutations fi font grandes des meurs & des cœurs. Si de vrayl.es tons &.çonfonanccs pénétrent iufques àlentendemét, il eft befoin qu’ilz rendët les cœurs telz qu’ilz font. Et pourtant vne fantafie molle & difloluë par lafeiueté,prend plaifir en tons molz & impudiques, vne plus rude je reiouit de fons plus durs, la gratieufe,dcs médiocres.D’ont on peut bien cognoiftre quant grande affi-niténousauons auecles chantz harmonieux, veuaufliqueplufieurs des figes ont dit,les vns que lame eftoit vne harmonie,les autres, comme Pla-to, que celle du monde a efté formée d’vne conuenance muficale. Oultre-pluslafolicitude de la mufique n’a point deffailly ànuldeceulx qui font profefiion de la fipience filon l’opportunité du temps, veu que Pythago-ras inuenteur d’elle, & quelques nobles Philofophes l’enfiiyuans l’ont du tout rendu perfaidc, eftans abbreuez de l’opinion prinfi des anciens,que ce monde eftoit formé des quatre elemens par cefte refonance, laquelle apres a cnfoiuy la Lyre en fimblance d’vne vraye tortue, de laquelle on die que Mercurea efté inuenteur auec des nerfz detroys cordes à l’imitation des troys temps de l’An. De vray il a ordonné troys voix,la haulte,la baffe, & la moyenne, la haulte à caufe de l’Efté, la baffe,de l’Hyucr, & la moyenne de la Vere Sc Autumne. Finalement les Aftronomes,l’ont eftiméfeom-me procurât tant de chofis vtiles)deuoir eftre recerchée entre les eftoilles, perfuadans qu’il eftoit vne mufique celeftielle, veu qu’ilz ont peu côpren-dre la forme de la Lyre eftre logée entre les eftoilles. Or n’eft il pas mal aife de répondre aux detradeurs,difàns que l’exercice de cefte difiipline eft vil, dedaignable d’autant que(commeilz dient)iespauures& vilz exercent la mufique, fi on a regard par quelz moyens,& inftrumens,& iufques à quâd ceulx qui font dreffez â la vertu ciuile y doiucnt prëdre plaifir: veu qu’il eft honnefte & modefte de l’apprédre, &fy exercer iufques à quelque poinél, & aulfi infâme & indecét de la pourfûyure iufques au bout, & d’eftre prins de fis amiellemës. Et comme il n’y ait rien qui empefihe les tons & inftru-mens de mufique de faire ce qu’ilz difint, il eft tout notoire qu’il fault que cefte difiipline n’empefcheles autres artifices, ny ne rende le corps mol & inutile aux affaires de la guerre & ciuilzrce qu’auiédra fi nous ne nous cm-ployôs point trop au temps qui eft neceffaire pour emporter le pris de l’artifice, ne touchant ie ne fçay quelles chofis amirables, & fùperfîuës, mais tântfiulcméc de forte que nous puiftions nous reiouïren tons receuables, non pas d’vne commune façon de mufique feulement,corne font vn amas de ferfz vilz, ôc d’enfans. Or comme des fons qui font la matière des chan-fons la nature foit en troys fortes, que le nombre detroys mufes perfaid, lors que le fonfe caufe de la voix comme eft celuy qu’on chante delà gor-
- gc,ou
- p.017V - vue 46/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IL 18 ge,ou du vent, comme celuy des trompettes, ou Huiles, ou par chofes tendues & battement,es nerfz,harpes, & tabourins,& aucuns autres,lefquelz concaues reforment à la touche, on peut bien cognoillre par les didz de Philippe,& Cato,comme le fon de la voix eftconuenabIe,& comme il elt licite aux nobles de le pourfuyure. Ce Caton appelle M.Sénateur notable, cxtrauagant, & fefcenin : d’autant qu’il luy fembloit que le bien chanter n’eftoit pas bien foant à vn homme d’authorité. Au regard de Philippe il a reprins gratieufoment,fon fils en la remontrance qu’il luy a enuoyé, corne il fut auerty du chat mélodieux fait par luy en quelque certain lieu, dilânt: n’as tu point de honte de Içauoir fi bien chanter î II lùffit a vn Roy de donner audience aux chantres. De vray aulïi lémble-il fauorifor beaucoup les mules fi tant lèulemét il affilié comme iuge de ceux qui debattet enfemble de telles choies: veu qu’onque ieune gentil home n’a defiré d’ellre Phidias, ou Polyclete pour auoir veu Iuppiter,quoy,qu’il ait leurs ouurages en grade amiration. Et combien que cell ardant defir de mufique n’ait point elle en fmtafie de ces deux princes hores par nous recitez, il a touteffois enfla-bé&gaigné lecœurdesmefohantz mefmementdeCaïus,lequelelloitfi. tranlporté du plaifir de chanter qu’il ne fen gardoit pas melmes es ieux publiez. L.Silla,homme défi grand renom a le bruit d’auoir trelbien chanté. Il n’y a home tant foit peu foauant qu’il ne lâche quelle folicitude a eu Ne-ronde conlèruer ou augmenterlâvoix:ny ne dira parauanture ame que ceux cy l’ayent fait fans propos. Sans point de douté celle partie de mufique a merueilleulèment grand pouuoir, & font les effeétz plus diuers qu’il n’ell croyable:veu quelle émeut Iesvns a vne folle ioye,à poëfie ama-toyre, autres attrahymens de volupté, plufieurs aulfi à la vertu, &a vneioyelàincle & deuote, & quelques fois a larmes lâinétes laquelle di-uerfité a tiré à diuerfès opinions, mefmes les grandz clpritz deslâinélz pe-res. SainélHierolme de vray a fèmblé blalmer le defir de chanter, quand il dit qu’on ne cbâtepas a Dieu de la voix mais du cœur: ny n’elloit befoin d’adoucir la gorge auec medicamensa la mode des Tragédies, tellement que les fons theatrales foyent ouïz en I’eglilè. Dont il auient fouuët,corne dit SainélGregoyre, qu’en cerchantvne voix douce au Diuin lèruice la bonne vie ell oubliée,& le chantre en fon lèruice irrite Dieu,pendant qu’il donne plaifir au peuple de fia voix . Sainél Ambroilè aimant l’honneur de Dieu a ordonné qu’on chatall. Athanalè lùyuant la vanité,approuuel’vlâ-ge de châter en I’eglilè qui ell d’vne voix fi baffe,qu’il a approché plus d’vne prononciation,afinquepar vnefuperfluité,& affection de volupté ou vanité, ou d’vne voix lalciue, &abâdonnée le menu peuple ne foit tranlporté corne tranfy.Sainél Augulltn voyant la difficulté qui d’vn collé & d’autre luy fourdoit pour la doute, dit:Ie braie fort entre le péril de la volupté, &c 1 expérience du fâlut, & côdelcens plus non pas d’vne ièntece irretradable, que la coutume ay ie de châter foit approuuée en I’eglife, à fin qu’vn cœur tiebile fexcite â l’affedron de l’honneur de Dieu par vn plaifir des oreilles.
- p.018R - vue 47/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Quand couteffois il m’auient de prendre pins grande délectation au chant qu a a fubftancc,ic confefle faire péché digne de punition, 8c lors 1’aime-roye^mieux n’ouïr point le chantre. Combien qu’en vn autre paflage il déclaré que nousnedeuonspasfuïrlamufiquepourla fuperftition despro-phanes, fi nous pouuons par la prendre quelque vtilité pour entendre les fainétes eforitures, ne nous trouuer à leurs menfonges Theatrales, fi nous entrons en quelque difputation des harpes & inftrumens muficaux qui férue à l’apprehcnfion des chofés fpirituelles : ny ne deuons laiffer a prédre les lettres,combien qu’ilz difent Mercure en cftre le dieu, ou bien delaiffer la vertu de iuflice pour luy auoir dédié des temples, aimans mieux adorer en pierres les chofes qu’ilz deuoyent porter au cœur. Au regard du fôn qui fê fait par le vent,& la bouche, nous ne le deuos point autrement blafmer, qu’ainfi que raifonnablement le témoignent les anciens, de Minerue 8c d’Alcibiades, llz la difênt de vray inuentrice des fluftes,lefcjuelles elle a re-prouué, fafchée de la difformité de la bouche : le fêmblable eft auenu a Alcibiades,comme il eut apprins le ieu de fluftes de fôn grand pere Pericle,& comme il eut emboufché celles que luy auoit prefènté vn excellent iouëut de fluftes qu’on auoit madé,& qu’il eut en retenât fon vent enfle les iouës, il rougit découurat la deformité de fôn vifâge,& en dédaignant les fluftes, il les ietta 8c rompit, méritant en fon premier âge de donner exemple,que d’vn cômun contentement du peuple l’vfàge des fluftes fut des lors reprou-ué à Athènes: lequel apres la viétoyre contre les Medes il auoit prins,& re-ceu,de forte que tous les nobles 1 apprenoyent. le treuuc que dvne inftitu-tion ancienne non feulement des nommes nobles Athéniens, ne de cefte ancienne Grece iadis tant renommée,qui depuis a efté fai été terre d’Italie, mais aufîi de noz gradz pères,& d affez d’autres natiôs 8c peuples,on auoit es banquetz,danfes,& affemblées folennelles harpes 8c fluftes,lors que par chants 8c elles, ilz louoyent ceulx qui pour le pais eftoyent mortz en gens de bien, 8c blafmoycnt ceulx qui de couhardie auoyeht euité la mort. De vray aufli eftoyét elles cogneuës au ieuz êc aux pleurs ainfi que ditOuide:
- ^Au temps iadis eftoyent lesfluftes en \fancet 33 Et toujiours en honneur furentpar excellence:
- 33 D’elles le fon au temple, & aux ieu% refonnoit,
- 33 Et aux triftes ohfeques a fluftes onfonnoït.
- Et combien que cefte maniéré d’exercice de fluftes foit tombée (corne parauature autreffois elle a fait de ces tant nobles, 8c graues hommes entre les mains de certains yurongnes, gourmans,volages, 8c villains, il eft tou-teffois manifeftepar plufieurs exemples quelle a fêruy d’vne certaine doctrine de guerre à plufieurs nations,& peuples Marciaulx pour donner batailles . L’armée des Laccdemoniens marchoit principalement aux chant, 8c à la flufte,ny ne fê faifoit aucune remontrance fans le chat du pied Ana-pefte.Et pourtant le rencontre en eftoit beau,& à craindre,corne qui marchoit de mefure, 8c au fon de la flufte fans rompre l’ordre du bataillon, ny
- ne
- p.018V - vue 48/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IL i<
- ne fetonnoit, veu que par le chant ilz efloyent gratieufoment, & allaigre-nient attraiélz de prendre le péril : d’autant qu’il fomble tout certain qu’ilz ne peuuét tomber en trop grande fureur, ne trop grande frayeur eflâs telz, mais plus tofl auoir vne grandeur de cœur ferme, conflate, & meflée d’vne efperance,& hardieffe. Nous n’auons point entédu que les Lydiens ayent de coutume d’aller autrement à la bataille,mefmesfouz leur Roy Haliacle menât la guerre aux Milefins, veu qu’il n’a pas feulement eu destrôpettes entre les rancz de fon armée durant le côbat,mais aufîi des fifres & harpes. Cequedemefmeon dit auoir eflé fait par les Candoyz auecraifon,nôpas du fifre,mais de la harpe,quafi comme maiflreffe ôc guide, & dreffant tous leurs combatz.Car,comme dit ce poète Laconique: n Et dux armes accourt la harpe refonnante. Maisàquoyfêruoitennoz
- légions les cornetz,trompcttes,clairôs,trompes,& tabourins,finon qu a la guerre on en fonne la marche,& retraitte,ou bié pour enhardir les trop découragez,ou pour retirer les trop ardas. Ce que n’a pas ignoré le prince des ss poètes difant: De chans enflamher Mars,£7* ïhomme de trompettes.
- Or efl il certain que les cœurs des hommes ne font pas foulemét enflam bez,& rabaiffez par le chant, mais aufîi font ceux des cheuaux, defquelz la docilité efl fi grade,qu’on treuue que toute la cheualerie de l’armée des Sy-baritains auoit de coutumede danfor & treffaillir aucunemét au chat harmonieux. Au regard du fon,Sigifmond Pandulphe,qui fo fait de la touche fur les cordes tendues,il y abieil a confiderer corne quoy chacun fen ayde. Car fi quelqu’vn le fait, corne quelque fois tu fais à par toy, ô Prince treffa-ge,pour apres les grades folicitudes,& les difficiles,& honnorablcs affaires de la guerre, paffer le temps & recreer ton efprit, ou pour fês amis, ou pour la vertu,il en tirera quelque plaifir, qui ne fora point defordonné, mais rai-fonnable. Ny ne fault point que fans propos quelqu’vn fefmerueille de ce que tu as accomply celle partie de mufique à la prouëffe des guerres,corne qui enfuys Mercure,qui a enfoigné a luyter, & apremier inuêté le lue,mais celuy qui fonner le fera pour dôner paffetéps aux écoutas , fombîera le faire auec infamie,& deshonnefleté,veu que la fin pour laquelle il fo fait, foit mauuaifo,6c l’vfâge à bonne raifon damnable,& non point moins que plu fieurs inflrumés des anciens ont efté reprouuez, comme les Pentades,Bar-bitons, & ceux qui tendoyent à don ner paffetemps aux auditeurs:aufïi ont efté les Heptagones, & tous ceux qui ont befoin d’vn exquis mouuemét de mains.Il fault donques,corne ie penfo,que la mufique quifo côfumeen ces inflrumens auec toute diligence,n’efl pas cômandéc,ne celle qui efloit ia-dis aux Théâtres, & echarfauxeffeminée,&molle pour la plus grand’part en tons impudiques,& qui efl rude,& variable,mais celle qui au contraire foitfimple,de bône forte,graue. virille,&modefle, &d’onton châtoitles Iouenges des vaillans homes,& que mefmes ilz chantoyent : laquelle quiconque ignoroit efloit tenu pour mal apprins. Ce que Cicéron témoigne eflre auenu à Themiflocles Athénien Gapitainedes Gréez trefrenommé:
- D
- p.019R - vue 49/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- d’autant qu’en banquetant il auoit refuie à iouër de la barpe. Nous auons entédu que Epaminôde Thebain fuyant cefte infamie iouoit merueilleu-femët bien de la barpe. Homere aufli efcrit qu’Achilles reuenant du côbat foloitprëdre foulas en cela,neiouat pas chofes Veneriennes,mais les prou-ëfles des vaillans hommes. Ouiden’apas feulemët dit Achilles dodte en la harpe,& bie drefle es difciplines de mulique,mais aufli Alcide difânt ainfi: 33 Von croyt quefur Heflor iettantje s mains iadis
- 33 A meurtr il employoit> gy au ieu de la barpe.
- 33 Parti ayant\>uydédes trauaux Vint ^Alcide
- 33 TEeprefque luy refloitquela fin de fa charge.
- Au demeurant il eft incroyable de quant grand defir Néron feft adonë a la harpe,veu qu’il ne delaifla rie de ce que les ouuriers de telles chofes ont de coutume de faire.Mais il fit vne choie folle, 8c digne de moquerie,de ce que la nuiét qui luy fut la derniere de là vie en ce monde,il ploroit fouuen-teffois 8c miferablemét comme malheureux entre tant de debatz propofez par la mort 8c la paour prelènte auec douleur, non pas de ce qu vn fi grand prince,mais qu’vn muficien mouroit. On pourroit amener en auant plu-fieurs exeples d’Adrian,d’Alexandre,de Seneque,& d’autres anciens: mais ie crain quel! iem’arrcfte longuement à les nombrer,ie ne lèmble auoir oublié mon propos,ou bien encourir le blafme de langard.
- DE L’ARITHMETIQUE ET GEOME-
- trie militaire. Chapitre JA.
- L m’a lèmble bon, 8c bien conuenant de toucher les dilciplines, qui ont par les raifons Geometrales les nôbres & multiplications manifeftes. Car elles font de grand lécours pour déclarer la force 8c nature des choies qui font fur nous, 8c de bien grad aufli à celles qui font au deflouz, corne pour les diftances des lieux, hauteurs d’edifi-ces,& pour mefurer les profondeurs d’eaux par l’art d’aucuns inftrumës cy deflouz delcritz.Qui eft vne choie que les Caldées(tat eft le genre humain prôpt 8c curieux) ont,corne l’on dit,premièrement trouué,& lesEgiptiens receu,ardàs d’vne meftne ferueur : Iefquelz par vne colieéhon generale des raifons de cefte difeipiine, l’ont montré fi propre à toutes ces choies que nous auons dit,& à tout ce qui peut eftre contenu es formes generales,que fans elle pas vne de ces choies ne peut eftre véritablement cogneuë. Nous trouuons par memoyrequ’Eudoxe,& Archite l’ont commencé en la parât de diuerfes formes 8c figures.Ceulx cy certes ont diuulgué les raifons inge-nieufes,& occultes de ceft art gardées en fecret, aufli ont ilz les proporciôs couuertes,& les demôftrations par le lèns 8c exemples d’inftrumés:& l’ont mis en auant formans engins auec lignes & figures géométriques legere-mét tirées pour dreflèr des inftrumens.Parquoy Platon feft fort anime cotre eux,corne qui auoyent aboly la dignité 8c excellence de ceft art,d’autàt qu’il eftoit tombe dvne confideracion ôc des choies incorporées à quel-
- p.019V - vue 50/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IL ic
- ques autres fenfibles, comme fi pour fen ayder il euft befoin d’vn corps,Sc ignoran ce mercenaire.En quoy nous ne faifons point de doute que l’indu ftrielaborieufè,&amirabled’Archimedes, &deSerpinaefté engrad’efti-me,& approuuéeàSarragouzeparhiftoriograpbes fortrenômez .Ilz ont de vray laifle a la pofterité beaucoup d’inuetions inftrumétales, & gnomo-niques,5c manifeftez par nôbre,&: raifôns naturelles,facqueras vne grade gloyre par fus tous autres. Mcfmes Archimedes inueteur du cercle côcaue d’airain,& du globe celefte.Ceft home la excellent par fis tous autres en la doctrine & pourfuytte de ceft art,eftoit à Sarragonze lors qu’elle eftoit pref fée d’vn rude fiege de Marcel, lequel touteffois eftoit encoresplus amira-ble ouurier, & compofeur d’inftrumés de guerre:& pour la defenfè de murailles : par lefquelz diuerfès cfpeces detraid;z,& pierres dvne merueilleufè grandeur dardez d’vn grand bruit, 5c vifteffe ofienfènt l’ennemy, 5c en vn moment font les murs abbatuz,& les fortereffes rompues. Defquelz Archi medes vfant pour la defenfè du pais contre le fiege de l’armée Romaine,& de Marcel leur Chef, la en vn fi grâd nombre de citoyens, 5c d’vne fi grade ville,fèul rendu plus long : lequel retardement comme Marcel ayant finalement prins la ville euft trouué auoir donné grand detourbe à fà vi&oyre, 5c qu’il eut permis le fàc, 5c pillage a la furie des gens de guerre, il excepta d’vn fi grand nombre de citoyens Archimedes luy fàuuant la vie pour le plaifir qu’il auoit prins en fis excellais ouurages,& l’eftimant a bonne rai-fon beaucoup plus que tout le refte du peuple. Au demeurât comme en vn fi grand vacarme,& tel qu’il peut eftre au fàc de Iapr’infè d’vne ville, Archimedes fut totallemét rauy aux lignés & formes qu’il auoit tiré en poudre, vnfoldat Romain cependant entra, ledefirduquel au pillage, &lame-moyre de l’ordonnance du Chef letenoitenfofpend: 5c tenant fon efpée nuë fur la tefte d’Archimedes ainfi rauy,il luy cômandoit de dire fon nom. Mais comme la grande folicitude de fon efprit luy eut perclus les yeulx&: l’ouië,fàns fè foucier de faire quelque rcponfè à la fiere demande du fbldat, fenquerant qu’il eftoit: 5c qu’au contraire il mit tant feulement la main au deuant le priant de ne luy brouiller, fà poudre, il luy donna occafion de le tuer,corne courroucé de dédain. De la mort duquel le Chef des Romains ayant pitié,tranffera à fès parens l’indemnité à luy pour néant deftinée : ôc luy fit les obfèques& fêpulture,qui eftoit la feule chofè qui reftoit,ôc qu’on luy pouuoit plus faire. Le fèpulcre duquel Cicéron prince de l’eloquencé Pvomaine, fè donne gîoyte auoir trouué chanfy dedans des buiffons auec vnefphere,& obelifque infculpez,& taillezau deffus,& long temps apres efpanduça & là, mefmes incogneu à fès citoyen-s, aux quelz l’ignorans il enfèignaeftantQuefteur en la Sicile.Par ce moyen donques,&parces au-theurs on voit l’induftriede compofèr engins eftre deriuéede laGeome-trie par l’imitation de ceft art courant, & diuulgué partout, laquelle fèu-lefeftant la philofophiedelaifTée£efèparée,)eftaiugéeaux inftrumens dé guerre, 5c aux ars mécaniques.
- Dij
- p.020R - vue 51/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- On comprend la hauteur dvne tour,ou d’vn pofteau par leur vmbre.
- rn fn rmnn-
- Vne boule de plomb,oudecuyureauecvne main de fer foit de cette forte,laquelle mifo dans leau tirera au fond,apres lequel auoir tou ché, elle remontera de rechef. Comme donques elle commencera a defoendre cotte, durant là defeente lesmomens du temps, puis y mettant vnelance diftribuc la quantité des piez ou des coudées,cela fons doute qui fe trouue-ra en petitte eau,te fora vn bô indice,& temoing en toute autre plus grade.
- (nmnn m <T .
- p.020V - vue 52/480
-
-
-
- 21
- LE TIERS LIVRE DE ROBERT
- VALTVRIN DE L’ART MILITAIRE.
- De ïAfltologie, gy diuerfe façon pour preuoir les chojés futures fil en efi aucun art.
- i)
- 33
- 33
- 33
- 3>
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- J)
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- L nous relie encoresSigifmon<lPanduIphe,deliurervne certaine dilciplinc Mathématique, c’eft à dire de la railon d’AIlronomie qu’aucuns eftimët fort opportune pour dénoncer les euenemens des guerres futures. Laquelle fl Lu-cainna enIêigné,ilatouteffoisattaint la lè&ede l’erreur lors qu’il delcriuoit la crainte de la ville, & qu’il preuoyoin la guerre ciuiîe deuoir ineuitablement aduenir parargumensnecelfaires de celle dilcipline aux approches de Cefàr. Ce poète de vray il Içauant, (h touteffois celuy fe doit dire poète, qui par vne vraye narration des choies faictes approchoit plus des orateurs ou hifloriens) afferme quelamali-ce de Saturne fèroit effrenée, lors que lèul il rèlideroit au throlnede fon. domicile,diIànt ainlî:
- Quelle ruine ô dieux?de quellepefie aufi Drejfe% vous cruauté?de maints les 'tours derniers la fe font en vn temps ajfemblé,fi la froide Etefloylle nuyfante au haut ciel enfiamboit Les noirs feus de Saturne, Aquaireeuf deflaplu Eau^ Deucaltonées,aufii toute la terre Submergée ta fufi fous la mer epandue,
- Si de tes rai% Pbebus le furieux lyon JSfemée tu preffoïs,tout le monde fèroit Enfeu,aufli P Aether de tes car% fujl brûlé.
- Or font ces feu% eflaintstmais Marspourquoy fais tu Si grant âpre fl, mettant en feu le Scorpion Courroucé,ia e fiant la queue toute en flambe,
- Et qui brûles fespieg?ia lupiter au ciel Efforcé de Poccafé,gyla falubte efloyle De Venus efl debile,gy le vifle Mercure Tarde,le feul Mars tient le ciel.pourquoy leurvoje Ont les fgnes laijfé vagans au monde obfiurs?
- Du Porte fée Orion le coSlé trop reluit Des armes la fureur gy du fer lapuijjance MenaJJè gy confondra tous drots gy loix par force*
- De vertu prendra nom le mefaifl execrable Parplufeurs ans aura ce fie fureurfin cours.
- p.021R - vue 53/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Si quelque cas donquesde lèmblable foffre en celle contemplation des chofes hautes, par lequel les curieux de telles chofes puiflent cognoiftre la vraye alîiete des elloilles, & preuoir la qualité des temps,& prendre vn fort plailàntfruiét de leur Ipeculation, ilz lêmblent auoir le contentement (i grand qu’ilz dédaignent comme petites & moindres toutes les noftres autres choies,mefmement extérieures,auec les grâces de fortune que chacun eltime tant. Par cell art de vray, &: autres de la recerche du futur, fil en eft aucun,plustollquVnemoqueriefolle d’vn chacun,nous voyons les entë-demens des plus renommez Philolophes le tormenter. Democrite de vray enaroddétout le rond prelque de la terre, auec la dilfipation de tout Ion fort riche patrimoine: Platon ÔcDiogenes en ontellé captifz : Pythagoras en a voyagé longuemét a diuerlês nations. Au regard d’Holtane,&; d’Em-pedocle, ilz ont nauigé plus en façon de baniz que de voyageurs, non feulement d’vn delir, mais aulîi d'vne rage de 1 apprëdre,laquelle ellans de retour ilz ont loue & tenu lêcrette : combien que ie treuue qu’outre eux vne extremeclarté de lettres, &gloyre de celle recerche des choies lècrettesa elle anciennemét prelque touliours ellimée & recerchée, comme par Thaïes leMilelîn, AnaxagorasClazomenien, Xenophon, Eudoxe leColo-phonin, Caiille,"Melon, Philippe, Euchemenon , Arate, Hiparée, ioint Socrates, Zeno, DicearchePeripatetique, Cratippe, Cleante, Chrylippe, Antipatre, Polfidoine &c Panece auec alfez d’autres, delquelz la pauureté voluntaire, la patience d’iniures,& contumelies, le trauailreceu d’auanta-ge effc en memoyre.Pour lefquelles choies aucuns d’eulx ont mérité des vénérations & honneurs diuins, ou bien deux égaulx : & ont tous apres leur trelpas acconlùiuy le loz, gloy re, & immortalité de leur nom, que viuans ilz auoyent touliours deprifé. Il n’ell pas tant feulement manifelle que les lèulz philolophes ont employé li grand ellude,& diligence en la cognoif-lance des choies futures,mais aulïi prelque toutes natiôs, 6c puilfantes Re-publiquesauec lesplus grandz Capitaines, Roys&princes de grand renom ont ellé de melme fantafie, & auis: tellemet que lâns ces artz qui promettent les choies futures, qui font diueries, & en plulieurs formes, ilz ne penlbyent point deuoir alfeurém et entrer es grades entreprinfes. En quoy foffrent premièrement les Babiloniens & Egiptiens : l’efquelz d’autant qu’ilz n’elloyent point àcouuert à caulè de la condition de l’air, & qu’en celle région la le ciel nell point caché de nues, ilz ont notétrelbien, & ont inuenté par le feul vfage la diuerlité des cours du Soleil, & de la Lune, 6c les voyes des eftoilles auec leurs effeétz,d’autant qu’ilz les voioyent plus à l’ailè que nulz autres. Les Caldées lùblèquemment lônt ellimez auec les AlTyriens auoir fait la Icience par vne oblèruation diuine du ciel, auec vne grand’ ellude,& contemplation pour furpalfer tous autres fuyuant ce que dit Lucain.
- Qui pourra par entrailles auoir des dejlinées
- La fcience, ou d’oyJèau% faire certaine epreme,
- Et
- p.021V - vue 54/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE III. zz
- Et obfemere clairsy ou ruminer le s ^éjlres
- Decure ^dfîirienne*
- Au regard de la difeipline des Arulpices, ie ne Içauroye pas bien dire cô-me quoy elle loir peruenuë en coure la Carie, & iulques à la trelfainéle Ville de Telmefle merueilleulcment curieulè & diligente en cela, & en la co-gnoiflance des eftoilles: ne pareillement comme quoy elle foie peruenuë aux Villes de Thelfaliedaquelle aulïiles Angloyz.ont(cômel’on dit)gardé en fi grandes ceremonies, qu’ilz peuuent lèmblerl’auoir baillé aux Perles: au pais defquelz(commele témoigné Cicéron, & Ariftote, au premier li-ure de Philofophie)celle maniéré de Magiciens lilçauans a flory de plus grande ancienneté qu’entre les Egiptiens. La Gaule à eu iadis les Druïdes interprètes de leurs religions, dilputans du tout, & de la forme des eftoil-les, du ciel, de la terre,& du monde:de la force aulïi des Dieux immortelz, deleurpuilfance, &voluntez:lèfailânsfortzdelçauoirles choies auenir, partie par Augures, & coniecture. Et combien que leur difoipline foit efti-méeauoireftétrouuéeen Angleterre, & de Ià/tranlFerée en la Gaule,ceulx touteffois qui depuis ont voulu la cognoiftre fy font tranlporté pour l’ap-prendreda ou aucuns d’eulx(côme il eft eforit)ont confumé dix &huiéfc ans, & plus. Les Gauloyz aulïi vfoyent de Diuins, lelquelz la, prédifoyent l’auenir par augures,& focrifices,ellâs en vne merueilleulè eftime,& obeif-fance de toute la commune,de la ou il failloit auifer aux grandz affaires ilz gardoyent vne coutume merueilleulè, & incroyable. Ilz coupoyét de vray d’vne elpée la gorge a vn homme,à la cheute duquel, & de fon démembrement auec le repandement du lâng ilz cognoilloyent l’auenir par vne ancienne oblèruation des chofes. Au regard de la Grece nourrice de tous bôs ârtz, corne elle n’ait iamaisenuoyé quelque partpeupler Ville làns Içauoir la volunté des Dieux: aulïi n’ont ilz làns elle commencé n’entreprins aucune guerre. Qu’a fait l’Hetrurie? N’a elle pas efté inuentrice de la diui-nation par les entrailles? & diuiné les portentes & efolers : & pourtant ap-pellée parles Gréez Tufoie, âcaulène Thus(encens)& des lâcrifices,ou bié de la façon de lâcrifier.Ie me tay des Troyens,qu’on tient auoir inuentéles augures. lelaille aulîlla natiô delà Cilicie, & Arabes, des Pifîdares,&fol>-lèquemment de la Pamphilie, & de Spolete ententiue toujours à celle di-foipline pour la cognoiftre.Celàfuffira pour les diuerlès natiôs de peuples: aioullons maintenant les exemples nobles des Republiques: & premièrement des.Athéniens, & Lacedemoniés, d’ôt ces derniers ont(comme Ion dit)baillepour collegal, & alTelfeur a leur Roy vn Augur, & les Athéniens faifoyentprelîderàchacunealfembléepublique quelques prelatz diuins, lelquelz(comme dit Cicero)ilz appelloyent Mantes. Toutes les foys aulîî qu’vn bruit d’armes eftoit ouï au ciel, ou qu’vne pluie prodigieulè de pierres, tuiles , fer, chair, & de lâng tumboit fur terre, ôe que les boucliers ar-dens fe monllroyent, ou que les coronnes celelles ardoyent, ou bien que les femmes lè tranlmuoyent en malles, pour lefquelz prelâges on f’attédoit
- D iiij
- p.022R - vue 55/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- a quelque grad dommage à la Republique. Ne lé font pas le Sénat, & P.R. aydédeces difciplines auecles vers Sibyllins?Mais encore non contens de ces choies ilzdilbyentpreallablementparprelâge au commencement dé leurs entreprilês qu il fuit bon, prolpere, heureux, '& bien fortuné, efti-mans cela léruir beaucoup en tous affaires. Nous Içauons bien que Cal-cas a efté tenu des Gréez a li grand honneur que lors qu’ilz tircret a Troye ilfut(commei’ondit)gouuerneur de leur innombrable armée de mer à caulédeladifcipline des Aulpices, en laquelle véritablement il a excellé, eifant moindre en autres choies quemaintz autres.: Au lurplus Amphia-rée, & Tirezie font tenuz tant excellens en ceft artifice, que le premier fut honnoré comme Dieu, ôde fécond non feulement ne fut pas préféré aux hommes viuans, mais aulfi aux trelpalfez, eftans les autres vacabondz corne vmbres. Mopfe & AmphilocheRoysïontperfaittementcogneuzen Grece à caulé du renom des Augures.R voy euidemment qu’aucuns pourront fefmerueiller ou eft ce que i’ay IailTé ce tant bô Augure pere de la ville de Rome. I’ay touteffois regret d’en parler, aulfi ay ie de penlér que la cité de Rome,chef certain de tout le monde, édifiée & fiorilfante de bon heur, ait plus toft voulu lè fier aux oifeaux, qu’à Dieu, delà fortune d’vn peuple fi puifTant, veu que loubz les Roys, & Empire confulaire par vn bien long temps, on n’au oit point de coutume de rien faire fans aurufpices, n’alfem-blées de ville, ne requelles de lécours aux Sénateurs,ne les côfeilz des Che-ualiers, nelesrolles des gens de pied, ne finalement tout lartMilitaire. le m’étonne remémorant ces hommes tant renommez & magnifiques feftre alfuiettiz aux volz & chantz deceptifz des oyléauxrou c’eft aulfi que i’ay -oublié les Martiaux freres tant renommez en cecy entre les plus anciens de Rome. le confeffe touteffois n’auoir rien d’eux que le lêul nom. le me tay de la pucelle Calfandre, fille du Roy Priamda fureur de laquelle a anô-cévncas de renom, & bien grand : aulfi fay le d’vn certain Polybe de Corinthe, qu’Homere dit auoir prédit la mort a plufieurs Gréez,faifâs le voya ge de Troye, & melmement àlônfilz.-onnelcetfi ce fut de fureur ou autrement. Au regard de moy ie lailfe trefvoluntiers & de bon gré tout ce qui eft fable, ou qui fen deult. N eft il pas certain qu’Atlas a efté fort Içauant en Aftrologie, & qu’il a premier difputé de la fphere entre les hommesîN’a pas aulfi Zoroaftre Roy des Baélrianes premier inuéteur de l’art magique fuyuant le tefmoignage des plus renommez autheurs, efté grand amateur des eftoilles, comme fon nom le chante,& regardé d’vne grande curiofité les principes du monde, & les mouuemens des eftoilles, ainfi que ledit Hermodore,& Dion au cinquiefmeliure de Philofophie. De laquelle cu-rieulècognoilfance & contemplation d’eftoilles,Pericle a deliuré d’vne paour vaine les cœurs des Athéniens tremblans, & clpouuâtez de l’ecliplé dufoleil, au moyen des caulés que par la do&rine d’Anaxagore il auoit apprinfe. Comme aulfi Alexandre pourfuyuoit Darius ainfi que la lune eclipfoitaumatinles Macédoniens penfans les Dieux leur eftre courroucez,
- p.022V - vue 56/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE III.
- s>
- 3)
- ceZj fo mutinèrent fi bien, qu’ilz deliberoyent de ne combattre point, ny n’eut peu les engarder le commandement d’vn fi grand chef, fi Ariftander lediuinn’cuft dôné a entendre les raifons dénaturé : tout ainfi que Dion deSarragouzeeftans de prime face les cœurs des gens de guerre fort troublez lors qu’il deliuroit le pais de Denys le tyran trclpernicieux & cruel,ne fut point eftonné d’vn femblable cas, d’autant qu’Amilta le diuin montra & redit la railon de Lecliplê du foleil. f On blafme auffi les poifons de la lune, pour laquelle paour Nicias chef des Athéniens ignorant la caufo a perdu vne fort belle armée de mer ruinant leur puiffance pour l’auoir retirée au port. Ny n’a autrement L. Sulpice le Gauloys qui auoit elle Côfol auec Marc Marcel, prédit le proche deifault de la lune en l’armée de L.Paul con treieRoy Perles otant la paour aux gens de guerre. le n’ignore pas auffi quelulleCefàraaiouftédixiours parraifon Aftronomiqueàl’obforuatiô des anciens: d’autant que troys centz foixânte & cinq fourniffient le cours du foleil, qu’il fait tournoyant le Zodiac,à celle fin que la raifon des temps douteufo côuint plus à l’andaquelle raifon Augufte apres vne faute décou-uerte a amendé par l’entreieâ: du Biffiexte, &(comme il appert es Saturna-JesjfitinfouJper tout ceff ordre en vne table d’airain pour vne garde éternelle. Il eft auffi manifefte que Néron prince trelèxecrable & cruel,a mer-ueilleufoment aymé l’art qui deped de l’air,des eftoilles, de l’eau, des fphe-res, flambeaux, baffins, des propoz auec les elpritz, & âmes, & de plufieurs autres façons qui promettent diuination tardant pour là fortune fopreme es chofos humaines, & defirant commander aux Dieux. Ny ne fuis ignorât qu’Adrian a efté fi fçauat en l’Aftrologie, qu’il a eforit iulquesau dernier iourdefâ vie toutes fèsfortunesrôcdifoit du vrayHelie ce vers de Virgile.
- De cefluy cy feront les Dieu^lafeule monflre
- ^Au monde, fansfoufrir que dauantage il Viue.
- Ieme tay d’Alexadre Seuere treflauat es Mathématiques,& art d’Arulpi ce, auffi fay ie d’Herofoope merueilleufoment les defiderant,& de Caffius, n’omettan t rien en elles. le me tay de Varin Antoyne Heliogabale qui di-uifoit continuellement auec les Magiciens. Il en effc outre ceux cy qui font fort renommez es diuinemens du vouloir des Dieux: qui n’eft pas chofo forteftrange veu qu’a tous hommes venans fur terre font baillez aucuns bons anges deftinez(làufla certitude de la mort)à leur garde & falut comme maiftres gouuerneurs de leurs ceuures, & qui ont efté veuz par aucüs, bien peu touteftois, Ielquelz ont efté excellens par la lumière de leurs ver-tuz diuerfos, fuyuant ce qu’en ontenfoigné les Théologiens, & les liures des Socratiques, & Platoniques auecautheurs de renom comme Cenfo-rin, C. Flaccus,Euclides, Apulée,Trimegifte, Année Flore,Ammian Mar-cellinjmais principalement Menander le comique,& Homere:par les Métrés defquelznous auons apprins que les Dieux celeftes n’ont point parlé auec les hommes vaillans, ny n’ont efté au fècours des côbattans, & qu’au demeurant leurs bons anges familiers ont frequente auec culx: par l’ayde
- fVcrticx Plinio li. 2,cap.iii
- p.023R - vue 57/480
-
-
-
- fEx Cice. i.de diui.
- f Dcllium, pro ducl-lum«
- f Caiu Du eüum, pro Caratmü. *f -Marcu Marcel, pro maximum.
- ROBERT VALTVRIN
- defquelz: Ôc amonitionsplufieurs ont eftérenommez,mefmemcntf Socrates, lequel nous auons entendu auoir de coutume de dire qu’il auoit auec foy ienefeay quoy de la vertu diuine, qu il appelle bon ange, auquel il a toufiours obey, ne l’incitantiamais,& fouuenteffoisle retirant.-ce que fou-uent luy eft auenu,& mefmemët lors que la bataille fut perduë presf Dellic foubz la conduite du Prêteur Lachete, la ou comme fuyant auec luy, il le fut trouué a vn carrefour prenant autre chemin que les autres, il ht relpon-le à ceux qui en demadoyent la caufe que Dieu l’en auoit auerty,& détourné: & lors ceux qui prindrent autre chemin tombèrent entre les mains des ennemys. Ny n a Ion feulement tenu Socrates, comme i’ay dit, excellent en celle preuoiance diuine,mais auffi Zaleque,Minos,Cimon,Zoroaftre, Licurge: ôc Numa, comme auffi en a fait Curius Fabrice, Coroncane durât la guerre de Pirrhus: &fCaiiisDuellus,Metellus,Liidatiusàlapremic re punique, ôc en lafecondef Mar.MarceI,P.Grache,Caton le premier Africain, Lelius Silla,Marin, & comme aucuns penfent, Cefer Augufte, ôc outre plus alfez d autres: outre lelquelz auffi les Republ.des Romains, & Gréez ont eu des hommes lînguliers,d’ont il ne faut pas penfer aucu d’eux auoir efté tel finon par l’ay de de Dieu . Pour laquelle raifon les Poëtes,& melmementHomereaccompagnoyët de Dieux pour les dagers & perilz, les plus notables princes corne Vlixes, Achilles, ôc Agamenon.Outre plus les prefences quelquesfois des Dieux telz,que cy defliis ie les ay déclaré,ma nifeftent qu’ilz donner auis a aucuns hommes : ce que mefmes fe cognoift par les lignifications des chofes futures, qui leur font predittes, tat en veillant qu’en dormant. Et combien qu’aucuns blamans telles chofes affermée qu’à nul des fages foi t apparu Dieu,ne bon ange, mais qu’aucuns hommes tranlportez de foibleffe, ôc rauiz d’elprit, ou bië mal dilpofez de leur corps prennent des opinions vaines,& effranges, qui ont vnefuperftitiôd auoir en eulxvnbon ange: auxquelz certes iepéferoyedeuoircôfentir, comme fouftenu des raifons d’£picure,& mefailànt fort à caufe de noftremutatiô, & deceptio .fi Dion ôc Brute hômesgraues,& adônez àl’eftude de làpiëce, ne fe deuoyat point par aucune affedion, ou maladie, & malaifez atrôper n’eu fient efté ainfi dilpofez par leurs anges côme ilz ont recité à leurs amys ôc familiers.Parquoy en me détournât d’vn périlleux chemî,ie ne feauroyc pas bonnemet dire s’il faut côfentir aux plus anciés autheurs approuuâs ce propos,ou bié fi celle façon d’homes gouuernas,& manias les Royaumes, armées ôc Republ.ont point veritablemët inuété l’opiniô de Dieu,fe difans auoir des anges & Dieux familiers,à fin de trôper par la nouueauté, ôc grâ-deur de la chofe les peuples indôtables, ôc difficiles, ôc que par la ceux pour qui on les feint, fuflet côferuez. Qui feroit celuy(s’il n’eft hors du fens dira quelqu’vn)qui ne croyroit aux oracles,s’il voyoit nô feulemëtlesgrâdz phi lofophes,& maiftres de lavie humaine,mais auffi gradesnatiôs,peuples,ôc Roy s de grâd renô,courir aux Delphes,à Dodone,& à AmmôrQui dédaignera les Sybilles, delquelles le Sénat, ôc peuple Romain prenoit cofeil en
- p.023V - vue 58/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE III. 24
- leurs extremes pcrilzîQui dédaignera auffiIesfogesfachât(ie me tay des au tresjque les Lacedemomés(ldquelz ie nefçay fi ie doy iuger approcher des Romains,&ehre des plus courageux,& excelles detout lemonde)en ont ehé tac curieux,corne ehoit Cicerô,que leurs cjhefz nô côtésdesfolicitudes duiour, couchoyentpourfongerau temple de Pafiphc affis en vn champ près la ville: par ce(ditiI)qu’iIzehimoyent les oracles vrayz de ceux qui ehoyentenrepoz?Quiehcequinereceuroit les Mages, fans la doctrine defquelz il ne cognoihroit homme pouuoir venir à la coronne des Perlés, tant fut il bien doué en autres chofes?Orehoyentlors les hommes infen-fez, menez par ces maniérés,& autres telles deprouidence,que nous auons ditrfefians à dangereux conféillers:nyn’ehoit encores le temps venu de fé retirer de fi gran des tenebres: la vengeance de Dieu pourfoyuoit lors le genre humain, & preffoit le démérité, tellemét que(s il eh: licite de le dire) la patiéce diuine fauonfoit aux fuperhitiôs humaines. Au regard de nous, furlefquelzlafplendeurdelagracediuineaietté là lumière, nous deuons prédre autre façon de vie, & autre maniéré de faire,pefàns que tous moyés, félon qu’a vn chacun eh fà charge ordonnée,comme de gouuemer Iesoy-feaux, & leur drefferleurs chans, regarder aux entrailles, figurer les fonges, infpirerles diuins, lancer les foudres, gouuemer les fortz, & toutes autres chofes parlefquelles nous cognoiffonsleschofésfutures,fontfaittes par l’ayde & aminihration des diables. De vrayilz font pleins de déceptions, Seillufions, parlefquelles il auientqu’ilz troublent tout, & qu’ilz epandéc es fantafies des hommes des erreurs, de forte que par ces moyens, fins, & ruféz de prefcience plusieurs chofés al’auenir font predittes, n’y n’auien-nent autrement qu’elles font dites-.dont les hommes embaclez font ren-duzplus curieux, s’enuelopans de plus en plus es laqzinfiniz d’erreur. Ce qu’ilz font bien fouuéc pour plus aifemet pouuoir & obtenir ce qu’ilz nous drehént, afin que les hommes émerueillez aiouhent foy aux fïmulacres d’vne diuinité&puiffance.D’ontil auient quefouuenteffois ilz troublent la vie, & trauailient de fonges,fâchent les membres, gahent la fânté,fofci-tent maladies, & quelque fois ilz epouuantent la fantafie. Delà eh auenu qu’au temps de Tarquin,AcciusNeuiusehantaugurvne pierre fut coupée auec vnrazouer, delà auffi qu’à aucuns les lignes d’vn Royaume a venir fé procurent. Dont il auintqu’vne Aigle enleua le bonnet de la tehe deL. Tarquin allant a Rome:& apres quelle futmontée fort hault, elle le luy remit a la tehe: qui eh vnechofé forte a croyre. Durant le régné duquel auffi on ditquelaviergeCreffeauoitde coutumedeporteraux vierges Vehales le reliefde toute la table du Roy, & que quelquefois il auint que quad elle le mettoit fur le feu làcré,qu’vnecédre génitale d’home fbudainfé dreffa du feu, de que cehe Creffe chabriere de la Royne Tanarquil, & fa captiue qui fehoit la affilé en partit grohe, & que Seruie Tulle,qui fucçeda à la corône, en naquit, auquelehat en enfance,couché en lafàlleroyalleonaveuardre le chef, & a Ion creu qu’il fut filz de lange familier,difant Ouide auz Fahes.
- p.024R - vue 59/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- JJ
- 33
- 3>
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- De TullefutVulcanpere au fifutla mere Crejjè corniculée, & a la belle face:
- A elle Tanaquil ayant les [actif ces Accoutumezper fait commanda de répandre Ain au foyerparé: la ou entre les cendres Fut d’vn membre Viril veue, on bienplufofi La forme fut au vray: laferue obeiffant S’afieten ce foyer, de qui Seruin conceu,
- A de fa raceprint la femence du ciel.
- Les fgnes a donné lepere. Alors qu'au chef De fa bouche eclarant il toucha & quardit Vhe hupe enflambée au haut defa perruque.
- Delâauffielt venu que Iuno de Vegic répondit qu’elle vouloit aller a Rome, & qu’on dit que la neffuyuit la main de Claudia, ôcquelunolpo-liée a fait vengeance des làcrileges. Ce que de melme fit Prolèrpine de Lares, & Ceres de Milles, & Hercules du Sanglier. Ny ne menacent point les longes autremêt Hannibal de la perte d’vn œil. Le regard auflî des entrailles prédit le péril de fa perte à Flaminin. Lelèrpent,ouplus toll le prince des diables, tyréd’Epidaoredeliura la ville de Rome de la peftilence : & à Eneas par l’indice des oracles trouua l’Italie promilè,& cerchée: en laquelle il fit là demeure,non pas tant par 1’auis des puiifances diuines que par ce-luydes diables. Que fait autre choie Anchifes es longes? A quoy tendent Iuppiter & Apollo sefforçans de couurir leurs oracles auec ambiguité, à fin qu’eltans trouuez trompeurs,& méteurs ilz puilfent quelque foisloubz couleur de railon couurir leur déception, & par ce moyen ilz ne celfent de ruiner les ruinez, & d’épadre aux deprauez l’erreur deperuerfion,& les trô-per,iulquas à ce quilz enuoyent a perdition ceux qui leur obeilfent. A qui ont elle profiitables de tout iamais les réponlès des diuins ? A ce elle à Cra-fus,ou Pirrhus, ou aLaye,ou bien a aucun précédant,ou fublèquét? Ne fut pas,comme Ion dit, Crœfus abufé d’vne telle reponlè,qui eftoit Roy de Ly die fi puilfant quâd il eut a mener la guerre contre les Perlès?Il eft vray que entrât dedasAlys il auoit ruiné de grades puiifances,mais en pelant parvne reponlê ruiner la force de lès ennemyz, il ruina lafienne: au lurplus auenât l’vn ou l’autre l’oracle le trouuoit véritable . Celle qui fut faitte àPirrus ne fut pas plus claire,lequel délibérât la guerre contre les Romains, & lè con-feillant à Delphos rapporta celle reponlè, comme dit Ennius: le dy qu'Eactdes le Romain pourra vaincre Pirrhus eftoit bien pauure delèns, s’il n’entendoit bié que l’vn ou l’autre ayant la viftoire l’oracle auoit apparence de vérité. Voylâ commet ce cau-telleux ouurier l’auoit ourdy : voylâ aulfi cômét en tout euenemétil auoit gaigné là retraitte de vérité: cela de vray lènt là tromperie li euidente, que combié,comme dit le melmeEnnius,que la race desEacides,ayc toufiours efté folle, Pirrhus touteffois l’a peu confidererfans difficulté. Celuy qui a
- deceu
- p.024V - vue 60/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE III. 25
- deceu Crcefus eftoit plusobfeur,& quieuftpeutroperChîyfippe.Dcvray Giceron la ainfi eferit, auquel touteffois le cas femble finalement cftre cô-trouué, le fulpeçonnat auoir elle feint par le poëte, & ceft autre par l’hifto-riographe amenant ces raifons i Premièrement qu’Apoilo n’aiamais parlé Latin, fubfequemmét qu’au temps de Pirrhus, on ne faifoit plus dé métrés: & penfe, comme il ditaumelme liureaflez d’autres choies,que le dernier a efté dit par moquerie. Corne que ce foittouteftois ces raifons nem efmeu-uent pas beaucoup, d’autant que la doute de l’oracle a peu eftre trallatée en Latin, Sc mife en vers,eftat premieremét en parolles Grecques,& en proie. Car fi ie regarde à la langue, toutes chofes qui ont efté dittes par oracles, & qui nous Ibnt en Latin, font defeenduës de la fourlê Grecque, & proférées en Grec par Apollo,ou bien par eux reduictz en memoyre, ny n’a la diuer-fité des lagues nuy a la vérité. Vne autre raifon dôques de Cicerô meprefle de plus grande violence, car il dit que les Gréez ne làuent rien de ceft oracle: & pourtant il eft bien croyable qu’Ennius l’a inuenté quafi comme fié. Au regard de Hérodote, que Cicerô appelle pere de l’hiftoire,ie ne le croy-ray pas fi aifement auoir controuué ce premier oracle. Il m’a femblé bon donques en vne choie fi douteulê toucher la vérité, & de n’obmettre l’auis de Cicéron . Ceft autre aulfi eft ambiguë & inopinable, que Philippe de Maccdoene print d’vn meftne temple, ceft qu’il euft a prendre garde au pe rileminentparvncar:ce qu’entendant le Roy, & fâché commanda rompre les cars par toute la Macedoene, & fi le détourna d’vne ville de Boetie - qui portoit le nom de Car,comme luy eftant fatahou bien,ainfi que aucüs dient, il la feit ralêr. Ce fut touteffois pour néant, caries menaces de l’oracle tendoyent ailleurs. On dit que le manche de l’elpèe dot Pauzanie le tua auoit vne graueure d vn chariot. Et pourtantTulle récontre de bonne gra ce: car l’auertiftement n’eft pas feulement obfeur,mais aulfi menteur,quafi que le Roy deuft mourir du manche, & non pas de la pointe. Ceft Appius Claudius qui durant la guerre ciuile fuyuit le party de Pompée,experiméta pour la feconde fois doutant quelle en ferait la fin vn Apollo eftant voifin du camp, & qui pour lors delailïe n’auoit fonné mot. Et pourtant vne certaine Perhemonoe diuinarrefte du temple,& chalfée dedans vne caruerne, & bouillant de fon acoutumée furie, tint fes propos, comme Ion dit. Ne crains point Romain les grandes menaces deceftuy cy, elles ne te feront rien: car tu poftederas en repos les coles de Negrepont. Ou bien, comme aucuns dient, lacofte Negrepontique, dilàntLucain. j> Tufuyras ô R omain des guerres les menajjes
- 33 Immenjès& feras hors dejtgrandperd
- 33 Tenant de Negrepontfeullegrand Vdlgaifible.
- Pour laquelle relponfereceuë,quafi côme en fonge,il s en retourna plus perplex qu’il n’y eftoit venu . Bié toft a près il mourut d’vne maladie au païs qu’on appelle Cole,auant la derniere bataille:par ce moyë eftat foubftraiéfc aux guerres,& mis en vn fepulchre Negrepontique, il dôna foy à l’oracle.
- p.025R - vue 61/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Par la mefme façon aufiî il fut predid à Laie par Apollo. Garde toy de faire lêmence d’enfant qu’on t’a défendu,, car celuy qui naiftra te tuera execra blement, & fera toute la làlle epanduë en làng. Apollo donques preuoyât les choies qui s’enlûiuroyët defendoit fuyuât l’oracle de faire les lêmences, fâchât qu’il eftoit en là puiftànce s’il s’en vouloir abftenir. Laie interrogoit celuy qui làuoit que c’eft qu’il auoit a faire, ce qu’il falloir corne ignorât les choies àvenir.Orlcma-ilnôpasattraiâ: par l’oracle,mais côme vaincu d’in téperance. Enlêmblable auiii côme les Argines s’enquillent par oracle s’il eftoit bon d’entreprendre contre les Perles, il leur fut relpondu: O peuple à Dieu tant aggreable reprime les puiftancesdes armes ennemies des voifins, lalêule vmbredetatefte défendra tout le péril du corps. Il fauoitde vray que c’eft qn’on deuoit elire, &: que le chois eft au pouuoir de l’hôme, mais que la fuyte du chois git en l’oraclc. Depuis ceux cy Nero Celàr auoit entendu des Mathématiques que la mutation de fon eftat luy eftoit deftinée: Lefquelz en cela concordans dilcordoyent touchant fa fortune apres eftre chafle de l’Empire. Pour lelquelles nouuelles eftat fâché il délibéra déprou uer l’oracle Delphique, car par là il luy a féblé que fô doute le deuoit tralfe-rer d’vn côlêil humain au diuin, auquel fublêquémét il fut relpôdu qu’il le dônaft garde du foixate treziefme an.Ce qu’entéduil entra en vne li grade afiêurâce côme home inconlideré, & n’ayant pas encore trente troys ans, que ia ne craignâtplus rien,il fopromettoit prolperité, & âge entier, quall côme ne pouuat mourir auat le téps prefix par Apollo. Finalemët il vint a telle infolëce,qu’eftans aucunes grades richelfes periësen la mer par la tor-méte, il affermoit qu’elles luy lêroyét rëduës, melmes àl’ayde des poiftons, tant eftoit fon orgueil grad pour telz erreurs, quad foudain il fut abadôné & forcé à vne mort fort infâme,& à la vérité dire du côlêil d’Apollo, côbié que ceft elprit tant faux, & pere de mélônges ayt pourueu de fes ambages, & artifices accouftumez que rien ne femblaft hors de raifon.Ce que Néron mefme a peu entendre à fa derniere nuytée,combien que tard,oyat le bruit des gens de guerre execrans fon nom, & louans celuy de Galbe : & appel-ler pour le comble de lôn malheur l’autheur de l’oracle, veridique. De vray fon fuccefieur Galbe auoit lors l’age de foixante treze an s.Quelque mefdi-fant nous dira que ce concilier donna bon auis a quelques vns, & qu’on le plaind d’vne part & d’autre auiourd’huy des defenlês de leurs làcrifices, & de l’abolition de leurs ceremoniesrdont melmement il auientqu’on ne fait point de relponles aux requerans, ou bien quelles font douteulês, & inexplicables. Mais pourquoy eft ce donques que long téps au parauant l’Empire de Celàr, & la natiuité de noftre làuueur Ielùs Chriftja creance de l’oracle d’ApolIo Pithius,a efté prelque du tout aboIye,&de tat aboIye,qu’eI-le eftoit dédaignée,comme leurs autheurs le tefmoignent?Mais pourquoy dédaignée, finon que comme vaine, ou faufe, ou doutenlê? Et pourtant le poëteconlêille làgement, dilànt.
- , Sans renonce s’en vontfiaïjjans la Sy bille.
- Et
- p.025V - vue 62/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE III. itf
- Et afin que par auanture ilz n eftiment celapeu,d’auoir efté contemné, aboly, & delailfé,& que ce n a efté que la diuination ou lefiege,ceft Apol-
- 10 Pithius eftoit celuy qu’on dit apres la defaitte de ce grand fërpét Python auoir efté le grand prophète, ôcautheur de toute la vaticination, prince & heritier du fiege de la diuination, & du nom, & auoir eleu ce lieu la pour y rendre relponlé, auquel la diuination lëmbloit auoir prins fâ fourceauec l’Autheur. Il eft vray que Cicero le mocque de ceux qui cerchent des eua-fions, &diféntquela vertu du fiege & du lieu eft éuanouiëpar fucceflion de temps: de forte qu’il les dit ne prendre pas garde qu’iieft queftion de la force diuine, & que fi elle eft, elle eft aufli eternelle, tellemét qu’ilz en parlent tout ainfi qu’on fait d’vn vin, ou de quelques (allures, lefquelles diminuent leur force de vieillefle, &perilfent peu a peu. Parquoy il appelle ceux qui en fontprofeftionphilofophes fuperfticieux, &prefques inlèn-fez. Lefquelz ayment mieux cercher des excufes friuoles à leurs folies, fei-gnans quelles font euanouiës, que de confefler libéralement la vérité, & de cognoiftre plus toft tard que iamais leur erreur, ayans efté longuement fédui&z en ces oracles, partie faux (à fin que i’vlé des parolles mefînes de Cicéron) partie vraysd’auanture: comme il auientfouuenteffois en toutes chofès, partie ambiguës, ôc obfcures, de forte que l’interprete a befoin d’vn diuin,& que le fort mefme fè doit referer au fort, partie par oracles douteux èc perplex:ceâxde vray trompent le plus, defquelz les populaires ne peu-uent difoerner la Vérité des illufions. Et pourtant on penlé qu’ilzliurent les Empires, vidoyres,richeftes, & les bonnes fortunes. Finalement comme
- 11 foit manifefte, qu’a leur vouloir la Republique ait fouuenteffois efté dé-liurée de perilz eminens, fi eft ce que tous les perilz qu’ilz ont annoncé par leurs refponfês, & qu’ilz ont détourné & appaife par facrifices font toutes vrayes tromperies.Car quand ilz preuoyent les difpofitions de Dieu, comme qui ont efté fès miniftres,ilz s’entremeflent aux choies,tellement qu’ilz fèmblent faire, ou auoir fait, toutes celles que Dieu fait, ou a faid. Toutes les foysaufti que quelque bien doit auenir par l’ordônâce de Dieu à quelque peuple, ville, duc, ou prince: ceux la promettent le faire par prodiges, ou fonges, ou oracles, ou bien par fort,& par ces autres telles chofes, corne nous auôs dit,fi on leur fait honneur & lâcrifice. Apres lefquelles choies li-urées,ilz le font adorer lors que cela eft auenu,qui par necelfité deuoit aue-nir.Et lors qu’il y a dâger de péril ilz le dient eftre courroucez pourquelque caulê legere & fotte:çôme a Varrô, d’autat qu’il auoit mis vn beau page au téple de Iuppiter pour le guet:pour laquelle çaulè le nô des Romais futpref que aboly auprès des Canes. Et fi Iuno brulloit pourvn autre Ganimedes, pourquoy eft ce que la ieuneftë Romaine en porte la peine? ou bié s’ilz ont tâtléulemétle regard auxDucz& Princes,pourquoy delaiftetilzlereftedu peuple?Pourquoy eft ce quele léulVarr6eftféulechappéiquiafait làfaute, & Paul tué qui n auoit rien démerité?Et pourtant foit que le péril eminent foit euitable, ilz veulent lémbler l’auoir détourné, eftans appailéz : finon
- Eij
- p.026R - vue 63/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ilz exécutent, & par ce moyen ilz te procurent vne authorité & crainte en-uers les hommes ignorans: & ont par ces cautelles 5c rutes détourné la co-gnoiffance de la Trinité, 5c d’vn vray Dieu enuers toutes nations. Par les obferuations donques fuperlticieufes de ces difeiplines, qui font conioin-étes à la cognoiffance des elloilles,il faut euiter l’aliace desmauuaiselpritz, ny ne pente qu’on doiue tenir hors de celle façon de fuperllicions ceux qui font deteenduz de la nation Chaldaique: d’au tac que d’eux eft la raifon des natiuitez, afin de pouuoir expliquer les chofespalfees 5c futures parla ratiocination des elloilIes,c’ell à dire de cercher par la raifon humaine quelz effe&z ontles douze lignes, les cinq planètes, auec le foleil, 5c la lune.Du-quel art Berote te tenant en fille 5c cité de Cohos a la premier déclaré la di-foipline: 5c depuis Antipater y ayant mis fon ellude : 5c de rechef Achina-pole, lequel n’a pasteulement lailïe les railons exphequées de la nailfance, mais aum de la conception. Et combien que ceux cy pourchalTent fçauoir iavrayepofition des elloillesàla nailfance de chacun, 5c quequelquelfois ilz la treuuent par reigles inuétées Sc eferites, ilz te trôpent toutelfois beaucoup s’efforças depredire noz aéles, meurs,& auetures, 5c font epriz d’vne trop grande folliedelquelz les inllitutions de nollre religion Chrellienne, 5c la lumière de nollre foy non feulement côfutét,mais aulli font plulîeurs tentences d’aucuns Poètes 5c Philofophes renômez, de Capitaines 5c Em-
- {)ereursexcellens, entre lefqueîz eft principalement ordonné à Moyte es ettres làin êtes. Quand tu teras entré en la terre que ton Dieu teliurera,gar-detoyde vouloir enfuyurel’abomination de ces nations la, & qu’il ne te 3> treuue entre vous homme qui tournoyé filz ou fille le menât fur le feu, ou 33 quiinterrogueles Arioles, 5c prenne garde aux longes,& augures. Ne lois 3> point maléfique ou enchanteur. Neva point aux Pythons,ny aux diuins, 33 ny ne requiers la vérité aux mortz. De vray il abominera toutes ces choies, 33 5c les abolira tous à. ton entrée, à caufc de celle maniéré d’execratiô. Tu fè-33 ras perfait, &lâns macule auec tô Seigneur 5c Dieu. Ces peuples defquelz 33 tu poffederas les terres, ecoutent les diuins 5c augures, au regard de toy tu es autrement inftitué de ton Seigneur, 5c Dieu. Qui fera donques doute, que ces chotes ne loyent non feulement capitales, mais aulli la peruerfion delà foy que lalèntence diuine defend auec fi grande diligence?D’auanta-„ ge il y a au Leuitique. Vous n’vteres point d’augures, ny ne prendrez garde „ a voz longes, ny ne vous retirerez aux Magiciens,ny n e demâdez rien aux ,, arioles, de forte que vous foyez polluz par eux. L’homme(dit il la mefme) „ ou la femme qui aura l’efprit Pythonique,oudediuination foit punyde ,, mort, quon les lapide, & que leur mort redode fur eux.Ny n’cll pas moins „ exprimé aux Romains par les parolles de l’Apollre. Quiacogneulafenté-ce de Dieu, ou bié qui luy a donné confeil ? Ce confeil aulfi ell diuin Sc ce-„ leffce. Ne cerche point plus hault que toy,ny ne recerche les chofes plus for „ tes que toy: mais pente toufiours es chotes que fa commandé Dieu, ny ne ,, foys curieux en plufienrs de tes oeuures. De vray il ne fellpas neceffaire de
- voir ^
- p.026V - vue 64/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE III. 27
- ' voir les choies qui ce font cachées. Ce n’efl pas à vous( comme il ell autre ^ par elcrit)de cognoiftre les tëps,ne les momés quigilènt en la puiffance du J, pere. Annoncez(dit Elaïe)les cholès avenir, & nous croyrons que vous ,, elles Dieux . Ce dicldel’Ecclefiallique ell de melme. L’homme ignore ce j, qui a efté auat qu’il full,qui Iuy pourra faire Icauoir ce qui ell a venir? Quel 3j le autre choie afferme ce diét de Sapience?Les penlees des hommes font ti-„ mides(dit i!) & noz prouidéces incertaines. Le corps qui eft corruptible ag „ graue lame,l’habitation aulïi celelle abaiffelelènspéfât beaucoup de cho-„ lès: ôc ellimons à grâd’difficulté les choies qui font en terre, ôc trouuons a ,, grand trauail celles qui font a nollre veuë. Au regard de celles qui font aux „ cieulx,qui les découurira? Et qui fçaura ta péféeffi tu n’en donne la fapiéce,
- „ ôc que tu n’envoyes ton fainét elprit des cieulx? Et que par ce moye font les „ voyes de ceux qui font en terre corrumpuës, ôc ont les hommes apprins les ,, choies qui leur font à plailîr Or ell il, dit Firmian, que les Philofophes qui „ dilputët de ce qui fe fait aux cieulx, ne fôt pas ainli: ce qu’ilz péfét leur ellre ,, toujours loyfible de faire, par ce qu’il ne lè treuue homme qui les arguë en „ leurs erreurs,& s’ilz pêfoyéc que quelqu’vn defcëdift de la,qui leurmôllrall „ qu’ilz font folz, Ôc meteurs iamais ilz ne dilputeroyét des choies qu’ilz ne peuuët Içauoir.Ny ne faut pas pourtat ellimer leurîpudéce ôc audace ellre de tât plus heureulè,qu’ilz ne font point repriz. Car Dieu,auquel lèulla vérité ell cogneuë, les redarguë,comblé qu’il féble ny prêdre garde, ôc ellime celle fapiéce d’homes pour vne fopreme folie . le laiffe les trai&és tât laborieux ôc fortz de làinél Augullin,&fiin&Ambroilè, ôc leur fort ample di-Iputation, lefquelles le temps ne requiert, ny ne reçoit le lieu, ny ne la requerra homme quiconque aura quelque peu proffité en leéture, comme qui font cogneuës: tant feulement dirayie vne lèntence de fainét Augu-llin,ienefoayliplus vrayequebriefueduliure qui ell intitulé de la cité ») de Dieu . Toutes ces chofes conliderées(ditil)on croit à bonne raifon « que quand les A Urologues difent auec grand miracle beaucoup de choies » vrayes,quccelâce fait par vnfecretinllinddeselpritzmalingz,defquelz 5 5 la folicitude ell de mettre en telle aux humains ces folles ôc offenliues opi-» nions des dellinées des elloilles, & d’aflèurer par vn art qui n’ell point del’Horofcopefnoté ôc regardé.L’autreelldefai&Ambroilèauliurequ’il nous aîaifféauec vne notable oraifon du trelpas de fon frere Satyre. Les fatj pro 3} Philofophes dilputent du cours du foleil, ôc delà raifon, ôc en ell qui font rautati. », d’auis de leur croyre, combien qu’ilz ignorent ce d’ont ilz parlent. Ny j> ne font montez au ciel, ilz ont mefuré l’effeau qu’ilz ne veirent iamais,car a> pas vn d’eux ne fut au cômécemét auec Dieu. Nul d’eux aulïi ne dit point »> de Dieu que lors qu’il dreffoit le ciel,i’elloye auec luy,&: ordonnoye toutes choies. Or en defcëdât des choies diurnes aux humainesil lè treuuét beaucoup de lèntéces des Poëtes excellens de melme lèns, entre lelcjuelles celle d’Homere entre autres principale ,trefmciéne ôc viue doit venir en auant. Iuppiter(dit iljepouuante a grandes menaces, non pasvn homme mortel,
- E iij
- p.027R - vue 65/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ny vnDieu dyne commune aflembléc : mais cefte fienne femme Iuno, fa' foeur, ôc Royne de Dieux, quelle n’euft à s’enquérir du focret de fbn cœur, ny à prefumer de le pouuoir auoir. Apres lequel deux autres ditz le treuuët par eforit de deux Poëces fort renommez en ce premier age,difât Pacuuius. „ Si preuoyent les chofos futures ilz font equiparez a Iuppiter. De rechef ce „ poete mefmefte fuis d’auis de plus toft ouïr,que de confontir à ceux qui en-33 tendent les langues des oyfoaux, & qui fçauent plus parlefoye d’vn autre qu’ilz ne font par le leur. Arrius dit.Ie ne croy rie aufti aux augures,qui en-richiffentles oreilles d’autruy de parolles, pour enrichir leur maifon d’or. I’aioufte Ennius pour quart à ceux cy, lequel fo moque aufli d’eux en cefte éloquence anciëne & venerable, vfant de cefte façon de parolles. Lefquelz }j pour leur proflït fofoitent des fontences faulfos. Ilz ne font de vray diuins 33 parfoience, ou art, mais fuperfticieux prophètes ôc dehontez Arioles, ou 33 bien ignorans ôc tranfportez, ou bien auquelz la pauureté domine : ôc qui 33 ignoras leur voye montrent aux autres leur chemin, requeras vne dragme 33 i ceuz aufquelz ilz promettent richeftes. Qu’ilz prennét dôques la dragme 33 de ce s richeftes la, &qu ilz rendent le demeurant. le propofo pour le cin-quieftne Horace poëte treftçauant, d’authorité, ôc grauité notable, dilânt. 33 Dieu par fâ prudence enuoyedeuat à l’obfourité de la nuiét, la fin des cho-?> fos a venir: Et fe moque fi les hommes craignentplus que de raifon. Au fur-33 plus foisrecordz degouuernerleprefontauec équité, fans t enquérir de ce 33 qui auiendra demain, ôc tiens pour gain chacun iour que la fortune liure-33 raàchacun.Ilyaencoresdumefme poëte cednftaLeuconoe.Necerche 33 point Leuconoe de fçauoir quelle fin les Dieux t’ont dôné,n’à moy :ny n ex 33 perimente les nombresBabyloniens,comme chofo beaucoup meilleure de « porter patiemment tout ce que liurera Iuppiter, foyentplufieurshy uers, ou bien le dernier. Lu cain vient pour le fixiefme entre ceulx cy. s j Soit prompt ce quentreprens & de la defiinée
- 33 Lefins de l’homme foit aucune & fiit licite
- 33 xjiu faut eux d’ejperer.
- 33 l’aflembleray auec eux Stace pour le foptiefine.il eft défendu a l’homme
- 33 de fçauoir quec eft que le iour de demain amènera. Tous lefquelz poëtes fuyt en dernier lieu Iuuenal Aquin dilânt ainfi.
- 33 Vn tendron amoureux ï^Arménien promet 33 Ou vn tefiament riche apres auoir touché
- 33 D’vn chaultpigeon les rouges: ou l’augur Compagein
- 3 y Kumine des pouüets la poche: & les entrailles
- 33 D’vn caignol^quelquefoisporter illuy fera
- 33 D’vn enfant lafrejfure au% Chaldés: mats plus grande
- 33 Lafiance fera, & tout ce partir creu
- 33 Sera du front d’^Ammon que dira îAfifologue:
- 33 Caria font de Delphosles oracles ceffi^i
- 33 Le brouillard dufutur les hommes endommage.
- Or
- p.027V - vue 66/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE III. & Or font fublèquentes à ces inftitutions de noftre religion, & aux di&z des poètes renommez lèmblables a elles, les lèntéces des philolôphes, mef-mement de Socrates : lequel a efté le plus affeété que nul autre en l’inquifi-tion des choies celeftes, & en la recerche des caulès occultes.Et comme il lè vit n’y pouuoir attaindre il mit en auât ce tant renommé propos approuué » de tout le monde. Ce qui eftlur nous ne nous eft rien. Et parcemoyen tenant en doute la dilputation de toute queftion de nature, il feft réduit à ce que toute Ion eftude giïoic en la vertu,& en Ion deuoir.il y a auflî vn ren contre de Democrite philîcien de meilleure grâce que nul autre cotre telle 3) maniéré de gens. Nul n’a l’oeil à ce qui eft à les piedz, & on contemple les jj régions du ciel. La moquerie aulïi que fait Cicéron contre ces folz dilpu-tans,cft de bon rencontre, qui tiennét toutes choies certaines comme fiilz delcendans lur l’heure du concile des dieux ilz auoyent veu de leurs yeulx, ou ouy de leurs oreilles ce qu’on fait la. Sas point de doute comme le mef jj me Cicéron dit en Ion trai&é de vieillelfe. Les heures palfent,aulfi font les jj iours,moys,& ans,ny nereuient iamais le temps palfé, ny ne le peut fauoir jj le fubfequent. Il y a aulfî des fentéces des philofophes excellens contre ces monftres d’hommes, en laquelle eft celle de Fauorin repoullànt beaucoup mieux,& plus prelfant, que nulle des autres que i’aye leu, la cognoilfance de l’auenir dilànt ainfi: Il diloit de vray qu’il ne pouuoit rien ouïr deux qui ne fuft grief & fâcheux : d’autant que la ou ilz diront choies vrayes (ce qui ne leur auient gueres louuent) & quelles foyent mauuailès, ce fera amener auant temps vne milère auec vne lolicitude làns propos : car eftant la la vérité,la neceftité fy conioint.Par ce moyen le requérant ne veult en cecy linon louffrir douleur, a fin que plus grande elle lè puilïe entrcmeller àla moindre.-Cequela commune nature des choies ne permet pas deprouuer. voyla que dit Fauorin. Voycy ce que dit Cicéron à fin que nous laiflions jj les précédés. Penlès tu auoir efté vtile à Marc CraIfe,lors qu’il floriftbit en jj opulence,& fortune grande, de fauoir, qu’apres la mort de Ion fils Publin, j> &la deffaittedefonarméeil auoitaperiraudelad’Eufratesauec ignomi-jj nie,& honte ? Penlès tu que Cn. Pompée euft peu le refiouir pour la gloyrc jj de lès trois conlulats, de lès trois triumphes,dc merueilleulès prouëftes, fil jj euftfeeu qu’il auoit aeftre tué es defertz d’Egipte, apres laperte de Ion ar-jj mèe, & qu’apres là mort il auiendroit choies que nous ne pouuôs dire làns jj plorer? Qu’euft penle Celàr,fil euft diuiné qu’il demoureroit tué en la pre-j> lènce du Sénat,qu’il auoit pour la plus grad’ part éleu, &enlacourtPom-jj peiane melme deuant le fimulacre de Pompée, à la veuë d’vn fi grâd nom-jj bredelès Centurions,&des plus nobles citoyens :auxquelz en partie il a-jj uoit fait tant de biens, tellement qu’à Ion corps n’approchoit aucun de lès j> amys,ne melme de lès e!claues?De quelle angoilfe de cœur euft il velcu? A jj la vérité l’ignorance des maulx à venir eft plus profitable que lelçauoir. Voyla qu’en dit Cicéron. Or pourray ie bienappeller en témoignage de cefte lèn tence des gen s de bien, nobles, & riches, mais il n’eft pas necelfai-
- E iiij
- p.028R - vue 67/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- re,ny ne requiert ce palPage plus long diteours: auec ce que Cicéron a touché les plus notables. Et lî, à fin que ie reuienne à l’argument de Fauorin, ilz annoncent des biens, il furuient deux incommoditez:la fafeheriede l’attente & 1 exténuation de la ioye preueuë,laquelle non preucuë fuft aue-nuë plus aggreablc & plus grande : ou bien filz mentent (qui leur eft vne choie fort commune,&frequente) & que ce foit malheur,tu feras tormen-té d’vne faulte alarme : & c’eft bon heur, d’vne faulte efperance & ioye, & d’vne trifteffelà ou tu te terniras eftre trompé. Ces menteurs donques & trompeurs font en tout euenement dignes d’eftre depritez: & fois côtrainc a ceft auis prefque par la raifon du philofophc Anaxagoras. le me tay de Diétarche, lequel a conclu en vn grand volume qu’il eftoit befoin d’ignorer toutes chotes futures. De vray comme Alexandre fuft pafle à la ville de Babylon qu’il auoitdelaififé au delà d’Euphrates, la Anaxarchus luy feic des remontrances, commefouuenteffois au parauant, qu’il ne feifi: conte des diuinations des Magiciens, comme fautes & incertaines, 6c non fans caute. Car fi les chotes qu’on prédit, dit il, o Alexandre dépendent de la deftinée,elles font incogneues aux hommes. Si elles font fobieétes a nature elles font immuables. Ce dict du philofophe Demona&eeft de mef-me,lequel dit regardant vne fois vn diuin ayant gages de la ville pour rendre refpontes. Ne voys tu pas de quelle chote tu demandes loyer? Si tu as puiffance de Iuppiter de changer quelque chote de ce qui efi: ordonné par la loy fatale,quelque refponte que tu demandes,elle efi: bien petitte.Si auffi toutes chotes font potees en la volunté de Dieu, de quoy nous peut feruir ton diuinement ? Demofthenes te confiant aux armes des Gréez, & de la force prompte & fi grande d’hommes, ne voulut point qu’on print garde aux oracles,ne qu’on écoutait les diuinemens, mettant en auat qu’Epa-minonde,& Pericle auoyent toufiours eltimé cela eltre vne couuerture de paour & de lâcheté. Ce diét aulîi d’Halicarnatee excellent en Allrologie, & prince treffuffifant au gouuernement de tes citoyens, eft fort falutaire & mémorable à toutes heures,en conteinnat toutes maniérés de diuinations
- Chaldaiques.Oreftforuenuvncertaingradhômeenrienmoindreacroy-
- re que tous les precedens,c eft ce teuere Caton,qui difoit fefmerueiller,que l’Augure ne femoquoitde l’Augure,foudain qu’il a apperceu:quieft vn diét qu’on peut adrefifer à tous Augures,fortileges, côieétureurs,Chaldécs, & Mathématiques, & finalemet à toute diuination .En confidente de vray tat de folies par lefquelles ilz trôpent les homes crédules,le rencôtre indubi tablemét deuft émouuoir la mcmoyre,& le ris d’vne mutuelle confcience. O corne fut de bonne grâce ceft autre dicte,ainfi que quelqu’vn luy requift difant : Si ce n’eftoit pas vne chote monftrueufe que fes chauffes auoyent cité rongées de fou riz. Il refpondit que cela ne 1 eftoit pas, mais que c’euft t ex ci- vn môftre fi les fouriz euffent efté rôgées des chauffes. Ce que c’enfoyt ce.Ub.2. n eft pas moindre,mais magnifique,mouelleux,&bië côfideré. Car corne cxulâti, jp Hannibal feftatfretireaPrufie defiraft la bataille,côme autheur du côbat, exuirann, & que
- p.028V - vue 68/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE III. l9
- 3)
- a»
- 3)
- >i
- SS
- & que Prufie n’y voulue entendre , d’autant que Jes entrailles le luy defen-doyent,aimes tu (dit il) mieux croyre à vne chair de veau,qu’à vn viel capi-taineîQui fut vne parolle grande, & digne d’vn fi grad prince,comme qui luy mit en auant laruïne de l’£Ipagne,de la Gaule,des Geneuois,& finalement celle de l’Italie, portant mal enuis que les entrailles d’vn fâcrifice vil-lain & ord, fuft préféré à tant de témoignages & vidloyres de guerres.
- Quelle autre choie feit Celàr lors, qu’il eftoit auerty par vn grand Augure,
- <k doefte Arulpice de ne palier armée en l’Aphrique auat la bruine.Ne l’a-il pas fait en contcmnant fon diét î Et fil ne l’euft fait, toutes les forces de lès ennemyslè fulfent alfemblé. Au contraireaulfi n’a pasefté prins Régulé, ayant eu egard aux Augures ?Mancinus aulfi garda la religion, &fut mis louzleiou.Ces choies donques,&leurIèmblabIesqu’onmeten auat pour confermer les aulpices,&celle façon d’erreurs font fi impertinetes, &fou-uen t fi friuoiles que le côlèil de M.Marcel,qui fut cinq fois Conful lèmble à plufieurs receuable. Lequel comme il fuit Capitaine general, & trelbon augur lailïa tout ceft augurage de guerre, & auoit coutume d’aller couuert dedans vne litiere, à fin qu’il ne luy donnai!: empelchement : & non làns caulè,car comme homme de bon cœur, &Iàgeil delèlperoit de pouuoir chalfer eftantdecouuert l’opinion fi vulgaire, &ia de long temps receuë & adhérant aux oz.Ie ne penlè pas toutelfois qu’on doyue totallemet con-lèntir à Marcel, ne les Augures deuoir eftre de forte répudiez,que les grandes choies ne foyent preuenues par aucüs lignes,ou augures: veu que Dieu drelfe le vol des oylèaux de forte qu’vn bec refonnât,ou vne penne volante par vne voye trouble,ou calme montre les choies futures,corne les anciens Théologiens,ôc aucuns autheurs renommez le témoignent.Melmes O ui-de es Faites:
- Quoy que pour la vï&oyre ô Cefiar tu te hafles, le ne veuïl point que marchent au combattes enfièignes Si l’aufiïce ne veut Flamin & de Perou^e Le lac tefirent tefmoings,que les dieuxpar oyféaux Plufieurs fignes émeuuent.
- De vray aulfi Cicéron en a trefbien parlé,comme des autres choies. Les fignes(dit il)des choies font montrez par eux : elquelz fi quelqu’vn fabule, il n’aura pas fait la faute par la nature des dieux, mais par la conieéture des hommes. Nyn’eft rien finalement outre les lignes des choies futures, que ces certains annonceurs de I’auenir puilfent promettre à chacun, ou bien eftre ouiz par la raifon des lignes ou des planettes: car ilz n’ont rien de certain es lèpt eftoilles, delquelles nous auons ia parlé, & qu’à raifon de leur marche nous appelions errantes (combien qu’il ne foit rien qui erre moins qu’elles)fi ce n’eft félon le commun régime àelles deu au mode f vne lèptu- tNon in-ple intelligence conioinéte par vertu eftantleurfobftance hors confiften- telll§°* te. Nous Içauons aulfi(à fin que nous touchions l’audace de ceulx cy par le menu)qu’ilz ont coutume de dire, que quiconque naiftra au ligne de
- N
- p.029R - vue 69/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- l’Aquaire foyura le meftier de pefeheur. Mais veuque la Gctulie n’a point de pefeheurs,qui fera celuy deux qui aufèra dire que nul ne naift la fouz le figne de TA quaire?Outre plus il faut bien puis qu’ilz predifent que ceux feront pour la plus part changeurs qu’ilz entendent eftre naiz foüzle figne de Libra(lefquelz touteffoisfont incogneuz aplufieursprouinces de peu-ples)qu’ilzcôfefientouquecefigneleurdeftaut,ou bien qu’il n’eft point d’efted fatal. Mais cômc les Roys des Perfes & des Lacedemoniens foyent eftablizpar la race, & quelesenfansdes Roysnaiz fouz vn mefme figne que les ferfz,fùruiuans viennent à la coronne, d’ou vient que lesferfz qui font naiz auec eux a mefmes momens d’heures, & de temps demeuret con tinuellement en feruitude ? Les hommes aufii de diuerfes régions,& diuers âge, naiz fouz diuers & variables mouuemensdes fignes periiTent d’vne mefme façon de mort, & à mefine moment de temps, filz font tuez en vn mefme aflaut de ville ou bataille, ou bien en tormentc de mer, comme il auinta la bataille des Cannes, quelz moments de naiflance donnez a vn chacun felon qu’ilz difent auront leurs loys ? Par auanture aufii viendra au contraire de leurs iugemens l’infinie gradeur auec fon infinie hautefie de-partie en foixate dix fignes,par les effigies des chofes,ou d’animaux:efquel-les les fâuans ont départi le ciel. Il eft aufii croyable que par l’infini nombre des eftoilles,il fe peuft faire qu’autre fignes font en vne pareille,ou plus grade,ou moindre puifiance: fans lefquelz l’obferuation ne peuft eftre menée à vraye perfedion & perpetuelle:& que ces hommes la ne peuuent voir ne apperceuoir l’excellence de la clarté ou de la hautefie : veu qu’aucunes des eftoilles fontveuës en .aucunes régions &cogneuës aux habitans d’elles, lefquelles mefmes ne font point veuës par toute vne autre contrée : & qui font aux aucuns totallement incogneuës: comme le Canope. Car c’eft vn figne grand luyfânt de nuid clair & bien émerueillable.Duquel fil n’eftoit autre témoignage M.Manille vient en auant pour témoin trefexcellent,en fon premier liure d’Aftronomie. Etpourtant(ditil)nous ne voyons pas en toutes terres tous fignes. Tu ne trouuerasiames la clarté du Canope iuf-ques que tu fois ala Grece par le Ponte.Parquoy comme il foit certain,que de cefte façon de diuinationsil fengendre pluftoft vne ambiguïté & con-fufion dommageable,qu’vne certaine & duifànte cognoiflance a ceux qui les requièrent,& qu’ilz n’y voyent rien àpointny n’apperçoyuent: ny n’a-uientriendecequeces refueurspromettent, commeyurongnespar leurs côiedures gliffantes & deceptiues (fi ce n’eft quelque chofe rare & fortuite.comme ilechape & auient quelque fois à ceux qui voluntaircmét men-tent)ie ne te confeille Sigifmond de t’ayder de cefte façon de iugemensfu-perfticieux d’homes: les disciplines defquelz mefines tu entes,& employés temps,fauorifànt les bons efprits. ôc te refiouïs mefmemét es fubtilites,veu que fur toutes chofes tu as toufiours eu auec toy, & as des hommes de tous âges exceîlens Mathématiques, excellens Horologers, & Aroftronomes à la coutume de tes anceftres pour diuiner les chofes avenir tant en paix
- qu’en
- p.029V - vue 70/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE III. 3o
- qu’en guerre. Me confiant donques des exemples, & authorité d’hommes figrands,lilàuans &tant renommez auec la railon ienediraypoint fans propos que l’art de diuiner,par requel quelqu’vn veult relpondre au vray à chacune demande des choies futures au lêul Dieu cogneuës eft totallemët nul. (Ce que Socrates afferme,& fubfequëment les Academiques,lefquelz aulli nous appelions Peripatetiques)ou bien qu’il eft, mais encores inco-gneu ,ouque c’cft quelque opinion, & au furplusvne vaine coniecture d’hommes deceuant autrement leur iugement.
- Fin du troilielme liure.
- LE QVATRIESME LIVRE DE
- ROBERT VALTVRIN DE l’art militaire.
- Des lo'ix. Chapitre I.
- O MM E aufli, Sigilfnod Pandulphe,ilfôit neceflàire que celuy que nous auons ordôné pour Chef 8c Capitaine aux autres,loit non lèulemet apprins es bôs ars que nous auons maintenant did,mais aufli foit iuge du droid légitimé: 8c àla coutume des anceftres dés ceremonies 8c du leruice entiers les dieux, & pour vuïder les contentions & differens d’entre les hommes, & auoir la luperintédence de la conduitte d’vne guerre iufte. Car la guerre(comme dit Cicéron en là Rep. ) efl lors iufte qu’elle eftfignifiée auec défiance: &melmement celle qu’on dreflepourlerecou-urement de prinlès,ou pour repoullèr l’ennemy. Nous dirons aufli que la charge d’vn droid légitimé efl de cômander les choies, qui appartiennent à vn homme de cœur,comme de n’abandonner là place durant la bataille, de ne fuir point,ny n’abandonner les armes : 8c les choies qui concerner la modeftie, comme de ne commettre adultéré ne faire melchaceté, 8c celles qui concernent la gratieulêté,comme de ne poullêr ne eftre querelleux: 8c ainfi des autres vertuz 8c vices en défendant ceux cy, & commandant les autres.il efl aufli outre ces choies aucuns deuoirs de guerre,comme de garder la lolénité pour entrer en combat, les decretz publiez, les accordz parlez,la reuerence du ferment,la punition des gens de guerre,la dignité & les degrez des recompenlês, 8c honneurs.il en efl aucuns lelquelz il fault aufli bien loufifir que les faire : comme de brufler les bledz,abbatre les maifons, faire prinlès d’hommes & beftail,& autres telles cholês,dont il y a particulièrement des loix eftablies.Pourl’eftabliflemét defquelles aucuns penlènt
- p.030R - vue 71/480
-
-
-
- fEx Dio-doro Soo fis, pro Sefbofis.
- ROBERT VALTVRIN
- Zeleuce auoir efté le premier,les autres Rhadamente ou Lycurgus,aucuns Ceres,laquelle a inuenré le froment,la ou au parauant on viuoit de gland, auflia-elle à Athènes la façon de le mouldre,& en fairepain,lcs autres difec en Sicile, & a celle caule iugéeDéelfe, comme CarcineleTragedian le témoigne en fa poëlîe.Les autres ailement en ont donné la gloyre,côme cho lè approchant plus la vérité à,Moylê,ce grand Chef de la nation Iudai'que, ôc grand philolôphe . Au regard de Lycurgus,de Zeleuce, & de tous ceux qui lont en grade amiration enuers les Gréez ilz font recens, & nouueaux comparez à Moylê : d’autant que le nom melme de loy n’eft point cogneu auoir efté anciennemét entre les Gréez, d ont Homere eft temoing,lequel n a iamais vie de nom de loy en lëseuures diuines.Car le peuple n’eftoit pas gouuernépar loix, mais par lêntences, & commandemens indeliniz des Roys, tellement qu’ilz ont long temps velcu vfans lêulemét de coutumes, & non point de loix elcriptes,permettans beaucoup de choies lêlon les cas auenans.Phoronéc aulïi lêcond Roy des Argincs,duquel on penlê que (fo ru)le lieu des pletz,& la maniéré de playder caulês forenlês, font deduidz, fut le premier entre les Gréez, qui lîx cents ans prelque auant la guerre de Troye a fait que les Argines lèroyent regiz par loy, & iugemens certains,li nous tenons pour fables & méteries les choies que Critias au Timée de Pla ton recite de Solon touchant les loix Attiques, alfez de milliers dans au parauant Phoronée. Ny ne luis ignorant qu’Ilisa efté appellée porteloy parles anciens Gréez,première inuentricedes loix. Au regard des Egi-ptiens, JeRoyMinosou bien Trimegifteleura liuré les premiers témoignages des loix elcrites : lequel par auanture quelqu’vn tiendra du nombre des philolbphes,combien que tenu pour Dieu, il eft honoré par les Egiptiens lôuz le nom de Mercure. Salbchis homme d’excellente prudence eft dir entre les Egiptiens lêcond bailleur de loix,lequel on dit auoir aioufté beaucoup de choies aux precedentes concernans l’honneur &re-ueréce des dieux. On dit le Roy f Soolïs auoir efté le tiers,lequel par les in- ftitutions a fait des gras biens pour l’art de la guerre. On tient le Roy Buc-choris auoir en quart lieu baillé des loix, comme expert en la làpience ôc expérience des choies, baillant les loix de la vie des Roys, & eftabliftant les foyrcs & iugemens des hommes : apres lequel le Roy Amalîn a beaucoup aioufté, lequel on dit auoir ordonné des choies qui touchent les Monar-ches,&toutle gouuernement des Egiptiens. Minos a obtenu lamer,& quelque peuauant la prinlê de Troye il bailla loixaux Candoys, comme le recite Paradie,ce que Platon a conuaincu eftre faulx. Au regard des loix des Spartains, dietz Lacédémoniens, Lycurge les leur a premier (comme Ion ditjforgé par l’authorité d’Appollo.Et(combien que félon l’auis d’autres) il n’en ayt ordonné aucunes par elcrit, i’en reciteray touteffois l’vne de celles qui lontappelléesRhetresfailânt defenlês de ne combattre l’en-nemy, à celle fin que d’vne frequente coutume de combat ilz ne fe filfent gens de guerre. A celle caufe on a depuis blaliné le Roy Ageftlae,comme
- qui
- p.030V - vue 72/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE 1111. 31
- qui par continuelles & frequentes courlès& batailles fur Eeocie apprint auxThebainsà refifteraux Lacédémoniens. Et pourtant comme Antal-cide le regardai! blefle, tu rapportes, dit il,desThebainsvne trefibonne recompenlè de ta dodrine,les dreftant à la guerre maugré eux, & leur ignorance . Au demeurant on a appelle celle maniéré d’ordonnances Rhetres, quafi comme ordonnées de Dieu, ôc comme certains oracles de luy. Ariba Roy des Epirotes, ôc extraid de la race de Pyrrhus,fils d’Achil-les leur drefla premièrement les loix, le Sénat, lesMagiftratzannuelz, &: la forme d’vne vie policée : & aux Arianées, Chatharade ; Zamolxis aux Gètes: Pittace aux Metelins : lequel a elcriten fix centzvers Elegiaques a lès citoyens des loix prinlès ça & la. Il a efté vn autre Pittace bailleur de loix, duquel Fauorin &Demetrie ont parlé. Au regard des Athéniens, delquelz on penlè que les droidz ôc loix font ifluës ôc diftribuées partout le mon de, Draco homme fort lèuere les leur a baillé : lefquelles Solon plus doulx que luy,& i*vndeslèptlàges, ôc drefteur de loix,a fait diligence d’abolir pour la trop grande rudefte& grandeur de peines: car à toutes choies prefques la feule peine eftoit la mort, tellement que ceux qui eftoyent condamnez pour l’oyliueté eftoyent punizde mort: aufti eftoit le fupplicedeceuxqui auoyent dérobé deschouz ou desfruidz ordonné tout tel qu’aux larrons des finances publiques, ou homicides. Par-quoy ce di6l deDemaseft trouué bon entre les lâuans, dilànt que Draco auoit elcrit lès loix de lâng, ôc non pas d’ancre . Entre les loix que Solon a faid en bon nombre , & toutes eftabliës de grande prudence, il a faid celles notables par lefquelles il a corrigé d’vne bonne modeftic les loyers des luyteurs : ôc ordonna à celuy qui vaincroit a l’Olympie cinquante eleuz, ôc dix à celuy qui vaincroit à 1’ifthme: ôc par mefine railbn que ceux qui auroyent efté tuez au combatz ôc batailles fuftent honorez de recompenlès, &: leurs enfans nourriz au delpensde la cité, dont eftant chacun enhardy combattoit vaillamment es batailles. Ainfi fit Po-lizée, Cyneagire,Callimache,& tous ceux qui combattirent à la prinfè de Marathon : ainfi aufti le feit Armodie, Ariftogiton,MyIciade,&autres innumerables. Alexis le comique dit que les Athéniens font bien louables en ce que combien que toutes les loix des Gréez contraignent les enfans d’alimenter leurs peres ôc meres, ilz les forcent lèulement-de nourrir ceux qui leur ont apprinsmeftier.il a efté aufti quelque fois vne loy en Macedoene, par laquelle celuy eftoit accoljé d’vn licol qui n auoit tué aucun ennemy .Entreles Sythes aufti foudain que quelqu’vn auoit ab-batu vn homme, il beuuoit du lâng : ny n’ont autrement coutume d’eftre ?articipansdu butin, qu’ilz n’euftent rapporté au Roy les telles de tous : es mortz : lefquelles quelque fois (qui eft choie eftrange)ilz vuïdoyenc &lesdoroyent,les portanspour y boyre. Il n’eftoit aufti licitc-à aucun d’eux envn banquet folennel de prendre latafte qu’on portoittout autour, linon à celuy qui euft tué quelqu’vn de la troupe desennemys.La
- F
- p.031R - vue 73/480
-
-
-
- pitinum, pro La-metieum.
- ROBERT VALTVRIN
- coutume aufiî des Gauloys eftoit de contraindre la ieunefle d’aller en armes à la guerre louz vue loy commune, que celuy qui arriuoit le dernier eftoit tué en la prelcnce de toute la troupe épanduë tout autour a-uec toute maniéré de torment. Et à celle fin que nous ramenions no-flre propos des eftrangers aux noftres, qui eftceluy qui ne fait bien qu’vn certain Itale Roy de l’Enotrie(duquel par vn changement de nom ilz ont efté appeliez Italiens pour Enotries) n’ait donné loix aux Italiens, & que celle contrée la maritime de l’Europe , qui ell entre les Golphcs Sylla-+Ex Sera tique ôç f Napitine premièrement print le nom d’Italie ? Les lâuans don-bone,Ne- qUes qUe cef]- jtale auoit enfeigné les Enotriens l’agriculture, veu qu’au parauant ilzeftoyent pafteurs vagans ôc rodans pais :Ôc fut le premier qui leur inftitua les collations, ôc ordonna des loix lefquelles aucuns dient n’auoir efté drefifées par Itale mais par Saturne aux Italiens, 6c par Quirin aux Romains. Car comme on vefquift rurallement en Italie d’vne façon ruftique ce Saturne drefla cefte maniéré de peuple indocile , ôc epars es hautes montaignes, en leur donnant loix : ôc aima mieux qu’ilz fuflënt appeliez Latins , d’autant qu’il fe cacha en lèureté en ce païslâ. Au regard de Romule, comme apres la mort de Ion frere il iouift iêul de l’Empire, il bailla ordonnances au peuple :ny napenféeftre rien qui peuft faire aflembler la multitude en vn corps, que les loix. Parquoy il départit en trente parties le peuple Romain, qui pour lors eftoit aflem-blé d’vn nouuel amas de pafteurs &gens ramaflez : aulquelz encores furent aiouliées cinq , lefquelles il voulut eftre appellécs Curies , attendu qu’ilz auoyent les charges publiques, lors qu’il le failbit quelque choie en chacune des parties : tellement que chacun failbit en là Curie feslâ-crifices, & oblèruoit les fériés. Et dit on qu a chacune defdides Curies furent impolèz les noms des vierges Curies , que iadis les Romains a-uoyent rauy des Sabins. Au regard de ceux qui auroyent le gouuerne-ment du peuple, il éleut d’entre les plus nobles races cents vieilz hommes :lelquelz il appella Sénateurs a caufe de I’age, & Peres pour la rcue-rence ôc fimilitude de leur foucy : ôc ont efté leurs enfans appeliez. Pa-trices.il a par apres inftitué trois Centuries de cheualiers, lefquelles il tmeumo a appellé Ramnes, ôcacaulêdeTacinTitieulès, & def LucumonLuce-fodcom, res>combienque ce lùrnom(comme ditTite Liue)foit incertain .-outre munionc. plus trois cents cheuaux armez, qui fappelloyent cheuaux légers pour la garde de fon corps tant en paix qu'en guerr^ , appellant leur Chef Tribun : tout le demourant le fuyuoit a pied en guerre: lefquelz tous il appelloit gens de guerre . Il eft vray qu’alors tous ceutf qui eftoyent en l’armée tant decheual que de pied,eft’oyentcommunémenttousen-lèmble appeliez Milites (gens de guerre) pour la commune fréquentation de la guerre, &non pas comme depuis & auiourd’huyeeux feulement qui font parez d’efperons dorez, ôc de ceinture d’or. Auquel fuccedant Numa Pompille fils de Pomponie, & appellé des Cures ( bourgade des
- Sabins)
- p.031V - vue 74/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IIII. 3*
- Sabins) pourregner,àparfaincteté rendu plus gratieux le peuple Romain eftant fort rude : leur apprenant de garder la foyen paix &en guerre par meintes folennitez par luy inftituées. De vray il a dreffé vn temple a Vefta,
- & a édifié des portes a Ianusle iumeau: & a créé des Augurs, trois flami-nes, le Iouial, Marcial, & le Quirinal auec les Salies prelatz de Mars, suffi a-il le grand Pontife. Il a fait plufieurs loix,auffi a-il des ceremonies, & retierence de tous les dieux immortelz: pour laquelle fi grande iuftice & religion ame ne luy a ofe mouuoir guerre. ANumaPompil-le fucceda Tulle Hoftilleplus courageux que Romule: lequel a réduit le peuple aux guerres, & aux armes ia accoutumé au repos & aux loix.il a auffi compofé toute la difcipline militaire, & l’art de la guerre. Et apres auoir vaincu lesEtrufquesil ordonna le premier que lefiege CurruLefuft à Rome auec les exécuteurs de iuftice: auffi fit il le manteau de pourpre, &celuyqui en eft bordé, qui eftoit le parement des Magiftratz Etruf-ques. Auquel fucceda AnceMarcie petit fils de Numa Pompille par là fille, & gardant fort bien la religion de fés predeceffeurs. Ceftuycy in~ ftitua des ceremonies parvne certaine loy,à fin que les guerres femblaf-fént eftre prinfés auec quelque moyen , & eftre lignifiées fàinctemcnr, defquelz le férial, & le Pere Patré vféroyent quand ilz fêroyent députez a telles choies, c’eft a dire à repeter les chofés rauiës, lors qu’ilz feroyent leursdefiances.TarquinPrifquerégna apresAnce,lequel printdesTuf-cains tous les apparatz & honneurs , d ont la dignité de l’Empire eft honorée . De la de vray eft venu le chariot d’or & triumphal auec les quatre chenaux, le fàye de pourpre, les verges, la rôbbe Currule, les bardes , les anneaux, les cottes d’armes, & ont efté en plufieurs batailles douze peuples de l’Etrurie vaincuz par luy. Depuis luy SeruieTulle amini-ftratref-bien l’Empire, combien qu’il commençait àregner quafi comme par fbuffrance, & diuifa la ville en quatre par les régions, & colines qui eftoyent habitées, & appella comme iepenfé ces parties la Tribus, a caufe du tribut. Ce fut il qui ordonna les compagnies, & Centuries des ges de cheual & de pied : au temps duquel comme Fabin le peintre témoigné fut faiéte montre des citoyens de Rome, iulques à quatre vingt mille honnes,quipouuoyent porter armes : ôc fut par luy ordonné le tribut .Or diuifà-il la cité no pas félon les régions,mais félon la taille,faifànt vn corps de ceux qui auoyent vaillant plus de mille efcuz corone : vn autre de ceux qui pour le moins en auoyent fept cents cinquante, f Le tiers de ceux qui +Vertie* iulques à cinq cents, & ainfi rabaiffant iulques a deux cens cinquante, T«o lî-& qui iulques à cent dix : ceux qui auoyent moins eftoyent delaifléz m°* comme pauures & foibles. Or ordonna-il les charges neceffairestant en paix qu’en guerre félon les biens . Mais pour autant que les patrimoines fé diminuent & augmentent dedans cinq ans,il voulut qu’on fift l’eftimation des biens au bout de cinq ans, lequel efpace de temps
- F ij
- i
- p.032R - vue 75/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- les anciens appelèrent Luftre. Tarquin auquel pour fà façon de viure fut baillé le nom de Superbe,fut le dernier de tous, home inique,cruel,preux, & vaillant en guerre, comme qui rafoit villes, & les redigeoit à fon obeif-fonce par rués infâmes. Mais cinquante fèpt ans apres l’abolition de la co-ronne,& trois cents & plus depuis l’édification deRome on créa dix hommes pour eftablir les loix:qui fut vn nouueauMagiftrat,& de grande puif-fance, par lelquelz furent premieremét dreftees les dix tables, & côfermées par les alfemblées des Centuries, & quant & quant aiouftées deux, à celle fin quetoutèdroiddesQuiritescomprinsen ces douze tabès, fuft mené à perfedion.Par ce moyen ilz publièrent fês loix decemuiralles denom mées des dix hommes, defquelz le nom eft des douze tables, en arein, ou yuoyre. Et les a eu le peuple Romain en fi grande recommendation (comme l’on ditjque tant que l’honneur & l’innocéce de la pudicité eft démoulé entier il en a efté contant. Mais apres que l’iniquité a prins pied, les interprétations des figes ont efté receuës par coutume, lefquelles on a voulu nppeller droid ciuil,& non pas loix. Duquel droid font defcenduës les a-dions,qui font le droid de conuenir,inftituées folennellement,aux quelles le college des Pontifes prefidoit,tout ainfi qu al’interpretation.A quoy eft aioind l’auis du peuple, les decretz du Sénat, les lentences de la commune,les edidz des Prêteurs : & apres que finalement la puiflance du peuple a efté tranlferée euxprinces,le vouloir du prince a commencé auoir vigueur de loy.Par cefte progreftion de loix,plufieurs notables Confulz Romains, Tribuns, ou Cenfèursont efté autheurs d’eftablirloix, dont elles ont prins domination,comme Confulaires,Tribunicies,Iulies,Cornelies. De vray Papius, & Pompée Confulz fouzOdauian Cefarfirent des loix qui font furnommées de leur nom Papies, & Pôpeies : fouz le mefme Empereur aufti Falcidin a ordoné vne loy, du nom duquel eft la loy Falcidie: autant en a fait Aquille,qu’on appelle loy Aquilée, ainfi eft il de la Iuhe,& Cornelie. Aufti eft ce la reigle Catoniane inférée par les Catons entre les loix,defquelz le nom eft tat cogneu,& tant renommé qu’ilz n’ont pas feulement rendu honorable la cité,mais aufti tout le monde en leur temps de leur prefence,& depuis par leur memoyre & renom.Et a fin que ie me taifé de Prifque,& Cenforin,ce dernier did Vticenfe a efté tenu en fi grade reue rence,que corne Cefor le tiraft de fon fiege à la prifon,tous les bôs citoyens auec le Sénat le fuyuoyent en filence fâchez d’vne grande triftefte : & qu’es folénitez & leuz Floraux(auquelz les putains publiques nues à la façon des anciennes ioucufés de farfés faifoyent leur office, & eftoyent retenues en la prefénce du peuple, iuftpes au contentement des yeulx impudiques, auec infâmes mouuemens) le peuple Romain auoit honte d’aller au ieu d’vne lafciueté accoutumée,d’autât que par fortune Caton eftoit pour lors venu au theatre.D’.ont Marcial dit au commancement de fés Epigrammes. jj Pourquoy comme cogneufies ô Caton le feuere
- jj Delà Floreglaifante vne tantgraûeuje,
- Solennité
- p.032V - vue 76/480
-
-
-
- 33
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IIII.
- Solennité & ieu% fefle%, & la licence
- Du peuple es tu venu au tbeatreïjeroit ce
- Vourefiant affluéfoudain te retirer*
- Nous liions que comme au tabourdementdu peuple il eufl entendu de fbn amy ôc familier Fauonin aflis auprès de luy que fa jïrefènee donnoit empefehement au fpe&acle acoutumé, il partit foudain du theatre, ramenant à fon partemét fur l’echarfault celle ancienne façon de iouer,en quoy le peuple confeffoit deuoirplus d’honneur & maieflé a luy fèul qua foy-rhefme en fà totallité. Au regard de l’ordre des cheualiers , & de ceux qui ont laiffé leurs diélzpar eferit à la pofterité, il efl certain qu’il en a eflé beaucoup de IurifconfûItes,& de grand renom: les eferitures defquelz Au-fideNamufâa comprinscn quarante Iiures.Entre lefquelz font Aufide & Nerua tous deux fort do£tes,& de l’ordre des cheualiers. Aufli a eflé Fu-rius Sabinius, & a premier eferit publiquement. le laiffe Tiberius Corun-can,Labeo, Trebace,& Alphée, ie laiffe aufli aflèz d’autres innumerables, par lefquelz quafi comme efloilles les loix refplendiffent:par le confèil defquelz aufli plufieurs des princes ont conduit leur Empire a vne mer-ueilleufè félicité.DevrayAdrian fefl aydédeIuilleCelle,Saluin, Iulian. Prifque, & Merace: Antonine Pie de Vindie, Vere,Saluin, Valens,VoIuxe, Martiane, Vlpie,Marcel, & Iabolene-.M.Antoynelephilofophede Seuo-lafbuuerain iurifperite. Alexandre Seuere de Fabin, Sabin, Iulle Paule, & d’Vlpian: lequel il efl certain auoir tenu en fi grand eflime au pris des autres, que Helie Lampride a laiffe par eferit que ce prince la a eflé grand Empereur, d’autant qu’il a gouuerné la République, principallement par le confèil d’Vlpian . Te confiant donques ô bon prince Sigifmond de l’eflude & meurs de ceux cy, tu as toufiours de mon temps baillé, comme vn perfaiél pafleur de peuples la fuperintendence de ton royaume, le gou-uernement,la cure, & régime à hommes qui ne font point cautelleux, ne fèdicieux, ne adonnez à mal, ne ennemys de vertu, ne abandonnez à leur plaifir,ne truelz, ne mefehans, ne miniflres de lachetez, non iniques, ne pilleurs de prouinces,mais vieilz, fâges, fobres,fèuercs, craignans Dieu, hommes fàindz,&qui euffent toufiours en leur cœur cefl ancien commandement, Enfuys Dieu: qui ne védroyent rien,&fans menfbnge feinte,ne déception de ta bonne eflimation, ne de tes mandemens à la façon des rapporteurs de Perfê,recitans bien fouuent aux peuples autrement que n’a repôdu le Prince,ny n’enfuïuoyent la façon de faire des Roys Paothes, lefcpielzame ne peut fâluërfansprefènt.Et à celle fin que les derniers ne foyent mis en oubly,ce ne fera pas chofe impertinente de reciter les noms, ôc dignitez d’aucuns de ceux que tu as ordonné en ton confèil. A bonne raifon donques Iuflusauanttous,denoflremagiflrat le principal & premier honneur,de la race Iaplus ancienne,& noble des Contes de lacitédê Rome, d’vne telle fàindeté de vie& perfeélion, & d’vne religion telle aucc vne fi grande cognoiffance du droiélciuil, & canon, & finalement
- F iij
- p.033R - vue 77/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- doué d’vne fi fopreme abondace & doulceur d éloquence tant maternelle que Latine,qu’on peut abonne raifon, & atrefebon droideftimer que par luy elle nous a efté tranftnife du ciel. Entre ceux cy feft apparu quafî côme l’aurore laques Aneftaxe de Burges excellent,non feuleméc en droid ciuil, & canon,mais encores tref-expert en tous bôs,& excelles artz, & merueil-leufement propre à mener grands affaires:côme qui decouure tref-bien les fantafies cautelleufes des ducz, & princes, & duquel ie loue l’elprit & la-uoir,de forte que ie ne paragonne perfonne auec là louenge:& le côtemple de forte,qu’il femble promettre beaucoup pour l’auenir, veu qu’à quelque chofo qu’il mette fonelprit,ilypaflefoudain, & ailement tous autres delà viuacité& promptitude. Deindus eft foruenu de l’ordre des cheualiers, defcendu des plus grandz de Perofe, homme de grand, & excellent efprit, de grande Iedure,& làuoir : & par ce moyen il eft homme cogneu en toute habilité de confeil, & en gloyre de toute vertu, & éloquence, tellement que non feulement noftre ville,mais aulft celle de Rome(fi cefte ancienne gloyre des anceftres eft en cores en régné) fen peut à bon droid glorifier. François Vifeomte de la race tant noble des Vifeomtes feft offert en quart lieu,& qui eft de l’ordre des cheualiers, homme de peu d’accès, & de grande confideration,& qui au demourant eft fort duït au maniment des affaires^ renommé pour là grande expérience. lien eft aufti plufieurs de l’ordre des cheualiers, & d’ancienne nobleffe, làuans, philofophes, & grandz orateurs: par lefquelz on peut aifemét auoir pour la conferuation bien fortunée de ton royaume bon confeil,harangues dodes,& propoz feuans.
- De lamedecine. Chapitre IJ.
- Ous ne Iairronspasauflî en arriéré lamedecine, combien que noz anceftres fort affedez à toutes vertuz, ont par auanture femble l’auoir moins loué,qu’il n’eftoit raifonnable. Il en faut auoir de vray la cognoiffance, en ramenant à ce temps la raifon des anciens, comme le dient les treffauans autheurs, non feulement pour les remedes des maladies & playes, d’ont côme que ce fbit les corps foyent affoibIiz,mais aufti pour affoirvncampen lieu fein,làou quelque fois il y faudra longuement camper. Les hommes fans point de doute du temps pafle regardoyent les foyes des beftes qu’ilz facrifioyent paillantes es lieuxefquelz ilz deliberoyent faire villes, fortz, ou affoir camp : Sc filz lestrouuoyent entiers, & leur nature folide, ilz ordonnoyent là leur fort, ayans égard à la pafture, & à l’eau : & fi la nature eftoit corrompue ilz delogeoyent eftimansque lemefme pourroitauenir aux hommes pat la peftilence du lieu, & des viures : tellement qu’ilz changeoyent de païs, cerchans a tous lieu fain . Et fi à caufe de la différence des régions, 8c diuerfes proprietez de la terre, ilz ne le pouuoyent decouurir, ilz y perue-
- noyent
- p.033V - vue 78/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE 111î. 34
- noycnt aifoment par la renommée & dilpofition des corps des habi-tans, & deleurtsincfc. Il faut aulfi auec grande indullrie, Scfuyuant Tin-ftirution des anciens cercher,& choifirles fonteines, & fi ne fen treu-ue point, & qu’il faille longuement tenir camp, on pourra par ces lignes, indices, & moyens conieélurer ou elles font. Premiererrient l’abondance d’herbes verdoyantes, vne belle hauteur d’arbres dénotant leseaues ellre prochaines:jcar l’abondance d’aucuns germes i’efiouift es terres efquelles vne humeur gratieufè n’ell pas fort au delfouz, comme le ionc, la ca- paueis vc ne,la ronce, le faulx,l’aune, & la grenoille s’arreftant longuement en author vo quelqueplace fur fon ventre. Or en font telz les indices. Qu’on fouille vne place non moindre de cinq piedz en tous fonsenuiron le foleil cou- verbis & chant, en affeyant dedans celle folle vn vailfeau cru de craye, ou vn bafi merito Vi fin de cuyure,oude plomb oingt d’huyle la gueule en bas :ou bien vne lampe ardantebié accoullrée, & pleine d’huyle :& qu’on couurela bou- ' che de la folle de ioncz ou feuillards auec terre au delfus, & qu’au iour en-lùyuant on Tourne: fi on rrouue le vailfeau fuant,n’ellant aulfi la lampe tarie, &ayat quelque relie d’huyle &demeche:&que melmes ellefoittrou-uée humide : ou que la layne mile en celle folfe rende l’eau,elles promettét indubitablement eau. On dit d’auantage, & qui effc vne choie plus certaine, àceux qui de loing regardent Ieuer le foleil, en ce qu’aucuns fpeculent , d’vn lieu haut vne fumée menue d’vne exhalation nebuleufo, qui fait foy que de quant grande hauteur elle fora eleuée en hault, d’autant dans terre fora Thu meur abailfée. A la Ieuée du foleil, ceux regardent le pais, qui font curieux de telles chofos, & la ou ilz verrôt fur terre voleter vn amas de mo.u ches,ilz promettet alors facilement pouuoir ellre trouué ce qu’on cerche.
- Il cil aulfi vn autre peculier iugement tant feulement cogneu aux lâuans, lequel ilz fuyuent durant les grandes chaleurs, & plus ardentes heures du iour par la qualité de la reuerberation quirelplendit de quelque lieu que ce font: car ellant la terre foiche,elle ell plus humide, & d’vne elperance certaine. Mais il faut que la veuë y foit fi entendue quelle s’en deulîe, & pourtant cefluy la deffaillant, on recourt aux autres indices. Ilz predifont aufli lafoueurdeseaux, de forte qu’on ne doyuecercher vne eau alpre auec vn trauail dommageable, ne delaiffer la douce & necelfaire endefollime. La terre argilleufo promet les eauz douces,& le fablon les limôneufos,& fubti-les: Le grauier promet veines incertaines, & touteffois de bonne faueur, ôc en excellence les pierres rouges. Marcel a entre les Latins baillé celle feien-ce auec grande diligence a ceux qui les pourfuyuent. De vrayil dit que les eauz qui ont leur fource à l’orient, ou au midy, font doulces,claires, & laines à caufo de leur legereté : & qu’au regard de celles qui tendent au Septe-trion ou occident, elles font tenues pour trop froides : mais aulfi font elles incommodes a caufo de la douceur de leur pelànteur .Tout ainfidonques qu’apres ellretrouuées, les bonnes, & vtilesfont d’vnegrande diligence defirables pour la conforuation de la vie humaine, aulfi ne doit on pas de
- F iiij
- p.034R - vue 79/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- moindre folicitude fuir leurs vices. On blalme premieremét celles îefcjuel-les de quelque part que ce foit cropiflent, & fôt pelantes,& amaires,& qui-conques ont quelque odeur, ou làueur,excepté vne eau d’vne feule fontei-11e en tout le monde, comme ie trouue qui eft plailânte, ôc odorante. Les eauz coulantes, & courantes en la Mefopotamie font eftimées les meilleures, car ilz difènt que par leur cours, & mouuement elles s’afliibtilient, & font profitables. Et pourtant m’elmerueille ie de ce qu’aucuns eftiment tant l’eau de alternes, veu que de leur durté elles foyent inutiles au ventre, & à la gorge. Et s’ilz mettent en auant que l’eau des pluyes eft la plus legere d’autant quelle a peu monter iulques au ciel, & pendre en l’air, & qu a celle caulè les neges font préférées aux pluyës. ilz difét de vray qu’elles font plus legeres qu’elles, & la glace encores plus que l’eau,la boyflbn delquelles neges & glace ilz dilenteftre peftilentiale, & mal laine Onreprouueauffiles eauz qui font boue & limon, comme qui rendent les corps debiles , mau-uais teinél, les greues vitieulês, & les yeux ploras. Elles fontaufi blalmées, lï elpanduës elles colorent vu vailfeau de cuyure de Corinthe, ou de quelque autre fin cuyure, ou fi les Legumes y cuilênt à peine,& que cuitz ilz fats* lente cent grolfes croftes au pot. f Aufli ne doit mois eftre l’eau approuuée de la uHhb™" ^on£eine ^ e^e efi c^ire, & lêmblable au ciel, & fi la moufle ou le ionc ne cap. j. croift la ou elle a fon cours ou quelle coule : & que le lieu ne foit infeét de quelque ordure. Il y a aufli grand egard fi elle pafle par contrées pleines de foulphre, de nitre,ou de bitume : car elle prend vn matiuais efprit, & vne chaleur peftifere,ou bien trop grande froidure par le vice du lieu a caufo de la diuerfité de fon gouft, tellement qu’elle corrompt d’vne grande foudai-neté,par ce que beuë elle endurcift foudain,tout ainfi que le plaftre fo relêr-re auec l’humidité, & qu’il lie les entrailles.Dôt s’en enfuit ce diét d’Ouide. Les entrailles en pierre V» Ciconïn ruijfeau Tourne, beu: marbre aufi rend ce que atteint!fon eau.
- Ii eft auffi medecinal,& de là nature limonneux de forte qu’il congluti-ne les corps,tout ainfi que lapoudre de la Pouille deuient pierre fi elle touche à l’eau : fi au contraire cefte eau attouche quelque choie folide, elle y adhéré & s’y attache. Voylâ pourquoy les choies iettées en ce lieu la le retirent tournées en pierre.Ces lacz ont la mefme force que le vin fi quelqu’vn en boit comme dit le mefme poëte.
- Il enrage,ou bien fufrevn fort profond fommeil.
- Car tout ainfi que l’yurongncrie eft vn tranlport d’entendemét iulques à ce quelle foit deflechée, & que par vn grand poys elle s’aggraue de fommeil, aufli a la force de cefte eau quelque venî agu de l’air qui émeut le cer-ueau àfurië, ou bien haflomme de fommeil. Il auient aufli que plufieurs mourent non feulement devenins compolèz d’induftrie,mais que d’auan-tage aucunes eauz gardent en elles vnepeftepar vn cours acoutumé d’vn ordre naturel. On parle de vtay d’vne fonteine d’Armenie, le poyflon de laquelle mangé, tue. Celle qu’en Archadie auprès de Nacriue les habitans
- appellent
- »
- 33
- p.034V - vue 80/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE III. 35
- appellent Stix eft mortifère, & cjui trompe les étrangers ? car elle n eft pas cognoiflable à la couleur ny à l’odeur, nefufpe&een fon gouft, cômefont lespoifonsdesgrandzouuriers, qu’on ne peut decouurir queparla mort.
- Il eft certain aufti qu’en la mefme région a vne fonteine,comme l’enléigne lepigrammefculpé en pierre, qui n’eft pas propre pour lauer, & quieften- fLegoex nemyeauxf vignes, d’autant que la Melampe auoit purgé larage des filles ^-^s10 deProetus, & qu’il auoit remis en leur première làntéles entendemens de vfibus. * ces pucelles. Il y a aufti la fonteine du Line, qui ne feuftre point Eure des auortemens:& au côtraire vne riuiere eft en Pyrrhée,qu’on appelle Aphro-dilée qui fait fterilite.il eft aufïî vne eau en Theftahe au près dé Tempe,que toute befte, & ouailles fuyent: elle fort par fer &parcuyure, ayant vertu d’amollir les choies dures,ny ne nourrit aucun boucage,& fi tue lesherbes.
- En Macedoene alfez presdu lêpulchre d’Euripides,deux ruiffeaux courans àdextre & àlèneftre du monument s’aftemblent la ou les paftans ont de +Ex v,“ coutume def predre leur repas à caulê de la bote de l’eau: au regard de bau- ^ *
- trequieft d’autre cofté, perfonne n’y va,parce qu’on dit que fon eau eft fitare pro mortifère: l’Achaïe a des humeurs excellemment froides diftillantes d’vnetanEre* roche,leIqueIles vn vailfeau d’argent ne de cuyure,ne de fer,ne d’autre matière ne peut fouftenir fins eftre minez: car elle treffault, & lé dilfiperau dc-mourant elle ne peut eftre conlèruée, & contenue qu’en foie d’Afoe, ou de mule, ou bien, comme les autres dient,en celle de cheual: laquelle aufli on ditauoirefté apportée a la prouince en laquelle eftoit Alexandre par Iole filz d’Antipatre,ôê auoir efté parluy tué de celle eau,quinefutpas fans gra de infamie d’Ariftote. Il y a deux fonteines en Beotie, defquelles l’vne cau-Iè la memoyre, & l’autre l’oubliance. Vn ruilfeau court en Cilicie, vers la ville de Vifque,d’ont comme dit Varro les elpritz de ceux qui en boyuent ont les léns plus fubtilz, &enl’iflede Co vne fonteine dont les hommes fhebetent La riuiere de Cidne en Cilicie guarit Iespodagres,comme il appert par l’epiftre de Calfin de Parme a M. Antoyne.il y auoit aufti vne fonteine douce en la Germanie de la le Rhein, au camp qu’auoit drefte Celâr le Germanique, le long de la mer : la boyfton de laquelle gaftoit les dentz dedans deux ans, & les faifoit tu mber,les ioinétures aufti des genoux le re-lachoyent. Avnemaifon des champs fituée fiirleriuage d’Auernelacdu Capouan en tirât à Pozole,& qui eft renommé â caulé d’vne gallerie & fo-reft appellée parM.Cicéron Academie, àl’exemple des Athènes, fourdirét des fonteines chauîdes quelque peu de temps apres la mort,eftant en la pof léftion d’Antiftie, IefquellesLaurée Tulle,qui fut l’vn des Libertins de Cicéron a louée en celle maniéré de vers.
- D'autant que ta forejl Û trefioble defenfe Delà langue fontaine en plu* grande verdure Se drefjè,& quautourd'buy foubs vnglm excellent Vancienfrequente ment regare la bourgade Renommée ïadts du nom d'^Achadcmie:
- p.035R - vue 81/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- „ Va aup faitfafource vne eau auparauant
- j, In cogneu'é-, les yeux qui de langeur allégé
- „ Le lieu de vray l'a fait kt honneur de [on Tulle,
- „ Lors quepourvnfecours il epanditlesfourfes3
- 3i Pour taccès d iames de toutes pars à luy,
- SJ Veau y efl abondante au^yeu^ medtcinaUe.
- Il y aauflien plufieurs lieux des alpesd’Italie vnemaniéré d’eau qui cau-fê le goetron a ceux qui ordinairementcn boyuent.Ory a-il finalement en diuerlés contrées des lourlés en aucuns païz froides, es autres chaudes, 5c autre part d’vn commun ficours,&qui tantféulementfourdiflentpourles hommes. On parle d’aucunes qui lâchent le vetre & qui font propres pour la guarilon du chefjdes oreilles, & desyeuxdes autres confortentles nerfz, 5c les piedz: les aucunes féruent aux denoueures 5c romptures d’oz,& gua-rifiént les playes.Or efl: l’eau fulphurée fort vtile aux nerfztcelle d’allun aux paraiitiques: &: la bitummée ou bien nitreufi par mefine moyen aux débilitez, mefinement eftat chaulde. le ne m’efinerueilîe pas que Homere n’ait point fait de mention des fonteines chauldes, mettant en auant fouuent qu’aucuns lé lauoyét d’eau chaulde, attédu quelamedecinequi a recours aux eauzn’eftoitpaslorsen nature. Au demourant corne les eauznepuif-fént pas toufiourseftrepreftes à celle maniéré deremedes pour l’infirmité humaine, & qu’elles foyenten aucuns lieux, mefinement entre elles fort diftantes, & quetoutes neloyentpas bonnes àtoutes chofis, aflémblons maintenant les autres ficours de fimple medecine, ou compofiz contre la vermine, 5c leurs morfures, & qui foiten main, & autant inuenté par nature que party de l’artifice auec facilité. On dit que naturellement il efl: bon d’epandre la fougere es lieux fufpedz,d’autant que comme l’experien-ce le montre elle ne reçoit point le ferpent, 5c que bruflée elle les chafléde fôn odeur. Les expérimentez ont fait entendre que fi on enferme vn férpét dedans vn cerne de feu, & de rameaux de freine, qu’il fuyra plus toftaufeu qu’au frefiie:& que d’auantage qui efl: bien plus grand cas,il neveult aucunement toucher àl’vmbre du foleil leuant,ne du couchant tant loit ellelô-, gue:mais fi d’aftuce comme il auient fouuent,ainfiauflî que Marco ledit. a Que foubsfermes efables ayt fait là fa retraitte
- 33 La viper e picquant, & quefonnée du ciel
- 35 Elle ait la fuite prins, ou bien que la coleuure
- 33 Fréquentant la maifon fe retire de l'ombre
- 33 ^[prepefle des beufs, & au befailvenin:
- 33 ^Aprens a enflamber dans l'efable le Cedre
- < 33 Odorant, gy chaffer de la fumée Galbane
- 33 La Marine Tortue.
- Oubien comme plus amplement l’a efcrit Lucain.
- 33 J/h feu médicinal enumnne le camp
- 33 Et la l’bieble pétillé, gy l'e frange Galban
- Sué
- p.035V - vue 82/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IIII. 3<s-
- Sué (y le Tamarix de feuilles mal vejlu:
- Et d’orient leCoJle auec le fort Panax,
- La Centaure Thejalle, aufît le Peucedane,
- Et le Tapfè Er'icm fùent a force flambes.
- On brûle les Lances, çy l’^Aurone ennuyeuf Defumée aux ferpens, & les rames du cerf Aucuns hommes profitent de tout leur corps ou d’vn membre à ceux quienfontmordz,commeafait anciennement Ophiogenes enl’illede Paros, & les Marfes en l’Italie, & iadis les Pfilles en l’Affrique, s’il en eft en-cores: Lefquelz font appeliez du Roy Pfille dit Agarchides. Lucain,
- De leurfalïueil% touchent premièrement les membres Oui retraintle venin, & l’arrefle en la play e.
- Il n’y a point de doute que non feulement la làliue des Maries & Pfilles fort de remede contre la piqueure du forpët,mais aufii fait celle de tous homes alun.le tairoye en mon propos les remedes des piquez,fi ie ne làuoye queM. Varro à Page de quatre vingt ans, &M. Caton Porcieontmis en auantquelespiqueures des alpicz font guariës fi ceux qui en font piquez boyuent de i’vrine: ou par la nielle broyée auec enuiron demy foxtier de vin viel,infufe aux narines, en appliquant for la piqueure du fien de por-ceau, les foorpions aufii mortz& broyez, puis applicquez for la piqueure qu’ilz ont fait, donnent guerifon. On dit aufii que la viperebruflée, & mile en cendres fort a la piqueure. Pour les piqueures aufii de ce genre de for-pent, Nigidius au focond liure des animauîx témoigné qu’il faut prendre vnepoule,& l’y applicquer.Par art aufii les remedesfont approuuez,qu’on trou ue auoir efté grauez en pierre for la porte du temple d’Efoulapiusd’vne compofition fort excellente. C’eft àlàuoirdeux dragmes de forpollet, autant de l’oppoponax,& en fomblable demil,vne dragme de treffle,& de la fomenced’aneth, defenoil, del’anis, deperfil,f& d’ammium,chacun fix fVerti e* dragmes, & douze de lafarine de vefledefquelles chofes battues & criblées pl!“0* en vin excellent, on départ en malles du pois de deux dragmes : chacune defquelles fo baille mellée auec troys doigtzde vin. De laquelle façon de preforuatif le grand Roy Antiochus vfoit comme l’on dit contre venins.
- Nous trouuôs qu’au cabinet du Roy Mitridates a efté trouué vne compofition depreforuatifeontre tous venins eferite de là main, & fort louée par Galien & Diofoorides, qui eft de deux noiz foiches,autant de figues,vingt foeilles de ruëpilées enfombleauec vn grain de fol, & finalement de tel effet! que qui le prenoit à ieuneftoit certain qucnul genre de veninne luy nuyroit pour ceiourlà. Audemourantceneforapas chofo impertinente ne inutile de maintenant pourfoyure les remedes des playes: mais pourau-tant qu’vne playe ne fo peut clorre fi le fer demeure dedans,nous enfoigne-10ns premièrement comment nous tirerons des corps ceux qui y font fichez & attachez, pourfoyuans aucuns remedes qui font peu, & en main.
- La cendre del’arondellebrullée en vnepoefleauecdu vin aigre tire le fer
- p.036R - vue 83/480
-
-
-
- *f Conii-cio legen-dum Cly meni pro olibanijfi-ftit enim fanguinë ex fente n tia Diofco ïidis.
- ROBERT VALTVRIN
- d’vnc playe : le rat mis en pièces, & appliqué auec farine de la fomence de lin, & la racine du concombre fauluage, efl: bon aux ozrompuz: la cendre aulîi des machoueres d’vn lànglier: les crottes de chieures aufli auec du vin vie! font fongulieremét louez pour les colles rompuës-.de vray elles ouuret, attirent, & guariflent, îAu regard de l’efiuliô defomg par playe, la pouldre du Clymene l’arrefte,en faifant emplaftre aueepoil de lieure & le blac d’vn œuf, & en l’appliquât deffus iufques ace qu’il tombe. La pouldre aufli d’a-loës foule, ou bien auec vin aigre fait le fomblable de quelque part que foie l’efiufion delâng. Si on efluue les playes tant recentes que vielles de la de-codion de choux, & que broyé on le mette fois, il guarilt merueilleufoméc bien. Les vers qui naiflent es arbres guariflent toutes playes : au regard des recentes les vers de terre les congîutinent fo fort, que Democrite adonné â entendre que dedans le foptielmeiourilzconfolident les nerfz coupez par ondiô, & pourtat il a efoé d’auis de les garder en miel. La cicuë broyée & appliquée guarit l’enflure d’vn coup,corne I’achillée quon appelle mille feuille la grande,beuë auec vinaigre vault à beaucoup de chofos relie fort principalement aux tombez dehault pour l’Laleine. Au temps des Troyës il fut des euures excellentes d’Efoulapie touchant celle façon deremedes. Auquel fos enfans Podalire & Machaon luccederent: lelquelz ayans lûyuy Agamenon chef excellent â la guerre de Troye, ne furent pas de petit for-uice aux playes, en guarilfantfoulementleurscôpaignonsdeguerre. L’hi-lloyre de Xenophon témoigné que Cyrus ordonna desMedccinsà fon armée. Nous lâuôs bie que Xerxes Roy des Perfos fut accôpaigné de Solthe-ne à la guerre qu’il mena aux Gréez, auflî fut Alexandre deSofthene le fécond, & non pour autre cho'fo que par la vigilance de cell art, fon focours, &excellëce laquelle nous fàuons bien auoireftécelebrée par les chiefz de noz an ceftres.M. Caton de vray mai lire &longuem et foui l’a premier touché en peu de parolles fans oublier les medicamens pour les maladies des ouailles & omailles : lelquelz finalement ont par apres elfe par autres traitiez plus amplement. Apres lequel C.Eualgius I’vn des plus exeellens homes, & renommé en lâuoirl’atrai&é parla compolition d’vn volume de-diéau diuinCelàrAugulle.llelt vray qu’au parauant comme ietreuue le Libertin de Pompée le grand, nomméLeucus en afoul eforit entre les no-llres, lorsque premièrement on cogneut que celle foience elloitperucnüë aux nollres. Mais afin queiereuienncauarellrangers qui fo glorifient de l’inucntion des chofos de celle difeiplinc. Le Roy Mitridates & chef non pareilque Pompée vainquit, a ellé tenu tant par indices queparrenomîe plus curieux cercheur des remedes de médecines de tous fos predecelfours: lequelfoul inuenta(comtne fouuenton elfaiall de J’empoifonner)dcboy-re tous les iours poy fon, prenant premièrement remedes, afin que pour l’accoutumance ilneluypeult nuyre: parce moyen iufques âceiour fon préforuatifellenreputatiô fornommé de Iuy qu’on appelle Mitridatique. On dit que Zopire a compofo au Roy Ptolomée vne autre maniéré de pre-
- foruatif
- p.036V - vue 84/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE 1111. 37
- ff ruatif qu’il a appelle Ambrofie .Outre Iuy le Roy Iuba pere de Ptolomée beaucoup plus émerueillable pour la gloire de Ton eltude que du régné (combien que premier il ait régné furies deux Mauritaniësja muété l’herbe d’Euforbe, laquelle les médecins appellent du nom de Ion frere eftant à la louange vnliurecompofé. La Centaurée eftappellée auec vne grande îouenge de Chiron le Centaure Ion inuenteur, de laquelle il fut guary, comme eftantlogé en la mailbn de Hercules, il fut en maniant les armes blefTé au pied, de la cheute d’vne fléché. On dit aufli querAchillée fut in-uentéed’Achilles dilciple de Chiron pour guarirles playes: laquelle accise caulè s’appelle AchiIeos,nous l’appelions mille feuilles.Les autres dienc qu’il ainuenté premièrement la rouille de cuyure bien profitable pour les playes, & pourtant on le peint la lêcouant de la pointe d’elpée dedans laplayedeTelephus.Onditaufliqu’aumefme temps Teucer inuenta le Teucrion, qu’aucuns appellent Hermion: & que Gentius Roy des Elcla- fLegoex uons a trouuéla Gentiane naiflfant par tout: mais touteffois fort excellen- HeTmiotï te en la Sclauonië à beaucoup de choies. Il ell aufli d’autres genres de me- pro Ger-dicamens, quipar vnequaficertaine puilfancediuine le font du feul at- minçam. touchement & s’en fait guarifon, comme il auint al’Empereur Velpafian,
- & a Pyrrhus Roy des Epirotes. Car comme Velpafian eftant en fonfiege & donnant publique audience, vn certain aueugle, &vn autre boiteux d’vneiambevinlêntàluyenlêmblejuy requerans lêcours en dilânt, qu’il ieurauoitefté loudainement démonftré en dormant, affeurant qual’vn feroit reftituée la veuë s’il luy crachoit fur fès yeulx, & a l’autre la iambe ferme s’il luyplaifbit y toucher du talon, & que cela lêmblaft d’entrée digne de moquerie, & qu’on n’en fift conte, finalement touteffois a la priere des amyz, 6e perluafion d’aucuns afliftas l'on éprouual’vnôc l’autre, ny ne défaillit à pas vn d eux la fortune de lafaté delirée. Au regard de Pyrrhus nous auons entendu qu’il guarilfoit les malades d’enfleure de rate,eftâscouchez fur le dos,en les preffant du gros ortel du pied dextre,apres auoir lâcrifié vu coq blac.-ny ne fut onques home de fi baffe coditiô,auquel larequeratil dé f Legoa-niaft la medecine.il en ell aufli qui pèlent qu’il y a vne grade vertu es paroi ^ Pro. les pour les maladies des homes, & belles lâguilfantes,ou clochâtes, ou bië eo' moribôdes.Etcôbié que noz lettres lâinétes la reprouuent, 6r qu’on penlê qu’elles ne lèruët de rien pour le recours de la fin té, Homere touteffois témoigné qu’Vliffes eftacha le fâg d’vn home bleffé,par charme. Theophra-fte en a autant dit des Siatiques,& Cato des mebres denouez. Varro pareillement dit que le charme 1ère aux podagres. On dit que le diétateur Celàr apres vne cheute d’vn car,auoit de coutume foudain qu’il eftoit môté,d’afi fèurer fo n chemin par vn charme répété troys foys:Ce que lors plufieurs fà-uoyentbien faire. Il relie vne bien grande abondance de telzexëples,que ie diroyevolütiers,fi leproposn’eftoit preffé pour la luy été de nud à nud:& le relie de I’exercitation des gens de guerre, qui ell le plus grad deuoir de la charge que nous auôs prins, & pour la difeipline militaire. Il fuffit dôques
- G
- p.037R - vue 85/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- entant que touche l’exercice des bons artz : nous pourlùyurons d orclêna-uant par ordre i’exercitation des gens de guerre.
- DE VEXERCIT'JTION DE L guerre, & de celle de chenal* Chapitre III.
- — V demeurant, comme il Toit beaucoup de maniérés d’exercice,
- nous receurons bons ceulx tant feulement qu’on prendra félon la force de la nature, & la railon de l’age, à fin que la lancé le garde, & que lùblèquemment les membres loyent réduz plus robu-lles pour porter les trauaulx de la guerre. Il fault peler que ce n’efr pas petite conlèquence tant pour l’vn quepourl’autre àquelle façon denourriture chacun fera drelfé en lès premiers ans, ôe dequelz exercices, rudes, ou gra-tieux,on le force par coutume, corne femble celt ordre des Lacedemoniés auoirefté misen leur cité publiquement lèule,ou bien auec bié peu d’autres par le Legillateurpour le regard de la nourriture & exercice. Il apparoilt aulli par les autres animaulx&natiôs,lelquelles ont les armes enrecômé-dation que le nourriiTeméc de l’aiét, & d’aucunes fonteines elt fort propre à la lanté,& force du corps : corne desLucanoyz,& dallez d’autres natiôs. On dit aulli qu’accoutumer les enfas au froid,elt vne chofc bône.Parquoy Horace elcriuat à Ion amy luyremonltre que comme robufte il apprenne en ieunelfe porter patiément la dilétte ôc pauureté d’vne rudelfe de guerre: & que l’hôme de cheual d’vn redoutable poin&on deface la fierté des Par-thes: qu’il viue a Perte en le iettant au péril. Et comme la nature des enfans ioit prompte a toutes euures & a êtes, il faut en celle âge laentreprédre ceux melmementqui le font parieu.Au regard des ieuz, ilzne doiuent élire ne villains ne fans trauaifne remiz,mais telz qu’on dit que Licurgelesainlti-tué aux enfans Lacedemoniens. De vray lôudain qu’ilz elloyét de l’age de feptans, il les prenoit & departoitparbédes,&lesaccoutumoitavnemef-mecompaignie & chambre, delireenlêmble, &enlèmble s’exercer: à fin que par combatz mutuelz & debatz communs il decouurill quel elloit de chacü l’entédemét,& quel hardy, & qui aux côbatz nefuyoit point la lilîè. +Ex Dio tMirys aufii Roy d’Egipte apres la nailfâce de fon filz Selofis ordonna que fofî° S o~ tol,s^esen^ins de toute l’Egipte nez au melmeiour que Ion filz, les ayataf-Sc2o£? féblezfulfétnourriz, & lesfittousdrclferen vnemefmedifcipline & exercice, ellimantqu’ainfinourriz & drelfezenfembleillêroyentdetantmeil-leurs à la guerre : & les exerçoit par vn continuel vfage à la patiéce des tra-uaux, ny n’elloit licite aaucun de prédre le repas que premieremét il n’eull couru neufvingtz llades.Et comme par celt exercice ilz fulfent tous deue-nuz hommes, & d’vn corps robulle auec le cœur bon, Sefolis fut premièrement enuoyépar fonpercen Arabie auec vne armée de ceux auec lef-quelz il auoitellénourry, citant accoutumé à la venerie, & il’abltinen-ce de boyre & de manger, & l’alfubieélit toute la nation au parauant
- p.037V - vue 86/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IIII. 38
- libre, ôc non accoutumée àla foruitude. Et depuis tirant àla Lybic, il en a réduit eflat encores bien ieune la plus grande partie àfon obeiffance. Alexandre aufïi par vn mefme moyen ayant choyfi trente mille enfans barbares commanda qu’ilz fuflent dreffez es lettres Grecques, & au maniement . des armes, ôc autres exercices à la façon Macedonique, ordonnât pour cela plufieurs maiflres, par ce moyen outre les lettres que par necellité ilz ap-prenoyent,ilz acqueroyent aufïi tout le refie d’exercitation ôc difoipline pour eflre obeilfans ôc à bie n porter le trauail,& peine des armes,& a vaincre en bataille. Mais comme en celle pourfuyte les Lacedemoniens ren-diflentbien fouuentpar trauaulx leur ieuneffe prefque brutalle, comme feruant àla hardielfe ilz fo trompoyent beaucoup. Aulïî elloyent ilz de vray frullrez de leur intention, ny ne voyons pas vne hardieffees autres animaulx ne nations par trop farouches, mais plus toit les humaines, ôc qui font de nature Leonine. Aufïi eft il beaucoup de peuples qui entendent aux meurdres des hommes &àles deuorer comme les Acheins, Ôc IesfHenioches auprès du Ponte, & autres entre les Mediterranées, qui par t fûrprinfo font des deftrouffes, ôc ne vallent rien à la guerre. Car toutes ces Kea^^ nadôsqui ont vne liberté fàuuage à la façon des loups ne peuuét foigneu- chi, §' rier tout ainfi qu’ilz ne peuuent foruir,d’autât qu’ilz n’ont pas la force d’vn entendement humain,mais filueflre ôcintradable. Nousfâuons bien que les Lacedemoniens furpalfoyent tout le monde pendant qu’ilz s’exerci-toyent ôc que par apres ilz ont elle moindres que les autres. Ilz n’efloyent pas de vrayplus excellens pource feulement qu’ilz exercitoyent leur ieu-neffe,mais aufïi par ce qu’ilz combatoyent auec expérience contre gens fans exercice.Les légions Romaines aufïi n’euffent iamais peu aucunement en leur ieuneffe ou apres marcher àpiedauant l’armée, porter gros faix, ôc leurs armes,ne faire rie louable ny digne de memoyre,fi elles neuf-font eflé premièrement accoutumées aux continuelles exercitations : aufïi l’exercice eft di<ft d’exercer, d’autant qu’il efl rendu meilleur par l’exercice.
- Et fi de cefle matière ôc temps nous deffailloyent exemples, nous pouuôs eflrerenduzcertains parceulx deScipion l’Aphricain lcplus ancien,& d’Emilie Lepide: car corne l’Aphricain efloit encores en bas âge, ainfi que dit Flore ôc Seneque, ôc Imhcrbe comme dit Tite Liue, il retira du péril de la mort àla bataille(en laquelle auprès de PauieHannibal fit vnmerueil-leux efclat de tticrië contre les Romains )fon pere citoyen Romain, Con-ful, &chef de l’armée eflant bien fort blefïe d’vneplaye,& cnuelopé des enncmyZjd’ont il rapporta vne fort grande louége pour la vie fàuuée a fon pere. Au regard d’Emilie, comme il fut entré en combat, il tua l’ennemy, ôc fàuua vn citoyen par vne mefme charge : ôc en mémoire de ce vne fta-tnë en habit de ieuneffe luy fut mifo au Capitole par vn decret du Sénat, à fin que les autres s’enflambaffent de cefle façon d’exemple. Mais aufïi, Si-gifmond Pandulphe, tu ne dois pas en ce paffage eflre mis en oubly, finô que nous portions enuië à tes louenges, ny à tout le moins eflre tenu
- G ij
- p.038R - vue 87/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- moindre que ces deux autres, veu que n’ayant prefques pas Page de dix 6c fêpt ans, à ce pellifere ôc mortel effort de la conlpiration des trahiftres furieux, c’elloit fait de tout l’eftat de la race des Maleteftes, ôc des citoyens ellans tous les tiens éperduz, fi en te dérobant fbudainde la comme l’vn des loldatz dvne légion, ôcappellant de toutes pars fecours des peuples fubie&z s’aflemblans en vn iour à toy tu n’eufles combatu de force ôc fiar-dieflè, 6c armes cotre plufieurs hommes vaillans, 6c fort cruelz pour la ruine de noftre ville auec vn bien grand péril de ta vie : 6c fi tu n’eufle remis le pais, 6c fumé lès biens, 6c lès richefles auec les tiennes ia periës, 6c prefques perdues a toy, 6c à tes freres en chalfant de la cité celle pelle la, 6c ce montre ôc portenteautheur,ôc enflambeurdefeditiô,ôcendeffailântparapres les chefz ôc coplices de celle facliô 6c tumulte,6c tous ceux qui leurelloyét venuzaulècours iufques atroys mille de la cité, moyennant l’armée des Pezeroes,6c vnbon nombre d’hommes,ôebendesappelléespartoy, ôc ordonnées pour la garde,lâuueté, ôc côlèruationdenoftre cité. Par cemoye tuasenceftagelâ,(quieft vnechofe merueilleufê)en ceft amas melchant d’hommes delèlperez, duquel vn fôldat leplus expérimenté du mode aux armes, 6c en cheualerie, 6c en tout le meftier de la guerre lè làuuant euft af-lèz fait, mérité par ta vigilance, viuacité d’entendement, 6c excellence de cœur triple coronne pour l’afifeélion tant publique que priuée en fumant le frere, 6c lcpaïsrquifut vn commencement notable d vn chefinuincible à l’auenir. Quel plaifir fut ce de voirie Prince au cômencemét de lôn ado-lelcence ofèr entreprendre vn fi grand cas? EU il rien plus magnifique,plus magnanime, plus glorieux, ne plus louable? Que trouue Ion es anciennes hiftoyres de tes anceftres plus excellent ? Que pouuoys tu laiflèr a ta polle-rité déplus grand renom, que d’ellre en l’eftime de tous,d’auoir en vn mefi me temps confèrué celle tant noble ville,tout le peuple, le droict, 1 équité, Iesloix,ôcçoutumes?DevrayauJ(ïi cela ne doit a aucülêmbler incroyable, comme qui as toufiours preuenu l’age,6c as eu toutes lesvertuz des ton enfance en fi grande reuerence, qu’elles ont ellé premièrement en toy certaines auât que les autres les ayent decouuert 6c cogneu. Tu as de vray en cô-tcmnant les coutumiers attraiélz de lage d’enfance apprins par vne grade influence des allresioinélladilpofition de la fortune en tes plus grâdz affaires pour l’Empire, de n’ellre endormy par vne niezerië ou repos, nep>ar oyfiueté ôc parelîè, ne par volupté: mais d’endurcir tes membres,porter les trauaulx de la guerre,veiller, endurer faim,6c foif, froid 6c chaud., ôc d’entreprendre auec les moindres des gés de pied 6c de cheual toutes choies ôc malaifées.Tuesaufli duitplus quenuldetontéps d’ellre gouuerné 6c de gouuerner,menerarmée,aflbircamp,dreirerlesbatailles,aflbirgarnilbns, chargerl’ennemy, drelfer l’artillerie,remparer,lancerdardz ôciauelotz, faire fonnerbouclier, forcer de l’elpée, chofes incroyables, monter a cheual, non pas a la mode Perfique auec ayde, mais auec le pied en l’ellrierlâns montouer,legerement, 6c ailement te ietter à cheual, en ayant les mains
- p.038V - vue 88/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IIII. 3S>
- au dos, a la façon d’vn condamné âmort,luy donner fbuuent la courfc royde, puys derechef ores l’arrefter amy courfê en vn moment ,&àvn tour de main: autreffois picquer a la montagne^ fâulterle foffé: &as finalement perfaidement apprins fauoir tous lesdeuoirs du meflicr de la guerre: tellement qu’homme ne fàuroit bonnement iuger, fi tu te prefêntes, ou fi tu es tenu pour plus grand homme de pied que de cheual, Tribun que Capitaine general. Comme donques tu fois fort auancé par plufieurs mai-ftres en plufieurs chofês,tirez de tous coflez de l’Italie, auquelz tu n as auat donné congé, que tu ne les ayes en t’exercitant en elles egallé, ou bien fur-monté en gloire, leur faifânt au demeurant de grandz dons de richefîês, 6c d’honneurs, en enfuyuant(commeiecroy)Alexandre Seuere qu’on dita-uoir entendu au ieu delaluideapres l’efludedes lettres, ou bien plus toffc P. Rutille, lequel eflant foldat,a, maniant les armes premier ordonné la difeipline de ruer coup, 6c fê couurir, 6c de donner iufques dedans vn cap, à fin qu’il ne fuit pas feulement preux des forces du corps, & de hardieffe, mais auffi d’art 6c d’induflrie. Nous lifons auffi que Paul Emilie s’adon-noitaumefine art:lequel voulut que fês enfans, al’inftitution defquelz il Ce trouuoit fouuent, fufTent endodrinez, 6c fbubz la charge de maiflres excelles en telles choies, 6c d’eflite.Marin aulfi non fèulemët en là ieunefle mais ia aggraué d ans 6c pelant pour la grande foiblelfe du corps, Ce iettoit tous les iours a la compagnie au moyen des melmes artzeombatantauee les ieuneS gens à celle fin de rendre fon filz bien renommé en failànt les de-uoirs de la guerre le relie de là vie: fâchât côbien celle façon de guerre imaginaire durant Iapaix accoutumée de ieunelfe elloitde confèquence aux grandz dangiers auenir, 6c aux vrais combatz.Et combien que celle façon de guerre qui fe cerche, 6c celle maniéré d’excrcitatiô Ibit beaucoup difFe-ren te de celle qui s’apprend entre les vacarmes auec vne indigence'de toutes choies, & toute maniéré d’efpouuantemens, elle réd toutelfois le corps plus adroit a cheual, & plus alaigre aux armes, d’auantage quand Marin a mené armée,il a exercé a continuelz trauaulx de coutlès 6c de lôg chemin, 6c leur ordônoitfbuuenteffois déporter charges, leur bagage, 6c viuresen-féble en vn troulfeau liez à fourches,au moyen defquelles le faix s’alegeoit, & que le repos en fullplus aifé:dôt ellvenu le prouerbe,que le loldat qui ne trouuoit rie difficile, & qui portoit bié le trauail,ny ne fuyoit pointla lilîè, faifât de frac cœur & d’affediô les cômademés de fbn capitaine fans fôner mot efhoit appelle Mulet Marian. Cato le Célorin auffi enfêigna fbn propre filz, corne qui luy apprint nô lèulemét à lacer dardz, & à manier les armes, mais auffi d’eflriller le cheual, & le cheuaucher, & de côbatre; a coupz depoingz,d’édurer chaud 6c froid,& de force palfer les torrens,& riuieres roydes .Au regard deCato l’Vticefê qui fut depuis,on le dit auoir fi bié por té le trauaiî,que cheminât âpied auec fês amyz eflas â cheual il leur tenoit propoz, venant puis âl’vn,puis â l’autre â telle découuerte,fuflfoleil,fufl pluie. C’efloit vn grand triumphe pour donner cœur de voir ce grand
- • G iij
- p.039R - vue 89/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Capitaine Pompée à l’age de foixante ans,exercitantpremieremet les gens depiedaufault, &àlacourfe, &les gens de cheual aux armes, de tirer lefpée & en courant la remettre au fourreau de bonne adreffe : 5c quàt a la? cer dardz, non feulement les lancer, mais aulli à temps montrer la force: &: lequel faifat telles chofes la plus part de la ieunelfe ne vaîquoit pas aifémét. Audi ne pouuoit il pas eltre egallé àSertorius, s’il ne le full préparé, 5c les liens aux combatz par continuelz exercices,veu qu’il auoitvne certaine,& fùpreme fcience de mener vne armée, comme accoutumé à gradz 5c périlleux affaires, 5c àlongz voyages, par côtrées rudes 5c inaccelïiblespour de quelquepart que ce fuit adaillir, & échapper. Maflinidfa Roy des Numides a l’age de quatre vingt dix ans a fur tous autres homes elle merueilleux en cela, tellement que corne le recite Cicéron,il ne couuroit iamais là telle pour pluie, ne pour froid. Il elt certain aulîi qu’il auoit de coutume d’arre-fterfurvn melmepied quelques heures, ny ne le remuoitquepremieremét ilrieulUalfélaieunelfed’vn lèmblable trauaiT.ôcs’ileftoitbelbin de faire quelque choie alîis,comme il auient louuent,il tenoit quelque fois le liège tout le iour làns tourner le corps ça ne là: 5c s’il auoit encommancé vn voyage à pied, iamais ne monta à cheual, Si à cheual, il ne defeendoit point, en palfant quelque fois ainli la nuiét auec le iour, à lin qu’il ne lèm-blalt rien omettre de ce que la ieunelfe a de coutume faire. P. Scipio en-uoyé contre la ville de Numance corrigeapar exercitation vne armée qu’il menoit corrumpuë de lâcheté :1a forçant d’endurer neiges 5c froidures, palfer à gué les riuieres, en chaftiant par reproches les timides, 5c lâches, &cnaffoiblilTantla façon de vie délicate, &lalciue auec les bagages inutiles pour le voyage. Cyrus a outreplus donné ordre, que les gens de guerre ne dinalfent ou Ibuppalfent iamais làns auoir premièrement fué: ce que le failbitparlachalTe,ou par quelque autre charge commandée. Mitry-date Roy du Ponte n’a iamais Ibufferten hyuerauachir les gens de guerre par oyliueté, il ne les tenoit pas de vray, ne mefmes là perlônne dedans les villes, mais en camp: ny n’a tous les ioursexercité leurs membres qua ieuz rudes, citant accoutumé de pourfuyure les belles làuuages à courfc, & de quelque fois les combatrede force, à fin que Zephire "les appellant à la guerre, leurs forces nelanguilfentparamiellemens. Nouslifons aulfi que du temps de Cclàr, (lequela, plus qu’il n’ell croyable àhomme,ellé bien portant letrauail)les ieunes gens de guerre elloyent drelfez es mai-fons par les cheualiers, 5c Sénateurs expérimentez es armes, 5c qui leur en a fouuentelfois elcrit pour en prendre d’vn chacun la cure 5c difcipli-ne, nyn’augmentoitouaccourfilfoit le chemin feulement aux nouueaux foldatz, mais aulïi à lès vielles bendes,& à toute l’armée, à fin de trauailler ceux qui par parelfe, 5c lâcheté demeuroyet derrière: toutes lefquelles chofes Probe Aurelle cognoilfant durât la paix, trouuameilleur le trauailpour fes foldatz quel’oyfiueté, craignât vnelâgueun&pourtâtillesemployoit maintenat a drelfer inllrumes de batterie,ores eleuer haultes tours,épuilèr
- le»
- p.039V - vue 90/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IIII. 40
- les païs aquatiques,reftaurer les téples tombez de vieillefle, ou biépour en édifier d’autres beaux ôc nœufz,& les reucrer.On dit que les danfes que les Lacedemoniés permettoy et durant la paix eftoyent vtiles entre les exerci-tations pour la guerre,lefquelles Socrates a approuueentre les Gréez. Noz anceftres aufli en fèmblablenela tiennëtpourdeshonnefte, mais plus tofl necefTaire : veu qu’il eft certain que la danfe a efté faiéte en armes, & que d’elle autres ont efté furnommez ieuz de danfès.Et combien qu’en vn me£ me temps il fôit certain que non feulement le defîr de danfer, mais auffi le fauoir ait efté en trois des plus nobles citoyens , qui font Gabinian côfulai-re ennemy de Cicéron, ce qu’auffi illuy reproche apertement, & M.Celin homme cogneu pour troubles : lequel aufli Giceron a defendu:& Licinin Craffe qui mourut en Parthie: Crifpe Salufte reprëd touteffois Sempronie, femme de bien noble race, non paspoureftre bonne danfereffe,mais pour autant quelle en auoit vn fîngulier fàuoir,& doétrine. Scipion aufli, à fin que i’vfe des parolles de Seneque au liurequi fintituleDe la tranquillité de l’ame,mouuoit ce corps triumphal& militaire par mefiire, & non pas délicatement, mais l'efforçant à la façon dauiourd’huyauec vne marche coulante non pas d:Vne moleffe feminine,ainfi que fouloyent faire ces anciens en leurs ieuz & temps des feftes, efquelz ilz n’euffent point efté blaf-mez encores que leurs ennemys euffent efté prefèns : aufli ne t’a point efté Sigifmond la pourfuyte de la façon de leur danfè, & celle d’auiourd’huy a deshonneur en te monftrant & exercitant comme eux maintenant a vifà-ge découuert,autreffois en mafque en la prefènee du peuple.Par cefte tienne raifon veu que(commefouuéteffois tu dis, &enphiIofophe)nuIle partie du corps eft oyfiue en la danfè, & que le col auec les iâbes & mains font exercitez,& les doyuët eftre par celuy qui vouldra auoir vn corps plus agile, & plus adroit à tout mouuemét,& haftiueté d’homme deguerre.Outre cefte inuétion deNembroth,ou bien (comme les autres difènt) d’Apolîo,
- & de Diane tu as de coutume de faire la chaffe, d’autant quelle te fèmble bicnpeu differéte d’vne vrayfc guerre,veu qu’il eft befoin de foiure les beftes fauuages à leur fuite par baricanes,rochers,& païs defèrtz : prendre grandz trauaux pour le defir de laprinfè:fabftenir de beaucoup de choies,endurer chaud & froid, & fouffrir faim ôc foif, prendre hardieffe lors qu’il faut cô-batre auec elles de près, ou de loing. Il eft tout certain que la plus part des anciens, & desplusgrauesnefè font point amufé à ces moyens treshon-neftes tantfeulemétpourleurplaifîr & paflè temps.Car combien qu’AIci-des ait tué d’vn coup de fléché vne biche, & aflèuré les foreftz d’Erimantie oarfà viétoyre,&; que Mcleager ait tué le fànglicr ruinant la région de Ca-ydon,& que le premier fondateur de la race Romaine ait abbatu les corps des cerfz, ilz ont tous eu égard a l’vtilité publique, & non à leur volupté. Cyrus aufli par vn mefme moyen a caufé de l’vtilité publique, & militaire accoutumoit ceux à la chaffe qui luy fembloyent les mieux naiz a la guet-re:par ce que cefte maniéré d’exercice eft indubitable pour fèruir au meftier
- G iiij
- p.040R - vue 91/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- de la guerre,àcercher les palfages, & diuers détours de chemins. le me tay d’Alexandre, du Sertorin, de M. Antoyne, &aufîi d’Alexandre Seuere, Adrian,& plufieurs autres capitaines,& Chefz excelles,cjui ontpourfuiuy d’vn fupreniedefir celle façon d’exercice. Au regard de ceux auxquelz la façon de la volerie, fi tu la penfè deuoir eflre tenue du nombre des chaffes, elle fè conduit plusgratieufèment, & non pas de moindre vifleffe nevo-lupté.Duquel exercice ont dit que Machabée Chef de gtierre a eflé l’inuen teur.Ceux touteffois qui croyent aux anciens efcriuains des hifloyres mô-dainesdifèntquece fut VlifTes, lequel apres le rafèmentde Troye amena en Grece des oyfèaux de proye, & les dreffa a voiler leur fêmblable. par ie ne fçay quelle force, ôcplaifànte amirationdesafîiflensfouz laguyde de nature. Car comme les oyfèaux de proye facent la guerre par tout aux oyfèaux,les vns les empietans fèulement a terre, les autres en voletant autour des arbres, & les aucuns ceux qui font perchez haut, & les autres eflans en plein voldes hommes d’auantage, & les oyfèaux de proye volent par compagnie en la Romanië au defTus d’Amphipoly. De vray les hommes chaf-fènt les oyfèaux des foreflz, & ioncieres, lefquelz ces autres volans au def-fus rabatent: & depuis la prinfè fai&e ilz leur font leur part: & dit on qu’en leur en iettant ilz les empiètent en l’air,& que lors que la fâifon de la prinfè efl venue ilzlesinuitentà criz &avne façon de vol à les tuer. Au regard de la pefche elle efl plus modérée, laquelle encores plufieurs grans homes n’ontpas dédaigné,MefmesAugufle &MarcAnthoine lefquelz par récréation ont fouueteffois(comme l’on dit) pefchéàlaligne, combien que par auanture la vie de ceux fèmbleraplus honnefle,& beaucoup plusrecc-uable de laquelle parle Ouide.
- 5> Encores lors nageoit fans tente le poiffon
- >> Entre ces peuples la:en fin efcalle l’huytre
- ” Seure efloit,ny loyfeaud'lonïé la riche
- « Auoit Ven I Italie ju celuy qui du fang
- >> Pigmeo feiouït.
- L’art de nager femble deuoir eflre icyaioinéb a caufè des guerres mari-times : veu qu’il a de coutume de fèmblerbien fouuentfàuuer lesfoldatz, & Capitaines, & les rendre plus hardiz à quelque noble entreprinfè. Et pourtant nozanceflresont choifi la place à Mars prochaine du Tybre, à fin que lesfoldatz IauafTent toute l’ordure, fùeur, & craffe militaire, que l’exercice des armes leur auoit procuré,& qu’en nageant ilz alIegcafTentle trauail. Par le fauoir de cefl art le Sertorin ayant perdu fon cheual, & eflant bleffé a la defaitte des Romains contre les Dannemarquoys paflà la riuiere du Rhofne au trauers des vagues auec la cuïrace & l’efcu, & de ces abifmes fefforçant beaucoup de tout fôn corps, & (comme l’on dit communément) mefines de fès ongles. Ce qu’en fêmblable fit IulIeCefàr lors que preffé en l’affaut d’Alexandrie, & à la furie de la multitude qui fôr-toit,ilfc iettaen vn fquif,qui foudainfutmisàfonddupoixdefafûyte,
- &por-
- p.040V - vue 92/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IIII. 41
- & portant a vne main éleuée fes lettres il gaigna vn nauire nageant l’elpace de deux cents pas. Parquoy (oit qu'il y en ait qui le difent auoir nagé iettat fon manteau dedans les vagues, & que ce Toit cas d’auanture, ou bien faiét aelïïen, afin que les ennemys fy amulàflent à coups de fléchés & de pier-res:& qu’il en loit qui l’aflermét auoir tiré fon mateau aux dents, & n’auoir pas feulement laide aux ennemys celle occafion de foy glorifier: celle opinion toutefFoisefl:Iapluscômune,& côferméedeplus certains temoings. De vray on ne fait point de doute,qu’il ne fe foit làuué à nage ayat la main fenellre éleuée, à fin que l’eau de la mer ne tranfperçafl les liures qu’elle te-noit.Augulle par auanture memoratif de ce danger,aprins peine telle que fe s arrierefils fulfent dreflez en cela, que bien lôuuent il les enfeignoit luy mefme. Au lùrplus les exercices doyuent ellre receuz qui fe peuuent accô-moder a l’imitation des chofes qu’il faut par apres faire au naïf, & qui ne rendent point celuy qui le fait,ouurier d vn vil exercice. Celuy fe doit tenir pour exercice vil,qui réd le corps, lame, & l’entendemét en mauuais ellat, comme vn infiny nombre de mercenaires, & que nous appelions villains: carilz ne rendent pas l’entendemét prompt nyvtile au mellier de la guerre , mais l’occupent a chofes villes. Il y a aulfi vne chofe qui n’ell pas a oublier,comme la plus vtile de toutes:c ell que les cheuaux bons àfelle,& qui nelbnt point trauaillez ont de coutume de bien toll fe défaire, & mourir. Au demeurant il ell befoin que le cheualier le pique fo uuat,& pour autant que les freins & harnoiz faiélz de courroyes de cuir font profitables, il ne faut iamais aller fans prouifion d’elles,par ce moyen auec peu de coufl il fe pourra garnir d’vn grand fecours, de auoir en tout combat & guerre vne plus glorieufe viétoyre.
- DV REPOS DES GENS DE GNEBJLE.
- Chapitre IIII.
- R pour autant que les gens de bien, & excellens ne doyuent pas moins auoir egard au repos qu’au trauail, veu qu’il n’ell prefque rienenl’œuure de nature,qui ne defire parfois repos à l’exemple des iours & desnuiétz, ordonnons luy quelque moyen & fin. Premièrement donques corne il loit beaucoup de façons de récréation de l’ame telles,quelles peuuét alléger les Iaflez de quelque art, & rédre ioyeu-femét la vigueur de î’elprit purgée de toute triftefle,& allégé d’vne perfeuc-réte continuation de labeur en vn repos &c ceflerce fera le meilleur que rien nefoit fait mefehammêt,rien en lafeiueté,vice,ne villennie,lâcheté,impru dence, ne malignité : & que tout ce qui fy trouuera loit ciuil, noble, facétieux, & tel finalement auquel quelque lumière apparoifle d’vn cœur bon & noble,comme font ceux qu’on appelle diélz plailàns,& rencôtres : défi-quelz on dit qu’Augulle Celar, Adnan, & aflez d’autres hommes hardiz, & gens de guerre,mefines les Lacedemoniens ont vfe. Licurge de vray en-
- p.041R - vue 93/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- tre autres inftitutions d’vne vie perfaitte leur ordonna celle maniéré de ieu que les ieunesgensapprinlfentàdire, & endurer rencôtres fans pique, tellement que fi quelqu’vn fuit par indignation tombé en telle faute,il ne luy eftoitplus loyliblede faire rencontre fur vn autre .-Mais fi quelqu’vn veut fauoir de quelle vtilité ell cela, il le trouuera aifément en la vie de Licurge. Il fera aulfi licite d’vlèr de diuerlè façon de vie, corne maintenant eftre aux champs, & fy promener comme faifbit ce Scipion qui premier mérita par lès prouëlfes, & vertu le nom d’Affricain, comme qui auoit de coutume detranlporterlâ l’elprit donteur de peuples, & lès oreilles pleines du bruit du camp,& des Ions de trompettes : no pas à fin que la vertu Ianguift d’oy-fiueté,mais à ce que l’entendement lèparé de la variété d’affaires reprint les forces:parquoy il nefeftimoit iamais oyfif,ne lèui. Scipion l’Affricain Ion arriéré fils, ayant de coutume d’aller & voyager aux champs auec Lelius comme portant le trauail, & l’exercice plus qu’il n’ell croyable defiroit le repos,& la lolitude. Et dit on que quelque fois le promenant au long des riuages de la mer,il a abbailfé celle main dextre viélorieulè de Carthage,& Numance,pour amalfer des coquilles &: cailloux : & à fin que i’vlè des pa-rolles de Giceron,il auoit de coutume de raieunir plus qu’il n’elt croyable, le tranlportant de la ville aux champs,comme fil eltoit elchappé de prilon.
- Muce Seuole d’vn merueilleux làuoir tat en droiét diuin que humain fuyant de la tempelle du palais au repos,febatoit,corne Ion dit, au tablier, & aux elches: & par ce changemét de choies il a releué Ion elprit ropu d’affaires. Combien qu’en cela par auanture feront plus receuables Q\Muce Sceuole, Augure, &Liconle phiIolbphe,lelquelzondit auoir trefbien ioué à la balle, d’autant que trauaillez pour les pîetz, & pour l’interpreta-tion du droiét,& des choies naturelles, ilz lè retiroyët a celle façon de paf le temps pour recréer leurs forces,& rcnforlcr leurs collez. Nous auos aulïî entendu que Denis de Sarragouze auoit de coutume de febatre a ce ieu,& qu’Augulle le diuin fadonna apres l’exercice des chaps à la balle depuis les guerres ciuilesfiniësraulïifitM. Antoine, Vcre,Augulle,M.AureiIle,& An „ toyne lequel corne il effc efcrit de luy a principalemét ioué à la balle. Le ieu des elches aufii n’ell pas a delprilèr au iugemétd’aucuns,veu qu’il a vne façon de combat, & de guerre, & d’vn rencôtre d’ennemys corne dit Ouide.
- 3>
- 3i
- »
- 3J
- )>
- )>
- 3i
- A fin que d’vn droit train marche le cheualief Alors que le pion périt enueloppé Entre deuxennemysque mieux vouloir fâche Suyure & retirer l'autre qui le précédé.
- Et que fuyant bien toflyiefit fans compagnie.
- Lequel ieuelloitappellépar les anciens l’arronneau, pour autant qu’il elt faiét de petites pièces de boys allans,elpians,& furprenans à la dérobée. Et pourtant dit Marcial:
- Si tu combas au ieu des cauteleux echest Ce riche cheualierte fra ennemy.
- Et
- p.041V - vue 94/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IIII. 4z
- Et combien quaucuns le louent, a autant qu’il fêmble éueiller d vnc grande penfée la viuacité de l’cntcndemct, il me fêmble en cela de tât plus reprouuable, veu qu’il n’eft rien fi mifêrabie que la perte du temps, ne rien plus dommageable que ce en quoy tu trauailles beaucoup, 8c profite peu.
- Ce mouüement de vray d’efprit,& émotion d’entendement qui fê perd en cela pourroit eftre employé à gradz affaires de confêquence, 8c meilleurs.
- Et pourtât outre Sceuole 8c Augufte,noz anceftres ont laiffé en memoyre, corne témoigné Pline que les Singes ont de coutume d’y iouer. Au regard du ieu du tablier il ne nous fêmble pas deuoir eftre dédaigné, lequel on lit que(comme dit Varro)Palamedes a inucnté à laguerre de Troye,à fin qu’il occupait en celales gés de guerre,& que parce ieu il détournait l’armée de inutinerie.C’eftaufïi vnechofêplaifânte,& de profit de cognoiftre le com bat des dez : auquel nous auons entendu que Claude Cefàreftoit fubied,
- & en a fait vn liurernous liions de mefîne de Néron,Domitian,Vere, Cô-mode,& principalement Augufte Cefàrauoirefté fîir toutes cliofès adonné à ce ieu,tellement qu’il en courut vnEpigramme le mordant touchant la Sicile en fês termes.
- ^Apres auoir eïléfur mer vaincu deux fois ^ALu de-g toue tou fourspouf vaincre quelquefois.
- Nous auons aufîi entendu quePtoIomée, 8c Alexandre, & autres a fiez ont allégé leurs plus grandes fblicitudes par le moyen de ce ieu, ôc fait que par iouer par foisilz fê font renduz plus adroiétz aux grandz affaires auec los & gloyre.-mais fil eft fait d’auarice,il n eftpoint noble,oii bien ceif e cô-uoitife amolliffant l’hôme qu’Athale l’Afiatique eft dit auoir trouuéfcom bien qu’apres l’Empire de i’Aiie ruiné on dit qu’il fut tranfporté aux Gréez auec le butin, 8c non en vne forte fêule) il le faut fuir comme dommageable, & plein dedebatz : ce quelesloix commandent, 8c qu’en cesparolles Ouide ne taift pas.
- «Autres moyens eferitsfont de ieu% hasardeux <
- Tdo-g maieurs en cela font charge^ de grand crime.
- Que vaüent ojfeletsïque plus haut point pouuoir «AJfoir,ou bien fuir les dommageables chiens.
- Au regard de ceft autre façon de ieü de hazard,auquel les enfans iettans f ^go en l’air certains deniers de f cuyure,en criantîtcfte ou nauire eltat le ieu te-moing de l’ancienneté,ie n’y voy ne cognoy quel vice ou infamie il ayt en f Que foy. Hérodote dit d’auantage que les Lydiens preffez de famine inuente- “<>«* rent le ieu de l’offeIet,& de la balle pour foulager leur famine.llz iouoyent ^ °a de vray vn iour, 8c repaffoyent l’autre : & ont ainfi vécu 1’efpace de dix 8c huid ansjefquelz ie ne penfè pas deuoir eftre blafmez, finon qu’ilz fuffent inuentezpourpIaifîr.Le defîr donquesfigrad de tant d'excellenshômes, Ducz,& Princes ne tendroit pas a tant de diuerfês façons de ieuz, 8c efbatz filz n’auoyét par nature quelque façon de volupté,veu qu’il eft certain que la vie fê doit départir en trauail 8c repos:Ôc pourtant le veiller 8c trauaux de
- p.042R - vue 95/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- lanuid n ont pas feulement cftéinuentez, mais auffi a efté le dormir :ny feulement les turbillons 5c tempefles,mais aufïî la tranquillité:ne de rechef la guerre , mais la paix 5c les treues : ne toufiours les euures de peine , mais aufli quelques folennitez de fefles ordonnées par les dreffeurs de loix, par lefquelles les hommes fuffent contraindz publiquement a refiouiflance.
- Fin du quatriefme Iiurc.
- LE CINQIESME LIVRE DE
- ROBERT VALTVRIN DE l’art militaire*
- Des quatre efyeces de vertus & de leur departement,£7* quelChefe de guerre en ontefiétenu^exceüens. Chapitre I.
- L me fêmble Sigifmond Pandulphe que nous auons touché es Iiuresprecedens toutes les inflitutions, la nature & exercitation deprefque toutes les difciplines,lefquelles fans point de doute font de grand proffit. Or ceux qui maintenant pourront cheminer par toutes les efpeces de vertus,& d’exemples parvne certaine côprehenfion plus ample,profiteront de tant plus,mefmement fi diligemment ilz confiderent les ruzes de guerre des Chefz 5c Empereurs, que les Gréez appellent Stratagèmes, auec de plufieurs hommes mfiniz didz graues,fubtiîz,& plaifàns: comme font ceux que Caton a ramaffé qu’ilz appellent Apophtegmes, en fen ay-dant en temps 5c lieu:Car les exemples de toutes noz dodrines ont plus de pouuoir & efficace,que n’ont mefmes les artz qu’on enfèigne.De vray,noz Capitaines 5c Chefz prendront es artz vne nourriture amirable & diuerfè, & es exemples vn moyen d’inuenter 5c forger femblables euures, d’autant qu’il n’eftrien(par maniéré de dire)did ne fait auec los 5c vertu auant,ne durant,ne apres la bataille,qui foit de proueffe,de memoyre, de renom, de ruze,d afluce,de perfeuerace,& confiance,ne rien de bénignité, libéralité, d’innocence,de magnificéce, ne de fâgefle qui parce moyen ne puiffe aifé-mët gaignerles cœurs des ledeurs .Il nefèradonquespaseflrangedcpre-mieremet toucher les exemples de la vertu, de laquelle la diuifion en quatre,cfl àtous cogneuë.Il faut de vray que le Chef foit rufé, & non fêuleméc en ce qu’il faut faire auec l’ennemyen la bataille, mais aufli eflre induftri-eux par tout 5c en toutes chofes:car ces capitaines ne combattent pas toufi iours,mais fôuuenteffois ilz parlementent par treues,ou par cas de fortune fins armes auec leurs amys,ou ennemysjâ ou,faillir au chois ou repoulfê-mëc des choies fènt fon villageoys,ou prefque ruflau: 5c la parolle forte,fbn
- p.042V - vue 96/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V.
- fol, & niai apprins.Or pour n’y tôber point, vue gratieulc nature & ciuilité, il y donnera ordre: pour laquelle l’Affricain le plus vieil,& depuis Augulle Velpafian,& maints autres des nollres,corne Pôpile Roy des Romains, Fa bius Maximus,& les deux Catôs fôt renômez. Aiouftez y M. Antoyne mer ueilleulèmét prudët.I’entens celuy qui ayma mieux le furnom de Phificien q de Celâr.Entre les eftrâgers les deux Cyrus, H âmbal de Carthage,& Mi-tridate le Pôtique.Celle vertu de prudece eft au demeurât en trois mébres. Elle procure de vray la memoyre,i’intelligéce,& prouidëce : lefquelles iet-tët trois yeux à tout autat de téps par vn alïemblemët des choies dillâtes: au regard de lamemoyre qui le recorde desgelles des lieux,des téps & perlon-nes,ie ne pourroye pas bien nômer celuy qui l’a eu plus excelléte q nul au-tre:veu que plufieurs en ont eu la gloyre.Ie Içay bié que les ennemys de Celât luÿ on t lûr toutes choies attribué vne excelléce de memoyre:duquel dit Cicero qu’il ne lâuoit rie oublier que les outrages : corne qui par la grâce de lamemoyre auoit de coutume déliré,&enfébleelcrire,oïr,&de ditterprô-ptemét lettres de fi grads affaires à deux lècretairespour le mois,corne difec Oppie,& vn autre hilloriographe,& orateur bien renomé,quatre paires ou bié lèptjfil n’auoit autre affaire.C’ell fâs point de doute vne choie bié côue nable d’entédre aîfi ailemét àtoutes,& d’en auoir vne Ci certaine memoyre. le ne fuis pas aulïî ignorant qu’à Q^Maximus ne loit auenuë vne lîngulierc louage en celà,ie n’ellime pas peu de choie aulïî,qu’il a eu vne bié grade co gnoilïâce de l’antiquité,duquel Cicero témoigné,qu’il auoitlalouuenâce de toutes les guerres, nô lèulemét domelliques, mais aulïî de celles des pais ellràges,pourtant ne m’emerueillay ie pas beaucoup qu’en la lecode guerre Punique les diélz&auizelloyëttenuz pour oracles,tat du peuple qdesplus grâdz De vray aulïî pélèray ie dire vérité,q qui aura en memoyre beaucoup de choies du téps paffé,lèra aucunemét jiphete de l’auenir.Mais corne il loir deux elpeces de memoyre,l’vne des choies,& l’autre des diélz,ie treuue q la première a elle en telle vigueur & amirable en L.LuculIe grâd Capitaine Ôc philolbphe,q nous l’auôs de n’agueres recité auoir ellé en Fabin. Au regard de la lècôde,Scipion féble l’auoir eu,ny n’elï home entre toutes les nations ne dememoyre que ie vouluffe preferer à luy en celà,lî ce qu’on dit efb vray qu’il ait nômé tout le peuple Romaî,qui ell vne choie prelque incroyable, Ci plufieursexcellés autheurs entre lefquelz ell Pline le le'cand en l’hilloyre naturelle ne l’eulfét affermé de leur propre témoignage. Adrian aulfi a ellé d’vne memoyre grade, & amirable corne recitoit par memoyre les liures à luy loudain leu:z,& incogneuz à plufieurs, & en vn melme téps deuilôit, efcriuoit,di£loit, & elcoutoit.Mais reuenat de l’Occidét à l’Orient Themi llocle foffre le premier entre les Greczdeql ellant empelché pour les gradz affaires tat publics que pnuez,auoit Ibuuenace ellat nay d’Athenes de tous les nos de lès citoy es:qui elloit vne cholè elpouuatable fi le récit de Scipion ne l’eull perfaiét. Cineas aulfi courrier du Roy Pyrrhus a acquis vne bié grà degloyreen cela, car ellant embaffadeur au Sénat de Rome làlua le lendemain de Ion arriuée tout le Sénat par leurs propres noms ellat home nceuf,
- H
- p.043R - vue 97/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- 33
- ROBERT VALTVRIN
- & de pais eftrâge.Il en eft qui aiouftét tout l’ordre de chcualerië,autres qui toute l’affembléedu peuple ependuë autour du Sénat. C’eft fans point de doute vn cas bien excellent, laborieux,& diligent, & ne fuft il venu à Rome pour autre choie. Au iurpîus combien que Cyrus roy de Perle euft vne bien crroife armée, il luy iouuenoit toujours des noms de tous les foldatz. Finalement Mytridate, comme il ièmble a A. Gellius autheur des nuidz Attiques,iàüoit,comme Ion dit,vingt & cinq langues,ièlon Pline vingt & deux,& ièlon Ton arriéré fils au Iiure intitulé des homes renommez, les lan gués de cinquante nations eftans fouz Ton Empire: faiiànt a chacune iufti-ce en fa propre langue : ôc qu'au furplus en les harengues faides à elles il ne vfoit point de truchement, qui eftoit vn cas qui rendoit Cyrus aggrea'ole aies foldatz,& ceftuicy afes peuples.L’intelligence confifte en la cognoifi fance des chofes prefentes, de laquelle le Chef qui en ièra proueu fie me ièmblera point digne de gloire empruntée,mais de la vraye, & immortelle . A quoy conuiendra bien ce qu’Accius dit louant Vliifes en ion Philo-dete, ôc au commancement de là tragédie.
- O le bien glorieux nay depetit pais,
- D 'vn nom fortrenomme\&‘ dufii d'vn cœur noble De l'ame'e de mer Achiue dutheur,(pr grief Vengeur fur les trojensfifils de Ldërtes.
- Il nomme en derrière ion pere : Laè'rtes touteffois, ny autre ne fattribuë rien de toutes les louenges : ce que tant ièulemét fait la vertu compagne de ce Capitaine.Ny n’enièigne Homere autre choie en çeft Vliifes,auquel il a toufiours voulu la prudece faire côpagnie, laquelle il a a la coutume poétique appellé Minerue,d’autant que iouz ià guide Vliifes a entreprins choies eipouuatables,& a vaincu toutes auerfitez.Par fon ayde il effc entré dedas la Cauerne de Cyclops,& en eft refforty, doublant les bancs de Barbarie, ny ne fut retenu,ne efchappé.Il alla aux Lotophages,&n’y eft pas demeuré:il a ouy les chantz des Syrenes, ôc a cogneu les breuuages de Circes, leiquelz Ci amiellé il euft beu auec fa compagnie corne fol ôc conuoiteux,il euft efté fubiedàIaputain comme villain ôc lâche de cœur:il euft veicu en ord matin & pourceau amy debourbier,comme dit Horace.Maro aufti imitateur d’Homere en toutes chofes,& dépeignât vn homme renommé d’armes, ôc iècourabIe,& qu’il a eftimé digne d’eftre pere des Romains,luy baille Acha tes pour compagnon en toutes iès entrepriniès, â celle fin que d’vn Capitaine bien auiie tous les affaires ibyent fi bien conduidz,qu’ilneibicfur-prinsparrufes&fineifes,&quaficôme inuinfible il vienne â la fin de ion intetion par vne voye inufitée des choies qu’il a à faire.Ce qu’il fait de bonne grâce : attendu que l’art militaire, ôc 1 euure de iàindeté ne Ce peuuét pas exercer fans folicitude & prudencedaquelle il nous a ièmble bon d’encorcs diuiier.il eft de vray vne certaine maniéré d’homes merueilleuièment propre â apprédre lettres, lefquelz pour l’excellence de l’efprit nous appelions plus communemét ingénieux, combien qu’es euures humaines ilz ibyent
- quelque
- p.043V - vue 98/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 44
- quelque fois de moindre viuacité d’cntendementdâ ou autres au contraire font merueilleufêmét vifz a mener la guerre qui toutcIFois font inhabiles à apprendre lettres, lelquelz on n appelle pas fins railbn figes, bien auifèz, prôptz,ôe aftutz,aufquelz eft bien feantc la plus grade partie des fai&z que les Gréez appellétStratagematiques:lâou en menant la guerre, l’auisprins fur le chap lêlon la neceffité le met en execution.Mais d’autat que cela ne fè vuyde pas fans peines,quelque autheur elegât en la langue Romaine a dit: il n au oit pas toutefois faute de malice ou rulè pour Ce côtregarder. Salufte aufti dit qu’il eft tout manifefte que l’entédemét peut beaucoup en guerre. Or eft il que fi nous voulons bien iuger fins nous trôper pour nous copiai-re entât que nous touche la viuacité ôc prudence, nous verrons manifefte-ment que noz téps ne quadrent pas au pafle,finon que par auanture le téps prefent puiffe mettre en auant quelques vns égaux à Pyrrhus,Hannibal,ou à Fabius Maximus,ou bie à Marcel,ou àlulle Celàr. Au demeurât la proui dence entre en régné lors que le téps de l’effeét d’vne entreprinlê Ce mene à la lôgue,laquelle eft la tierce partie de prudece,par laquelle le prêtent n’euft: point plus que le futur par vne conférence des chofes pretentes & paffées. S’enfuy t apres la force mefmement conuenâte â l’homme de cœur,laquelle confifte en deux membres. L’vn eft au cœur d’ont par cy apres il nous faut parler,& l’autre au corps,fouz Iaquelleeft contenue la vigueur des mébres, l’agilité,6ebonté des cinq lêns.Vn Capitaine de vray debile quoy qu’il foit entendu, ôe propre aux charges de la guerre debatra mieux des affaires, ôc plus commodcmét en la mailbn qu’au camp,corne qui eft bon de côteil,ôc non de côbat. Quj fut vn cas qui rédit le fils du grâd Africain inhabile aux armes,eftant en grâdeur de cœur égal â ion pere, ôe d’vne plus excelléte do-étrine. Au côtraire aufti l’homme membreux eftât aggraué d’vne trop grâ-de maffe de corps, ne pourra bien foudain fe trouuer en diuers lieux, pour quand l’affaire le requerra donner cœur aux fîens,repoullèr lesennemys: aufti ne pourra pas Paueugle, ne le fourd vifiter Ion camp, ou celuy des en-nemystout autour: ne iuger par les voix ôe cris diuers desfoldatz que ce peuteftre,nequ’ilenauiendra.Onditque le fort de membres eft propre à mener armée, faire degaftfur l’eftranger, rater les villes, ruiner les bourgades , tuer les peuples libres, ou les réduire en fèruitude, duquel le nom fera de tant plus renommé comme plus d’hommes il aura tormenté, (polie, & fait mourir, ôc aura inondé le païsde (àng, ôcteinéfc les riuieres, ôc comme plus hautes auront efté (es entreprinfès . Pour laquelle vertu Pyrrhus a eu grand renom entiers les eftrangers : aufti a eu Hannibal, ôc Mafiniffa. A u regard de ceux qui Ce glorifient d’vne prodigicute apparence de forces. Polydamas, ôc Milo vainquirent en toutes luytes en emportant la viétoyre : delquelz l’vn a eu de coutume auant le combat Olympique d’arrefter vn chariot en (à courte, ôc de le retenir à force de mains contre l’effort des Cheuauxd’au tre demouroit ferme fur vn bouclier oinét,duquel non feulement on ne le pouuoit faire par aucune force déplacer,mais
- Hij
- p.044R - vue 99/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- d’auantage il refiftoit tout ainfi qu’vne ftatuë fichée en pIomb.Nouslifons auffi d’vn certain Tritane, lequel en vnieu gladiatoyre des Samnites vainquit tous les ennemys d’vne lcgere touche: & que fon fils foldat de Cn.Pô-pée dédaigna tant fon ennemy l’appellant au combat,qu’il le défit du bras dextre nud,& le trouvant d vn doigt il le tranfporta au camp de fon Capi-taine.On dit aufli que Firme Saturnin fut fi robufte qu’il paffa en force Tri tane pere de ceftuy cy,d’ont Elius fait mention, par vne force prodigieufè. Il porta de vray conftamment vne enclume pofee for fon eftomach, veu qu’eftantrenuerfé&courbéfurfosmains,&dos,ilcftoitplusveritablemét enleué que couché. Au regard de noz Roys, & Capitaines. Tulle Hoftile Roy des Romains, & les deux Africains, Marin, & Marin le Tyran, Iulle Cefar,& finalemët Papyrius Curfor, & Maximus ont efté en grâd renom, defquelz Papire a prins ifon fornom de là vifteffe,& l’autre pour (à force,veu qu’aucuns l'appelloyent comme ce Milon de Crotone, & les autres Hercules, les aucuns Antée.ll refte maintenant que nous parlions de 1 autre efpece de grandeur de cœur,le deuoir de laquelle gift mefmemet en vn dédain de mort, & de douleur, & des chofes difficiles & terribles.Et combien queplufieurs des Capitaines la penfont eftre la propre vertu des gens de guerre, veu quelle eft commune à tous hommes, elle fo montre touteftois plus apertement en guerre entre les coupz, & mortz. De laquelle vertu Ro me a efté par fus tous autres l’habitacle inuincibleje plus approchant a efté Lacedemon,& Carthage.Et entre lesnoftres fioffre premièrementCato prince de IafàpienceRomaine,commeforpaffant àlauisdeplufieursfages tous autres,en enfoyuant,cômc ie croy Cleante, Chryfippe,Zeno, & Em-pedocle,defquelz tous, combien que pour vne autre raifon ont offert de leur bon gré leurs teftes à la mort,côbien qu’autres de grand entendement & fauoir ont opinion qu’elle ne fc trouua point en Cato,& qu’au contraire il perdit le cœur, veu que le propre de cefte vertu foit de ne foublier point, nelavoye droiéte de raifon, ne de pareillement fe troubler, ne éperdre es groz affaires,mais plus toft y perfifter : difans que la force n’eftoit pas cefte autre vmbratile, laquelle comme vnmonftre fefforce contre nature,for-tant hors fès limites par vn epouuantement de cœur, ou bien d’vne cruauté ou fureur,corne a efté(ainfi que nous lauons entendu) vn certain brutal gladiateur au icu de Cefàr,lequel corne les médecins incifoyent ces playes, tint le vifage tel,que par vne vi&oyre qu’eut la ioye for les douleurs, il mo-troit vne contenance riante:au côtraire ilz dient cefte la vraye ôc bône que Socrates,& noz anceftres ont dit eftre la foiëce des chofès tollerables, ôc nô tollerables : parquoy il eft manifefte qu’aucunes chofès font intollerables, lefquelles les hommes de cœur ne peuuent fouffrir,ne endurer.Or entre les noftres Iulle Cefàr,d’ont nous auons fouuét parlé ôc parierôs,fe prefènte cô me doué d’ellerauffi font les deux Affricains,ôc autant de Paulz,qui font le Macedonique ôdeCanenfe,Claude Marcel,ClaudeNero,TyberiusGrac chus,C.Marius,& IesCefàrs,Drufos,&: Germanicus, auffi font les princes
- Tite
- p.044V - vue 100/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 45
- Titc & Traian. Au regard des plus anciens le premier, & le tiers roys Romains, aulïi Orace Codes de l’ordre des cheualiers, auec L. Siccius le deté,. M.Sergius Tribun de la cômune, & autres innumerables, fi on les veut re-cercheroarle menu,veu qu’vne nation feule en a eu plus d excelles en toute maniéré,que le refle du mode. Au regard deseilragers,ily a eu Leonides Lacedemonien,Milciade d’Athènes,& les ia cy deffus nômez Temillocle, & Epaminonde,&entre les plus anciens Liber,Hercules,Thefée,Achi]les, Heclor,Tydée,Diomede,Aiax,ôde Vergilian Enée:aulïia-il Hânibal, & fon pere Amilcar, auec fon coufin Hafdrubal, Alexandre de Macedoyne, fon pere Philippe,& fon oncle Alexandre de l’Epire.Pyrrhus aulïi Roy des Epirotes duquel n ous auôs ia parlé. Outre plus entre les Hebrieux Dauid, Iofué,& depuis Iudas. Au demeurât ie fuis certain que côbien qu’Ariftote ait préféré celle vertu la,que ie lêmbleray a aucüs auoir peruerty l’ordre mo raides vertuz, non feulement en tenant la prudence de leur nombre, mais aulïi en préférât la force militaire à la iullice : veu que bien louuét la iuflice ell tenue plus excelléte, & plus perfaitte vertu au pris des autres: & nô fans caufè.-fachez touteffois que cela ell faid: tout de gré. Car la force ell le propre de l’homme, lèule malle entre les autres, pleine d’elprit,de vigueur, &c de cœunau demeurât il ell manifelle par l’auis d’Arillote quelle ell la plus honorable de toutes les vertuz par cela,non pas quelle foit meilleure, mais pour les choies qui font en elle tref bônes,& vtiles,& pourtât voyons nous les images des Capitaines trepalfez ellre parée prelques d’vn accoutrement de guerre, & les obelilques,coîumnes,pyramides,& arcz triumphans dref-fez,& confierez a la pollerité, quafi que ce loit choie fort excellente auoir ellé renommé en celle façon de louenge,& vertu. Et combien que la force conlèrue principalemét 1 alfemblée des hommes,aulïi ne fait pas moins la iullice maillrelfe & royne de toutes les vertuz: laquelle aulïi peut eûre elli-méepropre aux Chefz,d’autat quelle lèmble gouuerner les peuples,qu’elle garde les confédérations de la focietéhumaine, & quelle amonelle de gar der la foy non lëulemet aux amys,mais aulïi aux ennemys. Et côbien qu’il n ell rien en la guerre plus vtile que la fraude,ne de plus grad efficace que le dol es chofesqui lèlbntvuydées es guerres, d’heur,& à fouhet, &que tu trouueras en bon nombre,& grandes,pour lefquelles aulïi il faut quitter la charge de Chef,ou là faire auec lès rufesril en ell touteffois qui le côlians de celle fentéce de Xenophon,au liure qui fintitule Le Chef des gens de che-ual,penfènt leur ellre licite non feulement tromper l’ennemy,mais aulïi de prier les dieux immorteîz que faire le puiffe,& de l’efforcer de toutart, frau de,ou vertu fuyuat l’auis de Corebus dedans Virgile en celle nuiélée la tât milêrabîe de la prinle de Troye,dilànt apres la mort d’Androgée.
- Changeons donques no% efcu^ & prenons comme amjs
- Les hurées des Grec~:car qui querellera
- Soit laforce tou le dol qu on drejjeattx ennemys?
- Et combien au’il en foit qui elliment deuoir ellre detellé en tout temps
- H iij
- p.045R - vue 101/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ce changement de boucliers,&: d’autres choies dilàns auoir efté le did d’vit ieune home,& non pas de ce tant graue poëte,qui eft vn mal d’ancienneté & de noftre temps: car Toit que ce Toit la beftifo des Chefz,ou l’infolëce des lôldatz, ôc vne rage d’auarice, ces deux auiz doyuét eftre extirpez du cœur des capitaines &foldatz,à celle fin que la foy Toit gardée a l’ennemy, Thu-manité àl’amy,&: la iuftice aux vns ôc aux autres : ny ne nuyfe a l’ennemy, linon en gardant le deuoir, ne iamais a l’amy. Mais quelle chofo peut eftre plus infâme, ou bien plus mefohante que d’oftenfor ceux pour la tutelle ôc defenfo delquelz tu es appelle,ne qu’aufti d eftre faid d vne garde,rauifleur, & d’vn chien,Ioup?Fabrice,Camille,& Régulé ont efté fort renommez,& louez en cela,delquelz les deux premiers pouuas vaincre par dol, ne le vou lurent faire, le tiers eleut plus toft mourir cruellement que de porter dommage au païs,ou de faillir de foy a l’ennemy.Mais entre les gardeurs de foy à l’ennemy Caflin ne doit point eftre oublié: quant a l’autre ceux y font comprins, lelquelz ont eftimépeu de chofe fabftenir d’outrager fes amys, fi d’auâtage ilz ne mouroyent pour eux. Entre lelquelz fe prefontent auant tous Curie ôc les deux Decies a Rome,& a Athènes Codre,& les deux Phi-leinsfreres a Carthage: delquelz le premier lefeitpourappaifor l’epouuan tement du peuple, les focondz pour afleurer la vidoyre ôc l'armée ia branlant,le tiers pour deliurer la ville d’vne ruine prefonte,Ies quatrielmes pour etendre les limites de leur païs font allé a vne mort voluntaire, quittans leur vie pour l’aile de leurs citoyens. Mais Pompée le grand a eu les deux: combien que Cicéron compare a ceftuy foui toutes les louenges de guerre, ôc toutes les chofos dont ont befoin les Capitaines pour eftre grandz, que nous auons did ou à dire : ôc ce à bonne raifon ôc à bon droid.Mais fil en eft a qui on face raifon du lien, la iuftice auec la continence cogneuë entre les vidoyres&triumphes, laloucnge de guerre deuë a Pompée, laquelle doit eftre referée à la vertu,dont ores ie commenceray le propos,en y aiou-ftant vne chofo qui maintenant concerne la iuftice, c’eft que la beneficen-ce ôc libéralité font robbes tref-belles des Chefz ôc Capitaines par lelquel-les on peut couurir beaucoup d’imperfediôs: par laquelle Iulle Cefar pâlie tous en gloyre,iamais home de vray n’vfa (fil me fouuiét bien des parolles de Senequejplus libéralement de la vidoyre,dont il n’a rien prins linon le pouuoir de la diftribution. Quant aux forains Alexandre tient le premier lieu,ne ny côtredifont les noftres, combien que Philippe pere d’Alexandre cerchant la bienueillance des Macédoniens par largefles, a blalrné en luy 3» celle façon de prodigalité,dilânt ainli: Quelle raifon (dit iljt’a mis en celle 33 elperance que tu penfos ceux t’eftre loyaux,que tu as corrumpu par argent? 33 Le fais tu-a celle lin que les Macedoniés ne te tiennêt pour Roy,mais pour 33 vn foruiteur,& delpëlier?Qui eft vne chofo que tu entens bien eftre infâme 33 à vn Roy, ôc eftre plus toft dide corruptible que largefte, car ceîuy qui re-33 çoit en deuient touliours pirc,& toujours plus preft à melrne attente.Que 33 peux tu faire plus follemét, que de te trauailler à ne pouuoir faire plus longuement
- p.045V - vue 102/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. \è
- „ guemét ce que voluntiers tu fais?les rapinesfuyuét Ieslargeffes demcfùrées, „ car quad en donnant tu comméceras entrer en indigéce,tu fèras côtrainét „ de ruer fur le bie d’au truy,& pourtant corne tu fois prodigue pour t’acque-33 nr vne bien veillâce,tu ne t acquerras point l’affeétion fi grade de ceux au-quelz tu auras eflé liberal,que tu ferasaehayne de ceux que tu as dépouillé. Parquoy il ne faut pas tenir fon bié fi enferré que la libéralité ne le puifTe é-largir,ny dire fi ouuert qu’il foit cômun atout le mode: mais faut tenir par tout moyen,qui fè doit mefùrcr félon la puiflance.il me refie maintenir la quarte qui efl la modeflie qu’on appelle l’attrépence, a laquelle efl côioin-Cte celle qu’vn peu au parauant i’appelloye continéce: fans laquelle ne fefl point trouué(ie ne dy pas vn bon capitaine)mais tant féulemét vn homme de bien.Or comme le propos foit maintcnât des chefz, dequoy leur fèrui-ront l’eloquence, & la cognoifTance des lettres? dequoy auffi la magnanimité ne toutes les autres difciplines des chefz, fi vn capitaine efl fèrf de 1 a-uarice, de la couuoitifè, ou gourmandie, en abandonnant le frein duquel il doit manier vne armée?il fe pert auec les légions, & les attrait a vne pefle dont plufîeurs fè font ruinez auec toutes leurs forces? Voyla dôques la vertu propre & finguliere de Pompée, en laquelle fi fon collegal Craffus l’euft voulu^nfûyure il ne fufl pas mort auec fon filz, ny auec vne fi grande ruine de l’Empire. Le temple tant riche de Hierufàlem témoigné celle continence d’vn capitaine des Romains, auquel Pompée n’a point touché, Sc l’autre l’a fpolié: affez d’autres choies le témoignent, vne partie defquelles font déclarées par Cicerôdes parollcs duquel ie mettray icy en auant. A ces autres faccompagne vne gratieufèté, douceur, & facilité de nature en laquelle l’Affricain &lulle Cefàr font excellensrnyn efl rien de plus grand efficace pour gaigner les cœurs des hommes. A elle efl conforme vnecer-taineegalleté, &: familiarité auec les fbldats, qui efl vne choie qui rend le plus les gens de guerre affectionnez à leurs chefz. Laquelle ont notoyre-menteu entre les noflres, Valere, Coruin,& Marin: & entre les eflrangiers Hannibal. Ces moyens donques refrenent les gés de guerre, & les fubieélz par bienveillance & amour, tout ainfi que leurs contraires fèuerité, & arrogante puiffance. Pour lefquelz Marc Curin, & QjCincinatus, & Papi-rin le coureux, & Fabius Maximus ont eflé renommez : pas vn deux tou-teffois n’a eflé en cela pareil à Brutus, ne a Manlius Torquatus. Le premier defquelz l’amour de la liberté commune a emeu de trencher les telles a fès propres enfansapres auoir eflé fufligez en fèrfz,pour autant qu’ilz tenoyét le party du tyran qu’il auoit chaffé. Au regard du fécond l’affeétion qu’il portoit a la difeipline militaire le força de faire mourir fon filz hômeieu-ne, & d’vne efperance grande, quoy qu’il fufl vnique & vainqueur, pour auoir fans fon congé couru fus àl’ennemy. On Iuy accouple auffi pour cô-paignon d’vn faiét par trop féuere Poflhumin Tyburte, duquel i’entens auoir fait le récit pour plus tofl ne fèmbler l’auoir omis, que de vouloir affermer vn fi grand cas. De vray quelques vns des hifloriographcs letien-
- H iiij
- p.046R - vue 103/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- lient pour vray, les autres font cloute furlebruyt qui en court. A tout ce grand nombre de vertu on aioufte la patience, & en beaucoup de fortes: elle porte de vray de bon cœur les douleurs du corps, vne autre porte les parolles outrageufès quafi comme vne playe en l’oreille & au cœur,l’vne & l’autre font necelfaires aux chefz, & aux folicitudes de la guerre. A la vérité aufïi la première concerne la confiance, & la fécondé la ciuiliré, & celle modellië dont il ell propos.Quant àla première Mutins, & Marin, &: Pompée en font eflimez, aulïi efl vn certain Attilius foldat de Celàr co-gneu à Marfèilles, &M.Sergius auec fes compaignons d’ontnous auons parlé. Quant aux forains Cynegirus Athénien ell en grand bruyt par les hilloyres Grecques. Au regard de la féconde,les Empereurs Iulle Celàr, &Augullelcs font entre les nollres, ôc entre les forains, Philippe & Antigone Roys de Macedoyne, & Pyhllrate Roy des Atheniens.Finalement Pompée furpalfe les nollres,& les ellrangers, ou bien il les egalle.Parquoy ie me perluade de mettre icy le propos au parauant prins par moy que M. T.Cicéron a tenu en vne oraifon qu’il a faiét de fon Empire, & de la continence des Capitaines & chefz, & de ces autres quatre que nous recer-chons en vn chef, lequel comme i’elperefô Prince trefclemenc & inuinci-» ble)teléraproulîtable, ouplailànt. Ces vertuz(ditil)ne font pas léiflesne-)} celfaires au chef que communément on loue, comme le trauail es affaires, 3> la grandeur de cœur es perilz,I’indullrie en fés euures, la diligence en l’exe-3> cution, le conléil en la prouoyance. Puis fubléquemment, il n ell ia befoin 33 decercherla vertu de mener la guerre feulement en vn grand & perfait 33 chef d armée: il y a d’auantage plufieurs ars excellens, féruans & copaignes 3> decelle vertu: mais de quant grande innocence doiuet ellre les chefz d’at-33 mées, de quant grande aulîi attrempence en toutes choies , de quelle foy, 3> de quelle facilité, de quel elprit, & de quant grande humanité-.puis bien 3j tofl apres. Qui ell celuy qui ignore, quant grandes calamitez ont enduré 33 noz armées quelque part quelles fé foyent rencontré par celle auarice des 33 chefz? Souuienne vous des voyages qu’ont fait noz chefz d’armées ces der-33 niers ans en l’Italie parchamps,par les bourgades des citoyens Romains, 33 comme vous ordonnez facilement ceque vous eflimez deuoir ellre faicl 33 aux nations ellranges, penfez vous qu’il y ait eu plus de villes enneinyes 33 ruinées ces ans palfezparles armes de noz gens de guerre, ou bien plus de 33 celles de nozalliezen leurs garnilos? Croyez que le chefqui ne lérefreind, 33 ne peut pas refréindre vne armée, ne celuy aulîiiugerfeueremét,qui d’au-33 trüy contre foy ne veult le iugement leuere. Apres ces chofes diéles retour-33 liant aux louenges de Pompée: aulîi nous emerueillonsnous(ditil)dePex-33 celle n ce de ce fl homme par lus tous autres, les légions duquel font arri-33 uées en Afied’vne telle ficonde vie, qu’on dit que non feulement celle fi 33 grolfe armée-n’a frappé aucun homme pailîble, ne melmes fait de lém-33 bîânt. Au demeurant nous auons tous lesiours rapportz & lettres, com-33 mequoyles fbldats hyuernent, là ou non léulement on ne forceamede
- faire
- p.046V - vue 104/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 47
- „ faire la depcnce à l’homme de guerre, mais encores moins le permet on à quiledefire faire. Nozancellres devray ont voulu que le refuge aux mai-„ fons des alliez & amys fuit pour l’hyuer, & non pour l’auarice. Quant au }) relie fconfiderez quelle cil fon attrempance es autres choies, d’ou penlèz „ vous auoir elle inuentée celle tant grande diligence, & courfe tat incroy a-., b le? Croyez que la grade vigueur des rames,ne quelque art de pilote admi-„ rable, ne les ventz ne l’ont pas filegerement tranfporté au bout du mon-., de, ny ne l’ont retardé les choies quiont decoutume d’arreller les autres, „ nyl a lauarice détourné de Ion voyage délibéré, a quelque pillage, ny fon „ plaifiràla volupté, ny laplailanceàladele&ation, nylanobielfede la vil-„ le pour ellre cogneu,ny finalement le labeur aurepos.il n’apastrouuébon ,, de tant lëulement voiries bronzes, tableaux, ne autres paremensdes vil-„ les Grecques, qu’autres penlènt deuoir eflre eleuées. Et pourrai tout le pais „ auiourd’huy regarde Pompée comme tumbé du ciel, & non comme quel-„ qu’vn enuoyé de celle ville.Finalement îlz cômencent auiourd’huy croire „ que les F^omains furent iadis de mefmeabllinence, cequeialêmbloitaux „ nations ellranges incroyable,ell faulèment diuulgué: auiourd’huy la gloi-}} rc de nollre Empire ell manifelle à ces nations la, à celle heure cognoiflent „ ilzque non lans caulê leurs ancellres ont mieulx aymé lêruir au peuple }) FvOmain, quederegner, lors que nous auions nozMagillratzauectoute „ attrempance. Au furplus les perlbnnespriuéesontraccesàluy tant facile, „ on dit aulïi que les pleintes des outrages y font lî libres, que celuy qui pafi ,,feles princes en dignité, lèmble ellre égal en priuauté auecles moindres. „ Vous voyez au demeurant Meilleurs les Quiriteslbuuenteffois en ce lieu 33 dequelbonconlêililell, & de quelle grauité & abondance d’eloquence, 33 lequel melme montre de foy vne dignité d’Empereur. Mais quant grande 3) penfez vous là foy ellre ellimée entre les alliez, laquelle les ennemys ont iugé la plus fainéte de toutes les nations? Or eftil fi humain, qu’il ell bien 3} difficile de dire fi les ennemys ont en combatant plus craint là vertu, que vainqueuz aymé là douceur. C’ell ce que dit Cicéron, de la boutique duquel i’ay voulu mettre en auant ces fi grandes do&rines des chefz & capitaines d’armées, parce que iene fçays’il ell aulïi bien quelque autre parc elcritplus amplement ne mieux de leur bonne & excellente façon de vie. Il relie l’authorité qui s’engendre melmement des choies lùlciitfLes : le renom. de vray l’augmente de l’opinion des hommes conceuë des vertuz, & de la prolperité des chefz. En quoy Iulle Celàr, le plus grand Aphricain aulïi, & le grand Pompée ont ellémerueilleulêment renommez: &aellé leurauthoritéfi grande, & la fiance des loldats loubz eux telle, qu’ilz ne penlôyent point aller à la bataille & au péril: mais à la viéloire, Sc dépouillé des ennemys.D’ont il n’eft rien plus vtile pour les euenemens de la guerre defirables & prolperes.-lefquelz on a fouuen t trouué ellre tournez au cô-traire, par la défiance des combattans conceuë de la legereté , & ignorance des chefz. Finalement l’heur n’ellpas feulement a délirer en la guerre,
- p.047R - vue 105/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- mais auffi en la vie. Toutes choies de vray fe rapportent la: ny n’eft aucun qui le le puifleliurer, ne l’augmenter: c’eft fans point de doute vn don de Dieu qu’on doit eftimer lî neceflaire à vn che£que lî ce lèul luy defaut, on ne fera point d’auis de le choifir quoy qu’il foit fleuriflant en toutes choies: car la paour des foldats dont il n’eft rien plus prochain de la mort fuit le malheur d’vn capitaine,tout ainli que leur fiance, lôn bon heur. Si eft ce que Tite, Traian, Theodofius & SiIla,ou bien comme le bruyt'court Me-tel furnommé bienheureux paffent tou s autres. Et combien qu’a l’opinion des Philofbphes, ça bas ne fbit aucun heureux ,1e propos toutefois eft touchant l’heur de la guerre, d’ont nous difons lechcf bien heureux, qui a de coutume de vaincre, & n’eftre point vaincu. Du nombre defquelz eft Alexandre de Macedoyne, entre les forains, & Cyrus Roy de Perle s’il n’euft point fait de voyage en Scytie.-aufti eft Hannibal chef des Cartha-ginoyz s’il euft creu à Maharbal, ou qu’il fuft vnpeu plus toft mort.
- DES VIZ DES CH EF Z U ARMEES,
- que les Gréez appellent Stratagème s > & des propoz difiz auant, durant,
- & apres la guerrefagement^e bonne grâce & rencontre. Chapitre II.
- [Près ces elpeces de vertuz, &les deuoirs des chefz de guerre^ Med defquelz eft certainement grad,nous dironsfublcquem-mentles railons, & exemples promiz des fentcnces,tout ainfi que des proueflès, pour rendre fage vn capitaine general. Pour la plus noble & plus excellente defquelles lèramilè en premier lieu celle qu’Ariftote a vfurpé de Hefiodc, & Tite Liue de Heziode ou Ariftote,lors qucM.Ruffus Minucerecogneutauoirefté fauuéauec fon armée par Fabius Maximus. C’eft que premièrement celuyeft Capitaine trelèxcei-lent, & premier entre les hommes, qui preuoit & conlidere ce qu’il a a faire: & en fécond lieu fera celuy qui fuit vn bon confeil : eftant au contraire celuy dvn bien pauure entendement & inutile, qui ne fcet donner con-lèil aux autres ne le receuoir.
- Vn certain Gymnofophifte d’vn elprit vif & lûbtil pour repondre en peu de parolles, in terrogu épar Alexandre par quel moyen vn grand Empereur pourroit s’acquérir vnc grande affedion, répondit, qu’il ne fuft point terrible. Puis eftant de rechef par luy interrogué, comme quoy vn homme mortel pourroit eftre rcccuau nombre des Dieux, s’il fait(diftil) euures plus que humaines.
- Comme vn certain Athénien reprint par moquerie les elpées Laconiques pour eftre trop courtes les difànt pouuoir aifément eftre englouties parles baftelleux ftir les théâtres, le Roy Agis dit, àpeinetouteftois Pommes nous atteins de celles des ennemys qui font plus longues. Quanta moyieconfiderc que le langage Laconique qui lèmble eftre brief, comprend grandes fubftances, & qu’il atteint l’entendement des ecoutans. ,
- Comme
- p.047V - vue 106/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 4g Comme Cyrus eut entëduqu’vn cêteniermenoitaufouppervn certain Verti Polder fort pellu,Sc richement laid, le faifant feoir auprès de foy il i’appella ^ par Ion nom . O Sambaoie t’accompagnes tu pas deceieune homme, qui diaCyri; mange auprès de toy pour fabeauté à la coutume des Grecz?Oy fans point de doute dit Sambaoie: ie m’en reiouy donques aulïi qui Elis du banquet,
- & en ay la veuë. Alors toute l’a côpagnie le regarda s’esboufant de rire apres auoir découuert fa fi laide face.Et comme quelqu vn luy dift,dymoy pour Dieu ô Sambaoie de quel moyen t’a enchanté cefl homme?Lequel relpon-dit. En bonne foy ie 1e vous diray mes amys. Toutes les fois que ie l’ay appelle fuftiourou nuyt, ilneseft iamais excufé, ny n’a iamais obey lentement, mais toujours decourfe. Ny ne l’ay iamais veu rien faire lànsfueur de ce que ie luy ay commandé, & que d’auantage ilauoit rendu les compagnons de guerre diligés a Ion exemple. Ce Cyrus aulïi a d’auature aiou-Ee cefte inuention a la grandeur de fon Empire, qu’il fauoit incontinent ce qui le failôites plus elongnées contrées. Sachant de vray combien vn cheuaucheurpouuoit faire de païs iour ôc nuyéf, ôc les ordonnant arelais, afin que l’homme frais receuantles lettres couruftpour le lalfé, il fauoit en diligence ce que le failoitpar tout, &y nouruoyoitfélon que laneceflité le fèmbloit requérir. Et pourtat cela a elfe caufê(quoy qu’il foit bien effra-ge de la verité)qu’ilz fèmbloyét faire leurs voyagesplus ville que les grues, ôc a cela eftécreu pour la grande diligence des courriers.
- Aefchile regardant vn combat en l’iEine, la ou tout le theatre felcria elfantl’vndes combattans blelfé, pou lia Ion de Chios voys tupas(dilfil) que c’ell que de l’exercitation? Le blelfé le taift, la ou l’alïiftance s’elcrie.
- Agelilaus interrogué par quel moyen les Lacédémoniens lèroyent victorieux. Sivn chef bien apprins menoit leurs affaires, diftil. Eftant derechef ce capitaine prelênt quequeîqu’vn lëplaignoit que les Lacedemo-niens n’auoyent point de murailles. Parlemieulx(dillil)les bourgeoys de nollre ville lontrempars inexpugnables. Ileftbienraifonnable de défendre & garderie païs, les Dieux domeftiques, les autelz, maifons, parens, femmes ôc enfans parvenu, ôcnon de boys ne de brique.
- Comme Bralîdas eut prins vn rat dedans vne ligueraye, il le lacha pour vnemorfure, puis le retournant aux alEftans ildit.Surma foy iln’eErien lî petit, ne fi foible,quine lèpuilfeconlèruerla vie, s’il oie le venger, & le defendre contre les alfaillans.
- Chabridas auoit de coutume de dire qu’vne armée de cerfzloubzlacô-duited’vn lyon elloitplus à craindre,que celle de Iyons loubz la charge d’vn cerf. Ildiloit aufli que celuy feroit bien la charge d’vn chef qui fauoit les entreprinfes de l’ennemy.
- Comme Sc-lbllris Roy des Egiptiens eut réduit a Ion obcilfance les peuples Maritimes de la mer rouge, ôc qu’il eut à ton retour par terre lubiugué toutes les nations qui luy donnoyent empelchement,il drelfa des colum-nes en chacune des régions qui luy auoit femblé coüragcufe, ôc aymant
- p.048R - vue 107/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- la liberté,efquelles il graua Ton nom, celuy du païs , le membre virile dvn homme, & comme fa puiflance les auoit vaincu: au regard de celles qu’il auoit fubiugué fans coup férir, il y adrelfe aufli des columnes,enygra-uantles noms, & la nature d’vne femme.
- Comme deux lignes! vn de paix,& lautre de guerre eulfent efté prefen-tez par les Carthaginoiz à. Q^Mutiuspourlors Ambafladeur pour les Romains enluylailfantlechois d’emporter celuy qui bon luy fembleroicau Sénat & peuple Romain: les tenant toutes deux il dit que c’eftoit aux Carthaginoiz de demander, &non aux Romains celuy qu’ilz vouloyent.
- Au contraire Q^Fabius chef des Romains enuoya en melme forte des lettres aux Carthaginoiz elquelles on peut apperceuoir que de ces deux peuples l’auisjla vigueur,& la puilfance ont anciennement efté égalés. Car comme elles continlfent que le peuple Romain leur enuoyoit le pointon, & le Caducée, qui font deux lignes de guerre & de paix, pourelireeeque bon leur lèmbleroit,& qu’ilz eftimalfent celuy leur eftre enuoyé qu’ilz éli-royent, les Carthaginoiz repondirent n en vouloir point elire: mais qu’ilz eftoyentenl’auis de ceux qui les auoyent apporté, de lailfer celuy qu’ilz voudroyent, Ietenans pouraggreable. Et combien que ces choies foyent eforites par trelèlegans hiftoriographes, M.Varrotouteffois autheurtref-veritableneditpas que le pointon ne le caducée ayent efté enuoyez,mais deux tablettes en l’vne delquelles eftoit grauée l’image d’vn caducée,& en l’autre celle du pointon.
- Comme le chanure & les nerfz defaiililfent aux Carthaginoiz pour tirer fléchés, ilz le font aydez delatonture des cheueulx de femmes pour faire des cordes, ce que quelquefois a efté faidparceuxdeMarlêilIes, par les Rhodiens, & Aquilegenles, & par les Romains afliegez au Capitole, eftant Rome prinlê par les Gauloys .-dont en l’honneur des matrones le Sénat ordonna vn temple à Venus la chauue.
- Comme les Quintes Ce fachaflcnt du trauail & du péril, Tarquinius Prifcus inuenta vnnouueauremedeauparauantincogncu&bonàl’aue-nir. Il commanda de vray d’attacher en croix lix carnages d’homes mortz a la veuëdes citoyens, pourauforplus eftre demembrez par les belles làu-uages & oylêaux. Parquoy la reuerence du nom Romain, laquelle au pa-rauanta fouuételfois regangnéles batailles perdues, fut lors de grand fe-çours :veu que la honte les faifit comme li les mortz l’euflent à foufrir.
- Corne Cecilius Metellus Proconful nepeuft réduire àfon obeiflance la Trebie capitale ville d’£lpagne,&qu’ilcampeiaparcy & parlaauecfon armée, alfaillant puis les vns, puis lé tranlportant aux autres, & qu’vn icu-neTribun de gens de guerre luy demandait àquoy tendoit ce remeuemét de camp faiétfi fouuent : Si ie péfoye(dit ïljque celle miëne chemife feeuft mon intention,ie la depouilleroye & ietteroye incontinent dedans le feu. Parce moyen d’vn commencement bien fortuné, & apres tant de chemins faiélz, & auoir efté par tant de diuerlès villes libres,il retourna à Tre-
- bie
- p.048V - vue 108/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 49
- bis par furprinfe, &Iaprint venant about de Ton dcfir, qui ne fut pas fans grande admiration de tout le monde.
- Scipion qui fut le premier furnômé Aphricain difoit corne dit Valerele gradjOU bie Fabius Elô l’auis de SeUeque,que l’excufe d’vn Capitaine d’armée eftoit infime,& pleine debeftiE, de dire,le ne IepenE»ye pas. Il eftoit a opinio que lesaffairesde la guerre deuoyëc eEre menez Egemét, veu que les choEs paftees, & précipitées peu uët mieux eftre reprïEs que reuoquées parla forceou raifon humaine,ou bien corrigées,ou remiEsen leurentier.
- Comme auffi ce mefme Scipion delaiiTant l’art militaire, & les affaires publiqs E fuft adonné aux lettres, il difoit que comme il eftoit oififil vuy-doit^antplus d’affaires. Et comme depuis îleuft forcé, & réduit Carthage a obeiffan ce, & que les gens de guerre luy euffent amené vne pucelle d’vne merueilleuE beautéqu’ilz auoyent prins luy en faiEnt preEnt. le la prédroye voluntiers(diftil)fii’eftoyepefonnepriuée,& non pas chef d’armée. Et côbié que le cornu bruit coureuft de luy, qu’il difoit que iamais vn chef ne doit dôner bataille finon que l’occafion s’y offre,ou que la neceffi-té preffe,Elon touteffois que porte le quart liure des hiftoires de Sëprogne AElIion ancien hiftoriographe,on le ditainfi de P. Aphricain ftlz de Paul: c’eft qu’il auoit ouy dire afo pere L.Emilie Paul,qu’vn exceller chef ne cô-bat iamais finô qu’auec grade neceffité,ou qu’vne bié grade occafiô s’offre: l’vn & l’autre font certainemét tref bôs. De vray il n’eft rien de fi grâd efficace pour la conEruation d’vne armée qu’en ce, que le chef ne deffaille point à la fortune qui s’offre, en condeEédat a la raifon,la ou le cas s’eft offert. Il n’eft rien plus pernicieux qu’vn homme couard,quad il eft en extrémité du combar.ce que l’euenemét non Euîemét montre,qui eft le maiftre des folz, mais auffi la mefme raifon qui a fouuenteffois efté, & Era.
- Comme Augufte à l’age de dixhuiclans afl'aillift Ecorne comme erîne-my, le Centenier Corneille, & l’vn des ambaffadeurs de fon armée pour demander le Confulat pour luy, ouurit au retardement du SénatE cotte d’armes monftrant le manche de fon elpée, & ne fit point de doute de dire à la court, celle cy le fera, fi vous ne le faites. Ce mefme Auguftecha-ftialegierement vn certain bielle en vn voyage, &c fort difforme de viEi-ge, d’vne bien apparente cicatrice, au demeurant louant fort Es proueffes. Auquel il dit, quand tu fuyras ne regarde iamais derrière toy.
- Vn certain vielfoldateftanten grand dangerpour vn aiournemetper-fonnel, l’approcha en public, &lepriadeluyayder: foudain Augufte luy liure vn auocat qui eftoit en E compagnie, & luy recomméda ce plaideur, d’ont le foldat fefcria à haute voix.Si eft- ce Cefar que ie ne cercnay pas vn vicaire lors que tu fus en grand péril a la bataille Asiatique,mais combat-ty pour toy: puis decouurit Es cicatrices, pour lefquelles CeErrougic, & vint pour auocacer pour luy, comme qui craignoit depouuoirEmbler no feulement fier, mais auffi ingrat. Au demeurât il a efté d’auis qu’il n’y auoic nen plus mal feant a vn bon chef d’armée que l’outrecuidace, & que tou-
- I
- p.049R - vue 109/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- tes choies eftoyent alfezhaftées qui font faittes à propos. Et combien qiiè ce fuft vne choie di&e au parauant par Caton,il auoit touteffois de coûta-me de fouuenteffois Fauoir à la bouche comme lien. Il me fouuient enco-res finalement de ceft autre cas d’Augufte, lors qu’eftancen Alexandrie il entra en vne crotte, en laquelle eftoyent gardées dedans des boucttes les corps des Roys d’Egipte, & regarda voluntiersceluy d’Alexandre de Ma-cedoyne, & comme on luy demandai!: fil vouloit point voirceluy de Prolongée, il répondit qu’il vouloit voir les Roys, 8c non les mortz: Ptolomée touteffois auoit elle Rov. Mais ce lâge Capitaine vouloit bien diffîniren peu deparolles quelle différence il y auoit entre les vrays, 8c ceux que le commun appelle Roys. •
- Scipionleplus ieune gardant le commandement dePolybe,feftudioit de ne partir point de la grande place que premièrement il n’euft,corne que ce fuft gaigné l’accointacè 8c amytié de quelqu’vn de ceux qui fe retiroyét.
- Comme auftiquelqu’vn montrai!: par brauerie vn elcu fort biencnri-ehy, écouté ieune bomme^ditiblàns point de doute l’air eftbiébeau.-mais il faut que le Romain homme de bien mette plus toft fon elperance en la dextre qu’en la lêneftre.
- Comme Scilurus vint à mourir delaiftant quatre vingtz enfans,il com-mandaichacun d’eux rompre vnetroulfededars qu’il leurmontroit , & comme chacun d’eux nya le pouuoir faire, il les rompit aifément les tirant vne à vne,leur remôtrat par la,qu’ilz leroy et fermes & puilfâs,perlêuerâsen vne melme amytié,& foibles la ou ilz fe fepareroyent, 8c lêroyét dilcordas.
- On dit queTigranes délirât donner quelque attaintedeplailânte moquerie à l’armée des Romains, dit ceprouerbe commun, qu’ilz eftoyent beaucoup, f’ilz venoyent en ambalfade,& bien peu,li pour le combat.
- Comme Amafis Roy des Egiptiens fuft dédaigné des liens, d’autant qu’il eftoit venu de petit lieu, & de nagueres peruenuâlacoronne, ilcalfa vn vailfeau d’or qui feruoit â Iauer, 8c à lêruices deshonneftes, & en fit vne image d’vn Dieu, l’alfeiant au plus apparent lieu delà ville. Et comme les Egiptiens luy ^ortalfent grande reuerence, de cela auerty, il les alfembla, & leur donna a entendre le cas, comme que celle image eftoit faiéle du vailfeau, auquel au parauant ilz vomilfoyent 8c faifoyent leur vrine, 8c auquel ilz lauoyent leurs piedz:& qu’auiourd’huy ilz luy portoyent reuerence: ccquedemefmes luy eftoit auenu, comme qui au parauant eftoit du commun peuple, & auiourd’buy leur Roy, par ce moyen il cômada qu’on luy portail honneur, & perfuada ainli les Egiptiens â l’auoir en reuerence.
- Agathocîes fut filz d’vn potier de terre, lequel ayant acquis la principauté de la Sicile 8c eftant appellé Roy auoit de coutume demellerles potz de terre auec ceux d’or,& de dire en les montrant aux ieunes gens, ie fay cela maintenant, pour autant qu’ayant accoutumé celle façon de vailfelle, i ay entendu a la diligence 8c hardieftè . Au lùrplus comme il tint vne ville alliegée, 8c que quelques, vns de la ville luy elcrialfent des
- remparsy
- p.049V - vue 110/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. jC
- remparSjô potier comment payes tu la foulde aux gens de guerre, il leur répondit gratieufèment en foubzriant, apres quei’auray prins cefte ville : & comme il euft réduit a fbn obeiffance par force, il vendoit les pri-fèmniers leur difant . Si vous me dittes des iniures ie m’en plaindray a voz maiftres.
- Comme Antigonus eut veu quelques vns de les foldats quiiouoyent à la balle armez de leurs cuiraffes & fallades il s’en efiouyt, & appella leurs capitaines pour les en louer: mais comme ilfuftauerty qu’ilz beuuoyent, il donna leur charge aux foldats. Et comme aufïï il fuit apres vne longue maladie efèhappé & reuenu en fânté, ie prie àDieufdit il)qu’il ne nous auienne rien pire: car cefte maladie nous a bien donné a entendre de ne deuoir par trop faire le fier,veu que nous fbmmes mortelz.Et comme vne nuycftée il euft ouy quelques vns de fes foldats maudiffans leur Roy, qui les auoit mené en vn chemin d’ont on ne fe pouuoit tirer pour la bourbe, il vint aux plus empeftrez, ôc apres les auoirretirez ignorant celuy qui leur donnoit fècours, maudiffez maintenant(dit il)Antigone par la faute duquel vouseftes tumbez en ces miferes, en fouhaittant au demeurant bien a celuy qui vous a retiré de cefte fondriere.il a outre plus porté aufïi gratieufèment les iniures des ennemys que celles de fès propres citoyens. Et pourtant comme les Gréez fufTent aftîegez en vn certain chaftel,& d’vne confience contemnans l’ennemy, ilz diflènt force moqueries contre la deformité d’Antigone, fe gatidiflans maintenant de fà petite ftature, puis de fon nez croche, il dift s’efiouiftant i’efpere bien, fi i’ay filence en mon camp: & apres auoir prins ces moqueurs par famine, il traitta les prifonniers de forte, qu’il ietta es bandes ceux qu’il veit bons pour la guerre, & fùbhafta les autres, difânt qu’il ne Peut iamais fait, fi ce n’eftoit que ceux qui auoyent la langue fimefdifânteauoyentbefbin de maiftres. Derechef comme il eftoit trauaillé de la tormence ayant tous les fiens en vn mefme nauire, on dit qu’il commanda a tous fès enfans de leur en fouuenir, de le faire entendre à la pofterité, que iamais homme ne fè hazarda aux chofès douteufès auec toute fà famille enfèmble. Duquel commandement Philippe memoratif, ayant auec fby enfèmble deu x fiens.filz, il dit qu’il ne les hazarderoit pas tous deux à la fortune qui foffrirôir,& qu’en menant auec foy l’aifné il renuoyeroit en Macedoyne lepuifné, pour le fècours de l’efperance, & pour la garde du Royaume.
- Comme Antagore faifoit bouillir vn congre en fècouant la poalle Antigone eftant derrière luy dift, Penfès tu point qu’Homere en efcriuant les geftes d’Agamenon feit bouillir vn congre? Auquel Aritagorerepondit, Penfès tu qu’Agamenon faifànt fès proueffes fuft curieux de fàuoir fi quel-quvn faifoit au camp cuyre vn congre?
- Lamache reprenant, vn chef de chambre pour autant qu’il auoit failly, & l’autre répondant qu’il ne le feroit iamais plus, dit il, n’eftoit pas loifi-hlede-.-faillir.deux foys àlaguerre.
- lij
- p.050R - vue 111/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Memnon qui menoic la guerre pour Darius contre Alexandre, apres auoir frappé dvn élan ce vn certain lien foldatmedilànt beaucoup d’Alexandre , luy dit j ic te nourry pour combattre , & non pas pour medire d’Alexandre.
- Comme l’ordonnance des Perles fuft mile en fuite par la charge que leur firent les Mediens, & qu’elle fuft du tout eperduë,ny n’ofaft montrer vilàgeal’ennemy,leurs meres, & femmes leurvindrentau deuantde toutes pars, & le ferrans enlèmble elles les prient qu’ilz ne tombent point en \ l’infamie d’vne fuyte, & qu’ilz retournent au combat : a quoy ne voulans entendre, elles leuerent leurs cottes leur monflrant leur nature, & les priât de ne vouloir fê retirer pourrefuge dedans les ventres de leurs meres, ou femmes. Eftans donques reprimez parcelle maniéré de reprehenfion,iIz retournent â la bataille, ôc en donnant dedans ilz forcèrent de tourner vi-lâige auquelz ilz le tournoyent.
- Comme Themiftocleencorés ieune ayant fouuenance, & ruminant la vi&oire tant renommé de Marathon, &. l’Empire de Milciade tant renommé, tellement qu’il ne dormoit point la nuid,ny ne le trouuoit plus aux banquetz accoutumez, auoit de coutume comme Ion dit de repondre â ceux qui s enqueroyent & emerueilloyent de ce changement de vie,que la viétoire deMilciade le gardoit de dormir. Et comme on luy demandai!:, lequel il aymeroit mieux eftre d’Homere ou d’Achilles, lequel(dit il) delî-rerois tu plus eftre ou vainqueur en l’Olympie,ou bié prêcher les victoires, Et comme aufti Adimanthe craignant la bataille lûr mer ditâThemifto-cle la conciliant aux Gréez, & les yperfuadant,Ies premiers ôThemifto-cle qui chargent en vne bataille lonttoufiours defaiétz.Ileft vray(ditil) Adimanthe, mais aulfi ne fontpas coronnezceux qui font les derniers. Comme aufti il le fuft tranlporté â la merpourvoir les corps mortz,& qu’il eut apperceu des efcuflons,& chaines ça & Jaabandonnées il dit en palfant outre à vn lien amy qui le fuyuoit, amafte les pour toy, car tu n’es pas The-miftoele. On dit aufti qu’il auoit de coutume de dire qu’il n’eftoit ny hon-noré ny en admiration aux Athéniens, & que la ou ilz lèntent la tormente & que le péril eftoit eminét,ilz recouroyent â luy comme â vn platane, lequel apres le beau temps reuenu ilz arrachoyent & abbatoyent.
- Comme le Roy Antiochus apres l’abbord des Romains faiten Alie cotre luy euft enuoyé â Scipion pour pacifier la guerre, on dit qu’il eut cefte façon de reponlêjc’eft qu’il failloit au parauât auoir fait, & non pas maintenant, que tu as receu le frein, & le cheuaucheur. Comme aulfi le mefme Scipion euft daller en Grece,aucc vne grofte armée, & que tous fuflent eftonnez pour le bruyt qu vn peu au parauant couroit pour la multitude, & diuerfité des gens de guerre, il vlà de cefte maniéré de parler entiers les Acheins. Cômme(ditil)eftans gratieulèmentreceuzeneftéen lamai-lon du Calcidenlè bon hofte, & homme entendu à feftiërles gens. Nous nous émerueilliftions, d’ont luy po.uuoit en cefte lâilôn la venir tant de ve-
- naifon
- p.050V - vue 112/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 5i
- naifon & diuerlê, ceft homme glorieux fe riant de la variété dit que celle efpece de chair de venaifon auoit efté faiéle d’vnporceau priué,mais qu elle eftoit deguifee par le moyen des lauliés ôcappreftz. Et pourtant ne vous émerueillez point pour ces tant diuers noms de nations incogneuës, comme des Daces, Cadufins, & Ehnés, ne de maintes diuerlès armes, comme haftez, armez de toutes pièces, Pezeteres c’eft à dire gens de pied des aliez, ne pour ouir parler des archiers eftreauecles gens de pied, penlêz que ce font tous hommes differens entre eux d’arm es, ou à pe u près meilleurs lêrfz queelpece de gens de guerre, pour la nature qu’ilz ontferuile.
- Comme l’armée de Luculle redoutai!: fort les gens armez de pied en cap de Tygrane, il leur enioingnit de s affeurer,d’autant qu’il auroit plus affaire a les dépouiller, qu’à les vaincre.
- Lucius Sylla montra auxafliegez dePrenefte les telles des Chefz qui auoyent efté tuez à la bataille, fichées en des pointons , rompant par ce moyen leur obllination. Outre plus lemelme Sylla lurnommé l’heureux, eftimoit fort deux de les félicitez par fur toutes autres, l’vne l’amytié de Pie Metel,& qu’il n’auoit pas raie la ville d’Athenes, la conlêruant au contraire.
- Comme Eumene retournoit au camp & qu’on y trouuaft à chacun pas des lettres iettées par terre , par lefquelles il eftoit ordonné grandz guerdons à ceux qui porteroyent là telle à Antigone il aflemblales fol-dats, rendant premièrement grâces qu’il ne s’eftoit trouué homme qui preferaft l’elperance d’vne recompenle meurtrière au ferment de fidelité, puis ily aioufta d’auantage d’vne grande aftuce que ces lettres là auoyent efté feintes parluy pour éprouuer le cœur des fiens, &c qu’au demeurant fon làlut eftoit entre leurs mains: & qu’Antigone ne autre chef ne vou-loit point pourchaffervne viéloire telle qu’elle donnait vn trefimauuais exemple pour luy. Cela faiél il a pour lors refreint les cœurs de ceux qui branloyent, & prouueu pour l’auenir , que là ou il auiendroit vn cas femblable les foldats s’eftimalfent eftre plus toftéprouuezpar leur che£ que d’eftre corrumpuz par l’ennemy. Au demeurant eftant auerty que fi Ion armée fauoit contre qui onlamenoit,non feulement elle ne marcherait pas, mais d’auantage le départirait Ibudain quelle en lèroitauer-tie. Il tint comme l’on dit vn bien auile moyen,la conduilânt par chemins égarez, auquelz ilz ne peuffét auoir certaines nouueIles,& que par la il leur peduadaft qu’il marchoit contre quelques barbares-.finalement il perlèue-ra en fa fantafieiettant fes gens en bataille, & combattant auffi, auât qu’ilz IceuITentauecquiiîz combattoyent . Il feit aufti que gaignant les lieux a l’auantage,le combat fut plus toft dreffé par lesgensdecheual, dont il eftoit plus fort, que par ceux de pied, dont il eftoit plus foible. Et comme vne autrefois Antigone le pourfüyuift eftant le plus Ibuuét accompagné d’vn grand nombre de toute maniéré de foldats, ne le pouuant touteffois combattre finon es lieux elquelz peu de gens pouuoyentrefifteràvnbien
- I üj
- p.051R - vue 113/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- grand nombre, & comme finalement il ne le fceuft attraper de rulè, il fut enueloppédvne grande multitude dont toutelfois ilfe defempefira fai-fant grande perte des liens, & fe fauua dedâs vn chafteau de Phrigie qu’on appelle Nora: la ou fe voyant au danger d’vn fiege, il dôna congé à la plus grande partie de fon armée, craignant qu’vne fi grande multitude d’hommes ne le liuraft àl’ennemy: ou bien que le fiege ne fuft trop chargé dvn fi granclnombre. Et comme au furplus il fuit en creinte pour ceux de la retenue,pourautant.qu’arreûant en vn melme lieu, il ne fift perte des cheuaulx de guerre a faute d’elpace pour les piquer, il s’auilà d’vne fubtile inuention pourtrouuer moyen de les pouuoirelchauffer, & mettre en alaine,àfin qu’il z mangealfent de meilleur appétit, & qu’ilz ne deuinlènt lâches : il les attachoit fi haut d’vn licol par la telle que les piedz deuant perdoyent terre, les forçant par apres du ruer du trein derrière: qui eftoit vn mouuement quineleurémouuoitpas moins la fueurques’ilzeulfenteupleinecourfe, d’ont auint qu’il tira les cheuaulx du chafteau aufli poliz, que fi les eull tenu aux champs, qui fut vnechofè qui feinbla fort admirable, veu le long fiege. Demade apres letrelpas d’Alexandre difoit qu’il luy lèmbloit voir l’armée des Macedoniés femblable au Cyclope aueugle pour autant qu’elle audit perdu vn tel prince.
- Comme aufii Artaxerce fuyant quelque fois apres la perte des munitions, viùres, & bagages mangeait des figues lèches, & du pain d’orge, ô quelle friandilè(dit il) d’ont ie n’auoye point encores tafté.
- Appollonius homme de grand renom & auétoriré, appailàl’Empereur Aurelian de forte qu’il n’vfa de vengeance contre la ville de Thiane, comme il auoit délibéré. De vray(dit iljfitu veux vaincre 6 Empereur il n’y a point de railbn que tu vfes de cruauté entiers tes citoyens: fi tu veux regner il eft beloin que tu te gardes d’épandre le làng des innoces: fi tu veux viure vy de clemence.Et comme le mefme Aurelian tint alïiegée la melme Thiane pour fa rébellion il iura qu’il n’y lairroit pas vn chien s’il la prenoit:cn quoy il fit tresbien: car cela donna elperance & defir de la prendre aux lol-dats alpres au pillage, & aux alïiegez defelpoir.Mais comme la ville fufi prinlèd’alTault, & que les gés de guerre requilfent la ruiner fuiuant ce propos qu’il n’y lairroit pas vn chien, il leur répondit, iay donques dit que ie n y lairroye pas vn chien, tuez donques tous les chiens. Laquelle parolle leur déniant le faccagementdelaville ôdacôlèruant, toute l’armée receut quafi comme vne ordonnance. Or comme d’auantage vn certain Manlin Chilon luy reprochai!: par fortune d’auoir fait mourir vn home, par le cô-feilduquelilauoitprins leur ville, fareponfe futcommelon ditences termes : i’ay foulfert mettre à mort celuy par le moyen quafi duquel i’ay prins Thiane, comme qui ne pouuoye porter affection a vn trahiftre, aulfi ay ie ailemét enduré le mallàcre qu’en ont fait les foldats : car a la vérité celuy ne m eufi peu garder fa foy, qui n’auoit pas épargné fon pais.
- Iulian l’apoftat menant armée cotre les Perlés,bru lia vn pont qu’il auoit
- gaigné
- p.051V - vue 114/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 5i
- craigne apres qu’elle fut paflee, à fin qu’on combattift de plus grand cœur, d’autant qu’il falloit que les gens de guerre vainquiflent ou mouruflent en
- terre d’ennemys.
- Les Lacedemoniens d’vne excelléte gloyre parfurtous autres au meltier de la guerre eprouuoyent la bote du cœur de leurs enfans à coups de fouet publiquement,& leur donnoyent courage de les porter conftamment, les prians au furpîus eltans deflirez & prelque morts de perlèueramment atté-dre playes furplayes : ny ne remontroyent autre choie les meres à leurs en-fans allans au combat linon qu’en ne le fuyant point, ilz retournaflent déliant elles vifz,& armez, ou qu’on les rapportait prelques mortz auec leurs armes: car comme le rapporte leur Epigramme,ilz trouuoyent bon de vo-luntiers viure & mourir,pourueu que ce fuit auec la vertu.Comme l’enne-myen parlemécantdilt parbrauerieque les Lacedemoniens ne verroyent point le loleil pour l’abondance de leurs dardz, & la multitude des fléchés, yn certain d’entre eux ditrtant mieux combattrons nous en l’vmbre.
- Le grand cœur aulïi des Dannemarquoys & des Celtiberes elt a louer, lefquelz entre les armes, le fang, & les playes le reiouifloyent comme heureux de mourir: & auoyent regret comme les autres hommes de mourir de quelque maladie,comme fi c’eftoit vne choie infâme,&: milèrable. Ilz te-noyent aufli à grande honte elchapper d’vne bataille,la ou celuy pour le là lut duquel ilz feftoyét vouez elloit mort. Au furplus ilz portoyent ioyeu-lèment les playes, qui elt vne choie amirable, ilz contoyent leurs cicatrices,& portoyent gradamourà leur Capitaine pour lequel ilz mouroyent tranlpercez de dardz. •
- Combien qu’Alexandre homme toufiours de grand cœur eut leu la lettre par laquelle Parmenio luy.man doit qu’il le gardait du poilôn du mede- Ql111*
- cin Philippedlprinttouteffoislebreuuagefansfepouuatenparquoy com- parmenio me il ait eu plus grade fiance a l’eltime de fon amy,il a elté digne de l’auoir nis, pro innocent,& aufli digne de le faire. Comme aufli eftat fon armée en batail- mattls* le il vit quelque foldat mettat à Ion dard vn aneau,il le chafla des ranez corne inutile,attendu qu’il farmoit lors qu’il eftoit beloin de frapper. Au fur-plus comme auprès d’Arbeles il eult à côbatre en bataille vn milion d’hom mes, & que lès amys luy vinflent rapporter que les loldatz en diuilant en leurs loges failoyent leur complot de ne rien r’apporter du butin en la mai-ion du Roy, & qu’ilz le pren droyent pour eux. Il dilt en louzriant, vous m’apportez toutes bonnes nouuellesji’entends que ces gens de bien font leur eltat de vaincre,&non pas de fuir. Comme aufli il eult elté blefleala iambe d’vn coup de fléché, & que plufieurs qui auoyéc de coutume de l’ap peller Dieu y fuflent accouruz: alors il dilt d’vne face ioyeu!ê,& riate, c’elt icy làng comme vous voyez,& nô pas celte liqueur telle que les Dieux ont de coutume d’enuoyer.Le melme Alexandre aufli en enfuyuant comme ie croy fon précepteur Ariftote,tenoit vne boulle d’argent, ayant le bras tédu hors le liét, 8c au deflouz vn baflin d’airinà fin quelâoulelommeil par
- I iiij
- p.052R - vue 115/480
-
-
-
- fVerti ex Apophteg matibus Plutarchi.
- + Parum hæcqua-drat prio-ribus.
- ROBERT VALTVRIN
- tout epandu refoudroic la vigueur des nerfz, le tintemét de la cheute de la boulle l’eueillall.Côme outre plus il tint prifônier celuy qu’on tenoit pour le meilleur archer d’entre leslndiés, & qu’on diloitdônerdVne fléché dedans vn aneau,il luy cômanda de le môtrer,& côme l’Indien ne le voulufl: faire,f Alexadre courroucé cômâda de le mettre à mortdequel ainfi qu’on le menoit fe retourna aux bourreaux dilànt: que ia de pieça il n’auoit fait le meftier,& qu a celle caille il auoit eu paour de faillir. D’ont Alexadre eftat auerty felmerueilla,& en luy failat des prelèns il luy làuua la vie. Et côme il endurait grade loif, vne troupe de Macedonies portât eau en des chieures, luy en prelenterét vne pleine lala de, laquelle prenât,®ardat tout autour Ion armée altérée de loif,'il bailla la telle,& iettat Ion œil fur ia boiflon,il la rendit fans en gouller,vlànt de celle façon de parolleslouabIes:Si i’enboy, dit il,la lagueur preffera ceux cy.Cela ouy,Ies loldatz le voyant ellre la fief criërent à haute voix,& d’yne grande elperace,enlèmble qu’ilz ne fentoyée point le trauail, ny ne le péloyent ellre lîibieélz à la mort tat qu’ilz auroyëc auec eux vn tel Roy,& Capitaine. Ainfi aulïi qu’vne certaine ville luy pro-mettoit ia moy tié de lès biens,& des terres, Alexadre repôdit: le ne fuis pas venu en Afie lôuz intention de prédre ce que vous me donncrez,mais afin que vous eufliez ce q ie vous Iairroye : Il eft aufli vn diél de ce Roy melmes amirable de parolle, & de fai&dequel ayant les filles de Darius captiues, & merueilleufemét belles,ne les voulut tat lèulemét voir, ellimat choie indigne & infâme a vn Roy, & Chefvainquat les homes,ellre vaincu des femmes. î FinalemétjSigifmôd,il ne me lèmble pas bô de taire icy ton auis fore lèmblable à celuy d’Alexadre, lequel nonlèulemét n’a pas brullé à la façon de Cefar les lettres des ennemys àluy voluntairemét offertes,mais recerché celles des fiés d’vne grade alluce. A caulê dequoy nômé ie Alexadre ne toy, veu q les opiniôs de tous homes prelques lônt en cela.pareilles,& qu’on les voit plus toll Alexandrines & Sigilmôdines que Celârines,ne Pôpeianes?
- C.Pôpilie(cômeprefques tous dilênt,melmes Pline & P.Oélauius Côfi) ellant enuoyé en ambaffade à Antiochuspar les Romains pour luy défendre de ne toucher à l’Egipte, & de leuer le fiege qu’il tenoit deuât Alexandrie^ fin qu’il n’occupall le royaume des enfans de Ptolomée pupilles, ou bien qu’il fen departifl l’ilfenelloitialàilÿi& comme Antiochusellât en Egiptel’eufllaluéfort gratieulèmet deloingarriuantafon cap, & que par apres il l’euftembraffé las garder le retour du falut. (De vray Antioche auoit fort aymé Pompille fur tous autres pédant qu’il elloit ollage a Rome)àlors Pompille luy dill qu’il Iaiffall pour l’heure l’amytiépriuée,pour l’entreieél des mandemens du païs.Et côme apres auoir prelènté,Iiuré,& leu le decret du Sénat,le Roy dill qu’il en parleroit a lôn côlêil, & luy donneroit repon-fc: Alors Pompille faifimt d’vne verge vn cerne tout autour du Roy, luy dit auifes don ques & répons icy tout planté. Et comme tous femerueillaffent & cllonnaffent de fa grauité en grand cœur, Antiochusa répondu qu’il obeiroit au Sénat, & lors Pompille le làlua, & embraflabien gratieulèmet.
- Hadrian qui a paffé prelques tous Roys en largeffe,voyant quelque fois
- p.052V - vue 116/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 53
- vn vieil foldat qu’il auoit cogncu à la guerre frottant contre les murailles fon dos, & tout fon corps aux bains, Iuy demanda pourquoy il fë frottoic contre le marbre,puis voyant que c’eftoit à faute de valet, il luy donna des feruiteurs & leur depenfe. Mais comme le iour enfiiyuât plufieurs vieillars fe frottalfent contre les murailles pour émouuoir la libéralité du prince , il les fit appeller, & le frotter les vns les autres. Corne aufli aucun de fès amys, lereprinfent pour fâ trop grande familiarité entiers tous, il leur dift, que l’Empereur deuoit eftre tel enuerschacun, comme il vouloitvn chacun eftre enuersfôy.
- Comme le philofophe Fauorin fuftfànsproposreprins d’Adrian pour vn mot qu’il auoit proféré bien élégamment, & fè fuft retiré auec vne re-prehenlion de fès amys portas mal celafil dift en fouzriant,vous ne me con fèillez pas bien,qui ne me voulez fouffrir croyre celuy eftre plus fàuant que moy,qui a trente légions-
- Comme quelqu’vn des familiers d’Antoyne fufi: interrogé que c’eft: qu’il faifoit, veu qu’Antoyne fuyant du fiege de Modene beuuoit fbuuent la ou l’occafion foffroit, ou bien par vne coutume naturelle de fôn corps laffé de trauaux, & farreftoit à chacun pas,puis foudain il reprenoit la cour-fè comme perdu, il refpondit qu’il faifoit ce que font les chiens en Egipte, il boit & fuyt-.car on dit d’ancienneté que les chiens Egiptiens boyuent ôc fuyent, pourtant qu’attaintz de crocodiles ilz deuiennent folz & enragez.
- • Comme Theocrite non pas le Saragofin mais de Chio, efloit mené de-uant le roy Antigone qui eftoit borgne & courroucé contre luy, & que les fiensluy donnaient efperance que la ou il fèroit arriué deuant les yeulx d’Antigone il trouueroit mifèricorde : celle côdition,dit il,efl impoflible: c’eft faicl,ie fuis mort. Touteffois ce broquard vint à mauuais temps, car il procura la mort a Theocrite, & fit Antigone homicide, &periure, car il auoit iuré de luy pardonner,mais émeu de l’atteinte du rencontre,il ne luy fitpoint de grâce.
- Mithridate Roy de Ponthe préparant vne trahifbn a Arïara&e Roy de Capadocefouz couleur de parlementer auoit caché fbuz fèsiarretiers vn coufteaudequel combien qu’ilfuft ieune homme,cruel,& deftiné ameur-très, fouffrit touteffois eftre fouillé a la coutume royalle de ce temps la, & comme on le fouillaft trop cu-rieufèmét iufques esplus fècrettesparties du corps,il dit par maniéré de moquerie,garde que tu ne trouue quelques autres armes que tu ne cerchés : par ce moyen eftant la fufpition oftée il cou-urit plaifâmment fon embufehe, & tua le Roy tiré apart de fes amys,com-me pour parler en fècret a la veuë des deux armées.
- Comme Cicéron fuft bien tard venu au camp de Pompée au commencement de là guerre ciuile, & que fès amys le reprinfènt d’auoir trop tardé: le ne fuis point venu,dit il, trop tard,car ie ne voy rien icy de preft,fè moc-quant de la longueur de Pompée es appreftz de la guerre. Comme aufli vn certain Nonin dift à Cicéron apres la bataille de Pharfàlles, & la fuyte
- p.053R - vue 117/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- de Pompée,qu’ilzauoyent encores fêpt aigles,& qu a celle occafion il ne fê fachaft point,tes remontrances,dit il,fèroyent raifbnnablesfi nous auions a combatre des iais.
- Comme quelquvn fenqueroitde M. Cralfedu temp.sdu delogement de l’armée,il répondit,crains tu de n’ouir point la trompette?
- P.Licinius CralTus Conf grand pontife enuoyé contre Ariftonique fre-re d? Athale auec vne armée bien dreffée,& eqtiippée d’armes, & vn renfort au furplus de grolfes troupes, & forces de Roys,fut touteffois deffaiét en ba taille : & pour ne tomber en fêruitude du vainqueur barbare il donna dans l’œil d’vn Thrace d’vne baguette dont il guydoit fon cheual,à fin de l’irriter a le tuer. Cequeluy auenant,il garda par là mort la dignité de la Repub. &lafienne.
- Comme Pelopide fortoit de là maifôn eftant fâ femme en pleurs, & le priant de fêfâuuer,il dit,c’eft le meftier des perfônnes priuées d’amônefter, & celuy des Chefz & Capitaines de fàuuer les autres. Corne aufïî on euft auertiffemét que les ennemys prédroyent leur chemin par lieu x raboteux, & par deftroiétz, & que quelqu’vn fe haftaft luy difimt : O Pelopide nous fbmmes tumbez entre noz ennemys. Commentait il : fbmmes nous plus toft tumbez en leurs mains qu’eux es n oftres ? Apres cela dit, il fait pouffer vne iumentparla queue par maniéré d’ecarmouchedela bataille future. Comme de rechef il fuftarriuéaPharfàle contre Alexandre & que quelqu’vn dift que le Tyran arriuoit auec groffe armée : tant mieux, dit il,la vi-éloyre fera de tant d’hommes.
- Apres que M.Porcin Caton eut fubiugué les Celtiberes,& qu’il fuft certain tant par Tcxperience maiftreffe de toutes chofês, que par les fèntences des excellens autheurs que celle nation la efloit plus prôpte a rebeller, non feulement plus toft,que toutes autres prouinces,mais encores plus toft que l’Italie mefme ,iJmâdapouries en garder a chacune cité des lettres d’abba-tre leurs murailles.-Lequel mandement tant inhumain euft peu plus toft les émouuofr à rébellion qu’afappaifêr,filz euffent cogneu cela eftre general. Mais comme chacune d’elles penfàft eftre feule a qui on le commandoit,& &non aux autres,toutes y obéirent de paour. Pline & prefques tous hifto-riographes laffe.rment ainfi. Mais félon Tite Liue perede l’hiftoyre Romaine,il eft certain que Caton manda l.es Sénateurs de toutes les citez,auf-quelzil remontra que la confèquéce de ne fê rebeller n’eftoit pas moindre pour eux, que pour les Romains : veu que iufquèsà prêtent cela fefttoufi iourstfàit auec plus grand dommage des Efpagnolz qu’auec letrauailde l’armée Romaine. Or à fin que cela., n’auienne plus, iepenfe qu’on y peut donner ordre par vn moyen qui eft , jfi on fait tant que vous ne puiffiezrc--beller.Ce queic veuil faire auec la plus gratieufê ÿoye qu’il fêrapoftible:ay-dez moy auffi en cela.de voftre confêil, ny n’enfüyuray aucun plus volun-tiers que celuy que vous mefmes me cofèillercs -. Et corne ilz ne fbnnaffent mot,il leur bailla quelque elpace deiourspourypéfêr;&: comme derechef
- mandez
- p.053V - vue 118/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 54
- mandez a la fécondé affemblée ilzléteuffent, apres auoir fait abbatreen vn iour les murailles de toutes les citez il marche contre celuy qui n’obeif. foitpasencores: & en quelque région qu’il feiettaft lia fubiugué tous les peuples circonuoifins.Comme aufli le Roy Eumene full arriué a Rome,6c receu du Sénat gratieulêment 5c honnorablemét auec vn grand abbort des plus nobles de la cité, Caton le fuyoit fulpeçonnant apertement celle gran de carelfe entiers le Roy. Et comme on Iuy dift que Eumene elloit homme de bien, & qu’il elloit venu a Rome portant vne merueilleule affeétion a la Republ. ie le veuil bien,dit il,Il elt ce que celle gran de belle, i’entcndz ce nom de Roy,eil de fa nature vn chien bien gourmand. Comme de rechef il eull côfideré la prinlè qu’il pouuoit faire dvne certaine ville d’Elpa-gne par lûrprinle, il défit les ennemys, les furprenant par vne diligence dé quatre iournées faiéte en deux iours par contrées raboteulés, 5c delèrtes: 6c comme les liens ayans la viéloyrc, luy requilfent la caulè d’vne auanture li ailée,il leur dill,que la viéloyre leur elloit auenue pour auo'ir fait en deux iours le chemin de quatre iournées.
- Comme Epaminonden’eull eu iamais femme, ôc quePelopidc lere-print pour n auoir point d’enfans,qui en auoit vn diffamé, luy reprochant qu’il pouruoyoit mal à la Republique. Donne toy garde, dit il, que tu ne face pire, qui as à luy laiffer vn tien tel fils. le ne puis de vray auoir faute de race, car ie delaiffe de moy la bataille des Leuétrcs, qui ne me liiruiura pas feulement,mais fera d’auantage immortelle.
- Comme Pomponius homme exceliét full en vne bataille des Romains mené fort bleffé a Mitridate,luy demandant fi guery il feroit fon amy,ouy, die il,fi tu l’es des Romains,finon tu m’auras aulfi pour ennemy. Mitridate fefinerueillant de la confiance fi notable de l’homme,le garda totalement de luy faire outrage.
- On dit que par les exemples de Licurguslès reponlès furent telles aux citoyens demandans comme quoyilz pourroyentrepoullèr les efforsdes ennemys,fi vous demourez, dit il, pauures, & que vous delailïîez voz mutuelles querelles. Et comme ilz feiffent le lémblable de leurs murailles, la uille,dit il, ne fera pas moins encourtinée de murailles, I ellant de gens de bien,6c de cœur,que fi elle lelloit de brique.
- Comme Paul Emilie menait Ion armée dans le païs Lucain le long de la mer par vn dellroiél, 6c que les Tarentins le chargeaient à coups de léor pions il ietta lur les flânez en cheminant les prilonniers pour rempar,pour le regard delquelz les ennemys cefferent de tirer . Il ordonna aufli que le guet full fans ballon ny elpée, à fin que defelperans du moyen de refiller à lennemy,ilz refillaffent mieux au lômmeil.
- Comme les Portugaloys dilfent qu’ilz auoyent viures pour dix ans, 6c qu’ilznecraignoyent point le fiege,TibcreGracche leur répondit, qu’il les prédroit l’vnzielme année, d’ont les Portugaloys etonnez fe rendirent, combien que garniz de viures.
- p.054R - vue 119/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Comme Lylândre euft palfé le rempar eftans les Corinthiens endormis, & qu’il vit les Lacedemoniens lâches à l’alfaut, & que par fortune vn heure fuft palfé le folfé:n ’auez vous point de hôte,dit il,craindre vne façon d’en-nemys,aux murailles defquelz les heures giflent.
- Pompée blafmant lesfaidzdeLuculle,ledifoit auoir menéienelçay quelle guerre tragique & feinte auec les Roys : ôc qu’à luy eftoit relèrué la vidoyre contre vne alfeurée&rulee force d’ennemys, veu que Mitrida-te auoit prins lôn refuge aux bouchers,efpées, & cbeuaux. A quoy répons dit Luculle, qu’au contraire Pompée eftoit venu pour combatre les images & vmbresde la guerre,comme qui a de coutume devenir fur la fin d’elle, aufti vifte que fait vn oylèau fur la carongne abbatuë par vn autre. Etdifoit qu’il auoit ainfi combatu leSertorin,Brutus, & les Lacedemoniens,veu que Gralfus en auoit mené l’vne,de grande proueftè,Metel l’autre , & Lepide le demourant. Outre plus ayant recouuré les lettres du Ser-torin en Efpaigne, entre Iclquelles eftoyent celles de plufieurs Capitaines, par lefquellesilz l’appelIoyentàRome pour changer, & troubler la République il les brufta toutes donnant par là moyen aux melchans de l'amender & deuenir meilleurs. Comme aulfi tous ceux de là ligue pref-quesd’vnevoix diflent quafi comme amonneftez par oracle diuin, qu’ilz ne pouuoyent apperceuoir aucun moyen, par lequel ilz peulfent le défendre de la venue furieufedeCelar.-veuque venant vne fi grande tormen-tede guerre, il n’auoit pas vn homme leué pour refifter,ny ne lè prepa-roit; on dit qu’il répondit, qu’incontinent qu’il donneroit du pied en terre , il en fourdroit armées de pied, & de cheual. Quelque peu de temps a-pres, comme le bruyt & les nouuellescontinuaient, & qu’il euft entendu que Cefar auoit palfé le Rubicon, & auoit fbudain prins Rimene pour lors ville renommée & riche, & que le bruyt faugmentoit de iour en iour de l’ire & courroux de Cefar contre Pompée, & les Sénateurs, & qu’il mar-choit à l’intention d’auoir le conlûlat liuré de leur bon gré, ou bien par force, là ou il luy lèroit denyé, & qu’à celle caulè il failbit palier fes troupes pour prendre le païsde la marche, Spolete, Hetrurie, & pour venir à Rome auec fon armée (combien que cela eftoit faux, veu qu’il n’auoit point armée de plus de trois centzcheuaux, & de cinq mille hommes de pied) à lors la ville de Rome entra en plus grande frayeur & tumulte quelle n’auoit iamais au parauant fait : & furent les cœurs de tous ceux de la menée Pompeiane fi effrayez que toute la cité trembloit, ny ne lêmbloit pas que ce fuit IulleCelàrbourgeoysRomain,ne les légions Romaines venir à R orne, maispîustoftce Carthaginoys cruel ennemy Hannibal, & toute la Barbarie, & eftoit l’opinion & coniedure, corne qu’en vainquant il ne lèroit pas plus clemét que Cinna au mallâcre des Princes,ne plus modéré que Sylla àrauir & piller les biens des riches.
- Comme on dilôità AulusTorquatus tenant vne ville aflïegée que la
- ieunelfe
- p.054V - vue 120/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE V. 55 ieunefle feftoit la bien diligemment exercée à dardz& à fléchés,il dit, qu'il la vendroit tant plus.
- Comme Iugurtha Roy des Numides apres auoir corrompu vne partie du Sénat par dons, & vaincu par or lesChefz d’armées,vint bien fouuent au delfusde lès affaires, & qu’il fufl finalement venu a Rome fouz lâuf-conduit le confiant à lès aftuces : comme aufli contre Ion elperance il vuy-dafl: hors par commandement, d’autant que la honte vainquit la conuoi-tifê, on dit qu’eftant forty les portes, & fareftant fouuent fans fonner mot, il dit finalement en fe retournant, voyla vne ville en vente, & bien toft periflable fi elle trouue marchand.Laquelle parolle prononcée par l’enne-my,a efté plus qu’il n’eft croyable diuulguée à la honte des Romains.
- Comme les efpies euflent rapporté à Philippe pere d’Alexandre, qu’vn chafteaumerueilleulèment fort cftoit inacceflible,&totalement imprenable, il leur demanda fil eftoit fi mal aifé qu’vn afne chargé d’or ne le puifle approcher?
- Comme Cleomene d’Athenes euft aflailly trois cents hommes,qui efloyent en garnifon dedans Craterie, il fit tirer quelques dardz entre les murailles, elquelz eftoit eferit qu’il eftoitvenu pour deliurer leur République, en leurrenuoyant aufli quelques prifônniers ia reconciliez par la menée defquelzeftant vne feditiondrefleedanslaville il laprint approchant fon armée d’elle. Comme aufli quelqu’vn luy promift luy bailler des Gauloys qui mouroyent en combatant : le ne vouldroye point, dit il, que tu me baillaffes ceux la, mais plus toft ceux qui tuent en combatant.
- Lycene de Siconye rompit les canaux tombans en la ville des Chryfees, puisfoudain en feit d’autres,&leur enuoya vne autre eau corrôpuë d’hcl-lebore,dc laquelle vfàns,illes print atteindzdu flux de ventre.
- Comme Pyrrhus eufl engendré Ptolôméed’Antigona, Alexandre de Iauoflà, & HelenusdeTircennatousadroitz à Iaguerre&hardiz,eftans a cela nourriz des leur enfance, il reponditfeomme Ion dit)a l’vn d’eux encores enfant luy demandant auquel d’entre eux il Iairroit là coron-ne:à celuy de vous qui aura la meilleure pointe d’elpée. Mais cela n’eft point différant de celle autre exercitation Tragique , que les freres di-uifoyent la mailon au trenchantde l’elpée. Comme aufli on le priaft de chafler vn certain mefdilànt de l’Ambracie^il répondit, il vaut mieux qu’il parle de nous entre peu de gens qu’entre plufieurs en courant le païs.
- Darius voulant tenir fècret fon departement aux Scytes ,.îaifla les aines, & chiens au camp: lelquelz les ennemys oyans brayre & abbayer pen-lôyent que Darius ne fuft bougé. D’vn femblable moyen aufli les Gene-uoys lièrent en diuers lieux des ienifles à des arbres, lelquelz fellans retirés donnèrent apparence de refidence par vn frequent buglement.
- Comme quelqu’vn parloit fans propos des affaires de la guerre* mon
- K
- p.055R - vue 121/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- amy,dift Leonide,tu n’vfès pas des chofès félon l’opportunité. Il eft aufîî vn témoignage louable de ce Capitaine contre les Perlés remontrant à fès foldatz de difner quafi comme pour foupper aux enfers. C’eft vn cas mer-ueilleux que le morceau ne leur eft point efehappé de la bouche, ne arrefté en la gorge,ne tombé des mains : au demeurant îlz ont promis d’vn gentil cœur au difner,& au foupper.
- Periandre donna confèil à Thrafibule de cueillir les plus hautz efpicz, comme eftant neceffaire d’ofter les plus grandz des citoyens. Ce que de mefmes le pere de Tarquin Superbe ordonna faire es princes des Sabins.
- On a de coutume aufïi d’approuuer Emis de Theopompe,lequehcom-me quelqu’vn dift, que Lacedemon fè confèruoit d’autant que les Roys a-uoyent apprinsaregner, répondit, mais plus toft d’autant que les bour-geoys font obeiffans: car ceux ne fèuffrent pas qu’on leur obeiffe,qui ne fauent pasregner, & pourtant l’obeiftance des fùbieélz eft la difeipline du Prince : èar celuy qui guide bien , fait qu’on le fuyt bien . De vray aufïi le deuoir de la puiffance Royale eft de rendre les fiens obeiffans, tout ainfî que de l’art d’efcuyrie , de rendre le cheual doulx , & obeif fuit*
- Hélin Commode Cefâr a baillé fôuuent à fès Iaquetz des æfles tout ain-fi que Cupido,& les a fôuuentefFois appellépar les noms des vents,i’vn bo reâs , l’autre vent de Midy , l’autre Aquilon ou Circée, &ainfi des autres n orfts,les faifântau demourant courir outre mefùre.
- Marc Sertorin donna d’vn poignard au trauersdu corps a vn barbare combatant qui luy auoit rapporté qu’Herculegius eftoit mort, a fin qu’il; ne vint à la cognoiffance des autres, & que les cœurs des fiens ne fe r’abbaiffaffent.
- Antoyne Pie a tant aymé-la paix, qu’il auoit de coutume d’auoir touf iours à la bouche vne fèntéce de Scipion,par laquelle il difbit qu’il aymoit mieux garder vnhourgebys^que de tuer mille ennemys.
- Comme trois mille Carpentenoys habandonnaffent Annibal venant en Italie, il fit crier de paour que les autres ne fen emeuffent par vne rufe bien cautelleufè,qu’il lesauoit r’enuoyé:& pour donner couleur a cela il en renuoya quelque peu d’autres a leurs maifôns hommes de peu de fèrüiçe. Il vfà aufïi enuers fes foldatz d’vn auis bien gratieux & falutai-recar comme fès foldatz fuffent tranfiz de gelées & froydures, il fit crier qu’ilz prinfènt leur repas eftans des feuz dreffezdeuant les tentes, &en-uoya des huylespour les départir par lescambradés,a fin de les en oin-dre,& adoulcir leurs membres: ce qu’il fit de bon fens &fàgement. Car (comme les'Phificiensdient)il n’eftrien plus filutaire aux hommes que fhuyle appliquée par dehors, ne rien plus pernicieux au dedans du corps.
- Comme de rechef il euft fon camp afïis près la riuiere du Faute ioinft V Ie§b 1 ^CS Cannes.>&quef Varroeufta la pointe du iourfoudain donné ligne de lifianum' bataille (carde vray il y auoit vile certaine robbe rouge eftenduë fur les
- tentes
- p.055V - vue 122/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. sè tentes du ConfùlJ& que les Carthaginoys apres auoir regardé l’audace du Chef des Romains, &le grand nombre des troupes ennemies,veuqu’ilz n'en approchoyent a moitié près, furent d’entrée fort effrayez, il commanda que le camp farme, & contemple à cheual auec peu de compagnie lesennemys d’vn petit coftau, qui iaauoyent ietté leurs légions en bataille, & comme queiqu’vn de ceux qui eftoyent autour de luy homme de renom didGifcOjdifoit que la multitudedesennemyseftoitami-rable, Anmbal retournant fâveuë,ie penfë,dit il, auoir veu vnc chofè encores plus émerueillable, dont tu as perdu la memoyre : & comme Gif-go demandait que ceftoit, Annibal répondit qu’entre tous tant d’hommes il n’y en a pas vn qui aitnomGifco comme toy. Ces moqueries aue^ nansa l’improuuifte firent rire tous les compagnons de guerre tant ceux du coftau que ceux qui eftoyent au tour-.parquoy comme les Carthaginoys vident leur Chef fc ioucr en ce péril, & faire peu de conte de cela ilz deuindrent plus hardiz pour aller àla bataille.
- Comme Claude Néron euft ietté dedans le camp d’Annibal la tefte d’Hafdrubal apres auoir deffait par furprinfe les Aphricains paffans de l’Efpagneen Italie, d’ont il auoit la conduite, il auint qu’Annibal fe fa-cha (attendu la mort de fon frere) pour le defefpoir de l’armée fur la venue du fècours.
- Comme les Romains afîîegez, debatoyent auec les Gauloys touchant Je pris de l’argent qu’il failloit payer, Camille entreuint, & prenant les finances auec les plus groz de la cité, il les bailla aux officiers,& rendit les balances aux ennemys,leur commandant de déloger, Sc difant que c’eftoit le propre des Romains de garder leur pais auec armes, & non pas par argent.
- CommeDomiceCorbuIon affiegeoit Candie,& que les Arméniens fembloyenteftreobftinez à porter le fiege, il fit trencher la tefte de Va-duade , l’vn des Megeftanes qu’il auoit prins, & la tyra auec vne bali^ fte dedans les remparsdes ennemys: laquelle par fortune tomba au my-lieu de leur confèil, que pour lors les Barbares tenoyent : pour la veuë de laquelle épouuantez comme d’vn prodige , fè hafterent de fè rendre.
- Les gens de cheual Gauloys ont porté lesteftes des Romains pendues fur lespiz de leurs cheuaux pour les effrayer,auffi ont ilz au bout de leurs lances,chantant à leur mode,combien qu’ilz fcn trouuentquidient que c’eftoyent les Spoletains & non les Gauloys.
- On dit qu’Appius Claudiusauoit de coutume a tous propos de préférer le trauail des Romains à leur repos. Si n’eft il point d’homme Ci fol, qui iuge la douceur du repos deuoireftrepreferée auxfolicitudcsdes affaires,fil fe rencontre auec la fèurté : mais ceft homme bien fàge regardant-au paffé, voyoit ce que la fin a montré,la vertu Romaine fè nourrir d'affaires^ languir de pareffe.
- K ij
- p.056R - vue 123/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Q^Metellus apres la chafied’Annibal en la fecondeguerre Carthagi-noyfè, Ôc apres la prinft de Carthage mefme eftanstousen grande licfle fut fèul qui via au Sénat d’vne fentencegraue, & bien confiderée,fè di-fane ne fauoic fi celle vidoyre eftoit point digne de ioye, ou plus à craindre àla République de paour qu’vne nonchallan ce fimsfoucy ne ruïnafl le peuple Romain, tout ainfi qu’Annibal paffant à grand vacarme les Alpes en trauaillant l’Italie rauoitéueilléaftbupy deparefle.
- Scipion Nafique, qui fut iugé par le Sénat trefihomme de bien, en ce qu’il fut d’vne ferme & confiante opinion diuerfê de l’auis de Caton le Cenforin(qui eftoit tenu le plus (âge du mondejauquel il fut contraire en ce qu’il vouloir que Carthage fuft: inexorablement rafée , non pour autant qu’il luy portait moins de hayne,eftant ville merueilleulément enne-mye, mais pour l’amour qu’il portoit au pais, la façon de vie duquel il di-foitpreuoiriè perdre en fuperfluité de delices, leur eftantofté l’eguillonde celle enuieufe ville. Que pîeuft à Dieu que lors fon confèil euft eu lieu: par auanture que la félicité euft elle de plus longue durée , ny ne fuft perië de vices la ruïnans, veu l’infamie que la paixcaule à la gloyrede la guerre , & la vengeance du monde vaincu , que fait vn délicat defor-dre de vie.
- Comme Melanthc Chef des Athéniens vint au combat par vne défiance faitte par Xante Boetien Roy des ennemys loudain qu’il fut auprès, Xante3dit il, tu ne fais pas en homme de bien ne fuyuant lesconue-nancesde la paix, car tu es venu au combat contre vn fèul accompagné d’vn fécond . Et comme Xante femerueillaft il regarda qui luy eftoit en fuyte,& aflaillant l’homme il le tua d'vn coup.
- Verti ex Comme par fortune l’eleélion des gouuerneursdu peuple fe fift fuy-PlutarSi Uant ^or^re des lettres, Denysle plus vieil, auquel par cas fortuit la lettre * M echeut,répondit à vn qui luy dit :tu esMorio(fol)Denys, mais au contraire Monarche : tellement que foudein qu’il eut fait la harangue aux Sar-ragoufins il fut par eux ordonné Prêteur : & comme quelques vns le blafi maflènt d’auoir auancévn homme en honneur ôc dignité qui eftoit mefi chant & mauuais aux bourgeoys,ie le vueil, dit il, eftre tel, qu’il leur foit plus odieux que moy.
- Comme vn boflu reprochait à Leon de Conftantinople vn vice es yeulx, blafines tu,dit il,vn mal humain, veu que tu portes la peine de ton fuppliceau dos.
- Apres queHermocratesde Sarragoufe eut vaincu les Carthaçinoysen bataille,il feingnitque la nuid fubfequente arriueroit la cheualerie des ennemys, craignant que lesprifonniers qu’il auoiten grand nombre ne fufient pas fort bien gardez, car la vérité de l’euenement de la bataille pouuoit contreindre les vainqueurs à boyre& manger en fèureté, pour laquelle attente il a fait que le guet a efté plus grand que de coutume.
- Caius
- p.056V - vue 124/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. j;
- Caius Pondus Chef des Samnites auoit par fortune enclos les deux Confulz, & leur armée en des baricanes ,ôc lieux contrain&zqui eftoic vn fpe&acle miferable devoir tant de gentilz compagnons prifonniers, mefmement en armes, aufquelz eftoit ofté le moyen du combat. Et comme l’entreietde lanuiét eut rauy les cœurs du trauail aufoucy, ôcque la ioye n’auoit pas moins ofté le fèns aux victorieux que la douleur aux enclos, il leur fembla bon d’auoir l’auis de Herennius pere du vainqueur, homme de grand age&fàuoir(devrayil n eftoit pas loing) le bon homme ayant ouyl’eftat des affaires leur confeilla qu’il leurpermift fen aller, & que d’auantageil leur fift toutes les gratieufetez, honneur, ôeplaifir qui luy feroyentpoüibles. Lequel auis commença à eftre débattu en l’aflèm-blée du camp entre les cœurs fiers de la ieunefiè, ôeleurfèmblaceluy de ce bon vieillard trop mol & refueur touchant leurs fi cruelz ennemys, & à tous indigne: Finalement on renuoya le meftagerpour demander vn con-fèil plus virile. A quoy il fut d’auis de tuer tous les Romains : ôc lors tous mefmement le Chef ont penfeque ce bon vieillard refuoit, comme qui confèilloit for vn mefme faiét des chofès fi contraires.-mais touteffois d’autant qu’il eftoit homme de renom, ilz voulurent de rechef fenquerir fi par fortune ilzauoyent point quelque moyen confèil,à lors le bon vieillard fè feit dreflèr forvn liét, ôetranfporter au camp fur vne li&iere à iarriuée duquel tout le monde fè iettant autour, il leur dit qu’il ne venoit point pour leur bailler de nouueau auis , mais pour tant feulement leur dire la raifon de ceux qu’il a baillé. Le premier auiseft pour attraire d’inimitié à amitié les Romains cxcellens gens de guerre, ôc les plus gens de bien du monde, obligezparvn grand bienfaid,& non efperé, ôcpourvous gai-gner&àvoftre pofteritévn fupport d’vne fi vaillante nation. Car comment pourroyent ilziamaisauoirenhayneceux,ou les leurs, & leur po-fterité par lefquelz il leur fouuiendra la vie, ôc la liberté leur auoir efté donnée. Le fécond fi ceft autre vous depîaift,ôc que ie fuis d’auis de iouir de la bonne fortune, Ôc que voftre vouloir foie de ruiner res piez res terre vne nation ennemie : Par ce moyen vous donneres ordre non feulement a vous,maisauftialapofteritédevozenfans, & à ceux qui naiftront d’eux. Au regard du tiers auis dont vous me requerez, il n’en eft point, car c’eft vne grande beftifede laifferaller auec outrages ceux que vous tenez en voz mains, comme qui n’ofte l’ennemy,ny ne fè procure amy. Le cœur touteffois du vainqueur aueugléôc infolent print le tiers auis en delaifi-fànt les deux autres, & lacha les Confulz & armée fans armes, ôc paflèz fôuz la picque : ôc les dépouillant de leurs armes, ôc habillemens, il leur laiffa tant fèulement des haillons pour couurirleur nature. D’ont eftant auerty Herennion,ôc qu’il oyt qu’iiz fen alloyent bien fâchez, ôc qu’il n y auoit amy ny ennemy qui peut tirer vne parolie des Romains . O que de menaces rudes , dit il, font couuertes fouz ce mifèrable filence , ce que comme il fut véritablement dit, la deffaitte des Samnites qui fut
- K iij
- p.057R - vue 125/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- apres fouz la charge de Papirius Curfor le temoigne:auffi fait le iou auquel Pondus & les légions ont efté fouz mifes. On dit aufti que ce dict mémorable fut du mefme Ponce Chef des Samnites. Pleuft a dieu, dit il, que ma deftinée meuft gardé au temps, auquel les Romains commécerent à prendre dons,ie ne les euffe pasfouffert regner longuement. Ceft ennemy laie ' difoit bien fagcment, car il voy oit bien qu’vn Empire corruptible de dons ne pouuoit pas longuement durer.
- Comme propoz glorieux fè tinfènt de toutes partz a Xerxes pour le grand nombre de fon armée fufnfàns pour l’enflamber ia rauy d’vne trop grande eftime de foy, difant Tvn que les Gréez contre lefquelzil auoit à mener la guerre n’attendroyent pas tant fèulemét les nouuelles de la guerre, & qu’au premier bruyt de là venue ilz tourneroyent vifàige, puis vn autre,qu’il n’y auoit point de doute que d’vne telle multitude la Grecè ne fe-roit pas feulement vaincue,mais pourroiteftre ruinée.-fubfèquemmentvn autre, qu’à peine la nature des chofês luy fêroit fuffifànte, que les mers eftoyent trop eftroi&es pour telle armée de mer, & le camp pour l’homme de guerre, & qu’a peine eftoyent les champagnes affez larges pour iet-teren bataille fes troupes de cheuaux, ne mefmesleciel fùffifant pour les dardz tirez de main, &plufieurs autrestelz propoz,Damarate Lacede-monien fut fèul qui dift que cefte tant grade multitude fans ordre,& lourde qui luy eftoit aggreable eftoit à craindre à celuy qui la guydoit,car à la vérité elle n’a pas forces, mais eft de grande charge, & que ce qu’on difoit qu’il auoit plus grand appreft de guerre qu’il n’eftoitpoftible à ces régions là le receuoir, qu’il auoit délibéré de combatte, eftoit véritable, qui eft vne chofè à ton defàuantage.Et en ce te vaincra la Crece,qu’elle ne fera pas capable de ton armée,ny ne t’en pourras ayder. Outre plus tu ne pourras obuier aux premières charges en quoygift la feule confêruation d’vne guerre, ne donner fècours à ceux qui branlent, ne renforcer & affeurer ceux qui ferompent.Tu feras long temps au parauat vaincu que tu te fentes l’eftre.Finalement tout ainfî que Demarate l’auoit prédit,Xerxes défait par toute IaGrececogneut combien moindre eftoit vne tourbe de peuples au pris d’vne armée.
- Hanno de Carthage homme entre les fîens d’vne prouidence notable, contemplant des l’enfance I’efprit d’Annibal fort bouillant, remontra toufiours qu’on le deuoit garder dedans la ville fouz les loix,& luy apprendre à viure d’equité auec fes citoyens,le détourner des armées afin qu’acou tumé à vn Empire trop hafté, & apres feftre fbuz-mis à luy, il ne fift le tyran.Or fi fôn auis eftoit fi falutaire ou non,la fin l’a montré: Car il eft fi no-toyre qu’il n’eft ia befbin de comemoration de quant grade ruïne de l’Efpa gne, de l’Italie,& de grâdz gemiffemés & fang de peuple,ceft enfant làfeft efforcé rendre perpétuelle cefte douceur de regner, l’ayant vne fois goufté.
- Ariftophane le Comique a feint Pericle Chef des Atheniésfqu’on fçait certainement auoir efté homme fort rufe)retournant des enfers, & amon-
- neftant
- p.057V - vue 126/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V. 3g
- iieflant fes bourgeoiz qu’il ne failloitpas nourrir vn lyon dedans la ville, & que s’il y efloit nourry, ii luy faudrait obéir: voulant par celle feinte leur perfûader qu’il failloit ferrer la bride aux ieunes hommes nobles & courageux: car onia reflreint à tard apres l’auoirlâché:d’autant que la licence trop immodérée ne peuft endurerlemors: & que finalement on pouuoit bien denier aux requerans la trop grande faueurennemye de la liberté :8c non pas touteffois l’ofler à ceux qui l’ont iaacquife. Et comme lemefme Pericle fut fort contraire à Themiflocle, & qu’il y eut entre eux beaucoup de contentions, groffes, & difcordantes, on dit qu’il fembloitdire en fès harangues que iamais les affaires des Athéniens ne viendroyent à bien s’ilz ne le iettoyent au Barathre auec Themiflocle.
- Comme Cimon d’Athenes qu’on dit auoireflé du temps de la guerre delà Morée,merueilleufèment inhumain,& fuyant la compagnie des homes & l’accointance, fors celle d’Alcibiade, qui pour lors efloit ieune 8c de forme belle, mefmement d’vne langue prompte, l’embraffant 8c baifant de bon cœur,fut interrogué d’Epemante pourquoy il le faifoit: Il répondit qu’il aymoit ce ieune homme pour autat qu’il fàuoit bien qu’il ferait caufe de beaucoup de maux aux Athéniens.
- Comme IulleCefar vfantgratieufèmentdela viétoire de la guerre ciui-leeut recouuré les bouetes des lettres enuoyées a Pompée par ceux qui fèm-bloÿent auoir fùyui le party contraire, ou neutre, il les ietta au feu:& comblé qu’il eufl de coutume d’eflre modéré en fèscourroux,il ayma touteffois mieux n’eflre courroucé:& aeflimé l’ignorance des fautes que chacüauoit commis,eflre la plus excellente voye de perdomaymant mieux eflre deceu en aucunes choies, queparirritamens de fifïpitions, 8c conieélures mer-ueilleufement faulfes pouuoirdeceuoir. Comme aufïiPomponius mon-traflvn coup receu en la bouche à la fédition Sulpitiane, fê vantant qu’il auoit receu en combatant pour luy, Cefàr luy dit,ne regarde iamais derrière en fuyant. Augufle depuis parauenture memoratif de cefle parolle fè courrouça de mefme à vn certain fè ventant de mefmes, 8c montrant fes cicatrices.
- Comme Antigone le fécond filz de Demetrie eut a côbatre fur mer con treles Prêteurs de Ptolomée & que le pilot difl les nauires des ennemys eflreen plus grand nombre, à combien de velPeaux (dit il)offres tu mapre-fence. Et comme eflat affailly des ennemys, il reculait il dit qu’il ne fuyoit pas, mais qu’il fuy uoit le profit qui confîfloit au reculer.
- Comme Alcibiade eufl vn trefibon chien qu’il auoit acheté douze cétz vingt & cinq liures tournoifès,ïl luy coupa la queue :8c répondit a ceux qui luy dirent que c’efloit vn faiél villain a vn noble Capitaine, ie l’ay fait (dit il)à fin que les Athéniens parlas de cecy ne s’enquierent point curieu-fèment de quelque autre chofè de moy.
- Comme Demenate eut commécé à medire en vne harangue des faiétz de Tymoleon,& qu’il I’accufafl en aucunes choies, il dit qu’ores il efloit fi-
- K iiij
- f Barathre lieu dans Athènes, auquel c-ftoyët pre cipitez les condanez à mort.
- p.058R - vue 127/480
-
-
-
- PvOBERT VALTVRIN
- +Rcfti - nalement venu about de Tes fouhaitz:car il anoit toufiours requis aux refticüe*° E>1£11xjÎ de remettre les Sarragonz en telle liberté qu’il fuft loyfible af cha-ret. fcun de parler librement de qui bon iuy fêmbleroit.
- tcuiuis Comme tout le Portugal prefque le fuft rendu a Decius Brutus, & que pro cums. cje toul:e cefte nation la la feule cité de Cinanie tint bon opiniâtrement,&: qu’on eufteprouué de les rançonner, ilz repondirent tous d’vne voix aux ambaftadeurs deBrutus, que leurs anceftresleurauoyent laifte du fer pour defédre leur ville, & nô pas or pour acheter la liberté d’vn Capitaine auare.
- Commeon eftimaftThimothée Capitaine bien heureux,&queceux qui luy portoyent enuie,peignoyent des villes, lefquelles luy dormant en-troic dedans vnenaffe: fi donques difoit ilie les prends en dormant que tVerti ex penfêz vous queie feroyeen veilIant?fEt comme aufti queîqu’vn desau-pft^hT ^ac*eux Capitaines fift grand cas d’vne ficne playe aux Athéniens,quant à moy(dit ilji’ay eu honte qu’vn dard lancé d’vne catapulte foit cheu près de moy eftant voftre chef contre Samos.
- CommeLifimache eftant vaincu en la Romanie par Dromachete fè fuft rendu auec fon armée, il s’écria apres auoir beu eftant captif ô Dieux pour quant peu de plaifirie me fuis fait de Roy fèrf. tPopilîus Comme Popilius Silo eftant en grand eftime & pouuoir entre les enne-Publ^Syl mys eL1^ dit à Marin eftant enueloppé & afliegé d’vne tranchée durant la lanus. Ex guerre ciuile attendant le temps, & l’occafton, dit. Marin fi tu es fi grand Plucar. de Capitaine viens au combat: & fi tu es aufti fi grand .dit Marin contreins &CexApo moydy venir. Comme de rechef les ennemys luy euftent donné moyen phte.Pom de les charger, & que les Romains fe furent effrayez, ilfitvneharenguea peiusSilo. tous fes foldatsapres la retraite faite d’vn cofté & d’autre, difanc ainfi: ureho^ne Ie fois en doutelefquelzde vous oudes ennemys ie doytenir pour plus que enim effeminez,f comme qui n’ont peu regarder ^oz talons,ne vous leurs faces, îlli terga Comme Laberin euft tout fôn temps honorablement ftiyui la guerre, vosVlom il fut finalement mené fur le theatreàfage de foixante ans, & de cheualier habenas. Romain, fait fatifte des diète. & faiétedes hommes, parles amiables pa-rolles & prières de IulleCefàr, lefquelles équipées de forces partent de la bouche des Princes. Or ncteuftil pas ceft outrage, fêcompleignant fort & tenant entre autres propoz fies parolles. Eftant donques party de ma maifon cheualier Romain trente ans a,& fans reproche, i y retourneray pour vn contrefaifèurdela vie des hommes. Or ayie certainement veu ce fèuliourplus queienedeuoye.il futauftî eftant long temps au parauant excellent,& inuincible,.vaincu finalement par Publius, car en ce temps la, il ne fêtrouua homme qu’il ne vainquit: ce que Cefâraditen les parolles, tu as Laberin efté vaincu auec ma faueur. Laberin aufti le porta fi bien en patience, que fans altercation il fèconfefta vaincu par ces vers pleins de fâpience, & dignes de mémoire. .
- ,, T ous en tous temps premiers, ne peuuentpas bien efire.
- „ Lors que 'venu feras au Jupreme degré
- De
- p.058V - vue 128/480
-
-
-
- 59
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE V.
- De renom, a grandpeiney arrejleras tu
- Et pluflofl que defcendre, en cberras, te fuis cheu:
- Mon enfùyuant cberra, ceji lagloire commune.
- Comme Athenodorephilolophefingulier de vie & doctrine eult employé quelque temps fon labeur pour endodriner Augulte, & qu’il priait l’Empereur impétrant finalement Ion congé de retourner en Ion païs,ia eftat prefie de vieillelïe,il dift au delloger pour delaifier comme quali pour marque, & témoignage perpétuel de Ion partement, & pour le dernier de-uoir de là départie, & remerciment,S’ilt’auient Celàr d’entrer en courroux ne dis, ny ne fay s rien, que premièrement tu n’ayes conté en ton elprit les vingt & quatre lettres, ce que ie penlê auoir efté inuenté par ce philofophe, à fin que celte émotion vefiemente du cœur détourné autre part s’abbaif-lalt en vn moment de peu de temps: C’elt làns point de doute vne làge lên-tence de précepteur. Le faidauffi d’Odauian Celàr n’elt pas moins gra-tieux, lequel en prenant la dextre d’Athenodore, I’ay (dit iljencores beloin detaprelence, & le tint depuis encores vn an, apres auoir dit que le guer-don de la taciturnité, lêroit leur, & grand, d’autant qu’elle elt fans péril.
- Fin du cinquiefme Liure.
- LE SIXIESME LIVRE DE
- ROBERT VALTVRIN DE l’art militaire.
- La façon des anciens pourfignïfer & mener la guerre, grpour paffer accord. Chapitre I.
- iL y a allez d’autres railons, &auis de la guerre, Sigilmond jPandulphe, qui lèroyent trop difficiles & laborieux a faire entendre, d’autant que chacun Capitaine, & chef d’armée Éflffuyt ce qu’il tiét pour profitable. Et combien qu’il lôit bien ^difficile d’obuier aux nouuelles inuentions des elpritz, veu que bien louuentla fortune amene choies non preueues: nous trauailleronstouteffois pourouurirla voyeàlapofterité par les choies qui ont procuré la gloire aux anceltres, afin que de lêmblables cas ilz puilïèntchoilir lêmblables amys. Nous liions del’ancienne &toulîours oblêruée inllitution, que nulle guerre ne le deuoit drelTer,ny eltre faitte fansdefiance, nyn’elloitlacoutume, quepremieremetles Prelatz féciaux, neufifent fait entendre quelques choies aux ennemys ,iefquelz auoyent en regiltre par deuers eux l’équité de la guerre, & paix d’vn droid inuiola-
- p.059R - vue 129/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- blecîu peuple PvOmain. Or cftoit en ccs termes la forme de la défiance,ou de l’accord que failbit le Fécial,ny ne s’en trouue point de plus anciéne me moire, comme le témoigné Tite Liue, dilànt que le Fécial a requis ainfije Roy Tulle, Ne me commande tu pas de faire l’accord auec le traideur de paix du peuple Albanin? Et apres que le Roy l’auoic ordonné, le te demâ-de(dit il)des verueines,pren les(dilbit le Royjnettes. Le Fécial apporta de là fortereffe, de la verueine nette, puis il demanda au Roy,ne m’ordonnes fBx Tito tu pas ton ambalfadeur Royal, & dupeuple Romain &noblesfauec ma cô Lmiokgopjjgjûe & bagage? le le fay ,relpondleRoy, làuf touteffois mon droid, vos, pr° & du peuple Romain. Alors il traide l’accord auec vn long lagage,lequel recité en plufieurs vers il n’eft ia belbin de dire. Et apres les conuenances recitées, Ecoute(dit il)luppiter, écouté aulli traideur de paix du peuple Albanin, écouté pareillement toy peuple Albanin.Le peuple Romain n’enfreindra point le premier les conuenances qui font publiquement recitées fans dolcn lès tables, ou cire, depuis le commencement iulqnes à la fin : ainfi qu’auiourd’huy elles font trel bien enten dues. Et fi premier il les cnfreindpar vn commun conlèntement, & de dol, alfomme au mefmc iourle peuple Romain demefmes quei’alTommeray ceiourd’buy cepor-ceau, & de tant plus grand foit ton coup, que tu es plus puilfant & fort. Cela did il a frapéle porceau d’vn caillou. Les Albanins ont en lèmblable faid par leur didateur Ôc prelatz leurs charmes & ferment. Ancus Mar-tius arriéré filz de NumaPompilius par là fille, eftantd’vnemefme équité & làindetéquc lonayeulqui domta les Latins par guerre, tranlfera des Equicules le droid Fécial, dont les ambalTades vlèroyent pour repeter les choies: lequel on eftime auoir efté inuenté par H efus, ayant au melme teps elté traideur de paix, que le Feciai fut érigé a Rome: Il failloit de vray que le deuoir & authorité du traideur de paix étrcuit es accors que les Féciaux palfoyent.Qiianddonques I’ambalfadeur ou traideur de paix arriué aux limites de ceux dont on veut repeter les biés, il dit à telle couuerte(Ia cou-uerture eft de fil de laine)ccoute Iuppiter, écoutez vous les limites de quelque nation que ce foit, aulli facent les Dieux, le droid.-Ie fuis mclfager public du peuple Romain ,ie vien iuftement & làindement ambaliadeur, & qu’on croyeàmaparolle. Puis il fait les querelles appellantfublèqucm-ment Iuppiter àtemoing, fi iniuftement & lans railbn ie requier tes hommes,ou tes biens meftre liurez qui fuis melfager du peuple Romain,ne me feufre lors iamais iouir de mon païs : il tient ces termes quâd il marche fur les limites: & au premier qu’il rencontre: & en entrant à laporte:& quand il eft à la place, en changeant quelques parolles du charme, & du lèrment délibéré. Et fi on ne rend ce qu’on requiert, il lignifie la guerre trente troys iours apres(autantenyail de lblemnels)en ces termes. Ecoute Iuppiter, &toy Iuno,Mars, 6c vous tous Dieux celeftes, terre,aftres& infernaux, le vous appelle à temôings, que ce pcuple(ille nomme quiconque il foit) éftiniufte,ny ne fait la raifon. Mais nous conlûltcrons de ces choies auec
- noz
- p.059V - vue 130/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE VI. <ro
- noz maieurs,par quel moyen nous en aurons la raifon. Quant ce meflacrer eft de retour a Rome pour y auilèr, le Roy alors requeroit l’auis des pères prefque en ces termes:quant aux choies,querelles, & caulês que le traideur de paix du peuple Romain des Quintes, a dénoncé au traideur de paix des Prilques Latins, ôc aux hommes Prilques Latins, quon deuoit liurer, faire, ôcpayer, qu’ilz n’ont liuré payé ny faid,di(parlant à celuy duquel premier il requeroit l’auis)ce qu’il t’en lêmble? Alors il difbit, ie fuis d’auis de les recouurer d’vne iufte ôc fainde guerre, &i en fuis d’opinion Ôc y conlêns:& ainfl fublêquément on demandoit aux autres par ordre.Quel-quefois la plus grant partie de l’alfillace eftoit de mefîne opinion, la guerre auoit de coutume d’ellre faide par conlêntement,que le fécial porteroit en leur contrée vn pointon, ou perche brûlée au bout, &droid en Iapre-fence de troysiouuenceaux & non moins, que les peuples des Prilques Latins, ouïes hommes Prifques Latins ont offenfé ôc delinqüé contre le peuple Romain des Quirites, que le peuple Romain des Quirites aordonné la guerre entre les Prifques Latins, ôc le Sénat du peuple Romain des Qu.i-rites a ordonné, confenti,& délibéré de faire la guerre aux Prilques Latins: à celle caufeie& le peuple Romain lignifie ôc fay la guerre" aux peuples des Prilques Latins, & aux homes Prilques Latins: ce qu’apres auoir lignifié à claire voix(que les anciés ont appelle Clarigation qualî claire adion) illançoit le pointon dedans leurs limites .-lequel ainfi lancé elloit commencement de guerre.-ce que me femble auoir oublié Virgile quand il dit. , Et pour commencement de guerre le pointon
- , En l’air il darde,
- Il y auoit aulïi deuât le temple de Beilone vnecolomnedideBellique, fur laquelle aulfi ilz iettoyent le pointon pour lignifier la guerre. Oui-de es Falles.
- Vhepetiteplace a fin regard à dos D es fupremes arrenes,ou firt d’vn grantfignal Vh bien petit pillie^ la ou pour dénoncer La guerre, le pointon on darde de la main,
- Quand les armes on prent contre Koysçgy Prouinces.
- ' De celle lorte donques lors furent premièrement les choies répétées par lesRomains,&la guerre lignifiée,laquelle coutume lapollerité a prins: combien qu’il ne le faidplus.
- DE LU FORME D’EVOQJVER^ ET vouer. Chapitre IL
- V lurplus nous auons dcnotables autheurs,queles chofes qui Ce peuuentinuentcr& machiner par force,ou d’art pourprendre ou forcer bennemy ont de coutume d’ellre fai des parle vouloir ôc dilpolition des Dieux, a fin que lôubs leur faueur ôc authori-
- p.060R - vue 131/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- té l’art fullrendudeplus grande efficace. En lêmblable auffi on auoit de coutume es lieges des villes d’euoquerauant toutes choies le Dieu par les làcrificateurs Romains, loubs la tutelle duquel la ville elloit,&luy promettre vnmelmeouplus grand honneur, St reuerence à Rome, comme quinecroyoientpas poffible d’autrement prendre la ville, St s’il eftoit,iIz ellimoyent choie execrable de retenir prilonniers les Dieux. A celle caulè celle lâindetéa duré longuement St la dilcipline des Pontifes: &elt certain que le nom Latin de la cité & du Dieu Tutellaire a elle lècret St in-cogneulôgtemps. EttoutclFoislenom duDieuellinlérées aucuns liures des anciens differens entre eux. Les vnsde vray ontpenféquece futlup-piter, les autres la Lune, les aucuns Ops confcine defquelz l’opinion fem-ble à quelques vns la plus certaine : autres, Angerone: de laquelle décile la chapelle ellhonnorée entre les plus anciennes religions : &luy lâcrifie l’on auant le vingt St vnielme iour de Décembre, St qui déelfe de lilcnce à vnfimulachre à bouche clolê le doigt delfus qui dénoncé le lîlence. Au regard du vray nom de la ville ,& d’ou il ell deriué,il n’ellrien de certain entre les plus làuans. Car comme il lèmbleaVarro &TiteLiue la ville a elléedifiee foubs l’Empire de Romuleou Reme, & nommée du nom de Ion édificateur. Il en ell d’autres qui femblent vouloir dire que le vocable Rome a elle premièrement baillé par Euander, comme il eut rencontré la bourgade, laquelle au parauat édifiée elloit appellée en Latin Valence : lequel vocable les Archades tournans en Grec, luyuant la lignification du precedent l’ont appellé ç4»« pour Valentia. Hcraclide ell d’auis qu’apres la prinlè de Troye quelques vns des Achiues vindrent en ces lieux la par leTybre, & qu a la remontrance de Rome, la plus noble des captiues qui leur failoit compagnie, ilz s’y arrellerent bruîans leurs velfeauz, St firent des murailles, appellans la ville de lôn nom. Agatocle elcrit que Rome n’elloit point captiue, & dit que fille d’Alcagne St arriéré fille d’Enée elle donna la caulê de celle maniéré de dénomination, & Je vray nom de Rome, auec defenlè de le publier .-afin que les lècres des cerimoniesne fulfentcogneuz, &qu’ilzne lôufrifient par vneeuocation d’ennemys ce que fouuent ilz fauoyent bien auoir faid contre les villes ennemyes.Mais il faut voir que ce qu’aucuns ont penfé, ne nous confonde auffi,ellimans que d’vn charme on euoqued’vne ville les Dieux, & voue Ion Ion mallâ-cre. Orelldecellefortelecharmed’ontoneuoqueles Dieux,lors qu’vne ville ell tout autour affiegée. S’il ell Dieu ou déelfe qui ayt ce peuple St cité en garde,ie te prie & honnore lur tous toy qui a prins la tutelle de ce Voundat,' peuple & cité, & vous requiers ce bien que vous delaiffiez le peuple St f Cartha- la cité, les lieux, les temples,làcrifices, St la ville, St vous retiriez lâns eux, Carthagi- mettans en ce peuple St cité peur frayeur & oubhance, & que comme rer nêfiunam pouffiez vous veniez a moy, St aux miens a Rome,& que noz contréeste-1° P^es> làcrifices & ville vous foyentplus aggreables, & meilleures, & que ^ vous ayez la fuperintendence fur moy, furie peuple Romain, St fur mes
- foldats
- p.060V - vue 132/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. <rr
- loldats, à fin que nous le lâchions 8c entendions . Si vous le faites ainfî ie vous promets de vous faire des temples 8c ieux. Il fautluiuant les mef-mes parolles faire des lâcrifices, 8c voir l’approbation des entrailles, de forte quelles promettent telles choies deuoir auenir. Au regard des villes 8c armées on les vouedecefte forteapres auoir retiré leurs Dieux.Dis, ou, toy pere de Iuppiter, & vous les Dieux infernaux, ou bien lêlon que par autre nom il eft loyfible les appeller, ie vous prie que vous tous em-phlïiés celle ville la, 8c l’armée de laquelle i entends parler, de fuyte dé frayeur, & d’epouuantement, 8c tous ceux qui porteront armes, & ballons contre nos légions, 8c armées : 8c que vous chalïiés l’armée , les cnnemys,les hommes, les villes, & leurs poffellions, & ceux qui habitent en ces lieux,régions, champs,& villes, en les priuanc de la lumière du ciel : 8c que vous ayés pour damnables 8c exécrables l’armée des ennemys,les villes, champs,Chefz, 8c âges de ceux delquelz ientend parler, loubs les conditions , Ibubs lefquelles font quelque fois les en-nemys principalement à mort Iiurés: les donnant 8c vouant, comme vicaire îuyuant par ma foy, 8c mon Magiftrat, pourlc peuple Romain, pour les armées, 8c légions, afin que vous laifliés lâins, 8clâuuesmoy,
- 8c ma foy, l’Empire, nos légions, 8c armées qui entendent a vuider celle guerre . Et li vous le faites ie vous prie que ie le lâche , cognoille*
- 8c entende. Et lors quiconque fera ce veu, qu’il die en lefaifantievous prie vous la terre, & Iuppiter par ces troys brebis que ce veu vous lôit aggreable. Alors qu’il dit la terre,il la touche de la main, & quand il nomme Inppiter, il drelfe les mains au ciel, 8c quand il le dit accepter le veu,il met les mains au pis. Voyla la forme d’attraire les Dieux, 8c de vouer, extrai&e du cinquiefme liure des choies lêcrettes deSammo-nique Serrane, contenant ces deux charmes: Lelquelz il dit auoir trou-ué en vn fort ancien liure d’vn certain Furius . Il elt vray que Tite Li-ue au huitiefme liure depuis la fondation de Rome a exprimé la ha-ftiueté de Decius vouant fa vie par vne autre forme de veu vlânt'de ces parolles : Prononce premièrement 6 Pontife public du peuple Romain les mots par lelquelz i’offre ma vie pour les légions. Le Pontife luy ordonne de prendre lôn manteau long bordé de pourpre, 8c qu’a telle cou-uerte ayant la main fous le manteau fortant contre le menton,il die tout debout auec vn dard fous fes pies. O vous Ianus, Iuppiter, 8c le pere Mars, vous aulïiQuirin, Bellona,vous les Lares, vous les Dieux fai&z tEx Ma-des hommes, & finalement vous les Dieux quiauezpuilfance lur nous, g0Non?I 8c lur les ennemys, vous aulîi les Dieux infernaux, ie vous prie en re- files,pro ueréce vous aemâdant, 8c délirât ce bien, que vous donniés vne bien heu- ”u.™n ^ reulê force ôc victoire au peuple Romain, 8c que vous enuoyés la peur, frayeur, 8c la mort aux ennemys du peuple. Suyuat dôques la teneur de ces parolles,ie voue pour la republique des Romains,pour leur armée, legiôs, 8clècours,leslegiôs 8c lècours des ennemys,8c moy aux Dieux infernaux,
- L
- p.061R - vue 133/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- & à la terre. Apres ces prières fai des,, il cômâde aux officiers de iuftice d’aller a Titus Manlius, & d’auertir foudain fô collegal qu’il s’eftoit voué pour l’armée,& fans eftre enueloppé du mateau, il fe ietce tout armé à cheual, & poulie dedâs les ennemys, eftât veu des deux armées vn peu plus vénérable qu’on ne voit les homes, comme vn làcrifice enuoyé du ciel pour appailèr tout le courroux çles,Dieux,& pour porter la pelle aux ennemys détournée des fiés.Par ce moyé tout epouuâtemét,& peur portez auecluy ont troublé les premiers bataillôs : puis fubfequémét il dôna dedâs toute la bataille. Or fut vn bien euident ligne ce, que quelque part que le cheual le portail,iiz elloyétépouuâteztout ainli ques’ilzeullent efté frappez de quelque con-llellation pellifere, Se la ou il fut abbatu de dars les troupes des Latins épaulées prindrentla fuite, & quittèrent la place. Il faut aulli entendre, qu’il ell licite au Conful, Didateur, 5c Prêteur, quand il a voué les ennemys au mallâcre, deliurer pour facrifier tel des citoyens du dedans de la région Romaine, qu’il voudra 5c non foymefme.
- DE L^i RELIGION DES ANCIENS Capitaines d'armée. Chapitre III.
- R n’a le propos rien de bellifè que les hilloircs recitét de Zaleuce Minos,Lycurgus,& de Numa,& autres féblables hômestouchât la religiô des Dieux,lelquelz ont mis en auât l’opiniô desDieux, à fin de gouuerner,drelîer, &arreller les multitudes effrenées, 5c difficiles, 5c qu’ilz amenalfentde grades nouueautez aux républiques, lefi quelles fulfient occafion de fiilut a ceux pour lelquelz on les inuentoit. En quoy outre ceux que nous auôs nommez,il n’y a pas faute d’exéples d’ellrâ-gers, ne de lèmblables homes des nollres. De vray ce Thebain Epaminon-dasaelléd’auis de ne conforter la confiance des fiés contre les Lacedemo-niés autremét que par religion,car lôudain il embla la nuid les armes pendues au téple pour paremét, & a perfuadé aux gens de guerre que les Dieux fuiuoyét leur chemin, 5c qu’ilz les lècoureroyent e'n leur combat. Comme aulfi Pericles Chef des Atheniés,& prell a donner la bataille, eutapperceu vn lieu fort couuert,& touteffois bié fpatieux, 5c confacré au pere Dis, duquel on pouuoit decouurir les deux armées,il ordonne la dedâs vn car,vn homme de llature fort haute, 5c honorablemétparé de pâtofles,d’vne bien grâde hauteur, & d’vne robbe de pourpre, dedâs lequel il feroit porté apres le ligne de bataille donné. Et en appeliât Pericles par Ion nom il l’enhorte-roit,& luy diroit que les Dieux d’Athenes elloy et la: parquoy les ennemys ont foudain tourné vifaige, d’vn cœur abbatu, 5c epouuanté. Thimoleoü aulfi de Corinthe,grand homme,& grand Capitaine au iugement de tout le monde ,auoit fantalie,que rien ne fe pouuoit mener â fin, qui full prolpere,heureux,& bien fortuné fans la puilfance desDieux-, â celle caulê ilauoitbally vne chapelle en la maîlon laquelle il reueroit lâindemenr» Or auint il aulfi des cas merueilleux â l’excellente bonté & religion de cell
- homme
- p.061V - vue 134/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI.
- homme. Il a de vray vuydé toutes les plus grandes batailles au iour de là natiuitérd’ont il efl auenu que toute la Sicile feftoye ce iour là. Vn certain Syrien nommé Eune feignant vne fureur diurne concita les fèrfs à la liberté^ aux armes quafi comme du commandemét des Dieux en louant glo-rreufèmentles cerimonies de Jadéeffe Syrie, Stpour faire foy que cela fè faifoitdiuinement, il iettoit flambe auec les parolles, ayant en fa bouche vne noix cachée etofée d’etoupes, fbufre 8c feu en la fouflant legeremcnt. Ce miracle a drefle vne armée premièrement de deux mille hommes de récontre puis foudain parle droit de la guerre, déplus de foixâte mille,eftâs les forceres deliurezdes minières ôchateliers :8c afin que rien nedefail-lift a la méchanceté, il ruina eftant paré d’habit Royal villes, chafteaux, villages 8c bourgades d vn degas miferable. Mais afin que le propos reuié-n e aux noftres, d’ont il efl quelque peu departy, Scipion le'maieur fê ven-diqueencecy vn honneur notable par fus les autres: comme qui des fbn adoîefcence eftoitplus qu’il n’efl croyable inflruitd’vne merueillcufè in-duftrie à vne oftentation de vertu 8c fàinéteté. Il couroit vn bruit,(incertain fi tout de gré, ou d’auanture) qu’il eftoit de race diuine 8c non humaine: auquel corne en tel cas, il auint, à ce aufli faifoyent le circuit de parolles,qu’vn fêrpentd’vne incroyable grandeur fut veuauliétde-famere,& qu’vn dragon epandu tout autour deluy en fbn enfance ne Tau oit point offenfe, 8c plufieurs autres telz propos propres à vn peuple ignorant. Or nourrit il cefte opinion des hommes de tel artifice,qu’il ne tenoitiamais propos de fâ génération tout de gré, 8c la ou l’on l’interroguoit fi le bruyt qui en couroit eftoit vray, il ne l’affermoit, afin den’eftre tenu pour menteur, ny ne nyoit ce qu’il auoit aggreable eftre creu de tout le môde,faifànc plus par ce filence, que s’il fc fufl prefehé filz de Iuppiter.il y aioufla en cores vne autre maniéré de religion: car tous les iours montant au Capitole auanttous affaires tant publiez que priuez, il entroit feul en la chapelle de Iuppiter, &la faifànt quelque demeure comme tenant propos auec luy, (ce qu’il auoit perfùadé au peuple)il partoit de la plein de bon efpoir pour mener les affaires, &eft certain que cela a bien fèruyaux foldats pleins de fuperflition &efperancepourla victoire, quafi que les bonnes auantures fuffétpromifèsduciel.LuceSylla feignit que les Dieux luy predifoyet l’a-ueninàfin que le foldat fuflplus délibéré au cobat.Finalemet aufli auâtque venir au combat il prioit l’image d’Apollo qu’il auoit prins à Delphos. Le priât de hafter lavidoire promifè. C.Marius a eu vne féme Syrienne nômée Marte, qu’on difoit diuinereffelaquelleaflifè en vneliétiere il menoit bien parée, la feignat luy prédire l’euenemét des batailles. Comme QJîertorius faydafl d’vne armée de gés barbares 8c fas cofèil,enclins touteffois à la reli-giô, il menoit par le Portugalvne Biche blâche corne vn dô de Diane à luy tranfmisraffermàt cognoiflre par elle les chofês qu’il deuoit faire ou euiter. Car toutefFois& quates qu’ilauoit féti fècreteméc que les énemys efloyéten trez es limites en armes,ou qu’ilz auoyét pris quelque ville,il feignoit que
- p.062R - vue 135/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- la Biehe le Iuy auoit dit en dormant, à fin de fe confèruer fbn armée.De re-chefauffi fi on luy r’apportoit quelque vidoire de quelqu’vn de fèsCapitai nés, il cachait le courrier, & coronoit la Biche difant quelle luy auoit rapporté bonnes nouuelles, & qu?à celle eau le il failloit fupplieraux Dieux, comme qui auoyent à ouyr quelque bône fortune. Par ce moyen illes for-çoit de tant plus à luy obéir comme qui n’eftoyent pas menez par vn homme effranger, mais par le confèil de Dieu, & par vne grande religion. Finalement outre ceux cy on peut voir Marc Furin Camille, homme de grande faindeté, paix, & véritablement finguher en guerre ,& les autres excellens tant des Romains que des effrangeres nations iahors denoffre mémoire, lefquelz tu trouueras auoir fai t grandes vidoires, & acquis vne gloire defirée, comme qui plus que les autres auoyent mené leurs guerres auec vne fongneufêreuercnce des Dieux, & deleurayde.
- QJVE L.A GVERJ^E ESTOIT VNE CHOSE fe cerimonieufe, que ml nefiottreceu au nombrefans ferment. Chapitre I I'I I.
- E meftier de la guerre,a efté auffi mené d’vne fi grade cerimonie, que nul n’y eftoit receu fans faire ferment, ny n eftoit licite à home d’y prendre charge s’il n’eftoit homme de guerre, d ont fi tu yeulx auoirtemoignage Cicéron eft vn temoingtrefifufifant en a fôn premier des offices. Pompillefdit il)tenoit la prouince en chc£ en l’ar-3j mée duquel le filz de Caton fit fà première guerre.Et comme il fèmblabon si àPompuius derenuoyer vne légion, il renuoya auffi le filz de Caton, qui s> en eftoit. Mais comme de defirde voiril fuftdemouré en l’armée, Caton ss efcriuit à Pompille,que s’il le vouloir fbuftrir au camp il print de rechef fbn s> ferment, car il ne pouuoit raifonnablement-combattre l’ennemy,eftant ss quitte du premier. Il y a lettres du viel Caton a fbn filz Marc par lefquelles il luy eferit auoir efté auerty que le Conful luy auoit donné fbn congé,lors que durant la guerre de Perfe, il eftoit foldat en Macedoyne.Parquoy il luy remontredenecombatrepoint.Ilnyoitde vray celuyauoir droit decô-batre l’ennemy, qui n’eftoit point foldat. Voylacomme ceft homme ainfi fage ne tenoit point pour home de guerre, finô celuy qui auoit fait fermer.
- DE QJfEL TEMPS PREMIEREMENT
- le ferment de la guerre a efté d\n accord voluntaireprins entre les gens de guerre, ttanfferéaux Tribuns, & à vne legale afiion de iurement,
- CT que c’eft quil% iuroyent. Chapitre V.
- f Ex Tito LiuioLuc» Acmiho proflacco.
- Es gés de guerre ont premieremét faid fermer fbubz Luce Emilie Paul, & C. Varro Côfulz au parauât ilz vouoyent, & iuroyent tant fêulemét entre eux d’obeïr au commandemét de leur Capi-taine,ou de leur Tribun,de n’abâdonncr l’enfêigne,de bien cô-
- batre,
- p.062V - vue 136/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- 3)
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. <r3
- batre, 6c de bien defendre :ne fuïr point la mort, garder Ion rancen'com-batantj & le garder en chemin an t, donner fecours aux lafïéz, couurir les blelfez, de fe trouuer au iour de la montre, 6c de repondre au Chef, eflant par luy appelle. Ce que Tire Liue n’a pas oublié au vingtdeuxiefme Liure depuis Fedification de Rome. Les Côfuls(ditil)retarderétquelques iours apres la Ieuée faitte, iufepes a ce que les alliez de la nation Latine vinifient. ^
- Etlors les lbldatsf(cequ’auparauantn auoitiamais eflé fait)furent con- pExTi'to traintz de bailler leurs fermens auxTribuns des gens de guerre de venir Liuio Mi au commandement des Confiais, 6c ne s en aller fans leur congé. De vray .lues tu”c iln’yauoitiufques àceiourlaqu’vn fainélveu, &lâoulesgensdecheual quaman-efloyent affemblez en leurs dizenieres, 6c les gens de pied à leurs centenie- tea. res,ilz iuroyent enfémble volontairement, les vns en leur dizeniere, 6c les autres en leur centeniere de n’abandonnerI’enfèigne de peur^ oupourfuïr, nedelaiffer les ranez^finon que pour prendre, ou aller quérir baflons, ou pour frapper fennemy, ou pour fàuuerle bourgeois. Lequel ferment eflat entre eux d’vn accord voluntaire, a eflé tranfmué par les Tribuns à vne le-gale contrainte de ferment.
- LES P^AROLLES DV TRIBUN D ES
- gens degtteïrej^itand ïl faiïïoit faire leuée. Chapitre VL
- »
- Indus en fon cinquiefme liure de l’art militaire dit, que quand on faiioit vne leuée anciennement, 6c qu’on enrolloit les gens de guerre, le Tribun les faifoit iurer en celle façon de langage au Magiflrat de C. Lelie, 6c C. F. Confulz, 6c L. Corneille,
- P. F. Confulz,Tu ne feras point de larcin en l’armée, ne à dix mille au près par malice, féul, ne en compagnie qui paffe troys fdlz fix deniers par iour, 6c fi outre cefl efpace tutrouuesfvnpointon ou ballon ou vne pe^p°bo broche a cinq ordres,chieure à vin,fouffletz,torche,& tu l’enleues n’eflant ium pro tien vaillant plus, tu les porteras a C. Lelie, C. F. Confulz, ou bien a L. pompabn Corneille, P. F. Confulz,ou bien a quiconque foit d’eux que le Tribun um' commandera toubien tu promettras que dans troys iours prochains tu rendras,félon queparraifon tu voudras eflre fait au maiflre,auquel tupen-féras appertenir tout ce que tu auras trouué, ou enîeué de malice. Apres le rolle fait on leur affignoit iour de montre, pour repondre au Confiil les appellant. Subfequemmentle ferment feprenoit en celle forme pour s’y trouuer auec fés exceptions : Si aucune de ces caufés ne Ce rencontre,com-meles funèbres del’amy, iours de vendenges(qui n’auront point efléor-donnez tout a efïient a ce iour la, à fin de ne s’y trouuer)maladie côtinuel-le, ou bien iour d’aufpice, lequel il n’efloit pas raifonnable de paffer fans fàcrifice,ou bien le fàcrifice anniuerfiire, qu’on ne pourroit faire qu’au mefmeiour.Sidonques aucune de ces caufés entreuient,à lors il le pourra troys iours apres.Et côme l’homme de guerre efloit abfent au iour ordôné,
- L iij
- p.063R - vue 137/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN *
- ny n’eRoit excufé,il eftoit confoquemment condamné pour abfont,8é au furplus les gens de guerre iuroyent par Iuppiter, 6c Mars,comme le temoigae Pline.
- QJVE LE S EK ME NT DES CHEFS DE guette ejioitïeleuation dufceptre. Chapitre VIL
- Eux quiauoyent la conduite de la guerre iugeoyent aucunement les controuerfies: ce qu’aucuns faifoyent par ferment, les autres non. Or auoyent ilz le formét par l’eleuement du fceptre, ainfiquedit AriRote. Voylaqui fufiiraquantàlaformedu ferment de la guerre 6c du Chef.
- LE MOYEN D E D I VF RS ES N M TIO N S a leuergens de guerre. Chapitre MlIL
- Omme il foit deux choies qni font Hiômme de guerre, qui font laleuée,&le forment, 6cqueia liait efté plus qu’afTez parlé du fâcrement, il nous refte à parler de l’autre. En celle leuée dôques idegens de guerre la nature du peuple, 6c de la région elEpremièrement aconliderer, veu que de la diuerfité de l’alfiete des terres, 6c du regard du ciel fo forment les faces,voix, 6c couleurs des hommes auec les Lineamens 6c qualitez des coeurs , 6c qu’il n’y a point de doute qu’ilz feffeminent fort d’vne trop grande douceur du pais, & a la région quelque pouuoir pour donner vigueur aux cœurs, & pour aufli le corrompre. Voyla d’ou vient que les Egiptiens font de leur nature légers, euan-tez,inconRans, furibondes, venteurs,iniurieux, mutins, & variables à tout vent. Et les Romains graues,les Gréez glorieux, auares, 8e légers, d’ont les Athéniens font de meilleur entendement, les Carthaginoyz cau-telleux, 8e trahi lires: les Galates incenfoz, 8: fi nous croyons à Diodore, molz, de grandes menaces, detradeurs 8e fiers en leur opinion, d’elprit vif, 8e dociles:les Numides mobiles, 8e lans foy: les Perles, 8e Allobroges cruelz:les Hefpaignolz rudes:les Dannemarchoyz furieux:les Ale-mans courageux, 8e cruelz de grande Rature: les Gauloys de cœur plus grand que ferme, delquelzfolô le témoignage de Iulle Celarau huitiefme liure de la guerre de la Gaule,le cœur n’efi pas foulement aîlaigre,mais aulfi prôpt a entreprédre guerres, aulïï elt il mol 8e de petite refilléce à porter les calamitez:8e tout ainfi que corne dit le pere des hilloyres leurs corps portée trelmal le trauail, 6c fo lâcher à la chaleur.Leur premier combat elf plus que d’homes,&ala fin moindre que de femmes.Il eft tout certain queli tu fou-Riens leurpremeier fureur, qu’ilz iettét d’vn cœur bouillat, 6c de courroux hébété,leurs mébres fo lâcher de Tueur, 6c lalfeté, les armes leurs tombét, le foleil, lapoulfiere, 6c la foif combat leurs corps, 6c leurs cœurs mois apres la
- furie
- p.063V - vue 138/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. <j4
- furie palïee,de forte qu’il n’eftbefoin de grandes armes. Que diray-ie d’aucunes parties de l’Afie, comme la Phrigie & Carie ? N’eft il pas vray,fi nous croyons à Cicéron,& à l'ancien prouerbe que les Phrigiens faccouragent aux coups.Que dirôs nous de toute la CarieïN ’eft ce pas vn commun pro-uerbe,que li tu veux rien entreprendre de périlleux, il le faut faire auec vn Carien ? Que diray-ie au furplus des Candoys, lelquelz félon l’opinion du poëteEpimenide(laquelle Callimache a depuis vfurpé) il eft certain auoir toulioursefté menteurs,mauuailes belles,& ventresparefTeursîFinalemét ceux qui font prochains au pôle Méridional, aflis fous le Zodiac, ou bien qui ont leur regard à la région Oriétale font de petitte ftature,& beaucoup plus que nulz autres, promptz, & foudains, d’vne incroyable viuacité aux bonsauiz de la guerre, pour la fubtilité de l’air caufée d’vne chaleur fort apre.Et tout ainfi qu’ilz ont beaucoup d’efprit,& rulè,aufli ont ilz bien peu de cœur.Car il eft bien raifonnable qu’ilz fuyent le combat,atteridu le peu de làng que l’ardeur du foleilleur a laiffé,comme dit Lucain:
- )} Tout ce qu’à l'Orient,&aux chaudes contrées
- „ Naiftyeft de lâche coeur,la clemence du ciel
- » Lespeuples amoüift,0 là les veÛemens
- » Des hommes tu verras à deliure 0 bien longs.
- Au regard des nations,& peuples viuans fous le Septentrion, ilz font de ftaturefort grande auec beaucoup de fàng,pour l’abondance de l’humeur, & elpefleur de l’air la epandu. Et tout ainfi qu’ilz ont l’entendement hébété & pelant,aulfi font ilz d’vn cœur grand & fier,& pourtat beaucoup plus enclins a la fureur des armes,& qui au demeurant vont hardiment au com bat,& aux coups pour leur abondance de lâng.Et fi par fortune quelqu’vn en fait doute, la grande diligence de Lucain l’appreuue en deux palfages, dilànt premièrement ainfi:
- Les peuples font eureux en leur erreur, lefquel^
- » Sont fous le pol ^/inique,0 qui ne fontpreffeg^ ,
- a De lapeur de la mort U plus grande de toutes.
- » Par la les hommes font enclins de fe ietter
- 33 Au péril de la mort,tépargné de la vie
- 33 Leur femble chofe lâche.
- Et autrepart.
- 33 Tout peuple fous le North qui fa naiffanceprent
- >3 Eft de guerre indomtable:0 de Mars amoureux.
- Les corps aulE des Alpinoys nourriz d’vn air humide,ont quelque con-uenance auec leurs neiges, & font de melme nature que leur ciel, comme dit le poëte.Car quandla bataille eftelchaufée, ilz fient incontinet,deue-nans lâches d’vn leger mouuement,quafi comme d’vne lueur. Corne don-quesvn air chaud rendre les entendemensdes hommes plus lubtilz, &c promptz aumouuement, & qu’au contraire le froid les face plus lourdz, d’autant que le froid eftpelànt, & parelfeux, comme on le voit es lêrpens,
- L ni)
- p.064R - vue 139/480
-
-
-
- t Lego Tribunos proTriu viro;.
- ROBERT VALTVRIN
- defquelz eftant la réfrigération de l’humeur chaffée par l’ardeur du foleil femeuuent ville, &: combattent liereméc,mais aulïi font ilz en hyuer pref-que immobiles & tranliz,pour autant qu’ilz font refroidiz par l’humidité de 1 air. Il faudra donques élire ceux3qui aurôt des leur naiflance aquis vne moyenne qualité des contrées, & régions, d’autant qu’ilz participent de deux natures, & qu’ilzfont naizpourcontemnerlamort, &pour mener leurscombatz d’entendement &de hardiefle :ioint que ce tant falutaire mellement des deux, rend les elpritzpleins de lèns à tous actes, coutumes, & façons de viure, & capables de tout Empire, & de toute nature, comme font tous les Italiensdelquelz par force ont aquis los inuincible,& immortel contre la vertu des Barbares, & de conlêil contre les rulès des Méridionaux parvneiouifïance de tout le rond delà terre.Pour lequel acquérir facilement il faudra ordonner entre eux des hommes d’vn excellent entendement, & enteduz en l’art militaire : lelquelz auront a prendre la folicitu-de,& faire extreme diligence,que nul homme de guerre foit palTéà la mon tre contre l’ancienne mode qui foit moindre d’age pour la force, ou bien trop plus auâcé que ne le peut porter la nature humaine.Or a Tubere elcrit au premier liure de lès hilloy res, que Sérum Tulle Roy des Romainstref-làge a ordonné le commancement, &lafinde celle façon d’age depuis le dixlèptielmeiufquesau quarantième an,d’autant qu’il les ellimoit lors mettables. Nous auôs aulîi entédu que le Sénat auoit de coutume de créer deux f Tribuns pour celle leuée de gens de guerre,d ont les vns au dedas, & outre cinquante miles,regarderoyent es places, marchéz, allemblées tous les gentilz-hommes pour les faire gens de guerre,encores qui ne fulfent de Page requis,la ou aucuns d’eux lèmbleroyét de force fuffilànte pour porter armes, ôc que les Tribuns de la cômuneferoyent leur rapport au peuple f bon leur fembloit, que ceux qui elloyent moins agez quededixlèpt ans, aufquelz ilz auoyent fait fairelèrment auroyent la loude tout ainli quefilz les au oyet,ou plus.Ny n’ont point autremet Iunius Diélateur éleu de l’au-thorité des Sénateurs,& le Connellable Titus Sempronius fait enrôller en fiifant leur leuée les moindres d’age de dixlèpt ans, d’ont ilz drelferét quatre légions, & mille cheuaux. Philippe a premier entre les Roys de Mace-doyne,& foudain apresluy Aîexâdre ordonné deprédrenonlèulemét les moîdres de dixlèpt ans,&iouueceaux,ne lèulemét la ieunelfe de bone force pour drelfer vne armée,mais aulîi les vieilz loldatzdefquelz iadis auoyéc fouuét,& lôguemét luïuy les bades:& ceux aulîi qu’à bône railon tu ne di-roys tât loldatz q chôyli z pour Capitaines & Tribuns pour la reueréce de la vertu,&grâde fagelTeJl en ell aulïi qui lont d’auis d’auoir égard en celle leuée à la grade llature, car ilz dilènt q la force & grade vigueur côlille en vn gràd corps tout ainli q la beauté. Nô fàs caulè dôcques diloit Pyrrhus à Ion côtrolleur,élis les plus gradz,ie les rédray alfez hardis. Il n y a toutelFois pas grâd égard,pourueu q les autres marques de bôté faccordét,fiIz fontgrâdz ou cours.Il ell beaucoup meilleur d’auoir égard à la vigueur qu’à la llature.
- Aulîi
- p.064V - vue 140/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI.
- Aulïî n*y a-il pas faute d’autheurs renommez,qu’il a cfté des cheualiers Ro mains de trois piedz de haut,tout ainfi que C.Marin ayat pouuoir de dref-fer vne armée d’vn choys de deux autres qui auoyent efté fous Rutille,lôus Metel, & depuis fous fa charge melme,choifit fur tous autres foldatzle petit Rutilian: d’autant qu’il ellimoit mieux apprins au meflier de la guerre. Ce mefme Marin eflant déclaré Côful, & faifant vne leuée de ges de guerre,enrôla les fracs de pauureté,laquelle maniéré d’hommes n’auoit iamais au parauat efté receu par les autres Chefz d’armée.Car ces anciens n’auoy et point de coutume de départir les armes linon aux nobles, & aux gens de bien & debonlcruice, iugeansle bien eftre quelque gage pour bien faire fon deuoir. Aucuns dilent que Marin le fit d’vne arrogâcedeConful contre la Ioy & coutume des anceftresdes autres,par faute de finaces.Mais craignant depuis que celle façon de leuée de foldatz luy pourroit donner mau naisbruyt,& que le Chef nefuflparvn diffameappelléCapitainefracpar pauureté,trouua bon de calïer celle maniéré de gés de guerre. Et combien que iulques à ce iour la la Republique Romaine portail mal enuye l’enrôlement d’vn homme pauure quoy qu’il full noble,elle a toutelfois ellé con trainte de leuer des cabanes feruiles &c burons des palleurs, vne maniéré de villennaille par maniéré de dire,& la ioindre a lès legiôs comme pour vne bien grande force.Comme aulïî en la lècôde guerre Punique il y eufl faute de gens a la leuée, les lèrfz promettans de combatre pour les maillres furet receuzbourgeoys, & appeliez Volones, d’autant que franchement ilz le voulurét.Le Sénat aulïî au temps de la melme guerre,apres quelques melâ-uanturesde batailles,& la diminution des légions Romaines fut d’auis qu’on acheteroit des lèrfz des deniers communs, dont certainement il en fut acheté quatre vingt dix mille, & les enuoya au camp apres auoir prins fermes deux de combatre en gens de bien, & de coeur tat que les Carthagi-noys fou leroy et l’Italie. Apres la perte des Romains aux Cannes,le defaut aulïî d’homes libres auec la necelïité fit faire vne lèmbîable leuée,tellement qu’ilz’armerent buiôt mille robulles iouuenceaux elclauesachettés des finances publiques interrogans chacun d’eux filz vouloyent lîiyure la guerre: & combien qu’on eut peu r’achetterfix mille Romains a moindre pris, qu’AnnibaItenoitpnlbnniers,la Republiqueayma touteffois mieux en vn fi grand trouble le fier aux elclaues: auquel tempsotv dit que plufieurs iouuéceaux, & plufieurs ban niz ont porté armes, & que fix mille hommes condamnez a mort furent enrôlez. Mais apres la perte auprès du lac de Pe-rouze les Libertins aulïî furent receuz au ferment. Le deuoir aulïî des bandes drellées de douze mille Libertin s lè môtra d’vne vertu mémorable con treles Gauloys durât la guerre fociallc. Comme aulïî les Latins fubiuguez par les Romains, ne voululfent point bailler gens, il fut fait vne leuée de la ieuneffe feulement, & drelfées dix légions qui reuenoyent a fbixante mille hommes,ou plus fous la charge de L.furin, ellant encores la force des Romains petitte.Nous trouuons que quâd Celàr remplilfoit les bandes,qu’au
- p.065R - vue 141/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- lieu des mors il receut des ferfs de fesamys, du deuoir defquelz ilfeftoit bien aydé.Cefar Augufte leua plufieurs bades de Libertins en TAlemagne ôc en la Sclauonie, lefquelles il appella vouluntaires. Mais a fin que tu ne penfês cela eftre fêulemet auenu à noftre Republique,les Boriftenides eftâs afîiegez par Zopirion ont fouftenu le fiege en donnant la liberté aux ferfs, aux eftrâgers la bourgeoyfie,ôc aux obligez l’abolition de dettes. Cleome-nes Laccdemonien n’ayant plus que quinze cents Lacedemoniens,qui peuffent porter armes leua neuf mille nommes de guerre des fêrfs affian-chiz.Les Athéniens ayant employé toutes les finances publiqu es affrachi-rent les fêrfs. Caton le Cenforin difbit que le foldat de quelque condition qu’il fuft ne luyeftoitbon, quiencombatant remuoitles pies tout ainfi que les mains en marchant, ôc duquel les ennemys decouuroyent de plus loing le coucher,queles cris. Il difoit d’auantage qu’vne ieuneffe qui rou-giffoitluy plaifbit plus que celle qui palliffoit. Et corne il fattachaft à grof-fesparollesàvn certain homme replet, il luydemandaen quoyil penfoit quecefte forme de corps pourroit faire fêruiceà la Republique,duquel tout ce qu’eft entre la gorge ôc le nombril eftoitfous lapuiflance du vêtre. Auffi ne fèmontroit point autrement ceft EpaminôdeThebain courroucé aux bien gras, comme qui en caffa vn de fon armée, difànt qu a peine pourroyent trois ou quatre boucliers couurir le ventre de celuy pour la grâdeur duquel il ne pouuoit voir fbn membre viril . Nous auons fèmbla-blement leu quelesCenfêursauoyent anciennement de coutume d’ofter le cheual à vn homme replet, ôc corpulent Teftimans moins idoene a faire le deuoir d’vn homme de cheual pour lepoys d’vnc fî grande maffe. Cefar trouue bon de choifîr l’homme de guerre, non pas pour fà ciuilité, ne pour la belle taille,ne pour l’abondance ae biens,mais tant fêulemet pour la force des membres,fuyuant en cela fês anceftres comme ie croy. Car tout ainfi que cefte vrayc race de Romule exercitée aux champs & villages eft faide de corps merueilleufêment robuftes, aufïi a-elle au befôin toufiours préféré la commune des champs pour le choys desfortz, ôc vaillasfbldatz à celle des villes. Et tout ainfi que les anciés appelloyet toute maifôn des châps (ortus) iardin ou naiffimce,d autant que ceux qui pouuoyent porter armes y naiffoyent,auffi ont il-z apres les guerres affoupiës ordonné les villes pour augmenter la Republique, lefquelles ilz affignoyent à leurs foldatz vido-rieux pour guerdon, ôc les ont appeliez (Colon* ) de ( Incolo) habitans. Voyla comment auffi les citez faides desplus grandes,quafi comme reiet-tons de peuples font appellées Colonies. Iulle Cefar auffi a retenu Thème de guerre tiré du labeur des champs à la fôude, ôc a enuoyé les vieilz fol-datz aux Colonies. Le Diuin Augufte auffi mit es Colonies ceux qui a-uoyenthaté la guerre fous Antoyne, ou fous L. Lepide, Ôc ceux auffi defes legiôsdes vns en Italie,les autres en certaines prouinces. Et apres auoir rafé les villes des ennemys il en édifia de nouuelles, Ôc en tira aucunes des anciennes bourgades,ôc les appella Colonies. Il repeupla auffi de plus grand
- nombre
- p.065V - vue 142/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. ce
- nombre de citoyés les villes deftruiétes par les Roys, ou Dictateurs, & celles que la guerre ciuile auoit ruiné,en leur baillant de rechef le nom de Co Ionie.La Republique aulïi Romaine retint ala ville les gés de guerre comme duïlâns a tous, veu qu’ilz luy eftoyét neceflaires pour par force repoul-férla force des ennemys,& qu’aufïi a peine pourroyét ilz toufiours mener vn mefme meftier de guerre, & a donné ordre que chacun àfôn tour, & félon fa condition feroit le deuoir. Parquoy le laboureur alloit à la guerre à fon tour,ou bien quand la necefïïté de la Republique le requeroit, laiffant ion labeur, & en oubliant le meftier de l’agriculture il faifoit celuy de la guerre comme tout chagé,puis de rechef il retournoit à la charuë non pas comme foldat ou Capitaine,mais comme Iaboureur.Ny ne leur eftoit hôte en delaiftant les armes de reprendre la vie champeftre contrain&s pour la difêcre de biens.De vray les plus grandz de la cité viuoyent es champs en ce temps la: & lors que la diette auoit de coutume d’eftre faite on les appel loit des villages au Sénat. Ce que certaincmet eft tat véritable,que les honneurs dônez à Attille Serrane ayant à reccuoir l’Empire des Romains,l’ont trouuéfémantjd’ont depuis il eut le furnom. Vn huiflier apporta la Dita-tureàQiiintius Cincinatus labourât huit liens arpés Romains en la contrée Vaticane,qu’au parauant on appelloit les prés Quintiens. De laquelle apres auoir deliuré d’vn fiege le Côful auec fon armée,il retourna de rechef (laiftant les verges & doloueres) a fés bœufz eftant delà en auant bouuier. Outre plusC.Fabrice, &Curin le denté, defquelz le premier apres auoir chaffé Pyrrhus de l’Italie, & l’autre apres auoir fùbiugué les Sabins n’ont pas exercé l’agriculture de moindre induftrie qu’ilz ontcerché l’ennemy de grand cœur, SchardiefTe. Ny nefautpasenpenfer moins de M.Furin Camille, & dallez d’autres mémorables Capitaines de la nation Romaine, fadonnans du tout à ces deux maniérés d’exercice tant pour la defenfè que pour l’agriculture de leurs pais,ou confins côquiz félon que témoigné Lucain difànt:
- 1 ‘ On fuit la pourettê que tout le monde blâme,
- D’ont toute nation bores quiertà fes terres Ioindre longues limites, CT fous les laboureurs încogneu^ loing leurs champs etendre que iadis Le robufte Camil de fon foc f donna,
- Et qui des Curionsfou frit ï ancienne houe.
- Veu que la différence, & l’honneur de la cité ne vcnoit que de la, ne les fùrnoms des anceftres. De vray aufti quelques hommes de renom penfént que les Fabins n’ont point efté premièrement ditz Fodins finon du fouil-lement de la terre, & que depuis en changeant deux lettres ilz ont efté fûr-nommez Fabins, parauanture pour le labeur fingulier qu’ilz faifoyent de feues. Car à la vérité félon que chacun faifoit quelque bonne fémence, ilz feceuoyent les furnoms de Fabins,Lentules,Cicerons . Et ainfi ont ilz appelle Bouuiere la famille des Iunins, comme qui vfoyét de bœufz. Ce que
- p.066R - vue 143/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- non feulement ont fait les fèmences, mais aufli eft il certain qu’vne truye, & anefle ont donné des fiirnoms à grandz fèigneurs, comme à Tremeille, & au Chef de la race des Cornelins,& à tous les Cornelins ôc Scipions. Finalement Syluin duquel font tous les Roys des Albanins appeliez Syluins ne ficfl point procuré ce nom entre les Latins, finon d’autat quil auoit efté nourry es foreftz & aux champs, & en tant que les races ruftiques habitans en la campagne eftoyent tenues pour les plus louables, & les viliotieres blafmécs de pareffe: aufquelles aufli laretraitte pour habiter eftoit igno-minieufê: ie penfè que c’a efté à fin que la Ieuée fè fift des gens champeftres, d’autant que fans peler a mal ilz font plus idoënes de porter chaud & froid, poudres & neiges, de paffer les riuieres à gué, & de monter plus Iegeremét les montagnes, veu que leurs membres font endurcizàporter tous maux: ioint aufli que lesnonchallans de toutes delices, &voluptez fèmblentà bonne raifon n’en deuoir pas faire grand cas en la guerre, veu que mal trai-<5tcz de tant de trauaux & peines ilz en font deliurez. Celuy certes qui vit plus groffement, creint ie ne fçay comment moins la mort. le ne fuis pas toutefois d’auis qu’on doyue nier qu’on n’ayt leué dedans les villes de bôs & hardiz foldatz Gréez & Romains auec los & honneunmais c’efloit d’au tant que lors ceux la n’eftoyent point corrompus de repos, langueur,& pa reffe, ne de plaifîrs, ne d’vmbrages,ne en delices, ne de ces autres voluptés, mais acoutumez à prendre le péril d’vne honte d’infamie,&d’vn defirde gIoyre,tous telz qu’efloit he£tor,& Diomedes,que Homereprend d’entre les citoyens, ont efté le fâlut, & fondement de la Republique, & decefi grand Empire Romain. Au regard des gens de guerre villotiers de noftre temps qui font accouftrésrichement, perfumés, parés, ôcainmentiz aux amiellemens de villes,attédu qu’vne fèuere difcipline à raifon du lieu con-ferme l’efprit,& le rend plus propre a grandz effortz,ilz ont le plus fouuent de coutume fil faut çombatre de ne fèruir pas tant à leur Capitaine pour la viétoyre qu a prouoquer Penncmy au butin:attendu qu’ilz n’ont pas grande fiance aux armes legeres,&peu de vigueur eftas bien equippez. Et pourtant comme Hannibal Ce fuftretiré pour fâ fâuue au Roy Antiochus,il luy donna vn plaifant brocard dont voicy I’occafion. Le Roy Antiochus luy montroit vne grande armée qu’il auoit dreffé pour çombatre les Romains parée de pourpre, 8c d’enfeignes d’or, ôc d’argent ôc appreftz de richcffes, faifant auffi marcher des cars a faux, & des Elephans auec leurs tours, & la cheualerie auec vne fplédeur de freins,ioyaux & bardes. Et comme le Roy merueilleufèmét glorieux en contemplant celte arméefî grade, & fi braue-mët parée regarde Annibal : Penfes tu point(dit il)que toutes ces choies ne foyentequiparables aux Romains,&fuffifântespoureux?Alors Annibalfê moquant de la beftifè ôc ignorance de fês foldatz tant richcmét parés : le le croy,dit il,véritablement,quelque extrême auarice qu’ilz ayent. A la vérité aulîi ne pouuoit on pas mieux rencontrer, ne mieux mordre. Le Roy de vray f’eftoit enquis pour le nombre de fon armée, & pour en faire la com-
- p.066V - vue 144/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VR ^
- paraifon, Annibal luy répondit de la proye, comme y e liant celle maniéré d’hommes coutumièrement expofée. Iîlàuoittrefibienque lefoldatpau-uremét veftu le côfie à l’elpée,& aux armes,fans eftre paré de pourpre, d’or, & d’argent : & que ce tant riche apparat d’armes eftoit plus véritablement proye, qu’armes: lelquelles font tout ainfi difformes entre les playesSc lâng quelles font belles auant le combat: que la vertu ell la gloyre du fol-dat : au regard de toutes ces autres choies, elles fuyuent la viéloyre : & que l’ennemy riche ell le guerdon du vi do ri eux, combien quepauure.Si Nafb donques finalement ne repoullè pas feulement celle façon de gés de guerre de Ion art militaire,mais aulîi leur deffend les approches, corne vne certaine pelle, & infedion, qui les croyra deuoir ellre receuz en vne forte armée? linon que parauature ils le foyent voué auec Darius,ou plus toll auec Thrafoa la guerre de Venus, pour comme luy, forcer d’alfaut Thaïs auec vne armée de maquereaux,femmes, & ennuches, & autres minillres de vo-luptez,& d’vn villain mellier, & art, en dédaignant Mars contre l’ordonnance non feulement d’Annibal,mais aulïï de Caton, & de l’ancienne mode de faire?Ce que Lucain a exprimé en peu de parolles.
- Duquel le longmanteau a les membres pelhi%y
- Enclos à la façon des Qmrites Romains.
- Cell autheur fi gran d n’eull pas tant loué cela, fi l’vlâge de la mante rude ne full venu par la coutu me des Quirites. On doit donques élire entre tous autres hommes ceux qui auant le combat ne font pas branler leurs pointons a la façon des Samnites,pour par apres ne fien ayder à la bataille. Mais au contraire ceux qui apres fencllre ecarmouché,auront lepouuoir defen ayder au combat.
- DV CHOYS DES QHEVAVX.
- Chapitre IX.
- Vis que nous auons fuffifâmment parlé du choys des gens de guerre,venons maintenant au moyen & ligne du choys des che-uaux pour la guerre,par Ielquelz les foldatz cognoillent les marques des excellens cheuaux pour n’ellre trompez à l’achapt, & qu’ilz ne perdent leur trauail,& depenfo en vn lâche cheual. On l’epreuue par nature, parles conditions,au poil, à la taille, & au lieu de la nailfance. L’epreuue par nature ell, f’il elt ioyeux,follallre, & délibéré, fil eft hardy fans feffrayer de quelque choie nouuelle.Celle de lès conditions ell quand d’vne gayeté,& furie on le rend doux,& trai6lable,& qui d’vn grandrepos ell prompt a l’eperon ou bien aiféàarrellerenlàcourlê:c’ellàdire qu’il loit glorieux auec attrempance,& crainte, & prompt auec vn manimentparla feule parolle & raifon. Le cheual au contraire,ell blalmable, lequel ell mal faÇonné,etourdy,lânscœur,&retifidur au fouet,& à l’eperon, & qu’on ne peut donter au frein, ne à coups, êc qui en le cheuauchant ruë, ou bien en prenant le frein aux dents, à fin de n’ellre maillrié donne de violence de la
- M
- p.067R - vue 145/480
-
-
-
- 33
- J)
- 33
- 33
- 33
- 33
- t Nefcio
- vndc hic
- exccrpùt
- hune Brc-
- num fbiffe
- Britannu,
- queLiuius
- teftatur
- Gailoruia
- regulum.
- ROBERT VALTVRIN
- dent au chcuaucheur,ou carretonle tranfportant & rauifTant par terre en lieu, auquel il n’euflofé defoendre volontairement. Dont il auientquefi quelquefois il faut aller faire telle à lennemy, ileftnecefiâireau cheuau-cheur de demourer en croupe de la troupe,ou bien dire inutile par la mau-uaillic du cheual. Mais entre toutes les diuerfités de poil, deux tant feule-mét font a conliderer.Le blanc bien poîy,& le gris pomelé,fubfèquemmët apres le moucheté,puis l'Alezan, c’eft à dire, qui tient beaucoup du rouge ardant,comme font les fruicls du Dattier, que le loleil n’a pasencores du tout meury, & pourtant vne branche du Dattier ell appellée roulfe. Quant au corfàge, il le faudra choylir d’vne telle éueillée, petite, & feiche, la peau tenantprelque aux os-.l’encolure haute & releuée-.petite oreille & pointue: l’œil grand,gros,& noir, ouroulfâtre, qualî comme ellincellant.-nalêaux fort ouuers, à fin que par les deux trous il puiffe plus ailemet pouller & r’a-uoir fon ventile crein efpes & pendant à dextre : les couilles petites, & égalés: croupe ronde : longue queue : laiambe louple, haute & droitte : le pie foc,haut,bien vuydé,& rond : & que finalemët toute la taille {bit bien proportion née,& bien ordonnée par tous les membres,& qui foit grad, haut, & bien releué: & qui(commedit Xenophon)aelléeleuéenpaïspierreux, Sc au demeurant comme dit la Satyre.
- De mefmes louons mus le cheualquieflvifte,
- Auquel facilement dedans le rauque parc La palme ejldefîrée,& treffaut la ViSlojire.
- Celuy noble fera de quelqu haras qu il foit Quilès autres deuance appertemeht}&qui En la pleinepremierfait "voler U poulfere.
- LE MOYEU DES NATIONS à élire v» Chef Chapitre AT.
- Près le choys faiCt des foldatz,& des cheuaux propres a la guerre, nous cerchons quel Chef il leur faudra bailler en déclarât les vo luntés & affections des nations en cela. La loy défend aux Iuifz l'effranger, afin que lapuiffancede fon authorité ne corrompe le deuoir de leur religion. Au regard des autres nations, il f ell trouué de bien fort nobles Chefz,& Capitaines depaïs,& contrées eftrâges.Et pourtant fut il dit par oracle aux Egiptiens, qu’ils fe feruiffent d’vn Hebricu cotre les Ethiopiens.Les Carthaginoys fort rompus,& affaiblis de beaucoup de guerres, & pertes, firent Chef d’armée Xantippus Roy des Lacedemo-niens auec fon focours-.lelquels deffirët les Romains côbatans vaillammét, & de grade hardieffe. Les Taretins vain quirét les Athéniens fous la charge de Gilippe Lacedemonien.Les Gauloys prindrent Rome fous la côduitte defBrennusAngloys,bruflansd'auantageRome.Au regard des Romains, lefquelz il efl certain, lauf la bonne grâce des Gréez auoir excellé par fus toutes nations en trauail, en induflrie,armes, & difeipline militaire, plusieurs
- p.067V - vue 146/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. 68 lueurs les ont loué iufques au ciel pour laconduitte&gouuernemétd’vne armée. Et pourtant quand Cyneas principal ambalfadeur de Pyrrhe entroit à P.ome il témoigna auoirveu le pais des Roysdequel auis ie trouue bien quadrer a celî: autre poétique.
- .Autres comme ie croy battront de meilleur grâce En images le cuyur çy tailleront au vif *
- Le marbrebeaucoup mieux ils plaideront les caufes.
- Ils décriront aufi beaucoup mieux au quadrant Lespaffages du ciel & la leuée des aïlres.
- Jvlaisayes fouuenance o Romain de régir Les peuplesfous ta main, y bailler loix de paix.
- Ce fera ton eflat auxfübieSîspardonner,
- Et Vaincre les fuperbes.
- Au demeurât les Romains ne lèmblét point fuyuat ceft auis auoir fauo-rifé quelqu’vn,quad ils ont receu les eftrâgers aux plus hautes dignités : par la vertu delquels il eft certain que Rome a prins grande croilfance. Il en elt qui dilènt que les richelfesfontfeules,qui accompagnent & honnorent la gloyre des Chefs & Capitaines : par le defaut delquelles, ils veulent, & le prêchent qu’il ne fe peut rien faire d’entreprilê grande,rien de magnifique, nefinalemét rien d’excelléce: ôe que les Perles ne les Grecs }ne les Romains n’ont point côquis le rond de la terre fans abôdance de finances. Les autres pèlent que pour acquérir gloyre &triumphes, on doit tâtlèulemët bailler charge aux bien-fortunés & heureux.Quelles richelfes,dilet ils,ou armées de natiôs eulfent drelfé les aureilles aux Romains cotre Annibal,fils n euf-lent eu Corneille Scipion Chef bien-heureux,lequel le défit lêul, delaifsat l’Italie,auprès de Carthage'QjueljpfiteuIfét porté aux Carthaginoys leurs fi grâds threfors,& grades armées pour afiaillir ôcgafter fi long téps l’Italie, fils n’eulfent baillé la charge de leurs ges à Annibal Chef d’armée fort rufé & hardy?LesThebainsont ainfi éleu pour Chef le trefipreux Epaminôde, aufli ont les Lacedemoniés Leonide,& les Atheniés Themiftocîe. Les autres qui (ont auectoy de meilleur auis,Sigifmôd,pèlent que les grades char ges & Magiftrats fupremes ne doyuet pas eftrebaillés aux opulés & riches, neaux bien heures, ne aux Capitaines cauteleux,& hardis,mais aux doués de bon entendemét,& de bon coeur. Ce n’eftpas grad choie, dit Cicéron, de la guerre hors le pais, fil n y a bon eonfeil en la ville, ny ne font les grâds affaires vuydés feulement par la fortune,ou forces,legeretés,ou agilités du corps,ou par courfo & embufches,ou bien de loing à dards,ne par combat de main à main,mais beaucoup plus par côfèi!,raifon, bon auis, authorité, & lâuoir.Mais comme tout le mode fiche,prefche,& ait en amiration toutes ces choies eftre en toy,foit par don de Dieu ou de nature, fo deura Ion émerueiller fi toute l'Italie fa choilÿ pour Chef à tous ennemyjSjie guerre, & â vuyder tous affaires grâds? Au regard delà craintejpie chacun a pour toy, &; dont ils f ofont bien reprédre publiquemét, c’eft qu’il^difent que tu
- M ij
- p.068R - vue 147/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- fais le meftier d’vn foldat bien hardy, & des prouefles de ta propre main,& que tu te hazardes trop à toutes heurtes, ce que touteffois nous auôs leu a-uoir efté propre à Epaminonde,au Sertorin, à Cefàr, a Augufte, 5c à autres plufieurs grands Capitaines : le te laifie touteffois penfèr qui es homme de grand iugement, combien eft glorieux, combien aufii eft périlleux le ma-niment de tant,& fi grands affaires de guerre,veu que tu es homme de con feil 5c de pouuoir,& excellét parfus tous Chefz,& foîdatz en leurs deuoirs. C’eftfans point de doute vnegloyre bien rare, 5c qui (corne dit Salufte)de Iugurtha fe peut bien dire de toy du contentement de tous par fus tous les 33 Chefz de noftretéps. De vray,ditil,Iugurthaeftoir(quieft vnechote bien difficile)homme preux au combat,& de bon conteil. Mais pour autât que lvn a fouuenteffois de coutume de cauter vne peur par vne preuoyance, 5c l’autre vne outrecuidance par vne audace, fais que la fortune 5c opinion ne te porte 5c offre pas tant aux périls, que la vertu 5c bon confeil. Donnes toy donques garde ie te prie, 5c diflingue le deuoir d’vn Chef 5c d’vn fol-dat.Tuentens de vray beaucoup mieux quelles font les parties dvn Chef, ôc le deuoir que doit la proueffe 5c la profeffion du foldat : lequel ne te doit pas exiger, ny ne doit eftrcfaiâ: à part par le Chef,finon parauantu-re qu’à vne grande ncccffite.Nous lifons que comme quclqu’vn appel-loit au combat d’homme à homme Marin tref-vaillantChef,ilrepondit que fil eut voulu mourir il auoit peu fouuenteffois le faire dvne corde, 5c que le fage ne cerche pas le combat,mais la vidoyre. Voyla ceft home don-. ques trcfoonuoiteux de g!oyre,& Romain,difoernant,combien font diffe rens le deuoir d’vn Chef 5c du foldat,& pcnfânt que fouuenteffois vn Chef feflpîusfouuentfauué fansarméequen’eftvnearméefànsChef. Orvoys donques ô noble Chef,Marin auoir fuy le combat d’homme à homme, ce que nous ne lifons point auoir elle refufépar aucun foldat, à fin qu’à fon exemple tu aprenes de dédaigner le deuoir propre au foldat, 5c d’accôplir, celuy qui quadre à la maiefté d’vn Chef: Mais fi Marin pour la baffe condi tion de fa race ne t’emeut gueres, écouté Scipion de la race Cornelie : non pas tous mais celuy qui par fês proueffes a aquis le fùrnom d’Affricain. Car corne cefluicy fut chargé par quelqu vn de lâcheté,pour n’eftre gueresbon combattant,il fen laua d’vn plaifânt rencontre : il me fouuient, dit il, que ma mere m’a enfanté Capitaine, non pas foldat. Comme aufii plufieurs fecriaffentàMetel, qu’il combattift auecleSertonnlappelIantau combat d’homme à homme, comme Chef auec Chef, Romain auec Romain, ils le deforifoy ent comme homme lâche d’autant qu’il le refufoit. Touteffois Metel à bonne raifon ne faifoit point de cas de leurs parolles, carfcomme dit Theophrafle) vn Chef doit mourir en Chef, 5c non pas en foldat. Ne t’efmeus pas aufii Sigifmond en ce que nous lifons Alexâdre le grand auoir fait le deuoir de Capitaine,& de foldat:& te fouuienne qu’il a efié loué par le plus expérimente Prince,le plus approuué en l’art militaire, d’auoirfeu-lement fait tefte, 5c vaincu des armées bien grandes auec peu de gens,
- 5c
- p.068V - vue 148/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. <s*
- &d’eftre allé en côbatantiulques aux extrémités du monde contre Fefpe-rance,& la fantafie humaine. Or n a pas ce fi grand iuge & temoing An-nibal loué ce fi grand Prince Scipion d'iqifant auec Iuy pour auoir efté home de main,& excellant combatant,qui eft la gloyre d’vn foldat. le nefîiis pas aufii d’auis que tu prennes exemple à ce mutin Catelin, duquel Salufte „ aefcriten cesparolles : Catehn ce pendant marchoit a la pointe auec les „.plus allaigres donnant hores lècours aux plus preffez , autreffois il met „ gens frais pour les bleffés,ilprouoyoit a tout:& entre ces deuoirs d’vn Capitaine il met fublèquemment le deuoir du foldat, comme qu’il comba-toit, & défaillit fouuent l’ennemy. Somme qu’il failbit enlèmble le de-uoir d’vn vaillant loldat, & d’vn bon Capitaine. Or eft autre la raifôn de ce que doit faire, & autre de ce que Catelin faifoit. De vray il combatoit en delèlperé: Car comme dit Salufte apres qu’il le voyoit enclos de mon-taignes, & d’ennemys, & que toutes choies luy eftoyent contraires à Rome, & qu’il n’yauoit plus d’efperance de fuyte ne de lècours,il délibéra d’eprouuer la fortune eftimant cela pour le meilleur : il le promettoit toutes choies fil vainquoit, eftant en tout delèlperé fi l’ennemy eftoit le vainqueur . le n’enten pas que tune combates aucunement,mais a lors letrou-ueroye ie bon que la grande extrémité le requerra, & que tu auras proueu a tout,comme le requiert le deuoir d’vn bon Chef, & que la neceftité y fera, & lors que tu verras eftre necelfaire d’obuier à quelque grand péril,com me louuët tu as de coutume. Ecoutés les auertilfemés de Cratere a Alexandre: Que telle force,dit il, qu’on voudra de toutes nations conlpire contré nous, quelle remplilfe le monde d’armes & d’hommes, qu’elle couure la merde vaifteaux, quelle ameine des belles inufitées, tu nous garderas d’eftre vaincus. Puis il dit fublèquemment : Mais qui eft celuy entre les Dieux qui nous puilfe promettre eftant appelle que le làlut de Mace-doyne lèra de durée, veu que de fi grand ardeur tu t’offres aux perilz, oubliant pour lors que tu meines pour néant tant d’amesde citoyens? Et apres plufieurs propoz: Nous irons la ou tu nous commenderas. Nous demandons comme noftres les périls comme de peu de renom, & les combats de peu de los : garde toy aux cholès dignes de ta maiefté. La gloyre palfebientoften petits ennemys.Voys tu pas donquesà quelle reigle le combat eft limité, & quelle part il faut que le Chef vienne au combat? Comment?Penlèstu qu’en t’offrant ordinairement au péril, tune trou-ues quelque fois ton malheur? C’eft vn diél de Tragédie , que la male fortune ne perdonne guieres louuent aux grandes vertus . Nul ne fè peut a la longue alfeurément offrir fouuent aux périls. L’inconuenient rencontre quelque fois celuy qui l’efehappe fouuent. Ne vueilles pas donques expérimenter la fortune en petites chofes . Tu t’es affés montré à plufieurs, ô Sigifmond, a ton péril, & au noftre entant que touche la gloyre, aufii es tu aux Picetins, aux Etrulques, aux Millanoys, aux Latins, ôc Barbares ; affés aulfi aux amys, & finalement aux ennemys,
- M iij
- p.069R - vue 149/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- commetu necreinsIamort,ne Ieperil, ôc que tu eshomme de bien deta perfonne, ôc auentureux a toutes chofcs epouuentables, quelque danger qu’il y ait.Dieu t’a efté fauorab!e,il faut d’orelènauàt temperer tout de prudence, & y tenir moyen,à fin que tu fembles auoir fait tes prouelfes de bon auis, ôc de grand cœur,& non pas de furie, ôc inconfideration. Au demeurant Iaftature&perfe&iondu corps auec la dignité de la forme qui n’eft point trop parée, lèntant au contraire Ibn homme, ôc là guerre comme dit Tite Liue,eft de quelque confequence aux Capitaines, ôc fi elle defaut,elle n’eft pas pourtant tant à defirer, ne totalement à reietter,qu’ilz ne puiflent bien aller à la guerre,& auoir la charge fur les autres, pourueu qu’ilz ayent bon cœur, eftansparéz de la cognoiffance de ces choies d ont nous auons n agueres parlé. Par l’auis aulh de Traian, ceux qui eftoyent débilités, ôc
- mutilés de quelque membre alloyent à bonne railbn a la guerre. Ce qu’on peu t çognoiftre en plufieurs Chefs de la ville de Rotne,& des natiôs eftran g es. De vray outre Marin excellent Chef ayant les veines enflées, nous liions que Camille eftoit vieil, ôc malade, lors qu’il vainquit en bataille les Preneftins, ôc Tyrrheins : ôc que Iulle Celàr le Di&ateur a eu deux foys le haut mal,en menant la guerre: ôc que Q^Ciceron frere du grand Cicéron eftoit de bien foible côdition, lequel toutelfois a fous Celàr vuydé de gran des guerres en la Gaule làgement,& de grade hardiefle : ôc qu’entre les Lacédémoniens Lylànder a efté louuenteffois dénué des forces de l’entendement , ôc du corps par la vidoyre & grandeur de maladie : ôc qu’Agefilae iadis leur Roy eftoit boëteux, ôc qu’à celle caulè ilz furent longuement en deliberation filz le deuoyent receuoir pour leur Chef ou non : finalement ilz auiferent qu’il eftoit beaucoup meilleur qu’vn Roy clochait d’vn pied, que le Royaume en ibn gouuernemët.ll eft des hiftoyres dignes de foy qui recitent que le Sertorin, Orace, Codes, Philippe, Antigone, ôc Annibal Chef des Carthaginoys,qui tous ont efté grandz hommes de guerre, n’ont pas eu faute de genitoyres,mais tant feulement d’vn ceuil, tout ainfi qu’on dit que Sylla ôc Cotta Capitaines renommez ont efté de telle codition de nature qu’on les tient eftre naiz auec vn lêul genitoyre. Au regard de la dignité de la forme,combien que Scipion I’Aflriçain, ôc Iulle Celàr ayét efté de haute taille,touteffois Antigone, Alexandre de Macedoyne,& Augufte ont efté de petit corfage. La petitefle toutelFois n’apoint nuy à la hautelîe des vns,ne îahautefle à la bafle taille des autres,ny ne les a diffamé.Et comme la Grece folennifoitdesieuxau lèpulcred’Archemoreileft de grande memoyre par vne louenge poétique,que Tydée vainquit Capanée, par lequel de ftature bafle,& menu ont dit que tous les Thebeins furent vaincuz es combatz.L’honneur donques en lafuperintendence de mener la guerre fera à bône railbn baillé à ceux qui auront beaucoup veu,&qui eftashon-norez de plufieurs tiltres de confeil,d’authorité,de fcience, ôc de diuerfitez de choies,n inciteront pas lèulemët les prefens à la viéloyre, mais auflî en-flamberontla pofteritéafairelelèmblableparla commémoration.
- L’ORDRE
- p.069V - vue 150/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE VI. 7o
- L’ORDRE DE MARCHER EN B ^A-taille félon la dijcipltne Grecque £7- Romaine. Chapitre NI.
- L refie donques maintenantl’ordre de l’armée lors qu’elle marche, auquel gittouteIaplus grande confideration des Chefz ôc Capitaines : veu que c’eiï vne difpofition des chofes égalés, 6c inégalés ordonnant à chacune fon lieu, laquelle delaifTée le fol-dat, ne les Chefz ne fauroyent rien démefler: veu que les hommes de pied,
- & de cheual s’entr’empechent bien fouuent,s’ilz font entremêliez,ôc s’en-tr’affollent 6c prefTent comme ceux qui partent en foule d’vn théâtre: La ou au contraire: quand la bataille efl bien ordonnée, 6c chacune chofè en fôn lieu, le Chef promettra affeurément la victoire de tous defirée. Il nous faut donc premièrement deuifèr en peu de parolles de cecy félon la mode Grecque, pourfuyuans fùbféquemment celle des Romains. Or comme la cité fbit départie en troys, il faut premièrement choifir de tous eux les De-curions fuiuantl’auis de chacun Tribun de toute la fleur de la ieuneffe, mefmes de ceux qui font d’age 6c prudéce, f 6c qui brûlent de defîr d’entre-prendre 6c faire quelque bonne chofè, pour marcher les premiers. Subie- aadiendi.° quemmentilen faut élire tout autant de ceux qui mefmemet fontlesplus âgés 6c fàges,lefquelzefloyent ordonnez derniers es centenieres.Orefl l’ordre des dizeniers eflimé, mefmement pour les fubfèquétes caufès, d’autant que ceux qui font àlapointe fônttous Princes, ôc comme ilz foyent en plus grand dignité, qu’eflans fimples foldats, ilz penfent leu relire en-chargé de cercher la gloire de quelque excelléteproueffe . Outreplus quad il furuient quelque affaire, le commandement des Magiflraz efl de plus grande efficace que des perfonnes priuées:la force auffi des premiers s’offre d’vnepîus prompte 6c allegre hardieffe,fî l'affaire faddreffe en front, comme qui n’ignore pas que ce lieu la efl baillé en garde àleur vertu: Et fi en queue il furuient quelque grand effort: veu quelle entend bien que c’efl vne grande infamie d’abandonner fôn ranc: 6c que celuy qui mene la queue doit eflre doué de toute louange. Sidevrayilellhommede cœur,il renforcera les premiers, fi lors que le temps le requerra il commande de charger l’ennemy : fi de rechef il efl de befôing de reculer en retirât les fiés, il les fâuuera tant mieux entiers. Voyla l’ordonnance àlafaçon des Gréez.
- Au regard delaRomaineelleefloitdecefle forte: les gensdefècours légers ôc archers alloyentauant courir, pourrepoulfèr les courfès fbudaines des cnnemys, Ôc pour decouurir les lieux fufpeélz d’ébuches: apres marchoyét les explanadeurs pour abbatre les mottes ôc boys, afin que l’armée ne fuit en peine d’vn chemin rabboteux.-aufquelz elloyent fubfequens ceux qui portoyent leur bagage 6c de leurs chefs, 6c à ceux ey faifôyent épaulé plu-fieurs cheuaux: apres lefquelzmarchoitle Chef des cheuaux,puis lafan-terie, qui portoyent toutes façons de machines 6c inflrumens de batterie pour ruiner les villes. Les Millénaires, 6c Capitaines fuiuoyent apres: 6c
- M iiij
- p.070R - vue 151/480
-
-
-
- ROBERT VAL TVRIN
- en leur fuite les autres enlêignes autour de l’AigIe: & les ferfzlêruiteurs des Chefz eftoyent fubfequemment auec les gens de pié. L’arrieregarde eftoit d’vne multitude foudoiée, laquelle les armeures fuiuoyent, ôcvnbon nô-bre de cheuaux &de gens de pié armez. Au demeurant lêlon le temps ôc l’occafion Cefàrordonnoit huit légions en marchant de celle façon & ordonnance: lors qu’il lentoitl’ennemy près: mettant àl’auantgarde lix légions armées a la legiere, apres lelquelles eftoit le bagage de toute l’armée, puis fublèquemmentpour clorre l’armée, deux légions qui fembloyent moins fermes au combat a la garde du bagage. Mais es moindres voyages il iettoit àl’auantgarde troyslégionslegerement armées ,puislublèquem-ment le bagage, & a l’arrieregarde vne légion pour clorre l’armée. Par ce moyen il marchoitprefqueen ordonnance quarrée,Ia ou l’on attendoit l’ennemy de toutes pars. Voylâ quant à l’ordonnance d’vne bataille fui-uantces deux dilciplines.
- DIVERSE MANIERE DE DRESSER les batailles. Chapitre XII.
- V demeurant fi d’vn collé & d’autre les armées ennemyes s’affrontent pour le combat, le premier deuoir d’vn bon & fige Capitaine femble ellre, d ordonner & dilpolêr ceux qui làgement, îoyallement, hardiment & en gens de bien alfaillent l’ennemy. Ets’ilellbelbin de faire foudainement toute la cauallerie bourgeoylè iuf-ques au nombre de mille, il faut d’auantage ordonner deux cens cheuaux ellrangers,&les mellerauecles citoyens: car ceux cyioints aux autres me lèmblent rendre toute la cauallerie plus ferme: &l’enflamber par vneen-uie a vn defirdelos & gloire pour s’efforcer à l’enuis de s’entreuaincre de prouelfe. le ne fuis pas ignorant que les Lacedemoniens fort ruzés aume-flier de la guerre, ôc belliqueux, ont premièrement lors commencé a triü-pher en cheuallerie, qu’ilz ont appellé les cheuaux ellrangers. U ell certain aulfiqu’es autres euenemens de la guerre & nations diuerlês,les forces ellrangeres fe font acquis grande renommée, l’vfage de vray lèrt beaucoup àla promptitude. La fanterie lêmbleellre de grand effort àla guerre accompagnée de gens decheual, mefmement fi elle elldrelfée d’hommes qui loyent fort courroucés auxennemys. Il en ell qui pour l’ordonnance d’vne bataille penfent ce notable di&de Nellor ellre en Homere, qui ordonnoit, que parles races, & parleurs contrées les bandes & bataillons des Gréez fulfent ordonnés enlèmble, afin que les races & contrées fentredonnalfent leeours. Les autres trouuentmeilleur, & plus falutaire d ordonner l’amy auprès de l’amy: car l’ordonnance félon les races n’a pas beaucoup de raifon es périls: veu que fi le bataillon ell drelfé d’hommes de mutuelle amytié 3il ell rendu indilfoluble, & infeparable pour porter & donner coups: veu que ceuxcy font liés d’vne chefne de fer&dyaman-
- tine
- p.070V - vue 152/480
-
-
-
- /
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. ?I
- tine d’vne merueilleulè mutuelle amour: & faut comme l’on dit, vne bande confacrée, comme fut Seloofis qui (comme nous auons par cy auant ditjfutenuoyéen Arabie auec vne armée de ceux qui nés au mefme iour de fan’ailïanceauoyentellénourris auecluy. lien e 11 a celle caufequire-montrent aux leurs de foullenirlapremierecharge, & qu’ils feftimenten cela ellre viélorieux, qu’ils ne font point trouués moindres au premier rencontre. Duquel artifice ou moyen Pompée a vfé en la pleine Pharfalique.: car découurant de cheual les batailles, comme il vit les ennemys attendre t'ôutquoyenordonnaceletemps du combat, &fon armée n’eftre pas fins peur: mais troublée & comme mal aguerrie fetonner,il eut peur, qu’a la première charge elle ne fuft rompue: Parquoy comme l’on deut fonner a la bataille d’vn collé & d’autre, il ordône aux premiers rancs de ne le mou-uoir, &que demourans ioints & lârrés ils louftinlTent conftamment la première charge des ennemys iulques à la portée d’vn dard.En quoy combien que(fi on croitàLucain)l’arméemaleureulê foit demourée en bataille, Cefar toutefois dit que Pompée foublia. Les coups des playes(dit il) donnez d’impetuolité & courlè feftaignent d’vn arreït, la ou en frappant & combattant d’entrée les forces l’augmentent de l’impetuofité & courfe, &fenflambentles cœurs de toutes pars quafi comme emeuz de îbuflets.
- A celle caufê comme il eut veu 1 aile lèneRre de Pompée Ci forte de gens de cheual, creignant lanoblelfe des armes, il ordonna en queue deladizie-me légion cinq ou lix bandes cotieres au delfous des enfeignes,accôpagné defquelles, il auoit combattu auec tout le rond de la terre, qu’il tira des légions, leur commandant de ne bouger, & de ne Ce découurir àl’ennemy.
- Etlors qu’il chargea, il remontra aux gens de cheual, qu’ils nelançalfent pas comme de coutume les pertuilânnes,lè hâtans de mettre les mains aux epées en vaillans hommes, leur commandant charger haut, &qu’ilsdon-nalfentàla vilîere&aux fronts des ennemis. Ces moqueurs(ditil)dorez & gourriers ne tiendront pas bon, ny ne prendront garde aux armes tirées a leur viliere, c’ell vne ieunelfe mal viitée a la guerre, & aux coups. De celle violence donques & ordonnance de bataille, Ce drelïerent les deux armées d’ordre & de railon. Pompée ordonna cét & dix enlêignes en troys batail- f Ex plu_-lons: dont il y auoit lêpt mille cheuaux en l’aile lènellre, & cinq censàla tarcho & deflre:outreplusvngrandnombredeRoys:&pIufieursSenateurs & Che-ualiers Romains, outre vngrant nombre de gens armés à la Iegere. Celâr 4o.m. aulïï ordonna quatre vingts enlêignes en troys bataillons, lequel auroit moins de trente mille hommes de pié & mille cheuaux. Lelquels mys en tE* Pau-bataille & les priant Celâr donna ligne de combat. Or elloit par fortune °ncjeh;cvi en Ion armée Crallin, lequel au précédant auoit eu fous Cefar vne charge deturhæc honnorable, mais pour lors n’ayant fait fermentcomme de coutume, il fytrouuoitappellépar vn certain deuoird’amytié, qui elloit homme fort 50.M.pro ellirné en prouclfe. Ayant donques ouy la harague de Celâr,& veu Ce trou- 4°* uer d’vn collé & d’autre les lignais de bataille, il part de la troupe de Celâr
- p.071R - vue 153/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- auec vil vifiige riante fuyués moy (die il)mes iadis compagnons , & faites le deuoir que vous deués à noltre Chef : V oyci le dernier combat apres lequel finy, ilrecouurira (àdignité, & nous, noltre liberté.Et depuis le retournant vers Celàr.Ie feray(dit il)auiourd’huyô Capitaine que tu me rendras grâces vif, ou mort: fur ces termes ildonnadedans les enrtemys, lequel ont fuiui de leur bon gré enuiron fix vings loldats. Il y auoit(com-meaucuns ont dit nyn’elt hors derailbn)d’vn colté & d’autre au commé-cement du côbat vn certain pitoyable refroidilfemét,qui arretoit les épées ia dégainées veu que les vns voyoient leur freres auec l’ennemy, les peres, leurs enfans,& lesenfas,leurs parés,iufques a ce que Craltin d’vne furie in-confiderée fecrialt & dardait la pertuilânne,qui fut le commécement de la bataille,& fi la fureur de ceft home n eut fait la mellée des deux armées,pa-rauature qu’il fuit entreuenu quelque côpofitiô d’vne mutuelle pytié,ainfi le lo ultras les Capitaines melmes,touchât la ruine de l’Empire Romain & du gère humai. Maisde malheur il l elttrouuéhômc,qui,Celâr faifât le lôg hatalt les choies & ruinait le lùpreme Empire d’vne playe irréparable . Les armées farrelteret en grad ordre, & corne eltat la bataille cômécée on cô-battilt quelque téps d’egalles forces,& que Pôpée le confiât en la multitude epandiltlàcheualleriepourenueloper Cefiir, Celâr dôna fou dain ligne a fes gés de cheual de deux ailes,aulquels il auoit ordôné auoir l’oeil â cela: lelquelsplultoll que ditdonnans furies epandus lesont rompu,& forcé de tourner vifaige.La plus courageulèaufli des légions â fuiui lacaualerie fiferrée,quetousnefembloyent quafiqu’vnetroupe. La lètrouua Celâr prefent par tout comme vne grade armée,failânt les deuoirs tât d’vn preux foldat, que d’vn excellent Chef,frapant & remontrât. On a noté & réduit en hiltoire deux entre toutes les parolles qu’il a tenu courat par tout, dont l’vneeltcruelie,vtiletouteffoispourla vi6loire.Au vifage foldat:& l’autre pitoyable, côbié que Flore la dië auoir elté côpolèeà la gloire de Celâr ainli.Pardonne au citoyen foldat. Eutrope touteffois l’attribue â Pôpée en donnant courage.Celtc première â fin que ie conlènte à Flore fut de Cefar pourchalfant la victoire: Scia fécondé duia vaincat ou bié du viétorieuxia pitoyable, celte autre fut au fort de la fureur de la bataille : & a vie de celte cy les ennemysiatournans vilâge. Cefutaulîi vnaéte depytié,quandil permit â chacun des liens donner la vie à tel, des ennemys, qu’il eliroit. Ny moins celt autre qu’il ne fut trouué homme mort en la bataille, qu’armé. Pompée voyant les rancs des fiés rôpus & etônez, & nepouuâtporter le fes d’vne fi grande ruine, n’y dôner remede, le défit de la charge de l’Empire en façon d’homme eperdu & étonné, & fe retira en fon camp,luy conuenant trelbien ce que d’vn autre â elté diét.
- ,3 Lepere Iuppiter a d'^Atax enflambé
- ,, Les hauts cars, qui deJèns eperdu a iettê
- ,, Surfes larges épaulés fon ecu d fipt cuirs
- „ Tnjle^ grouillant les y eux,fes armes abandonne.
- Comme
- p.071V - vue 154/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. 7j
- Comme donc il fut entré au camp* il démolira autantfans former mot, queplufieurs en combattant moururent auec les fuyans, & en rompant fi-lence il a finallement dégorgé ccfte feule parolière efl donc iufques au cap: ôc fans tenir autres termes, il fè lieue, & prenant vne robbe propre à la pre-fêntemifêre, il part du camp, ne délirant pas tant viure, quecreignant de mourir, afin que les légions refiées ne fuffentdefaittes auecluy ; apres lequel délogé,perfbnne ne tint plus ordonnace, par cemoyen toute l’armée de Pompée fut en routte, & fut faiél vn grand meurdre au camp des Mi-niflres, & de ceux qui defendoyent les tentes: & combien qu’Afinius Pol-lio qui pour lors combattoit fous Cefàr, témoigné que parle comte fait des morts, il n’en foie demouré que fix mille: il efl touteffois certain par autres àutheurs notables, que des légions & cauallerie de Pompée il en efl demouréquinze mille :quantaux nations étranges, &c du fecours qui y efloyent accourus de la plus grand part du monde, le malfàcre efl innombrable, tant des epars que des nuz, en la defaiéle defquelz les tueurs fè font affouuy. Au regard de ceux qui furent pris par Cefàr,le nombre efloit de plus vingtquatre millehommes comme l’on trouue par eferit, & cent quatre vings enfèignes, & quatre vings Aigles . Craflin fut trouue entre les morts combattât corne ilaeflédiél de grand cœur, lequel Cefàr témoigna auoiren cefle bataille merueilleufèmentbien fait fon deuoir, &luyauoir fait grand fèruice,&auquel mortfeomme il auoit predit)il rendit grâces. Comme de vrayileuttuéplufieurs Pompeians, il mourut tranfperfed’vn glaiue tyré à la bouche du coflé qu’il foffrit, lors qu’il dôna dedans la plus gràdpreffe: &printon garde à la playe de la bouche,que la violence d’elle auoit eflé punie d’vne vengeance trefiufle.Domice aufïï y mourut, lequel auoit eflé prins a Corfun, & depuis lâché : & n’y demou ra des Cefàriens que deux cens hommes,trente Centeniers hommes excellens.C’efl vn cas merueilleux qu’eflant le combat entre Romains la perte foit fi inegalle: mais iepenfèqueceaefléle vouloir des Dieux, que cefle ancienne bonne fortune abâdonnafl Pompée. On dit que Pirrhus dreffant vne ordonnance de bataille près Afcule,fuyuitl’auis du vers Homérique, par lequel les moins belliqueux font mis au mylieu, ordonnant au demourant que les Elephans & la cheualerie foyentpour le renfort. CommeXantippe Roy des Lacedemoniésappellé par les Carthaginois quelquefois àleur fecours, que les Romainsfouuéceffois auoyent deffaiél, eut veu les forces des Carthaginois à la compagnie, & qu’il eut apperceu apres feflreenquis, comment les Romains combattans auec eux auoyent toufiours vaincu,& leur eut montré leurs fautes, par lefquelles ils auoyent eflé defaiéls ,qnafileur ouurant vnedifeipline, il digéra fi bien à dreffer la bataille l’ordre & difei-pîinedes gens decheual, depié, &des Elephans, que ceux qui lors n’o-foyenttant feulement fbufrir l’œil de l’armée Romaine, requeroyét d’eux mefmes de charger l’ennemy.Xantippe donc cognoiffant l’ardeur des fôl-dats Carthaginois l’cflimant à bon heur pour le combat dreffa de cefle
- | Ex Plu-tar. cadra pro con-grcüuca,
- p.072R - vue 155/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- forte la bataille contre les Romains. Il ordonna en front les Elephans, & peu apres la multitude de la ville furies deux ailes : puis en diflribuantles gens de foude, &la force des vieux’foldats, il commanda aux mieux en pie de combattre entre les deux ailes de cheuaux. Et comme aulïi il eut de-couuert l’ordonnance des Romains ferrée, ayans mis en telle contre les Elephans les plus allègres de d’elite, les r’enforçans de toute maniéré de focours, apres auoirdeparty furies deux ailes la cauallerie,àfin que l’ordonnance ne fuft rompue parles Elephans, Xantippe ordonna aux gens de cheual d’enuironner, de ecarmoucher l’arrieregarde ados, a fin de rompre l’ordonnance des Romains: ce que comme il fifl en plufieurs lieux,de fLègo cô que les Romaines légions ftournans vifâge neceffairement y refiflaffent tra pro ex & Jes repoulfâffent, ce pendant leu r ordonnance eflànt eflargie & difioin-te fut ouuertc de defaittepar les Elephans : la ou moururent trente mille hommes. Leur Chef Régulé futprins auec cinq cens hommes, & deux mille furent chaffés dedans Clypée. Annibal excellent Capitaine fe iettant en bataille près les Cannes ordonna furies ailes les plus aguerris &vail-lans tenant le mylieu auec les plus debiles,laouefloyent pour Chefs les plus braues de vaillans hommes: & ordonna a fîx cens cheuaux Numides de fê retirer aux ennemys qui pour affeurer les Romains leur liurerent glai-ues de efouz. Lefquels receuz fur la queue de l’armée, foudain que la bataille commença, prenans leurs courtes dagues qu’ils auoyent caché, de fê fài-fifïans des ecuzRomains ils donnèrentfurleurarmée. Quandaufïi Sci-pio ordonna fà bataille contre Annibal en Aphrique pour prendre le péril ducombatjiliettaen front le longbois, puis labandedes Prin ces, la fermant desTriares, ny ne les drelfa ferrés, mais au large, afin que les Elephans receuz entre eux fans entremeflement, nyroupture d’ordonnance peuffentpaffer outre. Ilyauoit aufïi vn bon nombre d’hommes allègres prefts, & ordonnés pour à la violence des Elephans à coups de trait Sucer leurs dos & coflés. Il a fubfequemment departy auz ailes les gens de cheual,ordônâtLelie auec les cheuaux Italiens for la fênefire,&MafIinifTe equippé de Numides à la deflre,laquelle ordonnance luy a caufé vn grand los de victoire. Annibal au contraire fê voyant forcé de venir au combat, & a vne bataille fopreme de gloire, d’ot il hen fut onques de plus perni cieufe ny plus terrible mefmes au récit, veu qu’il voyoit qu’il en efeherroit aux liens vn Empire de toutes natiôs, oubie vn perpétuel iou de feruitude, faquift pour lors mefmes à l’opinion de Scipion, de de tous les expérimentés au fait de la guerre en ce louange qu’ilauoitordôné ces bataillôs d’vne merueilleufe rufe & d’vne raifon plus diuine qu’humaine. Il fit de vray vne haye a la veuë de l’armée Romaine de quatre vings Elephans ayans en dos tours tremblantes de pleines de gens de guerre:a fin que de leur frayeur, & violence ils repoulfâffent comme bouclers & muraille d’arain les approches desennemys:leureflansenfîiitepourfêcours]esGauloys,Geneuois, Maures,Maiorquins de Minorquins auant le bataillon des Aphriqueins de
- p.072V - vue 156/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. 73
- de les citoyens: à fin qu’il ne fuftîoy fiole aux gens de foulde de diùerfês nations de tourner vifage, lefquels la foy ne l’amour du païs ne rendroyent pointpreux & vaillans:& qu’ordonnés incontinent apres les Elephans fisfouitinfient &:rompiffent l’effort du combat, & qu’ordonnant apres eux la multitude des fiens & des Macédoniens, afin que combattans entiers auecles ennemys laffez, ils enflent la victoire: Au regard des Itali-aues & Brutiens il les ordonna al’arrieregarde comme hommes fans foy, d’autant que triftes & forcez de parler de l’Italie ils obeiffoyent au Chef, ôc fuiuoyent l’armée. Et comme les deux chefs fê fuffent retiré aux leurs, &c fiflent diùerfês remontrances, propofims aux foldats les notes de couhar-die&les recompenfes, alors les Romains fonnerentà la bataille auec vn fi grand cry de toute l’armée, que les Elephans qu’Annibal auoit ordonné d’vn fi grand foing en telle pour rem part rebroufferentfr’enuerfàns de fortune les amys)contre fes bataillons les deplaçans par leur violence,de forte, que les gens de cheual tournans vifage, furet la première occafion d’vne fi grande ruine & defai&e: Eftant donques l’armée Carthaginoise denuée de gens de cheual, les gens de pié chargent l’ennemy, & auint qu’a la pre-mierecharge, ils demarcherent :lefquels comme les Romains fentiffent ébranlez, & fc retirer en partie aux leurs, & tourner vifage, ils enfonçerent le bataillon des Carthaginoiz. Et comme la fortune diftbien,eftans tant decheuauxmizen roupte,& tant d’Elephans defaicls, & l’auantgarde re-poulfée fur la bataille, Lelie & Maffiniffe reuenans tout à point de la chaf-fê de la cauallerie, les ayans quelque temps au parauant pourfuiui donnèrent fur la queue du refie de gens de cheual des ennemys : laquelle charge quafi comme inopinée donna fi grande frayeur à leur armée qu’elle fut rompue §c defaiclecomme enuelopés de toutes pars d’vn double combat, nepouuant la honte nela reuerence d’vn fi grand Chef les arrefter.Et com bien que ces deux Capitaines & autres ayent fouuenteffois autre part faiét plus grande boucherie, cefte bataille touteffoisa efiégrande, ôcqui mérité bien eftre mife au nombre des bien renommées : tant pour le renom des Chefs, de la puiffancedes nations,de la proueffe des gens de guerre, que pour le diuers péril des tués, & pour î’iffuë de la vitfioire: veu qu’au témoignage de Flore , il ne fut onques iournée fi belle fous l’Empire Romain que cefte bataille la. Il y mourut plus de vingt mille hommes tant des Carthaginoiz, que des alliez, & en fut prefqueautant pris: auec cent trentedeux enfèignes ôc vnze Elephans. Ny ne fut cefte victoire fans perte aux Romains, qui en furent les maiftres: il y en de-moura de-vray dix mille.Quant au Capitaine Annibal îlfê fàuua trifte, ôc accompagné de quelque nombre de cheuaux a la ville d’Hafdrumet:ayant touteffoiseprouué tant au combat, qu’au parauant tout ledeuoir requis a:vn-magnanime Prince auant que d’en partir. Et depuis venu ou rappelle à Carthage & fon païs, il ne nya point en la prefênce des Chefs, & Principaux de la Cite auoir efté moindre non feulement en l’hon-
- N
- p.073R - vue 157/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ncur de la batailleraisaulïîen toute celle de la guerre:& d’auoir eflé vaincu & furmonté par Scipion.Comme Corneille Scipion furnommél’Affri-cain ayant la conduite de la guerre d’Elpaigne contre Afdrubal chef des Affricains campeia quelques iours en autre ordonnance, que celle dont il auoit à combattre l’ennemy, 8c que les ennemys campeiaflent gardans toufiours vne mefme ordonnance, il a changé au melme iour auquel il auoit délibéré de donner la bataille, &en chargeantde les meilleures forces les plus foiblcs des ennemys, il les défit ailement. Comme aulfi Thço-gene Athénien conduiloit vne armée à Megare,il répondit à ceux qui luy demandoyent l’ordre de la bataille, que la, il le bailleroit : puis ilen-uoye lècrettement deuant des gens de cheualleur enchargeant de redoubler furies liens comme ennemys: celafaitil permit de drelferl’ordonna-ce de forte que chacü prêt tel rac qu’il voudroit, à fin que tous les couhards lè iettalfent for la queue, 8c que les gétils compagnons fiflént la pointe, tel lemét qu’il les fit marcher au mefme ordre qu’il les trouua. l’aiouftcray vo-luntiers les auis d’Artus, le renom duquel ie ne Içay commet tenu vray des noftrcs, maistouteffois fort eftrange, 8c pourtant à moy fufpeét : 8c combien que le meflement des fables auecles hiftoires ne foit autre chofè que d’afloiblirla foydela vérité par menfonge, i’aymc touteffois mieux n*a-uoirpoint teu que d’affermer fos faids en celle matière, ou bien qui ont peu eilre faids, 8c qui font de grand proffit. Orpour drelfcr vne bataille, comme on dit il mettoit à part tous les gens de pie, aulïi faifoit il la chc-ualerie, 8c lors que les piétons auoyent commencé la bataille,les gens de cheual fiiruenoyent &rompoyent la bataille des ennemys. Outre lef. quels il retenoit quelques bandes de gens de pié, lelquels en la grand’ardeur du combat furuenoyent, & chargeoyent les ennemys.Par ce moyen eftans les falfez alfaillis de gens fraiz en queue,il n’a i amais guéres par fon inuention eflé lâns vidoirc en toutes batailles. Alexandre iettoit au my-lieutous lès gens de pié, ordonnant les gens de cheual fur les ailes lène-ftre, &dcxtre. Comme aulfi il craignit la grande &grOlïè armée de Darius ayant touteffois fiance en la prouelfe des liens, il ietta lès gens en bataille, failànt front de toutes pars, à celle fin que tous encloz ils euflcnt moyen de combattre de tous collez. Comme aulfi quelquefois ellans tous preftz à la bataille les Prêteurs de gens de guerre luy demandaflent fil auoit rien a leur commander d’auantage:Non(dit il)fïnon que les barbes des Macédoniens foyent rafées. Et comme Parmeniofenemerueillaft, ignores tu(ditil)qu’iln’ell point de meilleure anlè en vn combat que la barbe? M. Antoyne commanda aux fiens(que les Parthes foudroioyent d vne infinie multitude de fléchés) de larreller, & lèmettre foubs leurs rondelles, furlelquelles les fléchés paflans outre, les ennemys en font demeurés dénués fâsoflefer les ges de guerre. Et fi le bataillô del’ennemy n’eflforçable parlemoyed vne voûte drelfée de rondelles, eequeplufieursont de coutume de faire: il fell touteffois trouué quelquefois de ieuncs compagnons
- p.073V - vue 158/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. 7a
- de guerre Romains, cjui fëiettoyent deftus ôcarrachans les rondelles, les bleffoyent par deftus. Scipion Emilian n’a pas feulement entremeflé des archers & tireurs de fundedeuant Numanceauec les bandes, mais aufll auec les Centeniers. Le moyen de dreffergens en bataille a elle admirable des Romains contre les Latins, & des Latins contre eux, 8c prefqües en toutes chofes égal, veu qu’ils eftoyent en force égaux d’vnc mefme ardeur découragé, demefmes ordonnances de guerre, &conuenans en mefme façon d’armes, & qu’ils auoyent fait lamas de leurs foldats fëmbîables aux leurs,les Centeniers à leurs Centeniers,les Tribuns a leurs Tribuns :& comme auffi ils euffent mis en vn plufieurs enfëignes, auecplufieurs pointons, rondeliers, Princes, auantdardeurs, Port’enfeignes, Triares, enfans perdus, & les attendas: 8c que leur armée fuit ainfi côplette. La bataille cô-méçoit premieremét par les pointés, lefquels eftâs repoulfes des ennemys corne foibles efloy et à leur retraite receuz des Princes,qui lors côbattoyët ayat en fuyte les pointés,& fi en côbattat la fortune difoit mal aux Princes, ils reculoyentpeu à peu de la pointe aux Triares qui faifbyent la queuedef-quels côme ordônés en bataille à la troyfiefme bëde, & derniers pour le ré-fort fë dreiToyéc & chargeoy et les ennemys. Et côbié que ceux cy ne laiflaf. fènt plus d’efperâce aux leurs. Ils mettoyét touteffois les ennemys en grade crainte,veu qu’en les pourfuyuas côme rôpuz 8c deffaiéts,& qu’ayans Javi-ctoire en main, ils voioyét foudainvn bataillé inopiné,fier 8c armé defcuz & pointés, 8c renforcé de gës de guerre.Eftâs dôques les ordônaces telles, côme il a efté dit, les Romains foc marchés cotre les Latins a la bataille: fur les ailes,defquels Manlius, 8c Decius auoyët là côduicte. Neuius Cete-nier augmeta quelque peu la difcipline Romaine en l’armée du Proconfûl. QJFuluius Flaccus contre celle des Câpanoyz pour dreffer la vnebataille autre,que celle qui fè fait parle combat des gës de cheual &c de pié. De vray on faifoit vne elite de ieunes gés,alaigres de corps, & armés a la legere auec vn léger cabaflet,equipésd’efpées,8c de fépt lâçotsde quatrepiés delôg mis en troupe de g^s de cheual Iefquelsà l’approche de l’énemy fè iettoy et à terre en le tuât au depourueu:on appelle celte façô de côbattas Velites.LesSâ-nites dôneret ordre entre les autres apprefls de guerre, que leur armée fuit parée de nouuelle beauté d’armes.Ils auoyët deux armées,de l’vne defquel-les les rôdeîles eftoyet ouurées d’or, 8c celles de l’autre d’arget, leur cuiraffe efloit d’efponge,& la greue fèneftre eftoit armée, leurshabillemens de tefle auec vnecreftepour aioufterâ la grâdeur du corps. Les fàyésdesfoldatsdo-rés,eftoyet de pîufieuas couleurs, 8c ceux des argëtés de toyîe, a fin que par ceftapparat{’énemyeuftgrâdefrayeur,& paour.LesFidenates,&Fahfques, les Vegétes, 8c Tarquiniés, n eftâs pas de forces fuffifâtes etôneret l’ordônâ ce des Romais d’vn bataillé eftrâge au parauât incogneu,ôc iufques âprcfet inufité,eftat dreffé d’vn grad nôbre de leurs gës pour donner frayeur a leurs ennemys,en dénât deffuspar le moyé d’vne ordônâce de prélats portas d’v-ne courfè furieufè des flâbeaux, 8c ferpés deuat eux en habit ecclefiaftiquer
- N ij
- p.074R - vue 159/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Les Amazones de la nation Scythique,fe iettans en l’armée pour le combat armèrent leurs corps dégradés peaux de ferpens, dont il eftvne abondance incroyable en Lybie de merueilleufement grands.-ellesauoyenclcn-gues elpées, lepointon, & l’arc duquel elles ne blelfoyent pas feulement l’ennemy quelles auoyent en telle, mais en fuyant ceux qui leurs don-noyent la chalfe. On dit aufii que les Arabes vlèrent contre Charles es H elpaignes d’vn merueilleux artifice d’ordonnance : car côme fi gendarmerie full en bataille, ies Arabes leurs mirent en telle vne nouuelle face demalques lonnans enfemble les tabourms,&repoullèrent toute la che-ualerie d’vn epouuantement, & ne fut polfible d’y refiller iulques a ce qu’en couurant la telle, ôeeftoupant les oreilles aux chenaux, les gens de guerre tinlènt bon contre ces deguilèmens de perfonnes. Les Maiorquins, ÔcMinorquins ont au combattroys fundes, dont ils attourentleur telle de l’vne , & fe ceignent de l’autre , & tiennent la tierce aux mains. Us tirent en la bataille beaucoup plus grofles pierres que nulz autres, & de fi grande force qu’elles femblent ellre tirées de quelque infiniment. Us bief-fentâ vn afiaultdc ville ceux qui défendent le rempart à ie£b de pierres, & froifienten vne bataille efcuz, fallades, & toute façon de harnoys. Uz ont finalement fi grade force Sc expérience de tirer, qu a force du traid dru côme grelle contre vne armée de mer approchant terre,ilz ne lèuffrent aucun delcendre au port: car ils atteingnent ailement d’vn traiél de funde tout ce qu’ils veulent. Ny ne faut point felmerueiller du leur tirer de celle nation la, veu qu’ils n’ont autres armes, & qu’ils f’y adonnent de leur enfance : car vn enfant n’a point autre pain delà mere, que celuy qu’il frappera, qu’elle luy aura montré.LesTroglodites nation d’Ethiopie, qui font de fi grande viftelfe, qu’ils prenent les belles lâuuages de courlè, portét a la guerre celle façon d’armes comme l’elcu décru cuyren rondelle,&vne malle ferrée, les aucuns arcs,& lances: ny necôbattent pas côme les Gréez de courroux ou d’ambition,mais tât feulement entre eux pour les viures. Or en leurs guerres ils côbattent premièrement a pierres iùfqucs a ce qu aucpns loyent bief fés,faidans de l’arc,auquel ils fontmerueilleulèmentexercitez.-ilss’entre-tuent les vns les autres. Au furplus les plus anciennes femmes departét leur côbat,à l’arriuée delquelles au mylieu d’eux lâns péril (car il eft défendu de les toucherais Iaiflent foudain le combat. Les Maces qui habitent auprès des Seccagnes de Barbarie ne faydét d’efpées ne de falades au côbat : côbié qu’ils foyent entre les autres Lybiens agiles du corps, & en pais deplainc, pour la plus part. Ils ne portent feulement que poinélons, ôc des pierres en vailfeaux faiéls de cuyr, côbattant auec cela tât en alïaillac qu’en le retirant auec vn effort d’en frapper l’en nemy par vn'lôg vfage qu’ils ont apprins- de tirervne pierre en courât:ny ne garder foy ne loy aux eftrâgers.Les Alemâs ont de coutume de fermer leursbataillôs de charrcttes,à fin qu’ame ne le fie a la fuite,fiir lelquels ils mettent leur bagage. Ils ordonnoyet aufii leurs gés de cheual de forte qu’autât qu’ils fôt de milliers d’elite, tout autat de ges de
- p.074V - vue 160/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. 75
- piéalaigres & hardis les accôpagnét au combat , cjue chacun d’eux a pour fa confèruation choyfî par toutes les bandes,aufquels ils fc retirent-.iefquels suffi accourent fil y a quelque mefàuature:& fc iettent au tour de celiiy qui de coups fera tumbé de cheual: ôc fil faut faire quelque diligence , ils ont fi Iegere marche par exercitatio qu’en fc tenat aux creins des cheuaux ils vôt aufîi fort qu’eux. Aucuns aufîi des Celtiberes combattent àlegers efcuz,les autres à boucliers rôds, ôc enuelopet leurs greues de triquehoufès nffiïës de poil. Ils portent desfàlades decuyure, auec crefte déplumés, outreplus des poignars de la longueur d’vne paume de pur fer. Ceux qui préparent le fer pour félon leur faconde faire forger armes pour combattre à la preffe,sachent en terre des lames de fer, lesylaiffans iufques àcequç la meilleure partie refte,eftant la plus débile confommée de rouille, d’ont par apres ils font de bien bonnes efpées, & autres armes neceffaires pour la guerre: lefquelles ainfi forgées font fi acerées, qu’il n'y a efcnpfallade, ne autre chofè qui leur refifte. Eftans donques équipés de deux courtes dagues, ils fe iettent àpié fils ont la vi&oire à cheual, & donnent fecours aux gens de pié. La nation de Soaue qui efllaplus Martiale de toute l’Alemagne fc iette fouuent à pié es combats de cheual,& y combattent, accoutu-mans leurs cheuaux nebougerd’vneplace, & fy retirent foudain au be-foing. Quand les Gauîoys dreffent vn combat de gens de cheual, ils y entreiettent quelques archers, & gens alaigres armez à la Iegere pour fê-courir les leurs ôc fouftenir la fureur des gens de cheual .Au regard des gens de pié on les mettoit nuds pour le combat, ou bien ils combat -toyent nuds au deffus du nombril, equippés d vn grand efcu,& d’vne longue efpée. Au forplus ceux qui commençoyent la bataille, fàifoyent criz, vrlemens ôc battemens des piés auec entreheurtement d’efouz fuiuans la coutume du païs,& epouuentables frayemens des harnoys: toutes Iefquel-Jes chofês eftoyét faidesd’induftrie pour effrayer. Il efl vrayqu’elles eftoyét de grand auantage contre les Gréez, Phrigiens, &Cariens comme a eux nouuelles, &inufitées:au contraire aufîi de bien peu d’effeeft contre les Romains: auquels les braueries des vacarmes Gauloys font cogneuz. Car combien qu’ils ayent iadis vne ou deux foix deffaieft noz anceftres près de Cremere&d’Allie, leurs forces touteffois font deiouren iour empirées: veu que depuis ce temps la ils ont eftéi’efpace de deux cens ans deffaiéts, tués,& chaffés comme beftes:& que les Romains ont fait plus de victoires fureux qu’ilz n’ont fait fur tout le monde, ainfi que les hiftoires le témoignent. Les Galates f’aydent de iougs de bœufz au combat, qu vn caneton afhs deffus conduit, d’ont ils tirent premièrement au combat vn dard de leur car, 5c depuis l’habandonnans, ils combattent a pié de l’efpée. Les aucuns d’eux craignent tat peu la mort qu’ils côbattét nuds. Ils elifènt aucüs pauures entre les gés librespour la garde de leur corps,& pour fêruiren côbattat de carretô,& de porter lefou. Aucus aufîi ont de coutume démarcher auant l’armée eftanten bataille, 5c d’appellerles plus gentils
- N iij
- p.075R - vue 161/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- compagnons des ennemys à vn combat d’homme âhomme , en freyane les armes pouretonnerl’ennemy. Ils attachent aufli au col de leur cheual, les telles de leurs ennemys qui ont elle tuez a la bataille, defquels ils baillent à leurs valets la dépouillé trempée en leur lang pour attacher à la porte de leurs maifons auec chanfons & hymnes: tout ainlî qu’ils font les belles fauuages qu’ils ont prins a la chalfe.lls mettéc aulïi en terre les telles des plus nobles de leurs ennemys oinétes de drogues aromatiques, les moffras auxpaffans forains d’vne exquilè curiofité, ny ne les rendét pour quelque offre qu’en facent les parens ou autres. Les Angloys ou Flamens ont aulfi inuenté celle autre maniéré de faire. Ils dreffent leur ordônance de bataille de charrettes, & chariotzpremierement inuétés par eux: & ell de celle mode. Ellansdonques les cheuaux attelles à celle maniéré de chariotz auec leurs combattans, ils cheuauchent tout autour de l’armée, lançans dards au mylieudes troupes de cheuaux, tellement que l’ennemy alïîs au deffus a fouuent de la furie des cheuaux, & du bruit des roues auec Ion vacarme effrange epouuaté & troublé les cheuaux des Romains, & les autres rancs. Au demeurant depuis que ceux cy fe font mellés dedans les troupes, ils lè iettent à terre des chariotz, & combattent à pie . Ce pendant les carre-tons fèretirans quelque peu hors de la bataille lè logent de forte que fi les leurs fontpreffés de leurs ennemys ils ont la vne leure retraite, & rendent leur cheualerie fi mobile, & les gens de pié ff ftables es batailles comme qui font dreffés d’vne routure & exercitation côtinuelle, de lorte qu’ils font accoutumés d’arrefter,conduire, & tourner leurs cheuaux par le timon es defcentes roydes, & d’y courir, & obéir au ioug,& de viftemenc fê retirer aux cars. Qui ell vne façon de combat tyrée comme iepenlè des orientaux, lefqucls faydent de cars equippez de faucilles, qui ell vn combat prefque lèmblable . Les orientaux y ont iadis eu grande elperancc. Les enfans de Iolèph ont longuement efférepoulles de leur héritage pour la crainte de celle maniéré de cars enfaucillez. Sifara en auoit neuf cents au voyage qu’il feit contre les Ilraëlites. Darius en prefenta de melmes a Alexandre :lelquels il commanda aux liens receuoir en fouurant, &de leur faire porter la penitence de leur courlè. Le Roy Mithry dates aulfi, & le Roy Antiochus, & affés d’autres Chefs fort renommés en ont eu à la guerre. Apres que les Theffales onteuenfeignédedrefferaucôbattroup-pes de gens de cheualen armes,toutes nations prelques lesont apresfuyui, & ont vfé de cheuaux es batailles,& fen aydët tousles ioursde plus en plus. Ileftvray que les Scytesayment mieux a la guerre les iumens que les cheuaux,parce qu’elles vrinent lâns entreropre leur courlè. Les Colophonins, & Caftabalenfes failoyent la pointe de leur bataille, de chiens, qui font vn fecours fort feur , & loyal aux hommes, & qui n’a befoin de loul-de, ny ne rompent la foy à leurs maiftres. Il ell certain que lôuuentef-fois les maiftres ont effé defenduz par leurs chiens contre les brigans, ôc qu’ils ont combattu pour eux contre les ennemys, comme il appert du
- Roy
- p.075V - vue 162/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. 7s
- Roy des Garamantes: f lequel vn bataillon de deux cents chiens combat- *** Ab6'n-tans ceux qui refilloyent r’amenerét d’exil. Seianfoldat déloyal pailfoit de ^n”aiê fimg humain des chiens fort apres afin qu’il les fo peull rëdrepriuez & gra- exccrpta tieux, ôc aux ennemys cruelz & furieux au combat, fuyuat comme ie croy ex les Badres: lelquels prefontent les vieilles gens aux chiens nourris de chair hæc!pro-d’hommes: ce que côme Sialànor gouuerneur pour Alexandre voulut cor- pter bdla, riger,perdit prefque la prouince.Les Efpagnols ne mirent pas des chiens en telle cotre Amilcar, mais bœufs attelez a chariottes pleines de poix rafine, fouffre & greffe,mettans le feu dedans, apres la trompette fonnée, ôc apres les auoir chalfé ôc halle de celle forte, ils lailferét l’armée desennemys def* faitte ôc rompue. Les anciens de vray n’vfoyent pas de celle forte d’inuê-tions follement,ne de fureur précipitée : mais d’vne grande confédération de côfoil en cerchant les deforts pour forcer à la guerre les Elephas ôc belles epouuantables. Au regard de la nature des Elephans,il n’ell ia befoin d’en fort parler,d’autant qu’ils fe treuuét es plus loingtains païs du monde:à cela touteffoisfe faut il arreller qui concerne la guerre. A près que l’Elehant ell prins on l’appriuoifo bien toll auec le fuc d’orge : ils font fort friands de troncs d’arbres,& abattent du front les plus hautes palmes,delquelies ainlî couchées ils prentientlefruid&lemagent, & fil auient qu’vn rat touche à leur prouuade dedans le rattelier,iîs le reiettent, d’autant que c’ell la belle qu’ils hailfent le plus.Ils fontent aulfi grades tranchefons de ventre fils ont auallé vne lànlûë en beuuat.Et quant à la docilité,ils fagenouillét au commandement du moindre Ethiopien, ils cheminent fur la corde, ils combattent, ils portent tours pleines de gens de guerre, vuydans pour la plus grande partie les guerres des Perles, ôc des Roys du leuant: & pour les eguil lonner au combat on leur montre vn drappeau teind en ius de raifin, ou de meures. Et quoy qu’ils renuerfont les bataillôs,& qu’ils foulent aux pies Jesgés de guerre, vnpeu de bruyt touteffois d’vn pourceau (tant elllapuifi fance dénaturé grande)ou d’vn rat qui ell fi petit, ou bien la foule veuë les epouuante. Quand aulfi ils font étonnés & bielles ils reculent toufiours, quelque fois auec vn grand dommage des leurs. Comme Semiramis euft a mener la guerre aux Indiens, ayant moindre apparat d’Elephâs qu’eux elle inuenta vn moyen pour les epouuanterpenfans n’ellre aucuns Elephans hors l’Indie. Apres auoir tué trois mille bœufs, elle dillribua les chers aux maneuures, & fit coudre les cuyrs en figure d’Elephans : lelquels par apres remplis de foin en auoyent la vraye relfemblance : au dedans delquels elle enferma vn home alfis fur vn Carneau pour conduire l’effigie de l’Elephat: qui furent chofosfaides à l’écart,& enfocret,àfin qu’on n’enfentillle vét,
- & qu’étonnés d’vne chofo nouuelle ils les eftimalTent vrayes belles. Apres ces chofos accomplies en deux ans, elle les alfembla a Badres. Il y eut aulfi (outre vne autre infinie multitude d’hommes) cent mille cars, ôc autant d’homes fur des carneaux auec glaiues d’vne toyfo de long: elle accoutuma aulfi lescheuauxàn’auoirpoint de paourde celle maniéré de fantafines,
- N iiij
- p.076R - vue 163/480
-
-
-
- i*Dccrant hæc ex Diodo. eft quôd cum eo Romani Elepha tes Lybi-cos haben tes gciTc-re.
- Ex PÜ-nio.,DcIe eis aliqua-do.
- /
- f Lego ex P. Orofio introdu •-âos pro introdu-âi,&EIe-phâtospro Elcphati,
- ROBERT VALTVRIN
- ce que Perfée Roy des Macédoniens a long temps apres enfuiuy î en celle guerre que les Romains eurent contre luy ayans des Elephans Lybiens. Si eft ce que l’vn ne l’autre ne tirèrent point de profit à la guerre. Carie Roy des Indiens eftant auerty tant de la grandeur de l’armée que du grâd apparat de guerre, fit diligence de fiirpafier les forces de Semiramis en fàifânt plus grofle armée qu’elle,& apres auoir chafifé aux Elephans fàuuages il en dreflfa plufieurs a la guerre, a fin qu’ils donaflent au vray l’efpoir comme ils firent à ceux qui les voioyent. Les elephans furent premièrement veuz en Italie à la guerre de Pyrrhus,côme qui premier en mena vingt en Italie aux Romains,incogneus iufques a ce temps lâ.L.Metel grand Pontife en pafla deflus des flottes aflifes fus tonneaux attachés par rancs enfêmble, cét quarante deux : & comme aucuns dient huitvingts pris d’vne vidoyre faitte fur les Carthaginoys. Antipater témoigné que le Roy Antiochus en eut deux fort renommés au meftier de la guerre, mefines par leurs furnoms, ils en ont de vray cognoiflance. Quand Caton enregiftroit es annales les noms des Capitaines, il a dit que celuy qui combattoit fi bien en la guerre Punique fut appellé Sutrc,ayant l’vne de (es déts ebrechée. f Côme Antiochus voulut tafter le gué d’vne riuiere, Aiax qui toufiours auoit efté le Chef du troupeau refu là le faire : Et lors il fut ordôné que celuy qui pafleroit au-roit la principauté, a quoy l’Elephant Patrocle fauanturarparquoyil luy donna bardes d arget efquelles les Elephans prenoyent grand plaifir, aufli fit il toute laprincipauté : celuy qui fut diffamé préféra la mort a l’ignominie, finiflantfà vie par faim. Ils craignent merueilleufêment la honte :les vaincuzaufli fuyentlecry du vainqueur, &fê rendent de honte. Comme lemefmeAntiochusnepeuft forcer les Elephans de paffervne riuiere fort profonde,&n’euft moyen de nauires, il commanda qu’on bleffaft le plus fort fur l’oreille,& que celuy qui 1 auoit bleflfé pafla foudain la riuiere:l’Ele-phant animé la paffe pour pourfuyure l’autheur de fà douleur, donnant au refte exemple de faire le fêmblablc. Antiochus qui fut dit Eupator en mit en bataille trente deux contre les Iuifs, ordonnant pour leur defenfè a chacun quinze cents cheuaux, & auoit chacune tour trente deux combatans d’elitte. Quad Annibal menoit armée en Affrique cotre Scipion,iI mit en pointe quatre vingts Elephans,à fin qu’ils gardaffent de fuyr le fêcours des Gauloys, Geneuoys, Maures, Maiorquins,& Minorquins, ayans les Carthaginoys en queue:& pour renuerfèr l’ordonnance des ennemys.Du reps de Cefar le Didateur, & a fon troifiefme confulat vingt Elephans côbattirent contre cinq cents hommes de pie: & de rechef autant auec leurs tours garnies de foixante côbattans,contre le mefme nombre que deflfus de gens depié auec autant de ceux de cheual. Comme les Romains virent a la première bataille qui fut dônée entre Pyrrhus & le Conful Leuinus au Capo-uan près Heraclée,& la riuiere de Lire,f les Elephas entreiettés an récontre des deux armées auec vne contenance cruelle, ioint vne odeur puante, & d’vne mafle terrible ils tournerét vifàge eftas fûrprins, & epouuatés de celle
- nouuellc
- p.076V - vue 164/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VI. 77
- nouuelle maniéré de combat, attendu la frayeur des cheuaux. Mais apres que Minuce Centenier de la quarte légion ayant deux cents hommes fous fa charge au fécond bataillon euil couppé de fon elpée la trope tendue cou tre Iuy(que non fans propos on appelle main )& qu’il euft forcé l’Elephant de courir fus aux fiens, les rênes commencèrent à le rompre, 8c confon dre parlonoutrageulécourlé: & fut la bataille finie au moyen delanuiét.La féconde bataille entre Pyrrhus,& les Romains fut durant le Confulat de P. Suîpice,&Dece Murene,la ou les Elephans qui furent blefïes a la première charge, & qu’on apperceut pouuoir eflre forcés de prendre la fuyte, foul-droyerent les leurs,chaffés par feu mis entre les cuifles,& les parties molles, portans auffi leurs machines ardantes,& tremblans de furie. La troifiefme fut durant le Confulat de Curin le Denté,la ou ellans lesJElephas enuoyés pour renfort,les FvOmains ia duits de côbatre telles belles & ayans appreflé descrocesenueloppées d’efloupes 8c oin clés de poix, aueceguillons pour fattacher,& qu’ils les eurent lancées ardates au dos des belles, & aux tours, ils les firent redoubl&r eflans entrés aifémét en fureur,& ardans,en ruinant ceux pour la defenfé defquels ils efloyent ordonnés. Les Velites auffi ainfi nommez quafi de voleter, ou du Grec , c’efl àdireietter, qui efloit vne maniéré de gens de guerre vn peu au parauat inuentée, les tiroyen t en arriéré auec vn croc attaché entreles oreilles:& comme leurs maiflres ne les peuffent gouuerner,on les tuoit.Hafdrubal frere de Annibal fut le premier qui inuenta la maniéré de les tuer quand il efloit befoin.Et auons entendu en auoir eflé tué vn d’vn dard receu par l’oeil iulcjues aux parties vitales de la telle. Au demeurant ils poullént hors en beuuant huyle les dards qu’ils ont attachés à leurs corps.il y a eu diuers moyens pour leur refillenon atte-loit deux cheuaux bardés à vn car: les cheuaucheurs defquels drelfoyét des picques fort longues contre les Elephans.Or efloyent ils bien couuerts,ny ne les blelfoyent de leurs fieches ceux que les Elephans portoyent : au demeurant ils fuioyent leur rencontre par la courlé des cheuaux . Les autes y enuoyoiet des lôldats armés de pié en cap,de forte que leur harnoys efloit de toutes pars couuert d eguillos,a fin qu’il ne full au pouuoir de l’Elephât de làifir làns lé blelfer,le foldat a lés approches. Les autres leur bailloyét en telle vn bataillon de Velites, auec charge, qu’incontinent qu’ils fèroyent aoulles par les ennemys,ils fouuriflent,&: qu’ils r’abbatiffent de leur cheua . enë la furie des Elephans fur la queue ou fur les flancs. Plufieurs aulfi (qui efloit vne chofe plus léurejtuoyent leurs maiflres deloinga coups de fonde. Parce moyen eflans chafles à pierres, &fansgouuerneurs ils efloyent forcés de ruer furies leurs. Les aucuns retiroyent à leur venue les bédes entières comme eperduës de frayeur, 8c en feparant les enléignes les vne des autres, ils leurs failbyent place, mais comme ilsfuflënt arriués iulquesau mylieu du bataillon, ils efloyent aflaillis de la multitude epâdue de toutes pars-.quelque fois aufli ils efloyent pris Tains &lâuues auec leurs maiflres. Les vitellians auffi au païs d’Affrique,ôc quelques excellens Capitaines ont
- p.077R - vue 165/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- combattu auec Dromaderes, lefquels ordonnés d’auatles légions, ou bien mellez entre les légionnaires ont IbuuétefFois renuerle les rancs des enne-mys au combat de main à main. Crefus les mit en telle à la cheualerie des ennemys fort grande & forte : pour le nouueau regard defquels, & odeur, les chcuaux tremblans de frayeur ne rompirent pas feulement l’ordonnance des gens de cheual, mais aufti des gens de pie, & mirent les ennemys au danger d’eftre vaincus. Les Carneaux aufti de Scipion vainquirent Antio-chus: & fè treuue par memoyre que les Carneaux combattirét auec Arche-lae a l’Orchomene, & Cheronie. Entre lefcjuels ceux qui jfontduits à la guerre ont deux boftès au dos, 8c portent deux archers au combat à la guerre,aflis dos a dos, combattant l’vn l’ennemyen tefte, & l’autre celuyqui pourfuyt. Les Carthaginoys aufti comme dit Lucrèce ont eftayé de combattre auec Taureaux.
- 3)
- 33 33 33 33 33 33 33 33 33 33
- Et contre!ennemy onteprouué iettet Les furieux pourceaux,ils ont aufifaiél pointe De Dons bien hardis,auec guides armées Et gouuerncurs cruels qui peuffent les donter Et de liens tenusicombien quepour néant Carfè ruans dedans le combatpefle mefle,
- Ils rompoyent de courroux les troupes fans egard, Mornans de toutespars l'epouuantable crefie Du Chef, ny nepouuoyent les hommes efrayés De la peur des cheuaux les donter & tourner Vifage aux enuemysi
- Fin du lixielme liure.
- LE SEPTIESME LIVRE DE
- ROBERT VALTVRIN DE l’art militaire.
- Des périlleux,cefi à dire malheureux ou infâmes ‘tours d'aucuns moys CX du temps idoène à la guerre. Chapitre I.
- L fuffit pour ceftc heure Sigilmond Panduîphe des choies que nous auonsdid pour dreflervne armée en bataille fe^-Ion les diuerlès aftuces des Capitaines, & les diuerfês rai-lôns touchant le combat, 8c la vidoyre pour l’inftrudion des prefens & futurs, la ou la neceftité le requerra. Il ne fera pas d’oreftenauant mal lèant fuyuant noftre intétion de réciter quelques exemples foit bien ou mal, touchant les iours 8c moys du temps périlleux depédans de celle matière, que Nigidius.appelle infâmes,
- tenebreux,
- p.077V - vue 166/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VII. 7g
- tenebreux, ou malheureux en Tvnziefme de lés commentaires grammati-ques. Il eft doques certain que les Fvomains perdirent leur première armée fous la conduitte de Scipion le fixielme iour d’Oétobre contre les Danne-marchoys. Auquel depuis fous la conduitte de Luculle ils vainquirent les Armenins,& Tygranes. Car comme Luculle fuit party accôpagné de dix mille hommes ôc que quelqu vn euftditquece iour la eftoit malheureux* & a craindre aux Romains:Combattons,dit il,auiourd’huy en ges de bien a fin que nous rendions ce doloreux, ôc trille iour, ioyeux, ôc plaifant aux Romains.Les ayant donques combattu ôc chalïc^il ne fit perte que de cinq hommes tués:& en tua plus de cent mille. Le moys de Nouebre a euidem-ment fait de grandes deffaiétes de Barbares: Carence moys la Alexandre vainquit les heutenas generaux de Darius: les Carthaginoys ont efté vaincus par Thymoîeon en la Sicile le vingt ôc léptieftne iour, auquel aufH Troye lémble auoir efté prinlé, comme temoignét Ephorus, Callifthenes* Damalchus,& Philarchus. Il eft aufli auenu aux Béotiens d auoir eu deux vitloyres de renom au cinqiefme iour de Ianuier,comme qui par elles refti tueroit la liberté a la Grece.Feurier n’a pas efté gratieux aux Grecz:au lépt-iefine iour duquel ils furet fous la conduitte de Cranon defaiéts en bataille par Antipatre,ayant au par auant combattu malheureulément Philippe en laCheronie. Aumefme iouraufticeuxquipaflérentenItalieauec Archi-dame furent cruellement deffaiéls par les Barbares du pais. Les Carthaginoys notent le vingtneufiefine iour, comme qui leura amené plufieurs milércs,& grades calamitez. Les Perlés ont efté vaincus des Grecs à Marathon le fixielme iour de Mars,& au trezielme aux Platées,& aufli àMica-le:&les Athéniens ont eu la victoyre fur meraupresdeMaxon le vingt Ôc cinqiefme,& ont au vingtielmeprinslagarnifon desMacedoniés, auquel iour ils facrifient lécretteméc a Bacchus. Les Romains aufii ont des iours de guerre ouuerte qui ne font point léparez des médiocres. Les iours médiocres de vray en contiennet trétecontinue!z,durans lelqucls apres auoir ordôné la leuée de l’armée, lenléigne de couleur rouge eftoit affilé à la for-terefte. Tous ceux eftoyét iours de guerre, aulquelsil eftoit licite de repeter les prinlés,ou bien courir lûr 1 ennemy. Il eft certain que l’eleélion du iour pour le combat eftoit à lors loyfible aux Romains, fils menoyét la guerre. Mais apres eftrereceuë,il n’eftoit point de iour auquel il ne leur fuft loyfible de défendre leur vie, ou bien la dignité publique. Ils fuioyent aufli les iours notez de quelque malheur,pour inuiter Iesgcs. Au regard des lecôds iours des moys,ou bien des fobléqués des Nones,& Idcs,noz anceftres ont efté d’auis de les euiter,combié que Varron les pelé n’attoucher de rien aux affaires de la guerre, mais tant fèulemét au x priuez, ôc les ont déclaré tene-breuxrcôme d’vn nom malheureux,eftant à celle caülé ainfi diéls, ôc tenus corne dit SeruiusFlaccus,qu’apresla reprinfè de Romelîirles GauloysSe-noys L. Aétilius remontra au Sénat comme Qj Sulpitius ayat à combatre les Gauloys, apres d’Aille làcrifia vn iour tenebreux pour le combat, Si fut
- p.078R - vue 167/480
-
-
-
- ROBERT VAL-TV RI N
- tué auec l’armée Romaine: & qu auprès de Cremere,8c en plufieürs temps, & lieux il leur eft mal prinsd’auoir combattu apres auoir facrifiévn iour tenebreux : 8c que le troilielme iour apres ceft autre, la ville fut prinlè hors le Capitole. Vn bon nombre des Sénateurs fe dit auoir bonne louuenance que touteffois & quantes que lefacrificedu peuple Romain a efté £ai& le iour lûblêquent des Kalendes, Nones, Ides pour mener la guerre, quefub-fêquemment les affaires fe font porté a la première bataille de celle guerre la. Et comme le Sénat fê remit fur ces choies aux Pontifes, a celle fin qu’ils ordonnaftent ce que bon leur lêmbleroit, ils furent d’auis, que ces iours la ne fulfent ne pour la guerre, ne purs, ne pour faire aftemblée, 8c qu’on n’y feroit aucun îàcrifice. Ce que le làuant Ouide n’a pas ignoré dilànt au premier des faites.
- 33 La fefle de luno fvfurpe les Calendes
- 33 Aufonïési & meurt aux Ides l’aigneau blanc
- 33 - Pour le dieu lupiter.la tutelle des Nones 33 N’a nul dieu:ç5‘ a fin^que tu ne fois dcceu
- 33 ~ Le proche a tous ceux cy fera toufours lugubre:
- 33 - P ourles euenemensilsfont dits mal eureux,
- 33 - Car Rprn en ces ioursld a fujfert des dommages
- 33 - Triftesfus Mars contraireteferont ces chofs
- 33 - Dit te spour vnefois pour tous les ioursfefîes,
- 33< Oue force'ie nefy rompre l’ordre des gefles.
- Nos anceftres n’ont point voulu qu’on fift rien en la République auant lécinqielme d’Octobre,ne auant le huiéliefme de Nouembre.Et pourtant ilsne côbattoyent point ces iours la auec l’ennemy,ny ne failôit on rien en Ia Repub.neleuée d’armée,ne alfembîée de peuple. Ce feulement le failoit quelaneceflitéextremerequeroit. Plufieursauftifuyetlequatrielmeiour auat le premier du moys,cel uy des Nones,ou des Ides, comme de mauuais prelâgemy netreuuerienparelcritfi de celle obferuance il eft aucune cere-monie:finon que Claudius dit au cinqielme des Annales,quecefte tat grade perte de la bataille auprès des Cannes fut faitte le premier iour d’AoulL . Les R omains aufti furent deftaiéts le dixlèptielme de Iuillet près de lari-uiere d’Aille par les Gauloys qui eft diftat de Rome de douze milles près le chemin de Sabarie : 8c fut l’armée Romaine incôtinent rôpuë, près le bord de la riuiere,auquel l’aille feneftre fen eftoit fuye : 8c fut faict fi grad meurtre par eux que loudain fen eft enfuyuie la ruine de la ville, le meurtre des peres,& le liege du Capitole. Leur fuyte fut de nuict lors quelle fut faiéte: ôe fut la bataille fur la fin de l’efté, & près la pleine lune au iour auquel au par auant il eftoit auenu vne autre grade defaitte fur les Fabins au près de la riuiere de la Cremere entre la ville 8c les Veies: car il fut tué envn mefmé iourtroisoents & fix Patrices,ges de guerre d’vne melmerace,8c famille,8c en vn meftne iour par les Veies.. Pompée aufti délirant forcer Mitridate fuyant la bataille,délibéra la donner la nuiët : 8c l’ayant pourfuiuy,comme
- p.078V - vue 168/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VII. 75
- Ialune full Ieuée à dos des Romains, Mitridate penlànt les ennemys bien, prochains à caulè de la longueur des vmbres, tira tout Ion traiét a faute, les Romains lesalfaiilans dénués d armes,eurent la viéloyre fins grand trauailde combat, &prindrent leur fort. Annibal faydant de celle rai-fon militaire de temps, ôe allu ce aux Cannes, dre Ifa les gens en bataille pour combattre les Romains, non pas la nuiél mais à foleil Ieuant : de lor-tequ’il lesforçoit de combattre ayans le foleil au vilage,aucc le vent d’amont , que les nollres appellent vulturne. De vray il tiroir lors en maniéré de fouldréardanteau matin, comme il a de coutume, & enleuoit de violence la pouîfierede la campagne brullée d’ardeur: &palfant par fus les troupes Carthaginoylès elle edoit chaffée au vilàge des Romains. Ain-fi donques Annibal feft acquis celle tant mémorable & immortelle gloy-re de la bataille des Cannes a l’ayde du vent d amont, ou de vulturne ; en laquelle combien qu’il full merueilleufement cruel, & grand ennemy des Romains, on dit que relfalié d’vne fi grande boucherie de les tant fers ennemys, il feic celfcr la tuerie. Les Romaius depuis le trouuerent bien du mefme moyen. Caries Confuls Marin ,& Catulle ayans a combattre lesGauloys fayderent de rulè auec la force. Premièrement ayans. rencontré vn iour troublé pour alTaillirpar furprinlè, & aulïi venteux de forte que la pouîdre leur donnait au vifage, ellant pour lors leur armée tournée vers l’Orient, à fin que comme ils entendirent loudain par les prilônniersque lapoulfiere leur donnoit dedans les yeux, à caulè de la fplendeur, & reuerberation des làladesparvn aueuglementde la lueur ils défirent auec bien peu de perte celle fi terrible multitude de Gauloys.
- Les Iuifs aulli ont egard au iour de leur Sabbat : car le diuin Auguile Velpafian les défit, d’autant qu’il leur effc défendu de faire nulle œuure de ccnlèquence. Antiochus les défit par vne autre railbn, ôe diuerlè, car comme il eull Ion fiege deuant Hierufalem,& que les Iuifs Iüy demandai lèntlèpt iours de treuespour faire leurs folennités du Sabbat, il ne les leur accorda pas feulement, mais aulïi fit vne grande p“ompe iniques aux portes auec taureaux a cornes dorées, & auec odeurs, &perfunspreparéz en grande abondance en liurant à leurs prellres le lacrifice,puisil retourna à fon camp . Les Iuifs de ce emerueillés fe rendirent incontinent apres la Ibiennité perfaitte. Il y a autre railbn gardée a autres nations. Quand Melciadesfut auerty que les Perles entendoyent à leurs ceremonies l’efi-pace de trois iours, il les furprint & vainquit. Et comme les Athéniens fulTent affaillis par les Lacedemoniens , ils pillèrent les païs des ennemys aulquelz ils auoyent lèruyde proye, qu’ils ne fen doutoyent point en iettant loudain vne armée vers Lacedemon au party desfelles lolen-nelles faiéles hors la ville à Minerue :lâ ou ayans les armes couuertes ils ne retournèrent pas à Athènes incontinent apres leur deuotion faiéle. Les mefmes Athéniens aulfi auertis de l’armée de Darius, Se prenans
- O
- p.079R - vue 169/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- par femblablemoyen l’elperancepar I'occafion delà religion,&que les Perles encendoyent à. leur cerimonië l’elpace de quatre iours drelferent vne armée de dix mille hommes feulement, & de mille Plateenfespour le lè-cours,&: chargèrent fix mille hommes es champs Marathoniens fous la conduitte de Melcyades Chef de l’armée : lequel le confiant plus de la diligence que de la force combattit auec gens alfés délibérés plus toll main à main que le coup des fléchés ne le Iceut repoullér. On dit que la diuerfi-té fut fi grande du combat , qu’on penlôit que d’vn collé fuflent les hommes préparés pour tuér, & de l’autre brebis preftes a la mort. Alors devray moururent deux cents mille hommes Perles es plaines Marathoniës .Et comme les diuinemens de femmes lbrcieres,troublalfent les cœurs des Allemans, comme qui predifoyent les choies à venir par les cours ,abif mes, & bruytdesriuieres, ôc quellesaireuraflent,lbit que ce fut de l’ordonnance d’Ariouifte leur Roy, ou bien par la loy, qu’ils ne vaincroyent point fils combattoyent auant la pleine lune, Celàrtrouua bon les aflail-lir enuiron le temps plus toll qu’en l’attendant idoëne leur caller la voyle. En aflaillant donques leur fort & collines, il n’a celle de les ecarmoucher, iulquesa cequ’enflambés de courroux ilslbntvenusà la bataille.Par ce moyen eftans finalement misavalderoupte, Celârlespourlùyuant quatre cents ftades iniques au Rhin, couurit toute la terre de carnages, & dépouilles. Ariouifte gaignant le deuant auec peu de gens pafla le Rhin.Le nombre des morts fut,comme Ion dit,de quatre vingt mille hommes.
- DE L'ASSIE TE DTN CAMP.
- Chapitre 11
- L faut maintenant auilér du lieu propre a alfoir camp : c’elt vne I choie bien a confiderer en l’art militaire : à fin que fi l’ennemy
- alïaut l’ennemy, il ne puilfe eftre repoulfé d’vn lieu haut,ou bien eftre receu en bonne force, & halleine.il faut donques tenir ce moyen pour le choys du lieu, foit qu’il faille lé r’afrefchirenchcminant,oubien afleoir camp contre camp,que la place foit fortifiée de nature ou d’art, & fuffifant’aux necelfités : par art, comme par trenchées, pallis, ou rempart : par nature, comme font mottes mal ailées à monter, collines roy-des,lieux hauts&rabboteux,que Cato appelle verruces,ou bien lieux enuironnésde riuieres,ou maraiz. Et entant que touche les necelfités, que le marrain,l’eau,le blé le puifle recouurer près.Mais fil faut faire comparailon de ces choies, ie treuue que les hommes de renom ont plus cerché les lieux forts de nature, que les opulens : Ce que profita bien à Marin . Car comme a Ion tiers Confulat durant la guerre de Dannemarch, il eufl: gaigné vne colline au deflusdVne plaine &d’vne riuiere,la ou fe-ftoyent campés les ennemys, ôc que l’eau pour boyre faillift à fon armée
- p.079V - vue 170/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VII. 80
- de forte que chacun fè plaignoit de luy, il leur répondit que l’eau efioita leur veuë,mais qu’il la Tailloir conquérir de force. Comme donques les gros valets commençaflent à çombatre,-ôc que l’armée fuyuiffcapres , fou-dain que les deux batailles furent en ordonnance le combat fè donna* duquel les Romains eurent la victoyre. Cefiir a en toutes choies loué les lieux hauts, & fils deffailloyent il preferoitlesaquatiques.il fe treuue auoir fait camp es voyages de la Gaule auprès de la riuiere d’Axone, le fortifiant d’vn collé : au regard du derrière, il le rempara contre l’ennemv, Ôc faifoit que les viures pouuoyent venir feulement des villes prochaines.
- Cnée Pompée choifit vn lieu haut pour camper en la Capadoce, la ou il fit quelque perte, au moyen de laquelle augmentant la furie des gens de guerre, il vainquit aifement Mitridates de la lêule courfe. Q^.Metel eliant en l’Efpagne citerieure fit defeendre la riuiere d’vn lieu haut dedans le camp des ennemys aflis en lieu bas, lefqu'els epouuantés de la foudaine inundation ,il défit par. embufehesdrefféeses lieux auantageu*. Le lieu donques fera de tant plusauantageux, de quant plus il fera en lieu haut: car letraiét le tire de plus grande vehemence a ceux qui font en lieu bas, auec ce que l’armée qui a le deffus repoulfê de plus grande impetuolité ceux qui fefforcent monter,veu que ceux qui fontlogézen bas, ont deux combats, l’vn auec le lieu,&laütreauec l’ennemy.
- DE LJ P^ECOG NO 2SSJNCE D E LJ
- contrée ennernye, de la multitude, vouloir, entreprinfe, & confeil.
- Chapitre III.
- Ais pour autant que l’office d’vn excellent Chef,eft d’auoirbon auertiffemét & cognoiffance de la contrée des ennemys tant en paix qu’auffi mefmement en guerre, à fin que l’armée ne vague, —,.&nefe foruoye,il faut aufli cohfiderer quelle eft l’afïiéte naturelle de leur région, fi elle efipoint en rocs inaccefîibles, ouenuironnée de riuieres, ou bien enclauée de marefeages : quant grand outreplus efi le peuple; quelle efi leur volunté : leur fantafie, & auis. fils font forts ou foi-blesen fortereffes, &: fi elles font fortes' dénaturé ^ ou d’artifice ; toutes lef-quelles chofes ruminées par lé Chef ne pouuans efire vuydécs par luy, de-urôt parnecefiité l’eftre par autres ayans tref-bône cognoiffance des lieux. Ce que fê pourra fèurement & commodément faire,fils fen treuuent d’entre les citez,& marchads,amys;des deux armées,recerchâs les pafTages. Au regard des cités elles reçoyuent toufiours fans difficulté ceux qui leur amènent quelque chofè.Il eft des Chefs qui recerchent ces chofêspar les enne-mys, ou par les leurs,les autres d’eux mefmes. Comme Cato iie peuft autrement decouurir en Efpagne l’intention des ennemys, il commanda à
- O ij
- p.080R - vue 171/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- trois cens cheuaux de donner tous enlémble dedasleur guet,& d’en prendre & amener vnlâin &fàuue: lequel mis a la torture confeffa tous les fè-crcts des liens. Iulle Celàr recerchoit les entreprinlês des ennemys, par ceux qui eftoyent trouuez a la campagne par gës de cheual qu’il enuoyoic courir,& deliberoit au conléil félon qu’il les trouuoit d’accord.ce qu’il fai-foit fagement, & prudemment. Or ont tous Chefs de coutume d’enuoyer des epiës,& decouureurs d’entre les leurs : & combien quelvfàge confonde fouuent ces deux, la raïlbn toutelfois & l’authorité des lâuans hommes les lépare: tellement que l’epiëeft celuy qui fans lonner mot contemple les affaires des cnnemys : veu que le decouureur ou explorateur cognoift lesembuléhesàcrys.De vraynous lifonsque les anciens ont vie d’explorer pour crier l’alarme, mais apres il a commencé à lignifier decouurir & recognoiftre au vray.il eft aulïi vnc autre façon de decouurir lâns nulle ay-. de extérieure dont on dit que les Chefs le font aydé louuenteffois, comme le Confui Emilie en la guerre Etrulque:car voyant auprès de la ville de Colonie, vne multitude d’oylêauxjfeftrc leuéde la foreftaueevn vol hafté, entendit bien que la yauoit quelque embulche: d’autant que le nombre desoylèauxeftoit grandauecvnepouuantement.En enuoyantdonques f Ex Fron des decouureurs,il trouua qu’ils eftoyct la dix mille f Boulonoys pour lîir-cap°a Bol Prenc^re l’armce des Romains, Iclquels il deffit en enuoyant des légions lé-iorum^pro crettement par vn autre chemin. Comme aulïi fThiamene fils d’Hora-Colonio-^ P;es fufl; auerty que lesennemys f eftoyent emparé de la montagne il en-ni itnmî-1 uoya ^es auât-coureurs pour decouurir que c’cftoit : & comme ilsrappor-nere3pro taffent qu’il n’eftoit rien de ce qu’il penlôit,il marche: & voyant partir de la agmen m vne grade volée d’oylèaux enlémble,il priht fantalie que l’armée des enne-t Ex eôde mys cftoit la parquée : parquoy en tournoyant auecfâ force il les fruftra de Thiame- leur embulche. Au furplus Alexandre le Sertorin, Marc Volulfe Edil de la Thiani° c°mune ont en perlonne decouuert l’intétion des ennemys, aufli a Maxi-cus, mian,qui régna aucc Diocletiamcc qu’ils fîrét en changeant d’habits. Il eft aulïi certain que Celàr l’a fait par changement de robbe, par autruy, & en perlonne. Car,corne il euft fatalie de predre l’Angleterre,& de làuoir l’eftat de l’ifle, &: de la maniéré de viure des habitas,il la dccouunt par C. Volufc-nus, ainli qu eft la cômune voix des hiftoyres, côbien qu’aucuns hiftorio-graphes renommez alfeurent que Celàr a en perlonne recogneu le port,la nauigation,& labbord de l’iflc:& côbien que ceux latreuuét bon d’eprou-uer la fortune:cela toutelfois félon mon auis lent trop Ion audace,& outre-cuydance de mettre en hazard toute la côduitte, & force d vne armée : veu que tous ceux qui fouffrironr telles choies,ou forceront les autres de le faire,cerchent leur mort,ou celle d’autruy. Veu que l’exemple eft rare, que les Confuls Scipion,& Valere Lauin,&aulïi Xerxcs ont d’vne grade noblelfe laifle mémorable a la pofterité. Scipion de vray fit mener par tout Ion cap trois epiësd’Annibal, qui furent prins, & leur montra toute l’armée fans fenquerir des ennemys,& ordôna loudain de leur dôner à difher, & apres
- auoir
- p.080V - vue 172/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VII. 8r
- auoir prins le repas,il les renuoya fàins & fàuues pour rapporter à Annibal les choies qu’ils auoyent veu entre les Romains. Au regard de Va!ere,com me il euft prins vne epië dedans (on camp ayant vne merucilleufê fiance en fon armée il le fit conduire par tout, ôc ordonne que fon camp fuft ouuert aux epiës des ennemys à leur bon vouloir,a fin de les etonner. Au demeurant,comme Xerxes fils de Darius eut furprins des epiës des Grecs dedans Ion camp,il ne leur fitpoint demal,mais apres qu’il eut ordonnéqu’ils fuf-lent menés par tout le camp,pour voir en (eu reté & liberté l’armée pourla-quelle ils eftoyent venus,il les laifîa aller fàins & fàuues. Outre plus nous fauons bien auffi par les dagers de pluficurs,qu’il ne faut pas du tout hazar-der fon fàlut à tous ceux qui fe rencontrer,ou qui fê rendent. Car la grande Babyîoneque nulle armée ne pouuoit prendre fut prinfêpar l’artifice de Zopire.Il fê fit de vray fouetter,& coupper oreilles ôc nés,& fe retira dedâs la cité,ainfi difforme comme fuytif, faignant auoir eflé ain fi mutilé par le commandement de Darius auec le contentement de tous les affiftans.-puis il remôtra au peuple d’auoir bô cœur,& de defendre la muraille, ôc le fouf-frir auec les fiens mener la guerre à Darius,comme cftât prouoqué d’vn recent courroux,& outragé. Les Babyloniens donqueseftanstrôpés de celle, manière de fraudes, ôc autres fèmblables donnèrent finalemet la charge ôc pouuoirfupreme delà guerre a la voîunté du fuytif Zopire: lequel pour donner plus grande foy a fbuuêteffois defaiéts les ennemys: Ôca finalemet mis entre les mains des ennemys le peuple dont ilauoit la charge: par ce moyen lavilledeBabylonquipar force ne pouuoit eftre prinfê la fut par trahifbn.Et côme depuis Darius euft ouuert vne pôme de grenade merueil leutemét grande, ôc que quelqu’vn luy eut demâdé que c’eftoit qu’il voul-droit auoir en auffi grad nôbre qu’eftoyent les grains : Il répondit des Zo-pires. Or ne luy eftoit Zopire pas feulement compagnon,mais auffi home de bien,& amy, duquel lors qu’il fê mutila & coupa les narines, ôc oreilles, & qu’ai nh faifànt foy, il auoit trompé les Babyloniens, ôc qu’il euft liuré la ville à Darius il difoitfouuét qu’il aimeroit mieux auoir Zopire entier que prendre cet Babylones.Iulian auffi faifànt vn voyage contre les Parthes eut au commencement du defert vn des prifonniers pour guyde, Ôc tomba par apres entre les mains des ennemys eftans en embutehe, par la conduitte d’vn vieillard rendu, luy promettant fous vmbre de thraiftre luy montrer bon chemin apres eftre venu en plus grands defèrs cheminans l’efpacede trois iours : ôc pourtant ils tuerent incontinent ce vieillard de coups de fouets,confeffant 1 auoir fait ainfi pour la liberté du pais,voulant de bon cœur endurertoutes cruautés pour luy.Le Chef fut tué en celle guerre la,8c l’armée forcée de contraéler au gré de l’ennemy.Valerian Augulle fort re-nômé pour fon fauoir,& eIoquencè,fut menât vne groffe armée contre les Perfes prins par leur Roy Saporin : pour auoir eflé mal guidé des fiés, & des cftrangers,& paffa fa vieilleffeauec vne ignominieuteferuitude,& iufques à porter la peine d’eftre courbé cotre terre pour du dos fbubfleuer lePvoy,
- p.081R - vue 173/480
-
-
-
- ROBERT V ALTVRIN
- & non de la main en montant à cheual. Au demeurant, comme ainfi foitj qu’il ne foit point de butin plus beau, ne plus riche prinfc que des epies, & decouureurs, fil allient qu’ils foyent prins, comme il auienc fouuent, veu qu’ils pourchalfent tout ce qui l’offre a eux, il ne fy faut tant fier qu’on ne face bon guet : & eft befoin que toutes choies fbyent toufiours preftes, & en ordre tout ainfi que fi on fentoit l’ennemy approcher.
- LA FORME UNN CAMP, ET LES FAÇONS de faire de ceux qui en ont la charge. Chapitre IIII.
- Es choies ainfi de toutes pars bien exécutées félon la condition du lieu : pourftiyuons fublèquemment la forme du camp félon la difoipline des anciens, ôc l’ordre, la mode, & les railôns des choies qui y font requilès , duquel premièrement le pourpris elloit quarré. Vn grand nombre aulfi demarelchaux auec grande abondance de ferremés requis à le drelfer fuyt d’armée, dont le mylicu du camp elt ordonné pour les loges, & fon circuit montrait en dehors l’apparence d’vnemuraille,auecvne ordonnance de tours en pareille diltance, &elt chacune courtine de l’vneà l’autre garnie de traiéfc,baliftes, & autres engins de guerre à tirer pierres, & de toute façon d’inltrumens de traid : a fin que toutes maniérés de ballons de ied loyent prelles. Ils font outreplus quatre portes & quatre faces de la muraille autant ailees pour l’entrée des lommiers,que larges pour la retraite de lôldats fils font forcez. Au regard du dedans du camp, il elt departy en rues, & alfeient les loges au mylieu entre lefquelles latente du Chef, & Capitaine general tient le mylieu en forme d’vn temple, tellement que c’ell quafi vnecitédrelfée loudain,en laquelle font le marché, ôeles loges desartilàns,aulli lônt les demeures des Primas &: Capitaines des bandes pour vuydcr les différés qui lûruien-nent entre les gens de guerre. Au regard du circuit & de toutes les chofes qui y font,il eft fortifié lôudain auec ia multitude, lauoir, & opinion d’ou-uriers, & fi l’affaire le requiert on fait au dehors vn foffé de fix pies de profond, 6c autant d’ouuerrure. Ellant le camp ainfi fortifié, ou bien l’ayant a ellre,il ne doit pas auoir faute de gardes en armes. Le nombre qui n’ell ia-mais moinde d’vne cohorte faugmente en chacune porte au plaifir du Capitaine general, fil y a péril eminent : lefquels autant iour que nuid font par fois le guet quatre heures. Au regard delà diltribution des fieures les anciens l’ont notée par eau & vmbres : & ont lailfé ce moyen de les co-gnoillre a la pollerité.Ils auoyent devray deuxvaiffeaux decuyure,oti bien félon la première inllitution de Ctefibe l’Alexandrin, ellant le trou d’or,oud’vncpierreprecieulépercée,cômequine fvfét point du battemét d’eau, ny ne feordilfent de forte que le trou feltouppe. Cela toutelfoîs n’elloit pas par tout en vlàge : car en aucüs lieux le fond de I’vn elloit perle, corne vn’ horologe de lâblon, & ont foubmis celuy qui elloit entier, ayant l’autre fiole au defîus pleine d’eau. Aux autres lieux le fond du vailîeau vuî-
- p.081V - vue 174/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VII. g2
- de qui edcit deflus, edoit aulïi perle, & celuy d’au defl'oubs plein d’eau, 6c entier lur lequeledoitleperfé & touchant aI’eau,edant toüteffois au pa-rauant le palEige de l’eau edoupé de cire dedans & dehors: 6c comme elle a commécéagangnerdelFusou delToubs,ou bien couler ou entrer, en odat la cire, ils luy ont permis de couler ou entrer, tellement quelle coula vne nuiét iufques àlafinduiour enfuiuant, 6c ceiulques au commencement delanuid fublèquentc:par ce moyen ils ont mis la mefure du temps en la quantité de l’eau receue par ce couIement,& ont edably douze parties jfoubs vneiudemefure diuilee en vncercle, & les ont marqués,afin que les nombres d’heures fulfent certains, elquels ils faifoyent à lâuoir leur entrée,demeure,& lortie. Et lors fiiiuans les Egiptiés beaucoup plus anciens, lefquels il ed certain auoir premiers auant tous cerché 6c mefiiré Iéciel, 6c les momens du temps,foit que Horus ait edé celuy qu’ils appellét le Soleil, duquel les heures ontprins leur nom, ou bien que Horus foit Apollo, qui auant tous ed edimé auoir trouué les heures, Scipion Nafique collegal dé Lenate les a premier des nodres diuifé par eau égale delà nuiéfc, 6c du iour, &adcdiél’horologeacouuertdecedelôrteran de l’édification de Rome cinq cens quarantecinq.
- p.082R - vue 175/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Vregarddelarailbndes vmbres Anaximenes de Miles dilciple de Thaïes Ta trouué entre les Grecz,& a premier monlïré l’horo-loge aux Lacedemoniés.Larailon le pourra cognoiltre de iour, mefmementparle loleil, files nues ne donnent empefchement à larailon du quadrant, fi quelqu’vn ellant en pais plat tourne le dos droi-élément contre le loleil,& qu’il meliire au pie î’vmbre defbn corpsdepuis le vingt & quatriefme de Décembre auec le commencement de Ianuier, auquel le nombre ell de vingt & neuf pieds a loleil leuant & couchant. De vray Décembre & Ianuier ont vneconuenance d’heures enlêmblepar vneraifon contraire, veu que par vne melme ligne l’vn faugmente, & l’autre decroift. Au regard de Nouembre & Feburier la raifon des temps égalé leurs heures. Octobre aulfi a appelle Mars amefmesvmbres,lefailàntfc>n égal. Les iours de Septembre & d’Auril conuiennent en fimilitude d’heures. Vn melme cours de loleil égalera Aoull a May. Au regard de Iuingôç Iuiilet,ils fe font donné égaux elpaces d’heures, comme il ell contenu en celle figure ronde des nombres touchant tous les moys.
- p.082V - vue 176/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VII. 83
- L faut donques que tous facent le guet egalement a leur tour Huilant cefte mutation d'heures, & y cfchet vne cruelle peine contre eux, comme quieft de la mort àqukonque aura abandonné fàplacepourquclquecauféquece fbit. Quant aux portes on y ordonne deiour vnegarde en armes, & efl la coutume de faire le guet la nuict en des petits forts:mais encores ne fera pas mal fait d’ordonner quel -ques gardes dedans le camp outre les publiques, à fin qu’on ne face point de maléfice occultement. Comme Brute eut cogneu le guet des Gréez par les captifs,&les euflfait venirà foy,iImittouteion armée dedans leur camp, & défit les ennemys. Etpourtant les plus fàges auoyènt de coutume d’ordonner des faifeurs de ronde, qu’ancienriemenc ils appelloyent (circuitores)pourvifiterleguet, & rapporter fi quelqu’vn y a fait faute, ou bien ils faifoyent quelquefois eux mefmes la ron de. Titus au fiege de Hie-rufâlem vifitoit le premier guet de la nuiét faifànt la ronde tout autour du camp, &des efpaces des fors, donnant a faire celle du fécond à Alexandre fécond Chef apres luy, & du tiers aux Columnels des bandes. Alcibiades d’Athenes eflans fès citoyens afliegés par les Lacedemoniens,& craignant la nonchallance du guet, leurenchargea de prendre garde à la lumière qu’il montreroit la nuid de fà fortereffe à la veué de laquelle ils fif-fentle femblable, 6c qucceluy qui y faillirait, ferait puny. Comme don-ques chacun attend foingneufement le fignedu Capitaine,ils ont tous fait bô guet, 6c a eflé euité le péril du foufpeçon de la nuiéfc. Comme Iphy-crates Chef des Athéniens faifoit larondeàl’arriuée des ennemys, il en tranfperfâ d’vn dard vn du guet, qu’il trouua donnât: & comme quelques vns le reprinfent, comme de chofétrop cruelle, ielayfdit iljlaifle tel que ie l’ay trouué. La trompette donques lignifiera a tous tant du guet que des écoutes l’heure de dormir, &ne fbit rien faid hors l’ordre fans l’ordonnance du Chef. Les foldats apres auoir fait leurs deuoirsaupointduiour viendront au Centenier, &êuxaux Milleniers;aues lefquéls les Princes déroutes les bandes viendront au Capitaine en Chef de toute l’arméerau-quels il donnera le mot du guet, & autres commandémens félon les affai-respourles faire entendre aux foldats: a fin qu’ils lesentendent eflans en ordonnances que quandil fera befoin de charger,ou de fé retirerais foyét obeiflans. Le Signal que le Chef doit donner pour bailler aux foldats, 6c que chacü ordonné au guet doit fàuoir & non autre efl de celle condition quand on encharge de l’auoiren mémoire comme en la guerre de Marin, BardeiusrencelledeSilla, Apollo Delphicus:en celle de Cefâr,la mere Venus, & le Kyrie eleefon des Gréez Chrefliens, 6c autres au plaifir d’vn chacun: car cela efl bien neccffaire pour fé recognoiflre entre les ennemys, foit qu’on combatte deiour ou denuibl. Carfî l’ennemy fé cuide couurir des armes des noflres, il fé manifefle incontinent en luy demandant le mot du guet: les autres l’appellent Symbolum, 6c les autheurs approuuez, comme Tite Liue 6c Virgille,Teffera.
- p.083R - vue 177/480
-
-
-
- .ROBERT VALTVRIN
- QJf'ELZ HOMMES O N DOIT EN-
- noyer pourparlementer aneeles ennemys fille faut* Chapitre JZ
- Il faut parlementer auee les ennemys, il fautauiferd’y enuoyer gens qui puifTent decouurir d’aftucc, & a’experience de beaucoup de choies leurs finefTes,&: conceptions. Apres que Scipion l'Africain eut prins auéc Lelius l'habit d’vn efclaue, ayant occasion d’enuoyerambaffade âSyphax, il y feit aller vne élitte de Tribuns, ’ôc Ce teniers àuzquels eftoit donné en charge de côtempler l’armée du Roy» lefquels pour plus aifement voir l’afiiete du camp, en tournoyèrent la plus grande partie pourfuiuans vn cheual quafîcommeechapé qu’ils lâchèrent tout de gré: 8c apres leur r apport la guerre print fin par feu. Les Carthagi-noyzenuoyerenten fèmblablegens qui foubs vmbredambafladeursde-moureroyent à Rome, & entetidroyent les deliberations des Romains. Apres qu’on eut eleu à Rome troys ambafladeurs pour aller en Bithynie, defquels l’vn eftoit goutteux, 8c podagre, l’autre bleflé à la tefte, 8c le troy-fiefme fêmbloit auoir le cœur lâche,Caton le Cenforin dit en riat, Lepeu-ple Romain enuoye vn ambaffade, qui n’a ne pie, ne tefte, ne cœur. Mais fi quelquefois ce peuplelaauoitnouuelles delà venue de quelque ambafi fâdeeftrangere , il fenqueroit premièrement à lès efpiës, quelle eftoicleur demande, puis les moindres Magiftrats leursalloyentaudeuant:Et lors le Sénat vuydoideur demande hors la ville comme il leur fêmbloit bon. .
- ^ Î)E OJZELLE PRHDENCE ON DOIT
- . ^ parlementer aueclennemy. Chapitre JZL
- Idonques il faut parlementer auec les ennemys, nous Sommes auertiz par l’exemple de Cefar, 8c d’Ariouifte Roy des Alemans,. comme quoy il fe faut donner garde en le faifimt. Car comme eiourfuft venu auquel ils auoyent accordé enfêmble de parlementer, ils auifêrent de le faire, accompagnés tant feulement de gens de cheual en armes. Et comme Cefar ne fê vouluftpas fier atoutle monde, il prendles cheuauxdu fêcours des Gauloys, &en monte la dixiefine légion, en laquelle eftoit fà principale confiance, les affeans fur vne motte acinqcens pas de la force d’Ariouifte,pour parlementer à cheual.Les gens de cheual aufli d’Ariouifte eftoyent élongnez de fêmblable efpace imais comme en parlementât on auertift Cefar que les cheuaux d’Ariouifte,mar-choyent tyrans dars &pierres à fês gens* il ceffa de parlementer, &fê retira aux fiens. Et combien qu’il vit les ennemys eftre vaincus fans aucun pe-ril.par la proueffe de la dixiefine légion, il ne fut pas touteffois d’auis que les fiens co.mbattiflent, afin qu’on ne peuft dire en repoulfànt les ennemys ciU’ ils euffentefté par luycirconuenuz fous couleur de parlementer.Quad âuftilecainp eftfort d’afliéte, 8c de gens, iepcnféquele deuoir d’vn bon&-
- fage
- p.083V - vue 178/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VII. 84
- (âcre Capitaine eft fil faut parlementer de ne le faire à la legiere. Car comme fuiuant le commandement de Vefpafïan, le Roy Agrippa parlemen-toit auec les Gamalenfès de fè rendre, il fut a peine rapporté delà place, eftant frappé au coude dextre d’vn coup de pierre. Comme au fiege de Hierufâlem Tite penfàft que les Iuifz fè pourroyent gaigner par vn de leur nation, il leur enuoya Iofèphus pour leur remontrer, lequel fut par eux. fort bleffé par la telle, & fuft mort fil n’euft efté bien to A retiré par Ce-far dedans le camp.
- OJf’ON DOIT UVOIK £G«^RD UVX armes des ennemjs. Chapitre Kl I.
- -----L faut aufliauoir egard aux armes des ennemys: caria façon eft
- àplufieurs nations en quelque temps dangereufè. Le longboys des Numides qu’ils ont de coutume lancer fans l’aueau font en temps depluyes inutiles, d’autant qu’ils font gliiTans. Les efcuz aufli qu’ils portoyent d’vn cuyr d’Elephant etendu ôt dur, legiers St feurs neles peurentdefendre, d’autant qu’ils ne les pouuoyentporter, comme defquels la nature eft de fabbreuuer d’eau, tout ainfi que l’epongc: & a cefte caufè non maniable pour leur pois. Les Orientaux vuydans leurs guerres principallement par fléchés haiflèntles vens Scies pluyes, quiles contraignent veniràlapaix. Parquoy comme P. Scipion vit l’armée du Roy Antioche fort trauaillée d’vne pluye continuelle iour 8c nuiét,8c que non feulement les hommes, 8c les cheuaux en eftoyent rompuz,mais qu’aufïiles arcz eftoyent renduz inhabiles, d’autant que les nerfz fè rela-choyent, remontra aux liens de donner la bataille au lendemain, combien que cefuft vniour de fôlennité, lequel auis la viétoire a incontinent enfûyui.
- Q^KE L^i MKLTITKDE DES mées doitejbre confiderée d’autant quegrandes armées ont ejiérompues & dejfaicles d’vne bien petite. Chapitre VIIL
- L fautaufti qu’es grandes armées on ait égard à l’experience 8c raifbn de la difcipline militaire,qu’ellesont autant d’vn cofté que d’autre, à fin que tu ne mettes au combat vn peuple neuf & fans expérience auec les bien aguerriz, cuidant a l’exemple de Xerxes que la force d’vne guerre git en toute l’armée. De vray comme ce tant excellent Roy d’Afieeufteu^comme Ion dit)fèpt centz mille Perles armez, auectroys centz millehommes de fècours, outre l’armée demermerueil-leufe, &prefques incroyable, 8c qu’abonne raifon on penfàft qu’a peine fuffifoyentles riuieres pourles abreuuer, nelaterre pour les receuoir, ne lamerpourlenauigaie, nelecielmefmeeftre allez grand pour les flèches:
- p.084R - vue 179/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- a celle armée touteffbis auiourd’huy fi incroyable , & de laquelle le nombre ferait maintenant plus difficile a affembler, que pour lors, il n’a elle à vaincre. Leonide Roy des Lacedemoniens a refifteauec quatre mille homes es detroicfz des Thermopyles combattant troys ioürs continuels. Etcommeauquatriefmeiouril vifl que d’vne guerre continuelle l’enne-my fepandoitpartout,ilremonftreà fês Lacedemoniens en r’enuoyant les alliés du fêcours pour fe garder a meilleur temps, qu’il ne falloir plus efperer delà vie, mais beaucoup plus de la gloire, & qu’il ne falloitat^n-drel’ennemy neleiour, mais plus tofl forcer le cap au moyen de lanuicf & combattre enfemble, & rompre les bataillons: veu que les victorieux ne fauroyent plus honneflement mourir qu’au camp des ennemy s. Il perfua-dadonques qu’il eftoit plus tenu au pais, qua fa propre vie, & qu’il ay-moit mieux mourir en gloire que de viure fans elle. C’efl vncas incroyable que fixcentz hommes ont donné dedans fixcentz mille: Finalement ils font mortz dedans Iatuerië, &les monceaux des tués, lafïes de faim," de veiller, & du trauail d’vne fi longue boucherie, chargez auec leur Chef de fâng, non vaincus, viuans d’vne gloire eternelle. Xerxes dôques étonné de ce tumulte & trouble fur terre, & fpoliéparThemiflocles de fês na-uires, defquels ilauoitcouuertlamer,fen fuyt bleffé, & en habit diffimu-lé, ny point autrement, comme dit le Satire.
- Qjtduec v»finivdïjjeauen vagues defang teintes
- Et d\n éperon lent pour tin fini carnaie.
- Comme ce mefme Xerxes fuit preffé par troys centz Lacedemoniens aux Thermopyles, lefquels agrandepeine il deffit il fê difoit auoir efté en cela trompé, que véritablement il auoit grand nombre d’hommes,mais point ou bien peu de gens aguerriz. Outre-plus centz mille Barbares furent deffaiéts par quatorze mille Gréez qui furent au fecours de Cyrus cotre Artaxarxes. Cyrus auffiau voyage contre les Perles vuydademerueil-Ieuxaffaires auec quatorze mille hommes .de guerre. Alexandre de Ma-cedoyne accoutuma tant àla guerre quarante mille hommes qu’il eut de fon pere, qu’en affaillant tout le rond prefques de la terre, il a vaincu innu-merables armées d’ennemys. A la première bataille qu’il eut donques auec Darius(delaiffons les autres)il fytrouua fixcentz mille Perles, lefquels ne furent pas moins vaincus parl’auis d’Alexandre qu’ils furent rompuz & chalfés parla prouelfe des Macédoniens : en laquelle Alexandre ne perdit que fix vingtz cheuaux, & neuf hommes de pie. A la lèconde bataille Darius combattit contre Alexandre auec troys centz mille hommes de pié,& cent mille cheuaux iulques àcequeDarius full vaincu, Ôc quela boucherie des Perlés fen ellenlùyuië. Il y demeura de vray cent mille hommes de pie, & dix mille cheuaux, & prins quarante mille. Au regard des Macédoniens ily en demeura trentedeux hommes depié, ¢ cinquanteche^ uaux. Lamere, la femme qui effcoit fa lceur,& les filles de Darius furent trouuées entre les prilonniers: & comme Darius offrant la moytié de fon
- Royaume
- p.084V - vue 180/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIL 85
- Royaume pour leur rançon fuft econduit,ilrenouuela derechef pour la troyfiefme fois la guerre auec toutes les forces des Perlés, & les fecours des alliés, n’ayant plus d’efperancc de paix: Et met en telle à Alexandre reuenant de l’Egipte deux cents mille hommes, 6c quarante mille che-uaux auprès de Tharlé. Mais comme apres le long doute du combat, il voit les liens vaincuz eflant preft de mourir en la bataille, il fut contraindfc àlaperfuafion des liens détourner vifâige. Pour laquelle bataille les forces, 6c Roys de l’Afie ont elle ruinez, 6c commença tout l’Orient eftre fous la puifTance de l’Empire des Macédoniens : 6c fut lors toute la fiance des Perles tant abbatuë par celle guerre la que depuis perfbnne n’ola rebeller-.prenans les Perfes apres l’Empire de tant d’ans,le ioug de férui-tude en patience. Il efb bien difficile de croyre ce qu’on dit, qu’en vnfi grand nombre de maux , ils loyent mors en troys batailles , 6c en autant d’ans quinze cents mille hommes que de piéquedecheuah&tous de ce Royaume 6c peuples, defquels n’aguiereslongtemps auanton recite auoir elle tué plus de dix 6c neuf cents mille . Epaminonde Chef des Thebains vainquit auec quatre mille hommes encecorriprins quatre cents cheuaux, vingt 6c quatre mille hommes depiéLacedemoniens, 6c dix 6c huit cents cheuaux. Milciades Chef des Athéniens allant contre toutes les forces des Perlés accompagné de peu de gens,fe ioingnit de main a main à l’ennemy auant qu’on le peuft repoulfer à coups de fléchés. Par ce moyen ayant vnze mille hommes il mit à mort deux cents mille Perlés. Luculle fit mourirplus de cent mille hommes en Armeni'é, accompagné de dix mille de pié, & mille cheuaux contre Tygranes ayant cent cinquante mille hommes en fon armée, (ans qu’aucuns d’eux attendri la charge des fiens, 6c tua à la chafleplus de deux cents mille hommes , ne failânt perte que de cinq Romains. Le mefine Luculle ayant pafle l’Eufrate, 6c le Tygre, 6c combattant auecMithridates, 6c Tygranes, tua auec bien peu de force vn grand nombre d’enncmys . On dit qu’en celle bataille la il fut tué trente mille hommes. Tygranes fè lâu-ua n’ayant prelques pas cent cinquante cheuaux, en iettant là coron ne pour n’eftre cogneu. Quatre peuples de l’Italie,preuz ôtfloriflans qui font les Etrulques, Vmbres, Samnites, 6c Gauloys fefforcerent d’abolir les Romains, faifans vne armée 6c alliance enfémble durant le Confulat de Fabius Maximus, & Decius Murena. Et comme le côbatfuft cotre les Samnites, 6c Gauloys, 6c fuflënt les Romains foulez de la furie des Gauloys, Decius fut tué: mais Fabius auec vne grande deffaitte de la compagnie de Decius gaigna la bataille, en laquelle furent tuéz quarante mille que Samnites que Gauloys. On dit qu’ily demoura fept mille Romains tant féu-lement de ceux de Decius qui y fut tué . Tite Liue recite que hors les Etrulques, 6c Vmbres, que les Romains firent finement retirer,il y a-uoit tant des Samnites que des Gauloys cent quarante mille troys cents vingt hommes de pie, 6c quarante fix mille de cheual, 6c mille cars
- p.085R - vue 181/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- en armes contre l’armée Romaine. Les Romains ont contre l’armée de Mithridates en la petite Arménie que prins que tué quarante mille hom-mes. U y fut blefle mille Romains: à peine en fut il tué quarante. Les Romains auffi vainquirent Hafdrubal auprès de la riuiere de Plombe, duquel latefte fut iettée deuant le camp d’Annibal, & tuèrent cinquante fix mille hommes de fon armée. Il en fut prins quarantecinq mille, combien qu’il n’y en demoura qu’enuiron huit mille de l’armée desRomains,& de leurs alliés. Comme les Alemans & Dannemarchoiz euffent gaignéla plaine de l’Italie, Marin & Catuleenuoyés cotre eux combattirét de forte,qu vne fi grande, & fi terrible multitude fut totalement deffaitte, auec bien petite perte des Romains & d’eux. On dit qu’il fut tué cent cinquate mille homes,& quarate mille prins.Le Sénat fut merueilleufemét éperdu de frayeur pourlareuolte delà Gaule Cifalpine. L. Emillius Catullus, &c C.Acillius Regulus eflans Confulz, veu qu’auffi les nouuelles couroyent qn’vne mer-ueilleufoarmée venoitdela Gaule Tranfàlpine, mefmement des GefTates qui n*eft pas nom de nation, mais feulement de Gauloys combattans pour la foulde. Les Confulz decelaenuieux, affemblerenttoutes les forces de l’Italie pour la côfêruation de l’Empire. Cela ffaiét on dit qu’en l’armée des deux Confulz fo fonttrouués quatre vingt mille hommes, corne l’a laide par efoript Fabin l’hiftorien qui fut en cefte guerre la: lefquels n’ayans pas fait perte fî grande qu’ils fo deuffent eftonnér fenfuyrent.De vray les hifto-riographes difênt qu’il en futtuétroys mille. Parquoy de tant plus igno-minieufe & infâme a efté la fuyte d’vnefî grande armée pour vne fi petite perte. Apres que Sylla eut prins Athènes, il combattit auec Archelae: la ou furent tués cét dix mille hommes: a grande peinef'cômelon ditjenechap-pa-il dix mille. Apres les nouuelles de ceftedeffaicte. Mithridates enuoya d’Afie foixâte dix mille hommes d’elite pour le réfort a Archelae.Defquels à la féconde bataille il fut tué foixante mille, & à la troyfielme toute la force d’Archelae fut tuée. Vingt mille de vray repoulfés dedans les paîuzôt requerans la vie à Sylla furent tués d’vn infàtiable courroux du vainqueur, & tout autant poulfés dedans la riuiere & tués : ôc ierefte de ces milêra-bles furent mis a l’eipée. Prahdes Perfé & Chef de la guerre, affembla vne armée iufques à deux cents mille hommes: & apres auoir aflis fon camp es limites des Cadufiens,il vainquit en bataille Achée Chef des Medes accompagné de huit cents mille hommes, dont il en tua iufques a cinq cents mille chaflant le demourât hors les limites des Cadufîés.Eftant en grad renom pour cefte viéloire, il fut eleu Roy des Cadufîés,&pafïa en Medie,& apres auoir ruiné toute la prouince, il facquit vne grande gloire.Les Cro-toniens iadis puiffant peuple en l’Italie furent deffaits par les Lorcrenfés, combien qu’ils euflfentfix vingts mille combattans, & les autres a peine quinze mille:H eraclian lequel on dit auoir eu vne merueiîleufè & afTés incroyable armée de mer, comme qui pour lors auoit troys mille fépt cents vailfeaux, lequel nombre on ne treuue point qu’Alexadre ne autre Roy ait
- p.085V - vue 182/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VII. S6
- eu hors Xerxes eflantdefcenduàterre* & tirante la ville auec Ton armée epouuanté du rencontre du Comte Marin, & prenât la fuite, auec vn vaif-fèau retourna feula Carthage, la ou il fut tué d’vne hante depicque.
- O K’O N DOIT DECO WK IR L ^ F N-tajîe des apege^. Chapitre I AT.
- Vantauxaffiegezil faut fenquerirdes fantafies de la commis ne, car fil fy treuue de la partialité, on prefte l’oreille a l’homme de cœur,.&pendant que, (comme il dit) que la peur y eft, &c queles parties n’ontnulcertain fùpport, ne fais le long, carie deîayeres choies preftes a deiamais nuy. A celle caufè comme Titus eut donné la chaffe aux Tarichées en bataille,retournant a la cité, & auerty du dilcordd’entre les eflrangers,& les citoyens,il entra foudain par force dans la ville & la print. Et fila reddition foffre d vn commun confèntement. Il le faut dônêr garde, que l’auis de plufieurs ne foit auec dol, comme il auint à P. Licinius le ProconfîiI.Car comme il euft prins des bourgades fous cou leur de reddition, ceux de larrieregarde des Romains furent tuéz. Au de-mourant iamais Cefarne feflfiéaux rendusfinonen liurantles armes, & oftages choifiz,entre les plus nobles,comme enfans & freres des Princes, iufques au nombre de cinq cens félon la capacité du lieu, afin qu’il oflaftefperance aux ennemys, & qu’il fè procurai! fèureté.
- QJ^îL EST DE T^IRE S’IL <JVIENT
- qu'on ctfîiege vn camp. Chapitre FC.
- ’Il auient qu’il falle affaillir vn camp en diuerfè forte, nous fom-mes auertiz comme quoy cela fe fait parles exemples fubfèques. Scipion l’Africain affaillant le camp,auquelhyuernoyent les i^UCarthaginoyz& leur fort, fit la nuyt mettre le feu dedans leurs loges. Les Carthaginoyz effrayez,&penfàns le feu fy eflremisparfortu-ney accoururent fansarmes pourl’eteindre,d’ontils furentaifémentdef-faiéls parles ennemys, eflans enarmes.il fut défait es deux camps quarante deux mil hommes, que de feu que d’armes:cinq mille prins,les Chefs a peine fè fàuuerent à demy brûliez. Craffe l’vn des Capitaines de Cefâr printle fort des ennemys de mefrne artifice. Commede vray, il menaflla guerre en Aquitaine, & fut auerty que les ennemys à la coutume de leur Republique prenoyent les places, fortifioyent leur camp, & fârroyent les viures, & munitions,il auifa de ne faire le long a dôner la bataille.Cela mis en confeil, & eflant toute la compagnie de mefme aüis il délibéra de combattre au lendemain: & pourtant en iettant fès forces aux chaps au point du iour il ordonna ceux du fêcours à la bataille, & eflant fon armée en telle ordonnace il attédoit la deliberationdes ennemys.Et côbien qu’ils pen-
- P ij
- p.086R - vue 183/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- falfent combattre fans péril pour leur grad nombre, ôc le peu de Romains, ils onttoutelFois eftimé pour le plus feur d’auoir la victoire fans coup férir en tenat les paflages, ôc en leur couppat les viures: ôc queII les Romains commençoyentàfaireleurretraitte, ilsfattendoyent donner lur le bagage de tant plus grad cœur. Cela decouuert Cralfe ayant par le retardemét des ennemys rendu les liens plus courageux,tire au cap: la ou corne les vns ré-plifloyét les trachées, ôc les autres repoulfaflent les ennemys a force dardz: ceux du lécours auquels il n’auoit pas grade fiace furet par luy ordonnés a fournir dardz,& pierres, ôc de porter des gazons pour réplir les trachées.Et corne il entédoit à cela,ôc que les gés de cheual luy eulfent f apporté que la grande porte du cap n eftoit pas h diligément fortifiée, il leur encharge de prédre les quatre cohortes demourées pour la garde de leur camp aueclef quelles ils vindrent à celuy des ennemys, ôc comme le côbat fuit doubteux ôc qu’on chamailloit d’vn collé ôc d’autre, & que les ennemys lortas le fort prindret la fuyte,Ia cheualerie les a pourluiui en pleine campaigne, ôc n’en a à peine lailfé la quarte partie de cinquante mille hommes. Pour celte maniéré de fortune ie treuue qne Celàr felt afiez biédonné garde de n’enclor-reiamais plus grand païs dedans les fortifications de Ibn camp que Ion armée pourrait r’emplir.Il auoit aulîi vne coutume que iamais vn cap ne de-uoit eltre abandonné , linon que le rempart eltant forcé onnepeultplus repoullérl’ennemy. Au regard au temps des faillies d’vn camp,Galba Capitaine loubs le mefme Celàr en a baillé enléignemenr. Car comme il eult alfis fon camp aux piés des Alpes, ôcqu’vne grande partie des liens fuit au fourrage,les Gauloys gangnerent incontinent le coppeau des môtaignes. Ces choies entéduës Galba alfembla les Capitaines, ôc tient conléil, ce pédant on auifa d’attendre la fortune, ôc de defendre le camp, à lors les ennemys donnent ligne de bataille, ôcl’alfaillentdetoutespars. Et comme les Romains encores entiers, ôc en leurs forces courulfent au quartier du cap vuy de de gardes pour le lêcourir, ils fe lalferent finalement pour la grande multitude des ennemys, ôc le peu de leurs gens. Les ennemys commencèrent à coupper le pallilfemét, Ôc remplir le folle, de fo rte que tout lémbloit eftre perdu. Les Princes de l’auantgarde venans à Galba luy remontrent dehazardertout,ôcpar vne faillie venir au combat. Les Princes donnent ordre que leurs Centeniers reprennent quelque peu aleine, en amalfant les dards qu’on leur lançoit, ôc depuis fonnans àla bataille, ôc fortans fou-dein par toutes les portes, les ennemys n’eurent pas Ioyiïr de lé ietter en bataille, ôc furent tous enueloppez ôc deffaiéfcs: au regard des Romains ils fe retirèrent làins ôc làuues. Comme aulfi les Geneuoyz eulfent alfailly par furprinlèlecampde.P.Emille, iltintlonguementles liens quoyz feignât d’auoir peur: & depuis étant l’ennemy lalfé,ilîes deffit, ôcprint failànt faillie lôudeine par les quatre portes. Triturin Sabin,aulîi dôna foulpeçon d’auoir eu peur à vne grolîè armée de Gauloys, en tenant lés gés lérrez dedans le fort,ôc pour y donner plus grade foy,iI en enuoya qui corne fuyans
- alfeu-
- p.086V - vue 184/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIL g7
- affeuroyent que l'armée Romaine eftoit au defèfpoir, nepenfântquedela fuyte: les Barbares pour l’efperance delà victoire qui foffroit , coururent de fureur au cap des Romains chargez de fagotz pour combler les foffez. ParquoyTituriniettatoutes les forces contre eux, 5e apres en auoir fait grand meurtre il en print plufieurs prifcnniers.
- OffVE OJVELOJ/E FIN DE G VE RK E QJ^I
- foffre, elle ne doit iamais ejlre delaiffêe. Chapitre ATI.
- Vfurplusquelque fin qui foffre esaffaires de laguerre ilne la faut iamais delailfer. Si on neft party égaux, on peutrecommécer de cœurs pareils: Ci i’ennemy a le meilleur,& q tout le perde & tourne en fuyte, il y faut auilèr foudain. Car corne le Sertorin chalfé en bataille par ÇV. Metel Pie n’eftima pas la fuyte Iuy eftre fèure,il comma-da aux gens de guerre fè retirer efpars leurdifant le lieu, auquel il vouîoic qu’ils fèretiraftet. Viriate Chef des Portugaloyz efchappa de l’armée des Romains, ôedelamalaifancedes lieux parlemefme moyen de Sertorin, epandant premièrement fon armée, que par apres ilar’afTemblé.Triphon aufïi Roy de Syrieeftât vaincu epadit partout le chemin argét en fuyât, Se euita les cheuaux d’Antiochusqui le fuyuoit,les arreftat par lâ.Ce rufé Roy auftïMithri dates cognoifïat l’auarice des Romains fit auffiepandre hardes & argét parles fuyas à fin d’arrelfer leur pourfuy te.Corne M.Marcel Cofùl, fuft tôbé entre les maïs des GauIoys,& toutes chofes ennemyes,il dôna dedans, Se eux eftâs étonnez de cefte audace incroyable, il leur tua leur Roy rapportât vn merueilleux butin,au lieu qu’il n’auoit poît efperâce de falut
- OJS’IL EST DE F <_AIRE SI ^iPRES L
- bataille perdue, onfeffietté dedans vn.foft • Chapitre JC 11.
- Ais fi les repoulfes de la bataille font retirez es fortereffes la ou il eft befôin de confèil,il ne faut iamais auoir le cœur abbatu. Car tEx Pub. corne lestCatinéfès fèntiffent les Sarraçrofins leur eftre ennemys, 9ro*9a~ & facheuz,ils impetreret fècours des Atheniés,lefquels vindrét â pro car-fi grade force d’armée demer en Syciie fous la côduitte de f Nicias Se Lama thaginen-chus, que les Catinenfès craignoyentleur fècours, & apres deux batailles eod-gaignées, ils enfermèrent les ennemys dedans la ville,&les afïiegeatauec Nidaspro armée de mer,par mer Se par terre. Les Sarragozins rompuz Se laffez de-Llc,as* mandent fècours aux Lacedemoniens, lefquelsleurenuoyerent Gilippus fèul, auquel toutefrois eftoit vne prééminence de toute façon de force,
- 5c qu i à fon arriuée,oyât que les affaires de la guerre fè portoéyt mal, affem-bla gés,Sc fempara des lieux auatageux pour mener la guerre. Et corne depuis il euft perdu deux batailles,a la troyfiefme il tua Lamachus,Sc dôna la chaflè aux ennemys,& leua le fîege àfes alliés. Les Atheniés apresfe delibe-rerét de combattre f ir mer, Gylippus fait venir l’armée de mer des Lacede-moniés iaprefte, Se le fècours des alliés. Les Atheniés à la première charge
- P iij
- p.087R - vue 185/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- furent vaincuz, 5c perdirent leur fort auec toutes les finances tant publiques que particulières. Par ce moyen Gilippus Capitaine excellent remit les choies en bon eftat, combien que battu deux fois, fans perdre le cœur, 3c fans fetonner. Et fi apres les forces deffaides,ilnerefte plus d armée, cela offre aux alliés occafion de prendre la querelle. Ariftonique Roy de l’Afie défit Licin Craffe auec vnegroffe armée de gens defècours. Au lieu duquel Craffele Conful,Perpenna venant, lurprint Ariftonique glorieux de la vidoire recente, & le mit en fuyte, le denuant de toutes lès forces:& comme il euft alïiegé la ville de Stratonicc à laquelle il feftoit retiré, il le força de fe rendre par famine.
- QV’lL EST DE F R£ LJ OV LES EH-
- ncmys vaincu^ en bataille nontpoint de retraitte. Chapitre ATI II.
- Ais files ennemys chaffezen bataille n’ont point de fors pour leurretraitte, il faut totallement entendre âdeffaire le'demou-rant de la bataille encommencée, comme Marin lequel apres la deffaittedes Alemans en bataille donna frayeur au demouranc accompagné de peu de gens, le logeant tout autour auec continuels criz (d'autant que la nuid auoit rompu le combat) & les garda de prendre le reposée faifimt à fin qu’au lendemain il défit plus ailement leur armée n’ayafc point repofé. De vray il eft auenu infiniz dômages a ceux qui ont efté non-challans de telles chofes. Comme Ethie Conful Romain,euft deffait neuf vingt mille homes Hunnoyz en peu d’heures,& qu’il Iuy fuft aifé de def-faireledemourant,ilfit d’vn mauuais auis ceffer lapourlùyce, laiffantvne ruine de toute la Gaule par faute de punir l’ennemy. Le lèmblable auint a Pompée d ot il le procura la mort. Car corne Celâr eut aflailly Ion lieutenat Torquat pour le deffaire auec vne légion,Pompée auerty du péril de lès alliez fit marcher la toutes fes forces, cotre lefquelles Cefar delaiffant le fiege marcha,fur la queue duquel aufli Torquat fit foudaïvne fiillie.Par ce moye les Celâriés epouuatez d’vn péril double fenfuyret nôobftat la repugnace de Celânlequel touteffois lè fauua: d’autat que lûruenat la nuid Pôpée reti rafonarmée delàchaffedaquelle au témoignage mefines de Celâr eftoit pour lors vidorieulè, dilânt ces parolles. La victoire eftoit auiourd’huy indubitable pour les ennemys,& qu’il auoit peu ce iour la lèulemét eftre vain eu d’euxjfilseulfenteu vn Capitaine lâchant vaincre.Finalemét apreseftre efehappé, & qu’il eu t ayant lès forces affemblées vaincu Pompée es plaines Pharfaliques, il le pourfuyuit en fa fuyte, & eut foudain la vidoire.il pour-fuyuoit touliours en tous affaires de guerre d’y mettre quelque fin, ne pen-fant auoir rien fait fil reftoit rien â faire: tellement que comme il euft def-faittroys cents cinquante mille Suyffes, les cent trente mille qui relièrent fins ceffer d’aller pour la nuid vindrét au quatrielme iour es limites de Lagrçs,côbien que les Romains auoyct tardé troys iours â caulè des bleffez
- p.087V - vue 186/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIL 88
- & de la fêpulture des morts. Cefàr enuoya lettres Sc gens à Langres qu’ils n eufïént aies fècourir de viures ne d’autres necefïités:&; que fils le faifoyét jl les tiendroit pour ennemys. Au demeurant il les pourfùyuit trois iours apres,auec toute fon armée. Les Suides prefïes de faute de toutes chofés,offrirent de Ce rendre, & en le iettans aux pies de Cefàr auec pleurs demanderont la paix : aufquels comme il commâdafl de bailler oflagcs,& armes,fix mille d eux pendant qu’on les cerchoit/en fuyrent la nuiét, lefqueîs pour-fûyuant il reputa comme ennemys,& print les autres à mercy les remettans dedans leur pais. Comme aufïi le mefme Cefàr eufl dôné la chaffe aux Belges,ils delibererent de regaigner leur pais poury combattre-.lefqueîs pre-parans leur départie au fécond guet Cefar craignât embufehe, comme qui ne fàuoit la caufé,tint fon armée enfémble.-mais apres que le cas fut confirmé par les coureurs au point du iour, il enuoya deuât la cheualeriepoura-mufèr l’arriere garde, fùyuant apres en ordonnance auec les légions : & fit vne boucherie autant grade quelle fe peufl faire par l’efpace d’vn iour. Puis fbudainvenues contrées des ennemys auant qu’ils y fuffent de retour, il print fàns refiflance leurs fortereffes. Corne aufïi apres la conquefle de toute la Gaule les nouuelles couruffent qu’aucunes cités vouloyét renouueler la guerre dlmena foudain en leurs cotrées fon armée, pour la fubite arriuée de laquelle il auint qu’ils furent plus toft deffaufts par la cheualerie, qu’ils n’eurentleloyfirdefèfàuuer es villes. Cefàr aufïi de vray défendit par edi& de ne faire ce fîgne de courfés, qu’on fait d’un feu mis es édifices, tant a fin qu’on ne peufl fè donner garde, & qu’aufïi l’abondance des grains & fourrages ne défaillit:. Somme que Cefàr obuyoit à toutes les entreprinfés des ennemysfefforçantd’yaccouriràgrandstraittes, nynelaiffoit le loyfir a vne ville de péfér plus toft du fàlut d’vne autre cité que de foymefines. Par-quoy il conféruoit fés loyaux amys par celle diligence, & forçoit de paour ceux qui branloyent à prendre les conditions de la paix.
- OJ<E VAVIS DE ELVSIEVKS CAPITAINES
- rieïlpas depourjûyureles fuyans opiniâtrement iufques d Vne extreme ruine. Chapitre X1111.
- V contraire aufïi il efl certain par I’auis de plufieurs Capitaines qu’on ne doit pas opiniâtrement pourchaffer la ruine totalle des ennemys. Car comme plufieurs remontraffent à M. Licinius de pourfbyure îadeffaitte totalle des ennemys, apres qu’il eut vaincu Hafdrubal,il répondit : Il efl de befoin qu’il en refie quelques vnspour porter aux ennemys les nouuelles de noftre viéloyre. Scipion l’Affricain auoit de coutume de dire qu’il ne falloir pas feulement faire le chemin aux ennemys,mais aufïi le pauer. Pyrrhus Roy des Epirotes a entre autres en-Lignemens d’vn Chef, laiffé par memoyre que les vainqueurs ne deuoyée pas opiniatremet pourfuyure la totalle ruine des ennemys eflas en roupte:
- • P iiij
- p.088R - vue 187/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- laquelle façon de rufc de guerre ie treuue auoir efté par luy obferuée, & par afïes d'autres excelles Capitaines en toutes façons de combats auec les en-nemvs: car comme il eull prins vne certaine cite, & qu eftant les portes cio fes il auilift que les enclos dedans combattoyent vaillamment à l’extremi-t LegoRo té il leur fit paffage. Corne les f Romains enclos combattiffenrvaillammét manipro au près du lac de Perouze Annibal retirât les fiens leur donna moyen de le vtnoüÈ retirer,& les deffit en leur retraitte fans faire perte des fiens. Ainfi qu’Agefi-ma eft hi- laus Lacedemonien combatoit en bataille cotre les Thebains, & qu il fuit ftoria, auerty que les ennemys eftans clos pour la nature des lieux; combattoyent
- vaillammét, de au delelpoir,il leur donna paffage en ouurant les fiens, puis de rechef il les remet en bataille fur leur retraitte, & les deffit fans faire per-tExFrô- tc> | Themiftocles apres auoir vaincu Xerxes,garda les fiens voulâs rom-
- tin5 Thé Pre Ie Ponc »comme 11 euft remontré T1’11 eftoit mcilleur de chaffierhors miftôcles de l’Europe, que le forcer de combattre par contrainde : & luy enuoya vu vi&oXer- homme pour luy faire entédre le péril de fes affaires fil ne haftoit fa retrait-ruoI^oTte • Antigone Roy de Macedoyne donna paffage aux Etelins, iefqueîs par tem rum- luy preffés d’vn fiegeenduroyent grade famine,& auoyent délibéré de fai-pere. re vne faillie,& mourir tous enfemble:par ce moyen en rôpant leur fureur,
- il les a deffaids à la fuyte. Tite Cheualier Romain, & auquel apres la mort des deux Scipions, l’armée Romaine donnala charge delà coduitte, deffit les Carthaginoys fans leperildesfiens:&enfouurant il leur donna moyen de fuyte, comme ils combattiffent de grand cœur pour ne mourir fans vengeance, eftans enclos par luy. C. Cefar fit auffi voye aux Alemans qui pour eftre enclos cobattoyent de tant plus grad cœur, comme defelpe-rés;&adonnéfùr eux a la retraitte. Comme Gn. Manlius Conful reue-
- nant du combat,trouuaft le camp Romain prins par les Etrufques, il a mis les ennemys enclos, eftans les portes enuironnées de gardes en telle rage, qu’il eft demouré en la bataille. Ce que voyans fes Lieutenans donnèrent paffage aux Etrufques foubtrayans les gardes d’vn cofté : & les ont defaids les pourfuyuansefpars,ioindle rencontre de l’autre Conful Fabius.
- QJTIL FAVT AVOIR L'ENNEMY PAR
- efclats mynefxrien tant bien Jeantavn Chef,que le retardement C7* dîf imuldtïomne rien moins que la hafliueté& témérité.
- Chapitre XV.
- Cecy fêrt auffi l’auisdeDomiceCorbulon,quidi(bit qu’il falloir auoir l’ennemy par efclats:ce que gardans plufieurs excellens Capitaines,leur eft venu à bien, ôc à gioyre, & mefmement à Fabius Maximus. Car comme eftant enuoyé contre Annibal, il ne voulut combattre en bataille, mais tant ftulement luy confommer fôn armée en diffimulant comme qui pour lors eftoit preffée de faute de finaces
- ôc de viures, il le fuyuoit affiegeant ftm camp es lommets des montagnes,
- &
- p.088V - vue 188/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VII. 8*
- & es forefts : & fortans quelque fois àcofté il luy faifôit telle. Et comme la multitude fè mocquaft, & quon l’appellaft Pédagogue d’Annibal, il n’en faifoit conte,fuyuant fâ deliberation & auis: tellement qu’en fè retournant bien fouuét a les amys,il difoic celuy luy fêmbler plus timide,qui craignoit les mocqueries,& attaches,que celuy qui craignoit l’ennemy. Or comme d’auantagefbn collegal Minuce fuft en grand renom,quafi comme eftant homme trefidigne du nom Romain, d’autat qu’il auoit faid quelque def-faitte des ennemys,il fè diloit auoir beaucoup plus grade crainte de la bonne fortune de Minuce que de lamauuaifè. Et comme quelque peu de téps apres Minuce fuft furprins d’vne embufche perifiant auecIon armée,il de£-fit luy donnant fecours vn grand nombre d’ennemys,& le fuma. Parquoy Annibal vaincu & repoulfé en les effors,dift(comme Ion recite)à fcs amys, Ne vous ay-ie pas dit que quelque-fois celle nue de montaigne nous fou-droyeroit de quelque bien grade violence de tempefterComme auffi eftat le Sertorin par vn mcfme moyen, en telle contre Philippe au delà de l’He-bro,vne grande multitude, & tourbe de Barbares troublant tout de fa brutalité,& fierté luy arriuoit de toutes pars, & fans obeifiance : donnant auffi fur l’ennemy d’vne outrecuydance, il fefforça de premièrement les dreflèr par raifbns,Sc parolles : mais la ou fubfèquemmét il les voit(ce non obftât) le hafter fans proposai délibéra de les offrir à l’ennemy,nô paspour du tout les ruiner, mais tant feulement leur faire fèntir les coups, efperant par la en îouuoirle temps auenir iouyrplus aifement. L’ayant donques exécuté fè-on fâ fantafie,il fy trouua au befbin,& les retira dedans le camp:puis quelques iours apres,pour leur eueiller l’entendement, & les confoler,illesfait tous afièmbîer : ôc commâda d’amener deux cheuaux au mylieu, l’vn prefi-que mort de vieilleffe, & pauureté,& l’autre fort &: poly, ayant vne longue queue.Or eftoit au près du maigre vn grand & puifiant homme, & au près du cheual poly & fort vn petit homme, & foyble. Et apres leur auoir fait ligne,ce grand homme fuyuant ce qui leur eftoit commadé, prend a deux mains toute la queue du cheual maigre fefforçant de l’arracher opiniatre-mét & d’vn coup. Au regard du petit home il arrachoit poil àpoil la queue du puifiant cheual. Finalement ceft autre tirant pour néant toute la queue cnfèmble,fè lafla fè trauaillant pour néant auec vne rifée de toute l’afiiften-ce,pendant que le petit homme arrachant peu àpeuadenuéenpeu de téps toute la queue du puifiant cheual. Alors le Sertorin fè leuant fur pies, Vous voyés(ditil)compagnons qu’enginvaut mieux que force, & que maintes choies font vaincues par le menu,qui ne le peuuent eftre tout a coup. Corne le ieune Scipion eut apperceu l’effrenée folie des ennemys, il difbit que lafèureté fachetoit auec le temps. De vray le deuoir d’vn bon Chef eft corne celuy d’vn Médecin d’vfèr de fetremés à l’extrémité. Et comme vn iour il euft aflailly les Numantins à point leur donnant Iachaflè,& que les plus anciens fuflènt fort courroucés contre les vaincus leur reprochans pour quelle caufè ils fuioyent deuant ceux qu’ils auoycnt fi fbuuent chafles : on
- p.089R - vue 189/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- die qu’vn certain Numantin répondit que feftoyent les mefmes ouailles, mais le berger eftoit autre. Finalement il n’eft rien mieux lèânt à vn Chef d’armée quele temporifer, & dilfimuler, ne rien moins conuenable, que la haftiueté & celerité.Or elt ihSigifmôd Pandulphe^que tous ceux qui pour le iourd’huy font eftimés entédus pour le long vfage de la guerre, te louent iufques au ciel de ces deux choies, melmement li contraires, comme qui as deffait deux Royaux apparats de guerre merueilleufèment beaux & puif fuis. Car comme Alphonlè excellét & bien renommé Roy des Terracon-noys eftât en fa grade puilfance pourfuyuoit 1 armée de Francifque Sphor-ce,ton beau pere,tu l’as faifant ledeuoir dvn bon filsreceu dedansla forte-relfe du temple de Fortune,auec fon armée, alfeant camp au dedas des murailles: & as tant fait,que combien que les ennemys courulfent fouuét iufques aux portes, & tu lèmblaseltrealfiegé, tuas touteffois elle la tutelle de ton beau pere, en rompant aifément parta prudence & magnanimité les forces, & tous les effors de ce Roy la : le chalfant finalement par vne faillie faitte fur luy des limites du Picin, lequel deux ans apres, au voyage de Plô-bin tu as auec vne charge forte & hardie, & loudeine des tiens, ayat ia gai-gné la muraille, & ia fefiouylfant ôc butinant, de fait d’vne courfe par maniéré de dire,& non pas de toute la force à la maniéré d’vne foudre, l’aflail-lant auec vne longue, & làge preuoyance, non pas par armes, nepar gens, mais plus toit de l’vmbre d’armes,auec vn ligne de feuz faictla nuid,& vn bruit commun des rendus, & de tous les peuples de l’Hetruriëqui accou-royent a toy, à fin que celle ville la ne full point rendue : d’autant qu’en vn moment tu l’as approché, tu l’as battu, & f en es retiré, ny n’ell menlonge qu’on dit de toy,que le Roy a ellé plus toit vaincu par toy que veu . Parce' moyen tu as vle(ce que nous n’auons point entëdu eltre auenu à beaucoup degens)detemporilementaulïege desFaueins, & Sphorceins, &pour la defenlê & lècours de Plombin de hardielTe,charge,& halliueté.
- OyV’JL FAVT AVISER ojae Paic rjsfE
- gloyre on ne tombe en péril, £7* ruine, au moyen d’vne bonne fortune. Chapitre XVI.
- combien que la fortune die bien aux hardis(côme dit Maro) & que l’experienceen donne fouuent bonne epreuue,illêfaut touteffois dôner garde fur toutes choies que la gloyre d’vne bô-ne auenturc n’attire quelqu’vn au péril,& ruine des liens.Pour la nonchallance duquel auis aucuns Chefs d’armées, donnans plus de furie, que de rufe fur l’ennemyont mis eux & les leurs en vne ruine & defaitte prelques milèrablc, & li cela ne nous eltoit d’autre part certain, nous fouîmes alféz endodrinés par les exemples du tref puilfant,& excellent Empereur Cyrus,& des Carthaginoys. Car comme Cyrus fuit entré en Scytië,la RoyneThomirisqui luy pouuoit defendre lariuiere d’Araxis,le fouffrit
- p.089V - vue 190/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIL <>o
- palîerifè confiant premièrement en les forces, & fublèquemment à i’oppor tunité de la riuiere, qui encloït I’ennemy. Elle enuoye donques le tiers de fon armée auec Ion fils â la pourfuyte des ennemys.Cyrus Iaiffe le cap plein deviures,commefilfenfuyoitdepeur. Les Barbares quafi comme inui-téz a repailcre furet d’entrée enyurés,puis loudain tués par le retour de Cy-rus.Thomyris ayat perdu fon fils en l’armée,fo prépara d’effacer la douleur, foit de la mere,ou de la Royneplus toff du fag des ennemys que de pleurs.
- En feignât donques vnc défiance pour le delêlpoir de la perte faitte attrait à fes embufohes peu a peu l’en nemy glorieux en reculant le petit pas:& corne elle le vint combattre en des deftroictsde montagnes,elle fit mourir deux cents mille Perles auec leur Roy : tellement que d’vne telle deffaitte,il n’en relia point pourporter telles nouuelles. f Comme Maarbal enuoye tExFron parles Carthaginoys contre les Aphricains entendifl bien que la nation efioit fort friande de vin,il méfia dedans celuy qui eftoitenfon camp arbalpro' de la Mandragore , laquelle a vne vertu moyenne entre le venin & le Anmbafc. fommeil : & apres auoir fait quelque combat ,leger il fo retira tout de gré, puisa laminui&en laiffant quelques hardes dans le camp, & tout le vin méfié,il fait femblat de fuir: Et comme les Barbares ayans gaigné le camp,
- & palmés de ioye,euffent beu le vin ainli mixtionné,& fuffent étendus corne morts,f Maarbal retournant lésa prins,& tués. Comme aufii Anmbal +ExFr£m futauerty>quefoncâp,&: celuy des Romainseftoit afiîsen contrée denuée Annibaf° deboys, il a laifféplulieurs troupeaux d’ouaillesdedans iecampen aban- proidem, donnât tout de gré le païs:delquels les Romains failàns proye fo font r emplis de viandes mal laines par la trop grande dilètte de boys. Puis Annibal ramenant Ion armée la nuicl leur a fait de grades fâcheries, comme eftans fans crainte, & apelintis des chairs à demycreuës. Comme les Hiftrins fuyuillènt les Etolinsqui les auoyent n’a guéres fècourus en vne guerre, le commencement de la bataille fut bien fortuné â lennemy, &caufede là mort.Car comme ils euffentprins le camp de Cn.Manlius,& entendiflent fort au butin,Appinlebeaulesaffautbeuuans &mengeans, &les vnsfef-battans,& ne làchans ou ils eftoyent pour leur yurongnerië: par ce moyen ils ont reuomy auec lelâng & l’elprit la vidtoyre mal conquifo .Et comme leurRoygourmandmisâchcual fufffort las d’vne grande gourmandilè,
- & tournoyement de telle,il ne foeut prelques qu’â grande peine apres ellrë éueillé entendre qu’il fuit prins.
- Q_VE LES APPARATS DES BANOVETS
- fè dojuent miter en vn camp. Chapitre K/.
- J^|gjg|pjEs friandilêsôc grands apprefis de banquets ont elle defenduz aux camps par Capitaines de grand renom. Nous auons entédu que Malfiniffa amy du peuple Romain âgé de cent ans auoit de coutume de prendre fon repas deuant là tente â midy, ou bien le pourmenant. Annibal ne mâgeoit qu’a foleil couchant pour ne perdre au-
- p.090R - vue 191/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- cunc heure du iour. On dit que ScipionSc Alexandre ont elté contensde pain lêc en cheminant auec leurs amys . Curin Tvn des plus vaillans Capitaines Romains, &: qui a vaincu la plus vaillante nation de l'Italie, & le plus riche Roy de Grece, comme il elt elcrit de luy, mettoit en vn petit feu des herbes qu’il cueilloir envn petit iardirt. Le moyen aulli des pois & feues a pieu à beaucoup de gens, delquels comme nous auons entendu l’Empereur Seuere auoit coutume d’vlèr entre tant de richelfes. Nous auôs aulli leu que Seuere Septimin fuyoit toutes delices au camp. Car comme il eult défendu qu’ame ne beult vin en l’armée, & que tous fullent concens de vin aigre, & que nul boulengerne luyuilt le camp, commandant que toute la tourbe des fôldats vlàlt de bilcuit, il en vfoit prelèns tous, & publi-qucmét deuantlàtetc,ny n’a iamaiscerché moyen defecouurir pour le fo-leil ne pour les pluyes. Et corne Pompée fuit malade,& que le médecin ordonnait qu’il vlàlt de Griuespour lelquelles recou urer les liens perdoyent leur peine comme eltans hors de faifon, &que quelqu’vn dilt qu’on en trouueroitchésLuculle, d’autant qu’il en faifoit nourrir tout le long de l’an. Pompée donques,dit il, ne lâuroit viure fi Luculle n cftoit curieux de friandifes. Parquoy détaillant celt apparat de medecine il a vfé de viandes communes, & groITes. Iulle Celàr eltoit fi aile en viures, que comme il eult decouuert, qu’on luy eultlèruy desalparges,& quepour huyle vierge, on luy eullmisde l’huylelàle,ilne lesmangeoitpas feulement lànsdifficulté, mais aulli reprenoit ceux qui fencourrouçoyent. Ses gens de guerre mangeoyent la racine d’vne certaine herbe auec du laid, laquelle ils fouilloyent : & en palîant de courlè par deuat le guet des ennemys ils leurs en iettoyent du pain, dilàns d'auantage,que tant que la terre porteroit celte façon d’herbe ils tiendroyent Pompée alïiegé. Pompée au contraire deffendit de n’apporter, ne publier par le camp celte façon de pain & de langagecraignant que les cœurs des liens ne fabbatilfent par la patience, & opiniâtreté des ennemys.Nous liions aulli que le pain bis,le menu poif-fon, le formage de laid de vache prelfé à la main, & le fruid verd du fécond rapport du figuier eltoyent aggreables a Augultcxomme qui le cô-tentoit de peu,& de viandes communes. On dit aulli que Tibere a tenu celte façon de vie au delà du Rhin,tellement quelèant fur vn gazon ilpre-noit Ion repas: & a pâlie toute vnenuidlàns tente. Le diuin Adriana vo-luntiers vfé publiquement des viandes du camp, comme de formage & lard,a l’exemple de Scipion Emilian, de Metel & de Traian Ion autheur. La necellité des choies necelïaires a fait viure Cambifes premièrement des bourgeons tendres des feuillars, puis du cuyr amolly au feu, pour n’auoir fait munitions de viures, ne recerché les chemins, tirant Ion armée par de-fers^ païs ardans,&d’autant que la région Iterile,inhabitée & dénuée de la fréquentation d’hommes ne leur fournilToit rien : & comme depuis les racines-& herbes leurs deffaillilTent entre les tablons, & que le defèrt fè mo-tralt vuyde d’animaux ils eurent pour Ie'ur nourriture le dixiefme d’eux
- p.090V - vue 192/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIL
- par fort. Et comme il euft perdu vne partie de fon armée, 8c mangé la titre, & qu’il fut en crainte que le forme tombai!; fur luy,à lors il fonneà laretraitte:cependantonluyrefèruoitles plus friands oyfêaux,& efloyent fes vtenfilies de cuyfine portés fur chameaux : pendant que les foldatz iet-toyent lefort fir ceux qui auoyent à mourir miferablemét, & viuans beaucoup plus pauurement. Finalement Sigifmond Pandulphe, ie ne veuil paspalferen filence,ce qu’entre tous ces fupremes honeftetés de vie des Chefs, & Empereurs, il y a entoy vnelî grande fimilitude& confiance, cju’on nelàuroit rien penfer pluslemblable, ne rien dire plus grand, veu quetuasenenluyuant égalé & furpalfé toute celle maniéré des Chefs 8c Empereurs,portant le trauail,le veiller,la loif,la faim, 8c toutes pau-uretés. Qui ne lait (veu que tu n as iamais dédaigné aucune façon de viande, tant fuit elle vile comme faifàntauec les tiens le voyage de Plombin) que tu nas pas vfé de pain bis à la coutume de ces autres ne feulement du gros,mais noir, & dur comme vn caillou,auec vne verdeur fleurie,& moyzië,&tel que les chiensprompts a la viande, ne lescheuaux neuf-lent pas mangé? le me tay du gland de liege, lequel à toy, &aux tiens en vne fi grande rage de faim lembloit viandes Royales, quali comme vne fâueur &fàuffemeflée.Ie me tay des eaux des fontaines chaudes, 8c ful-phurées : 8c combien que le moyen de vin défaillit, 8c que cefle maniéré d’eaux caufôit plustofl vn vomiffement,qu vneftanchemenc de foif3 rien toutesfois ne t’a lêmblé, ne au tiens plus plaifant à boyre auec vne amiration des gens dupais. Le deuoirdonques de la guerre requiert bien qu’on fe garde des delices, & de ne le ietter a la volée au pillage : encores qu’il lèmbleriche& certain. Car il auient bienfouuent quependantque le foldat entend aux delices,butins, 8c pillage desennemys,il rappelle l’ennemy, 8c que plufîeurs excellens Chefs ont eflé fubiuguéz 8c deffaictz apres auoir gaigné grandes batailles,& deffait de bien groffes armées.
- Q BELLES CHOSES SONT NECESSAIRES tant pour baillerfecours,que pour le tirer }fil auient que no Are armée foit enfermée (Tvn camp, ou de places fortes, ou quelle df tege quelqu'un.
- Chapitre XHIIL
- R apres ces raifons du melfier de la guerre, que nous auons diél, cene fera paschofê inutile de fauoir, ôcrecercher par les exemples des anciens ce qui fera necefîaire pour donner lêcours, ou en auoir, ou bien pour decouurir la fantafië de l’ennemy par lê-crets auis, 8c moyens, fil auient que noflre armée fbit afïiegée d’vn camp, ou de places fortes. Cicero Lieutenant de Cefâr eflant afïiegé dedans fon camp, ou il yuernoit, 8c délirant l’auertir bien a plein des affaires luy enuoye gens, 8c comme quelques vns prins,& cruellemét mafTacrés,r em-
- p.091R - vue 193/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- pliffent les autres d vne euidentefrayeur,il le trouua toutefois vn Chef Gauloys, lequel au moyen de la liberté grands dons, 6e promefTes porta a Cefar des lettres attachées à l’aueau d’vn dard, pour autant qu’il eftoit Gauloys. Cefar ayant l’affaire a cœur perfuade vn Cheualier Gauloys de porter fês lettres à Cicéron, pour les tirer attachées à vn dard, fil ne peut entrer dedans le camp . A quoyil faccorda, & comme il fuit arriué près du camp il tire craignant y entrer les lettres comme il luy eftoit enchar-gé,lefquellespar fortune tombèrent en vne tour, ny ne furent apperceus par aucun auant le troificfme iour . Puis defcouuertes par quelque fol-dat elles furent oftées & portées à Cicéron, & recitées en l’aflfemblée des gens de guerre, d ont ils entrèrent en grande efperance & ioye. Or eftoit l’epiftre fort courte , Se efente en lettres Grecques de cefte teneur, à fin » quelles ne fuffent entendues des Barbares, le fuis ia en chemin auec a mes légions, Sefêray la bien toft:ie te prie de garder ton ancienne ver-33 tu. A. dieu. Iofêphe couurant ces meflagérs de peaux de brebis a long temps abufé le guet des Romains, penfâns que ce fuffent chiens. Il fen eft trouué qui cnuoyoyent par gens des lettres coufuës dedans la peau d’vne chieure enflée,Iefquels fiaydans de leurs iambes à nauiger comme d’vn gouuernal, trompoyent ceux qui du camp les regardoyent de loing fous vmbre de quelque befte. Arpagus cerchant l’occafion de venger vn outrage , enuoya à Cyrus arriéré fils d’Aftyages eftant relégué en Perle par vn fèrf des lettres dedans le ventre d’vn liëurevuyde,luy ordonnant aufli de porter le filé, afin que fous vmbre de chaffe les gardes des pafi {âges n’entraffent en fufpicion :d’ont il eft auenu que par les lettres en-uoyées fecrcttement d’vn cofté & d’autre Cyrus priua Aftyages des royaumes de Syrie, & de Medië. Aucuns aufti ont eferit dedans les fourreaux des epées,Ies autres enuoyent lettres ployées dedans des cannes,ou ballons creux, & ceinélures, ou bien dedans le fondement de leur efpië, ou de leurs cheuaux. Les pigeons aufti ont Jfèruy de courriers en bien grands affaires, portails lettres attachées à leur col, ou bienâ leurs piéz au fiegede Modene, auquel leConful Hircius & DeciusBrutuslesfentr’enuoyoyent apres leur auoir drefiféà manger en quelques lieux hautspar Iefquels les apportant à la ville, au parauant tenus fèrréz & fort prête de faim, il auertiffoitfèsamysdelavicloyred’vn retour àleurs nids. Fabinlepein-f Quifint tre die que comme lagarnifon des Romains fuft aftiegée par lesîLigur-Ligurtim tins ^ qLîe par vn £[]et attaché aux piés des pigeons qui luy furent appor-interim ta tés,les neuz fignifioyent à quel iourarriueroit le fècours pour faire vne men duxî faillie. Les Latins faydent des lettres Grecques, & les Grecs des Latines & autres. Symmachus devray efcriuant en lettres Grecques au Roy Denis, colü- nys,îuy fit entendre que les Carthaginoysfaifbyentvn appareil deguer-bis ad fc: re fous la conduitte d’Hanno, qui fut caufe que les Carthaginoys ayans ' adhuctex- decouuert la tromperie défendirent par vn edicl public, que nul des leurs tusmacus. ne parlaft,ny efcriuift en Grec.Les Egiptiens aufti ont de coutume de faire
- diuerfes
- p.091V - vue 194/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIL i>2
- diuerlès figures d’animaux au lieu de lettres : aulfi font de mefinc ceux qui lesenfuyuent. Leurs parolles de vray ne font pas notées par lettres ne par aifemblement de lÿllabes, mais par celle maniéré d’images d’animaux, eftant leur fignificationcognuë aux hommes par vn vlâge de memoyre.;
- Car comme dit Lucain:
- }) Or n audit du papier FEgipte encor tvfage
- » Les beftes çpr ojfèaux fedans pierre grandes
- > > Eftojent les feules gardes en Magique langage.
- Comme encor on le peut voir esobeîifquesqui font encores for pies a Rome.Ils fignifiét de vray le vocable de nature parle vaultour : car les Phi-ficiens dilêne qu’on ne fauroittrouuer des malles entre celle maniéré d’oy-lêaux, & par l’image & figure de la mouche failànt le miel auec l’eguilon, le Roy. Ils dénotent aulfi part l’elperuier vne chofofoudainement faitte: tAhasle d’autant que c’elt vn oyfeau d’vne aile plus ville que les autres: qui eflhoberea“»
- 1 J ... rr i n • ^ 1 i- oumouf-
- vne marque qu’on approprie aux amures domeltiqucs, qui requièrent ai- chec, ligence. Le crocodile lignifie mal: mais en ce que le dragon mord fa ciueue fè ramenant en rond,, il leur lignifie Fan toutainli que le clou a eftéla mar-que du nombre des ansànoz ancellres, comme Cincins diligent en tels nombres l’alfeure. Le temps prelênt leur ell dénoté par la telle d’vn lion, d’autant que fa condition ell entre le pâlie &le futur, forte & ardante, d’vne action prompte. Le temps palfé ell marqué d’vne telle de loup,d’autant que la memoyre des choies pallées fe rauit,& palfe. Outre plus la figu-red’vn chien cherant dénoté î’auenement du temps à venir, duquel l’elpe-rance nous fiatre,combien qu’incertaine. Outre plus quand les Egiptiens veulent fignifiér la terre, ils figurent le bœuf. Et quand ils dilêne qu’Ofiris ell le Soleil, ils grauent vn fceptre,auquel ils grauent vn œil. montrans par ce ligne,Qlyris lignifiant que ce Dieu la ell le Soleil,& qu eleué d’vne puif-iànce Royale,il regarde toutes chofes,par ce que l’antiquité a appelléle Soleil l’œil de Iuppiter. L’œil outre plus ell pour la iullice, & ell interprété la garde de tout le corps : entre le relie des parties du corps la main dextre à doigts ouuerts dénoté la libéralité,& la lèneflre au poing clos la chichetc& auarice.Parle melme moyen les figures & inlirumens des autres parties du corps lignifient quelque choie certaine, lefquelles gardées d’vne longue memoyre & penlee d’hommes ils cognoilfent foudainquec’elloit qu’elles fignifioyent. Il ell aulfi des chifrcs de guerre: defquels il nousfêmble necelîaire de parler.La lettre rpofee en la telle du verlêt fignifioit le viuant,* es rolles efquels les noms des gens de guerre eftoyentelcritz anciennemet, pourvoirquants hommesrelloyent, &quantsauoyentellétués. Mais la lettre thica 6,1e fignifioit mort,a ont ell venu ce vers.
- O que fur toute s lettres ejtThita malheureufe.
- On dityquequad ils vouloyent noter l’ignorance d’vn foldat ils vfoÿent de la lettre, A: & l’il falloir faire quelque chofe en fecret,de la lettre S. Les anciens Capitaines.& Magistrats failoyent entre eux des chifres de lettres,
- QJj
- p.092R - vue 195/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- à fin de f entr’efcrire tou t ce dont ils fe vouloyent entr auertir focrettement par lettres:eftans a tous autres incogneu a quoy tédoit cefte façon de bafti-ment d’efcriture : ce que les liuresdesejpiftres deC. Cefar a Oppins & Bal-bus Cornélius témoignent allés : par lefquelles il faifoit diligence de fup-plier fâ preféce es guerres qu’il auoit es païs loingtains. Vous eufliés de vray trouué en fos lettres les aucunes fans aucun aflemblement defyllabe , combien qu’au demourant il y euft quelque focret ordre de permutation de Iet~ tres:de forte qu’en l’efcriture l’vne occupoit l’afiiette 8c le nom de l’autre: comme es vocables Barthus 8c FeIipo,en aiouftant du refte du nombre des lettres, celles qui defailloyent pour rendre vn chacun nom entier, 8c autres au plaifir des efcriuains de nulle lignification . Au furplus Iulle Ce-fàraeforit en chifre leschofos qu’il n’a voulu eftre manifeftéesà tous, 8c de telle afliette de lettres qu’on n’euft foeu compofor quelque nom : Mais fi quelqu’vn treuue cefte façon de chifre digne d’eftre fuyuië, il permutera 8c changera D pour A, 8c ainfi des autres. En cecy aufti fo treuue vne epiftre d’Augufte Cefar à fon fils de cefte teneur. Comme il y ait, dit il, infinis affaires qu’il nous faut entr’eforire l’vn a l’autre 8c tenir focrets, ayons fi tu veux entre nous vn chifre tel, que quand il nous faudra efcrire quelque chofo, nous eforiuions pour chacune lettre la foyuante, B pour A,C pour B, 8c ainfi fubfoquemment des autres tellement que pour 3 il faudra retourner a deux A A. Mais au forplus il faut auoir regard au papier, car fil efteforit du ius d’oignon,il rapportera les lettres fil eft montré aufeu.Les lettres aufti apparoiftent efcrites fur vn corps du ius fort blanc de l’efpur-ge,(que lesnoftres appellent Iaidiere,lesautres laiduëde chieure)apres eftre léchées, & qu’on iette fus de la cendre, par lefquelles les anciens ont plus toft defiré parler que par codicilles.Semblablement aufti les vns trompent les autres, eforiuans fur papier aucc du laid frais : 8c apres que les lettres faboliflent, tu les trouueras en efpâdant defliis de la poulfiere de charbon,telles que les did le poëte ingénieux en fon art militaire.
- 33 Qjtny l’efiïé puiffe a fagreue attachées
- 3 » O» biendejfiusJongléporter lettres cachées 3 3 Garde pen donnera fil fait de fin dos charte
- 33 Et portantfur fin corps Vauerttffement,parte.
- 33 De latélfrais ejl bienfiure & hors l’œill’efcriture.
- 33 F rote la de charbon tu en feras leélure
- 33 le tus de lin aujïi au papier blanc ferat
- 3 3 Qtdmuifibles a l’œil les lettres portera.
- A utres efonuent premiereméc d’vne grande aftuce auec ancre en parol-les de petit moment touchant affaires de confoquence,& des familiersmo-tans toutelfois d’vrine ceux qu’ils veulent eftre focrets,lefquelles deftechées ne font vifibles,veu qu a ceux qui y regardent depres il n’apparoift aucune trace de lettres,& fi elles font chauffées il n’y a point de doute que les lettres fe montrent de toutes pars pour pouuoir eftre leuës. Nous lifons aufti que
- Demarate
- p.092V - vue 196/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIL ^
- Demaratc eftant chalfé au Royaume de Lacedemon, Scviuant en Perle, auoitmanifefté d’vriegrande inùentionaux LacedemoniensqueXerxcs pvoy dés Perles auoir drefle vne armée contre la Grece.il a elcrit de vray des tables les cduurant d’vne cire menue: lelquelles il enuoya par vn lêrf ignorant du cas,& depuis portées aux Magiftrats,les rendirent étonnés: Car en voyant ce qui eftoit efcrit ils penloyentquece n eftoit que moquerie.Les aucuns le font douté de Telpric de l’dcriuain, penlâns de tant la chofe eftre plus grande qu’elle eftoit plus lécrette. Finalement lalceut de Leonidasa decouuert le double,car en rafat la couuerture de la cire elle a trouuel elcri-ture cachée, & que Xerxes auoit en armes lèpt céts mille hommes, & trois cets mille delècours. Vn certain AfFricain enuoyédes Carthaginoyspour decoüurir les deliberations des ennemys faignant eftre chalTé du païs,Se le prelêntant de lêruir a la loulde,n’elcriuüit point autrement toutes nouuel-Ies a lès cytoyens,qu’en tablettes vuydes couuertes de cire neufue. Aucuns auffi faydas d vne rulê Barbarique, & d’vne aftuce plus que Punique elcri-uent fur les telles d’hommes ralees,& les gardet a la maifon iulques a ce que le poil foit reuenudelquels finalement enuoyés àleur amy entendant le my ftere,& ftibfequemment tondus montret les lettres cachées fous leurs che-ueulx.Quand les LacedemoniensSe les Magiftratsvouloyentauertir leurs Capitaines d’armée de mer,ou Lieutenans generaux par lettres patétes des lêcrets de la Fvepub. ne les voulans atous eftre cogneus, ils les enuoyoyent de la forte qu’il fenftiyt, afin que fi elles tomboyent entre les mains des ennemys les fecretsne fuftent decouuerts. lis auoyent deux hantes rondes d’vne mefme longueur, grofleur,& parement, tellement que l’vne mile au près de l’autre elles le relfembloyent. Or comme il Ibit ainli qu’ils en relèr-uent l’vne par deuers eux,Iiurans l’autre au Capitaine, allât mener la guerre ils couchent.& enrollent tout autour de leur hante vn papier faict en façon de courraie,Iong & eftroict,lors qu’ils veulet elcrire quelque grand affaire eftâslesborsioinéls & fins faire iour, tellemét qu’ils couurét de toutes parsla hante:ceia faiél ils efcriuét au papier ainfi plié trauerfims le ioin€t des deux bors,& pourlùyuas les lign es depuis le haut iulques au bas : & depuis en l’oftant d’autour de la hante,ils enuoyetlàns elle au gouuerneur,ou Capitaine qui entend ce chifre, lequel apres l’auoir receu, &non lilàble eftâs les lettres couppées & mutilées,& par ce moyen eparfes Se diffipées de forte que lelènsnepeut eftre conieéluré,ilrolletout autour de la hante qu’il a par deuers loy, depuis le haut iulques au bas comme il lâuoit deuoir eftre faitrtellement que par celle maniéré de rollement tout autour la continuation ordonnée des parollés le trouue de mefme fiiyte.il y a aulïivne attéte necelfaire touchant l’elcripture entière des parolles, ou d’vne abbre-niation de lettres,ce que ce fait,partie ainfi qu’il lèmble bon a chacun,par-tiepour l’vfige & obleruancepublique.Car comme anciennement les ab-breuiations fulTent en vlàge pour plus facilement elcrire mefmemét au Sénat,à fin que les greffiers peulfent comprédreplus lôudain ce qu’on difoit,
- QJÿ
- p.093R - vue 197/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ils notoyent par lettres aucunes choies, eftans délits a ce que fignifioit chacune Telles. Et dit on eue par ce moyen'la feule harangue cJç.Çaton touchai: la punition des con jurez a elle gardée,& rechiitte par efçrfoau moyen, que le Conful Cicéron ordonna des eicriuains prompts, &Jcyr enfoigna de comprendre fes parolles par quelques marques, & abbreuiations, r’ap-portans la puiffance de pl’ufieurs lettres : au quel;temps ceux qu’on appelle greffiers n’effoyent pasenccresinuentéz : ôc dit on que lors.ftitla premier re entrée de celle maniéré de note,qui fut vne inuention comme le témoigné Seneqtiea Lucilius de panures lêrfs. Parquoy qui voudra.plus amplement lâuoir la publique.6c lècrette lignification des lettres qui font trou-uées es lèpulchres des anciennes curies,races,affembiées,pui£fances,Magi-ftratSjgouuernemet, ieuz lâcrés,affaires ciuils, affaires de la guerre des colleges,decuriës,faites,nombres,& es liures des hiltoriographes,& orateurs, qu’il recerche les commentaires de Probe Valere Grammairien, de Tulle Tyron, de Cicéron le Libertin, de Philarge de Samos, de L. Année Sene-que,ôc de Pierre le Diacre,eforits de grande curiofité. Il eff encores d’autres notes par les doigts,yeulx,ôc autres partiës au moyen delquelles les aucuns combien qu’elongnés parlent entre eux fans fonnermot, qui elt vnc façon de faire des gens de guerre : mefines quand vne armée conlènt quelque choie, promettant de.la main ce qu’elle ne peut de parolle : les autres ne pouuans promettre de bouche, treffailîent auec vn mouuemét d’armes. Et pourtant dit Ennius parlant d’vne femme impudique .-Elle le donne en iouant delabille,laiettant, &receuantenvnecompagnië de danles, ôc chanfons, & en fo rendant commune,elle en tient l’vn,donnant l’œuil-lade a l’autre, la main ell autre part empefehée, elle marche iepié de l’vn, baillant a vn autre l’anneau,elle appelle!’’vn châtantauec vaautre, &tou-teffois elle baille aux autres lettres du doigt. Ouide en lèmblable renfom tre à la coutume des anciens, (Iefquels ie treuue auoir eu celle maniéré de parler fort commune)à vne impudique, eftâtfiamië par ces notes & lignes au delâuantage de fon mary.
- Lors quafis'd fera,d’vne face modejle Laccompagnant auprès te feoirras&monfié Heurtes afin defeeu^egard’auf i mes feignes,
- Et ma faceparlant prens mesfeings furtifs,
- Me rendant la pareiUe:aufi te diray-ie Des mesfournisfans voix des parlantes parolles:
- Tu les liras,des doigts notées, gy de vin.
- Lors que tefouuiendras deno^ amours lafeiues Du poulce toucheras ta iouette vermeille.
- S'il efl rien que de moyen ta penfée ta parles,
- Ta molle main pendras au bout de ton oreille:
- Lors que mesfaiéls ou ditsfma clarté)teplairont Toufours fera tourné en tes doigts ton-anneau.
- Lors
- 3)
- j)
- 33
- 33
- 33,
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- p.093V - vue 198/480
-
-
-
- 5>4
- E L’ART MILITAIRE. LIVRE VU.
- Lors que defirerœspar raifinp'ufieurs maux
- t:n mari) a^&ms la table de la main y Comme les fuppîmns. ' . ;
- Ce meimepoëte aufti fort lafcif parle a !a putain & amie fubornéepar vn autre.
- Le fibre maieureux ay yen lorsque dormir Tume penfoisvo^ crimes, auec levinnote^.
- Ie.vcus ay veu eau fans maintes cbofes lancées:
- Par le four cil ^ efant en vo% cil% laplufpart De la voix, ny ne l’ont ton tesyeux) ny devin La table efirite^aufi ne fut trcmée muette La lettre es doigts? & ayle langage cogneu Deguiféjçyr les mots vattans certaines notes.
- Fin du jfêptielme Hure.
- LE HVICTIESME LIVRE DE
- ROBERT VAL TV RIN DE l’art militaire.
- Des vocables Latins anciens CT excellent d’vne dignité publique en l’art militaire. Chapitre I.
- E quant plus grand efprit & foingSigifmond Pandulphe, il eft fait mention par plufieurs en diuers lieux de la dignité publique de l’art militaire, des principautéz, & Magi-ftratz, de tant plus grad labeur ay-ie de recercber leurs vocables, fourlès, & offices, Iefqueîs elpars en diuers lieux,i’ay rédigé en ce prêtent liurequaft comme en vn corps ,àfin que rie ne défailli!!: a tô fàuoir & profeffion-qui fuft digne d’eftre cogneu. Mais pour autant que la dignité Royale conftituée premieremét d’vne famille confacrée ell la fupreme de toutes les dignités humaines, les anciens poëtes appellent IuppiterRoy,‘& non pas Empereur, attribuant à Dieu le nom qui eft le plus grand & ample entre lés hommes. Les Républiques, citez & nations ont eftérégies par les Roys, comme eftans les fupremes de tous, <k certains Dieux entre les hommes, excellens en bonté, làpien-ce,Ôc vertu. Par ce moyé les Roys font dicls de(Rego)régir & de(Redum) droicl} d’autant qu’il eft bien conuenantaux Roys, &ç non pas de(Regno) tegner, comme a vfurpé l’outrecuydancedaucuns. Or en eft il plufieurs elpeces, ny n’eft de cous Roys vnmefme moyen de puiffance. Au regard
- Q^iiij ,
- p.094R - vue 199/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- de la Republique des Lacedemoniens, il y lèmble bien eftre félon les loix; cariln’apas pouuoir fur toutes choies, mais lots a-ilpuilfmcefurles affaires de la guerre, qui fort hors le pais. Audi a-il d’auantage la charge des làcnfices & ceremonies des Dieux. Celle puilfance Royale donques confite en vne perpétuelle authorité de la guerre: & quant à la vie, & à la mort elle n’y a point de regard,linon pendant la guerre, ce que lèmble auoir elté anciennement comme le montre Homere. Car Agamemnon eftoit tor-menté des reproches & debatz es alfemblées, mais ilauoit à la guerre pouuoir de faire mourir. Ileltaulîi vne autre elpece de régnés, comme font ceux qui entre aucuns Barbares ont vne puilfance approchant d’vne tyrannie : combien qu’ils foyent félon les loix & coutumes du païs: pour autant que telles nations font plus duytes a la feruitude,que ne font celles des Gréez. Celles aulïi de l’Alie portent plus patiemment le ioug delà fer-uitude,que ceux qui habitent l’Europe.La tierce elpece eft comme anden-fLego Ac nementils ont elle en Grece,lelquel$ ils appelloyentf Aelÿmneteres.Celle fymnete- Cy qe vray (a fin que nous parlions rondement)eft vne eledfciue tyrannie, gctJs> différant delaBarbarique, non pas en ce quelle elt legale, mais d’autant qu’elle n’ell pas de coutume: & pourtant celle puillànceduroit le long de la vie, ou bien elle finiffoit à temps, ou bien apres les affaires vuydés: comme fut Pittaque que quelques fois ceux de la Meteline eleurêt contre leurs banniz. La quatrielme elpece elt comme les régnés, lelquels du temps des Heroiques elloyent voluntaires,&luyuantIacoutume&Ies loix:caria coronneleuraellé liurée, & à leurs liicceffeursdu vouloir du peuple pour les biens fai&s departizparles premiers au peuples,ou bien par partiali-téz, ou guerres, ou par vne congrégation enfomble,ouparconquefle de païs. Le peuple aulïi a de coutume en la contrée de la Taprobane(qu autres foizona longuementelïiméellre vnautremonde)d’elire vn Roy d’âge, & d’vne clemence notable, &: qui n’ait point d’enfans. Et lî par apres il engendre on le depofo, a fin que le Royaume ne foit héréditaire: auquel aulïi le peuple baille trente gouuerneurs:ny n’ell aucun côdamné a la mort fans l’auis de la plus grand part: delquels encores l’appel va au peuple,pour le-|Locuscor quel on ordonne foptante iuges, & filfell par eux abfouls,on ne porte mpeadde point de reuerence â lès autres trente, qui efl vne fort griefue infamie. Il ca.ii.fi li en elt aulii en vne certaineregio de 1 Afmque,qui ont de coutume d auoir berent a vn chien pour Roy, & diuinent fes commandemens à fonmouuement. plIuntT" Or a elté premièrement la puilfance Royale en Candiëlèlô Arillote:com-gmtahis bien queDiodore ne fcet ou elle a premièrementprins fourfe, veu que les «ullam ha hilloriographes n’en font aucune mention, laqtielle apres futolléeparla tionSgS- tranflation de l’Empire aux Confulz durant la guerre: puis elle eft venue â oifsimo d’autres nations differentes entre elles d’habit & de façon de viure, cotn-probro, me aux Perles, aux Roys delquels la coutume eltoit de porter la Tiare: ail plus hault de laquelle elloitvne pierre prccieulè grande,&luylânteenchaf-fée en or. Mais la coutume des Roys Egiptiens elloit de porter la face d’vn
- Lyon,
- p.094V - vue 200/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. 9$
- Lyon,ou Taureau: ou bien le deuant d’vn Dragon en leur telle,corne mar-eues de principauté, quelquefois aulïi vn arbre, quelquefois le feu, ou bien des lenteurs fort fuâues . Les Roys Ethiopiens portent vn Iceptre en forme de charrue, 8c des chapeaux Iongz fur la fin, ayans autour du nombril des fêrpens qu’on appelle Viperes pour enfeigne notable , que ceux qui foferoyent eleuer contre le Roy fèroyent fubieéls à morfures mortelles. Au regard des Romains ils auoyent pour marque le fiege Cu-rule d’yuoire en vn car, 8c la robbe de pourpre, fuyuant ce que dit Maro.
- » Nojlre régné ejl marqué parla Currule & pourpre.
- Au regard du dyademe, ils ne l’auoyent point comme les Hoys des autres nations : au demourant ils auoyent des pointons queles Gréez appellent foeptres, au lieu du dyademe, ny ne l’auoyent tous Roys, de Iuppiter, comme le témoigné l’excellent poëteHomere, mais tant feulement ceux qui faifoyent vne extreme diligence de faire viure leurs fobieéts au plus gradaifè qu’il leur eftoit poftible.CesdiuerfêsenfèignesdeRoysfèruoyent pour l’honneur, 8c parement, 8c fi donnoyent aux regardans quelque admiration 8c fuperftition. Finalement le Roy 8c Tyran ne font point difte-rens de nom, mais de faidl, d’autant que le Roy décheant de fondeuoir, facilement deuient Tyran. Il auient que le nom de Roy quelque fois tombe en Tyran, 8c du Tyran en Roy, comme le témoigné Seneque.
- }> leJuis monté au lieu ou mener vn bourgeois
- » ^yipeu le peuple libre, gy nay laifié que régnés.
- Et ceft antre
- » Partie d vne paix mejloit d'auoir touché
- }> La dejlre du 'Tyran.
- Et depuis, le temps auquel vacquoit la coronne, â efté appelle^ inter-regnum ) vice régné. Car quand premieremet il a efté apres la mort du Roy Romule, tout l’an fut député de quinze en quinze iours par cet Sénateurs, en faifant dix decuriës, 8c créant chacun de chacune dixaine pour auoir la fuperintendence des affaires, a fin que nul fuft priué du gouuernement de Rome fous vne égalé dignité. Ils eftoyentdonques dix gouuern eu rs, 8c n’en y auoit qu’vn qui euft les exécuteurs de iuftice, 8c pouuoir de faire ordonnances , 8c portail l’apparat Royal, 8c de l’Empire,lequel Empire ne duroit que cinq iours 8c l’auoit chacun àfon tour: 8c fut cefl annuel inter-ualie de coronne appellé pourl’effeél, du nom de( interregnum )vice régné, que maintenant il tient . loint auffi que ceux qui auoyent Iapuiflance cô-fulaire fous les Confuls, ont efté Vice Roys, fi quelquefois le vice régné auenoit,ny ne futonques celle Republique fi priuée de ce nom,qu’il ne fê creaft vn Vice Roy à tout le moins pour deux ou troys iours.l’entend bien qu’en ce paflage on me pourra obiieer, que les Magiftratz Curules, n’ont point duré anciennemët quatre ans en noftre Republique, ôc que feftoyét les Tribuns de la commune auec l’authorité Tribunicië,qui eft vne des plus grandes partiës de la puiffance Royale. Il n’eft touteffois point de
- p.095R - vue 201/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- mention que les Vice-Roys n’ayent efté de ce temps la, mais encores d’a-uantage les plus véritables hiftoriés ontmanifeftéqueles Côlulz ont efté crées des Vice-Roys pour faire les affemblées de l’eleCtiô des autres Ma^i-ftratz. Oren celle eleCtiô de Roy, ilsordonnét que quâd le peuple vouloir vn Roy, cela eftoit receu de tant que les Sénateurs l’approuuoyenn Alors le Vice-Roy ayant fait affemblée difoit,Meilleurs les Quintes crées vn Roy, que Dieu vueille que ce loit a vollre grad bien,& bon heurdesSenateurs en font d’auisdelquels lùblèquément l’approuuerôt li vous le crées tel qu’on le tienne pour lelêcond de Romule. Le Dictateur qu’on créoit a la façon des Etrufques eftoit vn Magillrat fort a craidre, lèuere,Sc de grad pouuoir,qui aboliffoit tous les autres Magillratz,excepté la puiffâce des Tribuns,corne dit Plutarche d’autât qu’il falloit obeïr à ce qu’il ordônoit. Ny n’elloit loy-fible d’appeller de Iuy au peuple côme d’vn Côful. Ses paremés elloyét tous Côfulaires, & auoit apparéce d’vn pouuoir Royal: mais pédant que le Roy regnoit,Ies Côfuls, Prêteurs n’autres Magillrats, ne le pouuoyent côlèruer en la Republique.Et la ou la Dictature eftok îtroduitte en la République, les autres Magillratz péloyent & eftoyct ellimés côme abrogés par la créa-tiô du Dictateur,excepté les Tribus de la cômune : & eftoit la Dictature en cedifFereteduRoy, que pédantlerégné du Roy la puilfance des Tribuns, toute PauCtorité du peuple elloyét fans aucu pouuoir, mais durât la Dictature les Magillrats de la cômune gardoy ent leur pouuoir, & auCtorité. Au demeurât le Dictateur n’a point de coutume d’eftre crée n’ordonné âla guerre lino lors que quelque force bié grade loudain dreftfée lêmbîoit menacer la ville d’vne grade ruine. Par ce moyéTite Liue témoigné que iadis en vn melme téps il fut crée deux DiCtateurs,d autât qu’vne demefurée force,neceftité & le téps le firét, vingt & troys ans apres l’edificatiô de Rome. Orne luy eftoit il point permis d’aller â clieual, côme qui iuy eftoit défendu par la loy anciéne,foit qu’ils péloyent que les forces fulfent plus grâdes en côbattant à pié, ou bien qu’à celle caufe le Chefferoit forcé de tenir bon au bataillon, & de n’abandonner fa place: loit auflique le pouuoir delà principauté loit à tous autres affaires Royaux & grandz. Mais Fabius eleu Dictateur requit premieremétpourConneftableM.Minuce au Sénat, & qu’il luy fuit loyfible d’aller à cheual durant làDiCtature.Outre-plus nous lifons queceluy que nous auons dit eftre nommé Dictateur es hiftoires eftoit anciennement appellé le Magillrat du peuple, d’ont Cicéron &Se-neque témoignent clairement à Lucille,que depuis il a efté elcrit es Tiares auguraux, & es fins des biens:& eft le témoignage tel que celuy qu’il nomme ell Conneftable,lequel il nommoit tel quebô luy lêmbîoit. Or n’a efté creée celle dignité & puilfance, ny n’a commencé du temps denoz ance-ftresauecle Conneftable apres l’abolitiôdes Roys pour durer vn an, mais tant feulement fix rnoysreombien que pour fon temps elle fuit plus grande que le Confulat, fin on que par-auanture ceux qui y font peruenus l’ont tenu plus longuement par force, comme L. Sylla, & C.Celàr qui ont elle
- Dictateurs
- p.095V - vue 202/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII.
- Dictateurs perpétuels, 8c ont ruiné la Republique, vouians euitercenom de Tyran odieux & infâme. Quant au premier des DiClateurs il n’y arien de certain, ainfi que dit Tite Liue : f touteffois on a quelque foy àluy & a Eufebius Cefârienfis, ietreuue félonies plus anciens autheurs que Titus Largius a efté premièrement crée Dictateur, & Spurius Cafîius Cormefta-ble. Oreftil certain comme M. Varronle témoigné que le Dictateur eft ainfi appelle, d’autant qu’il a de coutume de diCter, ou nommer les Magiftratz futurs, ou bien d’autant que le ConfuI le nommoit, au diCt duquel tous obeïroyent : ou bien, comme dit Plutarque en la vie de M. Marcel, veu que le Dictateur ne peut eftre eleu par le peuple, 8c que l’vn des Con-fulzou Chefiz, féprefentant au peuple dit ou nomme celuy qu’il ordonne Dictateur. Ils appellent Dictateur, par ce qu’il a efté diCt, ou nommé. Aucuns le dientauoireftédiCt Dictateur pour-autant qu’il ordonne, 8c non parl’eleCtion ou contentement dupeuple. Il recommande de vray les ordonnances des Magiftratz,que les Gréez appellent fiyp.ctr«,& les Romains (ediéîa)cdiâ:z. Et quoy que les douze faifleaux de verges fuflent fort rigo-reux, comme qui auoyent tout l’honneur fupreme de tout le Sénat des Cheualiers, 8c de la commune, au vouloir defquels toute l’Italie,& tes forces eftoyent régies: ils te font touteffois comme cafléz, 8c rompuz fouuent fousmis a celle correction DiCtatoyre. Et à fin que lagloyredes gens ne fufttropoffenfee, le ConfuIpunifleur de tous deliéts a efté quelquefois puny parle DiClateur. M'agïfter eqnitam ( le Conneftable )a efté ainfi diCt, àfinquetoutainfiqueleDiCtateureftoitla fupreme puiflance du peuple, lafienne fuft furies gens de chenal, & les attendans :8c qu’aufti il auoic en la guerre la conduitte des troupes des gens de cheuahmais le Dictateur n’auoit que la conduiCte des gens de pié, combien qu’il fuft Chef de tous en general, & ce a la coutume des anceftres. Au regard des autres eftats de maiftrite, ils font moindres que ceux cy, 8c font diCts Magiftratz, tout ainfi que blanchy eft deriué de blanc. Ceux font appeliez maiftres qui ont la principale cure des affaires, & qui plus que les autres font fubiects. Ny ne font les DoCteurs es ars feulement diCts Maiftres, mais aufti des villages, fbeietés, rues, colleges, & des gens decheual : d’autant que ceux la. font plus fubieCts, & ont plus depouuoir que les autres :auec ce que les Magiftratz qui ont plus depouuoir de commander, quelesperfbnnespri-uées, tirent leur dénomination dc(Magifter)comme par vne deriuaifon. . Ee Magiftrat de vray, eft vne puiflance commife à vn homme ou plufieurs par le peuple, ou parle Prince. Delà font les Prêteurs, Proconfulz, Tribuns de commune, Ediles, Curules, Preuoftz de viures, 8c autres lefquels gouuernent les prouinces del’auis de noz anceftres: ny ne les difons pas principautés mais Magiftratz. A ceux cy donques eft permis de délibérer, ordonner,&commander en aucunes chotes, 8c d’entendre qu’ils rapportent la perfonne de la cité, & qu’ils doiuent fouftenir fa dignité, 8c hon-neur:garderies loix, 8c difpoterdudroiCl, 8c te fouuenirquetelles chofes
- p.096R - vue 203/480
-
-
-
- ROBERT VAL TVR IN
- leur lonc baillées en charge. A eux aufiî appertient la corre&ion du palais, par laquelle les mauuaifês façons de vie des infolens, & de plufieurs font par faconduitte& fins confufion remiz en ordre .Par eux font prcdi&s les fins des ambaftades, quoy qu’ils fehaftent. A eux aufti l’antiquité donna la puilfance telle que nul iuge de prouinces ne prenoit les faifleaux dç verges fans leur ordonnance. Or eftleur office tant honorable, que celuy qui a eu charge en la guerre, a l’honneur d’eftre appelle Prince, & femble par vne merueilleufe façon auoir trouué vne prééminence entre les bandes Prétoriennes, & celles dugouuerneurdela ville. La plus grande Principauté eft vne certaine furpréeminence à laquelle toutes les autres puiffan-ces obeïftent :fuyuant laquelle nous difons Oébauian, Claude, Se Velpa-fian auoir efté Princes. Au regard de Seneque qui fut Confulduxemps de Néron, on ne l’euft point appellé Prince, car Néron l’eftoit, non pas Seneque. Nyn’eftoit Ion Conlûlat Principauté, mais tant feulement Ma-giftrat:aufîi n eftoit l’Empire de Néron appellé Magiftrat,mais Principauté . Or comme aucuns des Magiftratz, Se non pas tous, manient beaucoup des affaires publiez, il eft de befbing qu’il en (oit vn autre qui leur face rendre railon , Se les corrige, fans au demeurant les manier :lefque!s les vns appellent corredeurs, les autres rationaux,recercheurs ou contrerolleus, Se quelques vns les appellentprocureurs.'Mais outretousfês Magiftratz, il en eft vn fupreme : c’eft celuy qui ale plus fbuuét la fin Se l’introdudion, Se qui prefidefurîa multitude, la ou le peuple domine :Aufli faut il bien que celuy qui l’aftemble ait grande audorité en la Republique.il eft vray qu’on les appelle en aucuns lieux, Preuoyeurs d’autant qu’ils deliberent au par-auant,Se quand le peuple eft aflèmblé ils les appellent voluntiers Con-fcillers. Voylaprefquetous les Magiftratz des cités. Il ne faut pas auflî oublier l’opinion de Marc Varron au vingt Se vniefme liure des chofès hu-3i maines. Entre les Magiftratz(ditil)les vns peuuent faire venir par deuant sy eux, comme les Confuls, Scies autres qui ont puilfancedecondamnerdes « autres ontpouuoirde fiufirau corps,commeîesTribunsdelacommune: 33 les autres ontdeshuiftiers:lesaucunsn’ontnehuiftîersnepouuoirdefai-33 re venir par deuant eux, comme les trezeniers: Sc les autres qui n’ont point 33 d’executeur de iuftice, ne huyftiers. Ceux qui peuuent faire aiourner, peu-33 uent prendre, amener Se retenir. Toutes lefquelles chofesils peuuent,foie 33 que ceux qu’ils aiournent foyent prelèns, ou qu’ils ayent ordonné de les j 3 aiourner. Au regard desTribuns ils n’ont point de puiffance de faire aiour-33 ner, combien queplufieurs .ignorans n’ont pas laified’en vfêrcommefils l’auoyent. Et pourtant ie penfe qu’à la confiance de ce droid que dit Varron, Labeo eftant perfon ne priuée, ne fut point appellé par le Tribun. Or eft il bien ailé de repondre à ceux qui demanderont la caufè pour-quoy les Tribuns n’auoyentpuiftance de faire aiourner,veu qu’ils auoyentpouuoir de corriger, Sc punir. D’autant que les Tribuns delà commune ont efté anciennement créés, non pas pour faire droid, ne pour cognoiftre des
- p.096V - vue 204/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. <>7
- caufès, 6c querelles desabfèns,maispourinterceder.parlefquels celuy qui fêroitprefent fuflcontregardéd’outrage.Etpour-tantlepouuoird’aiour-ner leur a efléoflé, car pour garder qu’on ne fifl outrage il efloit befoinde leur veuë continuelle 6c prefente. Au demeurant la coutume de ceux qui demandoyent Magiflrat,efloit d’eflre prins parla main deflre du Tribun, en priant gtacieufementles citoyens, 6c de venir a la place fans chemifê, couuers tant feulement de leurrobbe, foitque ce fufl pour y venir auec ceft habit fupplier plus humblemët, ou bien que les cicatrices qu’ils auoyët monflraflent apertement les fignes de leurprouefïe.Et comme ils les mon-rtrafTenten bon nombre, les ayant receuen fréquentant la guerre en plu-heurs années, 5c combattans vaillamment, toute laffiflence portoit tacitement reuerence à leur vertu . Finalement il n’efloitloifibledexercer le Magiflrat outre cinq iours,finon qu’ils enflent fait ferment garder les loix. ( Le'gati) comme témoigné Varron , font perfônnes éleuées publiquement , de la diligence, & confiai defquels le Magiflrat faidoit en païs étrange, 6c qui efloyent ambaffades du Sénat,ou du peuple. Plufieurs efloyent tous les ans appelles par les gens de guerre, Empereurs,par honneur apres auoireu viétoiredes ennemys. Parquoy comme entre les autres Capitaines, & Chefz de fon temps Scipion fufl appelle Roy par la tourbe des Efpaignols des au par-auant renduz , 6c des prifonniers le iourau par-auant prins, 6c epanduz au-tour de luy, d’vne grande ioye 6c bonne voIunté,il dit à lors apres le filence fait à fon détrompé, que le nom d’Empereur, duquel fis gens de guerre l’appelloyent , luy fim-bloit merueilleufiment grand, ôc qu’au furplus celuy de Roy efloit a Rome odieuz, 6c intollerable, quoy qu’il fufl en grand eflime aux autres contrées r 6c que fils luy tournoyent à grand honneur d’auoir vn cœur Royal, qu’ils le iugent en leur entendement fans fonner mot. Entre les Princes de la cité le Proconful M. T. Cicéron fut appeîlé Empereur par l’armée apres auoir affailly les Parthesdiuifânt ton armée en troys, 6c que depuis il fut fait vne grande boucherie d’eux, prins Amane leur Roy, Sepire, 6c plufieurs chafleaux par force . Comme auffi Tulle Cefar fufl fouuent appelié par fon armée Empereur apres la viëtoire , il vfurpa le nom de Dictateur, 6c non pas d’Empereur, ne de R.oy, tant efloit odieux le nom de Roy dedans Rome. Defirant donques le nom de Roy , 6c craignant l’indignation du peuple, il procura eflrediél Roy apresauoir entreprins le voyage contre les Parthes, difànt qu’es liures fatidiques efloit contenu qu’ils ne pouuoyent eflre vaincuz finon d’vn Roy : qui donnaoccafion à la coniuration de hafler fa mort. Or n’ya-il eu aucun des fucceffeurs de Cefar qui fe foit ofé dire Roy des Romains . Au regard du nom d’Empereur, il n’efloit pas perpétuel non plus que du Confiai , ne du Prêteur, ne du Tribun de la commune , car nous trouuons ces autres premiers Empereurs auoir efléappelles endiuersnombres,les vns fept fois, les autres plus ou moins : 6c ainfi des Confuls 6c Tribuns
- p.097R - vue 205/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- de la commune, d’autant que cela eftoit nom de dignité, 5c nonpasd’ofi-
- ce. Carapres auoirbien combaturennemy,iieftoitordonnéparnozan-
- ceftres, 5c perpétuellement gardé durant la liberté de la République, que Je Conful, ou Proconful,Prêteur, ou bien quelque Romain que ce fuft qui euft défait grand nombre d’ennemys, ou qui euft fait quelque bien grande vi do ire. fuft appelle par l'armée Empereur, quafi commeparvnepre-cellence d’honneur au témoignage 5c gloire delà vertu. Orn’eftoitpas lors la coutume telle qu’auiourd’huy, de forte queceluy que maintenant toutes nations appellent Empereur des Romains, fuft feul Prince de touc Je monde, & qu’il fomblaft par vne fupréme puiflance feigneurdetout. Car ce nom la n’a point efté aux Capitaines ne d’honneur, ne de pou-uoir pourle gain d vne bataille pendant que le Sénat 5c peuple Romain gouuernoit la Republique. Ny ne puis bien entendre de qui premièrement eft venue cefte coutume, ou plus véritablement abus de coronne-ment,& parement d’Empereur, qui eft auiourd’huy, veu queien’ayoy, ne leu, qu’aucun des Cefars ait efté coronné en ce temps iadis . Iulle de vray, Augufte,Tibere, Caligula, ne Néron, veu que ces deux derniers qui eftoyentmefmementextrêmes d’vnefierté, & pompe intollerable, n’ont jamais prins coronne d’Empire, eu,ny vfé d’elle,finon d’vne de Lorier, lors qu’ils triumphoyent,ou bien de quelque autre citoyenne, ou de camp: lefquelles n’eftoyent non pluspeculieres aux Cefârs, qu’à quelconques autres triumphans,ou vidorieux. le penfe que celâeft venu desBarbares, corne qui ignoroyent les anciennes hiftoires, ny nefituoyent bien la vertu de ces mots d’Empereur, & de Roy, leur eftant celuy de Roy plus frequent, comme viuans fous Roys, & voyans celuy d’Empereur rare, ils ont eftimé plus excellent: mais comme que ce foit qu’il ait prins croiffance,il eft certain que ce nom fuperbe d’Empereur, c’eft à dire nom de Dieu,comme ‘dit Cicéron, a efté depuis fon coronnement plus que le Royal vfurpé par les Barbares (ans propos, comme nous auons dit,ou bien des Dodes auec peu demodeftië, & depuis introduidparlapofterité, & permis aux Roys. Au demeurât Eufobius en la deferiptiô des téps témoigné que Luculle a efté le premier appellé Empereur du téps de noz anceftres, corne auquel l’authori té des armées eftoit commife pour defendre, 5c augmenter la République.
- Aucuns difent que les Pontifes ont efté ainfi dids félon le témoignage de Plutarche, d’autant qu’ils font les facrifices des Dieux, puiflans 5c Seigneurs de tout. Les autres difent que le nom a efté inuenté pour la ruine des puiflans, comme fi au commandement du Legiflateur les fa-crificateurs doyuent faire les grans facrifices . Mais Q^.Mutius Sceuo-la auoit de coutume de dire, comme dit Varro , que les Pontifes font appelles (depojfe & facere) pouuoir 5c faire . Laquelle diffinition n’eft pas fort approuuée par Varron,les eftimant plus tofteftredidsde(P<vw & Facto) pont 5c faire, d’autant que le pont Sublicin fut premièrement faid par eux , 5c fouuentef fois refaid • Les autres difent que c’eft a
- p.097V - vue 206/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE.. LIVRE VIII.
- caillé des lacrifices tref fainds & trefanciens qui lé failbyenc au pour. Or furent premièrement créés quatre Pontifes de la race des Patriccs par les Romains, & autant du commun peuple: l’ordre defquels auec jeftablilTement on attribue à Numa , St a efté appelle Maxime , d’autant qu’il en eftoit de moindres. Et pourtant Tire Liue dit que Luce Can-tile fcribe de ces Pontifes qu’auiourd’huy on appelle les moindres ayant commis ftupreaueclaFlordnië, fut en vncafTemblée tant battu de verges par le Pontiêce qu’il rendit l’efprit entre les coups. Ce li grand Pontife entre les autres tient l’ordre & le lieu d’vn interprète, & prophète, ou plus toft d’vn demontreurdes choies lâindes : lequel n a pas feulement la lôlicitu-dedes choies publiques, mais aulîi prend garde auxfaerifices des perlon-nes-priuécs,8c eiüpefche qu’on n’outrepalTe les choies légitimés, enféignâc de quelle chofeabefoin chacun pour adorer les Dieux , ou bien pour irri-petrerremiflion . il eftoit aulîi garde des vierges lacrées, qu’ils appellent Veftaîes. Il iuge aulîi & punit les facrilegès. Il auoit aulîi auec foy toutes les chofes lacrées, & ordonnoit de quelles hoftiës, St à quels iours, & en quels temples on deuoit frire les foîennités, & quelle deuoit eftre la de-penlé des chofes diuines, & iargent qu’il falloir donner. Il eft aulîi permis aux Pontifes de rédiger par elcrit la mémoire des geftes, St ce qu’ils appellent Annales , îelquelles ont elle faides grandes par eux. Au demeurant noz anceftres qui ont prinspîaihr en la mémoire des geftes, ontefté diligens en ce que perlOnne n’ofoitelcrirehiftoire fil n’en auoit la charge de la ville-.laquelle ne fe bailloit à homme filri’eftoit homme defoy* & doué de quelque linguliére vertu, excellant fur tous autres en dignité. Et à fin que ie commence aux peuples qui d’antiquité, de grandeur , de prouefies, St en dignité des luftoires fe preferent a tous autres, les Iuifz ordonnerent(eomme nous l’auons trouué)que nul fil n’eftoit prophète n’elcriuift leurs geftes tant en paix qu’en guerre. Et lors que ce peuple la n’eut plus de prophètes, à lors il donna la charge & l’office d’eferire au plus grand preftre excellent en authorité St dignité.Ioléphe elcriuant contre Apion dit que cefte coutume îiurée par les plus anciens a eftélongue-ment& diligemmentgardée iulques àladeftrudion de Hierulâlem. Les Caldées aulîi, St les Egiptiens auec les Phéniciens extraids d’eux, qui font peuples de la Syrie fort nobles, ont diligement obferué que leur grâd Pontife reduiroitpareferitleurs geftes.Place aulh philolophe, Stprécepteur d’Ariftote mec en auanc en fon Tirnée vn prélat Egiptien, venerable entre les liens, & excellât en la cognoiftance de beaucoup de choies pour repondre à Solon fenquerat desfaids, St de l’antiquité des Egiptiens.Les Gréez qui ont efté merueilleufëmét fioriflans au meftier de la guerre, en Empire* & enl’eftude de lapiéce ont eu longueméc vue loy de choilir publiqueméc quelque home de bié St lâuar, lequel feroit métiô de tous les dids St faids, fous côdicion de n’y inferer rien qu'il n’euft veu defes propres yeux,ou qu’il u euftpour véritable par vn certain St indubitable témoignage. Ail regard
- R ij
- p.098R - vue 207/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- des Romains, & de nozan.ceftres qui fe {ont finalement acquis l’Empire de tout le monde, Cicéron, &c Tire Liue recitent qu’ils ont eu des le commencement de Rome vne inftitution qui a longuement duré, que qui eftoit le grand Pontife , reduiroit par efcrit les ceremonies publiques infiituées parNuma,& toutes les choies de chacun an,& les en-regiftreroit, tenant en làmaifon fes elcrits communs à tout le monde,à fin qu’il fuit loyfible au peuple de cognoiftre que rien n’auoit elle efcrit en faueurny enhayne. il ne faut pas aulfi oublier que fi tu recerches les ceremonies des anciens, & leurs elcrits tu trouueras qu’ils n’auoyent pas de coutume de bailler le fupreme làcerdotal à gens de baflfe condition, & pauures,mais aux riches, ôe Princes de la cité. Or comme en premier lieu les Pontifes des Perles fingerent comme premiers, qui eftoyent, & quon dilbit fages, & fubfequemment ceux des Egiptiens, & Aflyriens, & des autres nations,il eft alfés certain à ceux qui ont quelquecognoifiance des hiftoires quelles richelfes & biens ils auoyent. Et fi ces choies la ne t’émeuuent gueres,d’autant qu’elles font incogneuës, & eftrangeres, &: qui melmcment font contre noz loix,ramenons les grands preftresdes Hebrieux, entre lelquels les plus anciens font Aaron, Eleafar, Phinées, Hely, Abiathar,qui ont efté fi abundans en toutes choies, qu’il lèmble-ra eftre à quelqu’vn incroyable . Finalement ie reuien aux Romains, d’onteft party noftre propos. Ileft manifefteque Marc Fabin a efté pre-mierement éleu des Sénateurs, & depuis Luce Metel homme excellent pour grand Pontife, & lequel l’a efté pour vingt & deux ans. Nous liions aulfi qu’aucuns Celàrs,& plufieurs autres Romains, lefquels au temps iadis eftoyent eftimés excellens en prouelTes,richelles, & pouuoir,ont efté grands Pontifes . Il eft vray que celle dignité de Pontifes, & Augures n’eftoit point du régné de Romule . Et auons entendu que Nu-ma Pompilius l’atranlfcré du Roy àautres,afin que eftant le Roy em-pefché aux affaires de la guerre le feruice diuin ne fuft delaifte. Finalement les anciens Pontifes, comme le témoigné Cicéron au troyfielmc de l’Orateur, ont voulu qu’a caulê de la multitude des làcrifices il y euft troys repaiffeurSjVeu qu’ils eftoyent inftitués parNumapour faire ce fa-crifice de ieuz,& de repas. L es anciens corne témoigné Feftus appelloyent {£pa/0«é,r)banqueteurs, qu’au-iourd’huy nous appellôs de melmes, & leur fut baillé le nom à caufe qu’ils auoyent puiffance d’appeller Iuppiter,ôc les autres Dieux au banquet, delquels aulfi dit Lucain au premier liure.
- F'trque epuhsJepemfeJhts Titïïfque fodales.
- Au demeurant comme il y ait quelque façon de folicitude touchant le feruice diuin, & que les Pontifes & Marguilliers foyent autour des temples pour conlêruer ceux qui font en eftat, ôer’eftablir les ruinés,& toutes autres choies concernansle feruice diuin, il auient quelquefois quvnlêul en a la charge, comme es petites citéz: & en autres lieux, ceux qui ne font point du làcerdotal, comme petits facrificateurs, marguilliers, ôc gardes
- p.098V - vue 208/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. <,<> du lâindthrelbr. Sublêquemment aufti vientapres la folicitudeqliitouche les lâcrifices publics, lefquels la loy nordonne pas aux Pontifes mais font faids du bien public. Au demeurant on appelle ceux qui ont la fuper-intendence fur ces choies, les vns Roys des choies Iâcrées,les autres grands Pontifes. Car lors la coutume des anceftres eftoit que le Roy fuit Sacerdos (Prelat)ou bien grand Pontife. Et ont fubfequemment depuis les Roys ôc Empereurs efté appelles Pontifes. Ce que Virgile entendu en toute ma-nieredecerimoniës montre par ces parolles.
- i^4nin des hommes Roy, & dePhebus Pontife*
- Les Féciaux,delquels le traideur de paix eftoit le prince, eftoyent dids Prélats ordonnés pour faire les confédérations, lefquels, comme il fem-bleaPomponius, iôntderiués de (Emporter, &aVarron de/u/es foy,& (Facere)faire. Et félon autres lontdids Feciauz, quafi fediaux,{4 factendo fédéré) pou ries accords qu’ils font. Le droiddefquels certainement a efté tranllaté des Equicules aux Romains.
- Les Caduceateurs Ibnt dids ambalfadesde paix,car par eux eftoit lignifiée la paix toutainli queparles Féciaux. Oreftle Caducée la verueine, & le ligne de paix, laquelle à bonne railôn nous pouuôs eftimer eftre la verge de Mercure.De vray Mercure eft eftimé le Dieu des harangues, & interprète des Dieux. Parquoy toutainli que la verge diuilê les ferpens, c’eft adiré le venin, les combatans aufti Ibntappailes moyennant le parlementer,& en eft la guerre alfopië Sc rompue.
- Quelques Ediles auoycntl’authoritées ieux, &mailbns publiques,le nom a efté baillé à ce Magiftrat de ^edes(maiIbn)IêIon l’auis de Feftus,de Varro, ôc de Paul, d’autant quils auoyent le regard non feulement furies temples, mais aufti lur les maifons priuées aueciurifdition, &aulquelsla commune le repoloit de tous les decrets. Il eft vray que d’entrée ils furent deux extraids de la commune, & pourtant appelles plébéiens. Mais comme dixfept ans apres l’abolition de Iacoronne le menu peuple fe futfeparé du Sénat, il le créa des Tribuns au mont lâcré pour eftre leur Magiftrat: & comme fubfequemment il voulut aufti créér de Ion corps des ConIuls,a ce repugnans les Sénateurs, il eft auenu que les Tribuns de gens de guerre fuient crééz au pouuoir confulaire,tât de la commune,que des Sénateurs. Et corne quelque peu apres on trouuaftbô de créér des Côfifts delacômune, ils cômêcerét à l’eftre des deux corps.Et à fin que lesSenateurseuftent quelque plus grad auâtage,il fut ordôné,qu’ils en léroyent créés cleux des Sénateurs.Par ce moyen les Ediles furet faids Curules,d’ont il eft auenu qu’entre les Ediles les vns eftoyent appelles pîebeiens,& les autres Curules. Au demeurant la felle a efté dide (]inCi(Seda)â(SedendojCie^c pour fafleoir. La chaire Royale eftoit dide Curulc, à caufede la courbure de les piés, ou bien d’autant que les Roys qui y eftoyent aftis fen aydoyent pour eftre plus en veuë, quand iis eftoyent portésen chariot. Mais comme depuis Rome fuft deliurée des Roys, les plus grandz Magiftratz , comme les
- R iij
- p.099R - vue 209/480
-
-
-
- ROBERT V ALTVRIN
- Confuls, Di dateurs, & plufieurs autres eftoyent portés en chaire Currule, à la coutume des Roys, & pour-tant ces Magiftrats la font Currules,les autres plebeiens eftoyent appelles Pedanées,d’autant qu’ils alloyent àpié,ny n’eftoyent portés en chaire Currule ny chariot. Peur donques môtrer qu’il « y ait efté deux Ediles Cicéron le montre par ces parolles contre Pifo. Au re-„ gard(dit il)du Quefteur, eftantmefmement le premier Edil, le peuple le „ faifoit premièrement auec moy Prêteur par vne eledion generale. Il appelle Edil premier, d’autant qu’ils eftoyent tant feulement deux,tout ainfi que deux Confuls.Et fi quelqu’vn veult auoir de cecy témoignage,Teren-ce nomme toufiours au commencement de l’argument de fes comediè's deux Ediles, lefquels aufti faifoyent, ou redreftoyent toufiours les ieux,autant les plebeiens que les Currules. Tite Line au premier liure de la guerre Macedonique dit que les ieuz Romains en théâtres furent celle année la dreflfés magnifiquement, & à grâd apparat par les Currules. Lequel en-» cores dit au mefine liure foudain apres . Aufti furent les ieuz plebeiens j> troys fois entièrement refaids parles Ediles plebeiens. Or n’eftoyent les charges des Ediles petites pour le regard de drelfer les ieuz, les depenfes, & quelles lêroyentles farfes. Ledeuoird’auantagedel’Edilitéeftoit,que chacun Edil auifaft de faire les ieuz a fes dépens lèlon le pouuoir de ion * , patrimoine, & de là dignité. Duquel decret Marc Tulle Cicéron eft te-moing en lès offices failànt mention de Ion Edilité,&de Cn. Pompée. Afconin aufti Pedian afferme que quand Pompée fut faid Edil, il édifia vn théâtre à grandes miles pour des ieuztref-magnifiques,auquels il feit marcher des cars auec des Elephans. Valere le grand a aufti eferit es liures des dids & faids mémorables, qu’Attille Seranin , & Luce Scribonin Ediles lèparerent les places du Sénat, & de la commune . Mais fi comme témoigne Vîpian quelqu’vn a vendu vn fugitif, ou vagabond, ou vne belle cheualine malade, ou vitieufe pour laine, l’achetteur alôn recours par l’ediél des Ediles, & eft la choie redebitoyre pour obuier aux malices, & cautclles du vendeur. Il n’y a point de doute quec’eft ledeuoirdes Ediles que les égouts, canauz, édifices publiques, &priués lôyent gardés nets, Rentiers, comme noftreCicéron lors eftant éleu Edil le témoigné beaucoup mieux, & plus amplement que nul autre au feptielme plaidoyer « contre Verres. le fuis maintenât(ditil)ordonnéEdil. le fay mon compte, « que i’ay félon ^ vouloir du peuple Romain a faire de mon bon gré des « treflàinds ieuz auec vne trefgrande cerimonië à Ceres,& Liber. Aulli ” ayieàappaiferaupeuple, & àla commune Romaine la mere Flora auec j) vne folennité de ieuz. I’ay aufti à faire les ieuz fi anciens, & qui premiers 33 ont efté nommés Romains, àluppiter, Iuno, &Minerueauee vne bien 33 grande dignité & religion. I’ay fubfequemmentla lollicitude des fainds 33 édifices, & m eft toute la ville en charge pour là garde. Pour lequel labeur, 3 3 lollicitude lot ces fruiz dônés,corne le plus ancié lieu du Sénat pour opi-33 ner,vn manteau long bordé de pourpre,la chaire en car,iürilcliâ;ion,& des
- images
- p.099V - vue 210/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. I0C
- „ images pour la memoyre de moy 5c de ma pofterité. Outre ces Ediles plébéiens, & Curruîes,il en eft deux autres qui ont le regard fur les blés. De la création delquelsIulleCelàrfutautheur, & ont(commedit Pompée)efté dicls Cereles de Ceres. Par le nom aufli de ( Aeditui) nous entendons les Ediles,de vray Aedttum eft tout ainfi garde de l’edifice faind ou du temple quel’Edile,quafi( tuens } gardât le temple, ou bien tuteur du temple.Celuy de vray eftoitainfi appelié, auquel la garde du facraireeftoit commifo, au dedans duquel les ftatuës,&images des dieux des Gentils eftoyentgardées qu’il falloit prier, fiquelqu’vn defiroit obtenir 5c impetrer quelque choie entiers elles. Ce que piufieurs faifoyent penlâns eftre exaucéz en fouillant leurs parolles aux oreilles des fimulachres. Seneque dit au cinqielme liure „ des epiftres: Il ne fiut leuer les mainsau ciel,ne prier i’Ediî pour nous fouf-v frir approcher de l’oreille de l’image, afin que nous puilfions eftre mieux •3 exaucés. Aedïtimus aulïi eftce me (me qu’eft i’Edil, mais Marc Varron eft d’auis en Ion liure du lâgage Latin i Marcel qu’on doit plus toft dire(Aedi-• itmm)o^xz{Aedituus) d’autant que lederniereft nouuellement inuenté,Se l’autre entier d’ancienne fourle. Laumiusau Prothefilae a appelié Clauftrin celuy qui auoit la garde de la clofture de la porte,ordonnant par mefme figure celuy deuoir eftre appelié Aedituus qui auoitlagarde des temples. I’ay » trouué es plus correts exemplaires de M.T.Ciceron ainfi efcric : Aeditïmï en }>ftodéjcjue mature fcntiunt . Mais en l’exemplaire commun l’eforiture porte Edttui. Il y a vne fable Atheliane de Pomponiusquia en tiltre AedtùmHS, en laquelle cft ce vers:
- i) Qui pofîquamt'éi dppar?o,dtjue Asdïtïmo in templo tuo. Au regard
- de Lucrèce il vfo en la poëfie d’Edttuentesjpom Editui.
- le trouue qu’il a efté piufieurs Flamines,& tout autant qu’ils adoroyent de dieux. Et Marc Varron témoigné es liures qu’il a eforit de la lourlê de la langue Latine,que les Romains en ont vie, de forte qu’ils eréérét le Flamin IouiaI,Marcial,Quirinal,VoIcanal,& lerefteen fomblable.il eft vray que NumaPompilecréalelouial, veu qu’au parauant les Roysportoyent les offrédes des Roys,& des Pontifes, comme nous trouuons auoir efté obfor-ué en Priam,& Aeneas dedans Virgile, 5c finalement à moindres,comme a C.CeIar,au Diuin Augufte,&âplufieurs autres Princes,lelquels nous voyons honorés des tiltres du grad Pontificat en piufieurs monumés, qui font encores en nature. Au demourât Numa penfant qu’il foroit beaucoup plus de Rmysfomblables àRomulc quafoy, lefquelsen delai-flant Jafollicitude de la religion fenueîopperoyent es affaires de la guerre, inftitua les Prélats qu’on appelle Fiamines à la plus part des dieux, pour eftre continuellemét abornéz au foruice Diuin:Se en créa vn alupiter, paré d’vne riche robbe, 5c d’vne chaire Royalle Currule,lequel on 3ppella Diale, auquel il en aiouftà deux,l’vn à Mars,ôci’autreàQuirin . Et ont,comme il fomblea Plutarche efté premièrement diéfs Flammes à eaufo des chapeaux qu’ils auovent fur la.cime,d’onton vie pour couurirla telle, quali qu’ils fulient quelques Pi-
- R iiij
- p.100R - vue 211/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- leamines.Ce c|uc dit Lucain au premier;
- Et tollens dftcemgenerofo \ertkejl<tmen.
- 99 Ou bien,comme il lèmble à Varron,d’autant qu’ils eftoyent au païs La-
- tin à telle decouuerte,& qu’ils auoyent le chef entouré dvn lacet de Iayne, dont ils eftoyent appelles Flamines,qualï Filamines.Le Dial eftoit did de Dm,duquel on péfoit que la vie fuit baillée aux hommes, ou bien de Iupi-ter,qui ell le Dieu aydant. Les autres aufïi font parés du tiltre du Dieu, duquel ilzont iaminiftration. Ceftuicy feul a, comme dit Varron au fécond liure des choies diuines vn bonnet blanc, d’autant qu’il ell le plus grad, ou bien d’autant qu’il faut qu’vne hoffcië blanche loit immolée à Iupiter. Il fè fait aufïi beaucoup de diuerfes cerimoniës,lelquellcs font contenues es liures compofés des Prélats publiques. Nous les auons aufïi leu au premier des liures du peintre Fabin, lelquelles font prefques telles que nous les récitons. Il ell défendu au Flamin Dial d’aller a cheual, ny ne luy ell iamais permis de iurer. Il n’ell point auffi permis d’emporter feu de la mailbn du Flamin Dial linon lelàcré.Si vn prilonnier entre en là mailon,il le faut de-liurer, & faut tirer les liens par la cillerne à la couuerture, & de là par apres les defcendre hors en la rue. Il ne luyelloit pasaulli licite de toucher, ne nommer lierre,d’autant qu’il lie tout ce qu’il attouche, ny ne luy efloit licite de porter vn rameau mallif, ne d’auoir en foy aucun neud au Ibmmet de la telle, ne au bandeau, ne en quelque autre partie. Si on meine quel-qu Vn au fouet, & qu’il le iette à lés piés, il n’ell pas licite de le battre ce iour là. Autre qu’vn homme hbrenetondelaperruque du DiaI.Cen ellpasauf li là coutume de toucher vne chieure,ny vne chair crue, ne feu, ny aulîi les nommer.il n’ell aufïi licite au Flamin de regarder vne armée de mer prellc à combattre. Il ne deura aulîi tailler les bourgeons des vignes,qui lônt fort haut éleués. Il ell aulîi belbin que les piés du lid auquel il couche foyent frottés tout autour de boue déliée: Les rongneuresdes ongles & de fon t poil lérôt couuertes de terre lous vnef Euze.IÎ a tous les iours la telle attou-
- rée dvn bandeau fans bouquet au delfus, & ne luy ell licite d’ellre à plein air. Et a ellé depuis n’agueres treLbien ordonné par les Pontifes qu’il fe-roit à couuert. Menfurin Sabin a efcrit d’autres maniérés de ceremonies en celle forte: Il ne luy ell licite de toucher à vne farine mellée de leuain, ne de dépouiller fa chemilè linon à couuert, ny ne foit nud lous le ciel, corne fous l’œil de Iupiter. Nul ne falîiet en vn banquet au delfus du Flamin Dial hors le Roy:vn autre facrilicateur n’y ell pas receu.S’il perd fa femme, il perd fon office, ny n’ell loilible au Flamin de rompre fon mariage, finon par mort, ny n’entre iamais en lieu de lèpulchres, ny ne touche iamais a corps mort, combien qu’il ne luy ell pas défendu d’en faire les funérailles.
- Les Saliens ou danlèurs font vne façon de Prélats, lelquels on dit auoic ellé inllitués pour autant que Numa ayant ia régné huit ans, vne maladie pellifere courant l’Italië auoit alfailly Rome.Et comme tous fulfent en triade , on dit qu’il tomba du ciel vn bouclier es mains de Numa, & que le
- Roy
- p.100V - vue 212/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII.
- Roy dift defifus des choies amirables, qu’il diloit auoir ouy d’Egeria, & des Mules,&que le bouclier eftoit venu pour le fitlut de la ville,& qu’il le falloir çarder,&: en faire vnze autres à fa figure,grandeur, & forme, afin que pour lafimiîitude,vn larron loit incertain d’auoirle celelle. Comme dôquesles ouuriers fefibrçaflent à l’enuis d’en faire de lèmblables luyuant Ion autho-ricé,& commandement, 8c comme tous les autres fufient en de!êIpoir,Ve-fturin Mamurin l’vn des plus exceller] s ouuriers les fit, Scdrefla tous de II grade femblance,que Numa melmes ne les pouuoit dilcerner. Pour la garde 8c lêurté delquels on dit qu’il ordonna les Prélats Saliens. Or ont iis elfe appellés(S<a/i/)àcauIèdeIadanIèà làux, 8c non pas, comme aucuns dilène d’vn homme de Dardanie, ou bien de Mâtiache nommé Sale, lequel a en-lêigné la danle qui fe chante en armes, veu que comme dit Pline au leptiefi me Iiurede l’hilloyrenaturelle,Dardane l’ait inftitué,fuyuantcequedit Ouidcau troifiefmcdes Faites.
- „ îam dederat Salin à Saltu nomma, difta.
- D’autant que courans par la ville,ils ne danloyent point de trop grande vehemence ne force, 8c qu’ils prenoyent au moys de Mars les làincts boucliers ayans chemilès violettes, ceints de ceintures de cuyure larges, portas aulîi des fiilades de cuyure,& vn accoutrement de cuyure fur la chemilè,en frayant cotre leurs armes de courtes elpées. Le relf c de la dance elt faiét des pies. De vray ils font vn gratieux mouuement aucc tours 8c mutations en bon nombre 8c vilf ede bonne force 8c legereté. On dit que la recompen-lè de Mamurin pour cefi: artifice, fut vne certaine memoyre par vne chan-çon des Saliens faitte au Ion de Pyrrichius, les autres dilènt que c’eftoit Vc-élurin Mamurin qu’on chantoit. On ne fait point de doute que la dignité Senatoire n’ait elle inlfituée par Romule. Car quad il voulut édifier vne ville,il afifembla les palfeurs auec lelquels il auoit elle nourry. Et comme le nom luy lèmblafi: peu idoëne à fonder vne ville il ordonna vne franchilè,a laquelle fe retiraient tous les mefehas des païs circonuoyfins fans égard de la conditionne l’amas delquels il fit vn peuple,& a éleu les plus âgés du Sénat,les appellant Peres,fuyuât le confeil defquels il meneroit tous les afiai-res.Duquel Sénat aufii parle Properce en ces termes.
- ” La court qui d\n Sénat hores bordé de pourpre
- » Sebraueyutfes Mateurs empehjfés d'agneaux.
- » Le cornet ajfembloitles Ouirinsau confeil
- » Aupréfomente ftoitle Sénat de cent hommes.
- Or tout ainfi que, comme Cicéron dit qu’en Lacedemon ceux font appelles vieilz 8c anciens qui ont quelque fupreme Magiftrat, noz anceffres aulîi n’eu fient pas appellé le lupreme conlêil Sénat, fi le con!èil,la railon, 8c auis n’eftoit es vieilles gens.Ce qu’Ouide ne taift pas es Faites dilànt:
- 3 > Du chef chenu iadis 4 efté l’honneur grand,
- 33 . Enfin eftirne eftoit la ride de vieillefje.
- 33 Les faifts de Mars vuydoit, <(y les hardies guerres
- +Ex Pro-pcr. Lego, quæ ntinc niret.pro nunc quas inter.
- p.101R - vue 213/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Laieunejfe,en fin fort fi tenant parfis dieux.
- Cefi autre moindr en force,&inutile aux armes,
- . De confiil bien fiuuent fin pais ficourit.
- Omerte lors n'efloitla court qu’aux derniers ans,
- Del’âge eftoit le nom de Sénatgratieux.
- La \ieiüefje faifiit droit & fous loix certaines Eftoit i’agefiny,d’ont on cerchafi l'honneur.
- Ils ont dôques efté appelles Peres à caufè de l’honneur,& Sénateurs pour
- I âge. Les autres les penfent dire dicts Sénateurs a(Si«e«do)permettre, d’autant qu’ils donnoyent faculté,ou bien qu’ils liuroyent aux plus pauures, & a leurs enfans portions de terres. Or trouue-ie qu’a ce nombre de cent, on en aaioufté d’auantage.Brute de vray en amoindriffant quelque peu le nô-brede l’ordre desCheualiers par l’eleétion desplusapparensa fourny vn Sénat de trois cents à fin que la multitude de l’ordre euft plus de force au Sénat.De la aufli eft venu,comme l’on dit,que ceux eftoyét appeliez au Sénat,qu’on appelloitPeres,& quiy eftoyent attraids,& éleuz,ou bien d’autant qu’ils eftoyent pris de la race des Patriccs, ou bien que pour la difétte ils ont efté de l’ordre des Cheualiers tirez au Sénat, & appelles confcripts, d’autant qu’ils ont efté enrôliez au Sénat qu’on auoit fait neuf. Mais apres la mort de Cefâr, Augufte a réduit à l’ancienne mode, & honneur ce nombre trop accroiffant,d’vne tourbe difforme fans grâce,& trop indigne, corne qui paffoit le nombre de mille, defquels les aucuns eftoyent éleuz par faueur,les autres pardons,que communementon appelloit auortons.Ou-tre ces noms de Sénateurs, il en eft qui penfent aucuns auoir efté appelles Sénateurs pedaires,d’autât qu’ils n’exprimoyent pas leurauisau Sénat par le menu,tant feulement ils confèntoyent à l’opinion des autres,corne con-fermâs leurs diéts,& priués de dire leur fêntence,quafi corne fils venoyent à pié a l’auis d’autruy. Les autres difènt que c’eftoit vne certaine différence, veu qu’il en eftoit beaucoup : lefquels eftans peruenuz aux Magiftrats Cu-rules eftoyent portés par honneur au Sénat en vne chaire Curule, &que ceux quialloyent àpiéfappelloyent pedaires. Au furplusMarc Varron dit qu’aucuns Cheualiers ont efté appellés pedaires, ôc fèmble vouloir lignifier ceux qui n eftoyent pas encores éleuz au Sénat par les Céfêurs : Mais ayans exercé les offices de la commune ils venoyent au Sénat, & auoyêt fôn auis.
- II eft vray que ceux qui auoyét exercé les Magiftrats Curules,& n’eftoyent encores éleuz au Sénat par les Cenfêurs n’eftoyent pas Sénateurs, auec ce qu’on ne demadoit pas l’opinion à ceux qui eftoyent enrôlés des derniers, &c eftoyent tant fèuîemét de l’opinion que tenoyent les Princes. Au regard de la maniéré de tenir le côfcil,Marc Varron en a fait vn liure à la pricre de Pompée,lors que premièrement on penfê qu’il fuftéîeu Conful auec Marc Craffe.'d autant qu’occupé es guerres foraines iufques a ce temps la,il eftoit ignorant des coutumes ciuiles, ny ne vouloit pas eftre trouué moins fauât que les autres. Auquel liure Gellius témoigné que Varron en dit beaucoup
- p.101V - vue 214/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. iox
- de choies, 6c que la première efloit par quelles perlon nés lê deuoit tenir le Sénat,nommant le Diétateur,les Confols,Prêteurs,Tribuns delà commune, le Vice-roy, le Gouuerneur de la ville, 6c na efté loifible a autres qu’a eux de faire vn decret du Sénat, & toutes les fois qu’il eftoit necelfaire que touslês Magiftrats fulfent en vn mefme temps à Rome,alors le plus ancien de ceux qui eftoyent éleus foyuâc l’ordrefofdiét auoit la puilfance d’affem-bler le Sénat. Il dit d’auantage que par vn droit extraordinaire,les Tribuns des gens de guerrequi auoyent tenu le lieu des Confulz, 6c les Decemuires qui pour lors auoyent le pouuoir Confolaire, 6c outreplus les Triumuires créés pour donner ordre a la Repub.ont eu puilfance d’alfembler le Sénat. Au regard d’alfembler le Sénat,ou de tenir le conlèil il nyoit qu’il fuit Ioifi-ble le faire finon es lieux ordonnés par les Augures qu’on appelle temples. C’eftoit aulfi la coutume que le Sénat faflemblaft lins mander, 6c y tenir pie continuellementjlequel on appelloit Senatule. Duquel lieu eftant appelle ils aloyent incontin et à la court. Quant au temps d’alfembler le Sénat il en parle ainfi: Le decret du Sénat fait auant Soleil leuant,ou apres le couchât eftoit nul, 6c que c’eftoit la charge des Cenlêu rs de diftuter par quels, & en quel temps eftoit faiét le decret. Au regard de 1 âge d’vn Sénateur, il fut ordonné que nul de moindre âge, que de vingt & cinq ans n’entre au Sénat félon que témoigné Plutarche en la vie de Pompée.il n’y a touteffois point de doute â ceux quililent les antiquités qu’aucuns font entréz au Sénat a moindre âge, comme nous liuons eftre auenu â M. Vallere Coruin, auquel â lage de vingt & trois ans ils ont baillé IeConfolat. Mais entant que les Sénateurs n’entreroyent point au Sénat auec leurs enfans prétextés comme au parauant on auoit de coutume, cela fut depuis ordonné, &c en fut eau lê le faictde Papirius prétexté. Vatroaufli eftoit d’auis que celuy quivouloit alfembler le Sénat, deuoit premièrement prendre iugement d’aulpice,& immoler vn Iicrifice.il enlcigna aulfi que le Sénat deuoit premier délibérer des affaires diuins que des humains, 6c que le decret du Sénat lê deuoit faire en deux maniérés.L’vne,fi en lê Ieuant on conlèntoit, ou bien fi la choie eftoit douteulê par l’auis de chacun en particulier, aulfi fait il de liifir le bien, 6c de condamner â l’améde celuy qui n’eft venu au Sénat au teps requis. En quoy encores il faut noter touchât la coutume,que tout ainfi que kloy n’a point de pouuoir for l’homme de guerre depuis l’âge de cinquante ans,qu’aufti ne force-elle pas le Senateurlèxagenaire.Les necef-fités publiques ont celle coutume enuers les anciés, afin que fi par fortune il y euft quelque apparent effort des ennemys qui forçait de prendre l’auis d’hommes de baffe côdition,ou bien d’ordonner quelque choie qui euft â cftreplus toft executée que diète, ou bien fils ne vouloyent quelque chofo eftre trafportée â leurs amys,il lê fit quelque decret Iêcret,de forte que ne les Greffiers, ne les lêruiteurs publiques, ne leslêrgens des Cenlêurs ne fulfent ptelèns â telz aétes,& que les Sénateurs fiffent l’office de tous tant Greffiers que fergés, &: Cenlêurs. C’eftoit aulîi à eux de faire rendre le courroucé be-
- p.102R - vue 215/480
-
-
-
- ROBERT V ALTVRIN
- niuole, le fufped: paifible, l’aufterc graticux, & le contraire fecourable. Et combien que,comme il a efté dit, les cafies de vieillefie fuflfent inutiles aux armes, toutef-fois Tite Liue témoigné au troifiefme liure depuis la fondation de Rome,qu’à chacune cohorteil y auoit deux Sénateurs pour Chefs.
- Si nous recerchons l’ordre de l’antiquité par la fburfe des dignités, on co-gnoiftra que la famille des Patriccs a efté dediée à Iupitcr, à fin que la reue-réce du fiipremç Dieu,côme ils ont penfé pofledaft le premier lieu, & quelques véridiques l’ont voulu dire, que le nô de Patrice a efté did à (patribus) peres. Les témoignages de l’antiquité déclarent que la dignité confulaire,a efté introduitte apres les Roys chafles,fuyant la fierté Royale:veu que com me eux prefques elle auoit vn pîeirf pouuoir de gouuerner la République. Or eftoyét ils deux créés pour vn Roy,à celle fin que fi l’vn euft voulu eftre mefchant,il fuft réprimé par l’autre ayant fimblable puiflancc que luy. Hz auoyent premieremét les droicts de Royale puifiance, & tous les paremes, & accouftremens de popes pour l’ornemet de leur office.Ils auoyét de vray tous deux vingt & quatre fefleaux de verges auec leurs exécuteurs, & tout autât de coignées,leur cftat enioint quoy que leur pouuoir fuft grad de les auoir liées à neuds de chaines, afin que corne plus on tarderoit à les deliër ils retardaient la deliberation, mefmement fi lacondemnation eftoit à la mort. Aufii celuy doit eftre lent,qui iuge de la vie. Vne autre fintece fê peut corriger, & non pas celle de la vie, auec ce que cefte maniéré d’armes font de raifon,& non pas de fureur, & teileméc ordonnées contre les criminels pour plus corriger de frayeur, que de confirmer par peines: ioint que cefte peur eft plus ciuile,que Martiale,& telle que les voleurs de troupeaux,& les larrôs doyuét craindre,& les brigansen auoir peur,& du regard de laquelle la finie innocece ftehouyfie.il a auffi efté ordonné, que l’vn d’eux tac feuîe-mét,& non les deux au rayent les faifleaux, afin que la frayeur ne fimblaft doubler,& que celuy qui les aurait ferait dict le plus grad Conftul, ou bien celuy qui aurait efté premier Prêteur,ou bien MaieurVrbain.Les autresfot les moindres, aufquels corne il auient fouuét es grades cités, le Sénat ordô-na qu’ilz eufient le regard que la ville ne ftuffre quelque offenfte,& premièrement à l’vn d’eux,ou bien aux deux de Ieuer armée fil en eftoit befoin,de côtenir par tous moyês les ftubiedz,&les citoyens,&depouuoircondâner à la mortjtât à la ville qu’au cap,non pas touteftfois le Romain,lequel leur eftoitfeulemécioyfiblerefrener,&decômander lemeneren prifônpubli-que.Ilz vfôyent du fiege Curule attédu leur grâdeur,auquel ils môtoyentà plufieurs marches,a fin quelaaffiz ilsnepéfàftentrien d’entreprifipetitte, & pauure,& qu’eftans en repoz,ils meritaftent, ce que les autres Empereurs ont mérité apres gràds trauaux. Au demourat fà main eftoit arméed’vn ba-fton victorieux,à fin que la dextre d’vn vaillant home deffendift lesbiés de tous ceux de la R epublique Romaine,& les enfans:& que pour 1 augméta-tion de la gîoyre publique,il deliuraft lesfiruiteurs du iou de firuitude. ils marchoyét en public auec ftouliers dorés, corne fils fimbloyet nô fiulemét
- p.102V - vue 216/480
-
-
-
- ' DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. ic
- ne faire conte de la matière,que la fantafie rauië à vanité eftime tant, mais aufli la confumer. Outre-plus entre autres dignités de la République, ils ont mérité d’auoir les épaulés peintes, d’vne couleur diuerfe de robbe palmée, que la félicité donnoit pour guerdon aux vainqueurs.Or en eftoyent îlz appelles(Candtdati) d’autant qu’ils marchoyent auec robbes blanches. Ilz ont auEi eflé appelles Confuls dc(con.fukndo)confcillcï, à fin qu’ils ne fè inelcogneufienr,ayanstoutes choies fous leur vouIoir:d autant qu’ilzaui-foyent au peuple, & au païs,finon que celoit de la ou dit Acftius parlant de Brute. Celuy Ibit appelle Confuî,qui donne bon côlèihou bien que,côme dit Quintilian,ConIul foit diét de concilier, ou iuger, car les anciens ont appelle cela conlèilîer.Le pouuoir de ce~Magiftrat efboic annuel,à fin qu’ils fe donnaient garde, que d’vne infolece avn pouuoir diuturne ils ne tum-balfent tat plus allument en quelque faute. Et combien que leur Magiftrac fuft court, on les depofoit routef-fois dedans l’an fils n’eftoyent fufnlàns. La coutume aufli eftoit,que ceux qui deniadoyentle Côfulat, fuflent pre-fens en l’alfemblée du peuple, & que nuis ne fulfent receus moindres de vingt & cinq ans,quieft vn âgeSenatoyre.
- Suffesen langue Punique eft appelle Conful comme le témoigné Cali-» die Et pourtat Tite Liue dit au quart liure de la guerre Macedonique.Cô-3} me le iour enfayuat les Sulfetes le fulfent aftèmblés pour iuger, les tables fil 33 rent veuës,oftées,& Ieuës.Les autres pèlent qu’ils foyent dicts Sulfets quafi Ibus autres fai&s3àt([ujficere)qui eft adiré fubminiftrer,ou bien fubftituer au lieu d’vn autre,fuyuât ce que dit Tite Liue au vingt & troifiefme, Marc. „ Aurclim Gotta decemuirfucroTÜ mommsjn e'mlocum.M.Amlm Glabrio fafftBtts „ (fubftitué.)Ciceron aulfi pour Murener/^^emCoful>& tsnotn admituAra-,, dobcRofedïnfuJficiendo collegaocaipatits.il faut au demeurât entédre, que corne il foit deux cholês'ainfi que dit Cicéron jqui peuuét éleuer les homes à ce tant grand degré de dignité Confulaire, & à la fin des hôneurs populaires,dont i’vne côcerne le droiét,& l’autre la guerre : il n’y a point de doute que celle de la guerre ne foit plus auantageule pour l’acquérir, que n’cftla gloyre du droict ciuiî, car l’vn veille la nuict pour repondre à ceux qui luy demâdent conlêil, l’autre pour peruenir la ou il tend diligemmét auec Ion armée.Le chant du coq éueille celf autre, & celuy des trompettes ceftuicy: ceft autre drelfe fon aminiftration,& ceftuicy fon armée : ceft autre le dône garde que ceux fur qui il ale regard ne loyentfurprins, & ceftuicy que les villes & chafteaux ne le Iôyent:ceft autre enred a ce que les eaux des pluyes ne nuylent, & ceftuicy entéd & craint que l’armée des ennemys n’oftenlè: ceft autre entéd au gouuernemét des contrées,&ceftuicy a l’augmétation.
- La grandeur de l’Empire Romain a amené la couftume, & neceffité de creérla dignité Proconfuîaire, d’autant que les Confuls qui n’eftoyent que deux ne pouuoyent pas le trouuer a toutes les guerres, ny eftre au gouuernemét de toutes les prouinces.Or leur ont eftétous autres paremés Confu-laires accordés,hors qu’ils n’auoyent que fix exécuteurs de iuftice.Quat au nombre des Procôfuls,il n’eftoitpas certain, mais tout ainfi que legouuer-
- S
- p.103R - vue 217/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- nementefl: terme general, d’autant que tous Proconfulz ,5c tous ayans le gouuernement des prouinces,eftoyent appelles gouuerneurs,côbien qu’ils fuflenc Sénateurs. Le nom aulîi de Proconfulat elHpecial,tellement que ceux qui vfoyent du pouuoir des Confuls,eftoyent appelles Proconfuls.
- Liflor, L’executeur de iuflice eft le miniftre de la cruauté du Côfol, Pro-conful, & des Prêteurs, portans vn trouffeau de verges lié auec la coignée, & en a le Conful douze, ôe les autres Ex. Valgius-Ruffus dit au fécond des liuresqu’il a inflituédes choies recerchées parepiftre, que(Lzé?or)îe bou-reau ell dit de(7/g4re)Iiër,d’autâr que quad le Magiflrat du peuple Romain ordônoit que quelqu’vn fuft battu de verges, le fergét a de coutume de luy lier les piéz,& les mains. Et celuy qui de la compagnie des férgés auoit l’office de lier fappelloit(Lié?ûrjtellemét que pour témoignage il fayde de M. Tulle Cicéron,récitât les parolles qu’il a diét au plaidoyé pour C.Rabirin:
- « Litfordntfui^cQlIigamanfts. EtTite Liue au huitiefme lime.* LiBordeligaadfa^ lumNalgius RufFus.M.T.Liue, Feftus,ôc toute l’antiquité le penfé de mefi mes,à quoy auffi nous confêntons. Mais Tiro Libertin de M.T.Ciceron a elcritque(L/éLr)eftderiuédefLi»«#z)lin,oubien de(Iici«w;fil.Ceux,ditil, qui exerçoyent les Magiftratz eftoyét ceincts de Licium,fil, que les anciens appelloyent lin, pour lier les mains ôc les piés des criminels, comme nous auons dit.Ceux donques font ignoras qui pèlent que(Z./é?or) foit dit de (lï-tare)fac rifiër,par vne interpofition de,c,d’autât qu’il làcrifië & tuë.Et aiou-ftéc d’auâtage fans propos, qu’il eft did quafi(zé?cr)frappeur de la loy,d’autant qu’il (tciat)frappe le criminel,fuyuant le commandement de la loy: ce que l’antiquité n’approuue pas,côbien que la raifon lémble auoir couleur.
- Au regard du nombre de douze,les vns le pèlent auoir efté prins par Ro-mule à caufe du nombre des vautours, lelquels par augure luy fignifierëtja courône.Les autres,& mieux,des Hetrulquesleurs voifins,delquelz ilz ont emprunté le fiege Curule,la robbe pretexte, la façon de leurs Roys, d’autat que de douze peuples chacun bailloitau Roy créé vn exécuteur de iuftice.
- Ouettura (la fuperintendence des finances) en laquelle doit eftrevn fu-preme fauoir du droid,vne gloyre de lettres,langage prudët, vne conftace de cœur,domicile de continence,& le fiege de toutes vertus, elt le premier degré d’hôneur, 6c la mere de toutes dignités félon que témoigné Cicéron au lécôd plaidoyé contre Verres. Varroau fixiefmeliure,comme le témoigné Calfius,dir que fon office 6c fource elt fort ancienne, 6c prefques auant tous Magillratsfélon l’auis d’aucuns,& mcfmes làuas hommes. Gratianus Iunius témoigné aulèptiefmeliure des puifsaces, que du tëps de Romule, 6c de Numailz elloyët deux Quefteurs. Pôponius afferme que lors ce Ma-giftrat cômença que les finâces publiques cômencerent eftre en plus grade relérre,ôc abondâce,à fin qu’il y euft homes qui en euffent la fuperintéden-ce. Ce qu’on ne doit peler auoir efté du temps deRomule,attendu qu’elles eftoyentlorspauures,5c courtes. Au demourâttoutainfi qu’on doute,file Queftcur a efté du temps des règnes de Romule, & Numa, auffi eft il pltis vray lémblable que les Qu.efteurs furent, 6c eurent leur commancemét du
- p.103V - vue 218/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. 104
- rccrnede Tulle hofiile,lequel fit faire I’efiimation des biés,Scie dcpartemet en Céturiës & colleges en la cité,qui au parauat n’efioyent pas. Auffi efi ce d’ancienneté la plus cômune opinion que Tulle Hofiile a premiercmet or-donéles QueReurs en la Repub. lefquelz au témoignage de Pôponius,lu-nîus,Trebatius, Fenefiella,& Varro ont efié au cômencemét ainfi diéts de (Q^rer^enquerir. Mais pour autant qu’il n efioit point permis parla loy aux Côfii Js de iugcr la vie d’vn citoyen Romain fans le côfénteinêc du peuplera ceRe caufé les QueReurs ont eRé par luy ordônés pour iuger des cau-jes criminelles, defquelles depuis les Triüuirescapitaus ont eu la cognoif-fânce,& fappelloyét QueReurs parrices,félon que dit Feflus,ou bien félon Poponius,QueReurs deparricides,defiquels la loy des douze tables fait më-tion.car ceux font diéts parricides,qui non feulement ont tué leurs parens, mais aufïi quelque home que ce foit. Ce que de mefmes fignifië auffi la loy de Numa difânt ainfi.Celuy eR parricide,qui àfon eflien tuë vn homme libre.La charge de leur office efioit de choifir lesprouinces fuyuant le decret du Sénat,daller au deuantdesRoysvenansàlaviîle, & defoub-hafier les captifs. Il efioit auffi d’autres QueReurs au-tour du prince, qui féruoyent tant feulement de lire les liures au Sénat,& les lettres du prince.
- Les PreteurSjfelon l’auis d aucuns efioyent au commencemét ce que depuis ont eRé les Confuls, îefquels menoyent les guerres efiâs ainfi appelles d’autant qu’ilz auoyent la fuperintédence fur toute l’armée. Et ont eRé lors créés,comme témoigné Pomponius,que les Confuls efioyët T’appelles des gucrresfaitiesfur les limites, ô: qu’il n'y auoit home qui peuR faire iuRice dedans la cité. Au regard du nombre des Prêteurs, Rome l’a eu diuers félon le temps.Premicremét ceîuy de ville,& depuis quelques ans apres n’y pou-uantfuffire,vneftranger, & furent ainfi appelles, d’autant que l’vn faifoic droit aux efiragers, & l’autre aux citoyens. Et fiibféquemmét apres ie trou-uequ’ilenacRé créé plufieurs en augmentant le nombre iufquesà huit. ” Et pourtant Cicéron dit pour Milon : fépt Prêteurs, huit Tribuns de la cô-» mune luy eRans aduerfaires,& mes protecteurs ont eRé créés félon laptin-}} fé des prouinces, félon le nombre defquelles renduës furent tout autant de ” Prêteurs, partie defquelz eut le regard aux affaires de la ville, & l’autre aux » prouinciaies. Or auoyent ils pour enféignefix coignées,comme le témoigné Pîutarche en la vie de Paul Emilie. A laquelle guerre,dit il,Paul F mille futenuoyé.nonpas auec fix coignées comme les autres Preteurs,mais auec douze:de forte que la dignité Confuîaire efioit coniointe a fon pouuoir.
- Les Céléurs ont eRé ainfi appellés, à l’auis defquels le peuple efioit taxé, ou bien pour Peffect mefme,d’autât qu’ils auoyët l’authorité de faire les taxes,ou bien d’autat que chacu n a de coutume d’efiimer fon bien félon leur efiime,ou bien que les anciens ont tenu (Ce«/fre)pour iuger par vnefociale & fémblableconuenâce.Aucusdifént que Cê/ér vient de(C^éo)c*eR à dire, Pordône que tu faces cela,& que le Senat(Ce«/«if) a ordôné quelque chofé, £* ont Modefiin témoigné que le nom de Céfèur fémble en auoir eRé tiré.
- s U
- p.104R - vue 219/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- On tronue par efcrit,que Sérum Tulle a premièrement ordonné ceft office: & depuis apres l’abolition desRoys,routledroiétde faire les taxes, &tou-tes autres choies appartenantes à la maiefté Royale ont efté tranfferécs aux Cofuls.Maisl occaüon de créer ce nouueauMagiftrat,fut d’autat 'que pour la contraincfe des guerres le peuple ne pouuoit eftre fans taxe, ny ne pou-uoyent commodément les Confulz y entedrc. Mais tout ainlî que la chofe eftoit letépspalféd’vn bien petit momét, d’autat que ce Magiftrat n’auoit pouüoir que de taillerie peuple,aufft a-il efté depuis noble, & de plus gran de reuerence,puilTance,&lèueritéquenul autre. Car il eft venu a ce,qu’il a non feulement iugé des richefles, maisauftidela difcipline 8c façon de vië des ges de guerre. Aufti la coutume de Rome eftoit entre les Cheualiers.co me dit Plutarche,qu’apres que quelqu’vn auoit fêruy a la guerre le tépspre-fîix, il menoit le cheual par le trauers de la place en la prefènce de deux pre-fdés qu’on appelloit Cenféurs,aufquelz eftoyent la recités les Chefs,& Ca pitaines fous lefquelz il auoit fait le meftier:& par apres les Cenfeurs en or-dônoyent a chacun félon fon mérité,ou louenge,ou infamie. Or eftoyent pour lors ceux qui auoyent celle charge, homes notables tant en dignité, qu’en vertu,aufquels féans au fiege Curulle, comme les Cheualiers fé fouf-mettansàleuriugemétvinfentfuyuâtlacoutumejeplusâgé des Cenfeurs les interrogoit fils auoyent fait les deuoirs de la guerre fuyuâc la difcipline militaire, &: fils les auoyent accôply fous le Chef: Et fil nefetrouuoitau-tremét qu’ils auoyent affermé,ils les receuoyent en lamaifon auec vne grade ioye & careffe de leurs amys. Sinô,ils eftoyét notés d’vne marque Céfo-rië.Ce qui leur eftoit loyfible de faire pour bien petitte caufè, a ceux qui vi-uoyent,& parloyentmal,& defordonnéméten leuroftantlecheual,&les caffans de l’armée . C’eftoit aufft a eux d’augmenter & diminuer les péages du peuple Romain, & de permettre le Luftre apres la reuolution quinqua-nale & de faire des facrifices tauriles au Soleil, du porceau, de la brebis, & dutaureau,& defenqueriraufïi des noces, de la procréation, desperfon-nes libres,de la maniéré de viure,& des bâquetz, a fin que perfôhe n’outre-paffaft la bône manière accoutumée de viure du païs. Outre ces charges, comme ilsfuffent deux,l’vn Patrice,l’autre de la cômune,il leur eftoit loifi-ble de créer le Prince du Sénat, & de depofèr du Sén at les in dignes, comme on dit auoir fait CFabrice,lequel depofa du Sénat P.Corneîin Ruffin home Patrice,d’autant qu’il auoit depanfe vingt marcs d’argent en vn banquet. Etcôme M;Câton le Céfeur qui chaffa aufti du Sénat Luce Quintin Flaminin,freredeT.Flaminin, d’autant que perfoadé par vn garfon qu’il aymoit,comme dit Plutarche,& félon l’auis d’autres, par vne putain, eftat Côful en la Gaule de tuer vn certain Gauloys prifônier entre les criminelz; il y obtépera. Valere Antias dit, que cela fut exécuté par luy, non pour l’amour qu’il portait à vn garçon,mais a l’appetit d’vne féme.Tite Liue recite eftre efcrit en l’oraifon de Caton,que le Gauloys fen-vint fuitif auec fâ ferri me, 8c fés enfans, & que comme Luceprenat fon repas l’euft receu, il le tua
- fbudain
- p.104V - vue 220/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII.
- io S
- lointain delà main pour complaire àvneputain, de l’amour de laquelle il bruloit. le penlèroye bien cecy auoir eLtc dit par Caton pour donner plus grand horreur aux crimes de Luce,& que le tué n’eftoit pas vn fuitif,& que ce fut vn des prilonniers côdamné à mort, veu qu’il y en a ailes d’autres qui le témoignent, & melmement Valere le grand, & Cicéron en fon liure de la vieillelfe,là ou il attribue tout le propos, & le récit de la matière à Caton.
- Au demourât les Cenlèurs auoyent 1a charge du pris des lâcrifices, & di-Ilinguoyent les genres de ta diuerfité, & les offices de la République. Lors auffi lêmbloyent ils faire correction qu’ils condemnoyent vn Cheualierà l’amende, laquelle fappelloit, Cenjîo baïîaria, (priuation d’armes)lors que pour amende on ordonnoit au loldat de rendre les armes pour la faute cô-milêaudeuoirdela guerre. Au relie le Magiftrat a plufieurs autres pouvoirs,Iefquels Iulius Capitolinus recite en ta vie de Valerian : Pré, dit il,la cenfurequela Republique t’a donné, & que lèultu mérité pour iugerdes façons de viure des hommes, & des noftres. Tu auiferas de ceux qui deurôt demourer,àlacour: tu réduiras l’ordre des Cheualiers à l’ancienne mode: tu feras le moyen destaxes:tu confermerasIespeages:tu diuiferasl’eftat, &: recerchcras le nombre des peuples. A toylèra liurée l’authoritéde réduire lesloix par eferit. Tu as auffi à.iuger de l’ordre des gens de guerre : tu auras égard aux armes:tu iugeras de nollrepalais,de noz iuges, & grads gouuer-neurs,Iâuf deceluy deRome,&lesConfuIz ordinaires, &leRoydesfo-lenriitéz, aüec la principale vierge des Veftales, h elle demeure entière : finalement tu iugeras de tous. Il ne faut pas auffi oublier,que comme il foit certain que les autres Magillratsloyent annuels, que la cenfure a anciennement effcé quinquennale.Mais pour autât qu’elle a elle trop griefue,longue, & hautaine par tant d’ans, il a efté ordonné du contentement du peuple,quelle ne teroit plus qu’annuelle, ôctemeftre, auec ce que comme dit Afconius,le peuple Romain auoit en fi grande hayne ce nom tant trille,& teuere,qu’il a efté quelque fois delaiffié vn bon nôbre d’ans, & quelque fois auffi requis par 1a commune l’ayant au parauant reeufépour l’infamië des iuges corrompuz. On dit que Romule créa premièrement les Tribuns des centenieres. Car comme en vn mefme temps toute la cité full diuifee en trois races,qui eftoyent les Lauinenlès,ainfi diéts de fon nom,& les Ta-tientes de Tatm, au regard de la troyfielme les hommes ont elle diéts Lu-ceres de Lucas, qui ell à dire de la forell d’vne franchite,à laquelle plufieurs fuitifs te tranlportans ont efté receuz bourgeoys de la ville neuue, comme dit Plutarche,& corne le témoigné Pline : combien que le furnom loit incertain à l’auis de TiteLiue. Or que les(TriW) races, ayent efté iniques au nombre de trois,le nom le manifefte: & appelloit-on Tribuns ceux qui auoyent authoritélur elles,d’autantqu’ancienftemét on en enuoyoit trois à l’armée des trois races. Quelques vns auffi ont eftimé qu’on lésa appelle (Trihtmosfcelerum)à’autant qu’ils fecouroyéc foudain,fi quelque foisîa République auoit belbin de leur diligéce,veu qu’ils auoyent ta fuperinteden*
- S iij
- p.105R - vue 221/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ce furies ChêuaHcrs,& qu iis tenoyenc quafi le fécond lieu apres le Roy:ou bien de Celer,qui tua Remus, attendu que les anciens ont appelle Celeres ceux que nous appelions Gheualiers. Au demourant Jfconm P.ediams dit: qu'il eft deux gérés de Tribuns de guerredes vus premieremétfont appelles Ruffules,lefquelzont de coutume d’efïre,£iéés parle Gonfu.Leni’armée,_&:. nonpaspar lepeuple^du pouuoirdefqucls,commeditFefrus,Rutile Ruffe ayant eftably vne loy,ils ont efté appelles Rmirales, & depuis Rutules. Les autres font comitiaux, lefquels font eflablis par les affemblees au gouuer-îiemét de la République,en l’abfénce des Confuls^&,quelque fois infiitués fbus les Confuls pour eflreen l’armée comme Chef. L’office defquels onde ceux qui ont la charge de l’armée, eft félon que témoigné Marcel, au lime De-Fart militaire,de retenir au camp Iesfoidats,ies ietter hors pour i’exêfci-ce,de prédre les clefs des portes,de faire quelque fois la ronde, de fé troutter au departemét de froment aux compagnons de guerre,d’en faire l’efTay,de corriger la faufe meflire, de chaflier les fautes par fon authorité félon qu’il fenfuyt:defetrouuer fouuent au premier ranc,d’ouir les côplâintes des cô-pagnôs de guerre,vifiter les malades.Flamin Vofpique aioulfe acecy beaucoup de chofésenla vie d’Aurelian en l’epilire qu’il efcrit à fon vicaire, & j> qui concernent principalement la charge duTribun.Situveux,ditiI,eflre jj Tribun,& fi d’auantagetu veux viure, retreinslaviolence desges deguer-« re,que nul ne rauiffe la poule d’autruy,ny nevédangeleraifin, ny ne batte jj le blé d’autruy,fàns exiger aufïi Phuyle, le fél, ne le boys : qu’il foit content jj delà munition,& qu’il face butin fur l’ennemy, &non paslarrecinsfurles jj prouinciaux,que les harnoisfoyent bien forbiz,aufïi foyent fésballons,les jj fôliers bôs & forts,& que la robbe neuue cafle la vieille, & qu’il ait fa louée jj en fà cemôlure,non pas en braueries,qu’il n’ait chaine, braflélet, ne aneau, jj qu’il étrillé bien fon cheual bien refaid:,qu’ils fentre-leriient quafi comme jj feruiteurs:que les Médecins les penfent fans fàlaire, Se qu’ils ne donner rien jj aux Arufpices,qu’ils foyët pudiques en leurs logis, que les quereîleus foyét jj punis.L’occafion première de créér les Tribus fut la retrairte de la cômune, des Sénateurs faute au mot fâcré, la ou a la pourfuyte de Menenië Agrippa en faifant la paix, il fut dit qu’ils auroyët dedâs la ville des Magiflrats pour la cômune.Par ce moyen le peuple cômençaauoir deux Tribuns des Confuls,Virginius,& T.Vetufius.Etdepuisen-furétaioufléstroisparvne autre feparation durât le Côfulat d’Apius Claudius,&T.Qiiintius.Puisfoii-dain apres cinq autres, Q^Minuce,ôcM.Orace Puluin eflas Côfuîs.Parce moyen la iurifdidion des Tribuns fut fur la cômune Romaine, & parîâfu rét faittes les côditiôs de leur accord , de forte quelle aurait fes facrofainds Magiflrats,par l’ayde defquels on peufl faire îoy contre les Confuls, & que nul des Sénateurs ne pourrait auoir ce Magiftrat. L’authorité des Tribuns print finaleméc fi grand accroiffement, que tout ce qu’ordonnoit îeSenar, eftoit de tât approuué que les Tribuns luydonnoyëc authorité. Orefïoyét ilz arrefléz au porche du lieu ou fé tenoit le Sénat : car il ne leur efloit loifi-
- ble
- p.105V - vue 222/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. 106 ble d’entrer au téple, ny en la cour, 6e leur efioit r apporté tout ce que le Sénat auoit délibéré, afin qu’ilzapprouuafTent tout ce qui leur fembkroit a l’auantage de la Republique,en reboutât le demeurât i leur fantafië,6e lors les decrets du Sénat,qu’ilz auoyét approuué, eftoyét cottéz au dos d’vn T. autremét ils n’eftoyent point emologuéz. Au regard de la puifiance Tribu- c nicië, nous enauons l’auis deLabeo AntiftiëgrandIurilconlulte Lespa-rolles duquel l’ayefcrit toutes telles que ie les aytrouuéen Aulus Gellius.
- „ En l’epiftre(dit il)d’Athée Capiton nous trouuôs elcrit comme Labeo An-„ tiftiëaefiéfort làuantes loix, coutumes, ôe droit ciuil.fMais vnecertaine fAddoex ,, liberté trop grande ôe outrecuidée le troubloit fi fort que du temps d’Au- G.elIiom'
- .. u i mia,atque
- „ puite ia Prince, 6e gouuernant la République , il ne tenoit, ny nepenloit poftdiâio „ rien bon, finon ce qu’es antiquités Romaines il lilbit efrre iufte ôe lâind:. nem> liber Il recite auffi fubfèquemment ce que le mefme Labeo répondit eftat aiour-tas* né par vn huifiieraco'mparoiftre par deuant le Tribun de la commune.
- „ Comme donques(dit il)les Tribuns eu fient enuoyé Gellianus vers luy a la „ requefte d’vne femme pour comparoiftre, & luy repondre, il commanda „ àl’huifiier de retourner, 6e de dire aux Tribuns, qu’ils n’auoyent point dë „ pouuoir de decerner ajournement contre luy,ne contre autre: attendu que „ par lancienne coutume les Tribuns auoyentdroiéldeprinfedecorps, ôe •
- „ non pas d’aiournement.. Etqu aceftecaulëils pouuoyent venir ôe le pren-„ dre, mais qu’ils n auoyent pas puifiance d’aiourner vn ablènt. Ce qu’Aulus Gellius dit elbre elèrit par Varron es liures des choies humaines: lequel Varrô afferme que comme il fuit Triumuir,il fuit aiourné par Portius Tri- tLegoiuif bun de la commune, la ou il n’y comparut point, & qu’eftant Tribun il ne rcproe e* fitonques ajourner homme, lis ont aulfi la puifiance félon que témoigné Plutarche telle que fi le Dictateur efl: prefent,elle eft la lècôde, fi ablènt première, & prelquefèuîe.Il n’eftoitaufiilicite ace Magiftrat fablènteraucun ionr de Rome.Son pouuoir aufiigit plusaempefcherqu’àcontreindre,veu que combien que tous lesiautres collegaux foyent d’vn accord, quoy qu’ils foyentenplus grand nombre, vn lèul toutelfois a plus de pouuoir ne le voulant, ôefoppofant.La puifiance aulfi Tribuniciëaefié le temps palféa Rome marquée d’vne dignité publique, ôe depuis elle obtint le moyen d’ordre iudicial. Et de la vint ce decret du Sénat qu’Augufte Celâr eufi le gouuernemét des coutumes 6e loix, ôe de la puifiance Tribunicieà iamais.
- -Et pourtant fut il di£t par eux Tribun, d’autant qu’il auoit Ion authorité furtroys ordres, furie Patrice,furceluy delà Cheualerie, 6e furlacommu-ne,eftans appelles Tribuns de la commune dc(Tribus)race, d’autant qu’ils eftoyent créés par l’eleëtion des races, ou bien d’autant que le peuple efioic diuiféentroys,lors que la commune fe lêpara des Sénateurs, 6e que de chacune en eftoit créé vn. Au regard des Tribuns du threfor ils ontefté ainfi appelles acaulèqu’ils liuroyentles finances. Lequel threfor le peuple Romain auoit au temple de Saturne.
- LeScribeapnns Ion nom de(Scr^ere)efcrire, exprimant Ion office par
- S iiij
- p.106R - vue 223/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- „ la qualité du vocable. TiteLiue dit au fécond liure depuis la fondation „ de Rome: Si commepar fortune on fifl la le payement aux foldats,&que „ le Scribe affis auecle Roy en mefme parement, prefque vuida beaucoup 3, d’affaires,auquel faddreffoyent communément les gens de guerre. Sce-„ uola craignant de demander,fi c’efloit Porfènna de creinte de Ce decouurir ,, ennecognoiffantleRoy, tua le Scribe pour le Roy, félon que la fortune „ l’addrefTa mal. Probus AEmilius autilrredes Chefs excellensdes nations „ effranges, en la vie d’Agefilae. Et pourtant il fut en main au lieu d’vn Scribe, quiefloit vnechofèbeaucoup plus honorable entre les Gréez qu’entre les Romains. De vrayles Scribes,veu ce qu’ils font entre nous,font tenuz pour mercenaires. Au contraire en Grecenuln’eflreceuàcefl office finon qu’il foit cogneu eflre de bon lieu, de preud’homié, & bonne indu-flrië, d’autant qu’il efl befoin, qu’il foit participant de tous les confeils, cô-i» me dit Cicéron en la cinquiefmeaccufàtion contre Verres :Noz Capitai-» nés apres auoir furmonté les ennemys, & apres auoir bien gouuerné la 33 Republique, ont fait prefent d’vn anneau à leurs Scribes prefent l’affem-blée du peuple. Celuy aufli efl entendu eflre ( afêcretis & epiftolis) fècretaire lequel eforit les fècrets & lettres, comme on voit en Suetone touchant la » vie de Claudius. Mais pardeffus tous le fècretaire Narciffe,&Pallas mai-33 flce des comptes, lefqueis il a de fon bon gré fouffert d’eflre non feulement 33 grandement rémunérés par le decret du Sénat, mais auffi d’eflre honorés des dignités de Quefleurs, & Prêteurs. Flauius auffi Vofpicus dit en la vie 33 deCarin:la viedefquels ClaudeEuflhene(4^z/?o/ix)fècretaire deDiocle-aj tian a eferit à chacun fon liure à part. On l’appelle auffi{Notarïus fecretorum) notaire des fècrets. Ce que témoigné le Vopifque en la vied’Aurelian:Or 33 auint il, ainfi que les chofès Ce mènent de prouidence diuine,qu’en menafi 33 fant vn certain Mnefléeaffranchy, comme aucuns dient, lequel il auoit 33 {pronotdîïofecraomm) pour notaire de fès fècrets, il le fè rendit plus animé. 33 Caffius auffi au premier de fon hifloire: Le pere de vray du requérant l’offi-33 ce a honorablement exercé fous Valentin celuy de Tribun, & de notaire, 33 laquelle dignité efloit lors baillée à hommes excellens, veu qu’il efl cer-jî tain tels eflre éleuz pour le fècret Impérial, auquels on nepeuttrouucr vi-33 cedignedereprehenfion.
- Cancellarius, Chancelier, efl ainfi <Mz(acancello)&\i treillis, ou creneau qui efl vne aile du palais, d’autant que la il exerce fon office au- près du tre-for de l’Empereur,duquel il auoit la charge,ou bié(4 cancello ) félon la lignification par laquelle il lignifie l’efpacetiré delà région Paleflinejâ ouïe fefle desmaifons n’efloit pas en pointe maisenterrace.Cesefpacesdon-ques affis entre les fortereffes auec murailles dreffées d’vn collé & d’autre l'appellent propremét(c4»ce///)carneaux. Ceux donques qui vouloyent reciter au peuple les lettresqu’on auoit enuoyé,montoyent en celle région la furies maifons, &les recitoyent par les carneaux. D’ont il efl auenu en coutume entre quelques fàuans hommes que ceux foyent appellés(G*«-
- celUm)
- p.106V - vue 224/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. 107
- celUr'ujOàmdicïs qui ont aexpoférau peuple les lettres enuoyées du Prin-,, ce.Celar dit en i’vnziefme: Regarde Verre quel nom tu portes: ce que tu as Eut entre les carneaux ncpeut eftre fécret, certes tuas des portes tranfpa-rantes, les cloftures ouuertes. Et combien que tu fermes diligemment tes j, feneftteSj & portes, il eft toutefois neceftaire que tu tedecouures a tout le „ monde. Car fi tu t’arreftes hors, tu n’auras rien amendé en fes regards, & „ fi tu te retires,tu ne peux fuir le regard de ceux qui t’efpiét. Regarde a quoy „ ta voulu mener l’antiquité. Tu es decoüuert detoutes pars, eftant en telle „ clarté. Flauius Vopifcus parlant de la vie de Carin dit:lia éleu,& tenu des arnys ges de bien.Il a fait l’vn de lès Carneliers gouuerneur de la ville: dfont „ on ne làuroit rien penler, ne dire quelque fois plus infâme. -. ....
- Popularesi&Qptimates,Les Amieîeurs dépeuples,& les bons bourgeois font difterens. Car les populaires, comme ditPrifcian, au cinquiefmeliure de i art de grammaire, font ceux qui défendent le peuple, & les bons bour-33 geois ceux qui défendent le Senat.CicerôditpourP.Sextus:II atoufiours 33 eftédeux façons d’hommes en celle ville de ceux qui fe font toufiours 33 eftudiés d’entendre au bien public, & fy portent en grande excellence. 33 Les vns ont voulu fémbler, & eftre populaires, & les autres gardes du 33 Sénat.Ceux eftoyent diefts Populaires,qui vouloyent que tous leurs diéts, 33 &c faidts fuffentaggreables au peuple. Ceux qui fe comportoyent, de for-33 te que leurs auiz femblaffent bons à tout homme de bien, eftoyent tenus 33 pour bons Républicains. Il dit d’auantage au mefme lieu: Ceux font bons 33 bourgeois, qui ne nuyfént, ny ne font de leur nature iniques, ne furieux, 33 neen mauuais mefhage. Etlemefme encores: Ceux qui défirent lerepos 33 honorable, qui eft le plus excellent, & mefmement defirable à tous hom-33 mes fàins, bons,& heureux, font bons bourgeoiz: & ceux qui le font,font 33 eftimés grands hommes, &conféruateursdelacité. Ariftoteaucinquief-33 me des Ethiques: Cela aufti apparoift par la dignité, car tout le monde cô-33 fefiequecefteiufticequiconfifte en diftribution doit eftre félon vnecer-33 taine dignité, laquelle dignité tous nedientpas eftre tout’vne, tellement ,3 que les populaires difént que c’eft la liberté, les riches, l’opulence, ou no-,3 blefîè: & les gens de bien la vertu. Il dit aufti au troyfiefme liure des Politi-,3 ques: Nous auons de coutume dappelîervne puiflance Royale,quand vni ,3 homme féul gouuerne, ayat regard à la commune vtilité.Mais Jâou qiicl-„ ques vns en plus grand nombre que d’vn, ont le gouuernement,c’eftlere-„ gimedes plus gens de bien, d’autant que les plus mettables gouuernent, „ ou bien qu’ils aminiftrent pour le plus grand bien de la République. Il dit 3, d’auantage au quatriefme. Il femble que le deuoir des plus gens de bien eft: 3, de bailler les honneurs félon la vertu, car la fin des prüdéns hommes eft 33 la vertu: & du gouuernement de peu d’hommes les richefTes/& la liberté, 3, de la populaire.Item au mefme liure: A fin que le gouuernement de la Re-33 publique fuft parles plus gens de bien fimplement,moyennant la vertu, 3, &nonpas àlaruïnedes hommes bons, ileft raifonnable qu’elle feule foie
- p.107R - vue 225/480
-
-
-
- ROBERT V ALTVRIN appellée la tref bonne citoyenne.
- Proceres au témoignage de Varron, font les grands delà ville, d’autant qu’ils fontapparans en elle, comme font quelques bouts de poftres es édifices, qui fontappellés(Procew)quafi(Pro£-e^w)Et de la eft faible la tranfla-tionàaucuns, de fortequeceux lont appellés(Proceres)qui font plus que tous autres honnorables. lien eft qui les penfenteftrcdids(Profew)quafi procul à carie) loing de pourriture & de corruption de vice. Et combien que cela conuienne bien aux Princes,mefmemét àcaufo de l’excellence, & bote notable d ont ils doyuét dire doués, ils font touteiFois trompés par l’ignorance des lettres, ny ne penfont pas tant ce qui eft, que ce qui doit dlre.On ne treuue guieres le nombre fingulier de{Proceres)côme en Iuuenal: ^4gno~ feo Proceremi Salue Getuhce: quant au plurier, il eft fort frequent. Tite Liue au troyfiefme liure : Et nos \tdecet Proceres. Lucain au fil au cinquieftne : Fa-ta vocent Procerum.
- Primores font comme les Proceres, ou Primats d’vne ville , ou bien ceux qui entre les autres font de plus grande, 5c de plus digne puiflànce for le peuple, comme dit Tite Liue : Romule fo tranlporte aux( Primores) Primats delà ville.
- Summates font les puiflans: & ainfi en vfo Satyrus en fa Comedië des peftheurs: Summates \irifimpltcesfafh funtganei.Les hommes de grand pou-uoir font deuenus Amples hanteurs de tauernes. Macrobe au premier liure du fonge de Scipion:Mais ils font tant feulement contcns( Summatibus)des plus puiflans,lefquels fouent le vray focret p^r l’interpretation de la fopiëce.
- Sous le nom de Prafist tous les gouuerneurs des villes font appelles, quoy qu’ils foyent Sénateurs. Celuy à bonne raifon eft diél(Pr^)gouuer-neur lequel apres le Prince a le plus grand pouuoir en vneprouince.Dela eft diblle focours principal des gouuerneurs, tout ainfi qu’vn refraichif-foment d’hommes eft dibt tout ce qui foccedeà vn focours. Les gens de guerre aufli qui font ordonnés pour la defenfo d'autres foldats,de ville,ou chafteau, & telles autres chofos fappellent(Pr<e^/iawjfocours ou renfort: Ou bien, comme dit Varron,on appelle(Pra/?ii//«>»)d’autât que hors le cap ilseftoycnten garnifon en quelque lieu pour mieuxafleurerlepaïs, oubié d’autant qu’il eft ordonné pour quelque focours à l’vtilité & folut,toutainfi que le renfort qu’on met en arrieregarde pourfobuenir aux combatans.
- Satrapes ou Satrapa) ou Satrape, eft vn qui eft ordonné gouucrneur de païSi Plutarche.de la vie d’Eumenes: Alors apres laprinfodu Roy Ariara-te, Scauoir fobiuguéla région, il fut ordonné Satrape,c’eft adiré gou-uerneur du pais . Et au premier des Roys. le n’ay rien trouué de mal en toy depuis leiourque tu es venu amoy iufques aceiour, mais tunes pas aggreable aux Satrapes. Retourne t’en donques en paix, 5c que les Satrapes ne fo fâchent plus de te voir.
- Pnnceps, Prince eft vn nom d’ordre, & ainfi appelîé d’autant qu’il prend premier,tout ainfi que Municepsàz ce (\uc(muneracapiat)qçii\ prend
- les
- p.107V - vue 226/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. 108
- les honneurs. Il eft auffi nom de dignité, & auquel git la garde & defenfè audangier de là vie,de la religion, des Aufpices,des puiftances,Magi-ftrats, del’authorité du Sénat, des loix, des meurs anciens, desiugemens de laiurifdition, delà foy,des prouinces, des alliés de l’Empire, de la louenge de l’art militaire, ôe du trefor: & luy faut eftre le protecteur & de-fenféur de ces fi grades chofes. Spartianus parlant de la vie d’Adrian: Alors ,, eftoit la coutume que le Prince cogneuft les caufes, & d’appeller au confeil „ les Sénateurs, & Cheualiers Romains, & de proférer la fénten ce de toutes les deliberations. Caffian au deuxiefme des hiftoires : Tu n’as en rien defi-honnoré le nom dePrince, en gardant fa dignité par l’exercitation de la vertu. Ouide parlant de Romule, & deCefàrau fécond des faites.
- ,j Les cbaftes tu rauis> & Cefarles marié:
- „ la fatniïefor eft tu reçois le mefehanî
- „ Que ceft autre repoulfe, aufti t’efî aggreabls
- „ La Violence, ou les loix fontfous luy florijfantes.
- }) Tu as le nom de maiftre & ceft autre de Prince:
- „ Pemus aiÆi taccufe, aux ennemys Ce far
- j, P ordonne: au ciel ta mis ton pere, ey luy lefien.
- Ietreuuedes excellens Chefs Sc Princes en la Republique auoir fuy le nom àe{Dominm)Seigneur, Sire, ou Maiftre. Scipion de vray ayant ia re-couuré l’Italie ,& l’Efpaigne, encores qu’il euft fubiugué l’Aphrique, 6c chaffé Hannibal, n’a iamais foufFert pour quelque bô heur qu’il euft,qu’on l’appellaft Sire, finon par les Puniques, lefquels il cafta a bonne raifon, & les notad’infamié,quafi comme ennemys de la Republique,à caufé de leur defobeiflance aux bonnes conditions, & pour auoir trop fouuentrô-pu l’accord, fé mettans en liberté fraudulëment. Augufte aufti eftat l’honneur de l’Empire Romain, ne feft iamais foufFert appellçr à perfonned’vn tel nom, comme le témoigné Tertullianenladefenfe contre les nations; Augufte(dit informateur de l’Empire ne vouloir point eftre dict Seigneur, carc’eftvn furnom deDieu.Iecôfeftferay bien que l’Empereur eft Seigneur, mais par vne commune façon de parler. Mais la ou ie ne féray point forcé, ielediray Vif-fëigneur de Dieu. Etcôme Augufte fuïftcenom, ilaindu-bitablement mérité le furnom de pere dupais: lequel tous luy ont baillé par vn foudain & grand conféntement: d’autant qu’il eftoit nom de plus grande affeélion quedepuiftance, afin qu’il feeuft qu’à luy eftoit liurée la puiflance du pais, laquelle comme auifànt aux enfans eft la plus modefte. Au regard de la différence d’entre le pere & le Seigneur,ce Mitio de Teren-# cemontrabien quelle elle eft quandil dit: C’eft fait en pere d’accoutumer ic fils depl ustoft bien faire defoy-mefme, qued’vnecreintea’autruy . En cela eft different le pere du Seigneur.
- Dux, Chef,eft dit z(Ducendo) d’autant qu’il guy de, car le Chef doit eftre plus fàgequeles autres pour conduire l’armée, la ou il marchera quelque part, & lors qu’il viendra à quelque mauuais paflage, contempler àpart
- p.108R - vue 227/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- foy la nature du lieu de toutes pars,& fubfequemment demander les plus anciens de fes compagnies, hl en a, & fenquerirquel conlcil il faudroit prendre fi les enncmys leschargeoyent en ce pacage,de front,ou de flancs, oubié fur la queue, & fri feroit meilleur de paflèr outre, ou bic de rebrouf-lèr fur lès erres: & la ou il faudra aflèoir camp, combien d’efpace il deura prendre pour le fort, quelle oportunité il y aura d’eaus, de fourrages,& de boys, quel expédient de viures, en quel temps il faudra combatre, & dref fer fes gens en bataille, leur bailler renfort, faire remontrances braues,les r’affeurereftans étonnés de peur, & den’eftrepas feulement preuz &har~ dizenparolles,mais auflide faict.Etdeuralaou il ferabefoin manier les armes, marcher deuant les enfeignes,làuoir aller, 2c venir au fort de la bataille, & tenir fes entreprinfes couuertes,les taire, dilîimuler,drelTer embûches, & fen donner garde, preuenir la fantafië de l’ennemy, lâuoir par épiés & decouurirou font fes forces, quant grandes, & de quelles armes il fayde, car cela eft de bien grande confequencc. Puis quel eft le nombre des gens fins armes, quel celuy des armézàlalegere, quel bagage, quelle force il a pour fa garde, & de finalement commander aux fôldats de ne fuiurepas tant les dids que les faids,&non feulement la difeipline, mais aufliles exemples. Laquelle façon de diligence fera par-auanture àbon-neraifôntrouuéebonne,toutes les fois quon fen pourra ayder. Mais fi la nature du lieu fe change, fil fe r encontre vnemontaigne, ou qu’vne ri-uiere donne empefehement, fil eft aufli arrefté pour les cotaus, forefts, ou autre mal’aifr nce, la nature du péril eminen t changera la façon de faire de l’ennemy, &lors on combattrahores a bataille rengée,hores en pointe, maintenant auec le fecours, autre-fois auec la légion. Outre-plus il faut voir& fauoir de quel heur on doit commencer le combat, & ne défaillir point à la fortune qui foffre:& doityauifer quand par cas elle fiofire. Il faut finalement qu’vn Chefait en fon entendement que rien ne doit eftre deprifé en la guerre, nyn’eft dit fins caufe, que la mered’vn couard n a pas coutume de plourer. l’appelle donques ceux Capitaines qui ont toutes ces chofes en mémoire, & que l’experience & vfrgea fait figes: & les préféré aux autres,pourueu qu’ils foyent créés du peuple,& non des gés de guerre.
- Entend par cela qui fenfuitladifFerécede(Coweî,Soci«s,Sod4/h, ç$rCo/-lega)2cleurs conuenances.Nous deuons appeIler(Cow«)comme dit Vl-pian, & Labeo, celuy qui accompagne & fuit, & qui eft deftiné pour hanter quelqu’vn,& le fuiure.Les moindres auffi ont compagnie & Cheficom „• médit Cicéron: Il ne feftpas oflert{ comïtem) pour compagnon, mai s(du-„ cew) pour guide, & autre part: Nyn’euffe peu lors eftre Prince pour le faiut „ files autres euflent voulueftre(c0wi/er)compagnons. Au regardde(Socifû) iln’eftpas moindre, mais égal. Et pourtant toutes les fois que les Chefs parlent aux gens de guerre pour auoir la bonne grâce, ils les appellent (Commiktones)compagnons foldats. Ils communiquent leur condition, & fort auec eux, carie Chefn’eft pas compagnon fôldat:ouy bien les gens
- p.108V - vue 228/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. i0.
- de guerre entre eux, comme faitEneas en Virgile^Soc^jô Compagnons; Et melme l’autheurparlant en fa perlonne d’Achemenides : Cornes infoeltcis )> V'b'ft3 Suyuant le malheureux Vlylfes. Et de rechef: Vno gradmr comitatus ^chate,il marche fuyui du feul Achates.Ny n’eut paslàgemét dit d’AEneas qu’il fuyuoit Achates, ne Vlyflës Achemcnides.il dit tomcf-fo\s:^Arma jj La compagnie apprefte les armes, & les Dieux . Et
- jj derechef:Sacra Dec/que tibicommendat Troiapenates.Hos cape fatomrn cotrit-» tes.Troy terecommende le làn&uaire, &: les Dieux Domeftiques . Pren j» les pour la fuyte de tes deftinées. Eftoyent donques les Dieux delà fuite des Gréez , & d’AEneas, ou plus toft guydes ? De vray ils eftoyent jj parla côfeflion tat d’Aeneas que des Dieux melmes,de lafliite. Car au pre-jj.mier liure AEneas dit :1e fuis ceiufte AEneas, quiemmeineaueemoypar mer, les Dieux domeftiques vaincuz parl’ennemy. Etautroylielrnerles Dieux diét,Nous auôs fuyui tes armes apres la ruine de Troy, & auos na-uigué fous toy les vagues de la mer . Sous toy, eft a dire fous ta guide* & t’auons fuyui, c’eft a dire auons elle de ta lèquele. Il faut dire le fèm-blable des Gréez , & de leurs Dieux . Aufli faut il dire de la Sybille & d’AEneas, combien que hores l’vn , puis l’autre eftoyent la guyde,oii bien la fuyte, par-ce que la Sybille fuyuoit la voîunté d’AEneas,& feft monftréquafi comme là lèruante, & pourtant eftoit elle en fa fuyte. Mais aufli eftoit elle dide guy de, d’autant quelle luy montroit la voye,& qu’elle luy declaroit la choie qu’il ne làuoit pas, combien que quelque fois nous difons(Cornes)pour compagnon , comme Cicéron es liures de Rhétorique parlant d’vn palfant chemin,lequel quelque-fois le l.euant auant-iour, appella (dit il) Comitem, Ion compagnon. Et apres en auoir jj louuent parlé au par-auant du mefme, il dit: Donques il chemina pour jj aller en vn certain marché, & portant quelques deniers. Comitatus e)?,c’eft à dire il a fuyui. Parquoy Prifcian en la préfacé de grammaire, amonnefté* &amonneftantIes autres, digne toutef-fois de l’eftrebeaucoup, vlânt de jj ces parolles enuers lulian:lete voue donques ceftœuure qui es Prince de jj toute eloquéee, a lin qu a l’ayde de Dieu la gloire d’elle croiffe de plus grad jj renommée('fÉ,co»îite)par ta compagnie,quali comme de quelque foleih Mais que làuroit on dire déplus grande refuerië,& beftife que d’appel-lerceluy compagnon, que tu appellas Soleil. U y a d’auantage vne autre différence entre Cornes, & Socius,d’autant que Cornes celuy quiconque loit qui fuit vn autre pour guyde, Sc Socius eft le plus louuent compagnon es affaires deconléquence, &es choies lèrieules,& lubiedes au vouloir de fortune. Celar en lés commentaires: Et pourtat Androfthenés Prêteur de Thelfahë délirant eftrc plus to ft(Comes) de la fuite de Pôpée, que d’eftre(Sod^)compagnon de Celar esauerlitéz,affembla dans la ville toute la multitude des lerfz , & libres . Mais celle différence eft plus ma* nifefte entre Socius & Sodaîis : car Sodahs eft proprement compagnon es chbfes légères & fouuentef fois de plailir * Quintilian j De quelle
- T
- p.109R - vue 229/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- „ patience Ibuffrirois tu finalement, fi i’eulfeprins vne façon de vie,com-3) me vn jeune homme fubied à fon plailïr, mefines à caufe des grandes ri-„ chelfes félon l’âge ou la fortune, & qu’eftant en liberté & riche ie fifle des „banquetz à la mi-nuit, & des ieux duran.s toute la nuit en appellant vn J3 grand nombre(Sodalwm)dc compagnons. M. Tulle : le repoferay fobre-ment(c»w jôdahbtts)auecmes compagnons. Les compagnies ont efté in-j} ftituées ordonnées moy eftantQuefteur. Et de rechef en vn autre palfa-ge: le dy que Plance de Latran eft vn homme gracieux,& qui a eu en là de-mande plufieurs gracieux Iuyportans affe&ion.Lelquels fi tu appelles So~ dates, tu offenfe d vn no vicieux vne amytié profitable. Au regard de Caius il dit que ceux qui font Sodalesy font dvn mefine college,Iefquels les Gréez appellentffi/MoVîjduquel véritablement Marc Antoynen’eftpointdifcor-dant quand il appelle le QuefteurNorbanefon(Sodahs) collegal.Oreft-il que fous le nom de Collega,font ceux contenus qui font d’vne mefine puifi fàncc.'Quant a Comis, c’eft vn homme bening èc ciuil, qui complaift aux autres de bon cœur.
- Les Chiliarches font ceux qui ont la charge de mille hommes. Quinte „ Curie au quatrième des hiftoires: Apres ces choies ainfi ordonnées, il vint a iulques â la région appellée Satrapone,fertile & abondante en toutes cho-sifes ôc vi£tuaillcs,lâouilfitgrandlêiour, & afin que par le repos il ne ren-ss dift les cœurs lâches, il ordonna des iuges & bailla des pris â ceux qui vain-ss croyent en l’exercicemilitaire. Et comme il y en euft neuf iugés fort preuz „ pour la conduite de mille hommes on les appelloit Chiliarches, eftans ,, lors premièrement les bandes diftribuées en ce nombre : car au par-auant ,, les cohortes n’eftoyent quedecinqcentz hommes, nynauoyent fait les „ prouelfes dehardielfe.
- Celuy eftoit Centurion , comme dit Tite Liue au lêtiefme liurc qui au-iour-d’huy eft appelle Vrïm'ipdus, & comme dit Feftus,on l’appelloit ancien nement( Qenmrïorms)did â caufe de Cent, ainfi que dit Varro, d’autant que fon nombre eft iuftement de cent Quintilianau premierliure ss des inftitutions:On a longuement oblêrué que les conlbnantes n’eftoyent „ point alpirées, comme en Graccus & Triumpus, & puis en peu de temps jj onenapartrop vie,commed}oronœ}Gkenturtones qui (ont encores en au-ss cunes intitulations.
- Les foldats fuccenturiés ne fontpas ceux qui font delà première Centurie mais delà fécondé, â fin que fi la première defaut, ceux cy que nous auons diteftrefublèquensdonnentlècours auxpremiérs.Etpour-tanteft il dit Succenturiépourembucher, quaiî comme ayans armes de furprinfe, comme dit Terence en fon Eunuche:Iefèraypourlefecours en embûche.
- Les Decurions ou dizeniérs font ceux qui ont la charge de dix cheua-Iiers. Les aucuns les dient eftre ainfi di&s, d’autant qu’au commencement qu’on peuploit nouuelles villes, la dixielme partie de ceux qui y eftoyét menez,auoyét de coutume d’eftre entoilés pour le côlèil.Les autres
- les
- p.109V - vue 230/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE VIII. no
- les dientauoirefiéainfi appelles, a autant qu’ils font de l'ordre de la cour, pour le deuoir de laquelle ils fèruoyent.
- Les Decuriës ontedé didinétes de plufieurs noms de Tribuns Sciuges.
- En à celle cauie on appelloit Neuueniérs ceux qui entre tous autres edoyët éleuzàpart pour la garde des decrets parles voix desalTemblées. Orelloit cell ordre d’auantage diuifé d’vne braue appellation de noms,d’autant que l’vn fê difoit Neuueniér, l’autre éleu, ou Tribun.
- Quaterniones. Les Quaternions ou quarteniérs edoyentainfi appeliez à caulê du nombre de quatre foldats qu’ils auoyent lous leur charge, d’ont jj il ed mention es actes des Apodres, le liurant a quatre Quarteniérs de lol-dats pour le garder.
- Mîles,l’homme deguerreaedéainfi dit,àcaufè que premièrement Ro-mule fît vn choys de mille hommes du peuple, & les appella ainfi, comme dit Eutrope au premier liure des hidoires. Varron les penlê ainlî edre appelles d’autant que Ialegion au commencemetedoit de troys mille hommes, 5c que chacune race des Taciélès,Rauinenfès, 5c Lucerins enuoyoyét mille hommes. Vulpian au Iudinian vingtfètiefme liure dit, que Miles aedé dit quafi miliefme,c’ed adiré tout homme qui ed du nombre de mille. Combien qu’il ed des legides denodretemps ignorans la langue Latine qui le penlènt edre diëtcomme le plus preux de mille. Les autres entre les fuffifims efcriuains comme Helius (à wo/Zicie) de la molleffe par contraire fêns, d’autant qu’il ne porte rien de mol, mais plus tod rude, tout ainfî que nous appelions ieu, ce,ouiIn’y a point de ieu, ou bien d’vn mot Grec qui fignifie durté.D’ont Maro dit:
- ” D’vne race endurai aux fleuues no£ enfans
- » Laijfons, qui[’endurci ffent aux glaces & aux vagues.
- Les autres ledientedre dit,(à multïtudïne)you bien{àmalo arcendo)d’a.\i~ tant qu’il repoulfe le mal, 5c quc(mihtia)\3. guerre eddiéte quafîf (malitia) fDeieo malice, veu quec’ed fâ charge derepoulfêr par fâ multitude le mal, & la malitiam. guerre des ennemys,& de defendre les parties de la puidance ciuile 5c fês droi&s, a fin qu’ils ne facent aucun mal à leurs citoyens. Par ce moyen celuy n’ed pas feulement homme de guerre qui demeure en bataille, 5c defend l’aile dextre,ou fênedre, mais auffi celuy qui garde les portes, 5c qui ed en garnifon peu perilleufê 5c noyfiue, 5c qui fait le guet ayant le regard fur les munitions. Et combien que ce fôyent charges fans péril, elles font toutef fois réputées comme de guerre. Il ne faut pas auffi oublier que tous ceux qui edoyent en l’armée tant à pié qu’à cheual,ont edé par les anciens appelîés fans differéce(wi/m)gens de guerre, quelque foisproferas le mot cômunémct.Côbien que les gés de chenal n’edoyët pas fêulemét plus quegësdeguerre,maisencoresauoyëtd’auâtagele degré 5c honeurdeche ualerië. D’ont la preuue ed, que nous appelions milites gens de guerre. Cela n’ed pas obfèrué entre les Françoys:car on n’employe pas guéres dûment fis gens de guerre à tels actes, auffi ceux qui ne font pas exercice fort hon-
- Tij
- p.110R - vue 231/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- ROBERT VALTVRIN
- nefte comme ceux qui gardent les prifonniers, & qui les conduifêntà la mort. Valereauneufiefineliure: Cneus Carboneft bien infâme félon les annales Latines, lequel mené a la mort parle commandement de Pompée en Sicile à fontroyfiefme Confuîat pria humblement &auec larmes(j\<f,/i-„ relies gardes qu’ils luy permirent aller à la fêlle auant que mourir, afin „ qu’il prolongeaitfi vie. D’ont eft venuleprouerbe, qu’vnemefine chayne „ \\ç,{mihtem)\z fêrgent, 6e le criminel. Parquoy nous voyons eftre commun
- prefque partout que(ww/w)fignifie l’homme de pié, 6e que le nom de che-ualier eft hon norable.
- Tutmtltuarij milites, gens de guerre îeuéz à la hafte font ainfi diéts du tumulte, c’eftàdireàcaufe de la guerre ou Italique, ou Gallique,lors que le aeril eft proche 6e foudain, 6e que la guerre eft par furprinfê,de force que . e loy fir, ne le temps d’y auifèr n’y eft pas, pour les faire tous iurer particulièrement,comme il auint entre les Fabins lors que le Prince Patré,ou bien le Conful entreau temple, 6e prendfenfêignedifânt : Celuy me fuiue qui ayme le fàlut de la Republique. Ce ne font pas gens leués, mais tenus pour gens de guerre, la ou laneceftité force les prendre pour foldats, 6e que les propres forces n’ypeuuent fournir: defquels parle Salufte.Que nul fol-dat, ny autre receu pour foldat, 6e outre ceux cy autre part tous les leués 6e Centurions.
- ^Auxihares, font les alliés des Romains de nations eftra.nges, St font •{Non ex-ainfi appelles du vocable Grec-que nous appelions augmentation des Pr,“‘c chofes naifïantes.
- G-æcum! Sacramento rcgati, font ceux qui font en pleine ordonnance, 6e qui y fsr-foits uoyentl’efpacede vingt &cinqans,iurans àlaRepubliquedene reuenir finon par le mandement du Confùl apres auoir accomply leur fèruice,c’eft adiré le temps de leur guerre.
- Nous liions dedans Cefar que les Gauloys ont eu vne autre façon d’homes de guerre à la foudejefquels ils appellent Soldats, 6e ne fontauiour-d’huy la ny autre part.Defquels la condition eftoit telle^qu’ils prendroyent toute façon d’auantureauec ceuxauec lefquels ils auoyent voué amytié, & qu’a la fin ils votidroyent mourir, ny nepourroyent plus fè fouffrir vi-ureapres leurtrefpas, 6e que fil ne leur auenoit mourir autrement, ils fe tueroyenteux mefmes de leur propre main. C’eft vne eftrange façon de guerre côtraire à noz temps, ny ne l’eft trouué homme de leur nombre par longs fiecles quirefufaftle faire.
- Mercenarij,les mercenaires,ou foldats font dicts à caufè de la foude, corne furent ceux que l’an cinq cents quarante depuis l’édification de Rome, les Scipions freres menans la guerre en Efpagne SemprogneGracche, Se Fabius Maximus Confiais attirèrent à eux d’entre les Celcîberes de l’alliance des ennemys, les folicitans à force a argent.Auquel temps commencèrent premièrement les bandes des nations effranges eftre enfarinée Romaine. De vray, comme dit Tite Liue,il n’y eut rien fait mémorable ea
- Efpagne
- \h&is
- p.110V - vue 232/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. m
- Efpagnefinon queles Chefs Romains attirèrent a eux la ieunefledesCeî-tiberes àmefrne fbude qu’ils auoyent fous les Carthaginoys, d’ont ils en enuoyerentplus de troys cents des plus nobles Efpagnolz de lâen Italie pourfoulagerlescôpagnôsdegoerrequi eftoyëcaufècoursd’Anmbal.Celâ, tat fèulemët fut pour cefte année la digne de mémoire en l’Efpagne que les Romains n’ont eu que lors, home de fonde en leur cap auat les Celtiberes.
- Les Cheualiers ont efté ainfi diéts, d’autant que quand ils alioyent en ambaffade on les menoit aux defpés de la commune, ou bien fil falloir aller à la guerre : a celle fin qu’ils fuyuiflent à cheual d’vne façô militaire plus noble, & plus honorable le Roy, Se le Capitaine general, allant non pas à ,3 piécômelereftedu menu peuple. TiteLiue: Et apres qu’il eut tenu cepro-„ pos entre les enfeignesjil fètranfporte foudain aux gens de chenal.Or fus a ieunesgésfaites au-io.ur-dhuy plusgrâd prouefifequelesgensdepié, puis » que vous elles en plus grand honneur Se dignité. le trouueauffi que le nô de ceus qui eftoyent enrollés pour gës de cheual a efté fbuuent changé: car anciénemet fous Romule & fous les Roys ils ontefté appelles(Celeres) che-uaus légers a caulè de leur vitefle, ou bié de Celerleur Capitaine qu’on dit auoir tué Remus: pour la recompéfè dequoy iî.merita d’eftre fait Tribü des gens de guerre par Romule, qui furent iufques:au nombre de troys cents que Romule auoit pour Ion garde corps tant en paix, qu’en guerre, & lef-quels depuis furent didts Flexumenes,&depuisTroffules,commeilseuf-fentprins la ville de Troffule an deçà des Valfins fans aucun’ayde de gens de pié:duquel nom l’appellation a duréoutre le temps de Gracchus.lunius lequel pourfon amytiéaeftédepuis diéfc Gracchianeapar-apreslaiftfé par « eferit ces parolîes. Entât que touche l’ordre des gés de cheual, on les appel-j) loitau par-auât Troffules, & au-iour-d’huy Cheualiers,& pourtâtfache il 33 à plufieurs d’eftre appellésTrofluies,d’autât qu’ils n’entédét pas que vaut le nô de Trofiule.Mais en quel hôneur l’ordre ou degré de Cheualerië ait efté anciénemet,M.T.Cicerô le môtre enl’oraifô aux iugespour Planciëfte voy (dit il)que c’eft que ie diray,ceftuy cy eft de race Confulaire,& ceft autre de 33 Pretoriéne, le voy le demourâteftre de l’ordre des Cheualiers. Ils font tous 33 fms reproches, ils font tous egaîemét gens de bien & entiers.Si faut-il tou-33 tef fois garder l’ordre, & que la race Pretorianecedeâla Confuîaire,ny ne 33 debate aüec la Pretoriane l’ordre de Cheuaîerié.Encores en autre paftage: 33 Et depuis eftât de l’ordre des Cheualiers,il a côfermé fôn nôen fbn Confu 33 îat durant la guerre de Catelin,fe renommant cftre defeendu de ceft ordre3 33 au temps que ce troyfiefme corps a efté eftably Se créé en la Republique,
- 33 a l’ordre de Cheualerië cômécé eftre ioint au Sénat, & au peuple Romain.
- Deffhltor, c’eft à dire qui d’vn cheual fe tranfporteâ l’autre. Tite Liuc au 3, dcuficime Jiure delà fêcôde guerre Punique: Afin que non tous les Numi 33 desqui lot ordônéz à l’aile dextre,mais a ceux aufquelsmenâsdeus cheuaus 33 a la manière de Defulteurs, la coutume eftoit de fauter armés d’vn cheual 33 tas à vn frais bie fouuët en vn rude côbat-.tât grade eftoit leur legereté, & la
- T iij
- p.111R - vue 233/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- docilité de leurs chenaux tant grande, veu qu’ainfî dreffés ils farreftoyent.
- Procurfatores, les auantcoureurs font di6ts aprocurfando. Tite Liue au neufiefrne liure delà deuxiefme guerre Punique: Il enuoya les armés à la légère au fecours,par lefquels commelecombatcommencé par(Procurfato-relies auatcoureurseuft eftédelaiffé, il ordonne a Lclius de faire vne charge dvne embûche auec les gens de chenal.
- Pedïtes, piétons font ainfi di&s par ce qu’ils n’alloyent pas à cheual, defquels ie treuue le nom auoir tant feulement efté varié vne fois par Iphicrate l’Athénien: lequel a fait beaucoup d’inuentions en fart militaire, & a amendé beaucoup de chofès. lia de vray changé les armes des gens de pie, & comme au parauantluy& les Capitaines vfàffent de grans pauoys,de pointons cours, efpées petittes,ila au contraire fait{Peltam)\t bouclier à croiffant de lune, pour boucliers ronds, duquelles gens de pic ont depuis efté appelles Peltaftes a fin qu’ils fuffent plus promptz à fe manier, & aux combats.
- ^Accenfus, comme Quinte Afconin le dit, eft vn nom d’ordre, & de dignité de guerre, comme auiourd’huy on dit Prince, & Corniculaire. Caton les appelle aminiftrateurs. Varron : Ceux font dâdcz^yiccenjt qui fui-uentlecamp, comme font les Confùls,& Prêteurs, d’autant qu’ils font fouuent appelléz aux affaires neceffaires,quafi( ^Accerfiti )appellés, lefquels auiourd’huy nous appelions députez. Ou bien ceux eftoyent didz(Ac-ce»/) lefquels eftoyent fubrogéz aux places des morts, & eftoyent ainfî ap-pellés d’autant qu’ils eftoyent enrollés.
- t^Afcriptitpj eftoyent di<fts comme gens qu’on enrolloit pour remplit les légions, lefquels aufti ils appelloyent Accenfcs, d’autant qu’ils eftoyent enrollés au nombre des légions: ou bien d’autant qu anciennement eftans fins armes on les enrolloit pour hommes equippés, pour fucceder a la place,laou quelqu’vn mouroit.
- Leuis armaturœfine Eues, les armez a la légère eftoyent, côme le témoigné Tite. Liue au huitiefme, ceux qui portoyent fêulemét vn pointô & l’cfpée.
- Expediti, & Impediti, les nuds, ôc les armés tirent leur dénomination d’vne mefme choie,c’eft à fàuoir de gens de guerre eftans à deiiure,ou bien chargés. Sifènna au troyftefme liure des hiftoires, il arme les nuds, lefquels chargés d’armes 3Expedià\cs nuds mirent a mort fans aucune offenfèdes leurs. Ou bien les gens de guerre font diéts Expeditï, £7* Impediti, d’autant qu’vn foîdat, & ccmbatant doit cftre hors de toute folicitude, &fàntafië pour fonmefnage, &eftreempefché,& obligé.
- Ferentarij font ceux qui font armez a la legérepour combatre,comme de fonde, pierre, efpée, & aars, & de ces armes qu’on lance, & qu’on ne « retient point à la,main. Salufte en fon Catilinaire : Mais apres que les j> approches furent telles que les (Ferentaires)gens de ietpeurent combat-jjtre,alors ils viennent les vns contre les autres a grands criz, & enfèignes jj déployées, <Sc abandonnans les dars ils viennent aux efpées. Varro les
- penfe
- p.111V - vue 234/480
-
-
-
- u±
- >}
- 3)
- 33
- 33
- 3)
- 33
- 3)
- 33
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII.
- penfe eftre diéts de (ferre) porterrmais auffi à Ton témoignage les gës de che-ual ont efté dicls Ferëtaires qui auoyent les mefrnes armes qu’on dit, comme le dard : & dit auoir veu celle maniéré de gës de cheual peinélz en l’ancien temple d’Aefculapius,lefquels auoyent le nom efcrit de Ferentaires. Cato les a appelle Referentaires,d'autant qu’ils fourniftoyent aux combat-tans ballons,& breuuage.
- Quelques autheurs de bônc ellime ont témoigné,que les Pigmées habitas les môtagnesde l’Indië,&aufquels l’Occean eftprochainfontdefipe-titteRature,qu’ils n’excedentpoint vne coudée de hauteur,lefquelstoutef-fois font gës de guerre:car on dit qu’ilz ont la guerre continuelle contre les grues,equippés d’armes auec montures de belliers,& de chieures. IuucnaL Aux Thraciens oyféauxfiubits, & nué bruyante Le Beihqueus Pygmée accourt petitement Armé,& puisfoudain de force à l’ennemy Inégal,py rauy en ïair. lafiere Grué L’emporte d ferres courbes, gy fi c’en no^païs Auenirtu voyais,de ris t éclaterais.
- Mais quoy que là fouuentfi dreffint tels combats,
- Nul toutef-fois fen rit,veu que toute l’armée N’a plus d’vn pie de haut.
- Arimafpes,c’eft vne façon d’homes en la mer Pontiquc, auec vn œil au mylieu du frôt,menans côtinuellë guerre auec les griphons gardans I’or,& leÉpielz on dit par cômun bruit auoir fuiuy le party & enfèignes de Pôpée cotre Cefar es campagnes Philippines defqueîs Lucain dit au troifiefme. Là les Sidoniens, gy d’or hé trouffant Ses cheuewg, l’Arimafie.
- Les A mazon.es lot femmes de Scÿthie fort belliquéufès,lefquelles par la defaitte de leurs maris, & ayans parla acquis la paix prennét la compagnie de leurs voyfins, a fin que la race ne faille, tuans les malles qui en nailfent, & exercitent les filles en leurs mefrnes coutumes, non pas en oylîüeté ne à filler comme les autres femmes,mais aux armes,cheuaux,& chalfes, & leur brullent d’enfance la mammelle dextre, à fin quelle n’cmpefohe le traid de l’arc.Et pourtant les Grecs les ont appelle Amazones,d’autât qu’elles n’ont point de mammelles. Curce au quatriefme liure: Les Amazones n’ont pas tout le corps veftu,carla partie gauche eft nuë,& le demourât couuert. Elles ne trouiTent pas toutel-fois leurs robbes, car elles pédent iufques au def-fousdu genoil,&eft l’vne de leurs mamelles gardée entière pour en allai-der les filles.La dextre leur eft bruflée afin d’enfoncer plus aifémet lesarez, & quelles lancent les dars.-car comme dit le Poëte:
- Les AmazonespQulfint gy combattent en armes Peintes.
- Argyrafpides font gens de guerre ainfi appclléz à caufo des armes argentées, lefquelz ont hanté la guerre fous Alexandre. Orofius au troifiefme des
- T iiij
- p.112R - vue 235/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- „hilloyres:Parqtioyparla derniere deliberation il demande pourfêcours les ,, Argyralpides,ainfi dids à caufè de leurs armes argentées,c’ell a dire les fol-,, dats qui auoyentellé fous la charge d’Alexadreàlâ guerre.Iullin en l’Epi-,, tome deTrogus Pompeius au douziefme:Pour à laquelle gloyrc faire qua-33 drer les paremens de l'armée, il fit argenter harnoys des cheuaus, & les ar-33 mes des gens de guerre, & appella fon armée Argyralpides àcaufe des bou-„ cliers argentés. Tite Liue au trente-lêtielme : Ala mefme partie la bande 33 Royale eftant quelque peu rompue, lclquelz on appelloit Argyralpidesà ,, caufe des armes argentées.
- Capte cewjfjelloyent les gens de guerre appelles, lelquels n’eftoyent, ou bien peu taxés.Ceux cy de vray n’elloyét éieuz à la guerre,finon qu en vne leuée preflante,& es affaires dangereus de la Republique,à faute de icuncs gcns,aulquelz on bailloit armes aus delpens de la Republique, & non pas pour la valeur de leurs biés, &: qui toutef fois ont e£bé appelles duplusauâ-tageus nom de (Proletarij) engendreursà caulè du deuoir& office de faire génération. Et combien qu’ils ne feeuffent donner grand ayde à la République pour la pauureté de leurs biens, ils peuployent touteffois la cité par génération.On treuue par eforit que C.Marin a elle le premier qui les a le-uéà la guerre de Dannemarch comme aucuns dient,ou plus toft à la guerre Iugurthine,ainfi que dit Salufle, veu qu’il n’eft point de memoyre qu’il ait efté au par-auant fait.
- Cataphratti équités, Les gens de cheual bardés, font ceux qui font armés de toutes pièces auec cheuaux bardés. Tite Liue au trentecinqiefme : Ceft Si ambaffadeur donques d’Antiochus menteur comme font ceux que les ri-” cheffes Royales entretiennét,a r’emply la terre & la mer de parolles vaines, ” corne qu’vne innumerable force de cheuaus paffoit en Europe par l’Hel-” lcfponte.Vne partie defquelzefloitequippéede cuyraffes, qu’ilz appellent ” Cataphrattes. Item au vingt-fètielmejl acouuert l’aile dextredu batail-M Ion Macédonien quinze cents Galathes, aufquelz il a aiouflé trois mille ” hommes de pié hailecretés qu’ils appellent Cataphrattes.
- Les Gelones,corne dit Pompone Mêla au deufiefme hure des Côfuls,fç couuroyét du cuyr des telles des ennemys,& les cheuaus du relie du corps.
- Cerna») font dids(<à Cemf)c’efl à dire ges equippéz,& armés d’vne petit-i} te manière de boucliers.Tite Liue au vingt cinqielme Iiure:Il affembla des a petits vaiffeaux en vn haure fecret de la colle d’Argos, lefquelz on équiper pa d’hommes arméz à la légère la plus part Cetréz auec fondes, &c dars, & « autre façon d armes legeres.&luy encoresau mefme lieu. Que les Cetréz i, farrelleroyent près au combat de tant que la largeur de la vallée le pourroic « portera celle fin qu’ilz en tiraffentplus aifément les leurs a leur fuyte entre « les efpaces de leurs rancs.
- P/toijComme dit Varro,ont elle ainfi dids d’autât qu’ils combatoyent au commencement de iauelocs : mais apres le changemét d’armes ils n’eurent plus de bruic.Ouide au troifiefme des Faftes.
- pomule
- p.112V - vue 236/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. n* )} Romulepar apres a party les cent pères
- En dix ordres,& a cr^ dix Pointonniers )} Autant auo'tt le prince, autant le Pilane
- }} De corpsJefjuel^ efhyent montés d’vn bon chenal.
- Les foîdats Allègres, &armézalaIegéreonteftédiéfoVelites, de volter loudainemét comme le témoigné Orofiusau quatriefme liuredeshiftoy-res,ou bien dejSaMa/i,lancer.Etauoyentvnerondelle detroyspiéz, & ala dextre des pointons d’ont ils combattent à ict, & lômceinéts d’vne epée Elpagnole.Ilz eftoyent en croupe des gens de cheual auec leurs armes, &: donnoyent de grands empefehemensaux ennemyseftans à pie continuellement a collé des hommes de cheual,qui les auoyent porté en croupe durant qu’ils combatoyent. Et fil leur falloir combatte main a main,ils com-batoyent à l’epée prenans a gauche les pointons. On dit que leCentenier Q^N euius inuenta premièrement de méfier les gens de pie auec ceux de cheual en celle guerre, d’ont le Capitaine general Fuluius Flaccus alliegea la tref noble & puilTante ville de Capoue.
- On appelle les gens de gucnc(velatos)qui font veftuz & fans armes, lel-quelsfuyuoyent l’armée poureftrefubftituéz aux places des morts.
- Ceux ont efté diéts pylônes, lelquelz apres la perte de la bataille des Canes ellansiufques au nombre de huit mille, & ferfs foffrirent volun.taire-ment à la guerre. Et pour autant qu’ils le firent voluntairement ils furent appellézfFô/cwerjvoluntaires.
- Ceux ont elle appeIIés(Tir«//) defendeurs d’autant qu’ils défendirent le païs,d’ont effc venu le furnom Titus. Au demeurât Numa Pompilius elcri-uant des habits Pontificaus, dit que Tira/r^eftoitvn manteau duquel les Prélats couuroyent leurs telles venans aux làcrifices,comme dit Virgile: Qouurans d’habit Troyen no Are Chef à tautel.
- Ceux font appellés(Ror4^)lefquelz arméz à la légère commençoyent la bataille:ainfi diéts, d’autant qu’ils marchoyent auant les arméz à l’auanta-ge,tout ainfi que la rofée auant la pluye.
- Ceux eftoyent âppcllês(Benefciar'tj) lelquels n’elloyent point fubieélz a quelquel charges :tout ainfi qu’au contraire ceux eftoyent diéls Mumfi-ques,qui n’eftoyét pas exempts,& qui failoyent les charges en la Republi-que.Ou bien les Bénéficiaires font vne maniéré de gens de guerre ainfi appelles,d’autant qu’ils font erigéz aux honneurs par les Tribuns,comme dit Vegece.Ce qu’aulli fe conferme par Celàr en fes commentaires, duquel les 35 parolles font telles : Ceux cy eftoyent iulques au nombre de quarante cinq 33 mille,d’ont il y en auoit enuiron deux mille de ceux des ordonnances, lefi quelz eftans de (Bénéficiants) rémunérés es armées precedentes, eftoyent elpars par toute l’armée.
- Dupliciartj)doubles payes, ont efté ainfi appelles, comme dit Varro,auf-quels par l’ordonnance on liuroit double portion de viures à caufe de leur prouefle.
- p.113R - vue 237/480
-
-
-
- f non defide' rauit.
- -ROBERT VALTVÏUN
- Zrffmrc,Les gardes corps,font gens de guerre à la foiidejefqueîsfolon la
- coutume le Capitaine general auoit autour de foy pour lesenuoyerà toutes manières de périls. Et combien que ce foit vn terme Grec,Varron tou-tef-fois dit qu’il peut auoir Etliimologië Latine, tellemêt que Larmes) ont eftédicls d’autac qu’ils eiloyent(circaUtera)âuzour des collés du Roy, qualî (L4rero»«)cofl:oyans,&auoyentrelpéeau cofté,lefqueîs depuison aappeb \kStipatores àSùpatione) garde corps, à caille de la garde. Mais pour autant qu’ilz elloyent à la foude, que les Gréez appellent piàoQoçlx, a celle caufo les anciens ont quelque fois appelié les gens de Loüàe(Latrones})ou bien Latro-cinaitycombatte pour la foude, ou bien qu’ils fo guerrent pour drelTer embûches. On les appelle au-iour-d’huy Satellites)^arde corps.
- Sfozn/,Brigansfont vne manière de larrons qui portent fous leurs robes, courtes dagues,&elpées.Iolèphus au deuhefme liure de la guerre Iudaïque: jj-.EEant ainn la région purgée il fe drelïoit vne manière de brigans en Ierufa-» lem,Ielquelzon appelloit(5irc^')tuans en plein iour,& au mylieu de la ci-3> té tous ceusquebon leurfombloit,fomellansmelmementesiours defeftes « par-my le peu pie auec courtes dagues fous leurs robesrdelquelles ils tuoyent
- >» diuers hommes, ôeainfi qu’ils tumboyent ils fenqueroyent entre les au très » du meurtre,par laquelle rufe ilz elloyent hors de fubfon . Le mefme enco-3} resTlulieursS/c^rior^wmeurtriérsfentremellasau peuple(ainfi appelle Ion 33 les brigans) & portans en leur foin des couteaux, œettoyent en execution 33 de grande outrecuidance leur entreprinfo.
- Dejÿderatï milites,perte de foldats font comme ie penfo foîon la coutume ou raifon ceus qui font perdus,ou morts,d’autât qu’ils font le delîr des cho fos abfontes,ou bien non encores trouuées.Cicéron pour Cluence: Afinius en ce peu de temps la fut mené à certaines foblôniéres, quafi comme fil ah 33 foit à des iardins, & fut tué hors la porte Elquiline, & comme (Dejtderare-33 /«r)ilfuftperdu deusiours,& qu’on nele trouuafo es lieux,efquelz on auoit 33 de coutume de le cercher. Celàr ou quelque autre en fon lieu en l’vnziefme 33 liure:En cesdeus combcLts(DeJtderati/ùnt milites) îlfefotrouué perte de huit 33 cents,foixante compagnôs de guerre.Luyencores au douzielmedlperuint 55 au mefmeiouràLariffe,f & n’a point fait perte en ce rencontre de plus de 33 trois céts hommes.Quinte Curfo au quarriefme : Il fut tué de nombre fiid par les vainqueurs quarante mille. Au regard des Macédoniens (DeJj/derati 33 Jlint)la perte n’a pas ellé de plus de trois cents hommes.Le mefmeencoreau 33 palfage deTigrisrll n’aellé fait perte de rien que de quelque peu de bagage.
- Tnarij)Triaires ont ellé ainli di&sfolon que témoigné Varron, d’autât qu’ilz elloyent en la bataille à l’arriére garde pour le renfort. Et d’autant qu’ilz elloyent ordonnéz au delfous des autres le mot àzÇSubjidium) a ellé 33 inuenté. VhutaOïCusifubJïdeteomnesquaJtmarif) tenéz vous prells pour le 33 focours quali comme Triaires. Tite Line au trenrefotiefme: L’auant-garde 33 eft de pointôs,les Princes elloyent a la bataille, & lesTriaresfiifoyent Par-31 riére garde.Et au huitielme:Les Tnares finclinoyent fous les enfoignes fur
- p.113V - vue 238/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. n4
- le genoil dextre, ayans leurs efeus fur les épaulés, leurs pointons fichez en 5 terre,la pointe en haut, les tenans comme h le bataillon efloit heriffé d’vne ceinture de palis.Et files Princesauoycnt du pire,iIsfèretiroyentpeu àpeu auxTriares.De la efl venu le prouerbe,quequad on eflen peine, le recours
- refleauxTriaires.
- On dit que le nom de ï{etiarm eft venu de la face des armes. De vray le Retiaire portoit couuertement vne reth au combat, quon appelloit iaçu-le,contreleMirmillonpourcouurir fon ennemycombatantde grand ardeur^ le vaincre de force ,.eflant ainfi enueloppé. Auquel Retiaire com-batant le Mirmillon on chatoit: le ne te cerche pas.C’efl le poiffôn, pour-quoy me fuys tu Gauloys ? De vray les Gauloys anciennemét fappelloyent Mirmillonsjà l’habillement de tefledefquelz efloit l’image dvn poiffon. Et fut celle façon de combat inflitué par Pittacel’vn des lèt fâges, & Chef de l’armée,lequel ayant àcôbatrePhrynon Chef des Athéniens, qui auoit elle Pancratialle, & Olympionique, a caufè des débats pour les limites des Atheniés,& Mitilenains, affubla Phrynon d’vne rets cachée fous fon elcu, &l’enueloppanefen donnantgarde.
- Gregarÿ, gensr’amalfés, lontfoldatsleués du menu peuple,lefquels font moindres, & extra-ordinaires, veu que les autres font plus grands, & ordi-» naires.Iuflin en l’Epitome de Trogus Pompeius treziefine; l’Egipte qui efl » vne partie de l’Aphrique, & Arabie efoheut premièrement à Ptolomée, le-» quel eflant du nombre des r’amaffés Alexandre auoit auancé à caufè de fa » vertu.Le mefme encorcs au vingt-huitiefme : Ces choiesouyës Antiochus » ayant opinion de mener la guerre marche contre lesParthesauec l’armée jj qu’il auoit endurcy par plufieurs guerres faittes aucc fes voyfins. Mais l’apparat des defpenfes demefuréesn’efloit pas moindre, que de la guerre : veu que la fùytte de quatre vingt mille foldats efloit de trois cents mille, d’ont la plus grande partie efloit de cuyfiniers,boulengers, & putains. L’or aufïi & l’argent en fi grande abondance,que les foldats r’amaffés pôrtoÿent gre-ues d’or,marchans fur la matière pour laquelle les peuples combatent.
- Ceux font appellés Oftïoncs, Choifis, que les Decurions ou Çenteniérs choififfentpour leurs priuéz affaires, a fin qu’ilz entendent plus aifément aux publiques. Et font dicts (Opfiowerjd’autant qu’ils font éleuz,car (Opta-re) efl autant qu’elire,comme efl ce dict : Ojptau'itque locum regno, c’efl à dire,-il a éleu.
- Opficcr,aufïi font diéls de(Opfo) d’autat qu’eflasles précédas malades,ilz ont de coutume de faire toutes chofes,corne eflas leurs adoptez & vicaires.
- On appelle Excubitores,ceux qui fon t le guet, & font du nombre des gës de guerre.
- Ceux aufïi font appellés Pfocubitores, lefquels faifoyënt le guet deuant le camp la nuiét pour fa garde quand celuy des ennemys efloit près.
- Celuy eQ;di£t(Strerwtis)preux(effiCdx)h.ÔH\c d’execution(G«rf#«*)prôpt, vigilant, & hardy,d’autant qu’en combatant il dédaigné le péril. Tite Laie
- p.114R - vue 239/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- ROBERT VALTVRIN
- au huitiefme : Comme durant le fécond Confulatde Cn. Corneille, & P.Philon ellans enuoyéz à Palæpolis pour repeter des prinfes , on cufl r’apporté la reponfe des Grecs nation plus (flrennua) hardie du bec, que fiere de faid.Iuflin en l’Epitome de Trogus Pompeius douziefme:De „ vray il efloit eflimé(w4»«Jiremus) homme de main, & es harangues per-faid orateur.
- On ne doit pas félon que témoigné Vlpian, feulement eflimer celuy 7tansfuga3£\iiû£3 renié, lequel fefl retiré durant la guerre à i’ennemy, mais aufïî celuy qui durant les treues fefl retiré à ceux auec Iefquelz on n’a point d’amitié eflantfâfoyfufpede.
- Celuy efl dit ( fitgitiuus) fuitif3 comme dit Ofilin , lequel efl demouré hors lamaifondefonmaiflre pour fen fuir à fin de fé cacher de luy. Mais Cehus dit celuy fuitif, qui fuit en intention de ne retourner a fon maiflre, combien qu’en changeantde fantafîë il reuienne à luy. Nul,dit il, delaiflc auoirfaillyentel péché pour fa repentance. Caffin aufïî dit que celuy efl fuitif qui de propos délibéré abandonne la maifôn.EtIulian,ilaefléaui-33 fe qu’on doit eflimer vn fuitif fuyuant fâ volume, & non pas par la fuyte. Car combien que véritablement celuy ait fuy, qui a fuy le feu, le brigand, ou vneruine,iln’efl pastouteffoisfuitif.ily a vnequeflion faitteà La-beo,& Celius: Si celuy efl fuitif qui fefl retiré en franchifé, ou bien au lieu,auquel ont de coutume de venir ceux qui fé pleignent d’eflre vendus, le penfé celuy n’cflre point fuitif qui a fait ce qu’il penfé luyeflre licite de faire publiquement,ny ne penfé celuy eflre fuitif, qui feflretiréa la flatuë de Cefâr,d’autant qu’il ne l’a pas fait d’intention de fuyr.Ie penfé de mefmc de celuy qui fefl retiré cn franchifé, ou a quelque autre chofé fémblable.* par- ce qu’il ne l’a pas fait d’intention de fiiyr. Si toutef fois il a au par-auat fuy,& depuis fefl retiré la, il n’en delaiffe pas moins eflre fuitif. Celius en-cores eferit que celuy luy femble eflre fuitif qui fé retire en lieu tel, que fon maiflrene Iepeutrecouurer, & beaucoup plus celuy qui fe retire en lieu duquel on ne le fâuroit ramener.
- Tyronesfont ieunes gens forts qu’on élit pour la guerre, & qui font duits au fait des armes,d’ont ilz ont eflé dids Tyrones. Tyro auffi fignifië l’homme rude,& ignare. A celle caufé Cefàr les dreffoit es maifbns,par des Che-ualiers Romains, & auffi par les Sénateurs exercitéz es armes, & non pas en ieu par dreffeurs de gladiateurs.On les eprouuoit de vray premièrement fuyuant la coutume des Romainsd’excrciter la ieunefîeaux armes, & de les tenir fous des gardes, & par-apres aller à la guerre. Defquels parle l’excellent des poëtes:
- 1 Et la ieuneffè a fi première fleur.
- De la efl venu Tyrunculus par dimin ution,qui efl vn petit iuuenceau.
- Les legionaires font dids (Véteram) vieilsfoldats, & qui font exempts, ayans acquis le repos apres plufieurs trauaux de la guerre. Le vieil foldat efl auffi à l’auis de Modeflin eflimé non feulement Legionaire, mais auffi
- tout
- p.114V - vue 240/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. n tout homme qui a comme.que ce foit fuiuy les armes, & en a efté honno-rablemcnt exempté.
- Ceusaufli font dids('Ewf,mi)quifontexcmptsdelaguerre,parceque (merêre)tignifië mener le meftier de la guerre, à caufo de la foude qu’ils gai-gnent,tout ainfi que ceus font appelles (Emerlti Jhpendij, ve/ emerïtœ mihtuz)
- . quiontemployéle temps deu à la guerre, & qui font exempts de prendre la foude, & de hanter la guerre, comme elloit anciennement le foldat, à foixante,oufoixante& dix ans .-lequel exempt du trauail n’eftoit point contraint de fuyure plus les armes, luy eftant donné quelque terre ou meftarië.De vray aucunes Republiques ont de coutume que nul ne foit contraind defoyure plus la guerre eftant foxagenaire, & qu a la plus part foit donné relâchement apres foixante& dix ans .Iuftin en l’Epitomede ,j TrogusPompeius,vnziefmeIiure: Comme Alexandre feiftvn choys d’ar-3, mée pour la tant perilleufo guerre des Perles, il ne choifit pas la force de la 33 ieune(Te,ne celle première fleur d’age.-Mais lesvieils foldats, & la plus 33 part des exempts de la guerre, qui auoyent efté fous fon pere, & fos oncles. 33 Quintilian : Emeritishuic bellojhpendiis^ctuscpjii ia font exempts de la guerre. Virgile aufli par Métaphore appelle en fos Georgiques les bœufs (Emeri-forjexempts du trauail.
- » Armïger,Coftelier,eft celuy qui porte les armes foulemet de fon maiftre, JJ comme l’efou, le dard, l’arc, & autres telles chofos comme aucuns dient, 3J reprenans ceus qui appellent vn home d\armes(^r»2iger)ceqiietoutefifc5is 3> ie ne trouueauoirefté obforué par aucun des excellens hiftoriographes. 33 Tite Liue au vingt-deufiefme:Iufquesa ce que d’auantage vn Cheualier 3» qui fappelloit Ducarioncognoiflant leConfuIà la face dit: Voicy celuy 33 lequel auec fon peuple a defaiét nos legiôs, &quia ruiné le païs & la ville. 33 Or maintenant liure-ie ans âmes de nos citoyens tués celle vidime. Et en 3’ donnant de l’efperon il poulfo dedans la plus grande preffe desennemys, 33 tuant premièrement ^Armigerum le coftellier, qui feftoit mis au déliant de 3’ fon effort,& donne fubfoquemment au Confulvn coup de lanceau trauers 33 du corps.Quinte Curce Atarraseftoit au par-auant entré dedans la maifon 33 Royale auec trois cets hommes equippés d’armes,auquel on baille dix Sa-33 tellites, chacun defquelz auoit en fuyte dix(Armigeros) hommes armez or-33 donnés pour prédre les autres trahiftres. Seneque en la Tragédie d’Hippo-33 lyteparlâtdcs Amazones:Sanspoint de doute cefle nntion(Armgera) bel-35 liqueufo,efl infonfée de dédaigner les confédérations de Venus, & d’aban-33 don ner aux peuples vn corps longuement gardé chafte. Sueton en la vie 33 d’Odaüiàn: Au demourant il fit choys du nombre d’hommes tantpourla 33 garde de la ville,que pour la fienne, en r’enuoyant la troupe des Calliguri-33 iains,laqirèlleilzaiioyent eu (inter Armigeros)entrc les gens equippés pour 53 fa garde iufoj.uesàladefaitte d’Antoyne, de celle des Germains, ôèiufques ,3 àcelIeft^Varrüs.
- Ceux font dids (Uxa) qui fuyuent vn camp pour faire gain, ainfi ap-
- V
- p.115R - vue 241/480
-
-
-
- }>
- 3i
- JJ
- ROBERT VALTVRIN
- pelles d’autantqu’ils font hors des ordonnances, & qu’iîleurefl licite faire ce que bon leur lèmble. Les autres les dient ellre ainfi appelés de (Lixa) d’autant qu’il fuyuit Hercules, ou bien d’autant qu’ilz ont de coutume de porter de l’eau aus foldats dedans le camp, ou tentes, laquelle les anciens ont appelIé(TiA:4) 5c que cuite nous appelions elixe. Aucuns les dient(<* Li-guriendo quœftum)àe cerchergain . Tite Liue au vingt-troilielme : Lixa Ca~ loné/que) le bagage & gros vallets, 5c autre troupe ordonnée pour la garde du bagage.
- CcdoKes, comme témoigné Nonius font les vallets des gens de guerre, ainlï appelles d’autat qu’ils fournilfent boys aus foldats,ou bien qu’ils portent des malfuës de boys.
- Gueula aufïi ell vn feruiteur de foldat. Plaute: Voy(cuculam)vn valîet de gens de guerre, lequel fappelle ainfl de KotAsp Grec, d’autant qu’ilz ont de coutume d’eftre armés pour la defenfé de leur maiftres,de ballons, 5c maf-fues:&queceluy qui a coutume de fayder de celle façon demalfuëell ap-pellé(Lié?(pr)porte malfuë.
- Le foldat ell à\t{Autboram)\ccyüû a fait le ferment,& ell obligé.Suetone au troilîefme liure : Pour choilir35c(uutborando) obliger l’homme de guerre auec les légions,& les gens de lècours.D’ont ell dcnué( Authoramentum)cpii ell quali comme vne obligation des choies, ou bien vne foude, ou bien le loyer de la guerre,ou du combat,ou bien de quelque œuure.
- ' Le foldat ell dict (Exuutboram) qui e.H calfé des honneurs de la guerre. Exautborare de vray, ell calfer le foldat du lêruice de la guerre, comme dit Vlpian. Si nous fommes de l’auis de Iullin : Quiconque a calfé vn homme de guerre,il a mis au ranc des infâmes,quoy qu’il n’ait point aioullé l’auoir fait par ignominië. Sous la reuerencetouteffois de Iulian (Exautborare) n’ell pas feulement rendre le fbldatinfame, mais aulïi calfer vn Capitaine . de là charge, ou bien donner congé au foldat, & quelque fois aueccon-» ditionhonnelle .Tite Liue au vingt-neufiefme-.Laou vn d’entre eux a ofé 33 dire, que fil luy permet le chois de deus, il ne vouloit point aller à la guer-33 re. Alors Scipion : Et pourtant ieune homme que tu n’as point dilïïmujé ta 33 fantafië, ie te bailleray vn Lieutenant, à qui tu bailles les armes, le cheual, 33 5c autres inftrumensde guerre, & lequelloudain tu mèneras d’icy en ta 33 maifon,& l’exerciteras, 5c dôneras ordre de le dreffer, apres luy auoirliuré 33 le cheual, 5c les armes. Auquel donques ioyeux, 5c prenant la condition, il a liuré l’vn des trois de ceus qu’il auoit làns armes.Et comme les autres virent cell homme de che,u.û(Exauîboratum)ca,ffé auec la bonne grâce du Capitaine,chacun fexculà,& receut vn autre en là place. Iulius Frontinus dit auquatriefme des Stratagèmes,que comme lediuin Augulle Vefpafian tLo*refd° îeullelléauerty, qu’vn ieune homme noble & inhabile aux armes auoit fcet,pro ellépourla pauuretéenuoyéà. l’ordre de ceus qui ont à lêruir pluslongue-crexiffet. ment, il (Exauiborauit) lecalfaauec vnhonnelte congé, luy ordonnant le-
- taillon.
- p.115V - vue 242/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE VIII. m taillôn . Ores faut il mettre fin a Japourftiitedeceliure, Sc refrener fâproi fixité:mais pour-autant que iepenfé quelqueschofesencor y deuoir pat moy eftre inférées, le liure fubfêquent montrera plus commodément quelles elles font^ a fin de ne charger la grandeur de ceftuficy.
- Fin du huitiefme liure.
- LE NEVFIESME LIVRE DE
- ROBERT VALTVRIN DE;
- l’art militaire. - .. r
- rt r •
- Çhdejl ce que la guerre, & en quantes manières, & ci’ou [ont dermes' les au'tres'Vocables des armées, quelles[ont les cau[es
- ' ‘ L. des bataillons de leurs dominations* j:.
- "?'"! r Chapitre premier*
- f . r\r • • • • -* ‘
- Our-autant donques, Sigifmond Pandulphe, que nous auons montré les vocables anciens, •& renommés de la dignité publique de la guerre félon leurs diuerfés fburfésôc charges, d’orefen-auant ce fubfêquent liure touchant les armées déclarera (à fin que rien du demeurant ne foit oublié) & fera cognoiftre,Se expliquera à part les.caufés& dénominations particulières. (Bellum) la guerre, laquelle eft en beaucoup de diuerfitéz, & diftin&e par les noms, veu que l’vne eft ciuile, l’autre aux eftrangers, l’autre feruile, ou fociale, ou piratique, comme nous auons au aar-auant dit,eft dénommée de(Beüua) belle cruelle d’autant qu’entre el-eseftvn dtfeord mortel,ou bien félon l’auis de Setuius, Bellum, eft diéb de nulle chofe belle, tout ainfique(L«c^) foreft,eftdi&e(4LmWo)luyre, ven qu’au contraire la guerre foit epouuentable & mefehante,. De la eft (horrida hella . Les autres de B élus, qui mit en auant le premier glayue.
- « Câffius au premier des hiftoyres dit: Et depuis Belus mit en auant le pre-3) mier glayue, duquel on voulut bienappelïer Bellum. Or eft la guerre tout > le temps auquel on préparé quelque chofe neceffaire aus gens de guerre pour combatre , ou bien la guerre eft tout le temps que nous y employons-, laquelle ksindodres de noftre temps appellent Guerra, comme Bellum Gallicum^PhnicumiMaeedonicum, Guerre Galüque, Punique^ Macedoniquc.
- Vne guerre eft di£te(Dueüum) quand deus parties combatent pour la 3j viftoyre,comme dit Fefius : La guerre, dit il, au par-auant eftoit appellée 3j Di.iëljComme les autres dient, veu que ce font deus parties qui combatent,
- Vij
- p.116R - vue 243/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ou bien que l’vne fait le vainqueur, & l’autre le vaincu, &c depuis en changeant vne lettre auec la rature d’vne autre,on l’appelle (Beüum.)Horace au premier des epiftres:
- a Des fols peuples,&Roy s l’ire contient la Grece,
- 3i La froijfant la longueur d’vn Barbare Duél.
- Ouide au premier des Faites: a On dit epue de ce iourBellone fut facrée
- ss Du Tufcanin Duel portant toujoursftuettr
- ss Aux Itales.
- TiteLiue au premier liure : Di,dit il, au premier auquel il demandoit Ibn auis, ce qu’il te femble, A lors ceft autre dit : le luis d’auis qu’elles doy-uent eftre répétées d’vn pur & iufte duel. Et au trentc-lifîelme : Si le duel que le peuple a ordonné eftre prins auec le Roy Antiochus le vuyde félon ledelîrdu Sénat, & peuple Romain, il te fera, Iupiter de grands ieus dix iours continuels.
- TumultuSjCtft: vn trouble plus périlleux que n’eft la guerre. Car comme dit Cicéron, la guerre peut eftre lans trouble ou tumulte, la ou le tumulte ne peut eftre làns guerre. Mais quelle autre cholé eft-ce vn tumulte, qu’vn trouble fi grad que la peur en eft tant plus grande, d’ont le nom de tumulte a prins fa lource. Et pour-tant noz anceftres appeîloyent le tumulte de ricalië,d’autant qu’il eftoit domeftique,& le tumulte Gallique par ce qu’il eftoit limitrophe de l’Italië:outre lelquelz ils n’en nommoyent point d’au-tres.Or que le tumulte Ibit plus fâcheux que la guerre,on le peut entendre, d’autant que durât la guerre Gallique les vacations ont lieu,& non pas durant le tumulte. Il auient donques que,comme i’ay dit,la guerre peut eftre làns tumulte, & non pas le tumulte làns guerre.
- Labeo dit cela eftre appelIé(T#r£<t)troublc,qui eft du genre de tumulte, &eftvnmot tiré du Grcc.Maisiufquesà quel nombre eftimons nous le trouble ? Si deus hommes Ibnt entrez en querelle, nous n’appellerons pas cela trouble. Et fils ne font que deus ou trois, ce ne fera point aulïî trouble. Labeo donques dit trefebien qu’il y a différence entre (turba, & fixa) trouble & querelle, dilànt que le trouble eft vn débat d’vne multitude, & vn amas,mais rixa eft de deus.
- Pralia font batailles de gens de guerre. Lucille au vingt-fetielme:Lc 33 peuple Romain a fouuent efté vaincu en bataille, & non iamais outré par » la guerre. Tite Liue au neufielme: Quelque gradeur que ce foie qu’on ima-33 gine d’homme, là félicité routefefois ne fera guéres plus grande que de dix 33 ans. Laquelle ceus qui louent, d’autant que combien que le peuple Ro-main n’ait point efté outré par guerre, que toutefefois il a fouuent perdu ss (pralia) des batailles.Or eft diô:( Pralium ab impnmendohofles) deprefferl’en-nemy,d’ontfont(Pne/4)lespreffouers, qui font vne matière d’ont eft preffe le railîn,ou bien i(praludere)ccarmoucher, d’autant qu’ils commençoyent la guerre par ecarmouches.
- pugna
- p.116V - vue 244/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. n7 pugna eft autre chofè que la guerre,car c’eft vne partiëdîvneJournée d’vne guerre,comme la lournée des Cannes,de Crémere,laquelle contient plufieurs combats,veu que Pvn elles ailes, l’vn à la bataille, &rfeutre à l’ar-riere garde.Et eft ainfi diète de (Pttgnus)poinscomme quicommençoyeot ,, 3infi leur guerre. Lucrèce au troilieflne liure dexichofès naturelles: Les:
- „ mains, ongles, & dents furent armesanciennes. Cafîiodoreairpremier li-» ure des hiftoyres : Vous fàués comme entre les-ennemysdes combats he-„ ftoyent pas d’armes,tellement que chacune furie fè vuydoit à cpups.de j, poins, d’ont pugna a prins fon nom (Pugnare)a.im\ eft combatte,.(expa-„ gnare)vaincre en combatant. Expugnare natter») comme dit CalliÆrate,piller vn nauire, ou mettre à fond, l’ouurir, ou bien la brifèr, ou coupelles cordes,abbatre les voyles,ou bien faire leuer l’ancre. D’ondenxefmerbeil-le de ce verfet du Pfalmifte (Sape expugnaueruntme d'iuuentuteme^dicat rtunc îftaél-etenim non pqtuerunt mïhi, pour (oppugnauerunt}ou bien impugnauermt), nfont affiegé, par ce moyen (non potuerunt mibijilsne m’ont peu oftenfèr.
- (Profeflo non expugnauemnt) ils ne m’ontdonquespas vaincu ; pour laquelle lignification le tranflateur l’a prins , finori.que ce foit la faute des efcriuains. ' ~
- Gymmcum certaine», le combat de nud à nud, éft vne gloyre de viftefte & force,duquel le lieu eft appcUé(GymnaJîum) auquel; les luyteurs.fexercent, &la ou la legéreté des coureurs fait (es épreuues, Aucuns des anciens l’ont appellc(Penthalum,) les autres(Quinquertum.}De vray toute_cefte manière d’exercitation confifte en ces cinq ars, au jet du plat, a laCQürjfê, au faut, à . lancer ledard,&àlaluyte.Ouide enfèsFaftes: . jj ACefles&àdankursbrastl'g'épromoyenti tn:: jn* -
- jj Et au iet delà pierre en ieu ils les huroyent. . ...b . .d
- La luyte eft vn embrafîemét de corps à corps,d ont en fè: iojngnant vient . lesluyteurs. • ^ .
- Nous appelIons(£xerc/«w)armée,vn amas de gens de guerre, & nonpas t vne bande feule,ny vne aile,mais ce qui contient plufieurs nombres de ges . de guerre ou légions auec leurs fêcours. Or ce moz(Exemttts}iire fon nom de F exercitation, ou bien corne ilfêmbleà V arron[Exercitus) eft ainfi diél, parce qu’il amende d’exercitation. : o;l :
- Seruius aus commentaires du fécond des Eneïdes dit que (Copia) a\i nombre plurier conuientàvnearmée, &que( Copia) aufingulier abon- { dance fè dit de toutes autres choies, auquel nombre toutef-fois l’vfàricc » des fâuans eft contre Seruius. Salufte au Catelin : Poïlrema ex omni copia Ca-55 ti/«d)FinaIement de toute l’armée de Catelin * il ne futprins citoyen de re-» nom à la bataille,ne àla chafte.Salufte encore au meftne Catelin : Pendant . ” que ces menées fe font a Rome Catelin dreffe(ea: omni copia) de toute l’ar-” niée, qu’il au oit amené, & que Manlius auoit eu deüs légions. La mefme encores-.Mais^* omni copia)dc toute l’armée la quarte partie cftoit équipée en ges de guerre.Tite Liue au cinaiefme delà guerre Macedonique:Quel-" V iij
- p.117R - vue 245/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- „ qüe peu de.iour&aprcs ilamalfe lîx, mille desliens (exomn't-copia) de toute „ l’armée qu'on a peu amafter à Lamië. Stace au fczicfmc-.Premit mdtgefia rucrn „ testopta)l’airnéfeendefôidre foule les abbatus. Virgile (&<juœ fit mecum co-pùtïuftro) ieTtontemple quelle armée i’ay. Terence en Ion Ëunuche, comme dit Do nasaux commentaires:)?* hommes copias durit) il mene armée de lîx hommes* qui fontle foldat,leplaifant, Dorax, Sirilque, & Sanga. Lors qui! dit:Quelles forcesamene contre toy ce foldat.
- " r Mxpediti&'pvoya.ge de guerre,eft airili diét d’autant qu’il fa,ut que les gens de guerre,& de combat fbyent(fxpei//«)delàmpeftrés delcdicitude, & afFe-éHon de leur mefnage.T* ~
- ~-Commetous prefques, & melmement Seruius, & Varron touchant la viëdes arieîensdnterpretent la propriété de la légion a caulè de (Eligere) élire, Où bienpour l’ele&ion des gens de guerre. De mefmes aufti font ilz en diüerfe opiqiofi prelque touchant fon nombre. Premiéremét Seruiusmef mes excellêni Grammairien déclarant la fantalië de Virgile en plulîeurs lieu jç,dit qft^nda Iegiô n y auoit que trois céts cheuaus. Virgile au lètielîne: jj '3' Des cheuaus aie Chef fait choys en tout le nombre.
- jj Qui trois cents & polisfont en efiables hautes.
- rf' Et autre part.
- jj Troiscents armésd’efcusjousaffés bien cogneus.
- Le- mefmë encores : On dit plus proprement légion de gens de pie, & (rawid)degensde cheual. Virgile au neufiefme: j» * ' ' La-légion aux champs lors demoure en bataille.
- » Varron touchant la langue Latine dit : Hz ont efté di&s(milites) gens de jj guerre,d’autant qu'anciennement la légion eftoit de trois mille hommes, j> & qu’vne chacune race des Tacienlès,Ramnclès ,& Lucerins enuoyoyent jj mille homes, Cintius au llxiefme liure de l’art militaire, comme le temoi-jj gne Aldus Gellius au dixlêtielme desnui&s Attiques a ainli efcrit:LaIegiô jj aïbixanreCënruriës,trente manipules,& dix cohortes. Vegece au deulîef « me liure de l’art militaire: Les Macedonies Gréez, & Dardanins ont eu des jj phalanges,ëh chacune delquelles on enrôloit neuf mille homes de guerre. Les GauloysiGeltiberes, & plulîeurs nations Barbares vfoyent de bataillos de lîx mille hommes de guerre. Les Romains ont des légions lefquelles ilz Ordonnoyent de (îx mille hommes,& non plus : quelque fois moins. Plu-jj tàrche touchât la vië de Romule:Chacune légion eftoit fournie’ de lîx mil-jj le hommes de pie,& de lîx cents cheuaus. Tite Liue au trentehuitielme:£t jj comme ilz eulfent Ieué les légions Iaiufques au nombre de quatorze,d’au-jj tant que chacune légion eftoit de plus de cinq mille hommes de pie, & de jj trois cents cheuaus. Le mefme encores au mefme liure: A celle caulê ilsfu-jj rent d’auis de leuér nouuelles armées, d’ont il y eut quatre levions côtreles jj Geneuoys,chacune delquelles auoit deus mille deus cents hommes de pie* jj Sctroys cents cheuaux, accompagnées de quinze mille hommes depie, jj de huit cents cheuaux del’aliance des Latins. Et au trente-lilîelme:L’armée
- p.117V - vue 246/480
-
-
-
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- DE L'ART MILITAIRE.: LIVRT IX. n8
- mce Romaine eftoitprefqued’vne forme tant d’hommes que d’armes. Il y auoitdeux légions Romaines, & deux des alliés du nom Latin, chacune defquelles auoit cinq mille quatre cents hommes. Le mefmc au huitiefine liure: On leuoit quatrelegions prefque chacune de cinq mille hommes de pie, & detroys.cents chèuauxï Et au quarantième liurerEtourtÇipl.us il y auoit du fupplémeïrt, à fin quexleux légions euffent plus de dix raille quatre cents hommes'de pie, & fïx cents cheuaüx, ôc douze mille hommes dç pie, & ftxcents chenaux des alliés Latins, delàproueftèdefquels QTul-musfeftôit aydéen deux batailles contre les Celtiberesdefquels ilemme-neroitauec foy,febonluy fèmbloit. Au regard de la légion de nx mille deux cents hommes. C. Marin eftle premier qui.l’a ordonné, comme le témoigné PomponiusFeftus,veu qu’au par-auât elle eftdit de quatre mille, dont elle fappelloit Quarrée. Eufebiuseiil’hiftoirè EcclefiaftiquetEn-tre les noftres auflî Tertulian recite ces chofès, & Appôlinaire-entre les Gréez, lequelaufïi dit,que pour vn miracle-d’vn grand.faiét,la légion changeant fon nom aefté appellée foudroyante. Legrand Empereur aufti Tertulian dit, qu’il fe treuue au-iour-d’huy des epiftres par lefquelles il montrera ces choies plusappertement. Or Seruius cecontrariant es commentaires fûrrvnziehne des Eneïdes,d ont eft venue cefte tant grande var rieté entre les excellens hiftoriographes aefcritences parolles:La légion auoit douze cohortes,foixante Centuries, combien qu'en ces chofès par la fûcceftion de temps ladiuerfitédes Chefzatoufiours changé la difeipline militaire. Etpour-tantTite Liue au deufiefme liure de la guerre Punique dit: Les légions furent augmentées degcns.depié, & de cheual chacune de mille de pie, & cent de cheual.
- La légion voylée des Samnites a efté ainfi appellée, d’autant que chacun d’eux venant à l’autel encourciné de toyle de lin , iuroit de combatre le Romain iufques à la mort.fTite Liue au difiefme liure :Eftâs les Primatz des Samnires contraints fous ladite exécration, defquels dix furent nomes parle Chef, aufquels il enehargea quef chacun homme en choifift vn iufques àeequ’ils euffent perfait le nombre de fèize mille, d’ont cefte légion la fut appellée voilée , a caufè de la courtine def l’enclos auquelfla nobleffe fobligeoit furla vie.
- PbalanXjtn langue Macedonique fignifië légion, comme dit Seruius es commentaires du deufiefme des Eneïdes. Tire Liue au trente deufiefme: Ils enuoÿoycnt des cohortes auec leurs enfèignes pour forcer fils pou-uoyent le bataillon des Macédoniens, qu’ils appellent Phalanx . Et au vingtfètiefme : Ils furent fèize mille hommes de pic armez à la Macedo-nique qu’on appelle Phalangites.
- ^s4gmen fappelle proprement vne multitude en bataille,comme eft vn e armée qui marche en ordonnance, ainfi di£te(ab agendo) d’autant quelle marche. Car vne armée qui ne bouge ne fappellepas(^jrwf«), & fi on le treuue il eft vfurpé.
- V iiij
- -t-Lego ci Ti.Ii.dccc ftatione fê deflinacio ne.
- fVir viru pro ius vi-fum.
- fCofepti pro eon-fepta. TNobili-tas crac, pro noui-tas.
- p.118R - vue 247/480
-
-
-
- ROBERT. VAL TV R IN ...
- Cohws, comme dit Varron; eftainfîdi&e,. d’autant cju’elle fe Greffe de plufieurs chambrées, & ducentennieres, tout ainfiqu’vne ferme fàflém-ble de plufieurs corps de maifons, laquelle eft ainfi dicte de(CoWere)con* ioindre, d’autant que tout le dedans cft conioint comme en vne ferme, veu qu’en ce lieu la on fèrroitlebeftail,ou bien d’autant qn’en fè prefèn-tant elle ârrefte, 6c garde les eftrangers d’en approcher. le treuue que Co. hors aeftédediuers nombre. Plutarche touchant la vie.de Pelops: Gorgias » futle premier qui ordonnai comme Ion dit,la fâcrée cohorte de quatre « cents hommes d’elite, aufquels la cité donnoit moyen defexerciter,&vi-ùre dedans la forterefiedeThebes. A celte caufe ils ont appelle la cohorte de la cité.Ephore au demourant dit que la cohorte eftoit de cinq cents hô. , . mes. Califtenes de fèpt cents, quelques autres eltimentque le nombre de
- lituiïTpro quatre vingt & dixffoldats eftoit raifonnable pour la cohorte. Ce que de nulium. rnefmes apenfé Polybe, & autres autrement. Iofèphus au treziefme liurc 3i de la guerre Iudaïque: Or auoit chacune deldiètes mille, hommes de pie. Quant aux autres treze elles eftoyent dreftees de fix cents hommes de pié, & de fix cents cheuaux.
- Celle a efté diète Cohorte Prétorienne, laquelle accopagnoit toufiours le Prêteur. Scipion l’Aphricain de vray éleut premièrement les plusgentilz compagnons pour l’accompagner durant la guerre, & lefquels feroyent exempts de toutes autres charges auec paye & demie.
- Manipulus eft vne bande de deux cents homes,aufti eft bien vne moindre de fix ou fept hommes aflemblés enfèmble, qui font fous vnemefmc enfèigne. Et font ainfi appelles d’autant qu’ils commencent premiéreméf la guerre main a main, ou bien d’autant qu’auant que les enfèignes fufTent ils auoyentdes maniples, c eft a dire des poignées de quelque herbe pour enfèigne: dont ils ont efté depuis appelles Manipulaires.
- La bande, comme dit Vegece au troyfiefme de Part militaire eft diète - ^G/^«r)laquellef débandée de fon bataillon court fusa l’ennemy en façon mus, pro d’ecarmouche, contre laquelle on enuoye vn autre plus grande, ou plus fuperatus. forte. TiteLiueau fécond liure.* Contre lequel faifant telles brauerics Ro-« mule fait vn effort aiiec vn(g/c£«r) vne bande des plus gentils compagnos. 33 Etau vingt & vniefme liure: Les fuyans repouifes fur la troupe des com-batans eftoyent en doute, la foule aufti des fuyans detournoit ceux qui retournoyent au combat.
- Cuneus eft vne multitude de gens de guerre aftemblé en vn, tellement que d’autant que cefte façon d’aftèmbléeen vn (coitm v«#w)f’aflemble en vn, elle cft diète(C«»e«r)quafi Coneus, veu que tous ils famaflent & affem-blentiufques au nombre de troys mille, qui eft vne multitude de gens de pié, & non de cheual, laquelle iettée en bataille a le front eftroièt en félar-giffant fur le refte, & rompt les rancs des ennemys, d’autant que de plufieurs eft fait vn ietde darsenvn mefmelieu.Ny n’eft du(C«»e#*)bataillôau eu nobre déterminé,mais vne façô d’ordônace de bataille en figure de coin.
- Nous
- p.118V - vue 248/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. n
- Nous appellôs vn trou cache dedans la terre (cuniculum) mines,ou pour la femblance des coins fendans tout marrain noueux, qu’ils pénétrent, ou bien a caufè de l’animal lèmblable a vn heure qui a coutume delèmuf-)} fer dedans la terre qu’il fouille. Marcial.
- Enfôn terrier fouillé' le Conin prendfa ïoye,
- Monfirant aux ennemys vne couuene voye.
- Ileneftquifontd’auis qu’on ne doit pas dire(ca«ifa/«w)mais tant lèu-lement(c«#ic«/i)au nombre pluriér. Ce que ie m’efmerueille auoirefté diél „ par vndes plus làuans hommes de noftre temps es iiures de fes hiftoires „ contre l’vlânce de plufieurs lâuans hommes. Vegece : On a trouué'vn re-„ medede fouiller fous le fondement des murailles la nuit par {Cuniculum) „ vnemine. Et en vnautrepalïage:Ilcft vne autre façon de prendre villes par fous terre, & lècretement qu’on appellc(C»wic#/#w)mine ,à caille des „ conins,qui font des terriers dans terre, aulquels ils le retirent. En lèm-„ blable Celàr qui a elcrit élégamment : Au troyfiefme guet, on a decouuert „ que le rempart fumoir, auquel les ennemys auoyent mis le feu {cumculo) „ par vnemine. Aulfi en a vféTitéLiueauhuitiefme liure de la guerre Ma-„ cedonique: Et comme la voye fuftouuertedu foftepar(c«»/a//«>»)lamine au moyen des pionniers qu’on yauoitenuoyé. Et Q^_Curce: La dernière ruine de la ville fut, que le mur fut demoly delTous(c»wic«/o)par vne mine, larlacheute duquel l’ennemy entra. Mais afin que celan’auiene l’Appol-onië iadis noble cité, nous doit lêruir d’exemple. Car comme elle fuftafi liegée d’vne bien grande armée, & que les gés de guerre nefilfenc pointde cloute d’y entrer par les mines, les Appolloniates de ce auertiz parleurel-piës furent merueilleulèment troublés de res nouuelles, & furent tous ef-baiz d’autant qu’ils ne fembloyentpas pouuoir làuoirletemps,nele lieu par lequel les ennemys entreroyent.Mais alors Triphon l’Alexandrin lequel eftoit la, homme de grand elprit,ordonna décôtremineren plufieurs lieux, par lelquelles contremines il fouilla iufques à vn traiét d’archors la vile, & pendit àtoutes vn vailfeau d’arain. Enl’vne defquelles contre-mines qui eftoit près de la mine des ennemys les vaifteaux commencèrent à fonner aux coups de picz: par le moyen donc de ce bruit on decouurit à quel quartier de la ville les ennemys entendoyent entrer par leur mine: eftant ainfi leur allignement decouuert,il fit vn meftement dans des chaudières d’eau & de poix boudantes auec fiante d’homme, & fablon ardanr, & fit la nuit plufieurs trouz, par lefquels il fit mourir tous les ennemys qui eftoyent en la mine en faifant vn loudain répandement. Ceux de Mar-feilles aulfi eftans alfiegés par mines, & auertiz par plus de tréte efpiës qu’ils auoyent enuoyé pour découurir le lieu auquel on minoit firent vne folle d’vne merueilleulê largeur & longueur au dedans des murailles, comme vn relèruouer, lequel ils remplirent d’eaux des puyz, & du port. Parquoy comme la mine vint à le découurir vne grande abondance d’eaux y défendant a abatu toutes leurs eftages, tellement que ceux qui eftoyent dedans
- p.119R - vue 249/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ont elté perduz tant par la delcente des eaux, que par le comblement de la mine.Les Ambrachienlèsaulïi creignans qu’en abatant la muraille par mines on entrait dedans la ville, decouurirent le Ion des pionniers en failant lilence, & mettant l'oreille contre terre enplufieurs lieux. Aptes laquelle decouuerte, ils contreminérent droiét contre elle, & fut faicte vne nou-uelle inuention aifée contre les ennemys. De vray ils firent vn tonneau de fer troué au fond de forte qu’vne canelle petitte & de ferypouuoit eltre fichée, & luy firent vn couuercle de fer,& trouèrent le vailfeau en plu-fieurs lieux. Et apres eltre emply de duuet ils luy tournèrent la bouche vers la mine. Or y auoit il de longz pointons par les trouz du vailfeau palfans outre pour garder l’ennemy d’approcher,&enflamberentàfouf-flerd’vn foufflet de marefchal au bout de la cannelle vne petite fcintille de feu mis a la plume. Parquoy perfonne ne Iceultdurer nyarrelterdedans la mine, lors que non feulement la grande abondance de fumée,mais aulïi là vehemencelsurét toute remplie d’vne lenteur puante de la brullu-re de la plume.
- Ils appellent vne ordonnance de gens de guerre (Forfex)forces,cilèaux, qui elt contraire au bataillon en coin. De vray celt ordre d’hommes d’elite forme lalettreV qui reçoit ceiuy qui elten coin, &le ferme dvncolté & d’autre, & elt appcllée Front, d’autant quelle a fon regard aux ennemys. C’elt vn ordre de grand lêruice en vne bataille fil elt fagement ordonné: & fi mal à propos, les foldats quoy que bons combatas font rompuz pour eltramal ordonnés.
- On dit qu’on combat en fie, quand fouuent on fauance & retire, fans farrelter aucun moment. A celte caufe a-elle elté appellée fie,laquelle choifië des plus gentilz compagnon s,elt mife en telle àl’ennemy, à fin de r’alfeurer vn bataillon étonné.
- ^AUy les ailes font bataillons Ielquels on alfeoit au- tour des légions i dextre & àleneltre comme ailes es corps des oyfeaux ainfi qu’elcrit Cintius au fixiefme liure de l’art militaire, &c Virgile au quatrieline des Eneïdes. a, Lors que les ailes hachent & que les boys de rets
- „ On ceint.
- „ EtTiteLiueau vingthuitielfne: L’aile lêneltre des Romains, & les ban-„ des qui auoyent perdu leurs enlêignescombatoyentàlapointe.Oràl’aile „ trente cheuaux en vne armée, côbien qu’il en elt qui la dient eltre de plus* aa TiteLiueau trentehuitiefine : Leur aile eltoit de mille cheuaux prefquè aa qu’ils appellent Gemma.
- Turma, comme dit Feltus & Varro quafi.fferw^jeltantl’e tourné en(») d’autant qu’on faifoit(#r^»w)trétecheualiers des troys races, des Tacien-lès, Ramnenfes, &Lucerins. Il y auoit de vray en chacune race troys cents cheuaux, & de chacune Centeniére fen bailloit dix, d ont fe faifoit(t«rw**) la troupe. Somme, que fi nous croyons àPomponius, les Chefs de chacune dizeniëre eltoyent appellé&Dizeniers.Quelques vns d’ôt Froto elt du
- nombre,
- p.119V - vue 250/480
-
-
-
- 120
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE IX.
- nombre,font d’auis que chacune troupe qui efloit de trentedeuxcheuaux, auoit fbnDizenier.Au demeurant Cyaxares a eflé le premier au diètd’He-rodote, qui a departy les Afians par troupes, & a ordonné que les archers fuflent feparés des gens de cheual,& les vns des autres,veu qu’au par-auant ils eftoyent mefiéz enlemble.
- Nodus eft vnebandedegens depié fort ferrée ,tout ainfî que'turmd) troupe ledit de gens dechcual, ainfi quon le lit en la difcipline militaire. Or eft elle amfi diète, à caufè quelle eft mal aifee a rompre.
- iséctis, eft diète vne ordonnance d’armée d’autant que celle bande la. de gens de guerre eft merueilleufement vehemente a offenfèr l’ennemy à pointe de dars.
- i^écies eft diète vne armée mile en bataille, d’autant qu’elle eft garnie d’armes, & de dars fort affilléz.
- Les gens de cheual eftoyent appelles Claffes yi caufè du departement d’vne armée, lefqueîs ont efté depuis appelles Manipula ou bien a caufè des troupes de gens de cheual pour quelques trompettes qu’ils ont.Et pour-tac non fans raifon a-ilefté dit par le noble poèiQ{Clafîbmhiclocm)icy eftoyent les troupes degens de cheual.
- » Claffes aufïi eftoyent les parties du peuple. Tire Liue an premier liure: j> Alors il ordonna(c/4^)Iesdepartemens & Centuries de ceft ordre fuiuant jj la fuffifânce de leur biens,autant bien feant en guerre qu’en paix, tellement » qu'il a fait quatre vingts Centuries de ceux qui auoyent vaillant mille 5) efcuz corone, ou plus, d’ontil y en auoit quarante des vielz, de autant de » ieunes, lefqueîs tous eftoyent appelles, la première claffe, eflans les vielz » ordonnés pourlagardedéla ville,& les ieunes pourallerala guerre. Aulus » Gell'm dit au fètiefme des nuitz Attiques.Tous ceux qui eftoyent es claffes » n’efloyent pas appellés Clafhques, mais tant feulement ceux de la première, lefqueîs eftoyent eftimézauoir vaillant douze centz efcuz corone. Au demeurant ceux eftoyent appellés au deffous de la claffe, qui eftoyent delà » fécondé, & des autres qui eftoyent d’hommes de moindres rieheffes, que » delà fomme que i’ay dièt. Columella : les Claffes ne fè doiuent point faire déplus de dix hommes, que les anciens ontappellé Decuriës.Quintilian au premier des inftitutions.de n’ignore point que mes précepteurs ont gardé vne bonne coutume, lefqueîs diftribuans les enfans par claffes, don-noyentl’oldre d’apprendre félon les forces de leur efprit. Apres font ve-nuës(Claffes naummfes armées de mer. Et a Ion de plus longue ancienneté, comme dit Pomponius,appellé vne multitude d’hommes(claffe)que celle de nauires.Car comme dit Diodore,tous animaux furent des le commencement du monde engendrez,aufïi furent les hommes par mefme manière, de en cerchantleurpaflure ils ont vefeu d’vne vie fàuuage,& fans ordre,fènourriffans d’herbes, & de fruiéts d’arbres, leur eftans les belles fauuages ennemyës, nouraufquelles refîfter, on dit que les affemblées, de claffes d’hommes ont eftédrefees de crainte, pour la commune vtilité.
- p.120R - vue 251/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Etonteftèles fecours mutuels, &Ies lieux cerchés pour habiter. Les anciens ont appelle(Clajjès clypeatas)ce qu’au-iour-d’huy nous appelions armées. Qlaflis procinéla, eft vne armée en bataille & prefte à combatre,mef-mementquandelleeftoitcein&edel’accoutrement Sabin pour incontinent combatre.
- Caflra en plurier feulement, fignifient vn camp. Tite Liue au cinquiel-„ me de la guerre Punique. Valere Antias dit que(v#<* caflra)le camp de Ma-„ goaeftéprins. Lamefmes encores(£x0/r«rcd/?rh)ileft chafféde fon camp, j. Par ce moyctymacaflrahoftium)deux camps des ennemys ontefté défaits. „ Et de rechef au neufiefme liure-.Mais comme ils euffent( vnacaflra)vncap 3i fur leurs limites,&vn autre en Hetrurieprefque àleurveué.Au demeurant (Caflra) fontdids quafifC^Jd1'autant que la concupifcenceeftoit la cha-ftiée. Mais fil eft ainfi que de la en foitla fburfe: qui doute que ce ne foit vnnom vain entre les noftres? Ou eft celuy d’entre cefte manière d’hommes, qui ait en reuerence la vergongne,Ia pudicité,& chafteté?& qui n’ay-memieux afïaillir vne putain que de combatre l’ennemy? Ou eft celuy qui netienneplus toft propos de forcer la pudicité des ieunes gens,de violer les vierges, d’outrager les nobles de leurs puteriës,mefchancetéz &c vices, que d’affaillir l’ennemy, de foffrir aux coups, de cercher la mort pour leur honneur, de fuyr l’ignominie, d’acquérir gloire, de la patience, & trauail? Et fi quelque fois il auient(Ledeur qui que tu fois)que tu te tranlportes au camp, ou plus toft cagnars de cefte manière d’hommes, tu ne verras pas la fur leurs paillaffes ces tant fobres Capitaines Fabrices, nelesEmilleSjSci-pions, Hannibalny Alexandre, mais des foldats &ceux qui d’entre eux ont plus de dignités, couchéz auprès d’ordes putains, paillardes, & bre-daches, deuifâns entre eux de propoz efféminés & mefchanspropoz,pour émouuoir la luxure, & non pourlarefreindre. Etlàouledeuisfeft efehau-fé,l’vn route, l’autre rend fàgorge, l’vn piffe, l’autre pette, on y ioue,ony boit, Sc bien fouuent, (comme de coutume il auien t) les querelles fen dref-fènt. Finalement, afin que ie comprenne tout le demeurant, il n’y a aucune fobrieté en leurs parolles,nulle attrempence en leurs affaires,nulle fâin-éfceté ne modeftië,ny nul filence en leurs banquets,tel comme des anciens, mais vne villennië fupréme, blaffemes, criz, confufion, & trouble en toutes choies* & en ce que la difeipline ancienne defendoit de ne tenir propos efféminé, ou impudique, non feulement on ne fabftientpas la de parolles villaines,mais dauantageils font toutes autres chofès qu’vn homme vergongneux ne pourroit dire.
- Metaricaflra, eft départir, & affoir logis aux foldats dedans le camp,ou bien affoir le camp, ou le changer. Lucain au premier. Campeier hardiment viendray en Italie.
- Le nom dc(Tdberna)m témoignage de Vlpian donne a entendre tout édifice vtile à habiter, non pas pour autant qu’ilîeft clos dais: de la font venuz les tabernacles, fk(contubernales)à’vne mefine chambrée.Les nations
- étranges
- p.120V - vue 252/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. iz étranges qui habitent encores es édifices batiz d ais, donnent temoignao-e quej^en^aaufii elle aux Romains fort anciennehabitation. Etpourtat les loges es camps, & les tentes des gés de guerre, defquelles ils Ce làuuoyenc de l’ardeur du foleil, des tempeftes, pluyes, & froidures , ont efté appellées tabernacles,combien quelles fufient couuertes de peaux. Tite Liueau troyfiefme delà guerre Macedonique: Le tabernacle Royal fut afiis fur vne jj motte près le rempart en veuë,à fin d epouuanter I’ennemy, & dôner bône jj fiance aux fiés. Cicerô cotre Verres en l’a&ion fetïefine; De vray ils afleyent jj leurs tabernacles tendus des voyles des nauires a l’entrée, & bouche du jj port,melmes la, oudelamerlegouîfe,fengouIfeduriuageaIa ville.
- Tentorta, les tentes ont efté ainfi appellées d’autant quelles font tendues àcordes, & à palliz, d’ont au-iour-d’huy on dit auant tendre. Ouide:
- Icy Eacides, là tendoit Achiües>
- Vergile au premier des Eneïdes:
- blanches voyles voit encourantprès de la> Les tentes deKeftts.
- X
- p.121R - vue 253/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Papiliones Pauillons font aulfi di&s tentes à la femblance d’vn oyfillon » qui vole. Helius Spartianus touchant la vie de Seuere le lètiefme : Seuere » aulfi en tous voyages aprins là refedion d’homme de guerre enprefènce » de tous deuant fonpauillon.
- HybernacuUcajlrenJiay loges de camp pour l’hyuer, font baftimens fer-uans plus enhyueratenirfiéges, qu’à forcer villes .Tite Liue au cinquief-« meliure:Etcommel’elperancedes Chefs Romains fuftplus grande à ternir le fiége qu’a faire effort(Hybernacuîa)les loges d’hyuer ontcommancé 3» elfre drelfées, chofe fort nouuelle au foldat Romain : 6e eftoit leur delibe-» ration de continuer la guerre l’hyuer.
- On a appelle le bagage d’vn camp (impedimenta cajirenfa)caï(tmpedire)eÇt quafi enuelopper d’vne rets 6e garroter. Tite Liué au vingtneuficfme : Les » Romains cependant voyan sia marcher l’ennemy, 6e qu’il n’y auoit point ” de moyen de fortifier leur camp, fo mirent en bataille apres auoir tranlpor-« té 6e aliénable en vn \ku(impediméta)\cutbagagc.Et au vingttroifiefine:Les valletz 6e foyte du camp ont efté miz à la gardc(impedimetorum) des hardes.
- Nous vfons dc(commeam)pour les viures d’vne Republique ou armée, ou de quelque multitude qui marche.Tite Liue au trentefixiefine: Veu que 33 lesEtolins aoyuentpourleiour-d’huy donner ordre de faire venir de l’Afic 3> toute manière (commeam) de viures aux armées, afin que l’abondance de 33 blé, 6e la munition des autres choies fuit aux leurs en raifonnable fuffilàn-ce. Qommeaw aulfi le dit en particulier. Cicéron pour la loy Manilie.Or 3> fommes nous priués (commeatu)de munition de viures tant priuée que » publique . On dit aulfi que ( Commeam ) elt baillé par le Chef aux foi-dats, c’effc à dire le temps auquel ils pourront aller 6e reuenir commodément, ou bien le congé a temps de fen aller de la guerre, 6e ou bon leur lèmblera pour reuenir à certain iour.
- Mtmïmentdy font fortifications, 6e munitions du camp, ôe d’autres choies qu’on fortifie contre la venuëdesenncmys,foitdepallizoude folféz, ou bien de quelque autre moyen, afin que les foldats foyent en défenlê contre(comme i’ay dit)l’arriuée, 6e courtes de l’ennemy.
- Monumema par mutation de l’I, en, V,font les lêpulcres, ftatues, tiltres,’ liures,6e autres chofes qui nous amonnelfent nous fouuenir du temps pafi le. Au regard de ceux qui veulent dire que c’ell pour l’au enir que les fepul-cres fappellent monumens, d’autant qu’ils nous amonnelfent denollre mort, iepenlê cela faux: car ils font tant lèulement faidz à l’honneur du mort, 6e non pas pour vne publique remonlfrance.
- Atbleta elt vn homme fort, 6e veneur, lequel ayant les ioin&ures du corps oindes luide auec vne belle ayant dens,à fin qu’il donne palfetemps de les mouuemens aux affilias, 6e que de fon lâng il face reiouyr le peuple. 33 Tite Liue en l’vnziefme liure de la guerre Punique.-Le côbat aulfi des Athle ?> tesfutalorsen Ipedacleaux RomainsaueclaveneriëdesLyons, Panthe-3 ; res: 6e felt fait vn ieu de prelque toute l’abondance 6e diuerfité de ce fiecle.
- Au
- p.121V - vue 254/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. uz
- Au demeurant Sabin & Calfin, & tous en general ne {ontpas d suis que le meltier des Athlètes foit ieu,le fpeclacle delquels de h excellente fabrique, de d’vn exercice tant cruel fut trouué par les Athéniens a l’honneur de la Diane de Scytië fefiouilTant d’efiFufion de fang, qui eftoit vn palfetemps d’vneauffi grande offenlèpubliqueque priuée, 6e qu’on peut facilement entendre,h nous voulons vn peu ramener en mémoire moyennant les hi-fioires fon commencement & continuation, & de quelle depenfê publique, de quant grande aulfi diligence, ou plus toit folie, & de quelle grande fantahë, ioye, & labeur du peuple il ait efté'finalement exécuté, eltans mefmement tant de milliers de gladiateurs, les vns contre les autres,vn h grand pris d’Elephans, tant de troupeaux de Tygres,Lyons,Pardes, Afoes, &Cheuaux fauuages, & finalement des animaux de diuerlês elpeces de tout le monde par la fourniture que les foreltz&les chalfesqnetoutes les nations ont faiëtau theatreRomain . N’oublions pas aufïi celle partrop fuperfluë dépenlè en édifices, comme font les columnes de marbrefame- ^ego ^ nées tantparmer que par terre, & polies d’vne excellence d’entendement Cunaaf.r° des ouuriers pour lèruir aux ieux. De laquelle folië le Prince Scaurusn’eft pas à oublier, quia fon edilité drelfa troys cents foixante tant admirables columnes au ieu d’vn theatre de peu de iours,& qu’on pouuoit éleuerauec peu de marrain & cordages pour contenter laveuë du peuple prenant plai-fir en telles cholès:tellement que comme il elt eforit, il a fait le plus grand de tous les ouurages faiéts de main d’homme. Nous auons aulfi entendu parles ancienseforitz, que Curion qui mouruten Aphriquepour lepar-ty de Cefar durant la guerre ciuile, inuentapour forpalfier Scaure d’elprit, auquel il ne le pouuoit égaler en rich'elTes vn theatre, non pas de marbre comme Scaure, mais de charpenterie, lequel toutef-fois elloit double &£ fufpendu.Ettintparcemoyenen füfpenduëpar fon merueilleux artifice le peuple victorieux for toutes nations veincu deieux, & fefiôuilTant en fes propres perilz, afin que les armées mefines riantes, & hebetées ellans dedans lèruilfent demoquerië, & miracle aux alfillans. OraRomuleelte le premier de nozRoys, qui des le commencement forprint celle tant rude, & lèuere challeté des Sabins* Et depuis la puilfance de Titefconfu- -pLego mant vne abilme de richefies Impériales, auilâ de faire vn édifice,dont on profufo pourrait voir la capitale des villes.Comme donques le theatre en Grec foit PJ°Perfru* dit(Hemi^>/?m:a»î)Hemilphere, il elt certain quel’amphithcatre a prins fon nom, comme quafi deux théâtres enfemble ,conaprenans le-urs pourpris fLegofpa en vne place, à celle fin que les coureurs eulfent foffifant elpace, & que les uuvtnuf# alfillans vilfent plus facilement toutes choies: attendu qu’vne grande ron- pp^c^ro deur comprenoit le tout. Au regard des combatz que les Latins appellent eius. (cenamïna)les autres les appellent(4^m)de(4;quifonnelans, angle,
- veu que comme il lèmble a Feltus, le lieu auquel celte façon de ieuz fefait elt fans angle. Autres ont autre auis. Ou ide au premier des Faites:
- Le mimjlre trouffé caufe dit mm peut ejîre,
- X ij
- p.122R - vue 255/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- J>
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- f Lcgo Ca piralis pro capita.
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- !»
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- ROBERT VALTVRIN
- Qui malfacre l'boflie aux Dieuxpur les repaiflre.
- Ses couteauxfont tirés pour aufang chauld les teindre,
- Sans iamais requérir, ne requis point fe feindre.
- Les Vns penfent le tour agonalfon nom prendre,
- Véu qu’on chaffe la befle, & nef vient point rendre.
- Aucuns cuydent ce touriadis ainfi noté,
- Et que de fon lieufoit vn charaBere ofé.
- Effe qu’en l’eau l’boflie a leglayue marqué,
- Qu bien que pour fa peur, le tour foitremarque.
- Peut eflre auflt qu’es iewg, iadis accoutumés Des noms Grec^ font ces iours bores ainjtnommé^
- ^Agoniadif it iadis l’ancienneté Qui mefmblevnecauf eflreauecvérité.
- Bellonaeftla fèur de Mars, &DéefTedes guerres, à laquelle lès prelatz fâcrifioyét de leur propre fang, d ot Ladace & Lucain (ont temoings.Lors ou la cruelle Bellone tire apres la fèignée des braz.Or a-elle efté ainfi appel-1 éc(à bello)die\a guerre,& au-iour-d’huy Va,n6(Duellonaa duellojdchgucne.
- Minerue qui eft la maiftrefie des vertuz, & qu’on dit eftre la Princefle &: inuentereflede la guerre, eft ainfi dide, d’autant quelle amonnefte. Les Gcntilz devray latcnoyentpour fàpience. Cornificiustouteffois lapen-fc eftre ainfi dide, d’autant qu’on la figure & peint auec menaftes d’armes. Car elle tient vn pointon, & vn bouclier auec la fâllade en tefte.Les autres J’eftimentauoir efté dicté Minerue d’autant qu’elle( minueretvel minueretur) diminuoit,ou quelle eftoitdiminuée.Etpour-tant eft* il incertain fi elle-a point efté dide (Capta) ou tfCapitalis) Car il eft de diuerfês caufès de ce nom.Ouide au troÿfiefine des Faftes:
- Quoy que de Capte on peut le temple petitvoir,
- Minerue àfa n’aijfance a commencél’auoir.
- Le nom eflbien douteux, carvn efpritfoigneux Nous dtfons Capital, elle l’a vigoreux.
- Seroit ce que du Chef (comme on dit) de fon pere,
- Elle faillit ayant fon efeu, fins merci
- Ou que captme vint le falifque domté La premièrejyllabe a cefling la noté Ou que loy Capitale elle a, faifantpunir Leslarrecmstrouuê%, & du pais bannir.
- Mais de quelque rai fon que ces noms onpourchajfe,
- Pour no% cbefe touflours a de Gorgon la cuyraffe.
- Elle a aufti efté dide Tritonië,d’autât qu’on la dit auoir apparu en habit virginal au reps d’Ogygespres du lac ou du riuage de la riuiére deTritô.Au demeurât elle a efté dide Pallas àcaufê de Pallene IfiedeThrace, ou biédti geat quelle a tué. Il eft vray que ces deux denominatifz font quelques foiz proférés parles poètes fans propre nom. Virgile au deuxiefme des Encïdes:
- Tritonià
- p.122V - vue 256/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. 123
- - Tntorita, rejpice T?allas.
- Infedït nymbo ejfulgens & Gorgone feudi Mars eft ainfi di£l d’autant qu’il a le gouuernement fur (mares) les malles en la guerre, comme il femble à Varron, Combien qu’ils foyent troys manières de coutumes, comme aux IaxamatHes prochains de la bouche de la riuiére de la Tane, la ou les femmes font mefmes melUers que les hommes, de forte qu’elles mènent la guerre. Les hommes de vray combatent àpié de l’arc, elles à cheual, & non pas àarmes. Mais elles tuent ceux en tirant quelles ont attrapé de leurs licols : ou bien aux Amazones, la ou les feules femmes combatent:ou bien aux Romains & plulîeurs autres nations, la ou Ieslèuls malles combatent. Ou bien il a elle diël Mars d’autant qu’il fut rauy parles Sabins, la ou Mamers lignifie en langue Ofque commeMars.-îequel failânt les furies eft didGradiue, & Quirin lors qu il eft tranquille.Or auoit il dedans Rome deux temples l’vn de Quirin comme garde,c’eft à dire tranquille dedans la villed’autre fur le chemin Appian hors la ville au-pres la porte, quafi comme ducombatant, c’eft a dire Gra* d'mi, car ceux qui combatent auancentleurpas, ou bien ils marchent diligemment. Et tout ainli qu’Epaminondas difoit que le païs de Beocië eftoit le theatre de Mars,& que Xenophon appelle l’Ephelêla boutique de guer-re:les Romains aulfi lors appelloyent le temple de Mars le guerroyant, lequel tous client vn Dieu fort cruel &armé:&qu’à celle caulè il a la fuperin-tendence lîir les guerres & armes.Finalement quelques vns l’eftiment eftre Liber mefmes. Les Romains portent reuerence à tous deux d’vn nom de pere, donnans le furnom de pere à Liber, &: àl’autre de Malpiter, qui eft a dire Mars pere. A celle caufe le pere Liber eli éprouué auoir grand pouuoir furies guerres, d’autant qu’ils ont premièrement affermé eftre autheur de triumphe.De vray aulfi faftatuëaiipais des Lacedemoniens porte à vne hante vneenlèigne, & non pas vn pointon, car quandil le tient, quepor-te-ilautre choiequ’vn dard caché,lapointeduquel eft couuerte delyerre fattachant contre? lequel monftre que les fureurs de la guerre le doiuet lier du lien de patience. L’yerreaulfia vne nature de lier la chaleur du vin, duquel Liber eftant l’inuenteur pouffe aulfi les hommes à vne furië de la guerre. Parquoyils ont voulu que Liber & Mars fufïèntvnmefme Dieu pour l’affinité de leur chaleur.
- Mauors eft tout ainfi di(ft par figure comme^TWape/vtfoî^lêlonrauis de Seruius au commentaire du premier des Eneïdes, les autres le penfènt eftre ainfi dit d’autant qu’il(wdg«d verfdfjbraffe grandes choies.
- Mars ou bien Mauors aeftédit Gradiue de(GrWie»do)cheminer, parce que ceux qui côbatét à la guerre auancet le pas,ou blé marchét diligement: ou bié d’autât qu’en la guerre les armées viénét l’vne cotre l’autre,ou bic du dardemét du pointon que les Gréez dient ou bien corne dilênt les
- autres,qu’il eft nay <\t(gramen)àcnt de chien: ce qu’ils interpréter ainfi par ce que la coronne d’elle eft la plus honnorable au meftier de la guerre*
- X iij
- p.123R - vue 257/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- fExPro-per legs tria, pro tua & quia pro quis,
- Iuppiter aeftéditFeretriëde(Fe/reporter, d’autatqu onI’eftimoitporter la paix du temple, duquel on prenoit le feeptre, par lequel on iuroit, Sc le caillou pour faire l’accord.
- Les autres dient, que comme le RoyAcron,Roy des Cecinenfès eut elle veincu & tranfpercéd’vn dard par Romule, &que,fes dépouillés euft fèntefté par luyreuenu à Rome dediéz à Iuppiter par vn veu, ce trophée à luyordonnéiuyaiouftale furnomdeFeretriepourauoir férulennemy.il eft auffidi&defFero)comme nous auons dit. Propercc.
- - Trois dépouillés pofées au temple furent caufè De Feretrin, d'autant que le Chef mit à mort Le Chefd'vn certain heur, ou qu'a leur dos les armes pFincués ilsportoyentrainfide Iuppiter l e noble amel aprins furnom de Feretrin.
- Ianus a la prééminence de faire les accords. Car apres queRomuIe,& TiteTaceeurent fait accord, on fit vneftatuëàlanus à deux frons,quafi à l’image de deux peuples. Ganius BafTus a dit au liure qu’il acompofé des Dieux, qu’on peindoitIanus à deux frons,comme portier fùperieur,& inferieur Ouide aux Faftes.
- »
- »
- »
- «
- »
- ” Tu ce que voys du ciel, de mer, fy nues, & terre
- ” le lespuys faire voyr, Çy les tenir en ferre.
- » De la garde du monde en mojgit le deuoir,
- *> r De tourner lepiuot, l'en ay tout le pouuoir.
- » C r a chacune porte, Cy çàçy la front doubley
- » L'vne regarde au peuple, py Iautre au Dieu redouble.
- ~ Et comme \>o% portiers fefeyans à la porte » Voyent du prime hofel,foit qnon entre ou quonforte,
- 3 i De la porte du ciel aufi e fiant la garde,
- 33 Le leuant & couchant enfemble te regarde.
- Nous lelifons aufïiauoirefté à quatre frons,commeayansfôus fâma-ieftétous les climaz. Ny ne fè faut émerueiîler fil eft aux vns Bifront& aux autres Quadrifront, car autres le veulent outre cela eftre diëb Dieu, auquel eft l’Orient, & l’Occident. Horace.
- 33 Opere matutin, ouf plus teplaitlane.
- Les autres qu’il eft Dieu de tout l’an .lequel il eft certain eftre diuifé en quatre temps. Or eft il euident qu’il eft Dieu de I an en ce que le commencement de l’an en eft appellé. Anciennement on l’a appelle Chaos Patula-que, Claufie. Ouide es Faftes. v
- si Jadis on m’appelloit C haos, quifuis antique
- 33 * Tu riras de mes noms, hores qui Patuluque „ f Puis Claufie ftys dit du facrifîcateur.
- La raifon de ces deux noms eft, par ce que durant la guerre les portes font ouuertes, & en paix clofes. La caufè de cela le recite telle, que comme durant la guerre Sabine, qui fut dreflee a caufè des filles rauië’s^ les
- Romains
- p.123V - vue 258/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. 114
- Romains fe haflalfent de fermer la porte, laquelle elloit au pie du mot Vi-minal,& qui depuis pour le cas auenu fut appellée Ianuale,d’autant que les ennemysfy adreiroyent,elIefouuricdelby-melmesapresellreclolè.Etcô-me cela auint deux 8c trois fois il y demeura pour la garde beaucoup de g es en armes,pour-autant qu on ne la pouuoit fermer.Mais côme d autre collé le combat fuft fort rude, le bruit incontinét vint que Tace auoit challe les Romains. Par-quoy ceux qui en auoyent la garde prindrent la fuyte. Et commelesSabinseulfent à entrer par la porte ellant ouuerte, on dit qu’il defeendit du temple de Innus vne grade violence de torrens auec vne lôur-fe d’eau par celle porte la, 8c que plulieurs bandes durât le combat ont elle ropuësparles bouilIons,ou bien englouties d’vne profunde rauine.A celle caulêonatrouué bon que durant la guerre ellant Ianus partypour lefe-cours de la ville,les portes fuflentouuertes. La porte Ianuale,comme dient les autres,a elle diète de Ianus.Et pourtant efl la,mile vne enlêigne, 8c vne ordonnâce fàitteparPompilius, comme Pilb l’eferites annales, quelle fuit toufiours ouuerte durant la guerre. Toutef fois Varro dit qu’il ne le trouue 'point par memoyre quelle ait iamais elle ouuerte du régné de Pompilius, mais depuis,comme le témoigné Tite Liue,lors que T.Manlius elloit Cô-lùl apres la première guerre des Carthaginoys vuydée, & apres la guerre Asiatique finie par l’Empereur Cefar Augulle, ellant la paix acquile tant par mer que par terre.Or montre le nom de ce Ianus qu’il a la prééminence furtoutes les portes,ce qui ell vray femblable.De vray on le figure auec vne clef, 8c verge quafi côme gouuerneur des chemins,& garde des portes,cô-bien que celles de là guerre foyét doubles. Virgile au premier des Eneïdes.
- 3t Or a,comme Ion dit,la guerre double porte:
- a A qui en craignant Mars la reuerence on porte*
- » De cents verrous d’arein clofe ejl,& bien ferrée:
- a DefqueUes à iamais Ianus garde l’entrée.
- » Si au combat les grands,fè font délibéré,
- » Lors le Conful les ouure en richeffesparé
- j> D’v« ve élément Ouirin,en ecbarpe portant
- m Le Gabin & la guerre appelle, & puis partant
- » La ieunejfe lefuyt,lors les trompettes [ornent
- » Et d'vn cry enroué leur confentement donnent.
- Cecy lorsfefaïfoit,qu'aux Latins guerres fortes » On annonçait,ouurans lespluf-que trilles portes.
- Paélum)c&diétde(paélio) comme dit Vlpian, d’ontlenom de paix ell appellé. Mais(paélum)ell vn accord 8c confèntemét de deux, 8c paétion de >i deux ou de plufieurs. Tite Liue au fifielme: Et comme la fortune des alfie-33 gés ne peult porter le retardement de celle elperance, 8c que le peu des ci-»> toyens elloit prelfé du trauail de veiller 8c de blelfures, en liurant par vne » padlion la ville aux ennemys,ils delailferent leurs dieux domelliques,ellâs » enuoyéz en milêrable troupe làns armes,& auec vn lêul vetement.
- X iiij
- p.124R - vue 259/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Vax) paix eft de lignification notoyre. Virgile au fetiefme:
- ,, La main duKoy touchéefutvnepart depaix.
- P^jfignifië auffi perdon. Virgile au troifiefme des Eneïdes:
- 3i Par veu% & parprières ordonnent requérir
- J) (Pacem)paix,
- auffi fignifië ayde. Virgile au mefme.-lls requieret(/wé)layde des dieux P,*x,auffi fignifië bienueillancc.Le mefime au quatriefme: -paccq-per aras sj Exquirunt-
- »> Par facrifice aufii la bïenueillance quiérent.
- PaXyauffi au témoignage de Prifcian au cinqiefme liure peut fignifier de mefime tant au fingulier qu’au plurier.il eft vray que nous n’en vfionspas au plurier,par-ce qu’il n’en eft point d’vfiage. le m’efinerueille bien toutef-fois que cela ait efté dit par le prince des Grâmairiens , veu que ie le treuue proféré en plurier paraucuns bornes approuuéz & excelles en la laguc Latine. 33 Lucrèce au cinqiefme des chofès naturelles: Ventorupauidispaces^animàfq^fi. » cundas. Varro en la vie des peres troifiefime liure:Il faut prédre premiéremét 33 garde pour quelles caufès,& commet ilz ont eftably^cer) les paix, fècon-33 dement de quelle foy& iuftice ils les ont gardé. Horace au premier des 33 Epiftres : Befla queis &paces. & au deufiefme : Hoc paces babuere. C eft affiés dit du vocable de paix, & de fon vfâge pour cefte heure. Au demourant les effets confiftent en ce que les peuples profitent en elle,que l’vtilité des nations fbit gardée,à fin quelle foitla mere des bons ars,& qu en multipliant le genre humain par vne fùcceffion réparable elle prologue les facultéz, & qu’elle rende les façons de viure bonnes, & que finalement elle ait en fioy tant de bien, qu’es affaires humains on n’ayt de coutume de rien fiouhait-ter plus agréable ne plus defirable, & que finalement rien ne fè puiffe trou-uer meilleur. Au fiurplus le diuin Vefpafian ne deliberapas fans propos d’e-difiervn temple de tranquillité,pais &côcorde apres les triumphes, &lafi fëurancede l’eftatde l’Empire Romain, auquel il vfà de telle largefle que toutes les chofies furent la affiemblées,pour le defir defquelles voir fesprede-ceffieurs roddoyent tout le monde.
- Fædusfifl vne loy,& quelque fois vne paix qui fè fait entre les ennemys. Et a efté ainfi dit d’autât que la foy y entreuient.Parquoy Varro dit : Perbos etiam nuncfifidus^quafifidus. Ennius dit, qu’il eft dit au meftier de la guerre à caufe des féciaux,c’eft a dire des Prélats par Iefquels font faids ( feedera) les confédérations,ou bien (abbirco vel boedo) d’vn bouc, ou d’vn cheureau, en aiouftanta^W^ vne ^ceque les anciens auoyentpour vn figne.perni-cieux, comme : Sanguine fœdantem quos ipfifacrauerat ignés.) corrumpant de fang les feuz à Dieu vouéz, ou bien à caufè d’vne truyë (fœde) vilainement & cruellement tuée de coups de pierres, la mort de laquelle eftoit defïrée à qui faufieroit la foy.Parquoy l’excellent des poëtes.
- ” Depuis les Roji entre eux les combats delaijfés,
- * * Deuant l’autel armés fi tenoyent tous drejfési
- Du
- p.124V - vue 260/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE IX.
- Dugrand dieu Iupi:er3en main tajfesayans:
- . Et faifoyent leur a : cordée porc facrïfians.
- Les Arabes auoyent de coutume en faifimtvn accord d’incifer lededas de la main près le pouce,&non pasdetuérvnetruyë,&deprêdredu fil des robes des deux parties,& d'oindre des deux fangs fcpt pierres pofees au my-lieu d’eux en inuocant Denys & Diane,& apres ces choies faitces les appel-1er amys. Les Scytes & Lydiens tiret aufli en cecy comme le témoigné H e-rodote, dé leur lâng , & en le beuuant les vns des autres ils confermét leurs accords.Et ce non feulemét de leur coutume,mais aufii par vne vfiirpation de la difeipline des Medes. Les accords de vray furent ainfï conferméz a la guerre qui fut faitte entref Haliathe le Lydien, & Alliages Roy de Medië, lanfix cents & quatre apres la prinfe de Troye.Au regard deceluy des Ro- iiatcm3pro )) mainsauecles Etolinsilfutfaitlouscesconditions: Les Etolins conferue- Iiliricem. )> rontrEmpire,&maiefté du peuple Romain loya!emet,fny nelôuffriront )> palfer par leur païs aucune armée contre lès amys & alliez, ny ne leur don- turjpro v lieront confort nyayde, & feront ennemys des ennemysdu peuple Ro- ducet*
- }) main, portans les armes contre eux, ôz leur menant la guerre. Ils rendront )} aufli aux Romains, Ôz à leurs alliés les trahillres & fugitifz, & les captifs fi-» non ceux,qui captifz ôz retournéz à leurs maifons ont efté de-rechef prins,
- » ou bien fi aucun d’eux ont elle prins au temps qu’iîz eftoyent ennemys des » Romains lors que les Etolins eftoyent au fecours d’eux. Au regard des au-» très qui fc trouueront dedans cent iours,ils feront rédus fans fraude au Ma-» giftrats de Corfun. Et quant à ceux qui ne fe trouueront,foudain,qu’il fen » r’encôtrera quelqu’vrt,ilfera rendu. Ils liureront aufli des oftages au choys » du Conful,qui ne feront point moindres de douze ans,ne de plus grad âge n de quarante. L’oftage ne fera point Prêteur, Conneftable,ne Scribe public,
- » nenul de ceux qui au par-auant auront efté oftages aux Romains.Quant â » la Cephalenië,elle n’y eft point comprinfe. Ail regard de lalomme d’argér,
- » & des pelions qu’ils payeroyent,il ne fut rien mué de ce qui auoit efté con-» uenu auec le Conful, ôz fut accordé que fils vouloyent bailler argent pour » l’or,ils le pourroyent,pourueu que le denier d’or en valeuft: dix d’argét. Au » regard des villes,contrées,& homes qui ont efté autref fois en la fubieélion 33 des Etolins ils nepretendrontaueun recouurementde ceux qui ont efte 33 conquis par armes durant le ConfulatdeT. Quince, &CnéeDomice,ou » depuis,oü qui voluntairemet fe Ibnt réduz au peuple Romain, f Quât aux » Eniades leur ville & païs,ils feront aux Acarnanes.il y a aufli vne autre for- dauicum . me d’accord notable comme le témoigné Tire Liueeferite en fes parplles, mendisfa J> fuyuant l’auisdedix deleguez auec Antiochus: L’amitié du Roy auec le 33 peuple Romain fera fous fesloix ôz conditions. Que le Roy nelbuftrira uiodeca.
- 33 point pafler armée par fes païs pour mener la guerre au peuple Romain, ne ^ 15 â fes alliés, ne fur la contrée de fes fubie&s, ny ne les fecourira de viures, ne 33 d’autres munitions. Ce que de melme les Romains & leurs alliés feront au 33 Roy & â fes fubicéls. Le Roy aufli ne pourra mener la guerre aux habitans
- p.125R - vue 261/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 3>
- >3
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- ROBERT VALTVRIN
- desiflcs,ne paffer en l’Europe.Ilfè départira aufli des villes, côcrces villages & chafteaux qui font audeçadu mont deTaurus iufques ala riuiérede la Tane, & depuis la vallée de Tauriis iufques aux monraignes qui tirent à la Lycaonie,fans emporter les armes des villes,païs,&: chafteaux qu’il quitte-ra.Etf’ilen atrâfporté,ii en fera entière reftitution la ou il fera befoin. Ilne rcceuraaulîi aucun foldat, ny autre du Royaume d’Eumenes. Si aucuns bourgeoys des villes que laide Antiochus font auec luyouen fonRoyau-me,ils retourneront a Apamée anantle iour afligné. Au regard de ceux qui du Royaume d’Antiochus feront auec les Romains, ou leurs alliez, ilz auront liberté de le retirer,ou de demourer.Quant aux fèrfz & fuitifz,ou pri-fonniérs de guerre,ou d c’ed vn libre prifbnniér,ou fuitif, il fera rendu aux Romains ou alliés. Il durera tous les tlephans,ny n’en feraprouifion dau-tres.llliurera aufli toutes les galleres,&leur équipage.Ny n’aura point plus de dix barches à trente rames,&pas vnbrigatin pour laguerrequ’il voudra mener,ny ne nauigera au deçà des promontoyres,de Calycandre & Sarpe-done,finonquecefbit velfeau portât argét,foude, AmbafTadeurs, ou ofta-ges:ny ne fera loifible au roy Antiochus de leuer gens de loude des nations fubiettesaux Pvomains, nemefmes receuoirles voluntaires : & quant aux maifons & édifices appartenâs aux Rhodiens & alliézau dedans des limites du royaume d’Antiochus,ilz y auront tel droiéfc qu’au par-auat la guerre ilz auoyent:& fil efl deu quelque argent,ils le pourront exiger : & fily a rien de rauy,ils le pourront quereller, en cognoiftre, & le repeter. Si ceux à qui Antiochus a donné les villes, les tiennent, il en retirera les garni-ions, & donnera ordre deles rendre en bon efht. Au demourant il payera lêpt millions deux cens mille efcuz dedans douze ans par payes egalîes en douze mille talens Atiques de fin arger, ny ne fera le talent de moindre pois de quatre vingt mille liures Romaines :& outretrois mille fèpt cens cinquante muids de fromét: & qu’il liurera dedans cinq ans au roy Eume-ne neuf vingt mille efcuz : & pour l’efhmation du blé fèptante-fix mille deux cés efcuz. Il baillera aufïî aux Romains vingt oftdges,Iefquelz il chan géra au bout de.trois ans, qui ne feront moindres de dix-huit ans neplus âgés de quarante. Si aucun des alliés des.Romains mènent la guerre â Antiochus de leur bon gré,il luy fera loifible de repoulfêr la force,par la force, pourueu qu’il ne retienne aucune ville de droit de guerre, ou la reçoyue en amitié : & quant â leurs querelles qu’ils les vuydent par droit & iuflice, ou par armes â leur bon plaifir. Il fut aufli articulé de Iiurer entre leursmains AnmballePuniquejThoasl’EtolinjMnafîmache l’Acarnane, auec Bolide & Philon de Calcide. Il eftoic auffi articulé en cefl accord,que G on y vouloir par apres aioufter, ou changer quelque chofè, que cela fè feroit fans le rompre. le treuue aufli par les autheurs approuués qu’il efl trois efpeces d'accords,fuyuant lefquels les citéz,& Pvoys feroyent leurs alliances. L’vn eftoit lors que les loixefloyent baillées aux veincus par guerre. De vray il eftoit au vouloir,ôe arbitre du veinqueur, la ou toutes chofês eftoycnt rendues
- p.125V - vue 262/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. u* dues au plus fort d’en prendre ce que bon luy fembloit, 8e les condamnera fa, volunté. L’autre quand deux d égalés forces faifoyent paix, & amitié par vn egalaccordjcaralors les choies le repetent & rendent par la conuétion. Et fi la polfelïion d aucunes a eu trouble,on compofè fùyuant le droid ancien,ou bien ala cômodité des deux parties.La troifiefme elpece ell quand ceux qui ne furent onques ennemys, font vne amitié par vn accord fécial. Ceux la ne prennét, ny ne baillent loix, car cela appartient au vinqueur, & vincus. Et côbien qu’au témoignage de Tite Liuc, ne foit point memoyre plus ancienne d’accord,que de celuy qui fut faid entre les Albanes,& Romains , Pline toutefifois témoigné au lètiefme de l’hilloyre naturelle, que Thelêus trouua premièrement les accords.
- Nous difohs proprement les choies faindes lèlon Vlpian, qui ne font conlacréesneprophanes,mais confermées par vn decret in uiolable. Et ce qui ell confermé par vne làinde ordonnance, ell faind,combien qu’il ne foit conlàcré a Dieu*
- La choie efl filin de, au témoignage de Martianus, qui efb defenduë & munie contre l’outrage des hommes. Tite Liue au neufielme de la guerre „ Macedonique : la ne fabllenoyent ils pas de violer les ambalfadeurs, qui „ fontlâinds par le decret commun àtsnmons.Sdêhim)tfkàït(dfigmmïbtis.)
- Or appelloit on (Sagmïna)la veruaine qu’on cueilloit en lieu laind,quad les ambalfadeurs alloyét faire accord,ou bien lignifier la guerre. Tite Liue jj au premier liure, luyuant le commandement du Roy il diloir.Ievousre-jj quier Sire des fagmines. Le Roy luy dit:Pren la nette.Le Fécial apporta de jj laforterelfe de celle façon d’herbe nette. Le'melme au difielme liure de la jj guerre Punique : Comme il fu11 ordonné aux Feciaus d’aller en Aphrique jj pour faire accord, il fut faid à leur requelle vn decret du Sénat en ces ter-jj mes:qu’iîs portalfent quad & eux vn caillou, & vne verueine,& que fuyuât jj le commandement du Prêteur Romain,ils filfent 1 accord,& qu’ils luy de-:j mandalfent des làgmines.Celle manière d’herbe prinlè en laforterelfe a de coutume d’eltre linrée aux Feciaus.Les ambalfadeurs Romains auoyët auf-fi de coutume de porter celle herbe afin d’en ellre prelêrués,& que homme ne leur fift outrage,tout ainfi que les ambalfadeurs des Gréez portoyent ce qu’ilz appellent le Caducée.
- Objîdes) oliages font dids de(Objtdïum)liège, d’autant qu’ils font liurés parles alîiégéz, ou bicn(objtdes)^om{obfides)\cu qu’ils font baillés pourl’af lèurance de la foy du païs, comme le témoigné Fellus.
- f/4î)fignifiëdemefmeque(’0^/er)defcendu de(P4</ere)aIIer,parcequ’en le baillant, on fen peut aller, & retirer. Et delà eft venu, epetyadaw) lignifie oblige, ou bien cheminant fous fidemanumillion, comme le dit Fene-33 llellatEnuers Iequel(v<*£/^w^)obligéiI elloit lié du neu d’amitié.
- Hoihjjanciennement fappelloit voyageur, holle, & celuy qu’au-iour-d’huy on appelle(foy?#)ennemy elloit appe\lé(Perd[ieüio.) Varro : On diloit a anciennement (bojtis) l’ellrangér qui viuoitde lès loix : au-iour-d’huy on
- p.126R - vue 263/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- „ appelle (bofîïs) ennemy celuy que lors on appelloit (perdueüis.) Cicéron a'u „ premier des offices : De vray ie pren aufïi garde en ce que celuy qui de Ton „ propre nom efloit perduël, fut appellé(^o/?«jparvne douceur de vocable, „ allégeant l’horreur de la chofe.Car celùy qu’au-iour-d’huy nous appelions „ eftrâgcreftoitparnoz anceftresappelléC/w/hr.) Cequetemoignet lesdou-„ ze tables.Ou leiour eflably auec(^ojrh.)Item l’authorité eternelleauec(bo~ fauroit on faire d’auantage plus gratieufèment, que d’appeller „ d’vn nom fi doux celuy auec lequel tu as guerre ? combien que le temps la „ ia rendu plus rude, car il ne fignifië plus 1 effranger, & eft demouré propre ,, à celuy qui porte lesarmesennemiës.Caïusdela fignification des mots: „ Ceux, dit il, que nous appelions^)??*) en nemys, noz anciens les appel-„ loyent(perduelhônes) fignifians par cefte adiondion ceux auec lefqueîz ilz „ auoyentguerre. Vlpian parlant de la loy delà maieftélulië: Quiconque, „ dit il,eft coulpablc de la loy Iulië de la maiefté,il eft animé contre la Repu-„ blique, ou bien contre le Lrince(animo hoftilt) d’vn cœur d’inimitié. Ceux auffi font dids(bojles) & le font qui nous fignifiënt la guerre, ou bien auf-quels nous la déclarons ouuerte:quant aux autres on les appelle brigans,& hnons.Hoftire)Cigmfi'èegd\er,(boflimentum)cga.\eté>d,ont(boJles)font dids, par ce qu’ilz viennent au combat pour caufè égalé.
- Hécatombe) félon le témoignage de Iule Capitolin, eftoit vn fàcrifice de cefte forte. On dreffeenvn lieu cent autels de gazons, aufquelzeftoyent fàcrifiés cent porceaux, ôc autant d’ouailles. Le fàcrifice auffi des Empereurs, foit de cent beufz, & cent aigles,auffi font fàcrifiés par cëteines cefte manière d’autres animaux, ce qu’on dit auoir anciennement efté fait par les Grecz,eftans preffés de pefte.
- Hojliœ) font dides fàcrifices, qu’on fait deuant qu’aller contre les enne-mys,ainfi dids,d’autant que hojlire3eù. tuér pour fàcrifiér. A l’occafion défi quelles Trebace au premiér des religions dit cftre deux chofés,l’vne par laquelle on quiert IavoluntédeDieu par entrailles, & l’autre par lequel la feule ame eft vouée à Dieu, d’ont il auient que les Arufpices appellent les hoftiës,animées. Virgile en fa poëfië diuine, montre ces deux manières de fàcrifice, & premièrement celuy,auquel la volunté des dieux fè montre par entrailles,difànt: .
- j y Les cboyfës brebis comme on fouloït il tué.
- Puis foudain apres:
- 3 y Les ouailles ouurant3$ardeur il ruminoit
- » Les bouillantes entrailles.
- Au regard de l’autre c’eft à dire, auquel on dit le fàcrifice animé, & par lequel la feule ame eft vouée,il le montre quand il fait,qu’Entelle vinqueur a Erix facrifioit vn toreau.Car pourtrouuerles caufésdu fàcrifice animé, ilavfédu nom:
- }y Hanc tibi Erix meliorem animampro morte Daretis.
- t> P our la mort de Dures ce fie ame pour le mieux.
- Et
- p.126V - vue 264/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. n7
- Et pour montrerladeftinationde fésveuz,ildit:Poÿo/wo) pour toy ie paye,qui fé dit propremét du veu.Et pour'môtrer auoir fatiffaic aux dieux-îlafîgnifié dilanr:
- j} On ajjbmme le bœuf.tremblant il chet mort.
- Le mefme encores touchant le facrifice animé.
- „ Parle fangd'vne vierge fi Grec,% les vents rompifles
- „ Quand an pais Troyan première ment vous vwjies.
- „ Or faut il le retour parfang,&facrifice
- „ D’ame Grecque cercher.
- Or quad il a dit [anima) il a lignifié le nom du facrifice, 8t(litare) il fignï-fîë auoir pacifié les dieux apres le facrifice accomply.
- Vidimes font facrifices,qui fe font apres vne vidoyre, & ont efté ainfi dides,d’autant que(mc£f)liées on les menoit aux autelz,ou bien d’autant quelles eftoyent frapées,& quelles mouroyent par la dextre vidorieufe. Il ellvrayque l’authorité confond bien fbuuent par licence ces deux mots. Ouide au premier des Faites:
- » V iblima qua dextra ceci dit vich'tce vocatur
- » PdoPlibm à domitis holîia nomen habet.
- » QuatàîavidimeTiteLiueauvingt-deufiefrne,iufquesà cequ’vn cheuâ-» lier appelle Ducarion cognoifTant le Côful de face,dit : Voicy celuy lequel auec là cômune a tué noz legiôs,& a ruiné noftre ville,8c câpagne.Or mai-33 tenât liureray-ie celle vidime aux efprits de noz citoyés cruellement tués.
- Scæuola fils de Publius penfé que(Pofihminium)e(l vn mot compofe,tellement qu’il y a (pofi) apres, & (’limen) porte: de forte que toutes chofes qui font aliénées de nous, & font tombées entre les mains des ennemys,& qua-fî comme forties de leur porte, fembloyentà leur retour eflre par apres ce-ucnuêsàleur porte,par(pofihminium)vn recours. -
- Prado) butin, efl félon Varron vne choféprinfepar lesennemys,quafi (parida)pnnfe à la main.
- Manubiœ, comme il fémble à ÇK Afconius Pedianus, font les droids du Chef,d’vn burin faiét fur les ennemys, tellement que comme ilefl efcrit.es' liures des chofés,& vocables anciensdes manubiës font differentes dcÇpne-da)zn ce quc(pncda) efl le butin,qu on a fait fiir l’ennemy, &ies manubiës ne font pas le butin, mais tant feulement les deniers faids par le Quefteur de la vente du bu tin.Il faut entendre,corne il a eflé dit,que par le Quefteur . ôn entend le trefbrrier de l’epargne, car la charge de l’epaigneaeftétranf-55 feréedes Qüefteurs aux gouuerneurs.Tire Line au vingt-fifiefme: P.Qor-55 neiîle auquel eftoit echeu la prouince de la Gaule, requit au Sénat auant ” que partir pour mener la guerre aux Boulonois luy eflre iiuré argent pour 33 les ieux, qu’eftant Prêteur en Efpagne il auoit voué aufortdela bataille. Mais il fémbla auoir fait vne étrange, «5c iniufle demande. Parquoy ilz ordonnèrent qu’il feifl les ieiîz,qu’il auoit voué fans l’aüis du Sénat de fà feule fintafië,des deniérsfaidsdela vente du butin,fi aucuns il auoit reférue,ou
- Y
- p.127R - vue 265/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- bien a fês propres depês. Il Ce trouuerabien toutef-fois qu’aucuns efcriuins de renom,ont en efcriuant u\is(prada)pom{manubia) & Tvn pour l’autre témérairement, ou bien de nonchallance,ou bien ils l’ont fait par vne figure tropique d’vn changement de vocables,ce qui eft permis à ceux qui le font fagement,& de prudence. Mais ceux qui ont parlé proprement, & au naïf, comme ont fait plufîeurs,mefmes M.Tulle Cicéron autheur tref-diligent en la loy Agrarië,ont appelle les manubiës argent. On a aulïi leu es liures des Etrufques,que les coups de foudre font di&s manubiës.Finalement les manubiës font les paremens des Roys, & pour-tant dit Petronië Arbitre: a Tant de manubiës de Roys trouuées en vn fuï'tif.
- On dit (refîgnare as milit'i) quand pour quelque faute le Tribun des gens de guerre ordonne par fèntence rédigée par eferit, que la fbude ne foit baillée au foIdat,car on difoit anciennementf/gawre) pour eferire.
- Aerarijmilites) gens de fbude font ainfî appelles, comme ditVarro,par ce qu’ils prenoyent fbude. Hmc jlipendiumjlz fbude eft venu de(Jlips) mon-noye menuë d’autant qu’ilz appelloyent la monnoye de cuyurc(fôps.) Les gens de guerre ont efté diù.s(fiipend'iarif)dta.utiz qu’ils payoyent cefte façon de monnoye. Et pourtant dit Ennius: Les Carthaginoys payent(Jlipendia) tribut. Or que(/?ipr)fbit monnoye batuë, il eft aparent d’autant qu’elle Ce • baille a l’homme de guerre pour la fbude, & quon promet pecune, qu’on
- appelle(/ip#A*ri)promettre.
- Pecunïa) pecune, laquelle certainement eft le nerf de la guerre, eft ainfî diète comme dit Cicéron au témoignage de Varron, d’autant qu’alors les , pafteurs auoyent leur pecune(i#pecoré)tn beftail. Pline au vingt-troifiefme 33 dei’hiftoyre naturellerSeruius a efté le premier qui a battu mônoye de cuy-” ure,laquelle fut Bgiuéc(mtapectidum) de marques d’ouailles d’ont elle a die 33 appellée pecune.Caftius au CetieCme:Pecuma àpeexdistergo nomïnata)\a. pecu-né a 'efté ainfî appellée à caufe du dos de brebis, laquelle a depuis efté tranf ferée aux métaux fans aucune efEgiëpar l’inuention des Gauloys.
- Le fbldateft di£t(bdbere as alienum) deuoir,qui doit or,ou monnoye publique de cuir,comme a efté celle des Lacedemoniëns qui fêruoit d’argent monnoyé,ainfî que dit Sencque au cmcpeCme{debeneficiis.)
- £>e»4r$deniersquafî(</e»ï)cômeditVarro,d’autantqu’iIzenvaIloyent dix de cuyure,tout ainfî que(Q#i»rfri/)en valloyét cinq. Vitruue au troifîef-33 me de l’archireéture; Les noftres ont premièrement forgé l’ancien denier, 3> auquel ilz ont ordonné dix pièces de cuyure : à cefte caufë la compofîtion fVertihçc du retient iufques au-iourd’huy le nom de denier. Dydime eft dauis,
- cxPlinio: qu’il eft de dix petites liures.Pline au trëte-troifîefme liure de l’hiftoyre na-namcorm turelle: f Le denier fut receu pour dix liures de cuyure, & le quinaire pour» entWclo ^inqje fèfterce pour deux liures & demie. Au regard du pois de la liure dé » jus. cuyure, il fut diminué à la première guerre Punique, lors que la Republi-» » que ne pouuoit plus fournir aux fraiz : & fut ordonné que la monnoye jj d’vne liure leroit batuë du pois de deux onces : par ce moyen il y eut gain
- de
- p.127V - vue 266/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE* LIVRE IX. 118
- de cinq parties,d ont il fut làtifFaid aux debtes. La marque de la monnoye eftoit d vn cofte de Ianus a deux faces, 5c de l’autre de l’elperon dvn naui-re,& aux triens 5c quatreins, de nauires. Le quatrein anciennement eftoit appelle trionce a raifonde trois onces. Et depuis durant la guerre d’An-nibal Q^. Fabius Maximus eftant Dictateur, les allés furent faittesd’vnc once, & fut on d’auis que le denier fufl de léize onces, le quinaire de huit,
- & le léfterce de quatre. Par ce moyen la Republique a toujours gaigné la moitié , combien qu'au payement des gens de guerre le dénier a touf-iours efté baillé pour dix allés. Au regard de la marque d’argent,elle a toufi iours efté de carz à deux,& a quatre cheuaux. Acefte caulé ilz ont efté dids (bigati 5c ejuadrigati) de deux 5c quatre cheuaux. Puis par la loy Papyriane, l’as a efté batu d’vne demye once. Luce Drufe eftat Tribun de la commune a alloyé l’argent d’vne oétaue de cuyure. Celuy qu’on appelle au-iour-d’huy vidonat a efté batu par la loy Clodië : car au par-auant cefte monnoye eftant apportée delà Sclauoniëeftoit tenuëpour marchandifé.Or en eft la marque de vidoyre,d’ont eft venu le nom. Le dernier d’or a efté • batu foixante 5c deuxaus apres celuy d’argent, dont l’autheureft incertain , lequel fut marqué l’an cinq cens quatre-vingts & cinq de la cité de Rome . Q_. Fabius eftant Conful, & cinq ans auant la guerre Punique, duquel il n’eft point de memoyreque le peuple Ronfàin ait vie auant la defaitte de Pyrrhus. Lucain a aufti exprimé que la lourfé 5c vlâge du de* > nier d’or,d’argerft, 5c de cuyure,a efté aux autres nations par ces parolles:
- De Tbeffale le Prince Iones en maniéré De chaude mafjè ftdes métaux la première Baterië, £7* d'argent la fonte, & l’or bâtit.
- En monnoy & le cuyure >engrandi fourneaux fondit.
- n’eftpssderiuéde(»a>»fra5)nombre, ne de NumaPompilius, mais de(»ome»j:nom, d’autant qu’il eft effigié du nom des Princes à l’ancienne coutume, ou plus toft au témoignage d’Ariftote au cinqielme des Ethiques : Il eft ainli appellé, non pas introduictde nature, mais delà loy qui fappelle vôpaç.
- Seftcrce,félon Prilcian, aux figures des nombres, 5c poys, eft vne monnoye de deux liures 5c demyë, 5c pour-tant eft il appellé léfterce, quafi fé-mifterce,duquel Arunce: Le léfterce eftoit anciennement de deux liures 5c demië quafi lémifterce, auquel temps le denier valoir dix liures. Varroau cinqielme liure de la langue Latine: Le léfterce quafi lémiftercerdeux liures de vray 5c demië eftoyent l’ancien fefterce. Vitruue au quatriefme Iiure:Ilz ont appellé fefterce ce qui lé formoitdedeux aftës, & d’vne moytié pour tiers.Pline au trente-troifiefme:Le denier fut receu pour dix liures de cuy-ure,le quinaire pour cinq, le léfterce pour deux 5c demië. Plutarche de la vie de M.Antoyne : t Les Romains appellent vingt cinq Miriadesvn mi- + VTertjéx lion deléfterces. Helin Lacedemonien de la vie de Heliogabale :Iamais il ^Btarc °* ne loupa à moins de cent Iéfterces,c’eft à dire de trentre liures d argent*
- Y ij
- p.128R - vue 267/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Quant à I’eftimation du talent, i’ay auifé qu’il ell neceflaire d’amener l’opinion de diuersautheurs,parceque les efcriuins font endiuers auis. ex Tite Liue au trente-quatriefme: t Le nombre des prifonniers durât la guerre Punique elloit grand, lefquels Annibal auoit vendu, d’autant qu’ils j, n’eftoyent point rachetés parles leurs. L’argument de leur multitude ell, „ que Polybe elcrit qu’il coufta cent talens aux Achins, veu qu’ilz ordonné-„ rent cinq cents deniers pour telle pour les rédre à leurs maiftres.A celle rai-„ lôn donquesl’Achaiëen a eu douze cents. Aioutesmaintenat par porcion „ quel nombre il efl vray femblable auoir eu toute la Grece. Par laquelle rai-fon on voit que le talent valoit lix mille deniers, car cinq cens deniers baillés pour telle iulquesà douze cens prifonniers font le nombre de lix cens mille deniers, & montrent les cent talens: or ell il que la centielme partie de lix cents mille le treuue ellre de fix mille. Au regard des deniers de ce temps la,il fe treuue qu’ilz elloyent d’argent. Ce que Tite Liue montre au « melme lieu. Il y auoit quatre vingts quatre mille talens Attiques en mon-» noyé d’argét, qu’ilz appellétTetradragme,en chalcun delquelz ell le pois 33 prelque de trois deniers d’argent. Le mefme encores au trece-lètiefme-.Il ell 33 tout manifelle que le grand talent Attique a quatre vingt liures, & vn peu 33 plus : veu que la computation des choies lûf diéles manifelle qu’il a quatre 33 vingts trois liures, & quatre onces,qui font lix mille deniers. Tite Liue: Le 33 talent ne pelbit point moins de quatre vingts liures Romaines. De melme elloit l’Egiptien comme dit Varro,& Pline au trente-troifielme liure. Tite 33 Liue aulïï dit : Le Sénat ordonna que chacun talent ne lcroit diminué de 33 plus de trois liures & quatre onces. Et faut entendre,que cent mines Attiques (chacune delquelles ont quatre vingts cinq drachmes) font félon la côputation de Tite Liue le grand talent: car il a loixante mines lèlon Dar-danè.AudemourantTerence montre au Phormion qu’il ell vn talent grâd & petit, quand il dit: Si quelqu’vn bailloitvn grand talent. Seneque au 33 diliefme des epillres: vingt-quatre fellerces, c’ell à dire le petit talent A tti-33 que.Prifcian touchant les pois.Le petit talent Athénien vaut foixante mi-33 nés, & le grand quatre vingt trois, & quatre onces. Aulus Gellius au tiers « liure des nuits Attiques: On ditaulîiqu’Arillote acheta trois petis talens 33 quelque peu de liures du philolophe Speulippe apres fa mort. Celle fom-jj me la fait de nollremonnoye foixante douze mille lêllerces. Le mefme 33 encores au cinqiefme liure : Le cheual d’Alexâdre le grand qui fut de telle, » & de nom de Bucephale, fut, comme l’efcrit Cares, acheté treze talens, 33 & donné au PvOy Philippe, laquelle Ibmme monte en nollre monnoye «trois cens douze lêllerces. Seruius aux commentaires du cinqielme des 33 Eneïdes:le talent reçoit diuers pois félon la diuerlîté des nations. Car 33 aux Romains il ell de foixante & dix liures, comme Plaute le montre en 33 fi Mullelaire, dilànt que deux talens valent cent quarante liures. Nous li-fonsaulîi que le talent elloit quelquechofe petite. Car Homere dit aux ieuz Funèbres de Patrocleque les deniers prins elloyent de deux talens,
- p.128V - vue 268/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. iz< quinous forcede comprendre quelque choie moindre : v'eu que tout ainfi que le premier vinqueur a eu vn beuf, iln’efi: pas raifonnable que nous di-fions que le dernier ait eu q uclque grande chofe.
- Ponde, liure n’a point de Iingulier, comme dit Focas. Nous dilons tou-tcÇ-Po\s3duo pondojfta pondo3&c non binapondo.autternapondo.) Qmntilian au Dremier.Qiie direz vous qu’aucüs vocables feuls font vitieux,lelquels con-ioi n &s fe p ro fe re n t fan s rep rehen G o n ? D e vray (dua3tre, & pondo) fon t di u ers aenres de barbarilme,& toutef fois tous iufques a ce temps icy ont dit (dua pcndo3trepondo)cc qu’eftre bien dit Meflalaconferme, comme aucuns veulent, & cil tout vn, deux, trois, & quatre liures, que deux, trois, & quatre (pondo) comme aucuns veulent. Ce que le preuuentpar beaucoup de rai-fons,combien que quelques autheursne l’approuuent pas beaucoup. Tite 53 Liueau vingt-deufiefme: Qiul liureroit a chacun foldaz(bina pondo 3eyfex 33 Ubrdsafgpti.'jLz mefme au troifiefmeliure: Le dictateur donne àlupiter de-33 dans le Capitole vne coronne d’or du poys d’vne liure des finances publi-33 ques fuyuant l’ordonnance du peuple.
- . Combien que(Spo/z4jdepo uilles foyent proprement les choies d’ont on peut dépouiller l’ennemy,comme lafiilade, ou la robe, on en abufotoutefi » foispour toute choie qu’on luyofte.Tite Lille: Comme Marcel apres la d prinlè de Sarragouze eufi: ordonné toutes autres chofes en la Sicile, d’vne 33 telle foy, & intégrité telle qu’il augmentai! non feulement là gloyre, mais jj aulîî la maiefté du peuple Romain . Il emporta à Rome tous les paremens, » enfoignes de la ville, & les tableaux d’ont Sarragoulè abonde, qui eftoyent dépouillés d’ennemys,& conqueftes de droict de guerre. Au demourat ce futlavn cômencemét d’auoirlesouurao-esde l’artifice des Gréez en admi-ration, & d’vne licence de butiner communément toutes chofos lâcrées.
- Oplma {j>olia) font dépouillés de Chef à Chef, ainfi di£iesde(Op*) Ri-chelfe,comme dit Varro, ou bien de (opta) ouurage, comme autres dilènt, inefmement bien dod:es,veu que ce foie vne œuure notable & noble qu’vn Chef de guerre vinque fon femblabîe.
- Virgile témoigné qu’on peut appeller(ex«»/^) les dépouillés,les couuer-tures,& robes d’homes,dilanv.(ExuutdS indutus Achtüi) veftu de la dépouillé d’Achilles.Et quant aux Georgiques,il parle de la dépouillé du Icrpent.
- 33 Cum pojim nouas exmiis3nitidacjue muent a
- 33 Jnuohùt. Lucrèce:
- 33 Namfepe'dlorum fyohisvolhdnùbusauùhts.
- . Excubu)c fivn guet de iour,(vig///<e)celuy delà nuit, lefquels, comme dit Pline au fetie!me,Palamedes inuenta a la première guerre de Troye.
- Marc Varron expofe en deux fortes au liure de la paix & guerre que c’elt que(/»^a^treues,lefquelîes, comme il dit, font vne paix d’armées de peu de iours.Et en vn autre heu,qu’elles font vne abftinéce de guerre.Ces deux difnnitions lèmblent plus eftre faittes d’vne brieueté de bône grâce & plai-fmtc que manifelte Sc fuffilânce.-carlapaix n’efi: point treues, veuque la
- Y îij
- p.129R - vue 269/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- guerre dure toufiours, &: le combat celfe,nyne font les treues feulement entre les camps,ne de peu de iours.Que dirons nous,fi par les treues ellans les forts faidson donne quelque grand temps?Dirons nous que ce ne font pas treues? Que dirons nous aulïi eftre ce qu’eft eferit au premier des Annales de Quadrigarius, que Cnée Ponce Samnite requill treues de fix heures au Didateur Romain? De ce aulïi qu’elcritTite Liue au difiefine: tExcodë Trois fort puilfantes villes & f capitales de l’Etrurië, Volfimes, Perofe, & » Legoca- Arel° demandèrent la paix, lefquellesimpetrerent treues pour quarante « pita.pro ans, ayans accordé auec leConfuIdepouuoirenuoyér à Rome ambalfa- » capt*. moyennant quelques vetemens de gens de guerre & du blé?Que lèra-ce »
- jj de ce qu’il dit encores au premier liure: Si les treues ne font dides que pour a peu deiours?Duqueidegaftles Vegentes non moins affollésqued’vneba-» taille perdue enuoyentambalfadeursà Rome pour demander la paix, &
- 33 obtindrent treues pour cent ans,moyennant vne portion de leur pais. Les Gréez ont appelle celle abllinence de guerre plus apertement, & propre-men t,car ils l’ont did d’autant que durât ce temps la on ne com-
- bat point,& quelescoupsfont défendus.A la vérité aulîiVarron auoitau-tre choie a faire que de diffinirfuperllitieulëment les treues, & d’entendre à toutes les loix, &raifons des définitions. Quant au regard du vocable (Induciœ,) &pour quelle railonil aellé fait,ceque i’en diray lèmble plus probable par beaucoup de moyens que nous auonsleu. le penlè quelles lont dides comme quafi (indtfla otia) repos lignifié, pour iufques à certain iour, ou certain temps, ne combatre point ne faire aucun outrage, & que tDicquas ki°ur auenu des lors la guerre foitouuerte. Et pour-tant le nom de(*«-^pquibus. d#fLe)eft alfemblé de ces vocables f que i’ay dit, quali comme par vne con-„ iondion & copie. Aurelius Opilius au premier des Mules : Les treues font „ (ditil)lorsque les ennemys fréquentent lesvns auec les autres, lànsdan-„ ger &lànscombat, & delâlemblelenomde(W/rfci<e) auoirellé fait,quafi „ (iwLe)frequentations.
- Suppettœ) font les lècours qu’on requiert d’autruy, lelquels font baillés principalemet a ceux qui font fous la puilfance d’autruy.Nous difons auiïi (Suppsùœ)pour à l’ayde,comme dit Fabius Placiades.Meuius en la dilîefmc 33 Tragédie de Hercules : Fertefuppeùasoptimï milites) a l’ayde ô bons foldats.
- 33 Suetone de Velpafian : Ils chalferent d’auantage le Lieutenant de Syrie hô-. 33 me Confulaire venant a l’ayde,en Iuy rauilfant l’aigle.Plaute en l’Epidique:
- « Souuienne toy que li les vieillards font les mauuais de me venh(fuppetias)a.
- 33 l’ayde,nôpas à laleur.Luce Appulléeaufiliefmeliuredelà Metamorpho-33 lè:Et lors loudain il commence à cris doloreux teop\em(fuppetias)\c lècours 33 d’vne plus grande force. Mais il perdoitfon temps d’cmouuoir l’emotion « par pleurs, veu qu’il n’y auoit perfonne qui luy peull venir à l’ayde que celle 33 feule fille efclaue.Saind Augullin au huitiefme de la cité de Dieu:Ceux qui jj luy port et noz requelles r’aportét des dieux (fùppeti as) de l’ayde pour nollre jj fecours.Celàr au douzielme;Lcs nouuelles couroyët d’vn grand lècours de
- p.129V - vue 270/480
-
-
-
- r3o
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX.
- „ vçnsdechcual{ferrej(ippeti45)\cnhà. l’ayde aux citoyens. Et la mefme en-„ cores:creignant que lès affaires lè portaffent mal,& laiffant trente Elephas,
- „ il eft allé(/#£pef/4*)à l’ayde de lès limites, & villes. Et la mefme encores:Ec „ fefforced’aller(/«£pett<tt)àl’ayde des liens tournans vifàge.
- Strâg^eft vn terme de guerre,lignifiant l’efpace des troupes, auquel font ferrés lescheuaux, ou bien(ftringœ)Com les ranczdes chofès, qui ont vneaffiete continuée, ainfidi&es dc(jîringere)[c rrer. Delà vient qu’on ap-pelle(J?fi£0/h)ceux Jefquels, comme l’on dit, ont le corps maigre. Ou bien (morbm Strtgofm)tbk ài&par les anciens vne maladie decheuaux dont ils ont le corps couzu de faim, ou de quelque autre vice, cpnCi(ffnngofiis)cn~
- „ treprins. Mafurin Sabin au vingtfètiefme liure: Les Cenfèurs, dit il, P.Sci-„ pion Nafica, & M. Pompilius faifàns la montre des gens de cheual en vi-„ rent vn tïOŸ(fîringofitm)couzu} & en mauüais eftat, & fon cheuaucheur en „ bon poind, & bien habillé. Tite Liue au vingtfètiefine: La bataille futre-„ tardée d’autant que Hafdrubal cheuauchant deuant lesenfèignes en petit-„ te compagnie de gens de cheual, print garde aux anciens efcuzdes enne> j, mys,lefquels ilnauoit point au par-auant veu, & les cheuaux plus mai-„ grès, &luy a la multitude fembléplus grande que de coutume. Smngere en terme de guerre, cft autant que degainner, & pourtant difons nous( enfem -vjlnfïiim) vue efpée degainnée. Tire Liue au fèdefine: Et mettant bas le dard il charge YeimemyQiriélogladiojYcfpée au poing. Le mefine encores au » neufiefme: Les pointons & Princes affaillent l’efpée au poing, le bataillon » branlant, & étonné dufredoublement des criz.Suetone de CefànSoudain fExTUi.' jj qu’il fapperceutaffailly de toutes pars depoignars nudz, il enueloppe fa » tefte de fon manteau. redrdema,
- Defendere & ojfendere)nt fè doiuent pas prédre félon la-commune, mais grato. d’vne propriété Latine,defquels I’vn fignifië rencontrer, 6e heurter a quelque chofe, l’autre détourner,& repoulfèr, comme il eft dit en ce paflage par „ C. Claudius lors qu’ils repouffoyentles ennemys des Puniques.
- Les anciens difbyent(Vfr/jere)combatre, lors que quelques vns com-batoyent entre eux pour quelque chofè, que chacun difoit fienne. Virgile:
- 33 Ingentes genïtos diuerjis partïbus orhïs
- 33 Inter fe coiffe Viras, & cernere combatrcferro.
- Ce que maintenant nous difons(<sforer«ere)effant l’vfâge de ccft autre verbe fimple perdu, félon le témoignage de Seneque à Lucille.
- Recipere)cfl autant que recouurer, ou bien deliurer de péril. Cicéron en J3 fon Caton : De vray, fi tu ne l’euffe perdu, iamais ie ne( receptffem) 1 euffe >3 recouuré: Viro-ile:
- O
- » Frugéfque receptas, & torrereparantflammis.
- Keceptus)retraitte, eft vn lieu, auquel l’armée fe retire, d’ont eft venu » (figna receptui canere)qu’on fonne à la retraitte. Tite Liue au trentefètieftne:
- ” Le Prêteur donques contrainéf pour le péril des gens deguerre(receptuica-j> nere'mffii) fonner a la retraitte,a fin que d’impudence il nedes offrift a la fu-
- Y iiij
- p.130R - vue 271/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- rië des ennèmys delêlperéz, & enragez.
- Combien c^t{Ptandium)(o\t déduid du Grec, veu qu’ils appellent (a?-«Ale repas du mydi. le ne puis toutef-fois nier que plufieurs ne le dient ellre deriué d’autre part, comme de (paro) apprefter, quafi (parandium) d’autant qu’il préparé les foldats ôécombatans a la bataille. A qnoy fert d’argument ceft ancien témoignage de Leonide outre fi bonne ellime. E liant de vray Chef des LacedemoniensdegrandrenomàlaguerrecontreXer-xes, quiluy fut fa fin, & aux ennemys, donna aux fix cents hommes qu’il auoitees tant renommezeguillons -.Compagnons difnéz,comme elpe-» rans louper aux enfers. Cato au cinquiefme des Originesdî ietta aux châps fon armée , & la nuit en bataille bien difnée , & prelle apres luy auoir » fait refnontrance.
- Celius SabinusàiailTéparelcntqueles lêrfz auoyét de coutume d’eftre \cnduz(fubpdeis)tçù.c couuerte, quand le vendeur ne demadoit point de garantie. D’ont il dit la caulè d’autant que les lêrfz de celle manière de codifions mizen vente deuoyentellre marquez , afin que les acheteurs ne peulfent point ellre trompés, nedeceuz, & qu’il ne le fallu 11 point atten-” dre à la loy,& qu’on decouurill a l’œil la condition des lêrfz:Tout ainli,dit ” il,qu’anciennement les prifonniers de guerre elloyent venduz auec co-33 ronnes en telle, &pour-tanton les difoit ellre vendus louscoronnes.Car tout ainli que celle coronne elloit le lignai des captifz mizen vête le bonnet aulfielloit le lignai de la vente des lêrfz, à la garantie defquels le ven-deurn elloit tenu à l’acheteur. Il y a aulfi vne opinion d’vne autre railon, pourquoy on a de coutume de dire que les captifz font vendus fous la coronne, d’autant que les gens de guerre elloyent épandus tout au-tourdes troupeaux des prilonniérs en vente, & que cellentour.ement à elle appelle corone, ce que toutef fois i’ay dit ell plus véritable. Ainli aulfi l’enlêigne 33 Caton au liure qu’il a côpofé de l’art militaire. Voyci ce qu’il dit: A fin que » le peuple voile pins toll fupplié en coronne pour auoir elle viélorieux, qu’ellre védu coronne pour auoir ellé vincu.Iullin en Iatrentequatriefme 33 epitome deTrogus Pompeius:La ville de Corinthe ell rafée, tout le peu-33 pie ell vendu lôusla coronne, afin que de cell exemple les autres citéz euf-33 fentereintede lêreuoltér. Et depuis, comme le témoigné Florus de l’ellan des hommes, Lesferfzontprinsleurnom, d’autant que les Capitaines or-donnoyentde vendre les prilonniérs: & par cemoyenf/êr^refieur lâuuer ,, la vie, & ne les tuér point. SainclAugullin de la cité de Dieu: La lôurfe du ,, Vocable de{fmm)(cï£en lalangueLatine lêmble ellre déduide, d’autant ,, que ceux elloyent conlerués, lefquelspouuoyentdu droicl de guerre ellre „ tués parles vinqueurs,&elloyent faidslêrfz, ainli appellés pourellrecon-lêrués.l es prilonniérs elloyent vendus fous la pique fous laquelle elloyent toutes choies qu’on vendoital’inquant .TiteLiueau quatriefme: Lesen-» nemys hors les Sénateurs furent tous venduz. Au regard du Butin chacun „ des Latins, & Hcrniques futrellitué en fon bien qu’il recognoilToittLe
- Didateur
- p.130V - vue 272/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE IX. 131 piètateurfit vendre le refte. Les ennemys fontdièts eftremis fous leiou, lors que deux piques eftans fichées enterre, & vne tierce liée en trauerfo, ils font contraints depafter defious àrez de terre fans armes, & fans cein-„ èture.TiteLiue auneufiefine:De vray comme Pondus Herennius Chef „ des Samnites fuft comme ie treuue en aucunes Annales enuoyé fous le „ iouauec les autres pour purger l'ignominie du Conful. Les gens de guerre fontdièts combatre{fub wewjquand ils combatent(y#£ vinea militari)
- „ fous vn tabernacle de guerre. Lucilius: de ne monter haut, mais de com-batre de.loingf^ vitem). Le foldat efi: dit lancer les dardz(/»£ vâmjquand àlaprefonce des Centeniers ils font forcés de tirer dardz.
- Deditiojttt. lors que les vincuzforendent aux ennemys, Vneredditioa >3 voluntaire eftoit lors queleRoyffinous croyons Tite Liuejdemandoit:
- 3> Elles vous ambafladeurs, & orateurs des Collatins, pour vous rendre auec \
- 3’ le peuple Collatin? Ce que ces autres accordans,IeRoy lorsrN’eft pas le 33 peuple Collatin en là liberté? Et comme ceux la rêfpondiflent qu’ouy,Ie 33 Roypourfuyuoit: Vous donnés vous & le peuple Collatin,la ville, les 33 champs, les bornes, les temples, vtenfilles, & toutes chofos diuines & hu-3’ mainesfàmapuiflance, &; du peuple Romain ? Et comme ces autres luy Initions donnaient tout, finalement il difoit : Or ie vous reçoy. Voylâ la formel'
- , , J. . ,, * 1 1 tioncm.
- ancienne de reddition en 1 art militaire.
- Viètoire efi: diète d’autant quelle facquiert(Fï;c’eft a dire par vertu,car vne viètoireacquifepardol, efi: infâme, laquelle anciennement eftoit en „ grand eftime. Iuftin en 1 epitome quinziefme de Trogus: Mais, comme il „ eit manifefte, eftans enflambés de gloire d’honneur, & non de haynne ils „ combatoyent de dons & prefons mefmes durant la guerre, la menans pour „ lors beaucoup plus honnorablement qu’on ne fait au-iour-d’huy les amy-dés. L’antiquité a feinèt cefte viètoire eftre vne vierge & Déefie compagne de Bellone, & Mars, d’autant que ceux cy pouuoyent fauorifor chacune des parties. Claudianus:
- :3 A fin que la ViSlotre épandit fesfacrêes
- » Pennes deffus le Chef, amie de trophées,
- jj A qui donne plaifir la palme en fa verdure.
- jj Des Empires & régnés, ô vierge garde fèurey
- jj ' Et qui feule procure aux çlay es gartfon,
- jj Et pour fuir trauaux enfeignes la raifon.
- Tibulle:
- jj La vittoirefur N aux lajfe% fon voladdreffe
- 33 -Sur les Trojensfen vient la fuperbe Déeffe.
- . Ouide au huitiefme des Metamorphofos.
- 33 En fufpend longuement efoit l’heur de la guerre
- » Incertaine eut fon Voila viftoire tient terre.
- Armiluflmm,comme témoigné Varron,eft à\€t(ab amhitu lujlri)c efi: a dire vne grande place ronde, ainfi diète, d autant qu eftant tout autour edi-
- p.131R - vue 273/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- fiée decharfaux les ieuxfy faifoyent: & que la la pompe eftoit portée coût au-tour du but faid en pyramide. Aufli y eftoit faide la courfe de cheuaux d’hommes armés de boucliers.
- I»/frw»)aufTi comme dit le mefme Varron,eft vn temps de cinq ans, ainfi appelle de(/aere)qu’eft a dire payer, attendu qu’a chacune cinquiefme année les fubfides, entrées, reuenuz, ôc davantage les taxes eftoyent payez parles Ccnfiurs.
- Jmamentamnr, Arfenac, eft vn lieu auquel font miz en referue l’artille-a rië, armes, & toutes façons de bâtons. TiteLiueau tréte& vniefine: Eftat « la mutinerie plus échaufée d’autat que le feu auoit efté mis es édifices,d’au-i* tour le marché, la maifon Royale, Ôc(arm4nentamm)ccl[c des munitions „ auec vn merueilleux apparat d’inftrumen s de guerre ont efté brûlées. Le ,, mefmeau vingtneufiefme : Il auoit amené auec foy des inftrumens delà ,, bateriëde villes, lefquels auoyenteftéenuoyézauec les viures delaSicile. „ Il fen faifoyent deneufzauflidcdas(^rw^we«t4rio)i’Arfenac, eftanspour „ ceftecaufiplufieurs ouuriers de tels ouurages encloz au dedans.
- Fin du neufiefine Liure.
- LE DIXIESME LIVRE DE
- ROBERT VALTVRIN DE l’art militaire.
- Près auoir, SigifmondPanduIphe,recité les chofes de la guerre dignesd’vn honneur public,&donnéàentendrede tout noftrepouuoir leurs deuoirs & de toute vne armée, nous ferons entendre l’ordre d’vn chacun accoutrement: & premièrement les chofes qui ont efté faides par noz anciens touchant cela, auec les efpeces des paremens des armes, des inftrumens, & des raifons des machines: aufli ferons nousles ma-
- tières, genres, efpeces, & formes: outre-plus les enfiignes de recognoiffan-ce en la guerre qui ont efté le temps paffé en vfàgc,& ont apparence d’auoir quelque intelligence, & lignification. L’habit donques met la différence des degrés,des honneurs, ordres, & Magiftratz, lequel fe treuue de diuerfe inuention félon les coutumes des natiôs, & homes. Les Romains auoyent (toga)lc manteau long pour robbe,duquelpremiéremët tous fixes vfbyent en tous temps, iour & nuid: ou bien d’autant qu’ils auoyent de coutume d’en eftre affublés. Et eft à\ù.e(ategendo)à'mût quelongue, elle couuroit les autres accoutremés. Sa forme eftoit ronde auec vn ample giron,laquelle r’abbeflee fous lebras droid fttroufloit furl’epaule fineftre, comme on le peut voir à Rome es accoutremens des ftatuës, & comme aufli la laiffé
- p.131V - vue 274/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. i3i parefcrit. Valere le gràd de Scipion Nafica contre Muce Sccuola.Et pour-
- j,tant(ditil)que pendant que le Confulfuyt Tordre du droiét,iltendàlaruï-
- „ ne de tout l’Empire Romain, auec toutes les loix, ie homme priué moffre „ pour guyde a voftre vouloir,& fubfcquemment il troufle fur là gauche Ion ), manteau longappertement, &Ieuantlamain dextre, il fecrië: Celuy me jj fuiue quiconque ayme le làlut de la Republique.
- Toga candidayeadémque cretata)le manteau long blanc,& crayé,eftoit ce-luy auec lequel(candidati)cdk à dire les demâdeurs de Magiftrats brigoyët les voix en y aiouftant de la craye à celle fin qu’il femblaft plus blâc, & plus honnorable, &àcellefinaufti que celle façon de demandeurs de Magi-ftrats lèmblalTentinnocensàleurhabit,&ne vouloir pas requérir IesMa-giftrats par ambition.
- L’enueîoppement Gabin elt vn manteau troulTé de forte que Tvn des pans r’alTembîé ceint l’homme. Or effc-il que le Conful voulant lignifier la guerre vloit de celte maniéré d accoutrement pour-autat que comme Ga-bie cité de la terre du Labeur entendoit aux làcrifices,Ia guerrevint par lur-prinlê,&à lors les citoyens troulfans leurs manteaux partirent des au-telz à la guerre d ont ils rapportèrent la vi&oire : & de là eft venu la coutume. Virgile:
- » D’v» trabeau Quirinal, £7* d'vn Gabin troujfé
- » Le Conful bien paré, portes ouure bruyantes.
- Togapalmata le mateau figuré de palmes,eftoit celuy d ont vloyét ceux quitriumphoyent,&auoyent mérité la palme. Lequel aulfi l'appelle le manteau figuré, d’autant qu’il elloit figuré de vidoires & palmes. Le vieil Gardiatr, comme dit Iulius Capitolinus, fut la première perlbnne priuée entre les Romains qui eut à foy la chemilê palmée ,& le manteau figuré, veu qu’anciennement les Chefs mefmes les prenoyent au Capitole,ou bien au palais. Tulle Hollilletroyliefme Roy des Romains, fut le premier qui ordonna apres auoir défait les Etrufques,que le mateau bordé de pourpre, & celuy de pourpre(lefquelz anciennemét elloyent les liurées des Ma-gillrats Etrufques)feroyent portés dedans Rome. Il elt vray quel’âge puérile pour lors n’vfurpoit pas le manteau bordé de pourpre,car il eftoit comme les autres que nous auons recité, acoutrement de dignité. Mais depuis Tarquinius Prifcus fils du banny Corinthien Demarathe(lequel aucuns ont appelle Lucinon tiers Roy apres Hoftille, & cinquiefme depuis Romulejtriumpha des Sabins, En laquelle guerre il fit vne harangue a la louenge dé fon fils de l’âge de quatorze ans, d’autant qu’il auoit tué de fa main l’vn des ennemys, &luy donna vn cœur d’or, & vn manteau borde de pourpre honnorant la hardiëfle de l’enfant préuenant l’age,des guerdôs de virilité & d’honneur. Les autres penlèntquecemelme Prifque ordonnant d’vne vigilance de Prince îâge l’eftat des citoyens auifà principalement à Tacoutrement des enfans nobles, & ordonna que les Patrices fac-coutreroyent d’vn cœur d’or, & d’vn manteau borde de pourpre, àc ceux
- p.132R - vue 275/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- feulement defquels les peres auoyent eflé Sénateurs. Aux autres eftoit tant feulement permis le manteau abord de pourpre. A ceux touteffoisdcfquels les peres auoyent hanté la guerre au temps requis en homme de cheual. Au regard des Libertins il ne leur eftoit anciennement permis de fen accoutrer, ôcencores moins aux eftrangers, auec lefquels les Romains n’a-uoyent aucune amytié. Mais depuis il fut permis aux enfans des Libertins pour la caufè qui fenfuyt, que M. Lelius Augure recite difant,qu a la féconde guerre Punique les Duumuirs allèrent aux liures Sibyllins par vn decret du Sénat à caufè de plufieurs prodiges. Apres lefquels veuz,ils ont rapporté qu’il falloir fupplié'rau Capitole, & faire banquetz aux Dieux d’vncleuée de deniers, à laquelle contribueroyent les Libertins qui portent manteaux longs. Le fàcrifice donques feft fait auec les enfans nobles Libertins, ioin&auffi les vierges ayans pere & mere qui chantoyent les Hymnes. Et lors il fut permis que les enfans des Libertins qui eftoyent nés de mere de moyenne condition porteroyent le mateau à bord de pourpre, & vn cordon au col au lieu du parement du cœur dor. Valeritis Flac-cus recite que lors que le peuple Romain eftoit perfecuté de pefte, & qu’on eut reponfe que cela eftoit auenu d’autant que les Dieux voioyent la ville triftepar faute d’auoir entendu l’oracle. Et comme il auint qu’au iour des ieux Circenfes vn enfant vit d’vne chambre la pompe au deffus, & qu’il récitait à fô pere en quel ordre il auoit veu les fècrets des chofès diuines difpo fées dedans le coffre en car, le Sénat à fon rapport ordonna que les lieux fè-royent voilez,auquelpaftèroitlapompeeftantparce moyen la pefte ap-paifee. L’enfant qui auoit découuert la difficulté de l’oracle impetra l’vfage du manteau long. Ceux qui fàuoyent mieux les antiquités recitent qu’au rapt des Sabines vne femme nommée Herfille n’abandonnant point fa fille, fut auffirauie. Laquelle, commeRomule euft baillé à femme, a vn certain Ofque d u païs Latin, & homme de vertu qui feftoit retiré à fa franchit, il donna à l’enfant quelle eutpremier que nulle des Sabines enfantait, & d’autant qu’il auoit efté enfanté durant la guerre, & appelle par la mere,Ofque Hoftille, vn cœur d’or,& l’hôneur du manteau long. De vray auffi côme Romule euft appellé au confèil les rauiés, il promit comme l’on dit à l’enfant de celle qui première enfanteroit vn citoyen Romain vn noble prefent. Aucuns penfènt qu’il fut ordonné aux enfans de porter vn cœur dor deuant leur pis, lequel en regardant ils feftimaffent de tant eftre hommes qu’ils auroyent bon cœur,& leur fut liuré d’auantage le manteau long à bord de pourpre,à fin que par la rougeur du pourpre ils fuffent cou-uers de la rougeur de nobleffe.
- Pahidamentum) cote d’armes laquelle au-iour-d’huy fappelIe(C^wh) qui eft la robbe notable des Chefs & Capitaines, laquelle eftoit de pourpre mouchetée de couleur bIanche3ou de rouge,& d’or. I a coutume eftoit que les Chefs en fulTent accoutrés durant la guerre. Au demeurant(P<*/tf-damentam)cù. ainfi dnft, comme dit Varron, d’autant quç(faceretj>alàm bel-
- p.132V - vue 276/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X. 133
- Um futurum hellum)ï\ donnoit à cognoiftre la guerre future.
- Paludatï)font gens en armes , & bien en ordre , de vray aufli ils appel-]oycnt(Paludamenta)tous accoutremens deguerre.
- Trabeacdoyent robes Royales jdelquelles, comme dit Suétone auli-uredes diuerfités des robes, il eft troys manières. L’vne eft d’vn pourpre fort pur dédié tant feulement aux Dieux. L’autre Royalle, qui eft de pourpre, mais elle a quelque choie de blanc. La tierce eft Augurale de iaune & pourpre.
- Pœna)\a. mante eft vn accoutrement de guerre qui lèiette fur tous les autres accoutremens. Et eft ainfi appelle, comme dit Varron, d’autant qu’il eft de laine. Les vns dient que c’eft Tufcan,les autres que c’eft ce qu’en Grec ils appellent CUna: Obbas les dit eftre nommées Cblenes & non pas Lewer.Orquantala façon de la robe & de fa couleur Virgile le montre en lès parolles ;
- ,j - Tÿriôyue ardebdt mimes Una.
- lîeftmanifefteque(S4gw»S4gd &S4g«/«wJeft vn accoutrement court ,j propre à la guerre. Tite Liue au huitiefme: Il a tout tournoyé, aecouftré de » (/^«/«^menantaüfti les Centurions habillés en foldats,àfinquelesen-„ nemys ne prinlènt garde que le Chefles tournoyoit. Et en l’vnziefme tou-„ chant AnnibahPlulieurSj dit il, l’ont Ibuuent veu couché furla dure entre jj les gardes, couuctt mïlitari/dguîo)â'wn lâyede loldat, fon habit, lès armes> „ &cheuaux, ne le voioyent en rien plus excellents qu’en lès égaüx.Ilyen aquil’appeIIent(w///f4rep4//i»w^4^r4f«w)accoutrementquarré de loldat, &auoireftédi&(S4g&wjparcequilaeftémucmépâri£ lagaekédes Gau-loys contre la mauuailê dilpolîtion de l’air.
- PenuU)e(ï vn habillemët de guerre auec frages pédâtes,lequel aucüsdiét auoirefté ainlî appellé,d’autat qu’il a eu fô cômécemét des Penoyz vlânsde „ celle façôd’accoutremét.Seneque au einqielmeliureàLiberahll te fouuiét „ bié que quad tu voulus repolèr lous vn certain arbre, ayat bié peu d’vmbrej „ eftatpour lots le loleil fort ardant, & le lieu fort rude aux feftes des rocheSi „ duquel ce feul arbre eftoit produiél,que l’vn de tes côpagnôs de guerre elle „ ditlàpenule. Spartianusdela vie d’Adrian : Les Tribus delà côniune lôu-,j IoyentvlcrdePenulesen tépsdepluyës,& noies Capitaines generaux, d’ot „ H auient qu’on les voit entlôg mateau, & nô auec penules.Helius Lampri-„ dius en la vie d’Alexandre Seuere: Il permit aux vieilles gés de porter les pe-nules dedans la ville,a caulê du froid,combien que celle façon d accoutrement fuft robe des champs, & pour la pluyë. Iuuenal en là première làtyre: j> Ce futpourquoy fouuent ma femme delaiffay
- jj Par les Efjuillesfroides par monts ne cejfay
- jj D e courir epuand Dius le Vernalfort bruyoit
- jj De greffe, & mapenule en pluyë dijhlloit.
- tdcerndjciiv n habillement à franges du-quelârtciennemétvfoyent.lèu* lement les gens de guerre. Et pourtat pour la difterëce du peuple de la ville,
- fActogà-
- tiproàto-
- gatis*
- p.133R - vue 277/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- & de celuy du camp ou appelloitceux cy(Lœcernatosjfrangez, & ces autres (f0g4tw)emantelez..Et ont efté di&es Lacernes pour les extrémités des fran~ ges quafi iacerées.
- M<tftma)c omme dit Confence,eft vn accoutrement Sardanoys,qui eft faidde peaux de bettes fauuages, ain(1 appellé félon l’auis d’aucuns, quafi mondruëux,par ce que quiconque en eft veftu a apparence de belle fauua-« ge. Cicéron pour Scaure: Lequel le pourpre Royal nepouuant émouuoir » la maftruce des Sardes a changé par induftrië.D’autat que Cicéron fe moc-quant du Sarde la appe\lc(mafimca) comme le témoigné Quintilian.
- Combien qu’aucuns ayent(Sfr^/<^jrobes de pannes, comme ontles Sârmates, lefquels fecouurent de pannes, &c qu’il ny ait point de doute, comme dit Labeo que(/bv*g#f<*)ne foit toute manière de robe, L’audorité touref fois de Pomponius, & Caffius, & de plufieurs autres me mëuuent de penCen que(ftragula)nc(k point vn accouftrement vil, mais précieux, cô-me Tite Liue le témoigné au trefieme liure de la guerre Macedonique: Veu i> (dit il)qu’il t’eft licite fayder de pourpre (ïn vefîeflragula) en ta couuerture. 33 Et la mefme au neufiefme liure: L’origine de la fùperfluité des eftrangérs 33 fut apportée a Rome par l’armée Alîatique, comme liz doréz(Veflem ftragit-33 UmprenoJîtmJ&c les riches couuertures. Cicéron contre Verres en la qua-ijtrielmeadion:Ildifoitqueplufieurs couples detalfes, eguiéres d’argent, 33 & vne nchc(ftrag(ila)couuaxmc. ValerelegradauquatrielmeIiure:Voyos » fr'auiourd’huy aucun homme de renom vfe de pennes pour couuerture. 33 Floraceau fécond des fermons.
- 33 Vhum de oBogmta dnnis eutflrdgulâ vejîis.
- Iepenfètouteffois plus raifbnnablement&proprementlùyuantlete-moignage de Varro fort fufEfânt, &: parlant de mattelas ou coide,en la langue Latine, tout ce qu’ils entendoyent, fappelloit(/?r^«/«»î)de(^£r«o) étendre. Seneque au quinziefme liure des epiftres: La paillalfe ou mattelas eft fur terre, & ie furellerquant aux deux penules, l’vne fèrt de mattelas, & l’autre de couuerture. Vall.Martial es Apophoretes:
- 33 Stuguld^urgureis lacent Viüofa tapetù.
- le péfè âüfïi que les couuertures d’ôt on a de coutume de couurir les che-uaux,fbnt contenues fous le nom de(vej?i*)veftement. Les Lacedemoniens aufli ont vne chemifè propre,qu’aucuns appellent Punique,les autresCoc-cinée, cramoifië,laquelle il eft certain auoir efté par eux inuëtée pour ofter la cognoiftance du fàng par vne conuenance de couleurràfin que lors que quelqu vn fèroit bielle a la bataille,le cœur de î’ennemy ne le r eforçaft en le voyat. Les Romains en ont vfé fous les Côfuls. Et pourtat on auoit de coutume de la mettre le iour aüat la bataille deuant les loldats Princes, pour vn auertiflemët & ïdice du côbat futur.Ce que temoignePlutarche en lavie de 33 Fabius Maximus.C6me(dit il)Hanibal eut fô cap le lôg de la riuiére du Fa-33 te près les Canes,le Côful fit incôtinent au poind du iour leuer vn ligne de >t bataille. Il y auoit de vray vn certain accoutremét rouge étédu au deffus de
- la
- p.133V - vue 278/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. i34
- latente du Confiil. Parquoy les Carthaginoyz ayans contéplé la hardieffe duChefdes Romains, & le grand nôbre de ion armée,veu qu’ils n’efloyët „ pas approchas à moytié près,furet de prime face effrayéz. Plutarche enco-res touchant la vie de Pompée. Alors Cefàr difànt le iour tat defiréeftre vc-nu, auquel le combat fecret auec les homes, & non auec la famine, 8c pau-ureté, commanda foudin de mettre vne chemifè rouge deuant fà tente,car ccftoit aux Romains le lignai de bataille.
- DES ^ÎBJAES ET DE L^î SOVRSE DV 1vocable. Chapitre IL
- R maintenant fômmes nous amonneflés de montrer auec vn grandtrauailauxignorans toutes les efpeces d armes, d’inflru-mens, & d’artilleries pourbateriës de villes, en quoy nous les pourfuiurons chacun particuliérement,attendu qu’a chacune nation plaift fbn inuer.tion, 8c que les nouueaux efpritz des artillérs pren-nenttoufiours pîaifirànouuellcsinuétions.Au demeurant nous les pourfuiurons tous par le menu, fans touteffois preforire nulle part aux enten-demens des hommes, la liberté de reciter ce que chacun aura veu,& de fefiouyrenTes inuentions.
- ^yirma)les armes, comme dit Cicéron au premier des Tufculanes, font diètes entre les membres de l’homme de guerre, lefquelles font portées d’vne telle adreffe, qu’au befoin il puiffe en mctant bas fà charge com-batre de fos armes aufîi aifément que de fes membres. Lucrèce au cinquief me de la nature:
- Les mains, ongles, & dens antiques armes furent.
- caillou% & tronçons de forejlcombatirent Maïs foudin que le feu Vint à la cognoiffance Le cuiure auec le ferprindrent apres naiffance Le cuiure auant leferfutpremiéren vfdge.
- ^rma) comme témoigné Vlpian, font tous les bâtons,ceft à dire comme bâton aguifé,pierres, & non feulement epées, pointons,& iauelines quon appelle romphées. Caius de la lignification des Vocables: Le nom des armes nefignifiëpas feulement les efcuz, 8c glayues, mais aufîi les piques, & pierres. Parquoy les armes peuuent eflre âi&cs(ab arcêre) repou filer, chaffer, par ce que par elles on peut repouffer l’ennemy. Ou bieu elles font dides proprement pendentes(4^ arm'ts) des épaulés,commelef-cu, l’efpée, le poignard, 8c la courte dague : veu que celles que nous lançons au combat font diètes ( tela ) bâtons de get. Cicéron pour Aule Ce-rinne : Quels hommes pourrons nous véritablement appeller armes, fi nous voulons parler Latinîle penfè que ce feront ceux qui font equippes 8c armés d’efcuz,& bâtôs de iet.Que fera ce dôques,fi tu aschafTéfoudin quel qu’vn de fà terre à coups de mottes, ou pierres, ou de bâton : 8c qu il te foit
- Z ij
- J)
- J)
- JJ
- JJ
- p.134R - vue 279/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- „ ordonné de remettre en poffeflion ceîuy que tu as chafTé à hommes armés, „ diras tu lauoir fait ? Si les parolles ont lieu, fi les caufes font confiderées fe. „ Ion les vocables, Sc non felonraifon,ieteconfèilIedeledire,cartu ob-„ tiendras que ceux quitiroyentles pierres qu'ils amaffoyent a terre, & que )3 les gazons & mottes ne font point armes. Ceux auffi n’eftoyent pas ar-,, mésjlefquels enpaflantontcueilly vne branche d arbre, ioint que les ar-„ mes font en leurs noms: les vnes pour nuyre,les autres pour la defenfe, „ lefquelles fils n’ont eu, tu obtiendras qu’ils eftoyent fans armes.
- DES AK ME S DESQUELLES N O VS
- fommes couuefs. Chapitre III.
- L faut donques premièrement parler de celles defquelles nous fommes couuers.En quoy tu ne dois pas enfuyure vne certaine temeraire coutume du pais des Gauloys,lefquels fè confians en leurs forces, comme pour combatre d’vne plus grande gloire,ne fe dépouilloyent iamais qu a la guerre, & combatoyent nuds,d’ont les plus gentils compagnons font tumbés en grands inconueniens . Les armes donques d’ontnous fommes couuers, font les falades & corfèletz de di-uerfès façons, efouz, & infinies autres telles chofès. Quant àl’inuention des armes forgées de fer, & d’en couurir lexorps les vns l’attribuent a Mi-nerue,les autres iiuppkerRoy deTheffalië.
- (Stla)eK vnhabillementdetefte,ainfidi&pourla fèmblancede Silus. Car Silus, comme dit Feftus, eft vn nés tirant contre-mont Sc camus. Or eftfgrffo^que Curetesf comme on dit)a trouué félon que Diodore le témoigné, vne crefte de cuir, veu que Cafïis foit faictede laine. Et eft di-été (galea) comme dit Varro, de Galerus,rond bonnet du-quel ont vfe plufieurs des anciens. Nous appelions ( Qonus) la curuature qui appa-roift le plus for elle & for laquelle eft la crefte . Virgile au troyfiefme desEneïdes:
- ” Et conurn injtgnis Galea criftafque cornantes.
- Buccula) Iabaniére,eft vne partie delà falade. îuuenaî en la troyfiefme fatyre:
- ” Et fraffa de Cafiide buccula pendens.
- Nous lifons aufli (Galeam comamem aut criftatam)#autant quelle a la crefte parée de queues de belles, comme'.{Criflaque hirfutus equma, dut comas hahen-few)eftantherifTé d’vne crefte de poil decheual,oubien auecdes creins. Stace: {Mon ergo interga cornante s Ahantiadas.)Et la mefme fobfequcmment: (Comantem Mndrogeigaleam.)Semblablement aufli ceux qui fè vantoyent de vifteflè, mettoyent en leur falade vne penne en ligne de vifteffe, laquelle, oftans auxennemys vincuz,ils portoyent pendues à leur col en ligne de vidoire,môtrans en les rauifïant auoir efté plus vites qu’eux.Ils ont elle appellés(Pi/^ir^z)rauifreurs de pennes. luuenalen la première fâtyre:
- p.134V - vue 280/480
-
-
-
- *35
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X.
- Interpinnirapi iuuenes iuuenéjque lamjlas.
- Nous trouuons des autheurs entre les plus metables & plus renommez auoir prononce tant en genre mafeulin que feminin(Torym)qui elt vnacoutrement &: parement de col. Ouide au premier des Faites:
- „ Exvncquidem célébrésauttorquïs adèmpti.
- „ Cicero au troyfîefine des offices: C’eft ce Manlius qui appelle au com-batpar vn Gauloys, le défît au-pres de lariuiére d’Anion, au-queî oftant « («rc#f/H)vnechayneilen fut furnomme.Tire Liueau lètiefme: Puis il le « dépouilla(forç«e}d\'nechayne, le corps citant étendu furterre fans aucun jj autre mal, laquelle enfânglamée il mit à Ion col.Aulus Gellius es nuitz jj Attiques neufiefmehure: Apres Falloir abbatu,il lüÿtranchaLa telle, & jj luy arrachafrcrpc/wjvne chayne, laquelle langlante il mit à Ion coLSainét jj Hierofme en Iexpofitiô deDaniël deuxicfme. Certes ie fay vne chofe digne jj de moquerie dilputant en Tinterpretation des Prophètes, quafi comme jj Grammarien des genres des verbes. Mais pour-autant que i’ay elle re-jj prins par vn certain ignorant, promettant mons & merueilles, en ce que jj i’ay traduit tarants en genre féminin , ie cotteray en paflant que Cice-jj ro parlant de Marius a dit Torquis en féminin genre , ôc Tite Liue en Mafeulin.
- On dit que(^w?:R?)braffieIétz ou écuffions que lesges de guerre ayas re~ ceu endô des Capitaines, portçt,IoE ài€tcs(ab armo)àt l'epauIe, d’autat que les anciés appelîoyent;Craw)les épaulés auec les braz. D’ont les armes qui ypendent, font ainfi appellées, &cfont(drmflîœ)pa.remcns dépaulés ou de braz en façon de cercles diétsen Grec'j&ga^owsîçef. Aulus Gellius au neufief-„ me des nuitées Attiques:Entre îefquels vn certain Gauloys nud horsFelcu, ,j & deux glaiues marcha paré d’vne chayne (armillis) d’écuffions ou bla-jj zons.Tite Liue-.Ony aioufte vnemenlônge que communément les Sa-jj bins auoyent au bras léneltre (armiüas)dcs écuffions de grand poys auec des jj aneaux de pierreries. Ouide au fécond des Faites: jj Fregeratarmillas non ilia ad brachiafraflas.
- jj Cœjhts lignifiant les armes des poings, elt de laquatrielme forme, le-jj queleltvn cuir garny de plomb, & barré de fer, duquel les combatans a jj pugnades arment & garrottent leurs braz, & entre plufieurs nations,mef-jj mement entre les Sauromates,ils fentretuënten combatant.D’ont le nom jj de(Gf/h&?)aeIté donné a eau le de (cœdere) tuer. Cicéron au deufielme des j> Tufculanes:Les combatans àpugnades gemiffient quand en chargeant à ;j coup de celtes, ils donnent à leur ennemy, non pas que ce foie de dueil, jj ne de lâcheté de cœur, mais pour-autant qu’en pouffiantee loupir, tout jj le corps femflambe , & en effc le coup plus grand . Virgile au cinquief-,j me des Eneïdes:
- Sur fsn propos fny, iliette en leurprefence Des cejles vne couple, ayans vn pois immenjè: Defquels combatte Erix accoutumé ejloit}
- Z iij
- p.135R - vue 281/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- >3
- 33
- 33
- 33
- Etfuries fermes do^ fis bras il efiendoit.
- Chacun fen étonna, \eu lagrande roideur,
- De fiptgrands do% de boeufs auecplomb fer dur.
- Le mefme au mefme liure:
- Or Dates étonnépar fus la compagnie Les refufi, & le preux Eneas lors manié Le pois, & ça & là des liens la grand fuyte. Encores au mefme liure:
- Lorsfajfeureen fis doigt% chacun fiudin dre fié Et eflendans leurs bra% en l'air les ont dre fié Des coups ont leur chefz hauts en derriér retiré, Etmejlans mains aux mains ont au combat tiré.
- Le mefme encores:
- Sa dextre retirant les ce fie s apouffé Au milieu de fis cornes, & a les o% cafie Luy ouurantle cerueau.
- St ace;
- »
- 33
- 33
- 33
- Fay apprins de quel tour les Africains remuent Les armes, & comment les Maffagetes ruènt ^Au combat, & comment les Sauromates dreffint Leurs cefles de furie.
- fLege vbi Ils ont aufli appelléf (fiulponeasfies cefles liés de plomb,corne en vfë Ne-
- que Seal- U1*US enlacomediëduPhilempore:Il fautbatrede fculponées les colles à ££/ ceflui-cy. Plaute au Caflîne en a vfe de mefmes: Beaucoup mieux de fcul- „ bamenda ponées d’onton te foufflettemefehant viellard.
- âuécU & Pétale)cuyrafTe, ou corfeletefl vnecouuerturedepoi&rine. Plineau
- batuatur trentequatriefine de l’hifloire naturelle: Spurius Camillus fit aufïi apres la » probaftu. defaitte des Samnites combatans fur peine de leur vie vouée a quelque» 3> Dieu, Le Iuppiter qui efl au Capitole, de leurs cuirafTes, corfèlletz, fâ-33 lades, & greues.
- Thorax)tfl proprement le pis de l’homme, ou bien la partie plus éleuée.
- 33 Pline au vingtfïxiefme:Cinq brins d’ifope & deux de rue, auec troys figues 33 cuites purgent ( Thoracem jl’ellomach .Touteffois on le prend pour ce qui efl de fer, & d’ont l’eflomach & le corps efl couuert. Plutarche en 33 la vie de Luculle :Il efloit vettu(thoracem)â’vne cuyrafle pollië, & faite a éfcailîes, furlefquelles il portoit vn manteau Punicien.
- Au regard des chemifès, defquelles la chair nue efl couuerte, plufieurs les ont diuerfés, félon leurs coutumes & fantafïës : les vns de fbye ou de lin. Lefquelles ainfi que i entend ne font point fauffables acaufé du nombre de leurs pliz. Les autres difént qu elles repouffent tout ferrement,efias leurs plizremplizderecumede fer mifé en poudre. Les aucuns trouuent bonne celle d’encens fait de la mefme forte. le treuue aufli qu’aucuns ap-prouuent le cuir de cerf trempé en fuc. Pline aufli témoigné au fétiefme,
- que
- p.135V - vue 282/480
-
-
-
- J)
- )}
- )}
- i>
- »
- Emendaui ex VirgiU
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. j3s
- que les laines cuites en vin aigre ne fè fauffent point. Au demourant les o-es de guerre n’ayas plus d efperace es armes offenfiues, ont leur recours a celle maniéré de couuerture le confiansaux lames de fer, ôcà l’habillement de tefte,d’ont tout le corps eft couuert.
- Pbalerce)bardcs,ôe caparaftbns,&(Ep^ipp/d)fèlles,fontparemens de che-uaux,& d’hommes,& de guerre. Virgile:
- Ah premier qui \incra [oit le cbeual bardé.
- Salufte au Iugurthe : Mais fil demâde pointons,enfeignesÿiWer^)bar-des,& autres dons militaires.Virgile au difiefme.
- EurialuspbalerasRbamnetis & aureabullis Qingulà.
- Iuuenal en la cinqiefme:
- Vtlati pbaleris omnes& torqmbus omnes*
- Horace es epiftres:
- Optât epbippia bos,piger optât arare cab allas.
- Lorica) quon dit auoir elle trouuée par Midas MefTene, font armes faites de cuir delquelles faidoyent les anciens. Varro de la lague Latine: £.0-r:a*)eftainfi diète,d’autat qu’on faifoit des cuirafles de cuir cru. tLes Gau- ftégèfue loys depuis la forgèrent de fer ayant mefhie nom, & firent aulfi la chemifê GatiTeTer-de maille, laquelle anciennement ne couuroit que l’eftomach, de depuis ro.pro fac-tOUt le corps,d’ont il eft dit: ccdit cîia;
- Le pis de trois cuyraffes eft bien contregardê l^s*
- Ne pour peur lors cercboitle dos eftre gardé.
- Et Lucain au fètiefme:
- Quant iter quo tortagrauesloricacatenajs Oppofuitjotô que latet fub tegmme peBas*
- Or le faifoyent elles d’vne matière & ouurage riche félon le pouuoir,corne celles de Maximian & des Roys Ptolomées lefquellcs eftôyent d’or, les aucunes de cuytire, les communes de fer. Les aucuns les ont fîmples,oua deux,& trois doubles,les autres aymet mieux celles qui font à écailles auec les ioinéts couuerts,ou bien faittes a plumes,& fen arment.Crifpe Salufte: Lescheuauxauoyent mefmes bardes,lefquelleseftôyent faittesdelinge^
- & de lames de fer en façon de plumes. Virgile:
- Il picquoit fort cbeual fort braue en fon efeume Couuert depeau de cuyure en écailles déplumé loinCtes auec fin or.
- Iuftin en l’epitome de Troge Pompée au quarante & Vniefme liure.-Eux & leurs cheuaux font armés de cuyrafle & bardes,Se de plumes tout le long de leurs corps.
- Baltbeus, n eft pas feulement laceinétured vn homme de guerre, & de laquelle ils font ceinéts, mais auffi la courraye a laquelle pédent les armes, & ce non feulement par humilité,mais auffi pour vne brauerië & iaétance, comme il eft certain que Turne l’a eu.Virgile au douziefme des Eneïdes.
- Z iiij
- p.136R - vue 283/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ss Lors que le malheureux Baltée Je montra
- A fes hautes épaulés,& les clou^ démontra 3i La cemflure a Turnus qud Jon malheur porta,
- j} QjJau beau ieune Paüdsje tuant il ojla.
- Clypeï) les boucliers font armes â gens de pié, 6c les efouz à gens de che-ual. Virgile:
- „ -£7" clypeumfuperintonat,ingens,
- a aut-Ipfè ingens clypeumfupta'tpfum.
- On litauflî(Wclypeum)cc qu’ appreuue Caper, 6c le deuonsplustoft re-ceuoir. Il a de vray enfuiuy Homere. Aulh le trouuôs n ous vforpé par les là-uans eforiuins des arcs tant au genre neutre qu'au mafculin.Trebellius Pol-33 lio:Ilh clypeusaureus) ou bien corne difont les Gramairiens (clypeum auteum) 33 Senatus totitts luàicïo in E^omana curia coüocatus ejl. Tite Liue aulfi en avfé au gé-re neutre au trente-cinqielme,i’Aedilitéceft’ année la de M. Aemille Lepi-33 de,ôc Luce Aemille Paul,fut notable en laquelle ils condamnerét plufieurs 33 marchans de beftail, duquel argent ilz ont mis au fefte du tëple de Iupiter 33 (Clypea inaurata.) Lemefmeau tïcntc-huïücCme:Et duodeàm clypea durataab 33 œddtbus curruhbus.P. Claudio,& P.Sulpitio Galba funtpojîta expecunia quajru-33 mentarios adannonam coprehenfam damnauerat. Pacuuius: Clypea currum reliquit 33 Chlamide cotorta. Les anciés Pont appellé(clypeum)2, caufo de là rôdeur, 6c du cuir de bœuf auquel fut efcrit l’accord des Gabins auec les Romains. Les efcus de vray anciennemet des bornes preux elloyent peinéts: au contraire ceux des lâches de cœur 6c nouueaux foldats elloyent purs. De la eft venu qu’on dit,il a i’efcu blanc fans hôneur, c’eft â dire qui n’eftoit point peinct. Les efcuz aulfi tels que ceux d ont on côbatoit â la guerre de Troye elloyét imagéz,ainfi que le témoigné Pline au tréte-cinqiefme Iiure:d’ont eft venu —le nom de Clypeus non pas de(duere)d’ont vfoit l’antiquité pour combatre, ainft qu’vne fubtilité peruertië des Grammairiens a voulu.Car,comme dit Seruius les plus grandz efouz ont efté ditls(Clypei) d’autât qu’ils couurent le corps, du vocable Grec(*Ae7ifa)cacher. Au demourât on le trouue fouuét prononcé au géremafculin.Iîeft vrayqu a fouis d’aucuns (Clypea) au genre neutre font plus referéz â l’image, 6cpeinture ou parement, mais au mafoulin, aux efcuz. Prote 6c Athere combatans entre eux, ont (comme londitjinuenté les bouchers, ou bienCalthus fils d’Athamas. Hérodote aufti dit que les Carins ont efté les premiérsquiont peint les efouz, 6c ont fait les poignées, auf-quelles ils pendent :veu qu’au par-auant ilsfen aydoyent fans elles, les pendansâ leur col auecvne courraye du collé de l’épaule gauche. Au regard de leur matière, elle eft en eftime folon leur forme. Les Africains en ont fait d’or. M. Aufidius a fait entendre que fes predecelfeurs en ont eu d’argent. Alexandre,Roy des Iuifz en mit huit mille en telle â Ptolomée qu’il appelloit (hecatommachos) c’eft adiré combatans contre cent,d’autat qu’ils l’aydoyent de boucliers de cuyure.On dit que les Numides o nt fait des boucliers de cuir d’Elephans que les darsne
- pouuoyent
- p.136V - vue 284/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. i3:
- pouuoyent faucer : & que par cas de fortune ilz eftoyent réduz inutiles,car ]a nature de ce cuir eft telle qu’il boit l’eau comme vne éponge. A celle eau-fe eftans apelàntis,on ne les peut porter. Les boys froids & nourriz en l’eau lontplus propres pourên faire. Ceux qu’on fait de boys aufli font légers, defquels le coup fe referre,& cloft incontinét. A celle caufe le fer fen retire tant plus à peine. Or font de celle forte les figuiers.le faux,le tillau, le fus,le peuple,entre lefquels le faux eft le plus leger,& pourtât plus profitable. Au regard de la forme chacun en a fait àfon plaifir. Les gens de pie les portent longs, les aucuns aufti courbes, & les appellent tortues, les aucuns ronds, comme la Cetre,Pelte,& Parme.
- Catra) eft vn petit efeu de cuir duquel faydent les Affricains & Efpa-» gnols.Virgile: -Lxuas catra tegit.
- Pelta)ÂL vne manière d’efeu fort petit en façon de demie lune ^fombla-ble à la Cetre. Virgile:
- „ T)ucit Ama^onidum lunatis agminapeltis.
- Puma) eft vn petit efeu ainfi appelle, comme le témoigné Varro, d autant que toutes les parties font égales autour de fon centre.
- Ancile)c(f vn petit efou tombé du ciel du régné de NumePôpilIe, ainfi diét a caufo de là figure. Il n’eft point de vray en cercle, ny ne rend vne circonférence ronde comme la pelte, & a vne echancreure en ligne qui fe recourbe,les fummités duquel recourbées, & renforcées de leur redoublemét font la figure de l’An cile.Feftus dit que Ancile eft vn petit boucler ainfi ap-pellé par ce qu’il eftoit r’acourcy des deux collés, de forte que le haut & le bas le montroyent a demy. Ou bien il eft diél Ancile (ab ambecifù) comme dit Varro, d’autat que celle façon deharnoysfont échàcrés des deux collés tout ainfi qu’vne cuyraffe. Ou bien corne il fomble à Seruius au huitiefine des Eneïdes: Ancile eft vn efou court & rond ainfi diét d’autant qu’il eft rogné de toutes pars,ou bien à caufo defitpctôgiAgHjceft a dire eftant de toutes pars bordé.Ouide au troifielme des Faites:
- « Le bouclier bien rongnéd’ancil le nom auoiti
- » A lentour duquel ïœuil nul angle ne 'voyait.
- Les autres dient qu’il eft did de an qui eft a dire autour, & (AA«p) tour-r ner ou bien à caufo de(*>iuSw£jcoude auquel on le porte.Iobbas dit ainfi de-” firant le tirer du Grec.Ce furnom premièrement pourroit bien eftre defoen ” du de ce mouuement,ou vehemëce qui feft fait(«va&jj)c’eftàdirelafus, ou bien de la cure des malades qui fo dit(aKfc<nç:) ou bien de xywitAvaityjC eft a dire ingenieufo deliurance. Outre-plus a caufo d’vne deliurace de triftelfes qu’ils appellent «ï«;$oijj,d’ont les Athéniens appellent Caftor & Pollux «m-^*ç.Et l’il le faut attribuer à la langue Grecque,ils difent qu’il peut eftre ap-pellé de xÿxaiQ' de la coudée,à laquelle ilz ont de coutume le porter.
- 33 Sarijfajcftvn bouclier de cuyure. Q^Curceau neufiefme: La eftoit vne 3i grande multitude de gens de guerre, entre lefquelz eftoyent les Gréez qui 33 tenoyent le party de Dyofippe; Le Macédonien auoit prins armes ayant a
- p.137R - vue 285/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- a, gauche le bouclier de cuyurequ’ilz appellent Sarifle, à dextre la lance, & „ 1’efpée ceinde comme quafi pour en combatre plufieurs.
- Tbolos)eü vn nom Grec, & eft proprement comme vn petit efcu,qui ell au milieu cTvne voûte, & auquel les arcs falfemblent,& auquel on auoit de courume de pendre les dons.Stace au deufiefme des Thebaïdes:
- 3) Icy iattacheray les combats des anceflres,
- 33 Et des Roy s de grand cceur les faces redoutables
- « Aux thaïes éleués les armes iependray
- 33 Que conquisesparfang/ay ores raporté:
- 33 Et que me lïureras P allas prenant les tholes.
- Vmbo)c&\ne partie de l’elcu, qualî comme le nombril,lequelencores fouuenteflfoislîgnifiël’efcu, car quelque fois nous prenons la partie pour le tout. Virgile au diliefme:
- ,, Inde aliudfupérque alïudfugitque3Volatque
- î3 Ingénugiro Jefufïmetaureus \mbo-
- Otre^lbntles greues comme qui eftoyent mifes pour(cmr)la greue.Tite 3, Liue au neufiefme:Laiambefeneftre efloitcouuertede fagreue,lafalade 33 aufïi eftoit crcftee pour donncrapparëce de plus grande hauteur. Lefquel-les greues auec les creftes de làladcs les Careins inuéterent, comme Ion dit, mais lesLacedemoniens ont trouué lalâlade.
- Pero)vne gueftre,eft vne chau fleure de gens de village venue de la façon des Grecs,defquels celle manière de harnois fut tirée & attribuée aux Hernices par le Prince des poëtes, dont ils delcendirent.Et pourtant en font faids ces vers de Virgile au lètiefme, par lelquels les peuples des Hernices, &: les plus nobles d entre eux font recitéz, ellat pour lors Anagnië leur cité. j» Ceux quepa'tjl l’Anagnië,&le bonpere aufii ^
- 3 3 Amafèneyriontpas armesjty paraïnjî /&.-
- 33 _ Sous des boucliers & cars.de vray la plus grandpan 33 Tire bouüets de plomb/autre porte le dard.
- 33 A couples dans fa mamy CT ont tous roux chapeau,
- 33 Que le loup pour leur chefafoumy de fa peau.
- 33 Or ont il^ordonné\quenudlepieJènefhre
- 33 Seroitj & que le dextre armé feroit deguefhe.
- Ornayie encores que ie lâche, nulle part trouué que celle façon daller à la guerre vn pie chauffé & 1 autre nud,ait elle en Italie.Il ell vray q ie feray bien pour ample authorité apparoillre,que celle coutume a ell entre aucüs Grecs. En quoy il faut lùyure vne diligence oculte du noble poëte, lequel comme il eut leu les Herniquesfaufquels ell l’Anagnië ellrejdelcendus des Pelafges,& auoir elle appelîéz ainfi par vn certain Pelalge leur Chef, nomé Hern ice:a attribué la façon qu’il auoit leu de l’EtoIic aux Hernices, qui fot vne anciéne colonië des Pelalges. Iulle aufli Higine au deulîelme liure des villes,montre par vn propos qu’vn certain home Pelalge fut Chef des Hernices. Au regard de la coutume des Etolins,Euripides excellét Tragique l’a
- montré
- p.137V - vue 286/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. i3j
- montré a noir efté d’aller à la guerre n’ayant qu’vn pie chaulfé.En la Tragédie duquel intitulée Meleager,vn mefTager eft introduid deduïfât en quel habit eftoit chacun des Capitaines qui l’eftoyent alïemblé pour prendre le fanglier. En laquelle vous voyes bien comme lesparolles d’Euripidesfont fongneulêment gardées par Virgile: car ceft autre dit: Il auoit le pié melme oud.Virgileditaufliau femblable:
- „ On ordonna que nudferoit lepiéfneélre. *
- En quoy afin qu’on appreuue mieux noftre diligence, nous ne tairons pas vne choie âpeu de gens,comme en ce qu’Ariftote a reprins Euripide au deufielme liure despoëtesle difànt en cela auoir efté ignorât.‘car les Etolins ont le pié dextre nud, & nô le gauche. Mais afin que ie ne lêmble plus taft Affermer que prouuer, les parolles d’Ariftote font en ce fécond hure qu’il a laide efcrit touchât les poëtes , auquel tu le trouueras auoir tenu ces termes • d’Euripide.Et combien que ces choies foyent telles,il eft toutef-fois mani-fefteq Virgile a mieux ayméenfuyure Euripide qu’Ariftote. Auffinecroy-ray-ie pas qu’vn homme fi fauant n’ait Iceu ces choies.A bône railbn il préféré Euripide,car il a grade familiarité auec les efcriuins des Grecques Tragédies,ce qu’on peut penlêrpar plufieurs de lès dids.
- le netreuue point que les anciens tant Grecs que Latins ayent vfé d’e-triérs. Virgile au douzielme:
- » L\ndttele les cars pubien d’vn faut Je letté
- » A chenal, & poing tientfon efpée irai fie.
- Et au melme:
- a Quanddu combat TurnusvidquAeneas fepan •
- » Et fis cbefeeflonnêz, d’efioirfioudin il ard.
- >} Chenaux il quiert & armes, & d\n faut ’dbondit
- 3) Erauementdans fon car,&les refnes conduit.
- Vegece au premier liure:On n’a pas lêulemét contreind à bien lê ietter â cheual les ieunes foldats,mais aulïi les vieils.Laquelle façon corne il eft ma-, nifefte eft venuë iulques â noftre temps,côbien que non apparemmét. Les cheuaux de boys eftoyent alfiz en hyuer â couuert, & en efté en plain chap, fur lefquels les ieunes gens de guerre eftoyent premiéremét contrejnds de faillir fans armes, iufques à ce qu’ilz y fulient accoutumez : & par apres armés. Et y eftoit la Iblicitude fi grade qu’ilz apprenoyent à defeendre tant à dextre qu a lênellre tenas l’efpée nuë,ou bien la picque. Ce qu’ils failbyent parvn continuel exercice, afin qu’en vne alarme chaude ils ne tardalfent point â monter,eftans fi affedueulêmét exercités durant la paix. Tite Liue 33 au troifieftne de là lêcôde guerre Punique:Ny n’eftoyent tous les Numides 33 ordônés lu r l’aile dextre, mais lêulemét ceux qui à la coutume des lâilleurs 33 de cheual â autre, àyans deux cheuaux auoyét de coutûme làüter armes du 31 ialfé fur le frais fouuétef-fois en vne rude bataille,tant ilz eftoyent villes,&:
- 33 les cheuaux dociles: Xenophon le Socratique au liure qui fintitule le mai-33 lire d ecùîrië. Or puis qu’il a efté vuydé,quels doyuét eftre les cheualiérs,ie
- p.138R - vue 287/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- „ m’efforceray d’expolèr manuellement par quel moyen on recouure les bôs „ chcualiérs.Entre lefquels nous deuons remôtrer & pouffer la ieuneffe d’ap-„ prendre de le lancer a cheual. Dont celuy fera a bon droid loué qui y cô-„ mettra vn bon maiftre & bô dreffeur. Il faut auffi accoutumer les ia âgés de 3S fentr’ayderâ montera cheual â la façon desPerfes. Plutarchede la vie des j, Gracches : Apres auoir épacé les chemins, on a aflis a chacun mille (lequel „ eftdehuitftades)descolumnes de pierres pour fignede l’efpace.îla auffi „ affis de chacun collé du chemin d’autres pierres vn peu élongnées les vnes des autres pour plus aifément & fans faillir monter â cheual .Outre ces te-moignages,les arcs triüphaux qui font a Romelèruét d’indices,& le cheual de bronze,qui eft au Latran las celle façon d’etriérs auec fon cheuaucheur.
- Calcar) l’éperon elt vn éguillon pour haller le cheual,tirant fon nom de (crf/xjtalon.Ouide:
- » Non nocetadmijfo fuhdere calcar equo.
- Mais quant â ce qui clE eforit au lîlîclme des Eneïdcs:
- » Soit qud pie il marcha fl droit a fon ennemy,
- a Ou que de l’eferon il donna aux épaules
- 33 Du cheual écumant.
- Il a mis l’efpece pour le genre, c’cfl â dire les épaules pour le cheual, veu que les épaules ne peuuent pas ellre piquées des éperons. Or tout ainlî que celluy cy fert pour haller le cheual,la verge aulïî a ellé ordônée entre beaucoup de nations pour maniér le cheual. Valerc le grand au troifielme liure 33 de P.Craffe:Ellât enclos entre Elée & Smyrne,il fuît vne infamie de n ellre 33 fon prifotvniér fe procurant vn moyen de mort.il donna de vray dans l’euil 33 d’vn barbare d’vne verge d’ont ilmanioitfon cheual,lequel enflambé de 33 courroux pour la violence de la douleur donna d’vne courte dague dans le 33 flanc de Craffe.Lucain au quatriefme:
- 33 Le Matfiüoys monté fur vne efehine nue
- 33 Le cheual fans frein Volte auec verge menu e.
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- QUELLES ARMES SONT PROPRES AV COM-bdt>& quelz noms ont les inÛtumens de guerre. Chapitre IIII.
- L femble que nous auons dit les noms des armes pour la defenlê & couuerture, pourfuyuons maintenant celles qui relient pour offenfor.
- Acinacis, ell vne épée de guerre en langue Partique, ou Medi-que,comme dit Acron,combien qu’il fe puiffe mettre indifféremment. Curce au filîefme liure : Mais il ne trouuera rien outre vn bouclier pourry, deux arcs Scytiques,& vn acinace.-Sain&Hierofme au troilîefmeliure con tre Iouinian : Straton Roy de Sidon fe voulant deffaire de fa propre main à fin de ne fèruir de moquerie aux Perles qui le tenoyent de près, attendoit en effroy la venue des ennemys contemplant vne épée qu’il auoit prins : de
- la
- p.138V - vue 288/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X.
- 3) la main duquel fa femme le voyant bien près (Lettreprins arracha Pacina-ce,& luy en donna dedans les flânez.
- Enfis, & gladms, epée & glaiue font de telle nature, que ( comme dit Quintilian au neufiemeliure desinftitutions)eftas diuers vocables ilzlignifient vnemefme choie,tellemét qu’il n’y a point d’inconuenient pour „ la lignification d’vfèr de Pvnpour l’autre. Macrobeau premier du fonge „ de Scipion:Voyôs maintenât qui font ces deux noms, d’ont il a fait men-„ tion,quandi!dit opicjydera & ftellasvocatis. Vnemefmechofe de vray n’eft „ pas icy démon tréefoubzvnemefme appellation,come^/*,^^^^)
- GiW^glaiue,lequel félon le témoignage de Pline au fetieffne eft in-uentéparles Lacedemoniens,en changeantle,c,en g, comme dit Varron. Etaprins fafourcede (cUdes) defaitte,&cepourladéfaitte des ennemyz. Et tout ainfi que Je nom à.z{duponàius)ft dit en deux fortes par plufieurs3cô-me(hic dupondms & hoc dupondium) auflidit on (hocgladium, çj? hic Radius. jj Quintilian au premier des inftitutions : Ceux aufsi qui ont dit (glad'ta)ont jj failly au genre, mais il mefiiffit d’auoir donné ceftauertiffement afin que iene femble auoirr’amenéendoubte Part par la faute d’aucüsopiniaftres.
- Spata,enjîs,g^ glad'm) font noms à tous prefque cogneuz. Tite Liue au trenteneufiefme:Et la ou il a veu tout en fuyte Cato recourt à la fécondé le-jj gion qui efloit ordonnée pour renfort. Et commande que les enfeignes jj marchent deuant luy,& fait qu elles fùyuent à grand pas pour forcer le fort jj des ennemyz.Et fi quelqu’vn rompoit l’ordre de hafte,il le frappoitf^zta) jj de l’efpéeeftant entre les gens de cheual, ordonnant aux Tribuns & Centurions de les chaftier. Tu trouueras aufli ce vocable eferites liures an-: riens,&en Aulus Gelliusaudixiefmeliuredes nuiciées Attiques.
- Harpe)eQ:.vne epée en faux,de laquelle feft aydé Perlée en la defaitte de
- - Gorçon.Lucain auneufiefme:
- Harpen alterné mon fin iam cœde ruhentem.
- Etencoresla mefmes:
- „ Perfeos aduerjî Cjllenida dirigit Harpen
- ,, Lata coluknfen mmpens confinia colla,
- Maroaufetiefme.:
- „ Laua feeptra tenetfalcaù cominus enfes.
- Les anciens ont appellé linguam vneepée longue en façon de langue
- - De laquelle Mœnius a fait mention en la Tragédie d’Ixion.
- Machara,c(k vneepée longue a vn tranchant ainfi diète du Grec, car les ... Gréez appellent /uajtgàç long. Cefaraudeuxiefmeliuredefescommentai-jj rés:On àâufli eomba.tula plus partdelanuiét au bagage, d autant quilz jj f’eftoient remparez de chariotz,&defcendans du haut,ilz lançoientfurles
- jj noftres des dars,les aucuns aufli mettoient entre les cars, & roues des ma-
- »»cheres &; pointons,d’ontilz bleffoient les noftres. Seneque au cinqieftne sdiure de la ben eficence & libéralité:Ny ne cognoiftras ceftefaladela, com-3> me qui eft fendue en deux d’vne machére Efpagnolle.
- f Lego trà gulas pro fîragulas.
- p.139R - vue 289/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Dolones font epées.Plutarche touchant la vie de Grache. Ny ne pour-j> chafToieÂtpasmoinslamortàTybereJuy dreffantdes embufches. Aure-ïj gard de luy il marchoit ceint d’vne epée qu’on appelle(dolon) Dolones)ÇzIon 33 l’auis d’aucuns font gaules, au dedas defquelles eftoient poignars cachez, oubienfelon Varro vne longue hante auecvn petit fer,ainli appeliez de doI,pour autant qu’ilz trompent: attendu qu’ilz abufent du ferloubz vtn-breaubois. Il en eft qui veulent dire que les epées rondes & longues font appellées (dolones) Audi Virgile dit.
- 33 Pila manu fkucfquegerant in beüa dolones.
- Sica) eftdi&ede (fîcare) couper. Devray c eft vne courte dague,de laquelle fay dent les brigans de l’Italie,& pourtant font ilz diékz(Jïccarij)com bien qu’au témoignage de Quintilian au neufiefme liure des inftitutions, 33 Nous appelions abufiuemét (ficcdrios) tous ceux qui tuent de quelque ma-33 niere d’armes que ce foit.
- Pugio eft vn poignart trenchant des deux coftez,ainfi appelle felon Fe-ftus,d’autant quon en combat de la pointe.
- Clmadium auftieft vn coufteau meurtrier,d’autant qu’il pend (ad dunes) forlesfe(Tes,oubien qu’on en départ le trein derrière des belles.
- Ilz appellentf&CÉ^ita) vn couteau de fer long ayant vn manche d’yuire rond,&foIide,auecor & argent cloué de doux de cuyure de Chypre, duquel les Pont ifes & Flamines vfoient à leurs facrifices,ainfi appeliez de (fe-care) couper. les vns penfont que ce foit vne hache, les autres vne coignée de cuyure.
- MucroienJis,&gladitts,epée,lignifient de mefme.Prifoian au fécond liure 33 de l’art de gramaire:il fe treuue des finonimes autat propres,que appellatifz 33 commt(enJts,gUdiiis y mnero) lignifient vne mefme chofo , tout ainfi que 33 P. Cornélius Scipio Afïricanusfignifiet vne mefme chofe.Boece delàtri-jj nité; Il ne faut pas qu’vne répétition d’vnitez au nôbre des chofes face plu-ralité,comme fi d’vne mefme chofeie dy,gUdm vnstsienfsvnusi mucro \nus) 33 car vne epée peut eflre cogneue en ce nombre de vocables. Audi eft ce plus 3J toft vne réitération d’vnitez qu’vn dénombrement,comme fi nous difions 33 (enjis3mucro^gUdm)ct{e.ra vne certaine répétition, &non pas vn denom-33 brement de chofes diuerfes: tout ainfi que fi ie difoye foleil, foleil, foleil, ie 33 n’auray pas forgé trois foleilz,mais tant feulemét nommé vn par plufieurs 33 foiz. Le mefme Boece au mefme liure: C’eft plus véritablement vne repe->3 tition d’vne mefme chofo que dénombrement de diuerfos,quand nous di-33 fons Dieu le pere,Dieu le filz,& Dieu le faind efprit. Et eft celle trinité vu 33 Dieu.Ou bien(en[ts,& mucro^nusgUdius)tout ainfi que foleil, foleil, foleil, 33 eft vnfoleil.Subfoquemmétvn peu apres au mefme liure: Or ne dit on pas, 33 vn fils eft fainét Efprit quafi corne noms de plufieurs chofes: car ( mucro) eft 33 ce mefme quenjts, au regard du pere,du fils, & fai nét efprit, ilzfontvne mef 33 me chofo .TiteLiue au fotiefme: Le Gauloyséleuéau deffus comme vn 33 mont,&auançantfon efcudela gauche déchargea auec vn merueilleux
- p.139V - vue 290/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. 140
- „ Ton vn coup de caille en vain furlesarmes dcl’ennemy â fon approche : le „ Romain(mucronefetrretfo ) drelfantl’epéeapresauoirde Ton efeu gagné au „ deflfoubz de 1 autre. Mucro aulfi eft la pointe del’epéeou du glaiue,&de toute autre cholè.Tite Liue au trête deuxiefme:Les Gauloys & Elpagnolz „ auoiét des efcuz de melme forme prclque,&les epées inégalés & diuerlês.
- „ Les Gauloys les ont lôgues & moufles,& l’Elpagnol courtes auec pointes,
- „ & pourtant plus aifées,comme qui eft acouftumé d’aflaillir l’ennemy plus „ toft('w#£r0«f)d’efl;oc,que de taille. SenequeâLucilen l’vnzeielmc liure. Il „ ne faut pas appeller vne epée bonne à caufê de la ceinture dorée, ne pour le „ fourreau enrichy de pierrerie,mais bien celle qui ale trenchât bien affilié,
- „ &(mucro)vne pointe pour faucertoute façon deharnois. Macrobeau pre-„ mier liure du longe de Scipion.-Denys trelcruel polfelTeur de la Sicile,vou-„ lant monftrerâvn lien amyeftimant la feule vië d’vnRoy bien heureulè,
- „ comme elle eftoit continuellement milêrable,& de quantz euidens perilz „ pleine,fit pendre vne epée nue attachée a vn fil menu parle manche (mu-„ crone)hi pointe contre bas,& fur la telle de cell amy durât le repas. L excellant des poètes aulfi dit au douzicfme „ Elle tyre mourant le dardjnais dans les cofles a (Mucro)lapointe entre les demeure auantfichée.
- Finalement toutes ces maniérés d epées ont fourreaux.
- Aclides,com me témoigne Seruius font certains bâtons fianciens qubn n’en fait plus de mémoire à la guerre.On lit toutesfois que ce font malFuës -{xegbfiot faides d’vne coudée &demië armées de toutes pars de pointes, & qui Ce lancent de forte à l’ennemy,qu attachées à vne courraye ou corde, elles le fââç> peuuent retirer apres le coup dôné:on les ellimc toutesfois ellre vne façon de bâton de get,lequel on peut tirer auec vne verge,comme dit Marc: r' Teretes funt aclides illi
- Telafed bac lento mos efiaptareflagello.
- TelumtR. tout ce qui Ce peut getter de l’arc & delà main,comme pierre, bois,paux,pointons,lances, iauelotz, & tout ce qu’on tire au loing eft lignifié par le vocable Grec ttAo&v, combien quenouslelifons aulfi pour a epée.Tite Liue.-Il leur fut ordonné pour armes la falade,le boucler,les gre-» uesjacuyrafleletoutdecuyurepourladefenfè du corps, & pour donner » â l’ennemy les (fe/<*)bâtons, le pointon, & l’epée. Senequeau quinzçiefmc a, liure des epiftres parlant des richeflfes: Elles (dit il) ne nuylènt â perfonne,
- 3, ny neporte dommageâaucunleurfolie,ou la méchanceté d’autruy ,tout 33 ainfi que l’epée ne tue amc, & qu’elle eft le(telum) bâton de meurtrier.
- Virgile:
- s » Atnon hoc telum mea quod dextera ver fat»
- Ejfugies.
- Férutum^üvn bâton court,&menu, comme dit Nonius.Tite Liue au „ dhitCmc:Quihus plerifue infeuta \erutis in corpora ipfit fixisfiernitur cuneus. Et >j au premier: Arma mutata mhilprater hafiam 0 verutum datum. Vege: au
- Aa.ij.
- p.140R - vue 291/480
-
-
-
- 33
- »
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33 33 33 3 3
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- ROBERT VALTVRIN
- deuxiefme liure, corne il parlait des bâtons de get,& qu'il euft deuifé d’vn eftant le plus grand: lien ellvnautre(dit'il) moindre auec vn fer de cinq pouffes & demy,&: la hante de cinq piedz & demy, que lors on appeîloic verutulstm, & auiour d’huy verutum.
- Enfles, font ce que les villageois appellent paux,& qui ont efté entre les premières armes des hommes.
- Bdculus}baton efb did de Bacchus lélon Rabane & allez d’autres trouué & appelle de Bacchusde mafculineft cômunemeten vfage, Se a fignifica-tiônotoyre.Tite Liucau premier liure.TAugueur a prins place a fa lèneftre ayant la telle affeublée, tenât â là dextre (Baculû) vn bâton fans neu & crochu qu ilz ont appellé(fif«»*)Ily atoutesfois(iL*ci///ï)diminutif. Cicéron au deuxielme de finib.bon .Buallu aliud inflexion ^alrndïta, »4f«m.Noustrou-Lierons aulïi Ion primitifauoir elle proféré au neutre genre. Apulée au premier de la Magie: Verumtamenhoc Diogeni, & ^Àntifthenipera & baculum, quod diadema regibus rfuod Imperatoribus paludametum^qnod ponttfîcibus galerum, quod lituus auguribus. Ouide au quinzielme de laMetamorphofe:
- Effefoletjbaculum tenens agrefleflriiftra.
- Nindifla, verge du Prêteur de laquelle les lérfz touchez font deli-urez,& acquièrent libérté dite de(vi»*/ic4re)deliurer,d’autant que par elle il lé deliuroit delèruitude.Perlé:
- Ne cognois tu fèigneur,que cil dont la vindi fie deliure.
- Titç Liueau deuxielme lnuc:lüe primum dicitur vindifla liberatus. Aucuns aulïi cuydent que ce nom la foit tiré d’vn qui fut nommé vinditius1: d’autant que depuys Iuy on a touliours gardé que ceux qui léroiét ainlî affran-chiz,léroient receuz entre les bourgeois.
- Et cobien que(ver£er<*)les verges foient quelque-fois prinz pour bature, ilz lignifient toutesfois propremét la matière,tout ainfi quc(flagellations, lefquelz proprement font les fummitez des farmens. QmntiIian:/gB« ex proximoraptos, gp'Verberaquœ cafus obtulerat. Troge Pompée au deuxielinc liure:LesScytes furent auertiz de changer la façon du combat, ayans fou-uenance,qu’ilz auoientâcombatre auec leurs ferfz, & non pas auec leurs ennemyz,& qu’ilz les failloit vaincre par droid de maillrife,& non par armes: & qu’au lurplus il elloit befoin d’vlér(ver^m^)des verges au combat, & non des armes,& qu’en delailfant le fer,il failloit faire apprell de verges, (3efouetz,& de ces autres maniérés d’inltrumens qui donnent creinte aux ferfz. On dit que les Laccdemoniens inuenterent les pointons. Le frefnc ell bien maniable,le coudreell^lus mol, & le cormiér plus gras,pour lequel le pointon d’Achiles a elle en ellime par le los d’Homere.
- Hafldia,(ont les lancettes à fer long, & qu’on peut lancer â la main. Conti, font perches longues, & roides fans fer auec vne poinre ague. luuenaî:
- Nofle iteringrejjusgladium contâmquetimebis.
- Lrfwo’d,que lélon le témoignage de Pline au léptielme.-lesEtolins ont
- inuenté
- p.140V - vue 292/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 3.3
- 33
- 33
- 33
- 33
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. i4r
- inuenté,a tout ainfi que(&tfir4)notoyrelignification,combien que ce ne loit vn vocable latin, & qu’il foit efcript au vingt-quatreiefme luire des choies Diuines de Varron,au-queI palfage apres auoir parlé àe(peiïoficum) le dilànt eftre mot GauIoys,il a auffi dit que(/4«cf4)n’eftpas latin,mais E-fpagnol.Les autres penlent quelle loitdiéle du Grec,d’autant qu’ilz appellent cw.
- Pilum,lapertuilâneeftdel’inuention de Tyrrhenus,tout ainfi que le j-HxPIinio pointon eft Romain, &c que Geft eft Gaulois,& Sarifta Macedonienc. Les Tyrreni autheursledienteftrede grande commodité a la guerre : d’autant que fi celle manière de dard pendue & pelée egalement eft lancée par le moyen de Ion aneau,à peine fètreuue-ilharnois qui puilfe porter le coup,eftanc poulfée viuement d’vn l'ecouëment de bras.Et fil eft lancé de loing, il l’efforcé de faulèr le harnoys par Ion ébranlement & mouuement continuel, foudain qu’il fy eft attaché,ny ne peut fûbitement eftre euité, ou repoufté, ny mefmes farracher,quelque inftance que face l’ennemy. Les Angloys 8c les Ifles circuniacentes,en ont fort vfé.
- Gep,Iont bâtons Gauloys, & forts pointons. Les Gauloys de vray appellent les vaillans hommes Gefcs.Tite Liue au neufiefme:/èrepafloralt ba-bmtdggrefhbus tehs, falcibus, gejzfque btnis a*mati. ) Il en eft qui penlênt qu’on les appelle plusraifonnablement (Cefa) de (Cedere) tuer.
- Rztmex, eft vn dard lèmblable au Ipare maftuë des Gauloys. f Dde ru-
- Iaculum3qu’on dit auoir eftéinuenté auecfon anneau par Etole filz de ma pllum Mars, eft auflivn dard qu’on fait pour eftre ietté, & pourtant ainfi diél au témoiçnaçede Varron.
- O O
- Spara,comme témoigné Pompée font les plus petitz dars dts villageoys & ruftaux,ainfi diétz dc(fyargere)cpandre.Emille parlant des excellens Ca pitaines des nations eftranges:Ilz virent Epaminondas combatant mourir, atteint de loing d’vn Ipare.Lucain:
- TumJj>ara,titm murzees portanturjlragulaporro.
- Nous liions,^aros3au genre malculin. Salufte au CartiIinaire:«Srd ex omn’t copia qztartapars erat mzlztarzbus armisinjlmtta, cœteri vt qttofque cafus armauerat, ff>drosçgrldnceas.
- Sarijja,comme il lêmble â Pomponius, & ainfi le témoigne Setuius, eft vn pointon Macedonique.Tite Liue au neuûeime: ÀrmayClypeuSiJkrriffaque i/fô)c’eft adiré pointons. Et au vingt-Ièptielme:$/fimttlperturbarzordznes,
- Gr impeditus ïncurfu fuorum vfus pralongarum haflarum farrijfas Macedones vo-cantjintdete fîgna Roman* legiones. Et au vingt-huitiefme: Peroculi foramma ÿrœlongœ kajla quas farrijfas \ocant. Q^.Curie au lèptielme.’Priof barbants emz-fitbajiam3quam exzguus modica capitis declinatzone vttauzt, atque ipfe infejiam far-rïjjam equo calcanbus concito.
- Les Illiriques ap pellenc Gibine vn bâton lèmblable â vn épieu. Ennius; lüiricï reflant Slczs Gibznifquefodentes.
- Securis3\i2.chc(quafîfem.cuns) ou femiqutris,epi eft demy pointon,ou bien
- A a iij
- p.141R - vue 293/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- du Grec qui fignifië Roy .Ileft certain que lesRomainsontefté
- Grccz,& cftoieot(/ër«r«)dcs (ignés qu’on portoit deuanr les confuls.
- TraguU>z&vn pointon auecvn fer bien agu,dideain(i,-come die Var-ro de(^i/rere)tranfper(êr,ou bien comme il femble à Pomponlu s,c’eft vnc maniéré de dard,ainfi did d autant qu’on le tire eftant attaché a l’efou. Ce-jj (àrau cinqiefmeliure:ll mande qu’il tire au dedans le ca.nip(tragn/<tm) vu j> dard auec lettres attachées a i’anneau.Tite Liue au vingt- cinqiefme: la fut jj combattu l’efpace de quatre heures prefque,&comme les Romains vein-jj quiftent brauement,on fonna à la retraite,d’autant que.Cn. Scipio auoit jj la çuifte tranfperfée ( TfaguU) d’vn dard.
- Ciaua}c(ï vne façon de bâton,duquelfaccouftroit Hercules,ainfi dicte d’autant quelle eft ferrée de toutes pars de doux. La maffiië devray&rla peau de Lyon conuiennent à l’ancien Hercules, auquel temps les armes n’eftoientpas encores inuentées,& auquel les hommes fe gardoient d’en-trages aue longues perches,couurans leurs corps de peaux de beftes (âuua-ges.Quelquesvnslapen(ênteftredide(CW?ei4)laquelle aufliHorace appelle (Caïd) &eft (Catheia)vnc façon de bâton de guerre des Gauloys, lequel eftant tiré, reuient à celuy qui le tire. Virgile aufli en a fait mention:
- Tbeutonïco ritu folitos tor<juêre Catheïas.
- Il a dit (Tkeutontco ntu) d’autant que les Theutoniques (ont peuple de la Gaule Cifàlpine.
- 5 » Bipennis,cü ainfi dide,d’autant qu’elle a d’vn cofté & d’autre deux tran
- 3i chans,qua(î deux pennes. On diloit anciennement (penum) vntrenchant, dont font dides les pennes des oyfoaux quaft aguës. Quintilian au pBe-3i mier Iiure:Parquoy il faut que l’enfant apprenne,que c’eft qui eft propre es 33 lettres,quoy commun,quelle,&auec qui eft l’affinité, ny ne fefmerueille j3 que (feamnum) foit ù.iâ(JcabeOü)ou bien âc(pmna) qui (îgnificegu,la Hache 3j (Bipennïs)a deux tranchans foit faide, & qu’il ne foyue l’erreur de ceux,lef-f3 quelz d’autant qu’ilz penfênt que ce nom foit venu de deux pennes,veulét queies(pi»»rf)foient attribuées aux oifoaux.
- Do/4(»r4,doloére,quafiayant deux leures pour charpenter,ruiner,& « démolirrTitc Liue au deuxiefme liure de la guerre Punique:A lors Hanni-« balpenfitnt auoirl’occafion,enuoyecinq ccntzAphricainsauecdoloéres jj pour abbatre la muraille de fond en comble.Et au quatricfme de la mefme j> guerre:On départ aux groz valletz des(doUbta) doloérespour abbatre le » palli(Temenr,& combler les foftez.Et au huitiefme de la mefme guerre:Les j> enfeignes des cnnemyz font entrées par la mefme porte, d’autre cofté oft jj rompoitlesportes auec haches ôc(dclabris)coignécs.Iuuenalau troifiefme liure:
- JJ iVo dofampojlbac frangebat vertice vire m
- jj Si lentusnigramun'tretcajlra dolabra.
- Faîarica, eft vne maniéré de dard, dont on vfc(ex faits) c’eft à dire ceux qui combatent de lieux dreftèz^côme iÜcmble a Seruius, qui eft vn bâton
- grand
- p.141V - vue 294/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. i4z
- grand,faicT:autourauec vn ferd vne coudée de long,&: vne rondeur de plomb faiclen Iphére en là lummité.On die aulïi qu’il porte feu. Or combat on de luy des tours;lefquelles indubitablement on appelle(F<*/<e)efl:ant (falarica)diète â(/à/»Jcomme murailles(à warojLucain a de vray dit que la fàlarique le tire d’vne machineauec nerfz tors:
- Ou bien la fallmque a nerf^fors débandée
- Lajfomméy&c.
- Au demourant Virgile dit au neufielme, que Turnus la peut lancer de la main,cequeparauantureaclléditdeluyouenpoëte, ou a la louenge 8c vertu de Turnus,qui a lancé tel pointon.Tite Liue en l’vnziefme Iiure:Les Sagontinsauoientlafallarique,quiellvnbâtonde traiélauec vne hante oblongue, 8c au demourant ronde, finon au bout, auquel eftoit le fer, lequel quarrécomme au pilum,ilz lioient d’eftoupes, & oignoient de poix. Au relie le fer eftoit de trois piedz de long, a fin qu’il peult tranlper-cer le corps aueclesarmes.Maisquemefmementfilfattachoit à l’elcu,& qu’il ne peull entrer au corps,il donnoit vne frayeur.Car comme il fuft tiré à demyenflambéi& que du mouucment il portail tant plus grand feu*, il côtreignoit d’abandonner les armes, &rendôit le foldatnud aux coups fublèquens.
- fLcgoob-longo pro ab ligneo.
- i ••••
- Aa mj
- p.142R - vue 295/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Malleoli, font bâtons de guerre en la forme d’vnequenoille de femme. Ammianusmarcellinusau vingt-quatreiefmedesgeftes: Le Malléole eft ainfifiguré.C’eft vne fléché de canne aflemblée entre lefer, & lahante de plufieurs lames de fer,& eft côcauée tout ainfi que la quenoille d'vne femme, a laquelle on fille le lin, ayant le ventre ouuert en plufieurs lieuxfub-tilement,&aaudedansdufeu auec quelque entretenement eftant tyrée lentemêt d’vn arc foibIe,car la flambe des inftrumens à feu, fefta'int dvne deflerre d’arc trop violente. Au demourant le feu ne feftaint point par aucun remede autre que de ietter poudre delfus,ou bien marc d’huyle. Tite ” Liueau vingt-huitiefme:Lesvns vindrent auec torches atdentes,les autres ” auec eftoupes& poix portans des malléoles, tellement que toute l’armée ” eftoit efclarée de flambes.Or au dedans de ce malléole, il y a vne pâte & vn nourriflement de feu inextinguible faiét de colIophone,fouphrc&;falpe-ftre,qu’ilz appellent Nitre:tous liquéfiez en huyle de laurier, félon les autres en huyle petrelée, greffe d’ouaye, mouelle de canne fertile, & fou-phre.Et félon aucuns huyle d’oliue, d’oint delà colophone,camphre,poix rafine,&eftoupes. Les anciens gens de guerre ont appelle celle compofi-tion (incend'tarïum) boute feu.
- «
- Mïftlia haJhliasCont bâtons de guerre,ainfi appeliez à(mittendo) d’autant qu’ilz font lancez.Tite Li-ue au tren te-deuxiefine;Il y auoit vn grand nom bre d’inllrumens de trai<5fc, â celle fin de repoufler de loing les ennemys (mifsiltbfts)a bâtons deget.
- Catapulta, laquelle Pline au léptiefme dit auoir elle inuentée par Crêtes, elt vn traiél ou fléché legiere comme dit Nonius.Celar,ou autre pour luy „ au dixiefme de fes commentaires: Ilz getterét au deflus des voiles,afin que „les traiclz tirez par les inftrumens deget ne démoliflentla muraille, ou „ que les pierres & catapultes ne debrilàflent la brique.Tite Liue au premier „ hure de la guerre Punique:Et portans laies catapultes,fléchés,baliftes,â fin ,, d auoir en la ville le chafteau comme vne fortereflé la menaflànt ilz le fer-,, m erent demurailles.Plaute au Gurgulionfte telanceray du fouet, comme ,, font couftumierérement les catapultes.Et encoresaux captifide vray mon
- poing
- p.142V - vue 296/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. H
- j} poingeftvnebalifte,moncoudevnecatapulte, & mon épaulé vne telle J} de bellier a batterïë.Il eft auffi tout notoyre,ainfi qu’en vient les plus làuâs, que la Catapulte eft vn inftrument & artifice de guerre,duquel on tire des ,3 traiétz de trois coudées delong. Pomp.Tftyàx,eftvn traiëb de trois cou-j> dees de long qu’on tyre de la Catapulte. Vitreuue au dixielmerOn prend )) les proportions félon la raifon du pois toute telle qu’es Catapultes, fuyuât » lalongueurdesfleches.TiteLiueau premier de la guerre Punique: Han-nibal melme fè trouuoit en perfonne laou on poufloit la tour mobile, lûr-33 paftant de hauteur toutes les forterefles de la ville, laquelle eftant appro-33 chée, & ayant fait déplacer de la muraille les gardes, au moyen des cata-33 pultes & baliftes ordonnées par tous les planchers.&c.
- La partie de la Catapulte qui le tire d’vne corde doit eftrè d’acier.
- © © ® 5
- BJjompbed\ comme le témoigne Aulu Gelle, au neufieftne Iiure, eft vne maniéré de bâton de getdes Thraces,quoy qu’aucuns la tiennent pour Framée,épée, & glaiue. C’eft vn vocable que tu trouueras dedans les annales, d’Ennius au treziefme liure.Tite Liue au trente & vniefme: Les rhô-33 phées auftî d’vne bien grande longueur cmpelchoient fort les Thraces en-» tre les rameaux alfiz tout au tour. TLegera-
- w^rr^eftant de la quatrielme forme font inftrümens de guerre pour ti-rer fléchés, & quafi comme^ra^forterefles qui font les parties de la ville hautes,& r emparées,ainfi diélz âcaufe qu’ilz(arcent) repouflent les enne-mysjcombien qu’en tant que touche des arces, il en eft entre lefquelz eft Sérums, qui d’autant que (dreâna) font lècretz, penlènt qü aucunes font dictes, comme choies Ièçrettes,& qu’il en Ibitd autres le Ion le témoigna-
- p.143R - vue 297/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- gc de Solin au premier iiure des chofes mémorables,qui veulent que d’autant que les Arcades auoient habité au fommet des montagnes, il fen eft enfuyui que par apres les forterefles des villes ont efté appellées (arces). Au demourant on dit qu’Appollo a inuenté l’art & le moyen d’en tirer, qui a efté la caufê que les Candoyz ont fingulierement prins plaifir à l’arc qu’on appelle Scythique.
- tLegs
- Macha
- >3
- }>
- ))
- »
- Coriri, font proprement les fourreaux des arez,combien qu’on les dit c. ftre les troufles que nous appelions (P Weme)Virgile au douzicfmc:
- Quid telajagittœ,
- Qoriûque leues kumeri$,&Uùferarcus.
- Ouidc aux Methamorphofês:
- Exutthïc hnmerosphare tramJentôftpie tetendït isifcus
- Scorpiones, comme dit Vegcceau quatriefmc Iiure, font ce qu’au iour-dh’uy nous appelions arcbaleftes ainfi appellées quelles tircntde petitz & menuz fers, comme au premierliurc des MachabéesrEt ordonnalâ des ba beorum « liftes,machines,potz & lances a feu, & des inftrumens de guerre à tirer gum6" 33 pierres&pointons,&des(y?0rp/0«É,rJ arcbaleftes pour tirer fléchés, & des ” fléchés, & des fondes. Cefaraufeptiefmedes commentaires : vn certain f Proiï«” Gauloyseftantdeuant la porte de la ville gettoit dedans le feu,vis a vis de cicbac « la lourdes morceaux de greffe & de poix qu’on luy liuroit à la main, le-hibchTc?3 qucltumba mort eftant percé de part en part parle cofté (Jcorpiône) d’vn 33 coup de traid darcbalefte.il en eft qui difent qu’on n’en tire pas feulement des fléchés,mais aufli des pierres. Ammianus Marcellinus au vingteinqief « me des geftes: Quelque part aufli qu’on dreflaft a la main des arcbaleftes, » elles tiroient pierresrondes.Et au vingt-quatriefme: Lanouuelle façon a » donné le nom d’onager au feorpion, à caufê que quant on chaffe les afnes « fâuuages,ilz tirent de loingruans en derrière fi bien les pierres qu’ilz fau-” fent les eftomachz de ceux qui lesfoyuent,ou en leur caftans les oz ilz leur « écartelent la telle. Vegece René au quatriefme liuré:Les cheuaux ne font » pas fèulemét diflipez par le traict des feorpions, ne par les pierres tirées des » onagres,mais aufli font Iesengins des ennemys.Nonius Marcellus dit,que (Jcorpio)cft, vne manière de dard,les autres accordans à luy difent que c’eft vne fléché enueniméejqui épand fon poifbn la ou elle fattache, dont elle a prins le nom de foorpion.Ie penfè que cefte façon de feorpions a prins fa
- fource
- p.143V - vue 298/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVKt X. i44
- fourcedesScythes,lelqueIzayansteinélleurs fléchés en venin de vipere, & en làng humain tuent loudain d’vne playe irrémédiable, combien que la bleflure foit légère.Defquelz parlant Lucain dit:
- Lesfléché s il% ri épandentauec fer feulement jj Comme qui de poifon font foules amplement,
- jj La moindreplaye nuyt, & aufanggijl la mort.
- Finalement quiconque a efté le premier qui a inuenté larcbalefte pour tirer traid/oit Scythe ou Câdoys,ounay en quelque autre région, a efté véritablement trahiftre, ou bien plein de delïr d’offenlêr, ou bienil crei-gnoit Pennemy.il a de vray penfé ce quele melme Lucain dit: j j Longe tendere neruos jj Et quo ferre velit committere Ruinera \entls.
- Sagitta,la fléché,eft ainfî di£tc(aftgaci iêlu)i caufè du coup tiré de vifteT fc comme ilfèmble à aucuns.Nous l’auons de vray fait voler pourplus toft faire mourir l’homme, &auonsdôné ailes au fer. Laquelle ie penlè auoir efté inuentée par la mefchanceté ôc fraude de l’efprit de l’homme. On dit quelles o nt efté premièrement inuentées par les Candoys,corne dit Solin,
- » & à l’auis d’autres ainfi que le recite Pline par ScythefiIzdeIuppiter,ou fScÿtfce » bien Perles filz de Perlee.Les Orientaux en vfent fouuent, lefquelz ferrent PJ°
- » les cannes d’vn fer à barbillons qu’on ne peut retirer haftant diuerfement :
- » lamortparl’empennementde la canne,tellement que c’eft vn autredard ” au dedans des playes.On l’appelle la fléché barbare, delquelles auflîilz ob-}J fcurétlefoleihà celle caulèilzdefirétIeiourlêrain,haïflansfortles vens ôc » pluyes,lelquelz les forcent de viure en paix entre eux.L’ulàge d’elles a rui-» né les gens côbatans de la Candie.En quoy tout ainli qu’es autres choies Vcrtî « ” l’Italie emporte l’honneur,veu qu’il n’eft point de canne plus propre a fle-p^n-‘
- » ches que celle qui croift au Rhein riuiere du Bolonoys, laquelle eft fort » nioeleofè,& le pois ville & forçant le vent.
- Spiculum, eft le fer d’vne fléché bien aigue. Curceau fetiefme liure: jj Comme le Roy les tint afliegezeombatâtauee les plus hardiz,il fut bielle jj d’vne fléché,laquelle feftant attachée au mylieu de la greue, y auoit lailfé,
- p.144R - vue 299/480
-
-
-
- ROBERT V ALTVRIN
- „ (Spiculumjle fer. Item au neufiefme:Les médecins couppentlahante de fâ „ fléché,de forte que(jÿifw/»w)le fer attaché au corps ne fut point remué. Et ,, apres auoir dépouillé le corps ilzprïndrent garde que le fer eftoit barbib „ îonné, & qu’on ne pouuoit le retirer du corps lâns l’outrager, Se agran_-„ dirlaplaye.
- Murices) font chaufletrappes de fer,lelquelles iettées comme que ce foie farreftent lur trois pointes, offenlans de la quatriefme qui eft dreffée. „ Q^. Curceau quatriefme liure: Quand foudain vn certain fugitif vint „ au Roy en toute diligence,l’auertiflant que Darius auoitépandu parterrre „ (murices) des chaufletrappes la ou il efperoit qu’il feroit marcher fes gens,& „ fut le lieu remarqué,a fin que les fiens feeuflent fuïr la tromperie.
- Sculprum)eü\n ferrement fort tranchant. TiteLiue au lêtîelme delà guerre Puniquerll fit plus tuer d’Elephans par les maiftres que par l’enne-my .Il aiioit (fabrileJcalprum)sn cileau auec vn maillet,lequel la ou iîz cora-mençoient a entrer en furië,& le ietter furies leurs,le maiftre l’afleyant entre les deux oreilles en la ioindure par laquelle le col fè ioint a la telle, il chaflbit de plus grand coup qu’il pouuoit.Cefte voye eftoit inuentéepour la plus foudaine mort d’vne belle de fi grande mafle.
- Scdlpeüum)cft. vn diminutifde(Sc4/pr#>w).Ciceron au deuxiefme de Di-33 uinatione,\^Aut quorumlinguœfcinhœrent^tloquinonpoffentjbafcalpello refecht 33 liberarentur. Hieremie autrentefixiefme; CumquelegiJJèt ludi pageüdS très dut 3J quatuorfcïdttilludJcalpeüo jcribœ&proiecitin ignem.
- Feruina)ed\ne maniéré de dard long, côme dit Fabius Placias Plaute: 33 Si tibi macbera eftforis3at mibi veruina ejiintusyqua te & tüos confodiam.
- Soliferreum) eft vne façon de dard,c eft à dire tout de fer.caryfolumylignifie ce que nous appelions tout. Tite Liue au quatriefme liure de la guerre 33 Macedoniquefllz regardoyent en frayeur les bandes qui leur eftoiér à dos, ” côme ilzeuflentmislamain aux épées apres auoir lancé,Vf emif isfoltferrer Funda) fonde d autant que par elle les pierres 'fundantur) c’eft adiré font iettées. C’eft vn traid qui fe tournoyé auec vne lafliére,& lors que la plombée ieraarreftée, &: bien balancée, on tire comme fi elle eftoit lancée du 33 bras. TiteLiue au vingt-huitielme. On vloit pour lors feulement delà 33 fonde,de laquelle on vlê beaucoup au iourd’huy.Ny n’eftaucun dautre
- natioif
- p.144V - vue 300/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII. ,45
- ' nation quifoit excellent en ceft art comme font les Baléares parfos toutes^ Au pais defquelz,comme dit Flauius,lesmeres comme Ion dit, dreflènt leurs petitzenfans des leur enfance, de forte qu’elles ne leur fouffrent toucher à aucun morceau,quepremieremétilznereuflent attainéfd’vn coup de fon de. A-u forplus il en eft qui difont que les habitas de Maiorque & Mi-n orque cnonteftéles premiers inuenteurs,combien que Pline la die auoir efté inuentée par les Syrcphenices.
- Glans)ou (Glandis) eft vne plombée en façon de gland, laquelle fè tire à la fonde ou balifte.Claudian au foptielme liure: j> .. —Nuncfpicula cornu
- jj ^ Tendere,nuncglandes baleartjpargerefunda.
- » Salufteenlaguerredelugurtha.-vnepartiecôbatoitdeloing(glande) âplô-bées & pierres.Virgile au fixiefme:
- » Laplus part épandoitplombées de couleur Inde.
- Ouide au quatorfiefme des Metamorphofos:
- „ t^A'mJîcjue d\ne fonde \ne plombe enuojée
- » Ef tou fours du hauk cielbien foiblerenuoyée.
- Lucrèce auffi en a vie, auffi a Tite Liue au vingtlètiefme. Et quant a ce cpiz(gUndis)(& treuue en Virgile au quatriefme des Georgiques,la doute git ficeftnominatifjou biengenitifprononcéparfigure:
- » Mec de concuffa tantumpluit iliceglandts.
- , Car il fopeut entendre(taneumglandis)toucainfi que(hoc tegnt & tantü lucri. jj Les autheurs appc\lcnt(Chelidomumfalcafrum)faucille trcnchât tant feulement d’vn codé fort tenure, & de tantplus large,de la longueur d’vne braflfe auec vne queue fourchée corne vne arodelle, dont il a prins le nom. lln’a point de forreau,& f attache d’vn crochet à la cein&ure.
- Dante* fontdes coighées longues à tçanchantplus affilié,& defquelles non foulemët les Dannemarchoys ontcommancéàfayder, mais auffi autres nations.Or quantaux chofesqui generalement viennent aconfiderer touchant l’art militaire,toute maniéré de ferrement a letrenebant plus affilé qu’on trépe en huyle,mais en eau il prend vne durté eclatate.Le fang de bouch a fi grade force qu’il n’eft rien en quoy le tréchanr fendurcifle plus. L’huyle finalement auec cerufle & poix liquide conforue le fer de la rouille
- Faix, faucille efl vn ferrement en façon de croiftant monté for vne hante,iadis bâton de guerre,& au iourd’huy de village. Valere au cinqiefoie li-« ure: Vnumquémque exhis falcepercujfum,in c*demftamcompulit. Tite Liue au ?j neufiefme. llzalleréten habit de bergiers auec bâtons de villageoyzarmez s> (falcibus)dc faucilles & de pointons. Marcial:
- » Qui iadis pour des chef? courbe par dol fu faille »> ^Àux foldas iadis fu j ores aux champs retraiéle.
- La faux a efté ancicnnemét inftrumétde guerre,nô ftulemet for terre, mais auffi former. Les Romains de vray auoiét des faux d’vne grâdeur incroyable,Iclquelles iettas par artifice for le cordage des ennemis, îlz les coupoict
- Bb .i
- p.145R - vue 301/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- côme dVn rafouer prenâs à force de rames leur routte au côtraire , tellcrnéc que les antennes,& les plusgrâdz cordages tombaient donnansempefche-mens à'ieurs nauires, auxquels elles auoientlèruy de force & confort.
- De(falx) ont elle diôlz les carstfalcati) d’autant qu’ifë-efloientr emparez de.faux,ôc ainfî armez ilz alloientà la guerre. Orauoienfcilz auprès duti-mon des pointes depuys le ioug de quinze piedz de longèn façon de cornes,pour tranfperfer tout ce qu’ilz r’encontreroient.Etaux extremitez des iouz y auoiét deux faux, l’vne de mefme hauteur que le ioug, & l’autre tirât contre terre, à fin que celle autre trenchaft tout ce quilèr’encontreroit à collé,&que celte cy donnait à ceux qui feroient abbatuz,ou quilèiette-roient foubz.il y en auoitauflî demeimees elleaux deux es extremitez pre-fentans le tréchantjCÔme il ellcôtenuen celle prefènte defcription de cars.
- Mais tout ainfî que les Capitaines fattendoient toulîours de rompre les ranez des ennemys auec ces cars,ilz ont aulïî bien louuent epouuanté les leurs melmes,côme il aduint à Antiochusrcar quand Eumenes les vid entendant bien leur façon de combat, Sc combien perilleufè elloit celtema-niere de lccours,fi on les épouuantoit.plus toll que les afiaillir en vray com*
- p.145V - vue 302/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XIL i. bat, il fait courir des archiers, tireurs de fondes,& dardeurs a cheual non pas ferrez,mais écartez le polfibIe,& leurenchargcde leur cirer de toutes pars. Celle façon de tempefles auec criz cflranges a tellement effrayé les cheuaux,que fbudain comme échappez ilz Ce mirent à courir ça & la à tra-uers chaps.Les Romains epâdoient des chaufTetrappes, la ou ilz efperoiét que les ennemyz feroient marcher leurs cars, auxqueIIes,donnans,&; bien tofl apresbleflezilz deuenoicnt pefàns &inutiles.ilefl vne autre merueil"* leufe forme decar de guerre fans faux, chaffé de celle forte avens.
- Ilefl certain que (vœlli&c fades) paux font vne mefmechofe, comme dit SeruiuSjCombien que les deux ayent elle diétz par Virgile au deuxiefmc . des Gcorgiques:
- }j Quadrifidafquefades, & acuto robore Vkttos.
- VaUi)àcvï3.y font les palliz des tranchées,delquelz le palliffementell rem-paré.Aulïileremparementell diét proprement (t^aUum) en genre neutre, , combien que Albin Tibulelaitmisau malculin:
- 55 Non arces, nonvallus eratfammùmquepatebar.
- La dénomination de Vattus, comme le témoigné Varroell venue, d’autant que perlôn ne ne\espoauoit(varicare)outre palfer:oubien d’autat que chacune extrémité de la tige fort d’vne figure fourchée comme.V.Qiianta la terre qui Ce iette au plus près du pallilfement, on l’appelle proprement (<^r)rempar,ôc tout amas de terre, ôc de marrein pour ruiner villes d au-
- Bb.y.
- p.146R - vue 303/480
-
-
-
- ROBERT VALTVR\N
- tant c[üc(agunwr & ducantur)on les pouffe Sc traîne. Tite Liue au troifief.
- Lego „ me Iiure de la guerre Macedonique:Il forçoit lors d vn grâd effort les Thau Thau- maces (aggeribits&vineis) &iaeftoit la teffe debelier au pied delamurail-mraC°S* » mefmes encores.-Toute l’efperance depuys des combatans eftoit en la Thoma „ force,armes,&: batteriestauffiapprochoit on de toutes pars(dgger<?r)aux mu tos* „ railles mal aifement. Le mefme aü fixiefmc de la guerre Macedonique : de 3> tant plus eftoient les Macédoniens en peine, que les Romains combatoiët aat in*5 ,» (<*ggeùbus & Vineis) auec inftrumens de batteries ,& de. toutes machines præiiis )t {ùr terre,& les Macédoniens a mines. Au mefme encores : Mais auffi quel-elIent* » quesvnsarmez,&frequensportoientfeuzpourlancer (aggeribus) auxen-gins.La mefme auffi au fètiefme.Il approcha d’vn cofté & d’autre CVmeas (<p » dgZerem) des engms de batterie auec les tortues.
- Aonnnf\nAfyv
- CdtanÆ^eftvne porte couliffe&en treillis laquelle pend à anneaux ôc doux de fer auec cordes,a fin que files ennemys entrent en l’aualant iîz „ foient encloz & tuez.Tite Liue aut vingt fêptiefme:Hânibal arriua a la vil-,, leprefqueauquatriefmeguetjCeuxdel’auantgarde eftoiét fuitifz des Ro-,, mains, armez à la Romanefque. Al’arriuée donquesde îaporte,ceux c y „ parlans tous latin éueillentleguetjcurenchargeantdc lcurouurir Japor-„ te,& que le Confol eftoit la. Le guet comme éueillé a leurs voix, fefforce corne troublé de frayeur,la porte couliffe (cataraBa) eftoit auallée, laquelle ilzforleuent partie a leuiers, & la dreffent en partie a cordes a telle hauteur,qu’il pouuoient entrer droidz. A peine eftoit la voye foffifànte quand les fuitifz entrent àla foule.Er comme ilz fuffent entrez iufques a cinq céts, prefque la(cataraBd) porte couliffe eft cheute auec vn grâd bruit,a caufè que la corde à laquelle elle eftoit folpenduë fè lâcha.
- p.146V - vue 304/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE.^ LIVRE XII.
- H7
- Infiniment pour mettre le feu aux portes.
- Bb. nj.
- p.147R - vue 305/480
-
-
-
- ROBERT- VALTVRIN Infiniment pour rompre vne coulifle,ou vn treillis de fencûre.
- iinn/Vwv\nnnnnnirvY vvyvyvv vv
- Tour qu’on peut éleuer a écrouë.
- p.147V - vue 306/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. 148
- Tour mobile,& àrouësoutrepaffant delà hauteur tous engins de bate-riedè ville, laquelle approchée de la muraille, les dénué de toutes défends , ayant par tous Tes eftages catapultes ôc baliftes.
- Machine pour prendre villes ,d’ont parle PlutarcheenlaviedeDcme* trie.
- Hallœ,Cant tours de boys,le{queI!esanciennementeftoient drefleesde marreinpourdécouurir,elles font faiétes de charpenterie de larix ôc à roues,elles font lèures d’autant que le feu qu’on y iette,ne lesbateries ne Toffenfent point tant a caulêdela matière de bois, que pour le tournoye-ment.De vray attlsiles tours font diéles de (Tornus) tour félon l’auis de Varron , ou bien félon les autres, d’autant qu’elles font rondes, ôc droiéies. Car combien qu’elles {oient quelques fois quarrées, elles femblent toutes-fois de loingrondes àl’oeil, parce que l’image de tous angles feuanouit ôc confume en vn long efpace d’air ,&fémble ronde. Audemouranton les
- Bb.iiij.
- p.148R - vue 307/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- doit faire rondes, ou bien à. plufieurs pans,car les engins brifent toft les quarrées,nynepeuuent ofrènfêr la rondeur, d’autant qu’ilz pouffent au centre.
- p.148V - vue 308/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII. i4 Engin pour prendre villes.
- intninrnniri
- p.149R - vue 309/480
-
-
-
- ROBERT VA LT VRIN
- Engin Arabie pour prendre villes,grand & haut, garni d’hommes depons, efchelles,& de diuersinftrumens de guerre.
- O
- p.149V - vue 310/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XIL Tuyau pour tirer l’eau d’vn fbfle,ou d’vn Chaileau.
- j -
- Vn autre engin pour tirer eau.
- p.150R - vue 311/480
-
-
-
- ROBERT: VALTVRIN
- Autres deux engins pour tirer eau.
- p.150V - vue 312/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE.
- LIVRE X.
- I51
- Autres deujÿngins pour tirer eau.
- C Ct j.
- p.151R - vue 313/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Pont pour defcnfc.
- p.151V - vue 314/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. ,
- Pltitei) font clayes fai&es d’oziers qu’on auoic de coutume de mettre en te/le aux gens de guerre drefifans quelques ouurages,& fappeîloient militaires. Les aiz d’ont auiourd’huy on r’empare quelque chofe font ainli appeliez.Or font les plutees fai£tz d’oziers couuertz de bureau, ou de cuir crud, & ont trois roues defqueiles l’vne eft au milieu, & les deux en telle, à fin qu’on les puifle tourner quelque part qu’on vueille comme vne char-rettedelquellesles afliegeans approchent des murailles,y eftans a couuert, èc hors du danger du trai&,& de la fonde, ilz rompent toutes les defenfes, afin qu’onpuilfeplusaifémentécheller.
- Ce .ij.
- p.152R - vue 315/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Engin de peu d’efpace pour aller contré lesennemyz maugréeux,au derrier duquel foit vne bande de tireurs de fondes &c archers tirans bâtons de traid.
- p.152V - vue 316/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X. Jy
- Ilz appellent ( Telonem ) ou( tollonem)vne branliere toutes les fois qu’on fiche en terre vn haut pofleau, au fômmet duquel on afïîet en trauerfe vn cheuron plus long lurfbn milieu de tel côpas que fi Tvn des bouts fabaiflè l’autre fedrefïe. On attache donques al’vne des extremitez vn engin de clayes, ou d’ais, dedans lequel on met quelques gens de guerre, &lors en abbaiffant à cordes 1 autre bout, on les cleue & affiet on fur la muraille, la ou farreflans ilz peuuent offenfêr les ennemyz, & découurir: puis finalement r’apporter quelles chofès fefforcent faire les ennemyz. Au relie la forme du Tollon efl telle.
- Tinnnnnn
- Jvvv\/v\rvvs
- g^amiwin) n7
- g, g>„
- Ce» iij.
- p.153R - vue 317/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- S<tmbiica)c& vn engin faidà la fembiance d’vnê Harpe, ou d’autre in-
- ____ ftrumentmuficalpouraflailiir villes, car tout ainfi qu’il y a des cordes en
- rém^'prô vne Harpe,aufli y a-il à la poutre,qu’on medaupres delatour:Iefquelles trabcm. quelque fois abbaiffent le pont du haut de la tourelle à poulies,à fin qu ilz delcendent a la muraille, &foudein les gens de guerre delcendent de la tour,& paflans fur ce pont ilz gangnent la muraille.
- p.153V - vue 318/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X. m Exojtra)o.ü. vn pont qu’on iette foudein d’vne tour fur la muraille-il eft fai à de deux membreures,& eltoffé dofier, lequel éleuéilz affeietfoudein entre la tour & la muraille, tellement que les combatans fôrtanspar ceft engin Ce iettent dans la ville, &gangnent la muraille.
- 1
- p.154R - vue 319/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Vne roue dentée auec certaines marches au dedans tant pour le mou-uement que pour la montée des hommes par elle.
- p.154V - vue 320/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X.
- Vn cry pour arrefter vn pont leuis,& pour le garder de releuer à fon ab-batement,de force que l'ennemy n y puiffe entrer.
- p.155R - vue 321/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN Engin pour dreflir vn pont.
- p.155V - vue 322/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X. 15<r
- Mufculut^engin d’explanadeeft tout autre que la mine qui le faiâ-prc-Lego,difr-mierement a la muraille,& pourtant eft il appelle cpia.fi (murufcitlus) ou bien j.™.1.1?* Pro (i»#/c*//)c6meditVcgece ont prins leur nom des belles marines. Car tout ia),1S* ainfi qu’elles moindres que les baleines,leur donnent continuellement fê-cours &ayde,ces engins aufli moindres queles grandes tours font lesex-planadesa leur auenu-:.Or a l’antiquité appelle mufcule les moindres engins, duquel les foldas eftans couuertz demohfïoient les paux d'ont les fof-îezdelavilleefloient fortifieZjàfittquelatourmobilepeuflapproclier le mur fans empefchement.
- p.156R - vue 323/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Combien que (fcaU) échelle foie par aucuns vfurpée au nombre fingu-lier,& qu’il foie eferit es elentures (amples en Genefè (\ïditIacobfcalam ) on dittoutesfoisproprement (fcala)félon Varon . Quintilian, &Foca, &en meilleur latin, foit que ce foit vne bu plufîeurs,d’autant que ceft vnnom tant feulement plurier, tout ainfi que (/irmejlettres quand elles lignifient vne épiftre.Salufte au Iugurtha: (Deindevbi vnœatque altéra fcaU comminuta funt)i\ n’a pas dit(v»4 atque altéra fcala).Or entendra facilement chacun leur forme quoy que diuerfe, fil prend garde es protrai&z fubfequés expofêz a fart.
- É'urun
- *
- p.156V - vue 324/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. Autremaniere d’edielle.-î Lefôulicrâucclellrier.
- !S7
- •w.
- p.157R - vue 325/480
-
-
-
- R OBERT . VALTVRIN
- Autres échelles feiftcs dc pièces.
- C.
- p.157V - vue 326/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE.' LIVRE X, Autre genre d’efchelles.
- IJ8
- Dd. ij
- p.158R - vue 327/480
-
-
-
- p.158V - vue 328/480
-
-
-
- 4
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X.
- Dd iij.
- p.159R - vue 329/480
-
-
-
- p.159V - vue 330/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X. ico Autre genre d’efchelles portées à roues ferrées.
- Dd. iiij.
- p.160R - vue 331/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Bombarda) Bombarde, comme on die communément,eft vn engin de métal,lequel parvnenflambemécdefeu,aumoyen dyne poudre lulphu-rée,ou plus toft infernale,poufie en tourbillon merucillemement loingjes boulctz de cuiure & artificielz,& grades pierres de mortiers,auec vn horrible éclat Sctonnerre:abbatant murailles,& demoliflant toutes choies de reliftence. L’inuention de laquelle on penlè auoir elle d Archimedes au temps queMarcel afliegeoitSarragoufepourdcfendre la liberté de fes citoyens,& pour détourner ou delayer la ruine du pais.Duquel aulîi les Princes & Chefz de noftre temps vient pour l’aflubicctir ou ruiner les peuples libres. Au regard de ce nom Bombardai ie ne le treuue nulle part entre les renommez efcriuains Latins, combien que l’impofition tireedulon ne me lèmble pas hors de railôn. Quelle autre choie de vray eft ce vne bombarde, qu’vn fon,ou vn certain tournement enflambé ? le ne voudroye pas toutefi fois opiniaftremét alfeurer la fourfe de ce vacable,que les fauans efcriuains n’ont point touché, à fin que iene lemble à quelqu’vn trop grand recer-cheur, i’olè bié toutesfois dire qu’elle eft côtenuée foubz le nom de Balifte, ou Torment.Car balifte eft deriué du verbe Grec jSaAAtip qui lignifie en Latin (iacere) ietter.Toutcedonquesquiiette pierres, & fléchés peut railôn-33 nablement eftre appelle Balifte.Nonius Nfarcellus : Les baliftes font ce d’ont 33 on iette les grandes ôc lourdes pierres.. Viétruue au neufieftne : On ne fait 33 point toutesfois aucune balifte perfaiélement linon àla proportion delà 33 grandeur du pois de la pierre,que celle maniéré d’engin doit tirer.Orofe au 33 troifieftne des hiftoires.-Reguîe ayant la charge delà guerre Carthaginoise le,8c marchant auec Ion armée le campa près de la riuiere de Bragada,Ia ou e> comme vn fcrpent d’vne merueilîeufc grandeur deuoraftplufieurs de fes e> loldas defcendans a la riuiere pourlaneceflité de leau,Reguley alla auec 33 Ion armée pour le defaire-.mais comme les dardz n’entralfent point dedans ” fon dos,& que les coups de traiélz fulfent perduz, comme qui tomboient 3> par le treilhlfement de lès écailles,tout ainlî que fur la curuature des eleuz, 33 tellement qu’ilzeftoientrepoulfez du corps afinquilnefuftoflenfé:&co-33 meaufurplusilen vit vne grande multitude brifer aux dens,& écacher de 33 Ion effort,il ordôna d’amener des Baliftes par lefquelles vn boulet de pierre 33 poulfé à fon efchine luy a dénoué tout le corps. Valere parlant du mefme 3} ferpentau premierliure:Commeon nelefceuftpercerà coupsde traiél,il 33 mourut finalement chargé de toutes pars à boulîetz de Baliftes, & à coupz « druz de pierres lourdes.Ouide au premier hure de trift.
- Si Ne plusJouda'm les vagues aux coJle% des naufebatent. _
- 33 Que bahfles aux murs lepois de pierre s bajlent.
- Et au neufieftne des Metamorphofes:
- 3 3 Àfyplus legerement ellefone battue
- 33 Queiadis <_ydrlesoulabahjle battent
- 33 La murailleebrechée.
- y y
- Senequeaudeuxielmeliuredesqueftions naturelles-.Les baliftes &fcor-
- pions
- p.160V - vue 332/480
-
-
-
- *
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X. rtn
- pions tirent des traidlz auee bruit.Par ce moyen comme dit Maro,La furie des hommes,au témoignage dvn certain grâdautheura enfuiuy la foudre non imitable.Or que la balifte tire destrai&z Ammian Marcellin le te-jjmoigne au vingt quatriefine desgeftes:LâIêtreuue(dtt-iljl’artillerquimec jj fubtilement la fïeche de bois ferrée d’vn bien long fer dedans le trou de l’ar-» brier,&lors que I’extremité de la pointe fera venue iufquesaubout de la jj corde,elle part inuifiblechafleed'vnmouuement fècrec de balifte, iettant jj quelque fois des fein tilles d’vnetrop grande violence, & auient fôuuent, »> qu’auant que le rraid: lôit apperceu,la douleur lente vne playe mortelle. Le » mefine Ammian au vingtcinqiefme : Alors les baliftes dreflees a fléchés de boys,trauailloient beaucoup d’eftrebendées,& delachées, tirant fouuent « dutraiét.SaindtHierofineau premier liure contreIouinian: Comme plus j> on donne de montéeà vne balifte,tantplusviue eft là deflerre, Lucain au jj deuxiefme :
- jj Tortdjuepertenebras 'validifque balijla Ucertis
- jj Multifidas taculatd faces.
- Les Gréez entrepofans à la fin vne.r. l'appellent. jSotArççæp Laquelle Pline dit au vij.auoirefté inuentée par les Syrophenices. Ancon fort ancien hiftoriographe dit,que Saturne fut chafle en Grece par Iuppiter, la ou il af-fèmbla vne armée d nomes monftrueux:contre lequel Iuppiter occupant le pais d'Alpeftre enfeigna l’vfage des baliftes. Au fiirplus ayant la vidoirc,les poëtes lefeignét auoirchafTé Saturne diiciel,8c l’auoirpriué de la Candie.
- n n n n n n
- p.161R - vue 333/480
-
-
-
- p.161V - vue 334/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X. sgz
- Tormenta)font engins de guerre pour ruiner bourgades & villes ainfi di6bz,d’autantqu’ilz tirent,iettent,&enuoyent des bouletzjes tournoyas „ d’vn tour fort hafté.Tite Liue au trete quatreiefme: Archimedes alïît fur les ,3 murailles desTormens de diuerle grandeur cotre ceft apparat de guerre, & 33 tiroient des pierres d’vn grand pois contre les nauires éloingnées.Iofephus 33 au fixiefme liure de la guerre Iudaique.-Uz auoient aufïî trois centz baliftes, j, & cinquâte tormés à pierres,d’ont îlz dônoiét empefchemët aux Romains 33 de drefler leurs plâtres formes. Cicero en lahuiëbiefme Antoniane: Quoy? 33 feroitil treuesîliabatu Modene a Tormens,prefènsles Confuls, à la „ veuëdesambalTadeurs.yirgile enrvnziefme:
- 33 Lors fondain le Thyrrein & le fort contée
- 33 S entrechargent de lances en[''efforçant de courfe
- 33 Et premiers d’vn grand bruytjl-^ tombèrent par terre.
- 33 Et furent leurs chenaux frotffe^ a leur rencontre
- 33 ^Acontéebleffé cheut enfaçon de foudre
- 33 Ou bien comme yn boullet chaffépar yn forment:
- 33 Là épandant fa vie.
- Etau douziefme:
- » Lesboulet^duTormenthruyent de telle forte
- >* iV j ne partentfi grande les tonnerres des foudres.
- » Seneque au treziefme liure des queftiôs naturelles:Les detroidbz des nues » ferrées au dedans d’elles,iettent vn efprit de leur milieu, & pourtat ilz l’en-» flambent & lechaffent en façon deTormët.LesTormesauffi dont on tire » le trai6b,font diëtz de ( torquère)tirer. Virgile au deuziefme des Georgiques: j» Ithyreostaxi torquenturin arcus.
- 33 Firmian au deuziefme liure contre les GentiIz:Eftant Rome prinfè par 33 les Gauloyz,les Romains aflîegez au Capitole,ayâs fai6b des Tormens des 33 trefles des femmes confâcrerent vn temple à Venus lachauue. Seneque au 33 premier liure de l'Ire: Quand il eft befoing on luy donne vehemëce,ou on 33 lar abbaifîè,laquelle n eft point autrement en la puiflànce que les bouletz qu’on tire à Tormes,font en celle du tireur,côbien ilz feront chaflez loing
- TORMEN T VM \M|
- p.162R - vue 335/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- MdchindyZÏk vn engin de baterië, ruinant les villes,& les murailles des 33 bourgades.SenequeauThiefti.il n’eft ianeceflaire de ruiner les villes à ma ” chines chaflantes les boulctz de pierre bien loing. Valere le grâd au cinqief. 3y me liure:Comme Q^Metel menant la guerre Celtiberique en Efpagne afi ” fiegeaft la ville de Segobrica,& qu*il femblaft porter par terre auec machi-
- 33 neslecoftédelamuraille,lequelfêulpouuoiteftreabbatu,il préféra l’hu-
- 33 manité à la vidoire prochaine. Car comme les Segobricenfès euflent mis ” au deuant de la baterië les enfans de Rethogenesqui feftoit retire à luy,il 33 leualefiegeàcellefinque les enfans nefuflènt defaidz enlaprefènce du 33 pere d’vne mort cruelle,combien que Rethogenes meftne dit qu’il ne don-33 noitpointd’empefchementdepourfùyurela prinfèdela ville par la mort 33 de Ion fâng.Par laquelle tant grande clemence de ce faid,combien qu’il 33 n’ait prins cefte ville la,il a toutesfois gaigné l’affe&ion de toutes les autres ” delaCeltiberië, & a fait qu’il n’a pas eu grande neceflité de beaucoup de 33 fieges pourles réduire à l’obeiffance du peuple Romain. Seneque au dix-** feptiefmeliuredesepiftresîllfentreuueaftezquimettent le feu à la ville, 33 & qui ruinent les chofes inexpugnables detoutiamais, ôdèures par long ” temps, & qui dreflent des plattes formes à legal des forterefles, & qui 33 d’vne grande multitude d engins de beliers, & machines ruinent les mu-33 railles . Item au quatorzième : La philolophie doit eftre encourtinée 33 d’vne muraille hors de toute baterië, & que la fortune l’ayant batudeplu-33 fleurs machines ne forfè point. Plutarcne de la vie de MarcellusrEt lors 33 que Archimcdes eut drefte fès machines, il tiroit diuerfès efpeces de traid, 33 & pierres d’vne étrange grandeur contre l’armée fur terre d’vn fon & viftelfe incroyables. Iofèphe autroifiefmedelaguerre Iudaique:Lespier« 33 res aufsi chaflees des machines eftoient les defenfes de la muraille, en *’ froiffant aufsi les encogneures des tours. Au fùrplus il n’eftoit point d’afi ” fêmblée d’hommes fi ioindes qui ne fuftentr’enuerfêz iufques au dernier 33 ranc parla grandeur & violence de la pierre.Or pourra l’on entendre com-” bien grande cft la force de la machine par ce qui eft auenu cefte nuid la. 33 La tefte de vray fut emportée a vn certain Iozippe, du guet de la muraille, 33 duquel le fommet fut chafle comme d’vne fonde iufques a trois ftades.En 33 plein iouraufli le fruicl d’vne femme grofte,fut par vn coup receu auvétre ” cranfporté iufques a demy ftade,tant eft grande la force de ce tonnerre. Et 33 pourtant la violence des machines eftoit fort retrible,aufti eftoitle bruyt 33 des bouletz.La mefme encores au fixiefme liure:Or auoienttoutes les 33 bandes des merueilleufes machines contre les faillies,&mefmement la di-33 xiefme Légion des baliftes fort violentes, & des Tormens à mortiers, def-” quelzilz ne foudroioyent pasfèulemët ceux qui leur couroiét fus,mais auffi w les gardes des murailles. De vray chacun mortier pefoit cent Iiures, lequel 33 eftoit chaffé plus d’vn ftade.Au demourant le coup eftoit intollerable,non 33 feulemët aux premiers quilz r’encôtroiët, mais quelques fois aux derniers. 33 Au cômencemëtles Iuifzfêgardoient d’eux,d’autant qu’ilz eftoient blacz
- ny
- p.162V - vue 336/480
-
-
-
- »
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- Jj
- JJ
- JJ
- Jj
- JJ
- Jj
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- J)
- JJ
- JJ
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE X. ie,
- hyneftoient feulement découuers a leur Ion & bruit, mais auflî à leur lu-ftre: Finalement le guet des tours auertiHoient quand la machine desban-doir,& que le mortier voloitcrians en leur langue.-Le filz vient. Et pourtat ilzauerri/ïbiegt ceux aux quels il fadreflbit lesquels lefuyoient, & par ce moyen il auenoit qu en le détournât le coup eftoit en vain.Parquoy les Ro mains auifoiét de noircir les mortiers d’ancre,& lors ainfi tirez leurs coups n’eftoiet pas incertains, aiïollans plufieurs enlèmbîe d vn coup. Le mefine au melmeliure-.lizeftoiétau/ïifalchezaudroiéide l’Antoniane des com-pagnôs delehan auec vne multitude de Zelotes:non foulemét par ce qu’dz combatoient de plus haut lieu,mais aufli pour autant qu’ilz auoiét apprins à fayder des machines.Car l’experiecepeuâ peu auance le fçauoir. Arifto-teau lèptiefmedes Politiques.Mefmeen ce temps cy, auquel les machines & tourmêsfont inuentez en toute fubtilité pour le fiege des villes. Dioge- . nés Laertius au Iiure de la vie des philofophes:Le philofophe Strato, dit il, aeforit des machines métalliques.Claudian au deuxiefme Iiure.
- Ce cy efiant cogneu3notts Viunons jimplement Ny ne bruyrontl’alarme3en l’air ne voleroit Le frefne refonanti ér les poupes des naufc Le vent ne briferoit, ne les murs la machine.
- Et âfm(PanduIphe)qu’en ces engins de guerre,ie recite finalemet les in-uentions propres, & à ceux auxquelz iene fay point de doute qu’elle ne foientprofitablesjvoycilepourtraid: d vne pièce d’artillerie, qui n'a iamais au parauant elle veuë ne ouië,comme qui contre la façon de toutes autres (qui eft vn cas incroyable)n eftât point montée demeure en cftat fouftenât fur fon derrière fon pois,eftant fulpenduë en l’air fur la tcrre.C’eft fans point de doute vne tienne excellente inüencion,& bien conuenante aux Chefz prefèns & d venir.
- p.163R - vue 337/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Voyci cncores vne autre tienne inuention d’artillerie par laquelle oa tire vn boulet artificiel plein de poudre auec vn nourrilTement de feu.
- p.163V - vue 338/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. "LIVRE X; Les manteaux a artillerie.
- 164
- Le. ij
- l
- p.164R - vue 339/480
-
-
-
- ROBERT VALTVWN Deux maniérés pour trainerartillerie.
- p.164V - vue 340/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE.’ LIVRE] X.
- _ —*
- Engin pourguindcrlartilleric.’
- r,niuo
- t e. nj.
- p.165R - vue 341/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Engin pour haufler & baiiïer l’artiüenepar îe derrière^
- Engin à haufler & baifTer artillerie
- p.165V - vue 342/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. ! LIVRE X. Engin artilie '
- î66
- MACHINA
- TORMENTARM
- E c. iiij.
- p.166R - vue 343/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN Tout i artillerie. -
- • T
- a • ».
- p.166V - vue 344/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE X.
- Engin tournoyable.
- l*7
- p.167R - vue 345/480
-
-
-
- p.167V - vue 346/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE: LIVRE X.' «S
- p.168R - vue 347/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN Vnautre engin.
- p.168V - vue 348/480
-
-
-
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII. 169
- autre engin aflëmblé deboysIegier,dehui& piedz de large, fêpcd exaucement, &fèize de long : la couuerture duquel efl: doublement r enforçée d’aiz,& de clayes,& les coftez d ofiers,dont on penfé que le nom eft venu,à fin qu’il ne fôit forcé de pierres, ne de r raid:. Mais au dehors il efl; armé de cuirs cruz,& fraiz,ou bien de feutre cotre le feu. Et quad il y en a vn bon nombre,on les renge enfemble, ôc les traine l’on à roues. Finalement ceux du fiege y êftanscouuers bâtent les fondemens de la muraille. Lucain au troifiefme.
- ^Alon marche l’engin legerement couuen De terreceux qui font cachet deffoub^ fon teèl Et foub-zjo-gier couuertfiapprefient de forcer Le pied de la muraille,bore s d'vn grand effort c.Auec te fie de fer,le belier balancé S'ejfaye d\n ébranlé,ouvrir la Uefon De l'efpeffeur du mur.
- Tite Liue au vingt & vniefme:Il délibéra de mener cotre luy àcs{Vineas) par lefquelles on peut approcher le mouton, ou belier, de la muraille . La mefme encores.vEt pourtant la guerre a recommencé de plus forr,& en placeurs lieux: tellement qu'a peine yauoit il place fuffifânte pour les engins es aucuns des lieux. On commença àpoufTer(Ki»fdr) les cabanes dofiers, & approcher le belier.
- Latoùrtuëeft vn affemiblement d efcuz en façon de tortue,car les gens de guerre prennent les noms des animaux félon les genres des armes, comme lebelier,la tortue,laquelle aufsi fe baftit de marrein,& aiz, eftant reue-ftuë contre. le feu de cuir cru,bureau ,ou feutre. Elle a pareillement prms fon nom de la fémblance d vne vraye tortuë. Car tout ainfi que retirée dedans fâ coquil!e,nous la voyons hors du danger des coups. Etau contraire, mettant la tefte hors, puis la retirant,puis auançant fe mettre en péril, ceux aufsi qui font encloz en ceffce façon d engins font quelques fois à fèureté en r amenant la poutre,quelque fois aufsi ilz forcentpour clonner plus grand coup eftansfouuentesfoisdefaids.Au demourant la tortuë d’ont on peut approcher la muraille fe deura ainfi faire.On affemble vn placher en quar-ré, foubz lequel font afsis des aiflfeauxà roues fermez de lames de fer, fur lefquelzil roule-.de forte toutesfois qu’ilz ayent des areftes & mortaifés par lefquelles les leuiers rrauerfans puiffent hafterle roulement,a fin que tournez à droid,ou à gauche,ou obliquement aux angles on la puiffe auancer fil en eft befoing.Or peuuent ilz,fil eft neceffaire eftre de huid roues pour pouffer la tortuë,mais il fy faudra gouuerner félon fexigëcedulieu. Au de-mourant il la faut couurir de toute matière qui foit mefmement forte & de refiftence, fors que de pin ou d’aulne, ou d’autre telle matière : car ilz font tendres,& prenans aifément feu.Ou bien pour garder que le feu ne nuife a ceft engin , il la faut reueftir d’argile courroÿée auec poil dvne efpefîëur raifonnable & que tout autour de la charpenterie on allie des clayes faides
- F f. j.
- p.169R - vue 349/480
-
-
-
- ROBERT VALTVR1N
- drues d’ofier frac & verd reueftuës de double cuir cru, r’enforcé d'algue,ou bien qu’on couure de toutes pars l’engin de pailletrempée en vin aigre, à fin qu elle ioit hors des dangers des coups & delà violence des feuz.
- Il ne me fêmblepas aufsi choie impertinente d’expoiêr par quelz moyës aeftédreflee latortuëqueHe&ordcConftantinobleafait.Lefront eftoit comme angles de figures triangulaires, à fin quelestrai&z qu’on leur iet-teroit des murailles,ne tiraflent leurs coups à plomb,comme il appert icy.
- p.169V - vue 350/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII.’ i7o
- Il eft aufsi vn autre engin qui n’eft pas de moindre 'artifice, & d’auanta-ge epouuantable faid de celle forte.
- Aries efl vne façon d’engin duquel la forme eft telle: O n arme de fer le bout d vn arbre fort ôc noueux, lequel fufpendu ou poulie contre la muraille,puis r’amené en derrière,on r’adrelfe dvn plus grand coup,par ce moyen le codé du mur batu a plulieurs coups,obéit. Vidruue au dixiefmç >> de l’architedure-.On recite qu’Aries eft de telle fbrte:LesCarthaginois me-, j nant la guerre à Gadis agirent leur camp,& commue au parauant ilz euftent » prins vn chafteau,ilz fefforcerent de le rafer, & comme ilz n euftent ferre-s, mens pour le faire ils prindrent vne tronche, laquellefouftenans àleurs » mains, &batans de fa telle la fuperficie du mur fans celle, ilz deplaçoient la première rangée des pierres, demolilfans peu a peu & parranc toute la
- » liailon du mur.
- Ff. ij.
- p.170R - vue 351/480
-
-
-
- ROBERT V ALTVRÎN
- >
- Et depuis vn certain charpentier de Tyrus appelle Phcfarfèmenos émeu deccfteraifon&inuention,en fichant vne tronche y en pendit vnc autre en trauerfc comme vne balance, laquelle Ramenant Scpouflant il porta par terre la muraille des Gaditanois ca la debrifant.
- p.170V - vue 352/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE.’ LIVRE XII. 171 Tétras de Calcedôyne a premièrement fait vne plate forme de charpenterie fur des roues,faifant au deffus vn aflemblement, auquel il a pendu vn belier,couuràntletoutdecuirdebœuf,afinquc ceux qui eftoient logez en ceft engin pour batre le mur fuflènt plus feurement,tellement que d’autant qu’il eftoit couuèrt de cuirs, il commença a prendre le nom de tortue arietaire.
- Il eft vn autre engin de belier félon que dit Iofephe au troilîelme liure de la guerre Iudaique, d’vne grande tronche de bois, femblable à vn mas de hauire,la lommité de laquelle eft r’enforcée d’vne grofle malle de fer forgée en façon de telle de belier, duquel elle a prinsle nom. Or eft il en pente par fon milieu lié de cordes à vne autre tronche,côme d’vne Balace,& bien r’enforcéd’vn collé & d’autre de paliz bien fondez. Au demourant eftant r amené en derrière auec vn grand nombre de gens, & de rechef r’enuoyé par leur effort il bat la muraille de ceft auancement de fer, nynell aucune tour li forte, ne refpeffeur du murfi grande, qui foultenans les premiers „ coupspuiffe durera Ialongue.Cefar ou autre pourluy au treziefmeliure: Il 9,enuoyoit lettres & courriers en Sicile pourluy amaffer clayes &c marreins » pour baftir beliers, d’autant qu’il y en auoit dilètte en Aphrique. Ammian » Marcellin au xxiij. Nous viendrons au belier.On choilit vn lapin,ou bien tegeï^A. vn orne,au bout duquel eft vne boëte de fer bien afferé & long, failànt vne pro façon de front d’vn belier, dont ceft engin a prins le nom. Et ainlî lùlpen-
- Ff. iij. pro prona
- p.171R - vue 353/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ,, duc à aiz en trauerlè d vn collé Se d’autre,elle efl arrellée par les liens ferrez „ d’vne autre tronche quafi comme d’vne balance. Celle hauteur donques „ repoulfant en derrière de tant que la raifon de la mefure lepeutfouffrir,re-„ double de rechef d’vne vehemence de coups pour démolir tout ce quelle Lbe§e >» r encontre,tout ainfi qu’vn homme armé ledrelfant & frappant.Par lequel proro- >3 redoublement continué, la maçonneriëdes muraillesen lelachantfe dé-bora. „ molit,ellans les édifices brifez comme d’vne violence de foudre drue. Au regard de la forme de celle tronche ariecaire tu la trouueras à Rome taillée en marbre en l’arc triuphal de Lu.Septimin.Les autres dient que l’Aries ne démolit pas les murailles,& qu’il roule tant feulemét des pierres. Claudian, » ^Alors foït balancé par vn ébranle au mur
- » Ta machinefoudain roulera le belier,
- > y Les boulet& batra la couuerte tottu e
- » Les portes Jorsfép and en dehors la iemejje.
- Il ne faut pasaulsi oublier que celuy qu’anciennemët on appelloit le che-ualet elt auiourd’huy appellé telle de bellier entre les engins debaterie de . villes. On dit aulïî que Bellerophon ainuenté de cheuaucher le cheual,qui uenifle,ftâ vn inllrument de guerre,& Pelletroene le frein,la liétiere, & le harnoys
- tim poft du cheual.Or pour obuier a ces violences de coups de cheualet, ou de be-Bellero- lier,qu’ilz n’oftenfaflent la muraille de leur baterie,noz anciens deualloiét pao.Kviu» vn coJIct^duquel cïtr€EgnanS la telle, & la mouuans fulpcnduëça&la ilz détournoient les coups de la muraille,ny ne la louffroiét offenler. Par fem-blablemoienaulsi ilz faifoientdeualer le long du mur des faezpleins de paille trempée en vin aigre à lendroit de la baterie à fin de rompre la fuyte des coups,ou bien quelamollelfe les rendill vains.
- Nous appelions aulfi (Helepolis) vn engin à batre villes. Ammian Marcellin au vingt troifiefme.-Ellantiarinuention du belier en dédain comme trop commune,on en ballit vn autre cogneu aux Hilloriographes, que les Gréez (umommçnt(Helepolts)pom leffeël de laquelle continuel Demetric fils du Roy Antigone apres la prinlè de Rhodes & autres villes^efté appel-\é(Poliorcetes)va.Çcut de villes.On le ballit en cefteforte.On d refie vne grade tortuë baftie a lôgs aiz qu’on aflemble à doux de fer, laquelle on couure de cuirs de bccufz,& d’ofiers recens, & couure l’on de limon le fefte à fin qu’il refifte au feu, & autres inconueniensde coups deieël . Or ell Ion front enboité de trois pointes fort aguifées poilàntes à force de fer, toutes telles que les peintres ou imagiers nous peignent les foudres , à fin que de les éguillons auancez elle brilè tout ce qu’elle aura attaint . La multitude de gens de guerre donques gouuernant au dedans auec infinies cordes & roues celle grande mafie, l’add refie à la plus foible partie de la muraille de toutes fesforces:& fi ceux qui font au deflus pour la defen-lè de la ville ne la forcent, elle fait grande breche abbatantla muraille. Et combien que les forces de ceux qui la combatent loient grandes, leurs engins ne font pas moindres,comme on recite dire auenu aux Rhodiens.
- Il
- p.171V - vue 354/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XIL i7j
- Il fat vn Diogenes Rhodien,auquelonbailloit gages de la ville tous les ans a i’hôneur de ion art.Et comme en ce temps la vn certain Callias,homme de grand eiprit,fut venu à Rhodes,il fit vne modelle de muraille, fur la quelle il aflèit vn engin,for vn vas a anfes tournoyable,lequel a rauy & trâf porreau dedans des murailles vne helepcle approchant. Ce qu’ayans veu les Rhodiens ilzfemerueillerentj&oileréc à Diogenes ià penfion annuelle^ enfirentl’honneuràCalhas.CependantleRoyDemetrie dreifant la guerre aux Rhodiens amena en fa compagnie Epimache l’Athenien excel lent ouurier de telz engîsrlequel fit vne helepole a grades mifes,& grade in-duilrie,&labeur.L’exaucemétdelaquelleeitoitde vingt toyfes cinq piedz, & la largeur de dix toyiès, fi bien réparée de bureaux & cuirs,qu’elle eiloit en defeniè contre les baliiles. Et comme Caillas fut prié des Rhodiens de dreiTer engin contre celle helepole,& qu’il la traniportail dedas laville fuy-uantcespromeifes,ilnia qu’il fuil pombîe. Car il eil d’aucunes choies ayas en petitz volumes apparence de vérité,leiquellestoutesfois en plus grand font inutiles,& ceifent de ce qu’elles promettent,corne nous pouuons voir en cccy. On fore bien vn trou dedemy doigt,ou d’vn tout entier auec vne tariere, laquelle toutesfois ne peut forer,fi par vn mefine moyen & raiibn nous en voulons faire vn trou d’vne paume d’ouuerture. Par ce moyen dô-ques &raifonles Rhodiensdeceuzfirentiniure&outrageàDiogenes.Fi-nalemcnt voyans l’ennemy obiliné en les efforsje péril de ièruitude,la machine dreifée pour prendre la ville, & l’attente de ià ruine,ilz iê ietterent aux piedz de Diogenes,lepriansdeiècourir fonpaisdequel ayant foufferc outrage dénia d’entrée le faire.Mais apres que les nobles filles auec toute la ieuneife & prelatz le vindrét prier,a lors il leur promit foubz côdition toutes fois que filprènoit lamachine elle feroitfienne.Aquoy côièntanstous d’vne voix,il perce le mur du collé d’ou deuoit venir la machine, & ordôna a tous tant en public qu’en priué que tout ce qu’vn chacun aura d’eau, fien, &bouë,onlerepandiildeuantle mur, par ce trou lâauecvn canal fortant hors.Et comme vne grande force d’eau,fien, & boue,y euileiléépanduë la nuiél,deux îours apres l’helepole venant a la muraille, iêmbourba dedas l’humiditéjdautant qu’il fe fit vn abifme,tellement qu elle n’a peu par apres i’auancer,ne reculer.Et pourtant Demetrie fe voyant deceu, moqué & fru-flréparla iàpiencedc Diogenes fien alla auec fon armée de mer. Alors les Rhodiens fe voyans deliurez de la guerre par la diligence de Diogenes luy rendirent grâces en public, &luy firent tous honneurs & reuerences. Au furplus Diogenes mena l’helepole dedans la ville , Scl’ailit en lieu public, efcriuat deifus:Diogenes a fait preiènt de ce butin au peuple.Par ce moyen les machines ne font pas feulement neceflàires es moyens de defenfes,mais auififont bien a louer Iesconièilz. „
- F f. iiij.
- p.172R - vue 355/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- U eft outre ces inftrumcns & engins autres choies innumerables & pref ques infinies neceflaires au camp pour baftimes ôc démolitions. Mais afin qu’en les recitant ie ne iôye trop long,toutes choies qu’on penfc eilrenecefi faires à vn Chef dedans vne ville doiuent eilrepreftes,à fin que quelque part qu’il veuille mettre fiege,il puifle dreifer vne cité garnie de toutes choies. Au regard de ceux de defeniès, il n’eit ia beiôing d’en eicrire : car les en-nernys ne font pas apprefl: de baterie fuyuat noz efiritz, defquels le plus fou uent les engins fai&z iur le chap & d’vne cômune obièruance de guerre a-uèc vne expérience maifireife des choies, & vne diligence ingenieuié d’a-uis font ruinez fans engins.
- Orfuyuant ces genres d’engins diuerfeseipeces d’enfeignes, lefquelles font ordonnées pour eftre recogneuës es combatzpar ceux qui l’accompagnent ,& aux quelles îlz fe retirent fouuent du combat, eilant a la coutume des Romains vn étendard fort éleué, d’autant que Mars feiiouit defang. Les couleurs des enièignes, & étendars ont eilé àla volunté des Capitaines par fortune,ou bien de bon heur des choies qui iê rencontrent. Les homes devray au cômécemérdumôde fairembloiéclaiiransvneviefauua^e,&4-uoiét la guerre les vns aux autres viuas de chair humaine, eftant le plus fort vi&orieux . Et lors les plus foiblesappriz par les outrages des pluspuiifans à ce les contreignât la neceiîité dreifoiét vn bataillon mettans en telle vne
- eniêignc
- p.172V - vue 356/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII. i75 enlêigne de quelque befte_d’entre celles qui par apres ont e/lé côlâcrécsipar ce ijioyen ilz Ce gardoient d’eftre outragez d’autruy:d’ont il eft auenu qu’ilz ont fait lionneurs a la belle qui auoit elle caulê de leurlâlut. Et dit on que les anciens Egiptiens qui n’aüoient point de difeipline militaire inuente-rent vnc certaine enlêigne que les gens de guerre /îiyuroient, ellansfou-uenttormentez de guerre par leurs voi/ins:& que leurs Capitaines ont pot te à la guerre les . figures des belles,aux quelles ilz portent reuerence, peinâtes en tableaux, &quilz ont r’aporté victoire parleur moyens,enreco-gnoiflant & gardant l’ordre lôubz lequel vn chacun fuyuoit la guerre. Ce-far aulfi recite en l’Arate,qu’AgIoalle dilbit que lors que Iuppiter marcha del’iflede Naxe contre les Titanes, & qu'il lâcrifioit au riuage ,vn’aigle y arriua en bon heur,laquelle receuë pour bon prelàge,il a prins en tutelle e-fiant victorieux. L’hiftoirelaincte témoigné qu’au parauant vneaiglel’af-fitlûrfa telle,& quelle Iuy lignifia vn Royaume.LesThebainsaufii,corne le témoigné Diodore auoiét l’aigle tant pour ce qu’elle lèmble oylêau Royal,& qu'aufli elle efi digne de Iuppiter.Les autres entre lefquelz eft Iofephe diét,qu'elle a lapreeminéce es armées Romaines,a caule qu’elleeftle Roy de tous les oylèaux & qu'elle eft la plus forte: & pourtant l’eftiment ilzenlèi-* gne de principauté,& prelàge de victoire à quiconque ilz mènent la guerre,
- Le dragon aulîî a ellé quelque fois enlêigne depuys qu’ApoIlo eut tué le lerper a fléchés. Car combien que noz anceftres ayent dit qu’A polio fut diuinateur& médecin, ilz l’ont toutesfois aufli appelle Soleil,& Titan,quali côme lvn de ceux qui menèrent la guet re contre Iupiter.On dit aufli qu il a efté appelle Pythius à caufe de Python lèrpent d’vne merueilléulêgrandeur, laquelle n’eftoit pas moins effrayante que fon venin.Lequei Apollotuantà coups de | fléchés, r apporta aufli le nom pour la dépouillé, de forte qu'il fut appelle Pythius. Et pourtant en ligne de victoire Apollo veft vne couronnedelaurier,&ordonne de faire facrifices comme le recitent Pindare, & Callimache. Les autres dient que celle enfeigne ne commença pas par la mort de Python,mais plus toll de Hercules, ou del'Auentin nay de luy & de Rhea. Car comme Hercules
- p.173R - vue 357/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- eultlôuuentesfoisdomtédes horribles monftres,& qu’illè montrait aux peuples vi&orieux & triumphans eltans les dépouillés des belles qufla-uoic tué attachées à lès boucliers,& qu’entre autres monftres il euftaiouftc aies trophées l’Hydre apres lauoir tué, accroilfant toufioursen telles,Ton fils Auentin fuyuant le camp de Turne contre Enée ayant la charge des gens de pied portoit l’Hydre a cent telles. Voila ce qu’on dit communément de la mort du ferpent tué par Apollo,a fléchés,& du furnom dePy, thius,& de Hercules,combien que ( comme eferit Antipater leStoiquc& Cornificiuses Etimes, & Plato, & Eulêbe, des temps) il fen puifle trou-uer diuerfe raifon naturelle.
- S
- Au demourant l'armée Romaine cllant encores pauure Ibubz Romule,lioità vnpointon va boccau de foin,lequel ilzportoientpourcnfcignes. Ouide aux Faites.
- Elles efloientdefoin, mais au foin on portoit Vhonneur tout au fi grand, qu’aux aigles tu le vois.
- Les maritales pendu% portoit la perche longue,
- Defquel^deManïplairealefoldatle nom.
- j>
- »
- jj
- Mais depuis on commença auoir au camp quatre prin cipales enfeignes, du loup , duMinotaure, du che-ual, & du lànglier. Il eltvray que nous auons feulement entendu la railôn de deux qui font le fanglier & le Minotaure.Celle du langher elloitd’autant qu’a-pres la guerre finie, ceux qui faifoient paix entre eux auoient de coutume de confermer leur accord par la mort d’vne truye,à la charge que celuy qui le romproit feroiccrucllement lapidé tout ainfi que la rruye.
- p.173V - vue 358/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII.
- *7 4
- Le Minotaure participe deux natures comme qui cil Taureau iulques auxefpaules,&au demourant homme. Et qu’au furplusies Conlèilz des Capitaines ne doiuent pas moins eltre diuers & fecretz, que iadis a efté le laberinthe Ibn domicile.
- Or a l’effigie du loupefté entre les enleigncs de guerre,d’autant que lesenfans Martiaux ont ellé nourriz du laiétdelouue,oü bien d’autant que celle maniéré d’animal eftfoubz la tutelle de Mars, & aluy dédié:ce quon croit par argumens manifelles . Le loup de vray ell vne belle de proye & rauiflante , & qui de là nature de-uorc Ùl prinlè , gardant melmement I’oportunité du temps pour faire proye fur lebellail,que les gens de guerre gardent coutumièrement pour prendre villes, qui ell le poinét du iour, & la Tourne. Les Egiptiens en rendent vne autre raifon,combien que plusfa-buleulê. C’ell que comme Ilîs accompagnéede fon filzOrus contre Typhon , eut à mener la guerre * on dit queOfiris vint des enfers en forme de loup au fcc ours de là femme & lôn fils, & que j viélorieux cllant Typhon tué ilz firent honneur au loup, par len~ treuenuë & lècours duquel ilz eurent la vi&oyre . Aucuns diene
- p.174R - vue 359/480
-
-
-
- : ROBERT VALTVRIN
- que les Ethiopiens courans le pais des Egiptiens furent repouffez iulques à la cité d’Elephantie par vn bataillon drefie par les loups, & qu’à celle caufè ce lieu a elle diét Lycopolis, cité de loups, & par la pofterité honneur faiét à euz.
- Au regard de l’enlèigne du cheual,ie n’en ay rien entendu qui fuft de renom ne manifefte,linon que parauantureilz ont voulu deligner la commodité de Mars par la figure de celle belle, veu quelle le treuue es guerres auecvn grad lèruice,iointqueleche-ual donneprefage du combat,comme qui ardant à la vi&oyre & gloyre, porte les gens armez,& quelquefois il ell ville comme ilelinecelfaire a Mars, & plein de violence & grand furie.
- p.174V - vue 360/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 175
- Finalementl’Aigîe commença quelque peu dans auant Marin eflre feule portée à la bataille. Les autres enfeignes qui marchoient au camp deuantlesbandesefloientdelaiiTées,lefquellesencores Marin olla entièrement-a. fon fécond Conlulat,& ordonnaaux légions RomainesTAigle. A.11 demeurant l’ordre de marcher & arreller,&la dilpofition de l’armée
- - auec la guide des enfeignes fegouuerne par chans,veu que pour le combat on fonnepour la marche & retraite, par ce moyen le chant enflambe &; appaifè les coeurs des gens deguerre.Lefquelles émotions êcrabaiffemens de coeurs ell aux aucuns par trompetes. Et combien que Philippe & fes an-
- ^.ceffcres faydafîènt d’elles quand dz faifoient cacher les enfeignes, ilz les changèrent touteffois d’autant que le fon eftoit empefché du bruit & fon
- - 'désarmés depouuoirperueniràtous. Et fut ordonné que quand il fau-, droit remuer le camp qu’vne.percheferuiroit de ligne. Les Parthes auoient • de cou Hume d’auertir la nuict par feu ou fumée, & de fbnner l’alarme à
- cymbales. L’armée des femmes Amazones marchoit en bataille, & farre-lloitau fon du üllre. Oreille liftre vneelpcce de trompette auec laquelle on peint Ifis, & en vfoient les Egiptiens en fes fàcrifices prenant là dénomination de (Si/rojoubien defon inuentrice,oufituveux de la langue du païs. Iuuenal.
- » donne kmesyeulx du Jiflre courroucé
- Virgile.
- 3} Auffîre dup4is fes bataillons la Royne
- }3 Appelle. .
- Lucain.
- ,t Nous nauonspasreceu autemple ton Ifs
- „ Ny les chiens femidteu^nc les lugubres fstres.
- . De mefmeaulsi Properce en Tes Elegies:
- 33 DuCanopepoilu cefteroynepaillarde.
- }> Pour le fang Philippinfleüjlried’vne note. - '
- ” De ÏAnuhe abb ayant a o^éfaire te fie. c
- 33 A noslre Jupiter, & le Tibre forcer ' .
- 33 Les menaffes du Ntl endurerpouffer • ‘
- »? Dufjlrerefonant la trompette Romaine. * 1
- Lituus) elt vne façon de trompette rude ainfî appeîlée à çaulê du fon,, comme l’enlêigne ce vers d’Homere: Infonuit neruus. Ennius: le (Lituus) épandenla guerredes fons vehemens . Or puis que Iepropos c’ell dreE fé du( Lituus) il ne faut pas oublier ceque nous auons decouuert pou-uoir ellre mis en doubte. Si le ( Lituus ) augurai elldiét à caufe de la trompette, ou bien Ci la trompette ell dicleC Lituus)àe celuy des augnres, car l’vn & l’autre font en leur forme & telle egalement courbes .Sianfsu (comme aucuns penlènt)Ia trompeté l’appelle (Lituus) a caulèdufonlèlon : ce vers d’H omere , il ell necelfaire que le bâton Augurai foit apeilé (Lituus) fuiuantlafemblance du cornet.Orvfe Virgile de ce vocable pour le cornet
- G§-j-
- o
- p.175R - vue 361/480
-
-
-
- fi
- if
- if
- 1)
- a
- a
- a
- a
- a
- a
- a
- a
- a
- »
- fi
- ROBERT VALTVRIN
- au fixiefme des Eneïdes,Lâ ou il dit:
- Et Lituopugnas injignis oblbat & ha fa.
- Quafi que (Lituus)prenne l'on nom d’autât qu’il eft témoing de(I;V»)noyfè}
- Clafica (comme dit Seruius,font trompettes courbables,oubien cornes moindres faides pour affembler, lefqueües font ainfi di&es félon Pétrone de ( c^mjappeller. La trompette eft d’arein, & dit on que les Tyr-rheinsenontpremieremét vie,&que Pifee fut le premier d’entre eux, dont elle à efté par eux appelléeTyrrhene.Car corne les larrons &gens de pied Tyrrheins épanduz le long des contrées maritimes ne fuflent pas aifément affemblezàtouteoccafion de proye parcriz, &cornetz,eftant quelque fois lèvent contraire,& empefchant,ilzinuetiterent la trompette,comme qui eftoit plus grande que le cor.De la en apres on fen eft aydéala guerre pour fonner ( Boute Telle) à fin que la ouda crie ne pouuoit eftre ouië pour le tumulte,lefon de la trompette y peruint. Or mettoient différence les anciens entre ( Tuba &) Buccina) car combien que ( Buccina) fuft fèm-blablea(Tuba) elle eft toutesfois plus longue,&lignifiant la diligenceàla guerre.Properce:
- La Buccine ajjembloit les Omrlnspour la guerre. Virgile.
- La ou le feingdonna la cruelle buccine.
- Au regard de (T»^),ellefignifioitlaguerre,cômcdit Virgile fuyuant comme ie croy,Ennius:
- La tube fonna loingd’vn cuyurerefonant Terrible fon,&fùyt apres v«grand vacarme D'ont retentit le ciel.
- Il eft vray que le fon eft diuers.Car quelque fois la trompette fonne pour mener la guerre,quelque fois pour pourfuyure la fuyte de lennemy, quelque fois aufsi pour la retraitte.Or fapelle le lieu rctraitte,auquel 1 armée fs retire,& pourtât les enfèignes font aufsi appellées retraites. Au regard des tintemens des Cymbales, & battemens de Tabourins, on les a creu eftre côtenuz es facrifices fai&z à Iuppiter le Candoys,& a ce myftere de fà mere qu’Ouide a expofe es faftes quand il a dit :
- Laroidde Idepleça de tintemens tant fonne,
- Qjfen feureté l’enfant crie defa bouchette:
- De boucler s de perches on bat les pailles creu fs
- De cecy ont la charge Cotybans & Curetes Le cas fut incogneu}& Limitation Refie du faift ancienJtarein doncq les compagnes De la D éejfe bâtent, & les rauques rondelles,
- Cymbales pourftladeSj&pourefuz tabours:
- La fleufie tons Phrygins fonne comme iadis.
- Côbien qu’aucüsreiettétceftc opinion cômefcin&e parles poètes, & la veulét interpréter fubtilemet,ces chofès toutesfois ayas diuers offices entre diuers peuples, aurôt à eftre déterminées tant par mer que par terre félon les
- oportuns
- p.175V - vue 362/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 176 oportuns auiz des Chefz. Au regard du nombre qui doit eftre aux fàcrifî-ces,quand&comment,&enqueI lieu elles doiuent faire leur dcuoir les Chefz le feront entendre aux lubiectz, à fin qu’en baillant la lignification des chofes,iIz y obeiflènt les oyans.
- Fin du dixiefine liurc.
- L'VNZIESME LIVRE DE
- ROBERT VALTVRIN DE l’art militaire.
- De la guerre marine du temps que premièrement les Romains ïexercèrent,
- & du premier qui a efîé digne du triumpbe marin. Chapitre. I.
- Efte tant noble richeffe de l’art militaire de l’Empire Romain fSigifmondPanduIphe) a efté augmentée non feulement des triumphesterreftres, maisauffi des maritimes par l’adiunâion de l’Empire de la merrla gloire du quel noz anciens ont témoigné en portant faueur fingulicre aux mérités des vainqueurs.il eft de vray memoyre des dépouillés fai êtes fur Ancie l’an de l’édification de Rome quatre centz fèize, lefquelles C. Meuius qui auoit fubiugué les Prifques Latins attacha au poulpitre de la place apres les Anciaces vaincuz,& leur armée de mer prin-fè:fitoutesfoisle nombre de fixgaleresfè doit appeller armée: côbien que cenombrefuftàce commencement la vn mérité de grande gloirerde forte que les proues furent attachées à la place Tribunale, comme fi vn peuple fêmbloit eftre couronné,& pourtantle lieu a prinslenom de la place aux proues. Et comme depuys le renom de la ville euft commence eftre en eftime à caufé des merueilleux tiltres de leurs euures, ny n’euflent lors les Romains mené la guerre hors l’Italie,& que le peuple Romain fuft totallement ignorant a remuer la rame, & du faiét de la marine, il a tou-tesfoiz montré que la vertu ne vifè point,fil faultcombatre acheual,ou en nauire, fur terre,ou fur mer, tellement que foubz le Conful Appius Claudius il combatit premièrement contre les Carthaginoyz,l’an de l’édification de PvOme quatre centz foixante dixhuit,&fit voile qui eft choie incroyable, le foixatiefmeiour apres le marrein abbatu pour fon armée:
- & fi a menant la guerre à Hieron de Sarragouze fait vnze vingtz vaifleaux en quarante cinq iours comme le recite. L. Pifo,aueclefqüelzilentradans ex rlord le goulphe mal renommé pour les fabuleux monftres, &fà furieufe tor- rup mente.Ny ne fefpouuanta de forte qu’il n’eftima a bon prefàge la violence mefme delatorméte.Etafbudainfâns retardement vaincu le Roy Hieron metisfuæ
- Gg.ij.
- p.176R - vue 363/480
-
-
-
- ROBERT VAL TVRIN
- Lego vel leuibus pro nee.
- d’vne diligence fi grande,qu’il a fouuentesfois confelfé auoirefté vaincu auant qu’auoir veu rennemy.Comme Annibal Je plus viel, ou bien Amil-carChef des Carthaginoizpillaft toute la code maritime de l’Italie auec vne armée de mer de foixante deux vailfeaux durantle Côfulac desCneius Dueîlius, &Cneius Cornellius Alinaje peuple Romain abien olélecom-batrelurmer, auquel aufsil’appred foudain d’vne armée de mer fut bon prelage de vidoire.-attendu qu’au bout de loixante iours apres le marrein abbatu,l’armée de cent loixante,ou bien de cent trente vailfeaux, comme il lêmble à d’autres fut a l’anchre. Car comme dueîlius vit leur puilfance grandefurmer,ilfabrica vne armée beaucoup plus forte que belle, & fut le premier qui ordonna les mains de fer,d’ont les ennemyz fe moquoient, pour en combatant inuellir leurs nauires.Et comme il fuft auerty que l’autre Conful Cornélius Afinaauoit conquis la Lypare auec lèize vailfeaux, &queia appelle parle chef des ennemys pour parlementer de la paix,il auoitellé prins par vne fraude, & malice Punique, & depuis mis a mort edant prilonnier,il a incontinent fait voyle contreluy auectrente nauires, & a eu la vidoire de la bataille.il y a eu de vray trente & vn vailfeaux priz, treize miz à fond,trois mille hommes tuez,&lèpt mille homes priz com-me Ion dit. Finalement Annibal, ou bien Amilcar, comme nous auons dit,Chef de l’armée Punique, apres la perte du vailfeau, auquel il edoit porté,s’enfuyt a Carthage Ce dérobant dans vn fquif, & demada aù Sénat, comme qui edoit fort cauteleux.(d’autant qu’vn Chef fuyuant leur coutume edoit punyapres vne defaide)que c’ell qu’il ordonnoient de faire.
- Et comme tous luy dilfent qu’il combatid de forçe,ie l’ay fait, dit-il, & ay cdé veincu,par ce moyen il fuyt la peine d’edre mis en croix. Au regard de .Cneius Dueîlius,lequel par vnfurnomilz appellerent Bellius: veu que fes ancedres auoient toujours edé appeliez Duellies, par ce que feulil auoit r’apporté ce premier triumphe de mer fur les Carthaginoy z:il ordôna non content du triumphe d’vn iour,que durant là vie, àchalcun retour de lôn repas,il marchad vn nombre de cierges deuant luy auec fludes,qualî que veu la grande vidoire, il triumphad tous les iours.Et combien que cela fud contre la coutume de la ville, & les exemples particuliers des ancedres, les Romains toutesfois l’endurerent voluntairement . De vray onques vidoire ne leur fut tant aggreable, attendu que comme in-uincibles, ilz edoient fort puilfantz par mer, & par terre, & comme de toutes ces choies la gloire loit la plus amiellant, comme qui le moins du monde eguilonné remeue,& trauaille les excellens cœurs des hommes, les plus nobles de la ville ayans acquis le nom d’vne gloire delîrée mirenttou-te leur fantalie à faire nauires.
- p.176V - vue 364/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 177
- O^VEL BOYS EST LE ELVS CONVENANT
- a nautres. Chap' 2.
- Eux doriques qui veulent mettre leur fantafie à faire nauires, ont d’entrée a confiderer le chois du boys.Nous vuyderons donques premièrement quel marrein ont les anciens eu en eftime, & par apres le temps de l’abbatre. LeRobre eft materiel & ferme ,auec vne durté fi grande qu’on ne le peut percer aifément a la tariere finon mouillé,ne pareillemét en retirer vn clou qu’on y aura fiché. Les aucüs des noftres tiennent pour le robre,à quoy auffi conféntent les Gauloyz, il dure plante en l’eau combien que l’eau marine le corrompt » Le marrein oinét d’huile de Cedren eft fubieét aux artifons ne pourriture, le geneure eft de mefine côdition,lequel vient en Efpagne grand Ôc gros,& bon à mettre en oeuure.Le fou n’eft pas mauluais en l’eau,ne l’aune es marecages.Elle eft de vray incorruptible & refiftant au fais. LaLarice ne nage pointfûr l’eau a caufé de (on pois,côbien qu’elle eft en eftime pour autres choies dedâs leau ny ne fait point de flambe,ny n eft fubieéte à pourriture,ne vermine,à caufé de la vehemente amertume de fa féue, combien qu’es vaiffeaux de mer elle eft fubie&e a vers,aulfi Ion t tous marreins hors l’oleaftre & l’oliue. Les aucuns de vray font fubieétz a corruptions fur terre, les autres en mer. On ditque le Sapin bourjonantécorcéà Iamefmelune qu’ileftabbatu,ne le corrompt point en l’eau .Oultreplus quant aux arbres,il eft tout notoyre qu’il fault auoir égard a l’afliete,& à la région du ciel,car les côtrées fépten-trionaleslont plus fortes, mais generallement les arbres es contrées ma-recageufés & vmbrageufes font les pires, & ceux qui viennent en plaine font plus materielz & dedurée.llyaaulfi diuerfité félon les pays. Ceux des alpes mefmes de l’Apennin font les plus eftimez,ceux de la Gaule, Corfé,Bithynie,Negrepont,&de Macedoynefont moindres, &: ccui de Pernalc,les pires .-par ce qu’ilzfont brancheuz,tortuz, & que facilement ilz pourrilfent. La fuyte d’Alexandre le grand a témoigné qu’on atrouuédesarbresenTyleifledelamerrouge ,d’ont on faifoitdes nauires de la durée de deux centz ans, & qui font incorruptibles mifes a fond. Le lapin prend bien colle,& eft par fos tous autres en eftime pour les malz, & verges,a caulé de là Iegereté,ioint qu’il eft le plus hault, & le plus droiâ: entre tous les arbres. On dit qu’à faute de lapins, les Roys d’Egypte & dè Syrie lé font ayde de cedres pour faire nauires. Sefofis Roy d’Egypte fit viï nauire de cedre de deux centz quatre vingt coudées de long,duquel le dehors eftoit tout doré,& le dedans argenté, lequel il offrit en don au Dieu qu’on reuéroit àThebes.On fait aufsi eftime en Egypte & Syrie tant féule -mentd’vneefpinenoyre d’autant qu’elle dure en l’eauàiamais, & à cefte caufé bien vtile à faire les flanz d’vn nauire.La poix liquide eft bien vtile à greffer les nauires.
- G g. iij.
- p.177R - vue 365/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- QJT1L F^il^LT AVOIK. EGARJ) AV TF MPI
- de U coupe & de la Lune. Cha. 3.
- aE temps de la coupe eft de confèquence pour la durée d’vn mar-rein .On penfè communément qu’il fufïit le donner garde de n’abbatre boys pour charpenterie auant auoir porté fon fruiéh Le robre coupé en la vere eft fubieét à vermine ,’ mais en hyuer il ne fè iarfè ne cambre, autrement il fera fubieéfc à le ietter Sc creuaflèr. Ce qu’auient au cedrequoy qu’il (oit coupé defâifon. Iln’eftpas croiable de quant grande confèquence eft l’egard a la Lune, &aux eftoilles.il en eft qui eftiment que toutes choies qu’on coupe, qu’on cueille, & qu’on tond fè font plus fèurement au decroiflèment de la Lune, qu’enfà croiflance.il en eft qui dient,que la coupe des arbres fè doit faire depuis le dixiefme de la Lune iulcpes au vingtdeuxiefme pour les garder de pourriture, & que le marrein foit de longue durée,prenans leur argument a vne faindleté, d’autant qu’on a voulu celebrerl éternité en ces iours la feulement. Les autres font d’auis que la coupe ne fè doit faire que depuysle vingtiefme iufques autrentiefme de la lune, car les boys qui font abbatuzlaLune croiflant encores,fbnt comme ilz difènt quafî amolliz par vne humeur receue & inutiles à mettre en euure: ôc pourtant quelques vnsneles laiflènt pas fans raifbn couper tout au tour,iufques à la moelle,à fin qu’eftans fur piedz toute l’humeurfè coule.Or eft il receu entre tous lesarchiteéteurs quela meilleure coupe des boys eft a la coniun&ion de la Lune,que les aucuns appellent le iour du default d’elle, les autres de fon repos. Tibere Cefâr de vray fitainfi couper les larices,pour refaire le pont Naumachiere qui auoit efté bruflé. Cato homme excellant en toute expérience a aioufté ce propos id pr% parlant du marrein.Tu ne fouilleras iamais aucun marrein au déclin delà » lune,arrache le apres mydi,&horsle vent auftrain. Alors fèra-il de fâifon 3) quand fon frui&fera mcur.Garde toy de le charpenter durât la rofée .Puys «foudain apres il dit:Netouchepoint au marrein depuis la lune nouuellc f Ex pii j; iufques au premier quartier, & lors qu’elle fera demie, & lors tu ne l’arra-ni°Ji. ,, cheras de terre, ny nel’abbateras. Onle peut tresbien couperàpoin&es Integra.»*- quatre iours prochains la pleine Lune. Garde toy fur tout de 33 tailler le marrein noir, ne de le couper ne toucher finon fèc, ne 33 aufligelé,ne chargé de rofée. Et combien que ces or-
- donnances de Cato nefemblent pas auoir efté gardées par ces Capitaines d’ont nous auons fait mentionùlzont toutesfoizfaitla coupe en temps neceflaire ou bien en faifôn.
- p.177V - vue 366/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. i78
- DES CLQVZ D'ONT IL FAVLT ^SSEMBLE^ le bafli ment d'sn nauire, & quet% il% doiuent efire. Capitre. IllI.
- Ly aaufïi bien a aduifêr fi les clouz d’ont il fault affembler le baftimencd’vn nauire deuront efire de fer, ou de cuyure à la cou ftume de noz anceftres. Or iepenfè que mon auis en ceux de cuyure n’eft pas hors de raifon. La vertu du cuyure de vray cft plus forte,laquelle les médecins appellent reftreinétiue.Parquoy ilz aiou-ftentfesecaillesauxremedesqu’onprend contre le mal de putréfaction.
- La lame aufii de cuyure boit,& deffeiche vne fluxion de mauuaifê hu- fdaxipo-meur.Le cuyure a oultreplus vne vertu remediable , & deffechante qu’il Taille en vne playe,Et pourtant Ariftote dit que les playes qui fê font d’vne na quàm pointe de cuyure font moins offenfiues que les faiCtes de fer,& quelles A“ra< font de plus aifee guarifon. Par fèmblable raifbn aufsi le cuyure fiché au boys garde (à propre fubftance répugnant à l’humeur lunaire & aquatique veuqueîeferfoudain mangé & confirmé de rouille eft fubieCt àcefthu-meur, & au temps.
- DV PREM1ERVSAGE DES NAVIRES, ET de leur forme receué entre les anciens, leurs noms, & du premier qui à parta tfoméles moyens de les conduyre. Chapitre. V
- AnausfutlepremierquinauigaànefdehEgipte à la Grèce, au parauant on nauiguoità flottes, qui furent inuentées à la mer rouge entre les ifles par le Roy Erithre,car a lors Le pin n’auoit encor dédaigné fvnde perfe,
- Ne les Voïlles tendues aux Violents \>ens liuré.
- Le Pilote nauoitpour v» loyer forein Vagant hajle fa nefes pais incogneu%
- En ce fchantfonprofit.
- Combien qu’il en Toit qui fontd’auis quelesMifiens& Troycns ont premièrement inuenté les flottes en l’Hellefpontc, quad ilz trauerfbient la mer contre les Thraces. Les flottes T’appellent tronches liées enfêmble qu’on mene par eau,par lequel vocable de(R4f«) font quelquesfois (comme dit Varro) fignifiez les longs nauires.
- Nous appelions les nauires codiqueres d’autant qu’anciennement vn afïêmblement de plufieurs aiz fappelloit codex, & que Claudius Codex fut le premier qui perfuada aux Romains defe iettef fur mer duquel eft venu le nom,& vint en couftume d’autant qu’ilz eftoientforles riuiercs de grand commodité.
- Schedia3a.u(si eft vne efpece de bateau fans façon fai&e de tronches liées tant feulement enfêmble,d’ont il eft auenu que les mauluaifes poëfies ont efté appelléez Schedies.La neftrabique a eftéainfi appellée d’autant qu’el-lc eft faiCte de tronches conioinCtes enfemble.
- V
- Gg.iiij.
- p.178R - vue 367/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- S«0î/4,eftvne maniéré de bateau comme dit Cecilius. (Sclata) eft vne maniéré de bateau beaucoup plus large que profond,& a efté ainfi appelle par la mefmecouftume qu’on difbit(/c/o«tf)pour (locus) de {Jllis)pour (lu)
- Mufcule,eft vne petite & courbe façon de bateau.
- Squifs, comme tefmoigne l’Aphricain font petites naffelles quifuyuët 3} les grands nauires. Cicero. au premier Liure à Herennius.*llz abandon-3, nerent tous la nauire pour la grandeur de la tormente, & fe ietterent de-„ dans le fquif.
- Naues Afluariœ, font vaiffeaux legiers qui nagent à rames & voyles,& font ainfi appelles d’autant qu’on les peut hafter.
- Celox,cft vn petit vaiffeau ainfi diét (aceleritate) pour fa vifteffe, lequel a efléinuenté par les Rh.odiens.Titc Liuc au deuxiefme liure de la lecondc s>guerrePunique:Ilemmene deuxeentz nauires vingt quinqueremes, & « autant de celoces.
- Myoparo3tft vn petit vaiffeau de Pyratcs,fai6t de cuir, & d’ofiers, quafi ji le moindre paro. M. T. Cicero: Car, comme on l’interrogaft de quelle 3 y mefehanceté émeu il ecumoit la mer auec vn myoparon : de la mefine (dit j>ilj que toy, le rond de la terre.
- » Fafceüus 3dhvn vaiffeau Capouan. Saluftef Auintquc par fortune vne 33 cohorte portée dedans vn grand fazelf egara des autres,& fut inueftie eftat jj la mer calme par deux myoparons de pyrates.
- LsgS cer- Cercurus,eft vne grande nef d’Afie & que les Cypricns ont(commelon
- eurus pro dit inuenté.
- ccreinus.
- de Italia.
- 39
- 33
- Trieres3\cs galeres que les Gréez appellent (dromones) font grandz vaif Delc innu ^cauxl°ngz- Efâie au trentetroifiefme chapitre. Ny n’eft aucune gran-meri vigin de triere qui l’ecume. Et en l’vnziefme de Daniel: Etvenientfuper eum trieres nquatuor ^ Fpmani. Iafonaefté le premier qui anauiguéauec la galere,comme trieribus dit Philoftephanus.Comme de vray il euft à aller enColchos,eIle fut faiétc par Argos, & fut Argos denômée de l’ouurier au goulphe Pegafée.Lucain. Le Pin la mer fendant du Pegafé riuagz
- premierexpofél’homme terrein aux vagues..
- Il en eft qui dient que Sefofis Roy d’Egipte a premièrement vfe de galere,comme dit Diodore le Sicilien,ainfi diète(comme î ay ia dit, & côme quelques autheurs, l’afferment) d’Argos qui la fabrica,&quien nauigant auoit prins la charge de la r’habiller, ou bien (comme autres dient ) à caufê de fa vifteffe,quê les anciens appelloient Argon.
- Pijlris trireme,eft vnefaçondenauireàlaformedepiftrinspoifTonsma rins qui font d’vn corps long &eftroit: Lafaçon de vray a efté prinfè de I’areftedecepoiftoneftantpourryau riuage, défaire des vaiffeaux longz àla femblance, & fut ainfibaftiecefte façon de nauire. lien eftauffiqui veulent que l’ordre de marcher en bataille foit tiré des poifibns,& d’eux auflile moyen que les hommes auec les cheuaux doiuent tenirpourfar-mer&couurir de fer,fuyuant la confédération de leur écalles. Les Libur-
- niques
- p.178V - vue 368/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XI. iy9
- niques lelquelles aulfi on appelle éperonnées font ainfi <di<5tes à caulê de la contrée de Liburnie,6c ont ellé vfurpéesauecle nom & leur lemblan-ce par les Romains: d’autatque quand Augufte combatif contre Antoine qui perdit la bataille par le moyen du lêcours des Liburnins,en vn fi gand dangier ôc péril de combattes nauires desLiburnins le trouuerent lesplus adroidt. Horace en l’Epode.
- 35 Ibis Liburnis inter alto, nauittm '
- 33
- 33
- 35
- 33
- JJ
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- J>
- ^Amïceprogugnacula.
- Legia, eftvnvaiffeaulegier ainfi didfc, d’autant que de la vehemence de fon cours il chaffe 6c affemble les eaux deuant foy.
- Corbite,eft vne façon de vaiffeau pelant 6c grand, ainfi didt, d’autant qu’au plus hault du mas,on auoit de coutume de pêdre des corbeilles pour enlèignes,ny n’eftde rien differente d’vn nauire marchand,lequel eft le plus pelant de tous vaiffeaux, 6c fort propre à porter fais ,inuenté par HipedeTyrus.
- Orie (comme dit Fabius Placias Fulgence) eftvn fort petit bateau , 6c fort propre aux pefeheurs.
- ChwAz,Scfcalmefontinuentées parles Phéniciens, qui fontaulïi vaifi-féaux de pefeheurs.Cicero au troifiefme des offices:Alors Canin que veult dire cecy?Pythin as tu fi belle pefche? as tu tant de Cimbes? Et lamelme: Leiour enfuyuant Canin inuite lès amis, 6c arriue d’heure. Il ne voit pas vn feul (fcalme) coquet.
- Nous appelions Lintres ouMonoxilesdes vaiffeaux* vn peu plus gras que les fquifz qui font bateaux d’eau douîce, faidtz d’vne tronche de bois cauée.TiteLiueau premier de la fécondé guerre punique : Parce moyen vn grad nombre de bateaux fut affemblé, aulfi fut de lintres par inauerté-ce appreftez pour la traffique de marchadilê.D’ont les Gauloys coramen. çans les premiers en cauoiët des nouueaux chacun d’vn lèul arbre.Virgile, au premier des Georgiques.
- Il caue les bateaux en arbres.
- Lesecumeurs d’Aîemagne nauigent auec leLintre, d’vne lèule piece d’arbre cauée qui porte trente hommes,ny n’eft cela cholè incroyable,veu queleurs arbres font beaucoup plus grans que Iesnoftres, 6c qu’au païs des Indes les cannes y font d’vne fi merueilleulè hauteur que chacun en-treneud porte quelque fois trois hommes fur l’eau nauigable,ayans plus de cinq coudées de long.
- ImW,eft vne façon de vaiffeau court ôc legerrlequel on dit auoir efté inuenté parles Cyrenenlès.Virgile.
- Oudm qui aduerfo vix flumine Lembum. liteLiueau quatriefinedelàguerreMacedonique: Ny n’auroient aucun nauire,finon deux lembes tant feulement à leize rames.
- Le Bucentaure eft vne maniéré de nauire faidt tant feulement pour porter les grandz 6c puiffans feigneurs. Varro ditauxliuresde l’agriculture
- p.179R - vue 369/480
-
-
-
- ROBERT VAL TVRIN
- que par coutume il feft fait en Italie quà caufe de la grandeur desbeufs quiyelloient,en proférant celle voix (bu) elle fignifioit quelque grande chofe,& quedelàcedit(£«/*wi4)c’elladire vne grande famine, &c (bupeda) grands enfans,&(/n* bumania) courroux extreme, & autres lèmblables qui touchent la rail'on de gradeur,cequ’auiourd’huy gardent les femmes trâf-padanes,lefquelles profèrent celle maniéré de voix pour lignifier quelque grande chofe,& admirable. Bucentauredonquesellainlidiâ:,parce que les Princes, & grandsleigneurj ont de coutume d’y ellreportez, quali vn grand Centaure,dict par la lignification de celle ancienne voix. Le Centaure devray elloit vn vailfeauou enfeigne alîileau nauire. Ce que Virgile a donné entendre fort egalement en ce verlèt,
- Centauro ïnuehitur magna:\\ eft porté dedans vn grand Centaure. Mais deprifant celle voix debile, en vne n grande œuure, il a làgement plus toit voulu vferd’vne parolle plus digne, & mieux conuenantà lamaiellé delà poëfie. Au regard de ceux quipenlènt qu’il falledirc(j5ace»f4#ri#>»)&non pas(i?«ce»f4»raf)acauledecent bouches,en corrüpant & ollant quelques lettres, pour la grande fuyte qui eft toulîours neceflaire au lèruice des grâds ilzlbnt trompez d’vne vaine & lotte interprétation de vocable.
- Triremis, ell vne galere à trois rancz de rames. Horace.
- Maufeat \tlocupks qitem duclt prima tnremïs. 1 Nouslifons que les Argonautes les ont premièrement ordonné d’autant quelles font propres a la guerre,& a la marchadilè,de forte que la ou nous les delyrons voir comme ellranges, nous les enuoyons au iourd’huy pour vn épouuantement & beauté aux autres prouinces.
- Les quadriremes aulfilontainlîdidtesàcaulèdunombredes rancz.Le-quelnom fe treuue bien fouuent augmenté par la magnificence de ceux quif en aydoient.
- On ditqueNefichtonSalamininatrouuélaQuinquereme, &Xena-gorasle vaifieaua lix rancz, depuis lequel iulque à la decireme. Mnefige-Vefico xc ton aellé l’inuenteur. Alexandrele grand iufque à douze rancz. Ptolemée "r^Zena ^oter^ quinze. Perlée,& PaulEmileà lèize,&Demetrie fils d’Antigone zetas.C 2 iniques a trente : Ptolomée Philadelphe iulques a quarante: & Ptolemée MasCge- Philopater,qui futfurnôméTriphon iulques à cinquante : Luce Heraclée fi®otonNe a(commeonaditj vféde nauiresa challeaux venant del’Aphrique. Ce & vailfeau aulfi ell bien admirable,lequel par le madement du Prince Caius apporta de l’Egypte vn obelifque alsis dedans lesarenes vaticanes auecles quatre quartiers de la mefme pierre pour le porter, nyn’en fut onques certainement veu de plus admirable en la mer.Sonlettage de vray elloit de huiëlcentz vingt trois muis quatrelèxtiers de lentilles. Salongueurcon-tenoit 1 elpace du port d’hollie,à collé gauche,la ou depuis elle fut mile au fond par le Prince Claude auec troys plattes forme de la terre de la Pouil-le édifiées delfus & amenées a la halle :1a grolfeurde Ion mas contenoit les bradées de quatre hommes. Caius Celàraulsi donna vne autre forme
- Lego ex Plinio Ne fîchtô pro
- p.179V - vue 370/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 180
- nie aies Iieutenans au voyage delà Gaule & beaucoup plus ailee à fréter & plus baffe, qu’on a de coullume es autres mers, d’autant que pour les frequens changemens des fluz & refluz il auilâ que les vagues y efloiét trop grandes pour porter faiz &c multitude de cheuaux. Outre plus les nefz desGauloyz efloient faites & equippéesde celle forte, les Carénés elloient vn peu plus plattes quecellesde noz nauires, à celle fin quelles peuflent mieux le conlèruer fur la greue, & mieux receuoir le flot de la mer, leurs prores & poppes fort haut éleuées, & accommodées ala grandeur des vagues, & delatormente. Leurs nauires aufïl elloient fai&z de Robre, pour refiller a tout effort & outrage. Lesbancz ,de membreures elpelfes d’vn pied, clouez à clouz de fer de Iagrolfeur dvn pouce . Les autres elloient attachées à chaines de fer pour chables, les voyles de peaux fort tenures, tant pour la faute de lin, que pour l’ignorance de l’vfage, ou bien comme il ell plus vray fèmblable, d’autant qu’ilz efli-moient quvnefi grande tormente de la mer Occeane.nevne fi grande violence de vens ne fè pouuoient fouflenir,ne vn fi grand fais de nauire gouuernerpar voyles. Contre lefquelles la legereté àc le remuement des rames des vailfeaux Lyburni-ques fontplusauantageuxdefquels toutesfois ilz ne peuuent offenlèr auec leur elperon a caufè de leur fermeté , ny ne peut à elle fattacher le traiél a caufè de leurhau-telle.
- 1
- p.180R - vue 371/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- La forme de deux Quincjueremes ioindtes enfèmble, en oftantles rames d’au dedans afin que les coftez fafiemblentaueçlefquelles elles nagent comme nauires par le moyen des ranczdes rames gettezen dehors: on y porte des tours a eftages,& autres engins de baterie de ville. VoyCi comme îlz font cefl: alfemblement pour la guerre.
- W T
- /y
- p.180V - vue 372/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XL 1S1
- Oreft (ciafi s) vne multitude denauiresauec laquelle Tiphis apremie-rement côbatu,quoy qu’ilz en foient qui penfent que les Phenices (gens de grâd efprit,& excelles à nauiguerfur mer tant en paix qu’en guerre) ayent inucté de côbatre fur merauec armée. Il eft vray qu’ilzont premiers eu la côbderatiô des eftoilles pour nauiguer, & Eole filz de Helenis trouué la rai Ion des vens,Cope la rame,& Platée là pele,Icare les voiles, Dedaie le mas,
- & les verges,Pilée l’efperonjes Tyrrheins l'ancre, laquelle Eupalame a fait à deux Harpons, Anacharfis des membruresauec des crocz fichez qu'il appellent Harpagons,Pendes d’Athenes la main de fer,Typhis l’equipage dugouuernalpour tourner ça'&laie cours du nauire, 8c fi nous croyons à An née Seneque,l’exemple a efté tiré des poiflons, qui le côduilènt auec la queue tournans leurs vitefled’vn cofté&d’autre par vnleger mouuement £egô ieui d’elle:&fi a Pline,c’a elle des oyfeaux, 8c mefmement delà Buze quifem- «us pro bleauoir montré &enfèigné c’eft art de gouuerner par le contournement cor“m* de ia queue,la nature montrant au ciel, ce qui feroit neceflaire faire dedans la mer.
- LE N O MB BJZ DES VE N S, LEVRJ noms ,raifons, '^ejfeêh^. Chapitre. VI.
- Ommeil foie certain que la cognoifiance non feulement de la mer&delaterrefoitdegrâd fècoursaux gés de guerre & a leurs Capitaines, 8c d’auâtage aufli celle des vens qui pourroiét épou> uanrerlesignorans : d’autant que fans leur cognoifiance 8c expérience la nauigation n’eft point commodefur mer.Combien aufli que pour celle heure il mejfache d’en elcrire,comme quitreuueles plus excel-lensefcriueinsdes choies naturelles es deux langues, auoir eferit, les vns luffilàmmentjles autres moins,delà variété & diuerfité de leurs noms,ie pourluyuray,&côprendraytoutesfoizà part félon mon pouuoir leur nom hre,noms,lieux,natures,&effe<ftz en vne fi grande variété 8c diflonance de doéteurs. Les aucuns donques des fàges eftimans le venteftrevn air émeu 8c coulant(car le vent le forme,côme dit Lucrèce, la ou Pair eft émeu par vne agitation)dient tous les vens n’eftrequ’vn fans eftre different pour les lieux de quelque part qu’il loit courant toufiours d’vne mefine forte.
- Mais pour autant qu’entre tous,deux fouflent du Septentrion, &du midy, comme de deux coingz,il en eft qui ne confeflent que deux vens feulemét, defquelzl’vn eft la bile,l’autre l’Auftral,& que les autres partet de ceuxcy, dilans les aucuns,que Zephire tient de la Bize,& Eurus de l’Auftral.Oriba-ze met le mefme nombre en Orient,& Occident. Les autres ont fait eftat de quatre ves félon les quatre parties du monde .Devray l’Orient enuoye l’Eure & Apeliotes, le Septentrion la Bife,l’Occident Zephire, & le mydi pouffe celuy de I’Auftre,ny n’en nomme Homere d’auantage.Maisceux qui les ont recerché de plus près,les ont mis iufques au nombre de huyt,
- Hh.i.
- p.181R - vue 373/480
-
-
-
- ROBERT VAL TVRIN
- «
- 99
- 99
- 99
- ))
- 99
- 99
- 99
- 99
- 99
- 99
- mefmément Andronique Cirelle,lequel bâftit à Athènes vne tour de mar~ bre a hui&pans,enchacun defquelz il afïît l’image de chacun vent grauée contre (on contraire.Sur laquelle tour il afïic vneéguille de marbre, & au delTusvn Triton de cuyure auançantla main dextre auec vne verge laquelle il auoit formée de forte,quelle tournoie àtous vens,farrelUttou£. iours contre le vent,& tenant au deffus la verge pour l’indice du vent qui tiroir,Somme qu’encre le folerre & le mydy Eurus a efté alfis à TOrient hy-ucrnal,lequellesnoftres ont appellevulturne, & ainli l'appelle Tite Liue en celle bataille malheureulê des Romains en laquelle Annibal mit nollrc armée contre le Soleil, & le vent d’Orient, lors qu’il vainquit à l’ayde du vent&desraidzdufoleildonnans alaveuë desennemyz. Varroauffi vfe de ce nom. Aphricus ell entre celuy de midy, & d’Occident hyuernal qu’ilz appellent Zephire,&(Caum) la Gallerne ell entre l’Occident & le Septentrion,ainli lappellant la plus part d’eux,mais entre le vent d’Orient, & le Septentrion ell Aquilo.Parce moyen il lèmble ellre manifelleque le nombre comprend les noms & les parties dont partent les vens.Orpeutle pourtraiél de la tour cy delfoubz peinéte auec le Triton foufflat vne trom-pc,mettre toutes les choies à l’euil,fuyuant ce que dit Ouide.
- Le re fleur de la mertdelaiJftntfon trident Les vndes (y les eaux régit, &puys appelle Son Triton a%uré,& éleuéjurmer,
- Es épaules couuert depourpre naturelle Luj) mandant defonner d trompe refonante3 Et parfèing reuoquerlesvndes & riuieres.
- Lors la trompette il prend concauée ér cambrée,
- Quid’vnfîen bout eflroit, au largeprend ctoijjance:
- De vent donques remplie,en la my mer Pontique.
- %Au leuant & ponant elle fait retentir,
- Les riuages ap%.
- p.181V - vue 374/480
-
-
-
- Or gardent celle defcription,comme vraye,& plus queles autres excel-lente,tous les mariniers de la mer mediterranée, & mefmement les Gene-uois,en y entreiettant tout autant. Ilell vrayque félon Ariflote on en aioufle aucuns aux huid premiers,mefmemcnt quatre félon Varro, parce moyen il fen fait douze. Ariflote donques & Varro hommes diligensa entre tous ceux qui ont eferit les mieux appriz, les mettent par ordre, non fans raifon.Caile folcil ne fèleueny couche pas toufiours envn mek
- Hh. ij
- P? fc
- p.182R - vue 375/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- me lieu, & eft l’Oriet & l’Occident équinoxial autre.Or eft il deux équinoxiaux .Autre eft auflï celuydu Solftice d*Efté,& autre celuy de l’Hyuer, ou que ce foit que l’air a douzedifFerenccs, ou bien fuyuant douze poin&z denoftre région habitable , d’ontil tirent leur fource,ou félon les douze lignes, lelquelz auffi la triplicité des lignes émeut. De vrayles lignes chauldz font les Orientaux, les terreftres, les méridionaux, & les lignes acreux les Occidentaux. Au furplus les aquatiques drelfentlcs Septentrionaux . Voila donques les principaux vens.
- Il eft aufsi comme Tranquille l’appreuiieplulieurs noms &foufHes de vents partans de certains lieux,ou de vallées,ou de riuiercs,ou de tormen-te fur les montagnes,ou de quelque braz demerpar quelque caulê quielt auenuë pour forger le vocable, lelquelz ne courent pas partout, mais au plus près. Et pourtant Virgile dit que Cleopatra fuyant en Egipted’vne bataille nauale eft portée par leventde Iapigeacauédu cap de (Iapyge) faindeMarie, c’eft à dire venant du mont laind Ange.Ilaaufli appelle du vocable de Iapyge le Cheual de la pouille tout ainlî que le véc. il eft certain queceftleventdeCaure, earil vientd’Occident,&ainlila dicb Vir-
- gi!e
- p.182V - vue 376/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 185
- gile. Semblablement le vent de Iapixtormentc la Calabre, &l’Athabate, la Fouille,Chiron les Athènes,Tagreis la Phaphile, Circius la Gaule, que Cato es liures des (ourles nomme Cecius, auquel abbatautles édifices les habitans lors rendent grâces,comme luy eftans tenuz pour la làntéde l’air-Augulleaufii lediuinluy voua,& édifia vn temple pendant qu’il fai-Ibit fa demeure en la Gaule.le n’auroie iamais fait fi ie vouloyc pourfuyure chacun vent & Ion nom,veu qu’iln’eft pointderegion qui n’ait quelque vent peculier,y nayfiant,& le perdant près d’elle.Et comme ilz fôientplu-fieursvensauantiour,&pasvnd’euxde durée eftant abbatu,ainfi que le foleii prend force,ny ne fouffle outre vne certaine contrée,& face depaïs & qui commençant en la Vere,nepafie point l’efté: il eft toutesfois outre ceux cy par tout deux plus toft louffles que vens,qui font{^Auta & Altanus)
- Aura) eft vne frecheur fur terre, èc(Altanus) celle defur mer.Maisà cellefin que iereuienne de plus près à ce dont ileftjpropos. La Vere ouurela mer aux nauigueurs le foleii eftanten la vingt cinqiefme de l’A quaire au commencement deiaquelle les Fauonins qui font les vens génitaux du monde ainfi didz de (fauêre) fauorilêr, vel (fouêre) nourrir, amoîifient, le ciel.Les aucus l’appellét Arondelier au vingt deufiefinc de Feuburier pour les aron-déliés qu’on voitdes autres l’apellentcailletier, a caulè de la venue des cail- cxi iib. les,louffiant l’elpace de neufiours,desIeloixantc&vniefme iourapres 5»*
- l’hyuer encommencé. Celuy qu’on appelle fublolaire luy eft contraire,le- 47‘ -quel fe leue auec les pleyades en la vingt & cinquiefme partie de Taùrus,le neufielmeiour dumoysde May,lequel temps eft humide, luy eftant contraire le vent de Septentrion. Au regard delà Canicule,ellefèleue a la plus grad ardeur de I’Efté, a l’entrée du lbleil au premier degré du Lion au dix-huidieftne iour de Iuiller,la leuée duquel les Aquilons precedent quafi de huidiours &; deux ioursapres là leuée ilz pouffent d’vne plus grande force l’elpace de quarâteiours & les appelle Ion Annuelz.On eftime que la chaleur du loleil redoublée de celle de la Canicule eft abbefiee par eux. Apres lefquelz derechef les vens méridionaux foufflent fou uentiufques à la leuée de l’Eftoille d’Ardurus, laquelle le fait vnze iours auantl’equino-xe d’Autumne, ny ne fe leue prelque fans grelle & tempefte. Or commence Corus à le leuer auec celle eftoille tirant en Autumne, au quel Vuhurne eft contraire . Quarante quatre iours apres celle equinoxe les Virgiîies donnent entrée a l’Hyuer : lequel temps coutumièrement a -uientàl’vnziefmede Nouébre,&qui eft celuy de l’Aquilon hyuernal, fort different de celle autre eftiual,auquel ’Aphrique eft côtraire. Au demourat lèpt ions auant Sc autant apres lentrée de l’Hyuer la mer fappailè afin que les Halcyones puiffent nicher : lefquelz iours les nauigueurs de mer co* gnoiflent bié.Il eft vray qu’on ne voit gueres celle maniéré d’oylèaux ny ne mehét finon en hyuer àlaretraide des Vergilies,qui font iours appelez hal-cyonides,ellâtpareuxlamer calme,&nauigablemelmcmét la Siciliéne.Es
- H h iij.
- p.183R - vue 377/480
-
-
-
- »
- »
- JJ
- JJ
- J*
- JA
- ROBERT VALTVRIN
- i autres contrées de vray la mer eft plus calme.-mais lors la Sicilienne eft tra-dable.Elles font leurs nidz fept iours auant l’entrée de l’yuer,eclouâs leurs œufz en autant fubfequens:durant lefquelz la mer eft gratieuiè, & la nam. gation fort feurc aux matelotz.Lerefte du temps tient de l’yuenlatornien-te toutesfoiz de la mer n’empefche point la nauigation. Les écumeurs ont pour le péril de la mort forcé des nauigucursà i’auenturer àla_mort,& eprouuer la mer en y uerd’auarice auiourd’huy fait le femblable. Ces cours naturelz des vés font toutesfois à certain temps,&telz leurs effedz^Tous de vray ioufflent pour la plus part a leur tour,de forte que le vent cefte, fpn contraire fe leu e,& le drefleainfiqueion oppofite f’abbat. Ouide.
- Or comme ait chacun d’eux en dtuerfe contrée.
- Sesfouffles}malémis bores ony refîfîe:
- ne dirent tombant efldes freres grand Se difcord.dl'aurore gy régnés Nabathées L'Eure fefl retiré gy en Perfe, gy aux montf Soub% lesraid-g matutins afi^matsle ponent Et du foleil couchant les riuages humides Prochainsfont du Zephirc,gy aufiJês effors j
- Lafrifonante bife a fait en la Scytie,
- Et au Septentrion la contrée oppojite La méfrequente hume fie l'iduflerplmieux.
- Ou bien pour le faire court filz font aftemblez a faire vne mefîne tormente ce que ne le peut faire.
- La ruent tous enfemble Eure gy le Note aufi,
- Et l'africain frequent en tormente de mer: AufÏÏ a faid Aquilon qui n’a-uoit point de lieu en ce combat.
- Ceux qui fouflent de l’Orient font les plus chaudz, de plus longue durée,1 & plus feurs que ceux qui tirent de l’Occident. Ouide aux faites.
- Pren portfeur ô P îlot,a ce tourfubfequent3 Car le vent d'Occident fera méfié de grefle.
- Sivulturne commence à tirer de la partie du ciel,ilnctient pasiufqucsà la nuid.Toute façon de vent qu’on fent chaud,d urera longuement.Lcfo-leil leuant augmente les vens,& le couchant les abbat:au demourant tous font le plus fouuent aftoupiz à myiour ou my nuicbpar ce qu’ilz iôntrom-puz par vne trop grande froidure, ou par chaleur .Borreas ou l’Aquilon entre les Septentrionaux iaifoupit depluyes, lequel romptles autres vens, &fichafteiesnuës. Ouide parlant de luy.
- Pour chaffer triftes nues vne force ïay prompte, le tormente la mer,gy les chefnes noué% l'arrdche, i'enducy les neiges, gy degrefle le bas la terre, gy la ou ïay mes freres ioinfl%
- En l'^Atr ferain {de vray ce fl mon champ) laie luy te D’v» tel effort que lors fa moyenne contrée
- JJ
- JJ
- AJ
- A>
- JJ
- JJ
- AJ
- JJ
- -J»
- AA
- JJ
- AJ
- JJ
- JJ V
- JJ
- Comme
- p.183V - vue 378/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 184
- 35 Comme de no^rencontre s,& que des nues concernes
- Saillent les feu^ ïa üi%, & Jt t'entre aux creuaces 33 De ta terre,abbaijfant es cauernesprofondes
- 33 De furéé mes reins,de tremblement alors
- 33 £es efprlt^ie remue, Cf le rond de la terre.
- Les vagues le dreffenE plus grandes du vent de midy que du North, par cequeceftuycytiredu haut, &que ceft autre eft bas partant du profond de la mer. L’Aquilon eft plus véhément de iour, &celuydemidy la nuiét, lequel fappelle(A/of^) du verbe Grec vori(a d’autant qu’il eft nubileuxôc humide,comme le dit aufli Ouide:
- ,, D’allés trempées en eau le Note fait fon vol
- 3, Auec terrible vis3d’obfcurité couuert ,, Denuesla barbe poift3&des cheueux cbanu%
- ,3 C ouïe l'eau, & au front eft aftis le brouillard3
- „ La bruine luypend de l’eftomach, CT pennes.
- Il le fait aufîî des vensfoudains,quifontde plufieurs & diuerlês formes. De vray en vagant,ça & lâ,ôe ruans comme dardz ilz font des éclairs 3que les aucuns appellent Vulcan, les autres Vefta,autres qui les dient menaffes de tonnerres & éclairs. Et pourtant Papinian dit:
- 33 Tant de fols eft partj l’éclair du flot des vagues.
- U eft vray que les éclairs & corrufoations font plustoft yeuës que ne font les tonnerres ouyz : d’autant qu’on penlè que le ciel éclaire, plus toft qu’il ne tonne: ou bien filzfont fai <ftz enlêmblé comme les autres dient, alors ces feuz la le prelêntent foudainde leurvifteffeànoftre veuë. Le fon de vray ne vient point àl’ouië qu’apres vn batement d’air,& en eft le fènti-ment plus tardif.Herodote eftime l’éclair tout tel qu’a nous vn effort d’vn feu cômcnçant,& eftre la première flambe certaine,fefteignatoreSj& ores fallumât.C eft ce que noz anciés ont appdle(T#/ge/r#).Il eft vray que nous difons en plurier(f0»ifr#d)tônoires,& les a.ncïés(tomtrmm) ou bicn(tonus)lc trouue que Cecinna en a vfe homme de bonne grâce, fil euft efté renômé pour éloquent,&queCiceronnel’euftpointblafmé.Lcsancicns de vray pronôçoiét ce verbe la brief duquel nous vfonsprolôgâs la fyllabe,catnous àiCons(Fulgêre) ainfi que(^/e»dére).Oreftoit leur coutume de dire (folgere} eftantlaiccondeiÿllabe briefue, pourfignifier ce fubitdepartement d’e-elair de la nuë. Au regard de la flambe que la roupture delà nuë àialy, elle eft portée impetueufemétàten^ôc ale nom de fouldre,auec la vehemen-ce,fi elle eft d’vne forte inflammation,&: quelque partqu’elle tombe,elle r. épand vne odeur de fouffre comme dit Virgile:
- Lors amplementautourles lieux fument de fouffre. Lucain.
- 3* Lefernuyfontfomoitduceleftiel foufre.
- Mais fi cefte violence fort fans feu rouée plusàl’eftroiétjc’eftàdirefàns foudre , & quelle foit reuerberée de quelque promontoyre ,ou bien fi amaflee en quelque vallée clolè de montaignes , elle fentourbillonnc
- Hh. iiij.
- p.184R - vue 379/480
-
-
-
- lifo
- jj
- jj
- jj
- jj
- jj
- ROBERT VAL TVRIN
- fouuent,qu’entourillonnantles eaux ilfefaffe vn tourbillomlorsil Rappelle Typhon,c’eft adiré dardée .Devray la terre feiche eft foudain tourbh lonnée, & éleuce de bas en haut, ny ne rompt pas feulement les verges, maisauffi lesvaiffeauxen les tourdant.A la venue duquel vn peu devinai-lîhï.cap. greepandufert de remede, audemourantii remporte du rebond defon 48jege il coup au ciel auec foy les choies qu’il à rauy,8c les y engloutit .On dit que le lifupro il coraleft vn desremedes contre luy, lequel Metrodore appelle Gorgonie, dautant qu’il relifte aux Typhons 5c foudres.Mais lors que circontournc, 5c tournoyant vn melme lieu il fort d’vn foudain fouffle, 5c qu’il ébranlé, 5c entourillonne tout,on l’appelle tourbillon. Lucrèce.
- Le tourbillon defeend tournoiant, & détourné.
- Enfemble ce fie nue à corps lent,& apres Uaucir pouffé au vagues du Vonte comme groffe, llfeiette foudain dans l’eau, & de fon bruit.
- Toute la mer il meutfiaforçant à tormente.
- Et fil eft de plus grand effort, & qu’UTenflambe par vn toupillonne-ment, ildeuientcequelesGrecz appellent Prefter: lequel eft vn tourbillon ardant . Les Gréez appellent xv*$vtfnp<*Ttt, les vens lelquelz chaffez f J0, du profond,ou des creuaces de la terre,ont de coutume de gaigner le haut. 45, . iego Mais l’orage fe dit p*Txiyi's que nous pouuons appeller vent forcé, d’au-eùm fpif- tant qu’abbatu du haut du ciel,il bat ça bas d’vne violence fobitc. On ap-fatus pro pe]|eaupficolonnevnehumeurlaquelleefpelsie&congelécfofouftient.Il
- confpica- r .. 1 r * c 1,1 . . 1.
- eft aufsi vne nue de melme gere en raçon d vn long tuyau qui attrait 1 eau, aufsi fait elle toutes chofos quelle rencontre. Lucrèce:
- H auient quelquefois qu’vne columne plonge Du ciel en mer,bouillans autour d’elle les edux,
- ^Auecfureur de vens fouffians de toutes pars.
- Tous vaiffeaux qui lors font compris dans ce vacarme,
- Tombent pour la tormente en vn trefgrandpéril.
- Somme queles vens partans des nues produifontprcfquc tous ces perilz par lefquelz les équipages 5c fouuentesfois les nauires entiers font rauiz en haut. Et combien qu’il ne foit rien en la mer plus offenfant que les vens, tourbillons,&tempeftes, & que la nauigationnefoit en rien plusfêcou-rue de plus grande inuention d’hommes que par les rames 5c voyles,vn petit poiftbn toutesfois hantantles rochiers qu’on appelle Echine,arre-fte toutes ces chofes également pouffant d’vn mefme accord’, Ce refer-uant feul la force des elemens 5c nommes , & ce fans a&e ny effort, mais tant feulement de fa nature, quoy que les vens pouffent, & que latem-Adde ex pefte face fes furies . Il eft maiftre de leur fureur & abbatees figrandz pli.li. 3 effortz de forte que les nauires ne bougent, delquelz quoy que les cor-ca' I*m^ dages ne la forte tenuë des anchres iettées ne font point de focours,il refreindtoutesfoiz les violences, & domte fans peine la furie du monde,
- ne
- tus,
- JJ
- JJ
- JJ
- Jj
- JJ
- mat rabic.m
- p.184V - vue 380/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 185 ne faifànt aucune retenue,ne autre choie que d’adherer à la quille. Et combien que ieletreuuc es liures de renom, il fêmbleroit toutesfois cho-fe incroyable fileftoit tant feulement cfcrit delà mer Occeane, Indienne, &Scytique, & que cemonltre ne fuftplus toffc auenuà noz Chefz Romains dedans noftre mer. Ce poiflon de vray adhèrent au nauire portant nouuelles à Peliander de chaftrer tous les ieunes nobles, l’arrefta, quoy qu’il euftle vent en poppe. Oh dit qu’il arrefta le Capitaine d’Antoine en la guerre A&iatiquefê haftant de circuir les fîens,&: leur donner courage iufques à ce qu’il fê iettafi: en vn autre: parquoy l’armée de mer de Celâr vint loudain de plus grande violence Il arrefta aufsile prince Caius reuenant des Eftures à Antium.Ce tardement toutesfois ne fut pas de gra-de admiration. Car loudain qu’on eut entendu la caufè(d’autant que toute Lego ab * l’armée finglant vne feule quinquereme ne bougeoi t,& qu elle eftoit com- Aftura.pro me à l’anchre,fàns fê mouuoir d’vn lieu ) incontinant ceux qui faillirent du Aft---8î nauire pour le recercher, le trouuerent adhérant au gouuernal,& le mom ftrerent à Caius indigné & fémerueillant que celafuft ce qui l’arreftoit, & qu’ayant l’ayde de quatre centz rames , illuy fut contraire. Ceux qui pour lors virent ce poiflon mis au nauire,le difentcftrefêmblable à vn grand limas. Lesconches de I’Indie fê font attaché aux quilles desuauires d’vne mefmepuiflance-.defquelles l’attouchement fans bruyt,petit & leger fait corne Ion dit plus de retenue,que ne font de pouflêment les elemens trou- î-eg° blezrcar de vray le nauire demeure tardif, quoy que les voyles foient ten-dues,ny n’a cours celuy qui a le vent a gré. Il eft arrefté fans anchre, & lié fans chable .Finalement ces tant petitz animaux font plus de refîftance, quenefontdechaffetantdefêcoursà fouef: parce moyen combien que les vagues haftentle cours,le nauire toutesfois eft contreind de demourer furie dos de la mer immobile, & par vne merueilleufê maniéré les vaiT féaux font arreftez fans ébranlement, pendant que les vaguesfont rauies d’innumerablesmouuemens.Etàcelle fin que nous parlions d’vne autre nature de poiflon,parauanture que les matelotzdes nauires fufdiétz tou-chansàlaTorpillemerueilIeufêmentpefântefbnt dcuenuzpefàns, par laquelle les dextres de ceux qui la frappoienç. font tellement endormies, quelle empoifonnc la main de celuy qui la frappe par le bâton dont elle a efté feruë,tellement que la partie de la fubftâceviue demeure épamée fans mouuement,& fans fentiment.Les autres dient(quifêmble chofe incroyable ) que les nauires qui portent le pied droid d’vne tortue retardent leur cours. On parle d’vne autre maniéré de monftre qui n’eft pas moins in-croyabIe,qu’au tour de la mer de I’Indie,eft vnoyfèau d’vne grandeur de-mefurée (lesnoftres l’appellent Roque) les pennes duquel ont dix pas de longueur,àlaquelle grandeur ne deflaillent pas les forçes.De vray quand il a faim,& qu’il a empiété vn éléphant, & qu’il l’aura quelque temps porté en volant en l’air,il le iette en terre,de laquelle cheute prenant mort, il fen paift,ny ne rauit feulement l’elephât,mais aufli les nauires entiers tjrouflez
- p.185R - vue 381/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- aubeciufquesauxnuës,faifant mourir &confomer les mifèrablesnaui-gueurs pendans en l’air de fon terrible vol,
- LA MATINALE ^ASTR^OLOGIE SELON l’obferuation du Soleil, 0 de la Lune, 0* des autres efloiües, 0* des payions des elemens. Cbep.S.
- Presauoirvuydélaraifbndes vens il conuient paffer aux autres prognofliquesdestempefles. Or comme il loit notoyre qu’vne armée de mer foitfouuentesfois batuë & brifeedes combatzdc vens,& delabeflife des pilotes, nous baillerons pour îeprefent des prefàges diligemment recerchez pour les futures violences des vens, & des piuyes & tépefles,en efcriuant les temps oportuns tant pour la guerre que pour la nauigation, commençant premièrement au foleil, à la lune, & aux autres cfloiles ; car de là véritablement,corne dit le trefdo&epoëte.
- 1 Du ciel douteuxpouuonsprédire les tempefies,
- ' Etle temps eptil conuient drames tranfporter
- Le marbre périlleux, 0 nauiguer en arm es:
- Ou abbatre aux forejl^lepin en fa faïfon.
- Le foleil donques que l’antiquité a appelle l’œil de Iupiter,eflant pur,& non ardant a fa leuée lignifie le iour fèrein,aulïï fait il le vent quand auât fa leuée les nues rougiffent:& la pluye,fi aux nuës rouges,les noires fè côioin-gnent:& Ci auant foleil leuant les nuës faffemblent,elles fignifiét vn hyuer afpre:&temps fèrein,fî elles font chaffées du collé d’Orient, & qu’elles le retirent àloccidentfo les raidz fe monflrent auant foleil leuant, ilz lignifient eaux & vens-.& quand les nuës feront iettées tout autour du foleil, la tempefle fera de tant plus rude, comme plus la lumière feramoindre. Et combien qu’à fa leuée l’air foit autour de luy,fi toutesfois les nuës font épanduës partie au midy, & partie au Septentrion,elles lignifieront piuyes & vens.Lors aufîi qu’au Soleil leuant les raidz neferont point clairs, ilz fi-gnifierontpluye,quoyqu’ilz ne foient point attourez de nuës. Si le Soleil leuant fera enuironnéd’vn cercle ,& qu’il fê perde du tout également, il donnera beau temps:&fi le cercle fouure qu’on attende vent du collé de fon ouuerture:&fi le cercleeftdouble, qu’on fattende à vne cruelle tem-pefte. Au demourant,fi à foleil couchant les nuës rougiffent, elles fignifiét beau temps au lendemain ,fîaufsi elles reçoiuent vne couleurblue,elles dénoncent la pluye,fi couleur de feu ,les vens méridionaux: & fil fè treuue des taches noyres,iln’y aura pas faute de vens ne de piuyes :&fi autour du mefme foleil couchant,il fê rencontre vn cercle blanc,il lignifie vne legiere tempefle la nuiéh & fi c’efl vne petite nue,plus vehemente : Sc fi c’efl vn cercle^vn merueillcux vent du collé du quel il partira.
- Les prefàges de la Lu ne font approchans de ceux du foleil, car lien fè leuant elle refplëdit claire,&pure,on péfe qu’elle lignifie fërenité: fi rouge,
- vens:
- p.185V - vue 382/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XI. 18s
- vens: fi noyre, pluyes. Si auant le quatriefmè iour, elle ne fe montre point, &: que le vent d’aual tire,elle fera tout le moys froide: & fi au fèziefme elle apparoift fort flamboyante, ellefignifiera rudes tempeftes. Mais fi au qua-triefme iour, que I’Egipte, & plufieurs ont en recommendation, d’autant qu’il eft certain autheur du temps futeiir:
- Au cielfacefort cours}pur & fins cornes mouffes,
- Tout ce iour & le moys prouenant d’vne fuyte N'auront pluye ne vent, çy du péril fauue%
- Les Pilot% aux nuages accompliront leurs veu%.
- C’eft ce que dit Virgile. Si pleine elle eft à moitié pure,elle fignifie ioursfè-reins:firouge,vés:finoirciflant,pluyes:filobfcuritéd’vnenuë couurefon rond,vens du cofté duquel ellefèromprarfi deux cercles I’enuironnét, plus grade tépefte,& beaucoup plus grade fil font trois,ou noirs, ou entrerom-puz,&fèparez.Si pleine ellea autour de foyvn cercle,ellefignifiera vét du cofté duquel le cercle aura plus de fplédeur. Au demeurât le téps du defaut de la lune,ne fait pas feulemét foy d’vne rude tépefte aux nauigueurs parla rayfon,mais aufsi par l’experience maiftrefle de toutes chofès.ll fauttierfè-metauoir égard aux eftoilles,lefquelles veuë quelques foiz eftre courates, les vens enfûyuent.Quand en téps fèrein elles icintillent, il fera des pluyes rudes, quad leur clarté foudain fe diminue fans nues ne brouillard,c’eft pre fàgedepluye ou de grandes tempeftes.Si on voit plufieurs eftoilles courantes, elles lignifieront Iesvensdeuoir partir de lâou elles feront portées blanchiffantes.Et fi cela fè faiét en plufieurs contrées, elles épandront vés variables.Lerefteenfèmblable des eftoilles a a par foy fà vertu, & fertile félon fa nature,& non feulement les mobiles & difeourantes, mais aufsi plufieurs entre celles qui font adhérentes au ciel,toutes les foiz qu’elles font emeues par l’approche des erratiques, ou bien éguillonnées par leurs raidz comme nous voyôs auenir a la pofsiniere, lefquelles a cefte caufc les Gréez appellent waAçd’vn nom pluuieux. Mais puis que nous auons dit l’obfèr-uation du foleil,de la Iune,& des autres eftoilles,pourfuyuons maintenant les chofés qui fè font des pafsions des Elemens,ou bien qui prennent leur fourfè d’eux.Car véritablement il y a en eux des prefages certains du mou-uement futur,veu qu’on voit défia en eux les principes defquelz il prenent les cômencemensdes caufès. Qmmd les nues farreftent au fommet des montaignes,il fera froid:fi les fommetz font purs,elles eclarciront les to-nerres.Et comme entre elles les matutinales fignifientlevent, aufsi font les méridionales la pluye. Le brouillard defeendant des môtagnes, ou tü-bant du ciel,ou farreftant aux vallées promet fèrenité. Quand les arez en ciel font doublesjilzfignifiét la pluye, mais le fimplene fait pas toufiours les mefmcs menaces de quelque part qu’il apparoiffe:car quand il fôurdira dumidy ilamenera grande quantité deaux : lefquelles la vehemence du foleil ne pourra vaincre tant elles auront de force,&fil apparoift autour de l’Occi4ét,il tonnera auec vne Iegiere pluye, ôc fil fe drefle du cofté d’Oiict,
- Ex lib. i S ca,3 5. plu uia aut gra ucs. &c.
- p.186R - vue 383/480
-
-
-
- ROBERT VAL TVRIN
- il promet ferenité.Quand en efté le tonoirrefera plus vehemét que 1 éclair, il fignifie vent de ce collé la,au contraire fi tonne moins, la pluye. Quand il éclairera de toutes les parties du ciel,il ventera & pleuura de toutes pars. Si tant feulement du collé d’Aquiicn,il fignifie eau pour le iourfublèquét: fi du North,le vent mefmes.Et lors qu’il éclairera du midy de Corus,ou de Fauonin ellant la nuiéllêreine,c’ell indice de vent & pluyes de ces régions Ex Pli. li. la.Outre ceux cy les feuzterreftres font de femblable fignification, car les abhlsg°r Pa^es ^ fnurmuransdénoncent les tempeftes & pluyes: lesfonges aufsi Ls/S Pr° au tour des chandellesfignifient vent: ScfilafLibevolIete en tournoyant, oubien quand la cendre l’amoncelle au foyer, &c quele charbon ejfb mer-ueilleufement ardant.L’eau aufsi a fes indices: la mer calme, ou bien l’écume difperfée,ou les eaux failàns bouteilles fignifient lefroid par plufieurs
- iours. -
- 33 Lesvensfuturs fouuent au parauant enfeignent
- 3 3 Le courroux delà merfloudain que calme elle enfle,
- 33 Et que les caues rockç blancs de falée écume,
- 33 S'efforcent de hurer'voix tnfles a Neptune:
- 33 Ou qu'aux fommetz des mons v» muglemtntforcé
- 33 S’engendre >[’augmentant entre loingtaïns rochers.
- Il relie encores plufieurs autres prognoftiques & prefages de tempeftes, par animaux terreftres,marins,& par diuers oylêaux, lelquelz qui les voudra fçauoir,il trouuera auoireftévuydezparTranquille,Varron,Nigidie, Arate,Lucain, & par l’excellent des poètes Maro es Georgiques.
- LES REMEDES DE CEVX SONT
- en péril. Chap. 9.
- --------Radiouftons lesremedespourceuxquilonten danger. Lamer
- en tormente le rend calme par rependement d’huyle:à celle cau-fe on dit que les plongeons répandent de leur bouche, d’autant qu’ilappaifefa rudelîe & la rend calme.Si le voyage eft long , fAbfince beu garde de vomir. Mais d’autant'que les nauigueurs ont fouué-tesfois faute d’eau douce,nous leur enlèignerôs ces moies.Les laines épan-dues autour du nauire preignent humeur de la vapeur de la mer, dont on épraint vne douce liqueur. D’auantage les boules de cire concaues auallez à fillets,ou vailfeaux vuydes cloz,amalfent dedans eux vn humeur douce: - L’eau de mer aulsi fadoucift coulée en Argille.
- p.186V - vue 384/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 187
- CE O^T’ON DOIT F J IRE JS A N T
- que de tirer à ïennemy. Cbap. IX>
- Près auoir vuydéles chofes neceflaires àla nauigation, il faut au demourantauant qu’aller contre l’ennemy,que ceux quiontà combatrefur merfexercitent au port, & qu’ilz faccoutumenta Imaniër les gouuernalz,tirer la rame,apprefter les mains de fer, crocz &aiz,coignées & faux bien affilez : & que les foldats ordonnez lur letillac demeurët de bout vn pied en l’air,à fin qu’ilzne fétonnent de faire en vray combat,ce qu’ilzont apprins en vn fein&.Le moyen aulsi du combat, eft de tirer fléchés aux éloignez ,& défaire porterpeine, & mettre à fond ceux qui oferont approcher,auant qu’ilzle facent:&en fe iettant dedans les vaiflfeaux les tuer, ou bien àl’abordemeut les prendre auec leurs nauires. Au demourant le nombre des combatas requis a chalcun vaifleau le peut augmenter & diminuer félon le nombre des nauires ,& celuy des foldats.Lors aulsi qu’on nauiguera en quelque région incogneuë,il ne fau-drapasnauiguera l’auenture,maisfenquerir deloportunité des lieux ,8c des portz,à celle fin d’euiter les paflages non nauigables & lècz à caufè des dormans.
- CE QJXI EST NECESSAIRE AV rencontre des deux armées. Chapitre. X*
- ig^i^s^rilles ennemyz ont armée de mer,il y a vne inüétion d’vne prom-ptedefaiéte des nauires par les Gréez. On appelle feuGregeois ^^pVi^vne certaine confection & bouillement de charbon de faux, delàlpetre, d’eau de vie, defoulphre, poix, encens, auec du fil faict de laine molle de l’Eciopie,&: caphre, laquelle (qui eft vn cas merueil-Ieuxjard toute feule en 1 eau bruflant toute matière. Callimache archite-Cteur fuytif de l’HelepoIe,!’appnnt premier aux Romains:duquel aufsi véritablement les Chefz fe font aydé contre les ennemyz.Commne de vray du téps de l’EmpereurLeon, les peuples Orientaux euffentfait vn voyage de mer contre Côftantinoble auec mille hui¢z fuites, il les défit tous de celle maniéré de feuzdrelfant contre eux nauires à feu. Et depuys peu de temps apres,il défit auec le rnelme feu quatre centz vaifleaux ennemyz, & de recheftroiscentz.il en eft qui vient d’vn autre feu qui le lance,lêm-blable a ceft autre, mais de plus violente ardeur, en y aiou liant duvernix liquéfié,huyle de libraires,petrolée,tormentine, delayez en fort vin aigre, & prelfez, puis defleichez au foleil ,& âpres enueloppez d’etoupes auec pointes de fer aiguës en faillie, & en façon d’vn ploton faict defil.Tou-tesJefquellescholèsfoientoincles(exceptéletrou) decolophoene &fou-phre,comme il fenfuyt.Lesaucuns iettent celle façon de feu es vaifleaux des ennemyz adhérant à vne torche. Lucain.
- O que diuerfespeftes a la mer, veu qu’on darde
- Ii. i.
- p.187R - vue 385/480
-
-
-
- 33
- a
- »
- »>
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- ROBERT VALTVRIN
- Lances a feu ardantpar vn fouphre couuert: duquel burent les naufefacile nourriture,
- Hores ardans par poix,ou par cire fondue.
- L’onde ne vainc la flambe, & ia par metvaiffeaux 'Eftans épars,le bris,le cruelfeu rauit.
- Luy mefme encore s de la mefme matière:
- Il ordonne qu’on lance en poix flambeaux trempe%
- Es vaijfeaux oinél^pourguerre, & ne tardait le feu De courir par cordages,&par tout le marrein,
- Rendant la cire,çy lors furent des matelot%
- Les bancT^ tourne% en cendre,auec les hautes verges, la prefque aboient à fond les naufl* à my bruflées, la nagent ennemy% armes, & na le feu Les feul% vaiffeaux rauy car les maifonsprochaines,
- Delà mer l’ont attrait par les longues Vapeurs.
- Mais à fin que le feu ne puifle faillir quon letire d’vn caillou, lequel at-taindtd’vn fuzilou de quelque pierre fera feu qui receuenfoulphre,fueil-les,ou drapeau bruflé,la matière (ulphurée fera incontinant flambe. Chacune nation a en ces chofes lès inuentiôs.De vray quelque fois il fe fait des feuz du meurier,Iaurier3yerre que l’vfâge des epiez 8e bergers a inuété.Tel-lement que d’autant que quelque fois le caillou ne fe rencontre pas touk iourSjàceftecaulèon frotte boys contre boys,qui fait feu par lefrayemcnt que la matière d’vne fonge lêiche reçoit. Mais il n’eft rien plus excellent que l’yerre qui eft frotté du laurier,frottant aulsi le laurier pour tirer feu par fcintilles. Prometheus à inuenté de garder vn an le feu en vne ferule,de laquelle parle Martial :
- fdux enfans ennuyeufes,gy au maiflre aggreables.
- Boys fommes renomme^ du bien de Prometbée.
- L’inuention aufli de Annibal efl: bien trouuée bonne pour le combat
- de mer. Car comme Prufie euft: tranfferé la guerre furmereftant vaincu par terre, Annibal fut par vne inuention nouuelle caufe delavi&oire. Comme qui ordonna de mettre en bouteilles de terre toutes façons de fer-
- p.187V - vue 386/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 188 pens,& les iercer au fort du combat dedans les nauires des ennemys.Ce que de prime face fembla aux Pontiques digne de moquerie,que ceux combattirent à potz de terre,qui ne le pouuoient à armes.Mais lors que les nauires commencèrent à femplir de fèrpens, ilz quittèrent la victoire a l’ennemy ftirpriz d’vn péril double.Les autres aufsi iettét du fauon noir méfié d’huyle ou d’amurque,auec potz de terre,à fin que le tillac des ennemys foit fi glif-fane,que les gens deguerrenefèpuiffenten combatant tenir furpiedz. Et iiaademoûrantquelqu’vn veult faire celle autre expérience,nous trouvons par eferit qu’aucuns ieûnes hommes de chois faifànsle plongeon à l’approche des nauires des ennemyz ont percé la quille auec vne tariere.
- INTENTIONS DIGNES DE MEMOYRE pour gaffer rïuïeres. Ch dp. XI.
- !p|E naefemble qu’ileflbon d’y aioufler, comme quoy nous pourrons aifement paffer vne riuiere, fi l’ennemy nous le veult em-pefeher de l’autre collé, ce que nous monflrerons par les hy-itoyres en ramenant les exemples des anciens . Comme Pore vint au deuant faire telle a Alexandre ruinant l’Indie, les camps furent afiizfurles deuxriues de la riuiere d-’Idafpe, laquelle auoit quatre flades de large, fi profonde q’uelle n’efloit nulle part gayable .Orcommenda Alexan dre à vn certain Attale, luy eflant fort fêmblable de garder le camp auec accouflremens Royaux, & comme auec vne partie de la cheuale-lie, il fufl quelque peu-marché auant,&qu’vn brouillard efpes eufl ob-fcuréleiour,il gaignal’autre riue de la riuiere, la ou il fut longuement fâché pour le doute du combat,iufques a ce que les bataillons furent rom-puz,& les piedz des elephans trenchez à coups de coignée. Cefâr vfâ d’vne mefme maniéré. Car comme les ennemyz luy empechaffentlepafi-iàge de la riuiere, affeans leur camp furlautre riue, ilf’arrefla en vn heu egaré,ayanttrouué vn pont de ceux qu’ilz auoient coupe .Et au lendemain il enuoye toute fon armée deuant, d’vne ordonnance iettéeen longueur,farreflant quelque peu derrière auec deux légions,&apres auoir re-faiélle pont, il paffeauec elles choififfant lieu àl’auatage pour fôn camp & depuys ilfeit retourner le demeurant de l’armée. Labienel’vn defès capitaines cerchala nuiélfôn oportunité: car comme les ennemys fêcampaf-lent audela de la riuiere de Seine luy empêchas le paffage il recouura quelque nombre de batteaux liurantà. chacun nautonnier le fien. Il cercha auffi des nafTelles,lefquelIes il enuoya au mefme quartier auec vn merueil-leux bruit de rames.Les ennemys eflimâs les romains paffer en trois lieux départirent auffi leur armée en trois. Labienetirant aux nefz paffatrois légions,& comme fe iettant en bataille il eufl défait vne partie delarmée des ennemyz,le refie print la fuyte. Quelque fois auffi on fait pont la ou l’ennemy ne donne point empefehement auec plufieurs bateaux couuers • I i. ii.
- p.188R - vue 387/480
-
-
-
- ROBERT VAL TVRIN
- d’vn planché d’aiz. Quelques foiz aufli on met multitude decheuauxco-tre le cours de l’eau pour rompre fa violence, afin que ledemourantde l’armée pafle à bon &feur gué & d’vn pas ferme.-comme fit Cefarau pafTa-ge de noftreRubicon.Oniette quelque foiz deux troupes de cheuauxen choififlant les plus gradz cotre le cours de l’eau foparées d’vn ordre, & certain interualle, entre lefquelz les gés de pied tant armez que nudzpaflcnt. Car par le moyen de celle d’au defliis,l’impetuofité & violence du courât eft rôpuë, & celle d’au defioubz, rauit & tranfporte ceux qui par fortune font tombez.Comme aufli Cefor eufl: a pafler le Loere, & que les gens de cheualeuflenttrouuépaflage gayable de forte queles braz& epaulespou uoientcflrea fèc pour porter les armes,il pafla fon armée foine&fauue,en ordônant fà cheualerië de forte qu’elle rompit le cours de la riuiere. Celius recite que Magopaflafoudain la riuiere auecla cheualerië, & les gens de piedEfpagnolz, & que Annibal pafla fon armée par le Pau près fafourfè en ordonnant par odre les elephans pour rompre la violence de fon cours: ce que ceux qui le hantoiët ne Iceurët prefques faire. M ais fi la profondeur de l’eau repoufle d’vn cofté & d’autre le foldat,il la faut amoindrir par-plu-fieurs dérours.come fit Cefarpaflant le Sicore, ainfi que le dit Lucain.
- ^4fin que redoublant fies ondes}nen il nofiè En fiojjes on l’épand, & en fendant le cours Defies par trop grands eaux Je ruififieau porte peine.
- Comme Cyrus Roy de la Perfo trefpuiflant voulut prendre Babylone,iI fit pour vne bien legerecaufe la riuiere deGangesgayable,côbien quelle foit fi grade que le moins de païs qu’elle occupe, a hui& miles de large, & en (à plus grand largeur pour le plus, cent flades : quant a la profondeur, elle n’efl: point moindre de dix toifos.Car comme il vit vn des cheuaux de fon cfcurïe, de blancheur & taille excellente fengouIfer& perdre auecle cheuaucheur dedans vn abifme de vagues, il iura,comme l’on dit,de cour-roux, qu’il l’abbefleroit de forte qu’il feroit gayable aux femmesmy ne fail lit à fa promefle.il employa de vray en cela toute fon armée, &y entendit, perlêuerant iufques a ce qu’il euftdepart.y par tranchées fon cours en trois centz foixanteruifleaux, 5c qu’il Peut rendu fcc donnant diuers détours auxeaux.il a aufli par vnmefme moyen auec fofloyeursbienenten-duz détourné Euphrates,riuiere entre toutes autres fort mémorable, reno-mée,&grande,tant parles anciennes hiftoyres,que parfosdebordemens, prenant fon cours au trauersde Babylone, capitale de la Chaldée. Par ce moyen il a pafle eftant gayable, & fon fond a foc, prenanr vne ville que les hommes eftimoientimpoflible de pouuoir eftre édifiée d’entédemét humain , ny eftredeftrui&e par force humaine . L’entendement des Perfosa la vfo de fon engin.Car corne il afliegeafl: la Nicomedieiadisappellée Ni-fibis,& qu’il ne la peufl: prendre, obftat la riuiere quelques effortz qu’il fit, it arrefta finalement de loing le cours de la riuiere Migdonie trauerlâne la ville en exauçantfosdeuxriuages,afin quel’eau amafleedeuintgrofle.Et
- comn^
- p.188V - vue 388/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 18* comme les riuages exaucez commençaflent eftre rempliz , ilz enuoyerent la violence de la riuiere contre la muraille, en lâchant foudein les eclulès, laquelle ne pouuant porter la grande force d’eaue,tomba. Celle violence aufli a faufé l'autre partie du mur oueftoitfâfortiela rauiJfifantd’vne grande ruine.il en eft qui loudain font des flottes fur lelquelles on pafle les che-uaux, hommes, 6c autres charges; d’ontCefar Sc Xerxes ont vfé,comme dit Lucain.
- » Lors que fur l'eau fon pois n’a peu tenir la majfe
- » Les forefîz abbatuës on ajfembla de liens:
- » Eta fort grandes chaînes,les Qhefnes on lia:
- 33 Telles \oyes on dit que le hautain Xerxes 33 Drejfa fur mer/ofant à force pons, £7* a
- 33 lointiEurope à l’^Afie, Seflon à l'^Abide.
- 33 Sur la mer a marché au roide cours du Ponte:
- 33 De l’Eure, & du Zephir n’ayant aucune crainte:
- 33 Lors que \oyles, & flottes parle trauers d'éthos
- >3 II iettoit'.ainfi donq les bouches delà mer 33 On eflrefit par boys, & forejh? abbatuës.
- 93 uAforce terre lors ce dreffe l’edifice
- 33 Et fur la meraufi tremblent les hautes tours.
- p.189R - vue 389/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- lien eflqui dreflèntde celle fortevnpont de pièces defaffemblées & portable àfomiers, & qui fe peut r’aflemblerpar fes mortailès, cordes, & aneaux defer,eftant chafcunais double ôcvuyde collé de forte que l’eau n’y entre point.
- avtrePONT
- se
- SS
- iss:
- o o O O o o 0 o o o o o o o
- o 0 o 0 o o o o o o 0 * 0 0
- o o O 0 o o o ‘ o o 1 0 0 0 0
- Lm / -
- M
- M
- p.189V - vue 390/480
-
-
-
- (
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI.' i5o A V T R E PONT
- A VT RE P ON T
- p.190R - vue 391/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Autres aufsi en ont inuenré decefte forte :vne armée porte à charroy des naflelles faides d’vne pièce de boys fort legeres &c tenures félon lefpece du boys,ayans aiz & doux appreftezâà fin que foudain en dreflant ce pont ilz puiffent au befoing faire courfes, & embufçhes aux ennemys furue-
- nans.
- V
- p.190V - vue 392/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. i
- Ilcneft quiauecde grandz bateaux lèparez en façon de trois coquetz, & par apres conioindz enlèmble& couuertzde toile cirée paflcnt les ri-uiereslâns rames,nauigans de plus grade vitefle, que li elles eftoient cha£ fées a douze rames.
- p.191R - vue 393/480
-
-
-
- ROBERT VAL TVRIN
- hr03 «
- W03 * <§>
- ry
- (r*& (6) / 4 To v 1 •/ 1 ê A • y• y • A » • * y r •yf- * * • y\* *
- @) » t • • • * * % ga* • ♦•••♦ • ïÀ
- p.191V - vue 394/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. J9t Les autres font des naflelles d’oziers, &les couurent de cuir de bœuf comme fit Cefàr pour palferSicoris. Lucain: a Lors donc que Sicons eut nues delaiffant
- i» Les champs foudain le faut chanufut en bateau
- a DreJJeauec l'obier trempépuis reueflu
- 33 Dubouuillontué foujfrantlepaffager
- 33 kA nage féleuant fur la rimere enflée.
- 33 Le Vénitien donq fur les Vndes du Pau
- 33 JSfauigue ainf3aufi fait fur la mer eparf
- 3 3 L'Angloys de l’OcceanJors aufi que le VIH
- 33 Eflpar tout épandu}du papier biberon
- 3> Lesflettes on baflit au Qaire.^A ces flottes
- 33 - L'armée futpajfée.
- mm
- Lafortüne aufii a fait à plufieurs palPage, comme à l’Empereur Henry, lequel eftans les riuieres glacées entra au pais des Lucianins, defquelz il fit grand meurtre, & pilla leur païs. Mais aulfi ont efté plufieurs deceuz en femblable cas, comme Perfée filz de Philippe, lequel alfembla toutes les forces en vn,lbllicitées foubz l’elperance de gain.Et comme par fortune le Danube qu’on appelle ayant fait croûte déglacé fê foufFrit palier a
- pied,& qu Vne multitude ineftimable d’hommes & cheuaux accourufi: au palPage auec toute l’armée enfèmble,celle croûte de glace fe creuantde la charge du pois, & delà conculsiondes palfans fè défit, & delaiflà finalement toute l’armée quelle auoit longuement louftenu au milieu dcl'eâu eftant vaincue Sc débrifêe, les fiibmergeant pour les empefchemens de les glaçons.La prudence d’vne petite befte en ces chofes eft ànoter.Ona de
- p.192R - vue 395/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- vray trouué que le renard en temps de gelée approche de la glace fon oreille d’vne prudente ouië,coniecturant l’épelTeur de la glace,parquoy plufieurs ne paflent point les riuieres,ne les lacz gelez,finon a leur alée & retour.Les aucuns attachent àleur poi&rine des pièces de liege larges, les autres des tonneaiixvuidesjlefqueizfeconfiansalalegieretédei’inrtrument entrent esriuieres,& ainfi aifément & plaifamment portez,ilz gaignent feure-ment l’autre riue.
- p.192V - vue 396/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI.
- LesEfpagnoIz, Alchytcs, &les Arabes iettentfurdes vaiffeauxde cuir de bœuf des planches trelliflees,&ainh portez ilz font la guerre aux paf-fàns auecfleches enuenimées mettans leurs veftemens légers au dedans de ces vailfeaux & iettans au delfus le demourant, ilz ont pafle couchez la ri-uiere.
- Klz.i.
- p.193R - vue 397/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Ny n’a autrement fi nous croyons à Florus vn certain meflagier aflcuré les habitans de la ville de tenir bon : les auertilfans queLucule venoitje-quel(quielt vne choie bien eftrange)efchapa par le milieu des nauires des ennemys à leur veuë de loing quali comme vne Baleine marine louftenu dvn vailfeau de cuyr,& drelîàn t fa route auec lès piedz.Cefar aulfi a par vn fcmblable moyen en cecy comme en toutes autres chofesefté leparragon félon l’opinion de pluficurs.Il a de vray eu vn accoutrement de cuir cou-fid« &1 dî ^ cn^ comme vn Ibufflet pour palier les riuieres,+ f efforçant des iam -
- rigcs, pro bes,& drelfant dans leau par elles là courlê comme d’vn gouuernal. Si infidentis quelqu’vn toutesfois eftime parauanture ce propos de Cefar eftre feind ou dirigent^,. controuu^$uetoneTranquilleeftvn autheur& témoing opulent. Si les riuieresjdit il, le retardoient en les palfant à nage,ou bien porté a vailfeaux de cuirpleins de vent,il a fait grandz chemins,de forte que le plus fouuent il prcuenoit les courriers. Au demourant pour mieux alfeurer ceque nous difons,& ce que nous auons veu, nous relaierons de peine les le&eurs en mettant cy delfoubz le pourtraid.
- p.193V - vue 398/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 194
- Q^f ELLES M\MEES P JR ME OV PM R terre ont ejle merueiüeufèmentgrandes. Chapitre. JCII.
- E ne fera pas chofe inutile, ny malfêante à la matière prelénte, de comparer les armées entre elles d’aucuns qui ont elle excellens en l’art militaire, tant pour le nombre que pour la multitude deslè-cours.En quoy E nous voulôs commécer aux lettres Iâin£tes,qui nelâuoient ny nepeuuent mentir, es quelles nous liions qu’a tout coup ce Dieu Roy des Roys,prince & feigneur des armées a combatu, & quelque fois aulïi (fil eft licite de dire, ny n’eft ellrange à noftre religion ) entré en couroux,& cruauté, nous trouuerons que le nôbre de la nation Hebrai-queaprinstellecroilfancequ’à Ion departemét del’Egiptcon trouuc par elcrit.qu’il y auoit Ex cétz mille ieunes homes de guerre: nous lairrons les Idumées qui n’atouchoiét en rie au peuple d’iEaëbOn ditqu’iî y a eu loubz lachargedelofuéle nôbre deExcentz trois mille,cinq céts,cinquante. Et foubz Moylê au voyage de I’Afie, le nôbre de l’armée des enfans d’ifraël di-uifez par les races & compaignies fefl trouuéde Ex cens trois mille cinq cens cinquante:Oreftoit tout le nombre d’iEaël que fit faire Dauid douze centz mille bornes pouuans porter armes. Et de Iuda, trois centz foixà-te dix mille combatans.Quant à Leui & Beniamin,ie ne les tien point du ( nôbre,attedu qu’ilz faifoientlecômandemëtdu Roy par force. Alà aulsi a eu en Ion armée trois cétz mille hommes de la race de Iuda portans efcuz & pointons,&: deux centz quatre vingt mille de la race de Beniamin portans efouz auec l’arc lelquelz tous eftoient hommes de grande prouefle.
- Contre lelquelz a marché Zara l’Etiopien auec vne armée de douze centz mille hommes,& trois cens cars.Finalement on trouue que du temps tant des iuges que des Roys,tant de mille ont eüé defaiélz en diuerlês guerres, diuerfes régions,&en diuers temps, qu’a peine en euft mis nature autant fur terre qu'eux cc les chefzde iuftice lèmblentenauoir défait,&efteint. Combien qu’outre celle multitude des Hebrieux prelque infinië Sefofis Roy desEgiptiens,a eu Ex cens mille hommes de pied, & vingt cars de guerre,auec vne bien bonne armée de mer. Ny ne le doit on émerueiller des armées de celte nation, veu qu’anciénement l’Egipte a furpalfé toutes les autres du mode en nombre d’homes. Car la làinéle elcriture témoigne qu’au teps palïe, il y a eu en Egipte plus de dix & huiél mille que bourgades que villes, & trois mille d’auantage du téps de Ptolemée L’age. Quant tE*Pto»o au nombre de tout le peuple,Diodore le Sicilien témoigne qu’ilaeftéde fept millions.il y a en Gages vne ifle fort grade,n’ayant qu’vne nation ap- c| pro Mo pellée + Modogalique,au de là de laquelle font alliz les Modubes,&Mo- drogalin-lindesauec la ville de mefmenom,riche&magnifique,auflî font les Gai- ^ldicx modroeres,Prêtes,Calilfes.Safures,Papales,Colubes,Orzulcs,AbaIes,Ta- codé loco lu6les,le Roy defquelz a en armes cinquante mille hommes de pied, trois PHnii&re mille cheuaux,& quatre centz elephans. Auprès dcfquelz eftla nation des Andares,auecpluEeurs villages,trente bourgades fermées de murailles fequûtur.
- Klz. ij.
- p.194R - vue 399/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- & tours,fourniflfans au Roy cent mille hommes de pied,deux mille cheuaux,& mille Elephans.Mais de tous ceux prefque de l’Indie, & non feulement en celle contrée la les Prafins paflent en puiflance,& gloire auec leur cité Paliborre grande & riche a merueilles, lefquelz àceftecaufe aucuns appellent Pahbotres,aufsi font ilz prefque toute la contrée depuys Gan-ges.Orelt celle nation la en fi grande renommée de force, qu’on dit leur Roy auoir eu lix centz mille homes de pied,trente mille cheuaux, & neuf mille Elephans en foudeordinaire.Lesgens d’Alexandre le grand dient en femblable chofes incroyables,& ont efcrit que la contrée de l’Indie qu’iîz ont conquis, contient cinq mille villes, & que l’Indie efl la tierce partie de toutes les terres du monde,& que la multitude des peuples efl; innume-rable.La tourbe des Gotz qui ont eftédéfai&z par Claude Quintilie Au-gufteleurfaifànt telle &rcpouflant leurs efforts témoigne quant grande eftoit leur armée contre les Romains- ,veu le nombre des Roys prins, tant de nobles femmes de diuerfes natiôs,& tant de prouinces Romaines pleines de forfz barbares, & viellards,qu’il n eftoit aucune région qui n’euft vn ferf Gotique,corne vn certain feruice triumphal.Les lettres aufli de Claude Quintilie à Iuing Brocce protecteur de la Sclauonie eforites en ces termes en portenttémoignage.Nous auons défait trois cents,vingt mille Goths, mis a fond deux mille nauires,les riuieres font couuertes d’efous, & lesrk uagesd’elpées,& ienetaires,les champs fevoyent couuerts d’offemens, les cheminsen puent,la grand Carthage eft rafoe, Nous auons prins tant de femmes que lefoldat vainqueur en peutprendre deux & trois.Que dirons nous de Cyrus ? Na-il pas alTemblé,comme dit Xenophon, toute la force de Babylone,en laquelle eftoient fix vingts mille cheuaux, deux mille cars afaux,&fix cents mille hommes de pied.Quand Nine fit fon voyage cotre les Baétrians,il y marcha ayant fait là leuée merueilleufo de chacune na-tion.-tellement que Etefias recite que fon armée eftoit defopt milliôs d’homes de pied, deux cents nulle cheuaux, &vn peu moins de dix millefix cents cars à faux,ayant Zoroaftre Roy des Baétrians dreffé vne armée forte de quatre cents mille hommes, pour faire tefteàNine furies limites.Se-myramis femme de ce Nine Roy des Aflyriens bradant de gloire de renom,côme le recite Diodore le Sicilien autheur non reprouuablepaflaen Indie auec treize cents mille hommes de pied,cinq cents mille cheuaux,& cent mille cars faifant vn pont de deux mille nauires fur l’Inde noble riuie-re de l’Indie.Lequel nôbre de gens de guerre fora parauanture auiourd’huy incroyable aux auditeurs,combien qu’il ne fomble point impoffible à ce-luy qui prendra garde a la grandeur de l’Afie, & àlamultitude desnations. Car fi on confidere le voyage de Darius contre les Scytes, & la nauigation de Xerxes en la Grcce, & les guerres vn peu au parauât fai êtes en l’Europe, il ne trouuerapointnozdicb incroyables.Denys devray a tire vne armée de fix vingt mille hommes depied, & de douze mille cheuaux en la foule Sarragouze ville de la Sicile, outre les grands nauz, partie triremes, partie
- quinque-
- p.194V - vue 400/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 155 quinqueremes iufques au nombre de quatre cents.
- On dit que Mirine Royne des Amazones a fait armée de trente mille homes de pied, & de deux mille cheuaulx.Comme Xerxes vouluft mener la guerre par mer & par terre à toute l’Europe,il vint à la Grece auec fi grande côpagnie, qu’il n’eft point de mémoire qu’onques hômeau parauantne par apres en ait eu de telle. Et à celle fin queie metaifé defon armée de mer de laquelle il me fauldra peu apres parler , il eft certain fi nous croyons à Probe Emilie que Ion armée par terre eftoit de douze centz mille homes de pied, & quatre centz mille cheuaux : & fi à luftin & Orofê de fept centz mille Perles,& de trois centz mille auxiliaires :& fi à Hérodote de dixfept centz mille hommes de pied,& huid centz mille cheuaux. Au regard de ceux qui auoient laconduicte des carneaux & cars le nombre eftoit de vingt mille, lans le bagage &la multitude innumerable des ferfz,& boulangers, & autres, dclquelz on fait le nombre fi grand, qu’il n’eft homme ayant lens qui le puifle croyre. Artaxerxes aufsi, comme Ethefias le témoigne,a donné battaille de quatre cents mille hommes. Dion,&Xenophon témoignent que ceux qui combatirent eftoient en beaucoup plus grand nombre, ny ne doit cela fembler choie incroyable, veu que comme le recite la fàin&e efcriturc, ileftoit fi grand Roy que depuis l’Indie iufques à l’Etiopie il auoitfoubz fon obeifiance fix vingt &c fèptChefz & Princes de prouinces, aux quelzilcômâdoit.Antophroda-tes enuoyépar Artaxerxes contre Dathanes en Capadoce anoic vingt mille hommes barbares de cheual,¢ mille hommes de pied,& trois mille tireurs de fonde de la melme nation routre plus huict m ille Capadoques dix mille Arméniens, cinq mille Paphlagones, dix mille Phrigiens, cinq mille Lydiens, & enuiron trois mille Alpendins,& Pifidares, deux mille Ciîicicns, & vn nombre infiny d’bommes armezalegere.Philippe pere d’Alexandre ayant faitleuée de gens de guerre par toute la Grece pour la conféruation de l’eftat Royal, affembla deux cents mille hommes depied, quinze mile cheuaux pour enuoyeren Afie, non comprinfe l’armée Ma-cedonique,&vn nombre infiny de nations barbares. Ceux qui afferment le moindre nombre de l’armée d’Alexandre, dient quelle eftoit de trente mille hommes de pied,& cinq mille cheuaux.Darius auoit es champs A r-belins fix cents mille hommes Perles en la première bataille qu’ileutcon-tre Alexandre lefquelz tournèrent vifaige,non moinsvaincuz delà rufè d’Alexandre,queparla proueffe des Macédoniens :& en la féconde troys cents mille hommes de pied,& cent mille cheuaux, & en la tierce que la guerre fut reareffée il féprefénta a Alexandre auec quatre cents mille homes de pied,& cent mille cheuaux. Si derechef quelqu’vn veut confide-rerlevoyage deDarius contre les Scythes, il faudra qu’il le confefléauoir efteauee huict cents mille hommes de guerre. Quant au nombre de l’armée de Annibal apres eftre paffé les irions Pyrénées pour tirer en Italie, les autheurs font differens.Ie penfe touteffoisla foy debuoir plustoft eftre
- Klz. iij.
- Lego Ar-bclis pro alpeftris nid mauis legere ex Plutarcho, Ganfame -lus.
- p.195R - vue 401/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- aiouftéc à ceux qui la difent auoir efté diminuée de tréte fix mille hommes de pied,& d’vn grand nombre de cheuaux,d’elephans,&: fomiers. Corm me le païs de la Gaule ne fullfuffilânt pour nourir le peuple pour fon trop grand nombre,ilzenuoyerent trois cents mil hommes cercher nouuelles habitatiôs.Et comme vne partie deux lefuft arrcftée en Hongrie, îîzprin-drent & brullerent la ville d’Ionie , l’autre le ietta en l’Italie. Les armées des Romains qui en cela furent au comencement de lêruice, font celles qui l’enlùyuent.Car comme l’an de l’edification de Rome trois cents foi-xâte dix & huiél,le debordemétdes Gauloyslè fuit parqué à trois mille de Rome,il fut faitvne leuée de dix legiôs delà ieuneffe Romaine,au refus des Latins leurs alliez de fournir ges de guerre.*que les Romains feftoiét affub-ieéli. Lanaufsi quatre centz Ibixâte dixième, ellantia grand le renom des Romains,d’autant que leur guerre n’auoit point encores efté hors l’Italie, on fit la montre des citoyens: le nombre delquelz fetrouuade deux cents quatre vingts dix ôc lept mille & trois cents trente quatre,combien quela guerre n’eutt point ceffé depuis le commancement de Rome.Mais comme en l’an cinq cents dixfept le bruyt courut delà defeente d’vn merueilleux nombre de gens tant de la Gaule cilàlpine que de latranfalpine,les con-fulz penfans de la confêruation de l’Empire firent amas de gens,au moyen du quel le trouuua en l’armée des deux Conl'ulz huyt cents mille homes, comme Ion dit,& comme l’elcrit Fabius qui fut en celle guerre la. Dont les Romains failoiét le nombre de troys cents quarate mille hommes de pied, & vingt feptmille fix cents cheuaux,le relie de l’armée elloitdes alliez. Plineaufsi témoigné en l’hilloire des choies naturelles, qu’apresles nouuelles de la defeente des GauIoys,P.Emile,& C.Attile ellans Confulz, l’Italie lèule mit en armes trente mille cheuaux,& fix cents mille hommes de pied lâns les tranlpadeins, & fecours ellranges. On peu t par celle grandeur d’apparat incroyable côieclurer la puilTance desGauloys.Les Romainsaul fi preuoyans vn peu au parauant le temps de Annibal, la grandeur de la guerre future firent montre en Italie d’vn milion d’hommes pouuans porter armes,cômc le témoigné Diodore,tant de leurs citoyens, que de leurs alliez. A peine toutelfois peut on rien alfeurer de la grandeur des armées Romaines,veu que les plus anciens autheurs varient du nombre,& du gère des gens de guerre. Aucuns ont elcrit que quand la bataille fe donna aux Cannes,les Romains auoient en leur camp quatre vingt fept mille deux cents hommes de guerre. Ny n’ell choie ellrange en cela,fi lors la guerre a elle menée de plus grand effort & violence qu’au temps^palîe , d’autant que le dictateur les auoitmisen elperance de pouuoir vaincre l’ennemy. Au regard du nôbre de toute l’armée de Annibal qui pourlors fetrouua a la bataille,il elloit côme Ion dit,de quarate mille homes de pied, & dix mil lecheuaux.Et quant au nombre des Romains qui depuis le trouueret aux chaps Phibpiques àladernierebatai!IeJPlutarche,& AnnéeFlore,font fort différés entre ceux qu’il me Ibuuiet auoir leu,& qui mettéc le nôbre,recitas
- l’hiiloirc
- p.195V - vue 402/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. iS6
- I’hiftoire d vn dile elegat & graue.Ceux donques, qui font de l’auis de Plu-tarche afferment que Cefàr en auoit vingtdeux mille, & Pôpée Vn peu plus que le double.Mais ceux qui font de l’opinion de Florus, dient qu’il y a eu a vn code & d autre plus de trois cents mille homes de guerre, outre les fe-coursdes Roys;â fin que le Lecteur puiffe conceuoir quelque grande cho-le • De vray fi tu regardes, dient ils, les Chefz de la guerre, tout le Sénat y effoit,fi les armées Cefâr auoit vnze légions,&l’autredixhuiâ: qui edoient toute la fleur & force de la nation Italienne,fi les lecours, du codé de Cefàr edoier.des bandes Gauloyfês,& Germaniques.De l’autre edoient Deiota-re.Ariobarzane,Tarcondimoce, toute la Corinthe, & la force delà Tur-chïe,Capadoce,Cilicie,Macedoyne, Grece, &Etholie,&finalement de tout 1 Orient. Ny ne fut onques tant de diuerfês nations, ne tant de diueiÿ langages de peuples pour ruiner vne fi grande compagnie(comme dit Lu-cain) ny ne vit onques la fortune en lieu du monde, comme dit le mefme Florus,fi grande force du peuple Romain,ny tant de dignité. Depuys eux onatrouuéfoubz l’Empire d'AugudeCefar quarante quatre légions, lef-quelles il a didribué auec vne grand edime par tous les quartiers du monde pour la conferuation & defenfe de l’Empire.le veux fubfequemment toucher deux chofès des Romains,qui ne feront pas de petite admiration aux ledeurs.Ilfutde vray trouué en vne montre fàiteà Rome, l’an fixiefme de l’Empire de Claude Tyberefixmilions neuf cents quarante quatre mille citoyens Romains. Mais pour autant que la chofè fêmble incroyable, i’ay le témoignage d’Eufebe Cefarien au liure des temps, veu qu’au parauant l’an cinquante quatriefme de l’Empire d’Augude il en fut trouué neuf mi-lions trois cents foixante dix mille des citoyens Romains.Par la force def-quelz & lagrauitédescôfèilzlavertu Romaine àedé tenue par toutlerôd delà terre pour inuincible. Au demourantCorneille&Suetonerecitétqu’â la guerre qu’eurent les Iuifz auec les Romains il y fut tuéfix cents mille Iuifz. Egefippe prefque de ce temps la dit au cinqiefme liure que depuis le cômencemét du fiege iufques à la fin il y fut tué vn milion de perfonnes, ôc quatre vingts dixfept mille menez en captiuité .Au forpluslofèphe Iui£ qui eut charge en cede guerre la,eforit qu’il y mourut onze cents milleper-fonnesquedecoup,quedefaim,&quelerededesIuifz ayans diuers trai-étemens furent difperfez par tout le monde.de nombre duquel on dit auoir edédevingtmillehommes.Cecy foffira pour le prefènt en-tant que touche les armées fur terre.Or ed-il certain que durât le Confulat de M. Emilie, & de SeruiusFuluius,le plus noble,lors que la gloire de Rome fêmbloit ia grande,que les Romains eurent vne armée de mer, de trois cents nauires foubz la charge deLu&atiusCatuIusàlapremiereguerre Punique contre les Aphricainsrcontre Iefquelz celle des Aphricains fut de fix cents foubz la con d uite d’Amilcar à l’ifle d’Egufe entre l’Aphriquc & la Sicile.Ie treuue par le témoignage de Homereau deuxiefme des Iliades,que l’armée du Roy des Gréez contre les Troyensa eftéde mille quatre cents nauires, &
- Klz. iiij.
- p.196R - vue 403/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- d’auantage auec pluheurs nobles Capitaines. Ilefttout notoire aufh que Xerxes Roy des Perfes n’a pas feulemétpaflecefl: autre nombre, mais auf h de tous autres,quoy quelesefcriuainsfoient en débat fur cela. Hérodote de vray témoigné que Ion arméeeftoit de trois mille nefs, & quelles e-itoient armées,de deux cents quarante mille hommesjaquelle, comme il dit, a elle renforcée dehxvingtz nauz Turches équipées de vingt quatre mille hommes. Emilie Probe la dit auoir eflé de douze centz galeres,Ief-quelles deux mille marchandes fuyuoient.Orofe de douze centz a efperon & trois mille marchâdes.Fmaiemétluftin en afferme autat,car le nôbre efl d’vn million, tellement qu’a bône caufê on ne peut dire autre chofe, mef-mes encores de l’armée par terre que ce que le Satyrique dit en ces parolles: On croit ïadïs Athos auoir ejléa voiles JSlauigué,mefme dujli tout ce qu’ofe hî Crece JMenteufe en [es hijioyrcs, &MiœJe mejmes naux Pauéefutlameîaux roues foubmife.
- Nous croyons les ruiffeaux profond% eflre tariz Et les rimeres beuésfa v« difné des Medes.
- Et ce que dit Sof rate a aifles d’eau trempées Au demeurant comme Daire fut de retour de l’Europe,en l’Ahe,il dref-fa vne armée de cinq cents nauires d’onr il fit Dann Capitaine general auec Arthaphernes,aux quelzil dôna deux centz nulle hommes de pied, & dix mille cheuaux .Alexandre ht le voyage de lAheauec vne arméede cent quatre vingts deux nauires,qu’aucuns dient auoir efté de troys mille. Cefar palfaen Angleterre auec vne dehuiél cents. Herachan Côteen Aphrique a en cela égalé ou bien palfe les plus renommez, excepte Xerxes : caron le dit auoir eu trois mille lèpe centz nauires qu’à peineon aveu en bien peu de plus nobles &puiflantz.Cômedôquesileufl: prins terre auec Ion armée tirant a Rome,il feipouuanta du rencontre du Comte Marin , tellement que prenant lafuyte, il gaigne vn nauire, &fen fuyt feula Carthage,la ou foudain il fut tué des gens de guerre. Or eft il que le temps pâlie on crai-gnoitle grand nombre de nauires.Et pourtant du temps que Scipionma-moit les affaires de l’Aphriqùe, apres la prinfé de Carthage,il leur défendit de n’auoir point plus de dix nauires de guerre à eux. accordées.Toutlere-Ae de celles quinauiguoient à rames qu’on dit auoir efté iufques aunôbre de cinq cents furent menées quelque peu auantenmer,& parfon cômâde métbrufléesvisàvisdeCarthagei&leurfutce feu autant doloreuxqueh Carthage mefmeeuft efté veuëen flambe. Q/T.Flaminius apres auoir cô-batu Philippe Roy des Macédoniens,ht paix auec luy foubz condition qu’en luy laiffant tât feulement cinquantevaiffeaux,illiureroit le demou-rat aux Romains. Finalement comme Fabius Labeo eut par accord a prendre la moitié des nauires du Roy Antiochus qu’il auoit vaincu, & luy delai fier la moitié,il les coupa toutes en deux moitiez à hn que pour le plus leur, il le priuafl d’armée de mer.
- des
- p.196V - vue 404/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 197
- DES GRANDES PB^)J^ESSES DES GENS
- de guerre tant par met que par terre qu'on recite. Chdp, 2CIII.
- L faut aufsi reciter les proueffes des foldas clignes de renom tant parterre que par mer,car iufques a ce iour la fortune n’a point fa-uorilè les Chefzen les faifànsgrandz,de forte que n’eflans oyfifz &nonchallans ilzayentdomté la fierté du cœur des ennemyz, lefquels quelque fois n’ayans pas moins de braueric & opiniaflreté ont cô-batu & vaincu.Comme donques vn Chef barbare, cruel, fàuuage , braue & épouuentable fefcriafl aux Romains eflansen batailie.-qui elles vous’on luy refpôdit d’vne voix:Les Romains fèigneurs des nations. Alors les ferez vous(ditil)fi vous vainquez. M. Craffus tournant cela a bon heur, affauc les Barbares,& leur abbatit fort leur brauerië,les combacant rudement, la ou Chonidie Centenier n’étonna pas peu les Barbares allez en Barbare, d vne folie toutesfois ayant efficace enuers les hommes de mefmes: lequel portant vn peu de feu àu défias defafalladeabbatoitles ennemysépandât comme d’vne telle ardan te la flambe allumée du mouuement du corps.
- Comme Pyrrhus euft vaincu les Romains en bataille,& eufl veu toutes leurs playes eflre à la poi&rine, & a tous l’épée au poing, & leurs faces en-cores fieres,& par maniéré de dire le courroux en leur mort, comme filz efloient vifzjl drefla(comme Ion dit)!es mains au ciel difânt ainfr.O comme il m’efloitaifé de conquérir l’Empire de tout le mon de, ayant foldas Romains,ou bien moyeflant Roy des Romains .Parquoy comme il eufl: attaché vn tiltre au temple de Iupiter le Tarentin il efcriuit ces parolles.Tay tresbon pere de l’Olympe vaincu en bataille ceux qui au parauant ne le furent onquesauflil’ay ie eflé par eux . Et comme fes compagnons &amys l’interrogaflent pourquoy il fe difoit vaincu,ayant vaincu, on dit qu’il ref-pondit: Siiefaiencores vne telle viétoire,iererournerayfeulala Valonne, ôc fans foldat. Ceft autre cas aufli contre Annibal efl émerueillable a laba-taille des Cannes:car comme vn foldat Romain fufl: tellement bleffé, qu’il ne fé pouuoit ayder des mains,& qu’vn certain Numide le voulufl dépouii lereflantparterre,ill’embrafiapar lechinon ducol, & le tint iufques ace qu’il luy tronçonna des dents le nez &les oreilles. Eleazar a vn grand témoignage de gloyre.-carcomme il vit le plus grand des elephans armé a la Royale,penfânt que le Royy fufl, il marche droitàluy, lefaifânt pour la confêruation defon peuple,& pour facquerir vne gloire eternelle, & pafle d’vn grand courage au trauers du bataillon tuant à dextre,& àfêneflrc. Et comme les ennemys fe retiraient ça & la: il approche l’Elephant & fè iet-tant foubz luy,il le tuë, la cheute duquel le fit mourir enfepulturé foubz fon triumphe.Les en nemyz émerueillez d’vn fi grand fpeétacle de vertu, & ne fiofâns ietter fur luy nud& occupé furent fiépouantez de la cheute de la befte,qu’ils fellimerent inegauz a la vertu d’vn feul.t finalement An-tiochusfils de Lyfiaseftant effrayé de celle vertu demanda paix, accom-
- Ex Mach. li.i.cap.ff.
- "fLa fai&e cfcriture & Iofcphe font d’au-
- A
- tre auis*
- p.197R - vue 405/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- pagné de fixvingts mille hommes de guerre St trente deux Elephans.Par cemoieiiEleazarlailfa lapaixheritieredefavertu, 5c aquit vne eternelle renommée.Comme AnnibaleuR force les prilcmniers Romains de com-batre entre eux,5e que par fortune il en euR liure vn à vn Eléphant auec vn accord d’eRre deliuré fil le tuoit: ce leul Romain l’alfaillant d’vne grande induRrië,le tua au grand regret des Carthaginois. Parquoy Annibal entendant que le bruit de ce combat pourroit caulèr vn dépris, enuoya gens decheualpourle tuer lur fa retraitte.Et combien qu’au témoignage de Tite Liue i entende 5t loye certain que les Gaulois emportent la gloire de la guerre fur tous les foldats des nations Afiatiques, 8c que ie lâche fuyuant lesparollesde Salufte,que la guerre a eRé menée àpeu de gens contre des puilfans Roys,ôt qu’ils ayent louuentesfois foulfert la violence de fortune, & que les Gréez font plus eloquens que les Romains, Se les Gauloys plus auantages du renom de la gloire,nous auonstoutesfois prefques plus eu de triumphes des Gaulois que du rond de la terre,faifans non feulement l’cx-perience de légions à légions,mais aulfi de lahardielfe ôeprouelfe d’hom-meàhomme.CarM.Manlius lèulrepoulfales Gaulois échellans le Capitole à la fouledl fuyuit les armes a l’âge de lêize ans. Il a eu trente fept pre-fêns de les Chefz ayant vingt quatre cicatrices. Au demourant M.Valerc & T.Manliuslèruent d’enlèignement,de combien plus auantageulê elloic la vertu Romaine quelafuriëGauloylèiveu que Valeretuadecôbatd’hô. me à homme le Chef des Gaulois d’vne Rature grande 8c haute,tournoyât de là main vn dard brauement,5e qui par dédain 8c fierte iectant Ion regard partout prelèntoit le combat faucun de l’armée Romaine I’ofoit entrepré-dre auec luy.Comme aulh vne autre Gaulois nud hors 1 ecu , 8c deux épées paré d’vne chaine & braffeHets ou écuRon, 8c qui au demourant eRoit auantagé par fus tous les autres de force, grandeur, ieunelfe, ôehardiefie, felcriaR à haute voix, que fil y auoit aucun qui vouluR entrer au combat auec luy,qu’il le iettaR aux champs. Et comme perfonne n’olâRà caufc de lagrandeur& fierté de l’homme,&quilcommençaRàfe mocquer delaf-fiflence,& en ouurant la bouche tirer lalangueaux Romains. T. Manlius noble, d’ancienne race lé ietta à la campagne, fâché qu’vne fi grande méchanceté auint à la cité,que d’vne fi grande armée perlonne ne fauançafl: ny n’a foulfert que la gloire de laprouefie Romaine fuRtranfferée par ce Gaulois au fiens. A ceRe caulc donques fe confiant plus à fa hardielfe qu’à là rufe,il entre en combat rude & cruel,à la veuë des deux armées combatant iufques à ce qu’il défit 5c trecha la tefie au Gauloys, puis luy oRa la chaine. Son fils aulh tua pendant laguerre conçre les Latins fonennemy l’appel-lant au côbat.Il ne faut pas aufii laifler en derrière la force double du corps & du cœur de Q^Coccius lôldat Romain,lequel fe gaigna le furnom d’Achillespourlerenom delà vertu.Car comme il fuRappellé au combat de deux Bilcains qui font vne nation bien combatant, il en aflailiit, tua, 5c delàrma l’vn eRant homme decheual armé 8c equippé pour le combat,
- voltant
- p.197V - vue 406/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XI. i$8
- voltant & tournoyât tout le camp,auec parolles braues & outrageufcs, corne certain de la vi&oire future. Au regard de l’autre,qui en noblefle,&: har-dieffe furpaffoit tous les autres Bifcains,il ne le força pas feulement de reculer,mais aufli d’auantagedeluy rendre les armes & fa dépouille,â la veuë des deux armées.La proueffe aufli de Volcace fe montra digne de renom es combatz de Cefâr,Iequel auec trois cohortes rompit &repouflâIa légion Pompeiane. Vne cohorte aufli de Cefâr ayant la garde d’vn chafteau apres auoir longuement fbuftenu l’effort de quatre légions de Pôpée fouffrit vne fi grade pluye de fléchés que pas vn deux n’efchappafâns playe,auec ce que E*iii, de-quatreCenteniersperdirétles yeux.Et comme iîzvouluffent monftrer té- ^ oaui“ moignage de leur trauail & péril, ils r aporterent à Cefâr que tréte mille fléchés auoient efté tirées dedans leur fort.Il fe trouua aufli en la légion de Cicéron lieutenant de Cefâr deux Centeniers en perpétuelle querelle, lequel d eux deuoit eilre préféré à l’autrerdefquels 1 vn fappelloit Pulfle, & l’autre Varrene. Auint que le camp fut affailly,alors Pulfle fefcrie:Qifas tu à douter Varrene ? ce iour iugera de noz querelles. Sur fès parolles il fe iette hors le rempart,la ou eftoit la plus grande foule des ennemys. Varrene le fuyt de bien près. Pulfle tuant l’vn des ennemys d’vn iauelot eft affailly de toutes pars,fon écu, & fâceindure font faucez de forte qu’il ne peut déguaigner.
- Son ennemy Varrene y ardue,8c le defend des ennemys. Et comme ils fa-dreflâflèntàluy, il fè trouua bienempefehé apres en auoir tué vn, auquel ainfi enucloppé Pulfle vient au fècours,tellement qu’apres auoir fait grand meurtre iîz fe retirent au camp fains & fâuues.
- Cefâr aufli a eu Sceua foldatde grande proueffe, lequelbleffé à la tefte, épaule,& cuiffe auec vn oeil creué, 8c fôn écu faulcé de fix vingtz coups de dars,âla bataille donnée auprès de Durazo,appelloit les ennemys comme fè voulant rendre. Auquel venans iufquesau nombre de deux, il abbatà l’vnl’épaule,8c fitfuïrlâutrel’ayantfrappé â labouche. Au regard de cc-flui cy il y a diuerfe opinion: Aucuns dient que Cefârluy donna de grands prefèns de deniers, & de grands honneurs émeu de la vertu de luy, ayant fi bien fèruyluy,8c la Republique, par laquelle feule prefque la garde de la porte du fort,d’ont il auoit la charge auoit efté confèruée. Selon les autres ce mefme Sccua â l’abfèncedu Chef, fes compagnons aufli tournansvi-fâige fit fefte â toute l’armée de Pompée : 8c apres auoir fon écu perce de fix vingts coups de dars,il fut emporté par les liens 8c mourut delaifi-fânt la garde qu’il auoit du fort,apres auoir fait des proueffes merueilleufès 8c incroyables.Lequeleftendu mort fèmbloit terrible & redoutable ayant fait des combats excellens en la Gaule, 8c Angleterre toufiours viétorieux,
- & finalement défait parles liens. L.Siccius Dentatus Tribun de la commune feftant trouué en fix vingts côbats,d’ont il a efté vainqueur de huiéfc d’homme â homme, â la veuë des deux armées a receu par deuant quarante cinq playes, & pas vne en derrière, & auec trente quatre dépouilles des ennemys-.ayant aufli fauué 8c retire,comme Ion dit,de la mort qua-
- p.198R - vue 407/480
-
-
-
- .ROBERT VALTVRIN
- torze bourgeoiz: & apres auoir eflé foubz la charge de cêtz dix Chefzd’ar mées,qui par Ton moyê auoiéc elle victorieux, il eut la gloire d auoir eu eu don des hâtes de pointons,bardes,chaînes,bourgeoifès courônesd’or, & muralies,vne pour la garde d’vne ville,auec plufieurs écuffons,& carquoyz Depuis ceflui cy M.Sergius a en fa première & féconde guerre receu fur le deuant du corps vingt & trois pîayes,perdant en la fêcôde la main dextre, parquoy depuis ilfen fit vne de fer.Et côme I’vne & l’autre fuflent ptefque inutiles pour le combat,il a côbatu & vaincu quatre fois pour vn iour de la lî ^^.8* ^neflre j perdât deux cheuaux foubz luy.* Il le fit vne deflre de fer, Iaquel, Adde dex le ayant liée,il a combatu & leué le fiege de deuant Cremone, & a défendu teram Cbi Plaifance.il a prins douze fors en la Gaule.il à eflé prin s deux fois par An-rcam «q" fuyant deux fois lesprifons:combien que durant fa captiuité, iln’ait 8ce. * iamais eflé vn momét fans fer & chaînes.Or a-il eu dons militaires en toutes les plus rudes guerres que pour lors les Romains ont eu .Il à rapporté des coronnes bourgeoyfes du lac de Perouze,de laTrebe,& du Tefin, & afeul receu coronne de la bataille aux Cannes,de laquelle f'eflre fauué a eflé vne euure d’excellente vertu. Cômeautempsdu ConfuIatdeFlaminius An-nibal l’éguillonnail à la bataille par le degafl despaïs circôuoifins, l’ardeur de combatte fut fi grand d’vn coflé & d’autre,que les combatas ne fapper-ceurentpoint d’vn merueillsux tremblemet de terre,qui pour lors fut allez Eme d ‘ ve^ement pour abbatre villes,tranfporter moataignes,& rebroucer riuie-cx PL lib. res* On dit qu’Ariflomenes MefTenien a tué quatre céts Lacedemoniés, & i i.ca.3 7. que prins il fefl fauué par les carrières fuyuant les coulées des renars: lequel de rechefprins,&eflans les gardes endormies fefl roulé iufquesaufeu, & abrufléles liens auec fon corps. Finalement les Lacedemoniens l’ayans prins pour la tierce fois fouurirent, & luy trouuerent le cœur pellu.
- Comme les gens de Cefar fefufFenttrouuez en vn certain lieu marécageux,auquel aufsi arriuerent les e-nnemys en vn mcrueiiîeux nôbre, & que la fêfifl le combat â la veiië de Cefar,vn certain foldatdes liens appellé Se-uola,fè ietta au milieu d’eux faifant beaucoup de proueffes,& fèul i’arreftat court,il receut vne infinie multitude de dars tirant aux ennemyz vn nôbre de dars fufFifant pour cinq foldas à combatte tout vn iour , & en mettant la main à l’épée il repou ffe d’vn combat incroyable les plus hardis des en-nemysy arriuansàlafoule.-finalement eflant frappé d’vniaueloC, & d’vn coup de pierre , il a ramené les fiés fains & fàuues apres auoir dôné la chaffe aux ennemys. Au regard de luy eflant échappé deux tous,il fê ietta mal en-uis dedâs le mares limoneux,lequel partie en nageant.partie cheminât il a â peine trauerfé chargé de deux cuiraffes, & ayant fait perte de fon écu. Et comme Cefar fémerueillafl Iereceuant àgrandioye,& cry afôn armee, ilfe ietta trille au pied de Cefar luy requérant pardon de laperte de fon écu. Et lors luy fut donnée la charge de Centenier. La gloire dufoldat Cynegyred’Athenesaeflé en grand renom par les hifloires, car outre les grandes tueries faiétes csbatailles,comme il eufl donné la chaffe aux ennemys
- p.198V - vue 408/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. w myz iufquesaleurs nauz, il en arrellal’vne chargée de la main dextre, ny ne l’abandonna iulques a ce que la main Iuy fur coupée Apres laquelle ab-batuëil accroche le nauire a la fenellre, apres laquelle aufsi perdue il afi-nalement prins au dens le nauire,& fut fa vertu, comme Ion dit, que fans fe fafcher de tant de playes, ne vaincu pourla perte de fes deux mains, que comme vne belle fauuage, & enragée,il n’ait finalement côbatu des dents. On dit que M. Attille a elle d’vne mefme côllance à la pourlîiite des enne-mys, non pas qu’il full foldat des Marfelliens comme le dit Lucain, trop bien de Cefar,ainfi que les autres le dient, melrnes autheurs bien renommez.Car comme en vne bataille fur mer près de Marlèilles,ileuffcietté la main dextre lur la poppe du nauire ennemy, & quelle full coupée par les Marfelliens, il le iette dans le nauirel’arrellant fi longuement delà main fenellre iufques à ce qu’ellonnant les ennemyz decharefiere, ôc les tuantil le conquit, & mit à fond apres ellre conquis. En quoy il a autant fait que Cy negyre que la Grece tant pleine de langage a éleué iufques au ciel.
- COMPARAISON DE LA GtOIR^E auecle parragon & excellence des Chefc. Chapitre. XII1L
- ’Orelènauatnousaioulieronsaux choies fufdi&es quelz homes ont elle les plus nobles & ont de leur pouuoir vuydé de grandz affaires,à celle fin que l’honneur loit rendu aux defirans la gloire -------& alpirans à grandes chofes. Maispourautant qu’en c’elle maniéré de grandes choies on a de coullume de prendre egard a l’experience de la guerre,à la vertu,a l’entendement,& a la façon de viure,aux forces-, ôc alafortune:quelques Chefz &Roys du temps palfé tant de nations ellran-gesque des nollres lèmblent fort de prime face ellre en ces choies d’vne comparailon mutuelle entre eux femblables.Par ce moyen ellans alfeurez de l’auis des anciens, nousnelomnies pas ignoras que Thefée a coutumièrement elle comparé à Romule:CamilIe,à Brute:& à Brute, Dion: Lycur-ge,à Nume:a Marcel,Pelopis.-Pericles,àFabimà Qjiufsi Fabius Maximus Iafon le Pherée:Themizô,à Temillocle:à Allride;Eumene:Luculle au Ser-torin & aSymon : combien que de ce Luculle ie treuue ces choies eferites parEfchilus:Qiiel homme luy comparerons nous aumellier de la guerre? Quel luy baillerons nous en telle?qui a iamais elle Ion lèmblable? veu qu il loit certain qu’Anthiochus lephilolophe graue aeferit que Luculle a eu la plus grande viétoyre de lès ennemys,quele foleil ait iamais decouuert.il cil tout manifelle que Phocion a elle Chefd’armée par quarante cinq foiz fans iamais fellretrouué aux ele£lions,ellant toufiours éleu & appelle en Ion abfence.Parlâ donques peut on facilement conieclurer quant grand Chefil a eflé.lllèmble que nature a expérimenté,ce qu’elle auoitde forces en Alcibiades home d’vnvif entédemet,de grand conlèil, d’vne éloquence finguliere,d’vne belle taille,de grand pouuoir,d’vne excellence de vertu
- p.199R - vue 409/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- & noblefTe,& d’vnefupreme puiftanceSc gloire en l’art militaire. Il eft de vtay manifefte a tous ceux qui ont efcrit de luy,qu’il ne futonques chofe fi excellente que ce capitaine, veu qu en luy toutes les commoditez de lame & du corps,&de fortune femblent entre elles debatredela preexcel-lence.Sion veultpefer la vertu du Thrafibule à par foy, fans l’heur de la fortune ,ie fuis en doute fi ie le doi point preferer a tous. Cela tien iebien pour certain que nul en foy,conftâce,grandeur de cœur,& en affection au pais deura eftre préféré à luy .Car en ce que plu fleurs ont voulu, & qui eft auenu a peu d’hommes de deliurer le pais d’vn Tyran, il eft auenu à c’eftui cy de le remettre de feruitude àliberté eftant foulé de trente Tyrans. Iphi-crates n’a pas tant efté renommé ne mis au nombre des excellens Capitaines pour les grandzfaiélz & proueffes de guerre,que pour l’intelligence de fart militaire.il a efté de vray tel Capitaine qu’il n’a pas feulement efté digne d’eftrc accomparé aux Chefz de fon temps,mais au queld’auatage nul des anciens doit eftre préféré : car il a efté fouuent éleu Chef & Capitaine fans iamais perdre bataille par fa faute,eftat d’vn confèil inuincible,auquel il a efté fi excellent,que comme il ait inuenté beaucoup de choies en l’art militaire,il a aufsi rendu meilleures beaucoup de chofès iainuentées. Ly-fandre Lacedemonien a laide aux prefens & futurs vn grand renom de Ca pitaine& Chef, acquis touteffois beaucoup plus par fortune quepar ver-tu.Thymoleô de Corinthe doit fans douteicy au iugemét de tous eftre re-ceu pour grand,car a luy fèul eft auenu (ie ne fây fi a autre ) de deliurer fôn pais foulé par vn Tyran & d’ofter àSarrragoufe vue inueterée feruitude ,& de remettre à fôn arriuéela Sicile en fon premier eftat eftant tormétéelôg téps de guerre par les Barbares. Et corne il fuft tübé en vne grofle aduerfité, ila(ce qu’on eftime bien difticille) porté plus fagement la bonne fortune que la mauuaife. Le roy Argelm,& Mezence dédaignant les Dieux corne qui ne demandoit pas feulement les honneurs deuz aux hommes,mais auftiaux dieux,foffre par vn témoignage d’vn excellent autheur en ce par-ragonnage des Capitaines de renom, & non fans propos, car finous con-fentons à Ouide:
- » Or notable &hardy fut en armes Mezence,
- 3> A chenal,ou à piedjur tous eufl l’excellence.
- Nous liions que Cyrus a efté fort renommé par les louéges des Gréez d’autant qu’eftant allé cercher la guerre, il a réduit l’Egiptea fon obeiffancc, & conquis tous les peuples & nations qui font depuis les limites delà Syrie iufques à la mer rouge. Les proueffes aufsi d’Epaminôdas font par plusieurs preferees aux vertus de tous autres. Car il eft certain que les Thebes auant la naiffance de ce Chef ,& apres fon trefpas ont toujours eftéfôubz l’obeiffance d’autruy,& qu’au contraire il ne fè trouuera homme qui nie quelesThebains n’ayentefté le Chef de toute la Grece, tant qu’lia eu le gouuernementde la République. Parquoy on peut bien entendre que ce fèul Chef valloit mieux que toute fa cité tant noble, veu mefmement que
- p.199V - vue 410/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XL 200 lesThebeins outre leur fêruitude ont apres là mort fait vne fi grande perte qu’ilz ne lèmbloient pas feulement auoir perdu leur Chef 8c conleruation, mais aufsi ellre lors tous entièrement perduz auec luy. Et combié cjue par la poëfie de Homere,ce côbat mutuel d’Achilles 8c dé Heélor pour le fang & laviefoit manifelle 8c notoire,cju’ilzappellent (monomachie) combat dh omme ahomme,& que Heclor ait eu par fur tous autres celle vertu qui nousfurpalïe,heroique 8cdiuine, d’ontilnelêmblepas ellrefilzd’homme mais de dieu:toutesfois Achilles qui a vaincu Heélor doit par railon ferm Lego ma -bler plus grand,tant en forces qu’en cœur,qu’en diuinité,& qu’en louenge lor Pro mi deproueffesiveu quec’ellvn los paternel,& no pas heroique,lequel tu trou n ueras ainfi efcrit en vn tableau d’orîSi d’Achilles tu quiers le cœur,guerres, Duxi jc. & force. Plus que de Heélor eftoit grande Ion excellence. Tu verras aulïi gcdûchat au témoignage de Dares deTroye,hilloriographeTroyen qu’Achilles a p’aproca' elle de plus grade force 8c vertu que Heélor.Homered’auantage le dit dû-fcëdu de Iuppiter,& filz de Thetys,aulîi font tous les autres poètes fans cô~ trediéldelquelz dient leshômes d’vne excellente façon de vie,& vertu,non feulement ellre de la race des dieux,mais d’auantage ellre faiétz dieux. Et fi par le melme Homere Nellor eflloué iufques au ciel en fens 8c bône grâce, que le nom rende louables entre les leurs, les Atrides, 8c les Aiaces emeuz de furie,& Vlixes cauteleux, 8c rule, 8c que la Maratone donne los à Milcia-des,les Termopyles àThemillocles, 8c que Homere &Maro facentle fèmblable,non feulement aux Chefz Barbares, mais aufsi au Gréez 8c Latins en leur eltablifïan t vn Roy,d’ont il n’en fut onques vn autre plus iulle, ne meilleur aux parens,neplus grand àlaguerre.Si finalemëc tout ce qu’on trouue louable des autres nations elloit mis en vn,tout celTera au pris des Romains & de la nation àlongz manteaux. Et pourtant ilz fentreuuent qui lôntd’auis que Brennus doit a bon droiét ellre loué en grandeur de cœur, 8c gloire de prouelTes,d’autant qu’eflant accompagné dé Gauloy s Se nonoyz,il a prins Rome capitale du monde par force, 8c qu’il a alTailly les Romains comme gés fans refiltance,&: les a de forte défait, qu’on faudrait bien a reciter vne lemblale defaiéle de la force Romaine, encores que Rome d’auâtage n’eull point elle brullée:mais aulïi ont ilz ellé tout ainfi vain-cuzqu’llz ont vaincu & du tout exterminez parle ChefDolobella,de forte qu’il ndlrefté aucun de celle natiô la qui fe glorifiait auoir mis le feu dâs Rome.Les gellesdeHannibal ne font pas petitz,ne des derniers, car il fut fait Capitaine general ayant moins de vingt & cinq ans, & a es troys premiers ans mis à fon obeilfance l’Elpagne Martiale,& noble en gés de guerre^ vraye pepiniere d’armées.Il a aulïi prins par force Sagonthe ville tref forte amie 8c confédérée des Romains, 8c la ralee. Il a drelTé troys grofïes armées, d’ont l’vne demoura en Efpagne auec fon frere Hafiïrubal, l’autre futenuoyée en Aphrique, menant la troifielîne en Italie, auec laquelle il a pâlie les mons & bocages Pyrenez, renuerfant comme foudre toutes re-fillaces,& fell hallé daller bruller 8c ruiner l’Italie,làns drelTer fon chemin
- Ll.ii.
- p.200R - vue 411/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- quafeu&àfang.Etcommeilfull arriuéaux Alpes qui lêparent la Gaule del’ltalic,&qu’onques autre auant luyn’auoit paffé, excepté Hercules le Grec, & que les Gaulois montagnarsPefforçalTent le garder de pafTer:les ayant finalement repoufle à force d’armes, il a fi bien drelfé le chemin fut ces montaignes rudes,inaccefiibles,& mal aifées pour les froidures,en caf-fântIesrochesàfeu,&àpic,que lesElephansy pouuoient cheminer auec leurs chargesrcombien qu’au parauant à peine y pouuoit grimper vn homme (ans armesrquieftvn cas d’ontil nefeft pas procure petite admiration de vertu,ne peu de foy d’immortalité.Par la donquespalfant fon armée il entraenItalie,&acombatuaupresduThefin aucc P. Corneille Scipion, auquel blelféildonnalachalfe & le fauuavnfien ieunefils.Ilaaufsi défait auprès de la Trebie Tyberc le long ( comme dit Probus ) collegal de ceft autre Scipion, ou bien Sempronius félon Tite liue, auec vne grande defai6ledeRomains.ila de rechef combatu auec luyau près de Plailance, la ou le combat fut egal,& la retraite auec égale perte, combien que celle des Romains fuit plus grande non pas en nombre de gens,ainfi que recite Tite Liue, d’autant qu’aucuns de l’ordre des cheualiers aucc aufsi des Tribuns militaires,& Capitaines y furent tuez.Hannibal glorieux de tant d’a-uantures bonnes &plailântes prend grande confiance, & elpere bien de fônentreprin(è,&depuis paflantl’Appennin par le pays des Geneuois,il tireà!aTufcane:auquelvoyageilfutfi malade desyeux, que depuis il ne faydaiamaisfibien de l’œil dextre. Il fut toutesfois porté en litiere pendant qu’il eftoit ainfi fort malade, & a par vne embûche tué le Gonful C. Flaminius, hommed’vn efpritbeaucoup plus bouillant, qu’il n’eftoit de befoing : le furprenant auec fon armée près le lac de Perouze : Et bien toit apres C. Centenius le Prêteur tenant les boucages auec vne armée de gens d’eliéte, lâou il mourut en bataille quinze mille Romains tous d’elide, comme dit Tite Liue. Les autres font d’autre auis,car ie treuue es aucuns le nombre de vingt mille, &que des ennemys il n’y en demouraque quinze cents .Voy ci vne autre pelle de la Republique Romaine. Car comme partant de lâil fuft arriuéaux Cannes,& queles deux Confuls ClaudeTercn-ce,& Varron auec Paule Emillelè fufient prelêntédeuantluy, Varroau-theur temeraire de la bataille fit premièrement vne fuyteinfame,a laquelle ne luy firent compagnie point plus de cinquante cheuaux.L’autre Conful homme de bon fens mourut au lid d’hôneur,&; auec luy deux Quefteurs, dixneuf Tribuns de gens de guerre,quelques Confulaires Prêteurs, & Ediles^ au furplus quatre vingt Sénateurs. Au regard du nombre du relie des tuez,on en a parlé diuerfemét,d’autât qu’il ell certain qu’il y demoura qua-f Ex Ti- rate mille homes de pied,& deux mille fèpt cents cheuaux. Aucüs affermét le -LlUùàm cîueceux ^ n’eftoient que legionaires de pied & de cheual,& que le nom-maionscia kre ^es autres bourgeois & alliez eftoit aulîî grad. Et corne quelques iours dis quant apres il retournai! a Capouë, qui luy fut, comme il ell commun, t de plus cinTr gr^nd dommage que ne furent les Cannes aux Romains, Q^Fabius Ma-
- ximus
- p.200V - vue 412/480
-
-
-
- 201
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. mus luy fit tefteen lacontréedeFalerne, laou Hannibal eftant enclos en des detroiétzfe fàuuala nuiclfàns aucune perte de Ton armée. Il amufà de vray Fabius, quoy qu’il fuft vn Capitaine bien rufe-.car comme la nuiéi fuft obfcure, il mit le feu au farment liéaux cornes des aumailles, & en ietcavn grand nombre aux champs. Pour lafcmdaine veuë defquels,Ia peur fut li grande dans l’armée des Romains, qu’hommen’ofbitforar du fort. Quelque peu de temps apres il donna la chajOTe àM. Minuce Rüffe Conneftable, & Dictateur, l’ayant de rufè attrait a la bataille. T. Sempro-nius Gracchus Conful pourla féconde fois, a efté tué es pays Lucaninspar fùtprinie àl’abfénce de Hannibal. Il a aufïï de mefme forte tué M. Claude Marcel Conful pourla cinqiefme fois au près de Venufie. Et comme fi-nalementil fuft approché les portes de Romepour allez tardleuerlefie-ge des Romains qui preffoient Copouë affeant fon camp à trois mille de Rome, au près de la riuiere d’Aniene,il ietta féul dedans les murs vn poin-ton . Et comme les Confuls indignez que cela luy fuft loyfible fuftent fortis, & que d’vn cofté & d’autre on fé preparoit à la bataille, vne grefle foudaine auec vn tonnerre venant du plus haut delà montaignedu Capitole auec vn orage de vent contre la face des ennemyz, donna empef-chement. Ce que comme fuft auenu à deux effays,on dit que Hannibal éperdu du miracle dit, que l’entendement et la fortune luy defail-loient pour prendre FvOme: combien qu’au parauant ayant longuement couru l’Italie, perfonne ne luy auoit refifté en bataille, ny apres la defaide des Cannes tenu la campagne. Apres ces proueffesfaiétes au degaft de l’Italie, Scipion qui premier fut dictl’Aphricain vengeant les miferesdefon pays par celles de l’Aphrique a eu le pouuoir de le retirer de l’Italie, & d at-traire a la guerre, & vaincre fi hardy ennemy, mefmes celuy qui auoit chafféfbn pere près le Tefin. A laquelle guerre pour par apres mieux côba-tre eftanspreftz a la bataille, ilparlamenta pour la paix. Et comme ils ne peuftent accorder des codifions, les trôpettes fonnerent,Ia bataille fé donne qui fut la derniere : en laquelle onn’euft fceu dreffer meilleur ordonnance , ne combatre déplus grand effort, comme le vaincu le confeffe du vainqueur, & le vainqueur du vaincu, eftant l’vn & l’autre de grand iuge-ment en telles chofés: à laquelle Hannibal fut vaincu ôcfiabbatu qu’on-quespuys il ne fe remit fus: tellement que l’Aphri que fut à Scipion le pris delà victoire. Quel donquesde ces deux Capitaines deura eftre préféré? leiquelz, comme dit TiteLiue, ontefté les plus grands nonféulement de leur temps, mais auffi de tout iamais égaux àtous Roys & Capitaines de toutes nations, ou bien comme dit Florus, de tous Chefz qui aupar^ ug0 ge-auant & depuis ont eftéles plus renommez, hors les maifacres qu’a faitncris Pro Scipion efteignant & perdant la plus grande partie du genre humain, fcc-cnî* comme il le témoigne de foy dedans Ennius.
- Ll. iij.
- p.201R - vue 413/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Si la deffaifle d’hommes au ciel les hommes forte3 moy feul efl du ciel ouuerte la grand forte.
- Ce feul à\Ôc fuffira pour l’intelligence de la grandeur de ce Capitaine. Orfileftvrayceenquoyperfonnenedoutequelepeuple Romain prend comme fienne lexcellence au faid delà guerre parfus les autres, & quil fôit notoire que Hannibal la peut vaincre,il fembleconfèquemment que de tant plus Scipion a non feulement furpafféceftuy cy,mais aufsi tous Capitaines de tant que le peuple Romain, & Hannibal de Carthage font plus excellens en gloire de proueflès:ce que meftnes Hannibal fi grand en-nemy ne niëpas.Car comme en Ephefê la ou ils f eftoient trouué,l’vn pour fon refuge eftant vaincu, & l’autre tenu a Antiochus ambaffade des Romains,Hannibal eut le premier prins le plus honorable lieu enfeproume-nant,& quel’Aphricainlefbuffritfipatiemment,queleurproumenement fuft fans débat, & que le propos fe fuft fubfèquément dreffé entre eux tou-chant l’excellence des Capitaines, & que Scipion luy euft demandé quel Capitaine luy fêmbloit le plus grad de tous ceux qui ont efté,& qui iufinies à ce iour eftoiec encores en viedors Hannibal afferma Alexâdre fils de Philippe,& Roy des Macédoniens auoir efiéle premier. Et comme Scipion le requift de dire le fêcôd, il mit en fuyte Pyrrhus Roy des Epirotes, rendat raifon autant del’vn que de l’autre. Et comme finalement il fenquift du tiers,fè fuis ie fans point de doute.Lors l’Aphriquain luy dit en riantrCom-bien t’eftimerois tu Hannibal, & de quel lieu digne,fi corne moy tu euffes vaincu. A lors il dit: le me fuffe préféré aux Capitaines non fèulementdu tempsprefênt,maisauffidetoutîetempspaffé detous peuples & nations. Par laquelle reponfe il cft certain que Hannibal côfeffoit Scipion ineftima-ble,& qu’on doit préférera tous Chefz & Capitaines.Commeaufsilepro-posfè dreffaft du plus excellât des Empereurs,Seuerus fèptimus Empereur de renom préféra par vn mefme moyen, Augufte, Vefpafian,Tite, Traian, Pie,& Maximus,difantles autres effeminez,& veneneuz, & amerueilleufè-met aymé entre les Hiftoires celle de Hannibal, de Marius,Camillus,&Q^ Marius Coriolanus,& les a eftimé dignes de grade louëge & lieu.Mais corne on luy requift fon auis touchât les deux Aphricains,on dit qu’il répom dit, qu’ils furent plus heureux que vaillans,ce que témoigne leur vie priuée, & leur ieunefle qui ne fut ne del’vn ne del’autregueresde bonne grâce en leurpriué.lleft tout notoire que Scipion Nafiquen’a pas acquis moins de los& gloire en fon repos & paix, parles anceftres qu’ont fait les deux Sci-pions parleurs guerres & armes. On dit que commeàvnedemandecp’on fit a Antigone quel Chef luy fêmbloit plus excellent de tous, il répondit: Pyrrhus, comme le plus mettable Capitaine de fon temps fil auiel-lifioit.Mais combien qu’il le préféré feulement â ceux de fon temps, le renom toutesfois eftaffez certain entre tous les autheurs au témoignage deluftin que nul Roy de fon temps ne du pafféa deu cftre comparé à Pyrrhus, ny n’a eftégueresveu non feulement entre les Roys,mais au fi
- p.201V - vue 414/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. i0a' fi entre les hommes de grand renom homme d’vne vie plus fainéte, ne de meilleure iultice.Au demourant le làuoir de l’art militaire a elléfi grand en luy,combien qu’il ait mené la guerre auec Lyfimache,Demetrie, & Antigone Roys fi puilfans,il a eftétoujours inuincible, ny n’aiamais eûé le plusfoiblees guerres de la Sclauonie,Sicile,Romaine, ne Carthaginoilè, citant le plus louuent victorieux,& quiparlerenomdeIêsfaiétz,&gIoy-redefonnom a rendu fon pais renommé,ellant au parauantpetit,&: inco gneu . De vray, il elt fi certain,qu’il a efté le plus Martial de tous les Roys, que corne les autres hommes ayent de coutume de côbatrepourlagloyre, pour l’empire,pour leur cô!eruation,&pour les outrages,il cÔbatoitpoiir l'on plaifir,ny ne luy elloit point fi grad de l’Empire que de la guerre.Ioint qu’il elloit bien aprins au mellier d’elle pour la conduiéte d’vne armée, la mettre en bataille,de bien affoir vn camp,gaigner les cœurs des hommes, qui elt vne choie de grand effeCt,autant en paix qu’en guerre. Au demourant il eftoit beaucoup meilleur a la guerre, & a victoires qu’il n’eftoita garderies guerdons d’elle. Au regard de ceux qui donnent celle gloyreâ Alexandre Roy des Macédoniens,ilz ne le lèmblent pas faire là ns propos, neaufii auec peu de raifbn.Car ce Roy, & Empereur a couru tout le monde auec beaucoup moindre armée qu’il nell croyable, ôc a défait & alfub-ieCti infinies nations. Or ellant déclaré Roy des Macédoniens à l’âge de vingt ans,& ia duiCt a la guerre apres auoir donné ordre â la Grece, & â la Sclauonie , ôc apres ellre palfé en Afie, il défait premièrement Darius grand Roy de Perle,puysloudain apres auoir mis en Ion obeiffance la Phri gie, ôc Paphlagonie, il effc entré en la Cilicie par les detroiCtz, ôc chemins perilIeux,laquelIeIôudainepouuantéefitobeiiranceâfa viCtoire.Ce pendant Darius apres auoir fait armée de fix cents mille hommes de pied, ou bien de trois cents (comme il lêmble à d’autres) ôc cent mille cheuaux , ôc les auoir mis en ordonnance,fut vaincu en la bataille donnée entre les de-troi&z de Cilicie,la ou ellant chalfé il le retira de vitelfe ayat perdu quatre vingt mille hommes de pied,& dix mille de cheual,& quarante mille priz, Ion camp pillé auec la prinfe de là mere, là femme,& de toute là famille ôc racerqui fut vne victoire glorieufe à Alexadre,auquel de la failànt fon voya ge à Damas,les ambalfades des nations voifines vindrent le rendans eux ôc leurs villes,tellement que la Syrie, Phenice, ôc Sidon auec les ifles maritimes luy obéirent. Au regard de Tyrus prinlè par force,la vertu ôc la fortune la luy liurerér. Tenedos alfiegée quelque temps luy fit obeiIfance,vaincuë parle moyen d’vne armeé de centfoixante vailfeaux. La ville de Gaze fut forcée,& y fut tué dix mille hommes. L’Egipte a fait iou aux armes viCto-rieufes,aufii fit Cyrene. Ce domteur de nations tourna Ion chemin au te-ple de Iupicer Hammon, qui faignoit ellre fon pere par pais defers, ôc bru^ lezdufoleil,duqueîrcueuantilvoulutquonlecreüllellre nayde race di-uine,ne le contentât pas de là condition mortelle:Et depuis Ion retour il e-difia vne ville,laquelle il appella de fon nom Alexan drie. Et de la il tourna
- Ll. iiij.
- p.202R - vue 415/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- fes forces contre Darius,lequel eftoit venu auec vne grolfe armée à Arbel-le bourgade fans renom,& depuys fort renommé pour la defai&e des Per-fesdâ ou eftâs les forces & la fortune égalés,Alexadre demoura vainqueur, d’ont il feft ouuert le chemin d’Grient, tellement que les nations prochaines de la Perfide, & Babyloniens firent fon vouIoir.Et depuis prenant Ion chemin au Septentrion par voyes inaccelfibles, & mons haults à merueil-les,il a défait les Parthes & Hircanins.il afubiuguéle mont Caucafus paf-lântaudela,autrauaildeluy &des fiens,aufiia il lamerCafpie, ruinant tout.Il a roddé auec fon armée au tour de lariuiere du Tane,&des Scythes, ioint qu’il a tenu vne partie de l’Europe fur les limites de l’Afie auec la ri-uiére d’Idafpe. lia aufli vaincu d’vne bataille terrible Pore, le plus grand Roy del'Indie,pour luy auoirofé donner empefchemet: lequel toutesfoiz impatient de fa defaiéle,de forte qu’il ne vouloit prendre repas ny remede a fes playes comme délirant mourir, Alexandre fefiouiffant de celle grandeur de cœur a receu en amitié & la forcé de rcgner auec gran dz honneurs. Jlya outreplus plufieurs autres batailles données auec aucuns Roys& nations effranges,le long des contrées fpacieufès des Indes toutes renômées pour leurs viéloyres, tant parle témoignage des Gréez,fauorilàns àla gloi redes Parthes au dépris de celle des Romains,ou bien par celuy de quel, ques Gauloyz volages,que l’enuie & hay ne contre les Romains a tou fiours pouffé,&:nonpasvneaflFeâ:ion,ne lafoy de la vérité, ne finalement quelque amour entiers Alexandre-.tellement qu’on a fémé qu’il auoit tournoyé éefeigneurié tout le monde. Laquelle opinion il faut retrancher pour autant qu’aucuns en ont lafantafie,& de tant plus que quelques hifloriogra-phes mettables fêmblenteftre de ceffauis. Premièrement donquesietou-cheray entre autre ce diél d’Anneus Seneca,touchant Alexandre ayant corne ie penfè oublié,quoy qu’il fuff d’vne excellente memoyre vn autre pafi-„ fage & dictdefèsgeftes.- Vnefuriéjdiâiiljpoufroit ce malheureux de ruiner „ l’autruy,& l’enuoyoït es côtrées incogneuës. Eftimes tu celuy eftre de bon. „ fens qui d’entrée commence a ruiner la Grece, en laquelle il a efté premie-rement inflrui&îqui rauit ce qu’vn autre a de meilleur ? Il a réduit Lacede-„ mon en fêruitude,mis en dépris les Athènes, & non content de la ruine de «tant de citez que Philippe auoit vaincu ou défait,il les épart ça & la,& me-„ ne la guerre partout le monde.Ny ne farrefle nulle part celle cruauté pour „ là lafTetéàla façon des cruelles belles fàuuages,qui tuét plus que ne requiert „ leurfaim.Ora-iliamisen vn plufieursRoyaumes. laie craignëtlcs Gréez „ & les Perfes.Iaaufsi font foubzfoniou, les nations miles hors lapuilfance „deDarius, & elltoutefois en indignation quelaviéloirefincline dutrac „ de Hercules & de Liber au delà de l’Occean & du loleil. Il veult forcer la „ nature.ll ne veult point marcher , aulfihe peut il farreller,toutainfi que „ les choies pefantes iettées contre bas,aux quelles la fin de leur mouuemét ,, ell d’ellre à repos. Ic m’elmerueille toutefois comme vn fi grâdperlonna-ge ait tenu ceproposiaufsi ne fay ie pas moins de cell autre de Iullm difant
- p.202V - vue 416/480
-
-
-
- - L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 2.05
- ïln eft pas certain fi c’eft choft plus admirable d’auoir vaincu tout le rond de la terre,que de rauoiroféentreprendre.Et combien que ces choies foiéc manifeftes,ce propos toutesfois contenu en la cité de Dieu, ne le doit pas eilre moins.Quoy que ceftui cy (dit Saind) Auguftin ou Trôgus ait eferic auec aufsigrade foy desgeftes qu'on voudra(i’ay aioufte Seneca que nous auons ditjleshiftoires toutesfois plus dignes de foy les montrent auoir menty.Veu qu’il n’eftiamaisalléenperfonne, ne lieutenant pour luy, 8c encores moinsvaincuRome,quiiacommençoit a florir , ou bien aucune lifiere de l’Italie,ne aufii la Germanie, ne l’Angleterre, ne l’Elpagne, nela Gaule,ne l’Aphrique.Qu’a-il doques faitfll a tiré àrOrient,& l’a fubiugué vaincant comme le témoigne ion oncle Alexâdre Roy de l’Epire vne partie du monde la plus aifée à vaincre: ce que iouuét autre part le mefmeau-theur repete:& à fin que i’vié des mefines parolles de Q^Curce rendant ce Roy la glorieux de fonftile.Ua couru paria victoire toutes les nations de-puys le Heleiponte iuiquesàl’Occeane,& commedit Seuere, il a étendu fon Empire depuys la poinéte de Turchieiuiques aux limites de l’Orient. Combien qu’il eil certain que courroucé a Carthage par fiir toutes autres villes,il les menaçoit d’aller enAphrique apresauoirconquisl’Afie,pen-iàntparauanturepaiferdelaà Calis&enEipagne,&iubièquemmét faire fon retour en Macedoyne, & l’Epire par les Gaules, Alpes, & Italie. Finalement n’ayant encores aifailly l’vne au l’autre portion,il eft allé de vie à tref-pas,ny point autrement,comme dit Seuere, redoutable qu’en fa Babylone & Parthie:
- Carfi a fon Vouloir le monde luyferuoit
- D e ris comme ilpenfoit fil ae fié créé
- Pour inutile exemple.
- Toutes les fois que la diieeptation aeité grande entre les plus lâuans touchant l’excellence entre ceft Alexandre, d’ont, nous parlons, & Philippe fon pere Roy des Macédoniens, combien aufsi que chacun deux a leur iü-gement ie puiife defendre de les proueiTes.il n’y a toutesfois point de doute que Philippe n’ait elle vaincu par Alexandre en vertu, magnanimité, magnificence,foy, en modeftie,enproueiïe,& gloire :& luy par Philippe en gratieufeté,humanité de conièilz, prudëce, iobrieté,viuacité d’entëdemét, & finalement en éloquence. Et combien qu’Alexandre au diéfc de; luftin Toit le plus renommé des Roys,Tite Liue toutesfois dit qu’il eft encores ré-du plus glorieux de ce qu’il aeftélèul,&ieune,&qu’il eft mort n’ayant encores expérimenté la male fortune. Au regard de Philippe perc d’Alexandre,'Theophrafte le dit auoir efté plus grand,& plus modéré que les autres Roys,nonlêulement de race & dignité Royale,mais aufti en fortune.il en eft qui font d’auis qu’en cefte gloyre d’Empire Cneius Pompeius doit eftre préféré à tous autres pour les chofes qu’il a fait d’vne fupreme magnificen-ce.Son Empire de vray a efté grand & fort glorieux.-ce qu’au parauant n’eft point auenu a aucun Romain en ce qu’il a triumphçpourla troifiefmefois
- p.203R - vue 417/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRI N
- delà tierce partie du monde. Car combien que trois ayent triumphé de l’vne de ces parties, il a toutesfoisfemblé aucunement auoir triumphé de tout leronddela terre,en triumphant premièrement de l’Aphri que Secondement de l’Europe, tiercement pour le dernier de l’Afie. Quant aux diuerfitez des nations d’ont il a triumphé à part, on le pourra conoiftrc par ces choies fubfequentes . Les noms de vray de ces régions la eftoient telz.Le Ponte, l’Arménie ,1a Capadoce,la Paphlagonie, la Medie, CoL chis,L’iile Hyberic, l’Albanie, Syrie, Meiopotamie : outre plus les Iuifz qui habitent au près de Phenice, la Paleftine, & les Arabes. Il a auifi édifié vne ville de Ton nom es parties d’Orient, & des Ciliciens, & Iiàures entre la Cilicie&Ifaure, apres auoir défait les pyrates ôc écumeurs de mer. Au nombre deiquels auifi on comptoit ces huid cents ioixatefeize chafteaux par les trophées qu’il à planté aux montz Pyrénées, les ayans réduit foubs fapuiflance depuis les alpes iufques au cul de l’Eipagne, & prefques neuf cents citez, huid cents nauz pyratiques .Les captifz princes de pyrates menez en triumphé; & Tygranes d’Armenie, & ion fils auec la femme, & fille du Roy d’Ariftobole Roy des Iuifz, la feur de Mitridates auec cinq de iès enfans, & que défait que chaifé, que tué, queioubmis a ion obeii-iâneedeux milions quatre vingts mile hommes.Il eft vray que la vertu ne la raifon n’émouuoit pas ce Pompée aces tant grades Scglorieuiès prouefi iès, mais d’vne démefurée afFedion d’vne folie d’eftre grand: de iorte que fi horesilmarchoit contre l’Eipagne * maintenant contreles cruelz effortz de Lepide, &aux guerres des alpes, ou bien contre les forces Sertorien-nés, ou pour inueftir les pyrates, & rendre paifibles tant de mers&diuer-iès, il braifoit des moyens pour coniêruer ion pouuoir. Qui la, donques attrait à i’Aphrique, au Septentrion contre Mitridates, &à tous les angles de l’Afie finon vn iniàtiable defir d’auancement, qui ièul feftimoit bien peu grand ? Qui a émeu Ceiâr à iès euures tant priuées que publiques finon iâ gloire & ambition auec vne façon demeiûrée d’eftre plus grand quenul autre:comme qui ne pouuoit iôuffrir vn autre Cefarauant luyî Duquel toutesfois fi au contraire on veult en fèmblable diligemment pré-dre garde a iès proueflfes faides d’vn grand cœur, pour lefquelles il a efté appellé dieu par les anciens, il fera de befoin entreprendre vne choie inc-ftimable , & infinie. Il a premièrement eu la guerre contre les Suyflès qui font les plus gens de guerre entre les Gaulois, lefquelz eftoient non feulement en vne ardeur, mais rage de combatre, tellement que partizdeleur pays apres auoir brûlé ièize de leurs villes, & quatre cents bourgades, à fin queleiperance du defir de retour leur fuft oilé, ils fe ietterent d’vne plus grande obftination a la fortune parles terres des Romains, comme au par-auantauoient faidles Dannemarchois & Allemans, n’eftans pas en rien moindres qu’eux de hardieife& courage.Or eftoitleurnôbre & la multi-tudedesautresnations qui leur donnoient iècours eicrit(qui eftvn cas merueilleux)en lettres Grecques fur tables de cuiurc, qui furent trouuées
- p.203V - vue 418/480
-
-
-
- DH L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 204 leur camp. Finalement le nom des telles de toutes façons de gens cftoienc de trois cents loixante & huiét mille,d’ont ily en auoit cent quatre vingts dix mille bien hommes de guerre, lefquels tous Celàr ayant rencontré auprès delariuiere du Rone, a deux fois vaincu en bataille bien perilleulè, & vaincuz réduit a fa fubiedion.il aaullieftimé meilleur de combatte les Alemans eftans en crainte, qu’attendans le temps oportun, comme les di-uinations des femmes lorcieres ne les IbufFriiTent combatre auant l’appa-rencedela lune nouuelle.EnalTaillantdonques leurs forts & mottes,il n’a celfé de les écarmoucher & éguillonner iufques à ce qu’outrez de courroux ils vindrent àla bataille.Lefquelsmis en fuite eftans iufques au nombre de quatre cents foixante mille hommes ( comme Ion dit) Celâr pour- |Ex pîu_ fuyuant quatre cents ftades iufques au Rhin,il a couuerc'*' la terre de morts tarcho câ-&de dépouilles :1e nombre delquelz on témoigne auoir efté de quatre vingts mille hommes. Et de la il a deux fois drefle vn pont de riue à riue, bus, eftant le premier des Romains quiaalfailly l’Alemagne, mais les Barbares fê hafterent de gagner les foreftz & marécages, n’ofàns combatre, qui feruit de victoire .11 aauflivaincu & chafle delà Gaule par vne feule bataille Ariouife Ghef des Alemans fort arrogant. Il a aulsi mené la guerre contre les Tournefans, & Artclâns habitans en épelles foreftz. Comme donquesilzeuffent retiré leurs enfans & ménagé au plus profond delafo-reft loingdel’ennemy ,ils firent vne charge foudaine fur Celâr auec loi-xante mille hommes de guerre, lequel ils rencontrèrent alfeant Ion camp,
- 6c ne combatant point. Parquoy facheualerië ayant tourné vilaige , ils tuoient tous les Centeniers ayans enclozlesfèptiefme&dixicfme legiôs.
- Et fi Celâr prenant vn écu,& arreftant ceux qui combatoient en la pre-lence , ne le fuftierté fur les Barbares, 6c que finalement la dixiefme légion en forçant les bataillons des ennemys, ne luy euft donné fecours,eftant en péril, il eft certain que pas vn n’en fut elchappé. Et combien que par la vertu 6c hardielîe de Celâr, ils combatifient outre leurs forces ( comme Ion dit ) ils ne forcèrent point toutesfois les Tournefans de tou rner vilâge:
- & ont efté tuezeombatans vaillamment. Celâr devraya témoigné qu’il ne fen fauua que cinq cents de foixate mille. De la font cnfuiuiës les redditions des villes iulquesàla merde Ponent.Les Bolleducois furent defai&z d’vne meftne furie. Dont il en fut tué quatre mille,& cinquante mille ven-duz.ll y eut aulsi vne bataille lur mer,& mémorable auec les Vanoys habitans au près de la mer de Ponent, lelquelz furent vaincuz : aulsi furent les Aquitains à force d’armes ayans côiuré auec leurs voyfins pour leur defen-fe. Il a aufsi fait la guerre à la Gaule Belgique fecouruë des Alemans :1a Aquitam force defquelz cftoitde foixante douze mille hommes d’eliéte : lelquels fortans desforeftz, Iesfoldas Cefariens receurent, refiftansd’vn grand artifice, & les defaifans iufques à ce quils les forcèrent de le retirer .Outre lefquels il a conquis toute la Gaule qui eftafsilê entre les Alpes la riuiere du ^one,duRhin,& delamerduPonentdaquelle contient en fon circuit
- p.204R - vue 419/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- fix cents milles. Or a-il prins par force en elle en moins de dix ans huift cents villes, lubiugué trois cents peuples,& a menant la guerre contre trois millions d’hommes tué vn million, & prins vn autre en vie. U a aufsi enclos Vercingentorix d’Auuergne Roy des Gaulois terrible de corps, d’armes & d’efprit, & d’vn nom forgé quafi pour épouanter, dedans la ville d’Aufloisauec vn palliffementdedouzemilles,apresauoir fouuent elfayé la fortune auec plulieurs grandes batailles &eifors iufques ace que toute la Gaule prefqueféleua auec deux cents quarante huict mille hommes de guerre pourlefecours du R.oy : lefquelz aufsi furent defai£tz,chalTez,&: re-poulfez : Ceux le fauuerent qui le peurent. Le Roy finalement fè rendant, comme vn grand & ample honneur de vi&oire, & venant fimplement au camp auec fupplications il dit iettant fa cotte d’armes, & les armes deuant lespiedzdeCefar,reçoy vn vaillant homme qui es le parragon de toutes proueffes, car tu as vaincu. Et depuis il penfà d’vn autre monde comme fi ceftuy cy ne luy fuffifoit pas,palfant en Angleterre, & en entreprint la conquefte.-alaquelleau parauant le nom feulement des Romains n’efloit pasconeu, & dont les efcriuains & hiftoriographes ne font pas en petit debat:veu qu’aucuns d eux foufliennent qu elle n’eft: point realemét, mais tant feulement vn nomfeinct, pour laquelle hardieffe d’entreprinfeil fefl acquis vne grande gloire. Il aeifé de vray le premier quia oieietterarmée fur la mer de Ponent, &qui à commencé a nauiguer la mer Atlantique, tranfportant vne armée pour combatre, tellement que pafle d’vne merueilleufe viteffe,ilà receu d’eux épouuantez,armes, & oftages . Or fuit il paffé plus outre fi la mer Occeane n’eufl chaflié par vn bris la témérité de l’armée. Efiant donques de retour a la Gaule, il a de rechef pour-fuiuy les Anglois par mer auec vne plus grande armée, & forces.Lefquelz eftans defai&z auec leurs Roys ont finalement fait iou au vainqueur. Puys content de cela comme qui ne contendoitpas tant à laconquefte qu’à la gloire, il eft retourné auec vn plus grand butin qu’au parauant. Il a trium-phé quatre fois, comme le témoignent prefque tous hiil:oriographes,mais félon les plus certains, cinq fois. Le premier triumphe fut de la Gaule, &c aufsi de l’Angleterre, lequel fut le plus glorieux de tous. Le fécond de l’E-gipte, le tiers de Pharnace,& du Ponte, le quart deIuba, & del’Aphri-que, le cinqiefme fut de l’Efpagne. I’aiouteroye voluntiers le fixiefme de Marfeilles, fi ce n’efloitque parauantureileflcomprinsfoubs celuy delà Gaule, car il ny a point débouté à ceux qui ont leu cefte compleinte fi afpre de Cicéron parlant de Cefar es liures des offices qu’il en a triumphé. a Apres ( dit il ) auoir foulé & ruiné les nations effranges, nous auons veu jjporter en triumphe Marfèilleen exemple d’vn Empire perdu, & trium-jjphede celle ville là, lans laquelle iamais noz Capitaines n’ont triumphé « des guerres tranfalpines. Il a finalement donné beaucoup plus de batailles, qu on ne les fauroit réciter. Au demourant il a efié tuépar fà côduide,corne le témoignent quelques notables autheurs, vnze cents trente deux yille
- homes
- p.204V - vue 420/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. zoS
- hommes,ou bien félon d’autres, vnze cents quatre vingt mille,dont il ya eu foixate& deux batailles, ou bien félon au eus cinquante, paflant feu I en cela Mar Marcelrlecjuel a fémblablemét combatu trente neuffoiz, ou bien félon l’auis d’autres,quarante fois.Qjuelbefoingeft il que iepourfuyueces autres geftes? Apres tant de guerres vuydées, & tant de trauaux pafTez,lef-quelz non feulemét il efl difficile de porter,mais auffi deférire,lire, & ouyr, Cefàr vainqueur retourna à Rome, & entrant à la ville denuée de forces, il fé fit Dictateur, prenant les finaces publiques dedans le threfor qu’on luy auoit dénié. Et depuys pourfûyuant Pompée il a chaffé fon armée merueil-leufement grande àla Campagne Pharfâlique. Apres lequel vaincu &chaf fëen Egipte,ileut àdemeflervne grofle guerre auecles Alexandrins, tant par mer que par terre.Finalement apres la fubmerfion du Roy,Cefar viéto rieux laiffant Cleopatra Roy n e du païs,pafTe par la Syrie en remettant De-iotareau Royaume delà petite Arménie: & priue du Royaume de Ponte, Pharnace,l’ayant vaincu en guerre.Subféquemmet apres il a tenu l’Aphri -que,&apresauoir bien mené quelques guerres fort renommées, il ade-fait trois Capitaines tenâs le party cotraire, Scipion, le Roy Iuba, & Labie-ne.Cato l’vticenfé feft tout de gré doné de l’efpée au trauers de l’eftomach. Cefar efl: retourné en Italie victorieux ,puys efl fbubdain allé aux Efpa-gnes.Il défit auecvn grand dâgerCneius,&Sextus fils du grand Pompée, la ou moururent trente millePompeiansauecCneius.Orn’ailpas voulu qu’on fiftrolle du fang des Romains,qu’il auoit épandu durât ces guerres Jâ.Finalementilaeftécrééprelatde Vefta, & tenu du nombre des Dieux, non féulement par l’auétorité du Sénat,mais auffi de l’opinion populaire. Carauxieux que fon heritier Augufte Cefar a inftitué,vne eftoille crinite efl apparue l’efpace de féptiourscontinuelz,à vnze heures duiour, &alon perfuadéau menu peuplecredule quec’eftoir lame de Cefar tranfmis au ciel.De laquelle eftoille Virgile a fait mention au Bucoliques . Le fimuia-chre aufsi de Cefàr Iemôtreau chef du quel efl vneeftoille.Et depuis aufsi vne columne de marbre Numidique afsifé au mefme lieu de vingt piedz de haut auec vn tiltre infculpé du Pere du païs:ôc a Ion d’vne longue obférua-ce fâcrifié,voué,& iuré par Cefar. Mais côbien que tous ces autres que nous auons nommé fbientrenommez,aufsireft bien Scipion , par le confeil & vertu duquel HannibalaeftécontrainCt de retourner en Aphrique. Ceft autre Scipion aufsi PAphricain foit honoré qui arafe Carthage & Numan ce villes de grand pouuoir.Soit aufsi tenu pour excellent. L. Paul,le car du quel a honoré ce Roy Perfes iadis trefpuiffant & noble. Aufsi foit en gloyre eternelle Marin qui a deux fois deliuré l’Italie d’vn fiege & de peur de fér-uitude. Qu’on loue aufsi iufques au ciel ceux qui auoient àcombatre corne Dictateurs ouConfulz, la ou Alexandre Roy des Macédoniens fut pafïe en Italie, i’entend Valere Corbin, C. Martin Rutilin, C. Sulpice, T. Manlius Torquatus,QT.Philon,L.Papyrius Curfor,Q^FabiusMaximus.
- Mm. i-
- p.205R - vue 421/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Les deux Decies,L.Volumnius,N.Coruus, Quelalongueéxperience dé guerre rende aufti glorieux Piiilopœmenes, 8c a cous {oit préféré Pom-péedesfai&z & prouefles duquel font côtenuz es mefmes régions, es quelles le folcil l’eft par fon cours ôc limites: Iuille Cefar toutefois ne fera point dit auoireftéau meftierdelaguerrefocôdàceux la,neaceftuy cy,neànul hommedequelEutropeefcritauoirefté homme qu’onque autre n’a pafte aumeftierdelaguerre.Etcôbienqueiaonaitaflezparlé delà vertu &ex-ceiléce,il ne faut pas toutesfois oublier de luy vn autre témoignage de Ci-ceron:combfen qu’ilfoitcog-neu &manifefte a tout le monde : Il efttou-« teffois trefhonorable ôc vray. I’ay fouuét de coutume,dit il, mettre en auatv >, & voluntiersfouuent tenir propos,que tous lesfaiclz de noz Capitaines, a ne ceux des nations eftrages & peuples fort puifTans,ne de tous les Roys re-Si nomez ne font point a côparer aux tiés: ne en gradeur d’entreprinfo, ne en a nôbre de batailles,ne en diuerfité de régions, ne en diligence pour vuyder ,, les guerres,ne en diuerfe façon d’elles. Au demourant les contrées entre el-„ les fort élôgnées n’ont point peu eftre plus toft epacées par les pas de quel-,, qu’vn quelles ont efté cogneues,ie ne dy pas par tes courfes,mais par tes vi-,, doires.Le mefme Cicéron dit en vn autre paffage: Cobien que tesprouef-„ fos donnent mauuais iuftre aux louenges des autres,nous n auôs pas pour-„ tant perdu la mémoire dePompée.Mais quieftl’hômequi ne fâche quant 3S grand a efté fon nom?quant grandes fes richeftesîquant grande fa gloire en 33 toute façon de guerres?quât grandz les honneurs du peuple Romain,ceux 33 du £enat,&quant grandz font finalement, les tiensîllauoit fans doute de „ tant pafte les anceftres en gloire,que tu as efté par fus tous autres excellent. ,, Et pourrant nous compterons auec grandz merueillesles guerres, vi&oi-33 res,triumphes,& Confiilatz de Cn.Pompée,au regard des tiens ilz font in numerables.Maispourautantquelaqueftion a de coutume eftre grande, en quoy mefinementcôfifte cefteexcelléce deChefz,Plutarche viédraen j> place pour vn tiers temoing de renô. Ne péfe pas(dit il)quaucuns des plus 33 grandz & plus renômez Capitaines do,iuét eftrepreferez ace vaillat Chef: jî car fi quelqu’vn eftime que les Fabins,Scipiôs, Metelz, ou les Chefz de fon 33 teps,ou dupaifédenaguieres corne SylJa,Marinj es deux Lucuîles,& finale 3> ment le meïme Pôpée, du quel la vertu & gloire au meftier de la guerre a en 33 toutes fortes flouri iufques au ciefluy foiet côparables, les prouefles de Ce-3J for fans doute les vainquent tous.Et fi outre ceux cy on veult confiderer les 35 autres,comme Tarquin le foperbe,Régulé,Fabrice,Curin,& Camille,c’eft 33 fans point de doute vneeftoille qui fplédit entre tous, folon Horace quart 33 temoing d’auélorité,commelalune entre petitz feuz. Il ne faut pas aufti oublierOuideauxfaftesfaiftmtàcecy,autheurd’eftime, & qu’on ne doit pas laifler en derrière:
- s» De tesfaifl% la mefure a bien le nom de grand,
- 33 Maïs 61 qui ta 'vaincu eft de plus grand renom.
- Subfoquemment me confiant finalement de la parolle de Solin pour le
- dernier
- p.205V - vue 422/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. io6
- i> dernier témoignage à fin de comprendre toutes les louenges de ce Chef,
- >> autant a lùrpalTé Celàr le Dictateur non feulemét tous les Capitaines,mais )) aulfi tous les hommes,pour mieux parlera la verité,qu’afaitSicinius,ou » Sergius.Ies foldas.Mais fil nous faut tenir propos des Catons entre les plus grandz Chefz,!’Vticêce le trouuera entre Celàr,St Pôpée, fans peur St bra-ue,en fc niellant de la guerre ciuile.Ie n’en fâche point d’autre de vray pour luy bailler en telle : car autre n’a peu voler de fi haute aile, que celuy qui quad St quad fe foit éleué cotre ces deux en ce grand etônemét de la République ,& qui, lesvnsfùyuansle party de Celàr,les autres celuy de Pompée ait dédaigné St irrité l’vn St l’autre,& montré qu’autres font les deuoirs en-uers la Republique.De vray aulsi Chnlpe Salufte recite élégamment,& de bonne grâce que celle Republique la n auoit point eu d’homme de grand vertu combien que de làlouuenance ilen fuit deux de bien grande, St de diuerlèfaçon de viure,quieftoient M. Caton,St C.Cefar. Defquelzi’vn e-ftoit feuere, St l’autre clement. Caton eftoit confiant, St Celàr facile, ceft autre fins largefie, ôteeftui cyabondantenrichelfes.il nombre entre les louenges de Celàr qu il defiroit grand Empire, armée,St nouuefie guerre, la ou là vertu peut fe montrerai fe fioit à la bonne affe&ion des gens grâdz par vertu,à fin qu’il trauaillaft de guerre les milèrables nations, St que Bel-lona les tormentaft d’vn fouet lànglant,à fin qu’il y eut moyen de faire co-gnoiftreleurvertu.Maisfipourlalouenge de l’autre tu veux comprendre Ton image,tu y découuriras vn Atrides,vn Priamus,St vn Achilles courou céàcesdeux.-carenblafmantl’vn St l’autre, il adonné ce vray iugement d’eux,dilànt qu’il lêroit bany fi Pompée auoit la vidoire:8t fi Celàr l’auoit, qu’il mourroit.Aquoy comme il le preparoit toft, apres la victoire de Ce-fir,ie veux bien auoir en admiration celte tienne derniere playe, St noble mortrpar laquelle comme dit Senequd la liberté a perdu la vie.Ecàfinque i’alTembleenvntouteladignitécnlèmblelagloyre decefi homme St Capitaine,m’aydant de l’auis d’vn autre elcriuain de l’hiftoire Romaine:
- » Si par biens legrant losfaquiert}gy quon regarde
- 5» La 'venu nuè d’heur, tout ce qu’en no% Adaieurs
- » Nous louons ,a efié dh’eur: quia donq mérité
- » Vh figrantnom par Ivîars, ou par lefang des peuplesf
- » l’aymeroy beaucoup mieux,qu’iltirajl fes triumphes
- Desbanc^de Barbarie gy des fins de Lybie,
- » Que de monter trois fois dans le car de Pompée
- s> ^Au Capitole, ou bien mal facrer Iugurtha.
- }* Or dupais voicy le 'vray pere, gy trefdigne
- s* De tes ^Autels ô Borne,au nom du quelturer
- 33 Ne te repentiras Jefaifant bien toél dieu,
- 33 Si iamais m te voys de ton iou deliuree.
- Quant à ceft autre premier Caton Porcie,tout eft plein de Iouenge, tant au pais,que hors,St en guerre.Car outre le renom mémorable de làpience, en
- M m. ij.
- p.206R - vue 423/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- la quelle on ne le cuyde point auoir efté par aucun vaincu, il a efté en ce temps la'd’vn grand & merueilleux fauoir de lettres,& d’vne éloquence re. nommée. Il eft vray qu’alors la Iplendeur de la langue Latine n’eftoit pas encores a la perfedion de fa dignité,ce que Seuere dit auoir efté foubz Cicéron .Ny n’a efté moindre que les autres en la Cêfure, & triumphe,liurâc des préceptes aux Romains de toutes choies defirables,& à part,de l’art militaire.Mais entre les premiers font ceux de l’agriculture,& a efté à la con-felfion de ce temps la trelèxcellcnt agriculteur & làns enuiëraulsi a-il Qu.e-fteur fort collant,trelîu lie Prêteur,ôcTribun en parragon.il a aulïi eu trois choies fort grandes en vn homme, de forte qu’il a efté tenu pour trelgrand orateur, Sénateur,& Capitaine-Toutes lelquelles chofes il eft certain a-uoir efté plusmanifeftement excellentes en P.Emilian,combien que non auparauant luy. La vertu aulïi de Caton le Conful a efté grande outre les choies que nous auons dit en la guerre de Bifoaye, corne qui fait copte d’auoirprinspîusde villes enElpagne qu’il n’y aarreftédeiours .Ny n’cft celavne iadance, Il à la vérité elles ont efté iulques au nombre de quatre cents. On dit aulïi qu’entre Celâr,&Antoine a eu grade côparaifon:car corne ilz f adônaffent quelques fois au ieu pour fe retréér, corne aux detz, ou au côbat des perdris,ou coqz & autres animaux,il eft certain que Celàr en a r’apportétouliourslavidoire.Parquoy on aveufouuétquelqu’vn desfami liers d’Antoine l’auertirpar arguceen ces parolIcs:Quel affaire, Antoine,as tu auec ceieune home (parlât de Cefar)car côbien que tu foys de plus grâd renom,&pluslèuere,&enplus grande dignité,auec vn plus grâd excerci-ce de guerre,ta naiffance naturelle & ta deftinée craint celle de ceftui cy.Ec combien que ta fortune foit en foymerueilleulèment grande & noble elle flattetoutesfois aucunement la fienne.Les lêpt ConlulatzdeC.Marius mais plus toftvn ,veu qu’il en a tant feulement receuvn, &rauyles autres, font adhères à la parolle du premier ,Aphricain, aulïi font deux beaux triü-phes. Car comme il fuft home de cheual foubz fa charge à la guerre de Nu-mance,& que quelqu’vn interrogaft Scipion par fortune(comme il auient durant le repas) quel grand Capitaine euft deu auoir la Republique,f’il luy Verti hæc fuft auenu quelque melàuenture. Ceftui cy relpôt il,de Marius,luy donnât cho^n^vi " ^Ur ^e^Pau^Par le(luc^ di^jOn ne lâuroit à peine bien iuger,li celle vertu li ta Marii. perfaideamieux decouuert celle tant grade vertu nailfante qu’il n’ell cer-tainnement auenu.Croyez que ce baquet militaire a efté prefage à Marin, qu’il Ce feroit par toute la ville des banquetz fort plailâns. Car côme il loit certain qu’apres la côquefte de l’Aphrique, & le Roy Iugurtha mené deuât fo car,l’armée des Alemâs ait efté defaide, & qu’alaminuidileutmâdéla defaidededeuxcéts mille Dânemarchoiz,& quatre vingt millepriz auec leur chefHermode,il n’y eut celuy qui ne luy facriliaft en fa table côme aux Dieux immortelz.Marc Claude Marcelfe prefente d’vne mefme reputatiô, côme qui premier dôna le moyé de pouuoir vaincre Hânibahqui eftoic vn home d vn grâd cœur & hardy, & entre peu d’autres courageux côbattat,
- p.206V - vue 424/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 207
- fort renomme par tous hiftoriographes,&mefmement parla poëfie Vir-gilianc parlant ainfi de luy. j, Regarde comme marche auPc riches dépouilles
- 35 Marcel le renomméfurpaffant en Victoires
- » Tous autres hommes preux.
- On pourroitdire beaucoup de choies a la Iouenge de ce Don capitaine, niais on n’en fauroit dire plus.Qu’a l’homme,ou quel auâtage peut il auoir plus grand que l’excellence parlùr tous autres? Combien que Virgile ne l’a point rat dit pour fuyure la vérité que pour louer ceftautre, lequel a fui-uy Marcel fils d’Oétauia Iceurd’Augulte. Ueft vray quil en lurpaftè plu-fieurs,mais non pas tous. Les anciens Capitaines Romains ne des nations eftrages (hors Hannibal) ne feront pas marriz,fi Quintus Fabius fc met de rechef entre les plus renômez,tâtpource qu’ila elle tenu le plus fage de la nation Romaine (car Caton le Cëforin n’auoit pas encores occupé ce pre~ mierlieu de renom) quepourautant queluymefme (commedit Cicéron) luy porte vn louable témoignage de là grande fapience & vertu. Et a mefà moment elle fort honoré par celte manifefte poëfie d’Ennius:
- ’ V Vn feul homme nous a remis temponfant:
- ” C^r aufalut les cri^ point il nepréférait
- 3i D’ontjon los ejlplus hores, & fera fleurijfant.
- Le reftedescaufespourlefquelles celte gloire de famé, &fûrnom detref-grand, combien qu’il n’eutprinslàlourceen luy, peuteftreiugé luyeftre 'f^S0»110 raifbnnabIementdeu.EtcombienquelesconIèilzdecefthommede bien - - * foient plus en mémoire,que les batailles,il n’en a pas toutesfois faute pour egaller lagloyre de fon ayeul Fabius Maximus Rutilianus : lequel véritablement l’a pâlie,en nombre de victoires,& de grandeur de batailles. Tite Liue tient le lèul Hannibal qu’il a vaincu de temporiIèr,& de patiéce pour vnluffilànt,grand, &fingulier témoignage d’vn ennemy erftresles louages de ce Capitaine Romain. Le peuple Romain a à haute voix mis iulques au ciel. Q^Catulle en ce nombre & excellence deces Chefz excellens.Car comme eftat à la place aux Proues il interrogall le peuple,fil perfeueroit de lè repolèr de tous les affaires fur le gran d Pompée, il l’elcrira tout d’vn contentement,en toy.'prenant celte auanture parcasloudain en laquelle il au-roitfon elperanceipar lequel îugemét il a égalé le grand Pompeéà Catulle :2uec tous lès hôneufS' que nous auôs naguieres recité,cloz dedans l’elpace de deux lÿllabes. A bonne raifon aulfi on a aioulté à ce récit L. Marin côme vn exemple d’vn honneur admirable: lequel eftant cheualier Romain deux armées fort endomagées par la mort de P. & Cn. Scipions,& par la vi&oire de Hannibal ontéleu pour leur Chef, au temps auquel leur falut eftant à I’extremité ne lailfoit point de moyen de brigue. On y aiou-fteauflivn autre fingulier 5c bel exemple de tresbelles& grandes choies de L.Meteî,eftant premièrement grand Pontife,& depuis deux fois Côful, Didateur,Côneftable,l’vn des vingt 5c d eux éleuz pour départir les terres
- Mm. iij.
- p.207R - vue 425/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- grand Sénateur,tresbon harengueur,bon combatant,Capitaine trefpreux, & finalement le plus fage & riche de fa ville fi renommée: Iefquelles l’opi-nion eft certaine eftre auenuës en luy feul,& non e.n autre depuis I’edifica-tionde Fvome. Au regard de ceft autre Sylla qui fait eftimedeuoir vfurper lenomdeheureux,onnelefàuroitaflezfuffilamment louer ne vitupérer, d’autant qu’encerchant les vidoires il fe reprelènte au peuple Romain comme vn Scipiomil fait auflï le Hannibal en faifant le cruel.D’autre part aufsi Auguftefe hurepour eftre mis du nombre des preux & heureux Capitaines^ Princes: comme vn bien rare parement de vertu . Car à lage de dixfêpt ans durant le Confulatde Hircine ôc Panfa, ayant drefle armée, & eftantenuoyéPropreteur contre Marc Antoine, &Decc Brute tenatMo-dene afsiegée, ce ièune homme ardantreftédela première bataille perdue en laquelle Panlàfuttué, ôc delà fécondé ou mourut Hircine donna la chafle â Antoine,l’ayant vaincu:& apres eftre de retour a Romefe voyant eftre haï du Sénat, il fallia auec Lepide & Antoine cotre lïngtatitüde des citoyés.Et apres eftre crée Conful'en delaiflant Lepide auec M. Antoine,il a tenu l’Emathie pourfïiyuant en Grece Caflïus & Brutus meurtiers de Ce-fàr.Finalementeuxeftans vaincuz à force d'armes, &: l’Empire departy en trois hommes, Antoine eut l’Afie,Lepidus l’Aphrique,& Odauiam l’Eu-rope.Pédant ces entrefaites L. Antoine Conful frere de M. Antoine aflail-lit Rome comme ennemy pour défaire ce ieune Empereur. Lequel Oda-uian ayât vaincu en bataille, & chafle a contreint paries forces de ce rendre eftant aflïegé dedans Peroulê, & prefle de famine. Et a depuys défait & chafle Sexte Pompée fils du grand,tenant toute la mer en crei nte de toutes pars par vne guerre pyratique auec vne armée de trois centz vaiï-feaux épanduz par toute la mer. Par vne mefine fortune auflï il a combatu auec Lepide eftant arriué auec vn grand nombre de gens de guerre de J’A-phrique en Sicile pour l’occafion qu’il dônada ou vainqueur il luy fàuua la vieafapriere.Puis tirant au riuage de la mer Adriatique,il fit diligence de vaincre les Illiriques,Liburniens,& Dalmates.Subfequément venant d’A-diumeap de la Grece,la ou Antoine eftoit venu auec la Royne Cleopa-tra accompagnée d’vne armée de deux cents vaifleaux pour defeendre en armes en Italie,il fut la combatu cruellement tant par mer que par terre:fi-nalement Augufte demourant vidorieux, Antoine auec Cleopatra firent voyle malheureufè en Egipte. Lequel Augufte pourfuyuant a entièrement défait auprès du Phar.Et depuis apres la guerre Philippenfè,& derechef a-pres la Sicilienne marchant vidorieux en Italie,deux fois triumphant, il a fait entrée dedans Rome trois iourscontinuelzen triple triüphe Currule, de la Dalmacie, & ScIauonie,& de la vidoirc au camp d’Adium,& de celle d Alexandre eftant le Iane clos, indice de paix . Au demourantil ne peut longuement demourer en repos, émeu de la rébellion des nations. Eftant donques derechef le Iane ouuert paflant aux Elpaigncs, & aux extremes riuages de la mer Occeane vers les Cantabres & Eftures, il
- p.207V - vue 426/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. 207
- les a forcé de lé foubmettre au ion des Romains tellement qu’en roddanc route la prouince, il leur apprint par la crainte des armes de garder l’obeif-lance. Les Sarmates aulsi 8c Parthes qui habitent entre le Septentrion, 8c l’Orientenuoyerent à Augulle folFrirà luy faire plaifir.Tigranes vaincu en Syrie parle lieutenant d’Augulle fe repentit de fa. rébellion. E liant finalement tout pacifié par les lieutenans es parties de Leuant, il reuintde la mer de Ponent & del’Efpagne à Rome: la ou derechef il referma le Iane, lequel de rechef il fut befoing de r’ouurir, 8c de la forcé d’aller au pôle Ar-éiique ,1a ou les nations fort cruelles felloient enhardi deftre ennemies, &z domtafi bien les Vindeliciens, les Sallalfins, Les Germains, lesMarco-manins, les Souaues, les Sicambres,& tout ce qui eft de ça 8c de la le Rhin, & toute la brutale Barbarie affilé le long du Danube, qu’ils obeilfoient de tout leurpouuoir.Etdepuistirantaumidy,ilavaincu les Getulins, Gara-mantes 8c Marmarides : 8c a pacifié tout ce qui reftoit a appailér du collé demidy.Nyn’ellaucune des autres prouinces qu’il n’ait vifité,excepté l’Aprhrique, 8c Sardaigne , lequel venu a bout de toutes chofes fans auoir Ion lémblable, apres tant de conqueltes faibles ellant à Rome, &la paix acquilé tant parmer,que par terre,apour la tierce fois clos lelane des Qui rites, 8c a efté faibt perpétuel Di&ateur, &peredu paysauec vne réputation d’ellre le plus heureux de tous les Princes non lèulement au iuge-mentd’autruy, mais aulsi du lien propre. Car comme il deftinaft fon arriéré fils à la guerre, il requit aux Dieux de luy donner le courage de Sci-pion, la bienueillance de Pompée, 8c telle fortune que la fienne, comme fil diloit qu’elle luy auoit efté bien necelfaire. Outre là fortune aulsi il ne fell iamais trouué ny ne lé trouuera vn tel Capitaine que luy, fi nous croyons au iugement du peuple Romain,& melhies a celuy de Horace di-lântainfi.
- 3 » D'honneurspromptg nous fuifons largejfe en taprefence,
- 5» Pour en ton nom iurer,nous drejjons des autelg:
- )> Gonfeffans que rien tel nejlnay}nj ne naiftra
- « Mais ceprefent tien peuple efî en ce fage & iuûei
- a Otfil te préféré a tous noz Chef? & aux Gregeois.
- C’ell alfez d’auoir touché en ce peu de parolles l'excellence des Capitaines de l’antiquité, en lailfant toutesfois tout de gré Ninus, Liber, Callor, PolIux,& Hercules. Tout le monde de vray les confèlfe auoir efté d’vnc fi grande gloire, qu’ils femblentfurpalfer toutes les prouelfes que la mémoire des hommes àcomprins. Au demourant quiconque tiendra par obfti-nation outrecuidée & brutale les faiblz recens equiparables auxgeftes de ces tant grans 8c renommez Capitaines ,que nous auons dit,lérapar neccfi fité fans la conoilfance de l’antiquité, & de la vérité. le voudroye bien que celle preexcellence de Chefz cedall à nos temps,& Capitaines.Mais con-fiderant à part moy les rufes,& fages conléilz de noz anceftres auec leur admirable, incroyable; 8c prefque diurne gloire au mellier de la guerre, ic cô-
- Mm. iiij.
- p.208R - vue 427/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRî N
- meiuftç iuge, & hors de tome affeélion, ne trouue home auquel de droict ilz doiuent eftre comparez . Au furplus comme ainfi (oit Sigifmond Pandulphe Capitaine de trefgrande proueffo, qu’entre les gens de bien & nobles, il fe face vn plaidant débat des Chefzd’au iourd’huy pour fàuoir quelz on tient les plus dignes en expérience de guerre,en exercitation d’armes, en nombre de batailles, en diuerfité de nations Sc ennemys,en preu-d’hommiëjgrauité^foy,confiance,grandeur de cœur, diligence, & es autres témoignages excellens,&vertu deconduiéle, & quifemblent le plus approcher à ces autres anciens :& que diuerfoment on en mette en auant de diuers de noftre temps, ils ne te preferent pas finalement toufiours fou-lement a tous autres fans contredi<ft,indui6tz deraifons probables, mais encores attirent ils à leur opinion de grans perfonnages, & bien entenduz en telles chofes, qui font en grand renom entre tous autres hommes: combien que cela ne doitpoint eftre r’amené en doute, & qu’il doit plus + Lego clair que la clarté a ^ quiconque prendra garde au comble de tes faiélziveu cmuis pro que foui tu as porté lur tes épaules ( tout ainfi qu Atlas le ciel ) l’Italie difti-cuxus. gaftee îufques ace iour de tant de fureurs de guerres, & tirant à rui-
- nes, eftantappellé de toutes pars au focoutspourla garder d’eftredu tout perdue. Les chofos font notoires que tu as exécuté contre le Pape Eugene, pour la defenfo de ce noble Capitaine FrancifqueSforce,cncecours de temps tant mauuais &: difficile. Et pour Eugene contre ce meftne Capitaine tant preux,aufsi font celles que tu as fait pour Alfonfo Roy tant noble des Taraconnois : celles que pour le vaillant Philippe Marie Capitaine des Miltanois & Geneuois . Et finalement ce que tu as fouffert es mers fuperieure,& inferieure, pour l’augmentation , renom, & gloire des puifi fontes Republiques des Florentins, Vénitiens, & Senois, combatant, entreprenant, & exécutant partout d’vn grandcoeur,& à force d’armes : de forte que comme dit Homere,tu fombles facilement eftre le premier qui Ii-ures les cheuaux au combat, & vfos de la furië des gens de pied, non feulement aux noftres, mais aufsi aux nations effranges, & peuples fort loing. tains entre les plusexcellens,&: éprouuez Capitaines, qui font grands homes de guerre,& d’vneexecution hardie.
- PEINES DIVERSES DES SOLDAS HABAN-
- donnans kurenfeigne, (y defobeijjans a leurs Capitaines. Cbap.XV.
- V regard de ceux qui defobeifioient au vouloir du Chef ou de la loy, la punition fen enfuyuoit diuerfo & non fombîable.Car les vns eftoient puniz en leurs biens, les autres d’infamië, les autres au corps. Mais pour autant que la rudeffe de la vengeance d’vn maléfice,la crainte aufsi des peines, eft leplus fouuent vne diftiplinede bienviure &fogement,nous commencerons à l’infraétion delafoyd’ont noz anceftres ont toufiours fait grand cas. L’hiftorre deMetin Suffecin
- Alba-
- p.208V - vue 428/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. aop
- Albain ne nous eft pas incogneuë , d’autant qu’il rompit déloyalement l’accordconuenu auec Tulle Roy du peuple Romain: dont il fut tiré a quatre chenaux, qui eftoit véritablement vne nouuelle,&: cruelle façon de peine. le n’ay point de vrayleu ny ouydire qu’aucun au parauant ait elle démembré a Rome. Mais pour autant qu’on ne fauroit rien voir plus inhumain ne plus étrange de laraifôn de l’homme, que demembrer les mé-bres par vn foudain écartelement, il relie que nous rendions la raifon pour quoy ce démembrement & ecartelement du corps alèmbléfi inhumain.
- Il faut entendre que le peuple Romain eft venu d’vn petit commcncemét à celle lîgrande amplitude par l’exercice de toutes façons de vertu .-mais fur toutes chofèsil a eu la foy en recommendation,la gardant làindement tant en public qu’en priué. Parce moyen il a liuré aux ennemys des Con-fùlz hommes de grand renom pour conlèruer la foy publique. De mefme railbnaulîiilavouluque celuy auquel on auroit donné la foy pour fa garde , defenlè, & patronage full tenu plus cher que les parens, &: qu’il deuoit eftrc défendu meftnes cotre eux,ny n’elloit point de crime ellimé pire que fi on prouuoit à quelqu’vn de fellre fêparé de celuy qu’il auoit prins loubz fa prote&ion. Or ont noz ancellres ordonné celle foy, mefmement es de-uoirs de la guerre en l’exercice & conuenances : d’autant qu’autrement ilz penloient que les nerfs de la dilcipline militaire le perdoient, fi la déloyauté des hommes abuloitlânsvnepeinegrade,& épouuantable. Quant aux autres choies il çll certain que nulle nation n’a vfé de plus douces peines»
- Et pour tant comme le Conlul Aureille Cotta eut ordônépourlanecefsi-té aux cheualiers de venir r’emparer, & qu vne partie d’eux n’eull fait côte delon commandement,il fit tant enuers les Cenlêurs que le Sénat les con-demna; & obtint que par apres ils ne receurent leurs gages, dont les anciens les appelèrent ( dïmtosœre ) decheuz de loude:d’autant que par ignominie, elle leur elloitollée pourvn moys,ou pourvn an: tellement qu’elle tumboit dedans le fifquc,& non pas dans la bourfe du foldat. Comme Ar-taxerxes ayant condamné vn certain Arbace Medien, le difant chargé de lâcheté, & non pas detrahilôn pour la retraite qu’il fit â la bataille vers Cyrus, apres la mort duquel il auoit de rechef rebellé,il commâda que nud ilporteroittout leiourtout autour de la place au marché vne putain fur les épaulés. Il ordonna aufii de ficher trois doux en la langue d’vn autre d’autat qu’ayant promis d’alWâ deux des ennemys pour les retirer il auoit efté trouué méteur.Pendant que Hannibal eftoit en Italie auec vne armée,
- & qu’il eut donné quelques batailles au peuple Romain, les Bruciens furent les premiers de toute l’Italie qui fuyuirent fon party.Mais apres que Hannibalfen fut retiré,& que les Aphricains furent vaincuz les Romains ayans porté cela mal enuis ne firent plus de Ieuée de foldas delà Bruce par façon d’ignominie, ny ne les tenoient pour alliez,leur enchargeans d’obeir & fèruir comme fèrfz aux Magiftratz tirans aux prouinces: & pourtant ils fuyuoient les Magiftrats comme ceux lefquelz es îeuz dç farces on appelle
- p.209R - vue 429/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- bourreaux, &lioient ou fouettoient ceux cju’on leur ordonnoit. Appius Claudius auec le decret du Sénat, ordonna que d’entrée tous ceux que Pyrrhus Roy des Epirottes auoit prins prifonniers,& r’enuoyé de (on bon grêles gens de cheual feroient la guerre à pied, & les gens de pied lèroient enrôliez auec le lêcours des tireurs de fonde, & qu’à pas vn d’eux ne lèroit loyfible de reuenir àfon premier eftat de guerre,fil ne r’apportoit deux dépouilles des ennemys . Il a efté aufsi anciennement vne autre maniéré de punition militaire en ordonnant de feigner le foldat parignominië. Et combien quonn’en aytpeu trouuerla railon es liures desanciens, on a toutesfois depuis penfé cela auoir efté faid aux gens de guerre de cœur étonné, en déclinant de fon naturel : tellement quelle ne lêmbloit pas tant peine que medicine: combien que depuis on penle que pour plufieurs autres delidz cela fe fait par coutume,quafi que tous ceux fèmbloiét eftre tropfains qui delinquoient contre leur deuoir. Ce Cralfe que Sempro„ nius Alëllio, & plufieurs autres hiftoriographes difent auoireuentre autres bonnes choies cinq grandes & precipuës:qu’il eftoit trefriche, trefelo-quent, trefnoble,Iurifconfuite par excellence,Ôc grand Pontife,eut la prouince del’Alieauec le ConlùIat,fit les appreftz pour allîeger & forcer les Luques , ayant necefsité d’vne tronche forte & longue pour le mouton à batre les murailles de la ville.Il efcriuit àvn maiftre Grec & le plus grand des Athéniens alliez &amys du peuple Romain, qu’il fit diligence de luyenuoyer le plus grand de deux pomiers qu’il auoit veu dedans Athènes. Lors ce maiftre fachant pourquoy il le defiroit,neluy enuoya pas le plus grant fuyuant Ion commandement, mais le moindre qu’il eftimoit eftre le plus idoene & commode à faire le mouton, & plus aiféà porter. Cralfe le mande, ôtfcnquiftpourquoy il ne luy auoit enuoyé celuy qu’il luy auoit commandé, & en dédaignant fes railons & caufes qu’il mettoitenauant,il le fit dépouiller & batre de verges,efti-mant que tout le deuoir d’vn Chef eftoit corrumpu & défait,fi quel-qu’vn répond à ce qui luy eft commandé parvn conlêil non requis, & non parvn lêruice deu . Luce Papyrin requit que ÇL. Fabius Rutelian Conneftablefuft fouetté pour auoir combatu & chafie viélorieulèment les Samnites contre Ion commandement . Auquel il euft fait trancher la telle, mais l’armée en debatant ou priant donna occafion à Fabius de le fauuer à Rome, Iàou il l’a pourluiuy . Ny ne fut hors de crainte iuf-quesà ce qu’il feietta aueclonpereà fes piedz,& que le Sénat & peuple Romain en firent larequefte proteftant finalement qu’il ne quittoit pas celle peine à Fabius,'mais à la puilfance du Sénat, & peuple Romain. Comme le ConfulLuce Calfurnin Pilon menoit la guerre en Sicile contre les fuitifz, & queTitius Chef de la cheualerië enuelopé de la multitude des fuitifz euft rendu les armes, il commanda qu’il fuftpuny de celle maniéré de peines, l’ordonnant auec les ailes des tireurs de fonde, & commandant qu’il full veftu d’vn long manteau lâns lambeaux, d’vn làye
- p.209V - vue 430/480
-
-
-
- 210
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XI.
- Lins ceindure&qu’il fétrouuafl depuis le matin iufques âla nuidpiedz nndz près de la bande des Princes tout le temps de la guerre,qu’il fut foubz luy,enlepriuantdela compagnie des hommes, de l’vfâge desbaings, ôc des bandes de cheuaux, d’ont il auoit la charge. Q_^ Fuluius FÎaccus Cen-Leur chaffa aufsi du Sénat Ion frere Fuîuiuspourauoir oie donner congé de; fe retirer a leur maifon â vne bande d’vne légion d ont il efloit Tribun,fans l’authorité du Conful. T.. Manlius Torquatus fit foueter & trancher la telle à fon fils prefent l’arméerd autant que contre les defenfes il combatit au defceu de fon pere cotre GeminusMetius cnnemy & ChefdesTufculeins, Payant appelle au combat : combien qu’il fuit vidorieux . Poflhumius Tyburtius Didateur condamna fon fils A. Poflhumius d’auoir la telle tranchée pourauoir fans fon commandement, &de foymefme affailly 5c defaitles ennemys .-combien qu’il eneufl r’aporté lavidoire. Aufïi ne fît pasdemoindre cœur A. Fuluius de l’ordre du Sénat mourir fbn fils alant au combat fans fôn ordonnance, queT. Manlius, ou Poflhumius le Di-dateur. Il fit de vray mourir ce ieune filsexcellententreceulxde fon âge, d’entendement,de lettres, & beauté, apres l’auoir retiré de my chemin tirant d’vue furie temeraire au Camp de Catelin, duquel comme mal auife iîauoitaquisla Familiarité & apres auoir auant dit qu’il n’auoit pas engendré vnfilsâ Catelin contre le pais, plus tofl au pais contre Catelin. Claude fécond Empereur de ce nom cafta tous les foldas quiauoient ofé affaillirlecamp des ennemys fans fon congé &les enuoyaâ Rome pour les punir félon leurs démérites. Par ce moyen il efl certain qu’on a plu s fou-uent anciennement puny, & déplus grande féuerité ceux qui contre le commandement ont combatu lennemy, & qui au fon de la retraitte fê font trop tard retiré du combat, que ceux qui ont ofe abandonner leur en-féigne, ou qui repoufïéz ont tourné vifaige. Combien que Q^Fabius ait quelquefois couppé les mains dextres de ceux qui fé rendoient,lefqueIs eflanses garnifbns Romaines fefloient retiré âl’ennemy,â fin de donner crainte aux autres de fé reuolter,il fut toutesfois d’auis defoy mefme& de fà clemence qu’on deuoit leu r faire defenfés, & appaifér par douceur & pa-rolles gratieufès,& qu’il ne falloir pas accufer toute fufpition,ny eflre rigo-reux totalement a tous fufpedz. Car corne il eu fl découuert qu’vn certain Marfus premier en proueflé & nobleffe entrefes compagnonsefloitaccufé de reuolte, il n’en fit point de punition, mais pour autant qu’il fàuoit bien que non obflantfâ dignité on l’auroit a dedaing, alors il dit ries capitaines font plus tofl blafmez pour acquérir les bonnes grâces, qu’on ne leur fait d’honneur félon leur vertu :& par apres il a blâme cefl autre, d autant qu’il ne luy faifoit en rien requefle. Apres ce propos tenu, il luy fit prefént d’vn cheual courageux, & d’autres dons, d’ont par apres il fé rendit homme de grande foy & affedion . Comme aufli vn foldat Lucanin fufl par deuant luy accule, que fouuentssfois lanuid ilfortoit du camp pour l’amour d’vne femme, & qu'au demourant on le difl homme de grand faid
- p.210R - vue 431/480
-
-
-
- ROBERT VAL TV RI N
- t’armes, il fitfecretement prendre la femme qu’il aymoit tant, 8c la ltiy amener,apres laquelle arriuée,il le fait appeiler,luy dilânt,qu’il edoit bien auerty que contre la loy tu pâlies la toute la nuid hors du camp,aufsi au parauant ne nous edoit il pas inconeu, comme tu vis en homme de bien: parquoy les fautes feront compenlees aux prouelles, d’orelenauant tu me feras bonne compagnie, car i’ay bon répondant,&lors il luy recommanda &deliura fa femme. Or Sigilmond,Q^Fabius Maximusneme laide pastepairerenhlenceencepalTagedes peines militaires, comme qui à là mode ne prens pas garde à toutes les fautes des gens de guerre, ny ne les punis félon leurs démérites, en difsimulant au contraire la plus grande partie tout degré,fachant trefbien que c’ed vne maniéré de gens inclinée à mal, 8c que leur nature 8c façon de vieinueterée n’ed pas fort aifée à extirper. Et comme tu leur lâche lôuuentesfois la bride deféba'tre 8c éiouir, de forte que quand fennemy ed pres,tupunys rlgoreulèment les parelfeux, contumaces, nonchallans ,negligens, leditieux, 8c ceux qui habandon-nent leurs enfeignes: d’autant que tu entens bien que ces vices la ne touchent pas feulement d’vn chacun fa façon priuée de viure,mais aufsi le fa-Iut du tout en general. I’ay entendu aufsi que tu as par nature de te contri-fter fort pour les fautes des gens de guerre, la ou il faut recourir aux armes contre quelqu’vn, 6c au contraire tereiouirmerueillculèment, la ou tu en asfauué plufieurs 8c remis fus: 8c encores( qui eft vn grand don de Dieu)de ne delîier en celle lèuerité la mort des hommes, mais au contraire vouloir de tout ton pouuoir procurer plus tod à chacü le làlut.Et corne plu lîeurslbientémerueillezenten blâmât que tout ainh que tues trop doux, que tu lèmbles aufsi quelque fois trop rude 5c cruehtu as de coullume de repondre qu’il n’ed point d’home à qui la cruauté {oit moins côuenâte qu’au Prince,5c que pour la vidoire leChefd’vne arméedoit ellre plus craint que l’ennemy.On trouue parelcrit qu’edant vne mutineriëleuéç par les foldas IuilIeCelâr appailâ tout le cap,8c regaigna leur cœur par la punitio de quel ques vns:ôc lâ ou ils failoiët les facnfices de la guerre,on dit qu’il challia lès gens,en ce mefmemét que quad ilz font entrez en vne ville,il ne leur efloit licite de Ipolier les homes ne les teples des dieux.Ce que par apres il reprocha,ainh que la mutinerie féchauffoit toujours plus-.car ceux qui auoient iuréaux dieux 5c citoyens Romains ne pouuoiétimpugner ce dont parle facremét de la guerre ils auoient prins la defenfe. Au demourant les foldas qui elloiét notez de telle infamie nepouuoiët pas receuoir lôude, ne iouir des priuileges de gens de guerre, ne porter armes, ny ellre remisâpor-terceindure,quepremierementonneles eull auant tous autres marqué pour les mérités de leurs vertuz. Augulle a ellé fort feuere en l’art militaire, & a calfé auec infamie les légions mai obeilfantes auec vne par tropim-modede requede de leur retraide.il a auÜi puny de mort les centeniersôc Chefz de chambre pour auoir laide leur garnifon. Quant aux autres façôs de vicesil apunylesloldas de diuerfespeines, comme de les faire tenir de
- bout
- p.210V - vue 432/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. m bout tout le iour deuât le Pretoyre,quelque fois en lâye fans ceinélure,quel que fois aufsi portans vn gazô de terre.C.Curio ayat decouuert vne légion des cinq mutinée durât la guerre Dardanique au près de Durafe, la fit marcher fans armes,&la força de copper de la paille eftantdecinéteen lapre-fence de toute l’armée en bataille. Puys au lendemain il les fit faire vn fofie efiant pareillement decinclz.Ny ne fut pofsible par nulles prières de la légion d’impetrer de luy de ne leur ofter leurs enlèignes,ne abolir leur nô, Ô2 qu’il ne diftribuaftlesloldas pour r’emplir les autres légions. Luce Domi-cian Corbule fit en Arménie loger hors le rempart deux ailes,&trois enfei-gnes,le{quelles en fa côpagnie tournèrent d’entrée vilàge âl’ennemy près d’vn chafieau,iufquesàceque parvn continuel trauail,&par courlèsheu-reulès,ilzrecouurerent leur honneur. Ceux qui durant le Confulat de. P. Cornelie Nalîca,& de Decimus Iulius auoient habâdonnél’armée furent condamnez, & apres auoir eu des verges veduzpubliquement.Corne. M. Cato apres auoir longuemét fait fonner la trompette pour rembarqueméc eut leué.lancre,& fait voile du riuage du païsennemy,y ayât fait lèiour par quelques iours,et que l’vn des foldas quieftoit demouréfit merueilleux cry & gefte pour efire tranfporté-en r amenant toute l’armé au riuage, il le pnnt,&: le fit mourir faifânt plus toft feruir d exemple,celuy que par igno-miniëles ennemys euflent fait mourir. L. Paul ordonna de bailler àfou-droyerauxElephans qnelquesvns deseftrangers qui auoient tourné leur robbe apres auoir vaincu le Roy Perle. Le dernier Aphricain aulfi apres a-uoirruinel’Empire Carthaginoys liura aux belles fumages & Ipeétacles qu’on faifoit au peuple vn homme delà mefine condition &coulpe. Lequel aufii (commeIon dit) eftant déclaré Cenlèur,oftale cheual â vn ieune homme par ce que durant le fiege de Carthage, il bailla fumptueulèment en vn foupé en pillage â lès compagnons vn gafteau faiéfc auec du miel,auquel il auoit donné lalèmblance de Carthage auec le nom. Et comme il requit la caulè pour quoy il Iuyauoitofté Ion cheual: Tu as (celuy dit il) ruine Carthage auant moy.Xerxes Roy des Perlés permit â Pithius pere de cinq enfans & requérant le congié pour l’vn,d’elire celuy qu’il voudroit:& apres l’auoir departy en deux,il les mift d’vn collé & d’autre du chemin,par la quelle vidoire,il a faiét la purgatiô de l’armée. Aétifanes Roy des Ethiopiens apres la redu&ion des Egiptiens foubzfa puilfance, les gouuerna d’vne fupreme equité.Il réfréna de vrayles deftrouffemensparvnenou-uelle mode,fans faire mourir, nelailfenmpunizles dehnquens, & parvn iugement donné,il condemna d’vne douce fentence les chargez, apres les auoir tous alfemblé. Or les força-il d’aller au cul du defert apres leur auoir coupé le nez,leur édifiant la vne ville appelleé Rhinocere â caulè du nés coupé. Corne Alfuere defiraft que la renommée & bruit de luy couruft par toutes natiôs,& peuples d’auoir tué Cyrus, Et que Mitridates qui premier l’auoit blelTé,& Chares fubfequemment luy ayant coupé la veine du iarret
- Nn. j.
- p.211R - vue 433/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- d’ontiltübaportoientmaIenuys,qu’iniullement la gloyreleur elloitoilée parprefens enuoyezdu Roy, il fut merueilleufement enflambé de courroux ayant ces nouuelles, & cômanda de trancher latefteàChares. Et corne la merefe trouûa la: Monfieur (dit elle] ne faites pas mourir ce Chares homme fi execrable d’vne peine fi foudaine: c’eft à, moy de le payer de fes au daces cjue ia de lôg temps il brade. Et comme le Roy eut donné le pouuoir àlàmere d’en faire la punition,elle commanda à lès bourreaux de le prendre, Sc d eftre mis l’efpace de dix iours en tourmét,de luy creuer les yeux, & de luy couler dedans les oreilles du cuyure fondu: & parce moyen le faire mourir matirifé de toute façon de peines. Quelque peu de temps apres il fit mourir Mithridate dedans des Iquifz pour la mefme caufè : d’autant qu’il le ventoit publiquement d’auoir tué de là main, Cyrus, & n’auoirpas Arfuerus tiré fon dard en vain,& a faute, comme Artaxerxes, mais qu’au contraire xes^mef- ^ l’auoit porté par terre en luy faulànt la téple,duquel coup, il eftoit finale-me horçc, ment mort. Au regard de ià mort & iùpplice,elle fut de celle iorte. Apres a-uoir édifié deux fquifzioingnans bien l’vn à l’autre ,ilz renuerlênt l’hom-me,qu’ilz veulent executer dedans l’vn mettat l’autre deifus. Par ce moyen ilz les aifemblent tous deux , de forte que la telle, les mains, & piedz demeurent dehors,le relie du corps demeure enfermé dedans.Ilz luy donnét viures,& le forcent de manger,en luy piquant les yeux d’eguillons : Et corne il a mangé,ilz luy coulent dedans la bouche pour là boylfon du laiét mellé de miel,duquel aulfi ilz luy arroulênt la bouche,& là face.Et en tour nàt Ion lquif,il afseient toufiours contre leloleil, luy couurâs tous les iours d’vne multitude de mouches là face ,qui f’y attachent. Et comme la vertu naturelle face ce que la necefsité contreint faire les hommes beuuans & mangeansjilfengendredela corruption & pourriture, diuerfité de vers, parlelquelz pénétras dedâs les vellemés le corps foit ronge. Et corne apres la mort de l’homme on leuele fquif de delfus,on voit la chair mangée, ôc apparoill autour des entrailles vne multitude de telle vermine, & d’autres qui tous les iours nailfent.Mithridateellantmartirifé de celle maniéré de fupplices a velcu Iangoreulèment l’elpace de dix iours,mourant finalemét ainfi. Auidius Calsius qui voulut ellre diél Marius mit en croix les loldas qui auoiet rauy par force quelque chofe aux prouinciaux, es lieux mefmes elquelz ilz auoient delinqué.On dit aulfi que ce fut le premier qui inuenta vne façon de punition plus toll de cruauté que de feueritéitellementqu’il prenoit vne bien longue tronche qu’on fichoit en terre, à laquelleil atta-choit les condânez depuys la cyme iulques au bas mettât le feu au pied, de Iorte qu’il en faifoit mourir les vns brûliez,les aucüs par la fumée & tormét du feu,& les autres de peur & frayeur. Le mefme Auidius aufsi en a noyé par dizaines enchainéz enlèmble, & a coupé les mains à plufieurs qui a-uoiét habandonné le cap,aux autres les iambes & iarretz, dilànt que l’exe-pîe d’vn criminel viuant milèrablement elloit plus grand que tué.Comme aulfi làns lonordonnancevnebandedelècourseut tué trois mille Sarma-
- tes
- p.211V - vue 434/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XI. iu
- tes logez au tour du riuage du Danube faifânt mauuais guet, & qu’elle fut reuenuë àluyauccvn merueilleux butin eflans leurs Tribuns en grande efperanccderecompenfepourauoirauecfipeu de gens défait vn fi grand nombre d’ennemys,il les fit tr ou fier, & mettre en croyx, & finalement mourir,difant qu’il pouuoit auenir que ce fuit vne embûche,& que la reue rence de l’Empire Romain periroit. Et comme vne mutinerie fê fut drefi fée grande dedans l’armée, ilfèiettanud au mylieu ayant tant feulement fèsbrayesleur difânt : frappez moyfi vous auezle cœur, &faiétesvn aéte de difcipline corrüpuë.Etlors eflans tous appaifez il mérita d’eflre creint, pour autant qu’il n’auoitpointeude crainte. Pifcenius Niger fit tuër diz foldas pour auoir mangé vn coq qu’il auoient rauy àvn Prouincial, & défendit le feu, & la viande cuiétc alarmée quipar prières & non par force empefchoient l’execution , & denemanger ne boyre que pain & eau, en payant & Iiurant premièrement le décuplé au Prouincial. Vn foldat charpentier aufïi fut par la fèntence d’Alexandre Seuere,ou bien d’Aureil-le adiugé à vne femmelette pour carreton,à fin que par vn meftier fêruile il procurait la nourriture à vne vieille qu’il auoit oultragé de parolles.Et corne les foldas enfuffent marrizilleurperfuada de porter patience, & les effraya d’vnemodeftie.Aurelian a eftégrand chaftieur deputerië. Il fè con-tenoit de vray & a chaftié d’vne cruelle peine les adultérés. Car comme ilz euffent volé la femme de leur hofte il les a attaché à vne corde en courbât deux arbres,apres laquelle lachéelecriminel pendant d’vn cofté & d’autre efl fôudain mort demembré.Mais Marin a encores plus rudement chaftié des foldas, lefquelzayans violé la chambrière de leur ofte il fitenfèuelir (car il eftoient deux) vifs dedans des cuirs de bœufz.ayans tant feulement la telle hors,à fin que de la multitude des vers qui fy engcndreroiét ilz fuf-lent longuement tormentez. Autres ont inuente de les pendre en plufieurs façons de croix la telle contre la terre: les autres les epaulesdes vns de leur etendre lesbraz au gibet: les autres de liervn corps mort au vif, comme Opilius Macrinus, ôeMezentius duquel Virgile dit: a Les corps mort:£ aux viuans oultreplus ilioingnoit,
- s> Mains aux mains,face a face aufi il conioingnoit:
- 33 Dvne tardiue mort,les tir oit ce torment,
- 33 Pourri* & corrumpuz en leur embraffement.
- Noz anceftres ont aufïi ordonné quelque fois quant aux punitions, que fi le crime en l’art militaire auoit efté commis par plufieurs, on en puniroit lesaucuns par fort,afin quelacreintecouruftatous,&lapeineà peu. Car lefoldatquiahabandonnéfonranc,quifefteffrayé del’effort des enne-my s peut bien quelque fois par apres eftre meilleur côbatat,bon citoyen, homme de bien.Les bons foldas donques obéiront, & garderont les com-mandemés de leur Chef,finon que par fortune ilz foient contre la confer-uation de la Republique. Car en tel cas le fèul déloyal & méchant homme de guerre y obéit. Quelle iniquité y a plus grande, ou plus grande execra-
- N n.ij.
- p.212R - vue 435/480
-
-
-
- /
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- J>
- ROBERT VALTVRIN
- tion que fans aucun egard aftaillir tout ce que le ChefordonneraîNefera pas ce propos ( par auanture quelque fois approuue dedans vn camp) trouué funebre,cruel, & plein de trahifon.
- Si dans le fis dufrere, & du pere en la gorge Tu m'encharges cacher monglaiue, & de ma femme Au ventre plein defruitf,m'augréqu'en ait ma dextre le le feray: f il faut,&les Dieux dépouiller,
- Et temples mettre en feu,la flambe de la guerre Des Dieux,& deIuno feravnemeflée:
- Etfiafoit le camp fur le Tibre Tufcan, ?
- Je le viendrayplanter d'audace en l’Hefperie Campagne. Lors au fi quelque murs que tu vueilles ^Abbatre,de ces bra% le belier ébranlé Efcartera les pierres,& quoy que cefit Rome La cité que voudras efire mife en ruine.
- Et combien qu’homme ne puifle rien dire plus inique, ne d’ontvn Chef Romain deuft eftre plus offenfé, fil eftoit loyal, ce mefchant foldat toutesfois feft efforcé de donner témoignage de fafoy enfon deuoir par ces parolles,par lefquelles il ferend conueincu , attendu les ordonnances de la guerre , d eftre mefînement deftoyal & trahiftre . Ces propos donques auront efté miz en auant contre ceux qui manient la guerre de plus grande parefteôcnonchallance,ou autrement que ne requiert la commune difcipline, ont encouru note d’ignominie, & d’infamie,eftansapprouuezpar plufieurs exemples,a fin que les gens de guerre apprenentafe donner garde au péril aautruy,ou bien qu’ilzfoiétprou-uoquez parles exemples de la vertu d’autruy.
- Fin de I’vnfiefme liure.
- Le
- p.212V - vue 436/480
-
-
-
- 33
- 3*
- 3>
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- 33
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. 113
- LE DOVZIESME LIVRE
- DE ROBERT VALTVRIN, DE
- 1 art militaire
- Des Tmmpkes, & quec eft, & d’on ileftventt. Chdp. î.
- iOus mettrons finalement pour la confummation de nc-ftre euure,SigifmondPandulphe;les triumphes d’vn ordre jraifonnable, & deu à noftre narration,veu qu’ilz font la fin des guerres, & l’honneur & gloire des gés de guerre.Car le
- ___________triüphe eft le fupreme honneur de toutes les proueflès delà
- guerre, & vne trcfgande ioye de tous,tant malles que femelles, que de tous âges de toute la cité,auec vne venue au dcuât qui le faifoit au Chef,& â farinée vidorieufê âlon retour,d’vne glorieufè defaide des ennemys portaten pourtredure deuât foy les geftes faidz de hardieffe & bon heur: & eft ainfi did côme on le témoigné du mot Grec ^ict^v<nç,qui lignifie en latin exul-ratio,reiouiffance. Quelques autres croyent que ce nom eft venu en coutume des Gregeoiz,& que quelque choie de ceft hôncuren appartient â fon ' premier autheur le pere Liber, qu’ilz appellét Bgix^Coy. & combien que Pîu-tarche nie cela eftre vray, toutesfois le trefdode en toutes choies & fubtil M.Varron,lediteftrederiuédelâ. Il eft vray que Tranquille afferme que Triumphuskdoit plustofteftimer eftre latin, d’autatque celuy quitrium-phamentfailbitlbn entrée â la ville,eftoit honoré par trois iugemens. Premièrement l’armée auoit le iugement touchant d’odroyer letriumphe au ChefiSecondement le Sénat,puys pour le tiers le peuplermais c’eftoit de celuy mefmement qui Didateur,Conful,ou Prêteur auoit fait choies dignes de triüphe.Tite Liue:Quad les affaires auoient cflé de toutes pars bien vuy-dez,l’armée en iugeoit,& a le Didateur fait fon retour à Rome triumphant par le decret du Sénat,& par le comandemét du peuple. Le mefme encores au trente & vniefme liurerL.Corneille Lentule eft retourné del’Efpagne:Et corne il euft fait entendre au Sénat les chofès que parpluficursans il auoit vuydé de grande hardieffe, & bon heur,luy requérant eftre loyfible d’eftre porté dedas Rome en triüphe, le Sénat iugea fes euures dignes de triüphe: mais qu’ilz n’auoiét point d’exemple de leurs anceftreSj,quc celuy qui auoit mené la guerre n’eftat Didateur,Conful,ne Prêteur triüphalbqu’au regard de luy il auoit eu le gouuernement de la prouince de I’Efpagne, côme Pro-conlùl,& non pas côme Conful,ou Preteur.il fut toutesfois dit qu’ilcntre-roitenioye âRome,parl’intercefsiondeSépronius Lon gus Tribun delà cômune,lequel toutesfois difoit que lûyuant la couftume des anceftres on ne l’auoit iamais veu faire. Mais finalement le Tribun veincu par le con-fentementdu Senar, y confèntit, tellement que par le decret du Sénat, Lentulus entra en triumphe â Rome.
- Nn.iij.
- p.213R - vue 437/480
-
-
-
- JJ
- î>
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- JJ
- ROBERT VALTVRIN
- DES-TROPHEES, ET DE LEH^OP^IGINE,
- & en cjuoy 'défont dljferens du triumphe : & que les vns apres la viéloire auoientde coutume d’immoler vne brebis,les au-cuns vn boeuf les autres vn coq. Cha. II.
- Il fefault donner garde, que ce en quoy fabulent aucuns touchant le triumphe & trophée , ayans opinion q^’vne mefme choie doiue dire appellée par deux noms,ne ndüs confonde. Car toutainfi que celuy elloitdid triumphant,qui par laloy triumphale failoit vne pompe Martiale, &epouuantable par la boucherie des en nemys:femblablement aufsi ilz appelaient trophée la ou les en-nemysauoienteu lachalfe, & non lâns propos dunomGrecrfd7rouoi» didà cau'lè que l’ennemy tourne vilâge.Or eft il que les anciens appelaient trophée vne tronche de chelhe de môtaigne taillée en façon d’homme vaincu, & comme veftudeles dépouillés ôc armes.De vrayon y pendoitde toutes pars des dépouillés bien parées, & en bel ordre, ny nelloit fiché en terre qu en lieux bien apparans. Ft pourtant Salufte dit de Pompée: Apres la conquefte de l’Efpagne il ordonna des trophées es mons Pyrenés. Pour laquelle coutume aufsi onattachoit es villes destrophéesâ desarcz de maflbnnerie.D’ont noftre tant élégant poëte a dit:
- Sur lefepulchre il dreffe v n chefne bien fort grand Tout autour ebranché, & d’armes claires larme:
- A toy grand les dépouillés adreffepour trophée Le beüiqueux du Chef Me^ence, qui font creJles Arroufées de fang,auecjes dard% brife%,
- Etla cuyraffe aufîi en dowge lieuxfaucéet -
- Soub^ la fenefre il lie v» bouclierfaiél de cuyure,
- Etau col luj pendit vne efpée d’yuire.
- Et de rechef en vn autre palfage:
- Il veult les Capitaines porter les tronc% vetu%
- Des armes ennemyes, &y ficher les noms. Ora-ilditquelestiltresaueclesnoms des ennemysmortz eftoient attachez aux trophées. Et pourtant dit Iuuenal:
- Des guerres les depomlles aux trophées ficbées Tronques, & U cuyraffe,auec vne bauiere Pendant du cabajfetfaucé: & duTimon La courte courbe tauec l’appreftdelagallere Veïncu ë, & le captif trifie aufommetde l'arc.
- Il ne faut pas aulsi oublier que l’ouacion eflvnc façon de triumphe, qui n’efi: pas dide d’ouatio, c’eft adiré clameur Bacchique, comme plufieurs penlênt,combien que comme dit Plutarchcon crie&châteenl’ouation. Au demourant les gens de guerre ont de coutume de làcrifier vn boeuf en vn grand triumphe & pleine vidoire , & en l’ouation vneouailled’ont
- celle
- p.213V - vue 438/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. 214 celle façon de triomphe aprins ce nom:& d’autant que ceux quivenoient de la bataille auec la multitude alloient au deuant aux moindres dieux,&: que la ou ils auoient chaffé les ennemys,ils leur fàcrifioient des ouailles, ils eftoientappeliez(Ouantes) .En femblableaulïi l’ouation eft le moindre triumphe. Celuy auflï qui à mérité l’ouation eft fur vn cheual, &conduid au Capitole par la commune, oubien par les cheualiers Romains, la ou il facrifie des ouailles, d’ont,comme il à efté dit, eft venue l’ouation. Au regard de celuy qui triumphe,il eil porté à quatre cheuaux blancz,deuant lequel marche le Sénat au Capitole, auquel il facrifie des taureaux . En quoy aufsi il nefaultpas laifl'er en arriéré, entant que touchent les moindres triumphes, & ouations: en quoy ie treuue les anciens Hiftoriogra-phes auoir elle difcordans: partie d eux efcriuans, que celuy qui ouoit, auoit de coutume d’entrer à cheual : & toutesfois Sabm Maflurin dit qu’ils eftoient à pied fans luyte de gens de guerre, mais auec tout le Sénat. I’efti-meauftichofêdigne,&àproposde confiderer le Legiflateurdes Lacede-moniens, lequel à ordonné de facrifier quelque peu autrement que les Romains. De vray, fi quelque Chef des Lacedemoniensa vuydé Ion en-treprinfè par menées ou par beau langage, il facrifie vn bœuf, fi parbatail-le,vn coq-.tellement que combien que cefoit vne maniéré de gens fort Martiaux, & telz reputez par tout le monde,ils iugeoient toutesfois les faiélzplus grands,& plus conuenansàl’hommevuydezparraifon & prudence, que par violence,&prouefle.
- DIVERS GENRES DE TRIVMPHES SELON la dïuerjité des peuples 0 nations, Qhap. III,
- — — Out ainfi donques que toutes nations n’ont pas gardé vn mefme
- ex épie de religion es fàcrifices des triumphes, auffi eft il certain que la façon de triumpher à efte diuerlè entre elles.Parquoy pour ramener le premier autheur de triumphe, on dit que quatre Elc-phans attelez tray nerent le car de Denys que les Latins appellét le pere Liber triumphant des dépouillés de pîufieurs nations, apres auoir fubiugué l’Indie.On dit auffi que Seloftris Roy des Egiptiens fut d’vn cœur fi hautain & glorieux,qu’il auoit de coutume d’atteler à fbn car au lieu d’Elephas chacun des Roys de fes fubieélz félon le fort,triumphant de celle forte fans en auoir aucun exemple de fés predecefïeurs,(pas que i aye trouué)prenant cefte fi grande licence d’vnegloyre,cruauté,& fierté intollerable. Erichto-ne aufsi a eflé le premier qui vidorieux a prins en Grece le car à quatre cheuaux.Mais entre les noftres Colle & Marcel amenansvn butin fortriche furent aufsi portez en car a quatre iougs: toutesfois. Denys n’a pas bien ditdifant queRomuIe ait vfedu car, vcu que les ftatuës comme on al’aif-fé par mémoire eftoient a Rome à la veuë de toutle monde portansàpied les dépouilles, dont il eftmanifefte que fes triumphes eftoient à pied. On
- Nn. iiij.
- p.214R - vue 439/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- dit que depuis TarquiniusPrifcus,&par apres le fils deDamarate ordon-nerencccfte forme & magnificence mal feante de car àquatrecheuauxau triumphe,laquelle toutesfois les Hetrufques prindréc& vfurperent au par-auant.Quoy qu’autres afferment que Publicole a premièrement triumphe en telle pompe,laquelle aulsiietreuue auoir eftédeniée à aucuns, & non fans bien grandes raifims,toutainfi qu’elle a efté o&royeeparlcs loix des anciens a plufieurs & grandz Capitaines.
- QJSE LES TRIOMPHES FESTOIENT PAS
- oliroye^ à tous^&quelz il^ejloicnt. Cbap. IIIL
- Ommedonques l’honneur de triumphe fuft venu a telle railbn qu’on n’eftimaftpoît eftre polsible au Senat.P. Romain, & a l’armée de bailler,ne à vn Chef receuoir d’eux choie plus grade pour vntrelàmple honneur,& gloire apres auoir vaincu les ennemyz, & qu’a celle caulê chacun chef d’armée requérait le triumphe,qui eftoit le fupreme des honneurs pour des petites batailles & rencontres, on y obuia parla loy,qu’àceluyfeul ferait permis d’entrer à Rome en triüphe, lequel ferait Chef renommé par feseuures & prouclfes, & qui en vnc feule bataille auroit défait l’armée desennemys,Ies rompant & tuant iulques au nombre de cinq mille hommes. Et depuis L. Marin & Marc Caton Tribuns de la commune ordonnèrent punition aux Chefz qui par lettres auraient deguife au Sénat faufemet le nombre des mors des cnnemys,ou bien celuyde la perte des citoyens, commendant d’auantage à ceux qui fai-foient leur entrée de faire ferment deuant le Quefteur:fur cela, à lâuoir fi les choies qu’ils auoient donné a entendre au Sénat n eftoient pas faufes. D’autre parttoutainfi qu’au parauat les Tribuns delà commune foloient eflre contraires aux requerans le triumphe : tellement que donnans quelque fois empefehement aux gens de bien, & deproueffe, ils détournoient ceux des autres de frayeur, & les faifoient triumpher aufsi comme il eft eferit de Manlius, la coutume aufsi eftoit qu’il fuft loyfible de bailler la coronne de laurier pour l’augmentation de l’Empire, & non pour la re-conquefte des chofes qui en auoient efté. A celle caufe letriumphe n’a point efté ordonné à QJFuluius apres auoir conquis le peuple Campa-nois, ne à L. Opimius pour la redu&ion des Fragelleins, le requerans au Sénat: car il eft certain que le Sénat auoit le pouuoir d’ordonner & aiuger ceft honneur: combien que durantle Confulat de Valere & Horace,il fut premièrement triumphé.Ce qu’au parauat iamais n’auoit efté fait par l’ordonnance du peuple fans l’authorité du Senat.letrouue aufsi que touchant celle pompe, il eftoit ordonné d’ancienneté que le triumphe ne ferait point aiugé à ceux qui lâns aucune authorité de Magiftrat auraient efté enuoyez à grandes entreprinfes,& de renom pour les vuyder par guerre. Parquoy M. Marcel, & P. Scipion n’ont point efté portez en car trium-
- p.214V - vue 440/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII. zi$
- phal,lors quel’vn d’eux a réduit Sarragouze,& l’autre, les Efpagnes à l’o-beiflance des Romains fans Magiftrat. L’obfêruance eftoit aufli fuyuant la coutume des anceftres que nul triumphaft qui eut delaiffé Ton armée à vn autre, fil ne liuroit la prouince àfonfuccefleur conquifo, & pacifiée. Par-quoy comme la grandeur des faidz rendift le triumphe impetrable au Proconful L. Manlius, le requérant à fon retour d’Efpagne au Sénat dedans le temple de Bellona, l’exemple des autres luy repugnoit:vn moyen honneur toutesfoisluy fut ordonné, c’eft qu’ouant ôenon pastriüphant il feroit fon entrée. D’auantage la coutume du Sénat aufli eftoit de décerner le triumphe de forte, qu’il n’eicoutoit la harangue de nul autre,que de celuy qui auoit à triumpher, ou bien de ceux quifeftoient trouué à la guerre . Et à cefte caufe eftoit il ordonné que les lieutenans, Tribuns, Centeniers, & finalement les foldasfo trouueroient au triumphe, a celle fin que publiquement la vertu fuft veuë des prouefles de celuy à qui on falloir tant d’honneur. Iamais atifii triumphe par l’ancienne coutume des Romains ne fè procuroit par pleurs ne par fang des citoyens, ny n’e-ftoitadmis eftantodroyé.M. Fabius Conful apres auoir vaincu les He-trufques & Veientesparvneglorieufebataillerefufa le triumphe aluy offert par vne grande affection du Sénat, &du peuple: D’autant que fon fre-re Qé Fabius Conful y fut tué combatant vaillamment: difant qu’vne Ci grande perte pour la Republique les pleurs y eftoient mieux fêans que le triumphe. Le Sénat auoit le pouuoir de dénier le triumphe, aufsi eftoit il en lapuiflance à qui il eftoit offert de le refufèr, ayant combatufoubz la conduided’autruy,ou en autre prouince que la fienne, comme premièrement le fit Helius, aufsi aCn.Claudius, & fùbfêquemmentNéron,lequel Helius ayma mieux fuinre a cheual Line Salinateurtriumphant, de la gloire duquel il eftoit participant à la defaide de Hafdrubral que de iouir du triumphe que le Sénat luy auoit décerné egal.Parquoy il triumpha fans car,d’autant que la bataille auoit efté donnée en la prouince du Salinateur. On denioit aufsi le triumphe a celuy qui auoit vuidéla guerre d’vne autre armée que la fienne, & qui euft delaiffe fa prouince pour le profit du pillage, comme il aduint prefque au Prêteur L.Furius: auquel combien qu’il euftfait fans aucun exemple, on décerna le triumphedes Gaulois contre la coutume,araifon de fès grandes proueffes,auecla grâce, &c priere de les amys en l’abfence du Conful. Nous lifons aufli que par vne licence militaire du temps paffé ceuxquifuyuoientlecar,feiouoient ceiourla aar-rozer le triumphant de moqueries, & vers, fans danger. Lefquelles chofès toutesfois fedifoient de forte par les gens de guerre au Chef, que facilement on les découuroit eftre dides contre vn Capitaine voluntaire, èc ambitieux. Nous auons aufsi entendu qu’on auoit de coutume de porter en pompe par maniéré de rizée vne Citerië,qui eftoit vne effigie fubtilc 5z de grand babil deuifant auecle peuple. Et pourtant difoit M.Caton contre M. Cecile: Que diroyeie d’auantage ? comme quicroyqui fera porté en
- p.215R - vue 441/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- „ pompe pour vncCiteriëesieuz,ôcdeuilèra aueclesafliflans.Au demeurant la ville auoit vne ordonnance treflain de, Ôc digne entre les autres, laquelle à toutes entreprinfes & vuydemens d’affaires inuoquoit les Dieux: d’autant que les chofes qu’ils approuuoient,elloient hors de calumnië : &
- quand elle decernoitvn triumphé oufupplication,elle diloit en parolîes
- foIennelles,qu’il auoit tresbien ôc heureufement aminillréla République.
- LES PAREMENS, ET ORNEMENS DES triimphans. Chap.
- Estriumphansauoicnt plufieurs paremens, comme la coronnc de laurier, vne talTe d’or, ôc lâcrificale, l’anneau de fer,le manteau long de pourpre, auec palmes, vn feeptre d’yuire,ou bien celuy du trefgrana,ôc tresbon Iuppiter,la face outre plus peinéte de rouge flamboyant,tellemët que tout ainfi quon a de coutume de peindre es feltes la face de L’image de Iuppiter, comme le témoignent les au-theursnon feulement graues, mais aufsi fainétz, les corps aulsi des trium-phans les ont efté de mefmes:ôc a triumphé Camille de celle maniéré de religion.La Bulle aufsi pendant depuis le pis iufques au cœur, & ayant la figure d’vn cœur elloit vn parement des triumphans,tout ainfi que des ado-lelcens, au dedans de laquelle elloient des remedes qu’ils ellimoient valoir contre les eguillons ôc morfure de l’enuie. Il eft aulsi certain que les trium-phanslaportoient fur le cœur, à fin que ceux qui la regarderoient fefti-maflent de tant ellre dignes du nom d’honneur filz furpafloient tous les autres de celle partie. Au demourant aulsi (Butta) elt dictede jSovAilmot Grec, qui lignifie en Latin [conflium) conlêil, ou bien d’autant que la Bulle couure la partie du corps, en laquelle le naturel conlêil fait fa relîdence. Les triumphans aulsi elloient amonnellez par derrière en ce tant glorieux car,qu’ils elloient hommes.De vray on luy dilôit: Regarde apres toy, ôc te fouuienne que tu es homme. A la vérité aulsi elloient ils en fi grande ioye de le voir en vne fi grande Iplendeur de gloire, que l’auertiflement de leur condition leur elloit oportun . Or comme la coronne fuit foullenuë par derrière, ôc que l’an neau de fer fuit au doigt,on prenoit garde tant a la fortune du triumphant, que de celuy qui arrelloit la coronnc. Au furplus les triumphansauoientdroiâ: d’ellre velluz d’vnlôlennel parement,Ôc qui n’elloit pasloyfible â chalcun de porter.La robbe de vray acquilê par vertu n’elloit pas a tous de mefme, car elle elloit differente de matière ôc de couleur. Quant au pourpre ietrcuue que les Romains en onttoufiours vfé, vray eft que Romule a porté la robbe Trabée. Tulle Hollille a elle le premier des Roy s qui a vfé du long manteau à bort de pourpre, ôc de celuy à doux d’or, apres auoir vaincu les Hetrufques. Veriusaulsi fait entendre queTarquinius Prilcus a depuis triumphé en chemilê d’or, laquelle les autres appellent Palmée, d’autant que ce vellement la elloit celuy duquel
- vlêroienc
- p.215V - vue 442/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. nè
- vfêroient ceux qui auoient mérité la palme, ou bien d’autant que les palmes y eftoiét veuës figurées. Ariftote de vray témoigné au fixiefme des problèmes que l’arbre de la palme neft pas fans propos tenu entre les paremens delà victoire ôc des triüphansraufsi faiét Plutarcbeau huiébeftne des Sim-pofês.Carfi tu charge ceft arbre de grâdpois,&que tu le forces & charges fi outrageufèment que la grandeur ne fe puiftè porter, la palme n’obeit point au fais, ny ne fe cambre contre terre,arguant au contraire contre la charge, tellement qu’elle fe courbe ôc cambre contremont. Parquoy dit Plutarche: la palme eft aggreable es combats, pour figne de victoire, Ôc d’autant que ceft vn bois noble, & qui ne fè rend point aux effors & vio-leces: de la êffc venu qu’on a dit que les triüphans ont porté rameaux de palme . La coutume eft aufsi venue de porter corones de l’aurier,& de tenir vn rameau à la main,non pas d’autant que comme aucuns dient,que fil eft offert entre les ennemys armez, c eft indice de repos, ôc + qu’on l’aioufte ^.Ex ^ aux lettres pour principalement dénoncer aux Romains vne ioye, & les l.xv.cxxx. victoires, ne pour autant qu’il eft continuellement verd, ne aufsi pour de- adde » ad~ noncer la paix,ne pour auoireftépofe au giron de Iuppiterletrefgrand ôc ter^pro" tresbô, toutes les fois qu’vne nouuelle victoire apportoit vne ioye.- car aue- fuiflet, nant I’vn ou l’autre,l’oliuierluy eftoit à preferer : mais pour autant quelle eft merueilleufèment belle au mont Pernafê , ôc àceftecaufe aggreable à Appollo,eftans ia comme le témoigné L. Brutus, les Roys Romains accoutumez d’y enuoyer des dons.-prenans parauanture occafion, d’autant que la Brutus auoit mérité la liberté publique,ayant baife cefte terre la portant lauriers, fûyuant la reponfè de l’oracle. Et d’autant que ceft le feul des arbres qu’on plante a la main,qu’on reçoit es maifons ôc que la foudre n’attei nt point.Pour ces caufès donques croyroye ie plus toft qu’on luy fe-roit honneur es triumphes, quepour autant que ce fêroit vn perfun de la defaitte des ennemys, ôc vne purgation comme dit Maffurius .Il eft aufsi auenu a Augufte de grans cas dignes de mémoire de ceft arbre, pour lef-quels ie le penfè auoirefté vfurpé es triumphes. De vray comme L'mïdDm-Jîlla (laquelle depuis a par mariage receu le nom d’Augufte)eftoit afsifê,vnë aigle defeendant du ciel luy offrit fans feffrayer vne poule d’vne viue blan-cheurfans eftre offenfee : ôc en fémerueillant y eut autres merueilles, en ce quelletenoitau beevn rameau de laurier chargé degrene.Les Arufpices ordonnèrent de garder cefte poule ôc fa race, ôc de planter le rameau ôc le bien garder . Ce que fut fait au village des Cefàrs afsis près le Tybreà la neufiefme pierre fur le chemin Flaminin qui a caufe de ce fappelle aux poules blanches : la ou par grandz merueilles eft venue vne foreft, de laquelle depuis Cefàr triumphant a tenu vn laurier en fâ main,& porté vne corone,
- & depuis luy tous Empereurs. Eta efté la coutume introdui&e de planter les rameaux qu’ils ont tenu,&demouroient lesforefts diftin&espaf leurs noms.
- p.216R - vue 443/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- LA FAÇON DES ROMAINS EN LENRS triumphe s. Cbap. VI.
- R pourlmurons nous la manière des triumphans donnans à co-noiftre en ces choies l’ordre des Romains. Au iour donques auquel deuoit eltre la pompe, tout le peuple Pvomain y abordoic par tout efpars pour voir le Ipedtacle du trium phe, e liant chacun félon lôn pouuoir paré des plus beaux veltemens, tellement que pas vn des citoyens ne gardoit la maifon,prenans place chacun la nuid précédant le iour du triumphe es Théâtres equeltres qu’ils appellent Circos}8c finalement es lieux drelfez de boys pour cela, autour de la place, es temples, 8c porches,es places publiques,fenellres, feftes de maifôs, 8c par tous les lieux de la ville elquelz feroit le pafiage pour voir le triumphe : lailfans tant feulement la voyede l’Empereur epanduë par tout de floeurs 8c bouqueltz odoriferans, deVerueines,&autres herbes donnansluaue lenteur. Puis vn grand nombre d’hommes ayans bâtons en main faifoient faire voyc au peuple larendans vuyde Scfpacieufe.Au demourantvne partie des gens de guerre marchoientauant iour par troupes, & ordre auec leurs Chefz, & eftoit eltablië au près du temple d’Ifis ( car la les princes repofoient celle nuiétéelâ)puisau point du iourilzportoient âleurmain dextres le laurier velluz de pourpre tilfuë d’or, & portez dans vn car doré, & fort ele-uépour pouuoir ellreveuz,ellans alsiz en maiellé fur le fiege curule 8c d’yuire.Puis tous les gens de pied marchoient deuant loubzleurs enlèi-gnes, 8c Tribuns. Apres lefquelz elloient portées les dépouillés des en-nemys, corones d’or,& les prelèns des villes alliées . Subfequemmcnt fuyuoit le fon des trompettes auec toute la nobîelfe des ollages, 8c pri-fonniers d’vne face, 8c habillement trille. Et fi le Chef des ennemyz eftoit prins, il elloit fur la queuë de tous ellant mené deuant le car enchayné. Quatre cheuaux bejux, 8c blancs, bien harnachez tiroient le car,apres lequel tous les prilonniers qui elloient venuz par la prouince â telle raie pour l’affranchiflement de la leruitudc, ou bien ayans chapeau en telle pour marque dudondelalibertélûyuoientle car du triumphant. Les gens de guerre & cheualiers fûyuans ce cardes Empereurs félon les légions, cohortes, & chambrées auec le laurier en main,chantansen partie des carmes du pais mellez de rencontres, 8c moqueries : &chantans en partie les louenges des triumphans palfoient aux galleries de la ville, la ou le Sénat & tous les ordres epanduz au deuant attendoient leur venue: laquelle ne le faifbit linon par la porte 8c voye triûphale auprès du Vaticane, qui a prins le nom,d autant que la pope des triumphes y palToit touliours. Et la apres auoir fait leurs facrifices,&oraifons aux Dieux, ils prenoient leur réfection, 8c menoient le triumphe velluz de robbes magnifiques 8c triumphales ellans les Dieux âfsis âla porte, auxquels ilz faifoient facri-
- p.216V - vue 444/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII. 2.17
- ficespaftans entre les efiharfaux , a celle fin qu’ilzfuifent veuz plus aiie-ment du peuple. Ornefituroiton fuffifâmment reciter la multitude,ne la magnificence de ces (peclales en toutes choies , ne mefines les pen-fer, foie en nouueauté d’artifice,ou de richefles,ou de nature. On a de vray cerché toutes les choies qu’on peuttrouuer entre les hommes bien fortunez en quelque contrée que ce loit , félon qu’elles font plus admirables ôc magnifiques,plus aux vns qu’aux autres : tellement qu’vne multitude infinie d’argent & d’or tant en oeuure,que pur, que monnoye,
- & d’yuire & pierreries, ôc de riches robbes d’vne eftoffe rare fùyuoit: les autres portoient grandes taffts ôc phiolesfôc gobelletz fort bienpenez,
- Sc grands. Les autres des vafesen grand nombre d'or,ôc de pierrerie d’vn grand artifice , ôc poix. On portoit lùblèquemment des chaines, ôcecuftbns auec montagnes d’or enuironnées de cerfz, lions, ôc pomes de toutes fortes par vn ordre certain. On portoit aulïi des images à demie boffe,ôc les Dieux que les autres auoient fait d’vne grandeur mer-ueilleufè, ôc d’vn artifice diligent. Apres eftoient portez achariotzmédaillés de bronze, ôc de marbre , auec tableaux ôc collolfes . Aulfi e-ftoient bâtons & autres dépouillés des ennemyz comme catapultes, ha-liftes, ôc tous infirumens de baterie auec armes riches, ôc. belles d’vn cuyure , ôc de fer bien poly, ordonnées de forte quelles fembloient y eftre cheuës par fortune : entre lefquelles eftoient couchées fâlades, e-feuz , cuyraires,graiues, boucliers, pointons, troulfes, mords de chenaux, efpées nues, ôc des piques fichées -.tellement que le regard don-noyt frayeur mefines aux veinqueurs .Laquelle eftoit mefimement grande veu les engins qu’on portoit:pour la grâdeur defquelz,ceux qui les r’encon troient,eftimoient les porteurs eftreen grand dangier.On portoit en triü-phe les enféignes des gés de guerre,auec les modelles des villes,ôc bourgades. On menoitaufsi troupes des cheuaux priz ôc de diuerfis manières d’animaux, comme d’Elephans, ôclyons harnachez de leur propre harnois. Apres eftoient menez bœufz â cornes d’orées,parez de bandeaux,ôcco-rones, lefquelz vne ieunefle menoit trouffée pour les facrifier : ôc les tafi fes d’or,ôcdargent eftoient portées pourfèruir au fàcrifice .Toutes lefi quelles chofis ne pouuans eftre menées en vn mefme iour, pour la multitude ôc abondance,eftoient quelques fois reftruées au Iendemain.A-pres lefquels vne autre face de guerre fembloit foffrir es ieux,efquelz on vo-yoit ruiner des villes fortes, défaire la force des ennemys,les vns eftre tuez, les autres fuir:Les vns priz prifônniers,abbatre d’engins murailles d’vne hauteur merueilleufè,rafer chafteaux, ruiner villes bien peuplées, l’armée fefpandre dedans lescartiers tous pleins de malfàcre, les prières des gens fans defenfè,le feu mis aux téples,les ruines des maifonsfùrleursmaiftres. L’artifice ôc grandeur des ouurages les monftroient aux aftiftans, neles fachans comme quafi faiétesau vray:Ainfi!e difànt Ouide au Ponte:
- * z-\ f.
- O o.).
- p.217R - vue 445/480
-
-
-
- %
- ROBERT VALTVRIN
- Les Villes ehufnees auront de tours & murs La ceinture3 & qu’au \raji faillefemble lafeinÛe.
- Or eftoit le temple de Iuppiter le Capitolin, la fin de ce triumphc : la ou a-près qu’on eftoit arriué,les veinqueursfuyuans Fancienne coutume atten-doientiufquesàcequequelqu’vnlesauertitdela mort du Chefdes enne-mys. Car le Roy ou Chef des ennemys eftoit condamné a perpétuelle pri-{on:ou bien attaché par vn licol on le rnenoit publiquement à la mort. Et apres les nouuelles receuës de ceftefin de vie, & que tousauoient fait la court, ilz le retiroient au palais eftans les làcrificescelebrez & perfaiétz lo-lennellement pour la leçon de fois.Puys les triumphans dreflans banquetz aux autres,faifoientinuiterfuyuant lacoutume les Conlûlzpourfytrou* uer,lescontremandans par apres,à fin queceiour laperfonnen’y fuftde plus grande authorité que le triumphant.Àu demourant tous les autres auoient en leurs maifons appreftz de banquetztpar ce moyen la ville de Ro mecelebroitàgrande ioye outre toute maniéré accoutumée d’honorifi-cence ce iour heureux,pour l’augmentation du bien public, & de l’Empire du peuple Romain auec la fin des maux ciuilz.
- LES LOIX TOVCHANT LES coronnes. Chapitre. VIL
- L eft aufil neceflaire demefiircr la maiefté des coronnes d’vne fpeciale confideration , comme qui font d’vne grande dignité auecvn grand eguillon de prouefle .La prudence Romaine a tenu vne coutume d’ancienneté pour enhardir les cœurs, que le Capitaine apres auoirbien,&de bon heur vuy dé vne guerre, montoit en chailê, & aflembloit les gens de guerre pour louer chacun en ces prouefles, & que pour le témoignage delà vertu il dônaftcoronneàceuxquiauoiét bien lèruy la Republique,à fin qu’il y euft qualité de faueur. Et a fin que ie commence preîque au commancement, les anciens les portoient Iegeres, les appellans ftrophes,d’ont font venuz les ftrophioles,lequel vocable en-cores a eftévfurpé entre les choies Diuines, & les honneurs Martiaux, eft quelz les coronnes gardent leurs noms:teIlement que quand les coronnes Es pîinio fe faifoient de fleurs, elles ont efté appellées ferma de frété lèmer. Le peu-lUi .e».3 pie Romain a fait l’honneur de fleurs tant feulement à Scipionfurnommé Serapion pour la lemblance qu’il auoit à vn certain marchant de pourceaux. C’a efté vne façon qui n’a pas fort pieu aux Gréez anciennement. Onfouloitlorsdevraycoronnerde rameaux d’arbres es combatz facrez, qui a efté quelque temps es camps Romains:tellement que Romule aainfi coronné d’vn feuillartHoftilius grandperedu Roy Tulle Hoftile, pour eftre entré le premier dedans Fidenes : aulsi a de mefme l’armée le pere P. Decie Tribun des gens de guerre pour auoir lâuuéla vie a Corneille ColTe
- Capitaine
- p.217V - vue 446/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE, LIVRE XII. 218
- Capitaine general & Conful durant la guerre des Samnites.Onadepuis commécé à les diuerfifier,par vn mellement de diuerfes couleurs: & ont les Sicioniens premièrement brufléenfemble les odeurs & couleurs des fleurs: defquelles encores chacun nepouuoitpasvferàfon plaifir,finôn ellantre-ceuauecvne grande feuerité.Devray on ne trouue point d'exemples de la licence d’elles autre delancienneté que de la fille du Diuin Augulle, du quel Dieu les lettres gemiflent que Marfias ait efté corone toutes les nuidz par la luxure d’elle. Comme P.Numatius eut coronné là telle d’vne coron-ne de fleurs oftée à Marfie,& qu a celle occafion les Triumuires euflent ordonné delemenerenprilbn,il en appella aux Tribuns de la cômune,le£-quelz ne luy donnèrent point de confort. Comme le changeur Lucius Fuluius full accufé eftre allé delà galere en la place de iour auec vne coron-ne de rôles durant la féconde guerre Punique, il fut par l’authoritédu Sénat menéen prilbn,lànsenpartlrauantqu’ellefull finie. Aptes'lelquelles corones ainfi receuësbien toll apres vindrent celles qu’on appelle Egyptiennes^ par apres les hyuernales lors que la terre denië les fleurs,en dô-nantteindure aux ratures de corne :aulsifit celle que Homere appelle . Depuys ancra à Rome peu a peu le nom de Corolles par Lu-cilius ainfi au commencement dicte pour eltre grefle, & bien toll apres celuydes Corolleres melmement depuys qu’on les bailloit de lames de cuyre tenures d’orées ou argentées.Il elt certain que la coutume de coroner a ellé premièrement des Dieux des Gentilz-.& dit on que Dyonifius,comme le témoigné Diodore lioit là telle d’vne mittre , fi quelque fois elle trauailloitpour auoir beu :d’ontila eïlé appelle Mitrophore, que depuis les Roys auoient de coutume de fàcrer leur telle d'vn diademe au lieu de mittre : &qu’ainfi l’a premièrement lepere Liber mis en là telle fait d’yerreayant triumphé des Indienx.Les autres comme Pherecides diéc que Saturne a ellé auant tous coronné. Les aucuns tiennent que Iuppiter a ellé premièrement honnoré de celle dignité apres auoir défait les Titanes. Au furplus la corone d’elpicz de bled, fut baillée pour enfeignetref-lainde à Romule à Ion facerdotat, qui feroit liée d’vn ruben blanc, lequel * auoit premièrement inllitué les prélats des terres labourables, & felloit nommé pour le douzielme frere entre eux. Cell la première corone receuë àRome,&ell vnhonneurqui ne finit qu’auec la vie .Mais apres qu’elles commencèrent à ellre baillées par honneur aux Dieux, en coronant aufliles vidimes,elles ont ellé fublèquemment vfurpées aux combatzlà-crez. Devray c’elloitvn grand honneur en Achaïe ,de coroner dePer-fil les veinqueurs, au combat làcré de Nemée,tout ainfi que del’Am-brofie ('qu’aucuns appellent Botrys,les autres Armoilë)on en coronné en Capadoce. ilzordonnoientque les veinqueurs ne lëroient pas feulement honorez, mais aufsi le pais .De là cft venu qu’on les liuroit à ceux qui deuoient triumpher dedans les temples de Diane pour Ibudain les hurer aux ieux. Et ont ellé dides Donatices, d’autant qu’on les
- O. ii.
- p.218R - vue 447/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- donnoit es ieux aux vainqueurstce quon fàijfôit de mefine aux ouans.il eft certain aufsi que les Athéniens n’ont pas feulement introduit l’vfàge de i’o-- liue pour les veinqueurs,mais aufsi pour les citoyens d’excellente vertu,en coronantle Chefdel excellent Pericles: Les Gréez aufsi de l’oliuefauuage de l’Olimpie.Et pourtant Hercules auoit le Chef coronné hores d’oliuier jfâuuage, maintenant de Peuple,.autre fois de brin deperfil.Au iourd’huy les feulz Atheniés,& plufieurs des Gréez vient de la coronne d’oliuier. Au furplusloliuierafait grand honneur a Iamaiefté Romaine en coronant les troupes des Cheualiers,qui eft vne coronne qui n’eft pas fort ancienne aux noftres, ny n’a efté de ces xemps la liurée , mais tant feulement du temps de QTabiusRutihanus, qui premier ordonna que les Cheualiers Romains coronnez dejrameaux d’oliuier iraient lequinziefme de Iuil-let àcheualdu temple d’honneur au CapitoIe.Et depuys eft venuë la coutume que ceux qu’on receuoit entre les Cheualiers eftoient coronnez de cefte maniéré defueillars,quafi comme tranlportez & adioin&z a cefte di-gnité.Nous liions aufsi que ceux qui auoient procuré Ietriumphe,en e-ftoient parez, &; non pas ceux qui f eftoienttrouué aux batailles. Il eft vray que ie ne pourroye bien dire la caufe pourquoy cefte coronne la, ait plus toft efté d’oliuier que d’autre rameau : ny ne me louuient I’auoir îeu es autres efcriuains, quelque curieulèreçerche que i en aye fait .-combien que ie ne loyeignorant qu’on la peut tirer à diuerfes lignifications, ouplus toft fottiles,& relueries.Et combien que cefte nation princelfe feule des terres &c citez ait plufieurs elpecés decoronnes que nulle autre contrée,qui ont efté d’vn grand interualle,.& fort differétes, comme celle d’or, les vallares ou paîîiHaires,murales,roftrées,6c Bourgeoilès, ou citoiennes: Emendaui il n’a point toutesfois efté de coronne plus noble que la Graminée. La-ex Pli. hb. qUeJje |e Sénat eftant hors de la lolicitude de la guerre, & le peuple en repos ont ordonne:&ne lauoit aucun h nonen vnextreme delelpoir,ny n’eftoit décrétée que par toute vne armée lâuuée. Quant aux autres co-rones les Empereurs les ont donné, mais le foldat donne cefte fèulle au Chef. Elle fappelloit aulsi coronne de fiege lors qu’vn camp eftoit deliuré d’vnfiege,& d’vnedefaiète abominable, d’autant que ceux quieftoiét de-liurez la donnoient au Chef qui les auoit fauué. Or eftoit elle en grad honneur & gloyre,car fi l’honneur qu’on fait a laBourgeoilê pour auoir fauué quelqu’vn,encor que ce foit quelque fimple citoyen, eft tenu pour noble ôc làinct,en quelle eftime doit on auoir la fume de toute vne armée par la vertu d’vn feul ? On la bailloit de l’herbe de chien, dent verte cueillie au lieu au quel quelqu’vneuft lâuué les alsiegez . C eftoit de vray anciénemét vn bien grad ligne de vi6toire,quad les veincuz tendoiét l’her-be.-car c eftoit quitter fa nourrice la terre,& la fepulture: laquelle coutume a lôguemét duré en Germanie. A la vérité aufsi les anciës ont voulu que l’her befuft diète palme ou viétoire,ce que Aètiusmontreapertemétau Melea-„ ger:IIzfefiouiftent(ditil)ilz courét,ilz côbatét,ilz oftrét l’herbe,ilzdonér,
- chacun
- p.218V - vue 448/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. ±i9
- chacun garde la coronne qu’il a autour de là telle. Au demourant quand ie baille l’herbe dit Plaute,cela lignifie que ie me confefïe veincu, qui eft vn figned vne ancienne vie & paftoralle. Car quand les hommes combatoiéc en vn pré a la courte ou luy te,ilz cueilloient de l’herbe en la terre, ou efloit Ieieu, &la liuroienta leur aduerlàire.Celle corône fut donnée a Lucius Dentatus vnefois apres en auoir mérité quatorze Bourgeoilês. Quelques Chefzaulîi fouuét l’ont eu par don,comme Decius Mus, Tribun des gens de guerre par l’armée: & vne autre de ceux lefquelz tenans garnifon furent alfiegez.Or montra il parladeuotion,quantgrandeefloitl’hautorité de cell honneur,car l’ayant eu en don ilimmola vn bœufblanc à Mars,& cent autres fauues que les alfiegez Iuyauoient donné pour là vertu. Outre lefi-quelz l’honneur de celle coronneellauenu àM.CalphurninFlamine,Tri- BweTi^ bun des s;ens de guerre en la Sicile, & au mefme temps à la guerre de Dan- ex pli. lib. nemarca Cneius AttinasCentenier.Sylla aulïi Dictateur a lailfé par elcrit comme elle luy fut donnée auprès de Nolle par l’armée, ellant lieutenant (iu*1*c<lulî en la guerre Marfiquercequ’aulïi il a peint en fa maifon en la Bourgade Tulculane, que Cicéron eut depuis. Et f’dellvray de tant plus le diroyie execrable, veu que par fa prefeription il a arraché de fa telle, ayant depuis faiétlemallâcre de beaucoup plus grand nombre de citoyens qu’iln’en auoit fauué.Or qu’il aioulle encor auiourd’huy a celle gloyre ce fuperbe n ode heureux, il a toutesfoiscedéau Sertorinen celle coronnee, liant les alfiegez baniz par tout le mode.Elle a aulsi elle baillée parle Sénat & P.Ro. a ce Fabi9 qui remit fus les Romains làns eôbatre lors que Hânibal fut chaf federiralie.Emiliâ Scipion aulsi a eu en donfcôme recite Varro)celle co-rone de fiege en Aphrique,ellant Manlius, Conful, pour lafauue de trois cohortes,pourlefquelies fauuerilen auoit tout autant mis aux champs.
- O n dit aulsi que le Sénat en donna vne au Diuin Augulle le lêizielme iour de Septembre.Et combien que comme beaucoup d’autres de noz ancellrcs celle coutume loitabolie, l’excelléce toutesfois & grandeur deton cœur (Sigifmond PanduIphe)adenollre temps ellé honorée de celle coronne, d’vn contentement vny,a la guerre de Plombin, mefmes de toute l’armée des Tufcainsfauuée par toy, & fublêquemment par ceux qui elloient af-fiegeZjdu Sénat aulsi &peupleFlorentin,&finalementdetoutelaTu-fcane& Italie deliurée par toy du peuple barbarefquiellvn hôneur dont àmonauisil n’ell rien li glorieux) veu qu’en chalfant de la Tulcane ce grand Roy de Terraconne de Sicile de ça & au de la du Phar de Valence,de Hierufalem,de Hongrie , de Maiorque & Minorque , de Sardaigne, de Corlè,Comte de Barfelonne,Duc d’Athenes,de Neopatrie,Comte aulsi de Rolsillon,& de Ceritanie:tu as forcé Ion camp en façon de foudre aueef! peu de gés,en te iettant à li grandz perilz,& en remettant fus toute la Tuf-cane,allant en ruine, & prefques perdue, lors que les corones murales le de-ccrnoient à fesfoIdas,qui à ce dernier voyage lâauoient ia monté la mu-
- Oo.iij.
- p.219R - vue 449/480
-
-
-
- Lego fle -xiflcr pro ftetiflct.
- ROBERT VALTVRIN
- raille. Au retour de la quelle beauté & pompe d’armée remettant toutes chofesfus,tousleshabitansdupais& des villes furent au deuant,lefquelz tous contemploient par merueilles tes foldas, 5c toy feulement entre tant de notables Capitaines.Toute la cité de Florence auoit l’œil fur toy,chacun tecontemploitente regardant comme vn homme diuin enuoyé du ciel, tout ainfiquela vidoire: chafimte louoit pour la protection dupaismy nefefmerueilloientpas moins que ton feul pouuoir ait été fi grand que d’auoir été autheur de la retitution de leur ancienne fèigneurie, 5c liberté prefque e-teinde par le Roy, & que par toy la vidoire fétrafportatau lieu dont elle fetoit detournéauec vn merueilleux r’abailTement de la gloire Royale.D’auantage autiapresauoirdelaitelaTufcane, les Vénitiens veu le bruit de la gloire de ton nom pour tes proueffes faictes en elle , refont par vne voix,comme d’vn decret du Sénat,vn honneur non feulement humain mais aulfi Diuin. Ilzt’ehfênt pour leur protecteur contre Franciique Sphorceau pais de Lombardie auec vn grand apprêt, 5c depenfes, te fai-fans Chefde leurs peuples.Ie dy qu’ilz t’offrent comme maitre bien entendu en toutes chofes qui ont à etre vuydées jfoient d’entendement, d’atuce, de gaigner les lieux auantageux,preuenir Fennemy de vigilance, de tem-porifèr,de diligence,de fallaces, d’amufèmens, &rufès, toutes les fois& quantes qu’il en fêrabefoing, tant àla profpere qu’à la mauuaifê fortune, &aux cas fubitz & improueuz, étant au parauantles leurs defaietz par luy en la derniere 5c malheureufè bataille,& finalement rompuz,& Iaplus part chaffez,& grand pais prins,& qui aeflé 5c fera mis enproye. Ce qu’ilz ont fait pour la defence & conferuation de leur état, ny n’ont iamaiseté frutrezdel’efperance qu’ilz ont en toy, toutes les fois qu’ilz ont fuiuy ton confèil.Par vne mefme voye, èc non point autrement quelque peu de tëps apres que le bruyt courut parla Gaule Cifàlpine toutainfi que par laTu-feane fêtant à bonne raifon la fuperintendence de la guerre ordonnée par fur tous,& paffant à Creme ville tresforte,& inexpugnable auec toute l’ar-meé bruflant les bledz, 5c demoliffant les maifons, auecprinfès d’hommes & de betial en ruinant tout le pais entièrement, tu as réduit à ton obeif-fance comme victorieux par force,etans les paluz defêichez non feulemét lesfortereffes,lefquellesauparauant n’auoient iamais fouffert fiegefoubz la conduide de quelqu’vmmais d’auantageplufieusautres fortes &inac -ceffibîes ont faitiou à tes cfFors.Qite diray ie plus, veu qu’il et certain qu’étant entre tant d’excellens Capitaines ordôné & appelle par le decret du Sénat Chef pour Iatroifiefine fois tu as repoufféiufques à la mer inferieure,Ferdinand fils du Roy de Tarraconne auec toute ifon arméeRoyal-leÆt comme les Florentins defirafient réduire à leur ancienne fubiedion Folian,outre plufieurs autres places qui etvne grande ville, que la force du Roy tenoit bien garnie de viures,& munitions : 5c que pour ce faire tu fûtes party auec vne forte armée: il et certain que les afïiegez ont été pat toy reduidz foubz ta puitance, etans latez pour le trop veiller, con-
- p.219V - vue 450/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. *20
- tinuel trauail, & pour les combats aufti continuez iour & nuiâ:, qui n’a efté fans grand péril & perte des tiens. Et combien que Sauone ville Addopoft maritime noble & ancienne,grenierpour la guerre du Roy contre la Tu- Sa' {cane fuft d’afsiete inexpugnable tant pour la grande armée de mer que pour le rempart fur terre merueilleufèment long* &la vicinité du port, ioint quelle fuft bien garnie deviures & d’vn grand nombre d’hommes choifiz {ilz eftoient de vray quatre mille ) tellement qu’il n’y auoit aucune elperance de la prendre, eftant le lieu fortifié de tours, de murailles, barrières , fo{fez, &rempars: La promptitude toutesfoisde ta prudence feft auifé d’vneraifon plus forte que les armes, par laquelle furprinfè contre l’opinion de tout le monde auec la mort & fuyte de plufieurs par la démolition du lieu tu l’as ioint à la fêigneurië des Florentins,auxquelz elle eftoit deftinée. Comme donques tu ayes aquis non feulement à toy,& à toute la noble race des Malateftes,mais aulsi à toute l’Italie vne dignité, & Iouenge auec vn nom immorcel& gloire eternellepar tes vertus & autres, l’honneur, & la gloire fupreme te conuient:veu queteslouenges font manife-ftes non feulement aux noftres, mais aufsi aux langues des Tuftans, François, Anglois,& a autres quelque part que celbit, & le feront par cy apres.
- La corone bourgeoyfe eftoit par la Ioy ordonnée a quiconque auoit lauué de mort le citoyen,d’ont la première eftoit d’Euze. Ceft vne façon d’arbre toufiours vert,& pourtant dit Cecilius: On les apporte auec corone d’Euze , & manteau en noftre garde. Depuis on la trouua meilleure de l'EfeuIe de Iuppiter.laquelle encores on a chagé auec le chefne, {oit qu’on face ceft hôneurau chelneacaufedes Archades, que l’oracle Diuin loloit appelier mâgeglans,ou bien que ceft arbre {oit entre les fàuuagesleplusbeau& fertile, & entre les frâcz le plus fort (illiure de vray le gland a meintes nations pour leur nourriture &riche{Tes,encores qu’ilzloiétlàns guerre, & en font les belles & oyfeaux peuz,duquel aulsi le guy eftoit d’vn grand {êcours aux chafleurs)ou bien qu’il liuroit plus aiféméc pafture au foldat & par tout.-lbit aufsi qu’il fôit vn guerdon raifonnable d’auoirlàuué le citoyen,d’autat que le chefne eft dédié à lu ppiter garde des citez. A celle occafiô Claudian dit:
- Le camp iadisfoloit d’vn cbappelietde chefne , Les temples coroner,de cd qui a peu fauuer
- Le citoyen veincu, & au danger de mort.
- Les corones donques citoyennes d’arbres a gland font vne trelhota-bîe marque de la vertu des foldas, Auxquelles cedent les muralles & valla-res ou pallillaires, & celles d’or, quoy quelles loient plus riches : aulsi font les Rollrées,ou eperonnées,combien quelles ayentefté en grande eftime, mefmementen deux hommes, qui font Marc Varron (auquel durant la guerre des Corferes Pompée la donna) & M. Agrippa, que luy donna Ce-lar à la guerre de Sicile: laquelle aufsi fut diète pyratique. Au parauantles éperons des nauires fichez au fiege des Tribuns eftoient a honneur, tout ainficommevne corone afsilê ftir le peuple Romain. Mais apres que pat
- Oo. iiij.
- p.220R - vue 451/480
-
-
-
- •fEmcn-daui ex Pli. ü. l6f
- eap.4.
- 3>
- Jj
- J>
- jj
- jj
- ROBERT VALTVRIN
- les (éditions Tribunities ils commencèrent eftre foulez &paftouiilezaux piedz ‘.depuis aufsi que les forces publiques furent faides priuées &cer-chées par chacun des citoyens, & qu’ilz firent les choies IàcroIàindes,pro-phanes : alors les eperonsle drelferent de leur piedz aux telles des citoyens. Augufte donna cefte corone à Agrippa, laquelle auisi fut donnée àluille Celàrpar Therme à laprinlê de la Mettelline. Il eft aufsi auenu queM. T. Cicéron pere de l’eloquence Latine a efté honoré de cefte façon de corone parle peuple Romain a la faueur de L.Gellius îeCenforin dedans le Sénat: d’autant que par l’induftrie & vigueur de 1 éloquence de ce tant copieux orateur la trefcruelle coniuration de Catelin a efté découuerte & punie. Au demourant Sabin Manfurin en l’vnzieme liure des choies mémorables dit,comme le témoigné Aldus Gellius,que cefte corone a de coutume d’eftre baillée àceluyquien vnmefme temps euft contregardele citoyen en tuant l’ennemy, & que le camp Iuy fuft demouré. Toutesfois il dit que comme Tyberius Celàr fut requis, iï celuypouuoit prendre ceft honneur qui euft làuué le citoyen tuant fur la place deux des ennemys, combien qu’il ait perdu le camp du combat dont l’ennemy le loit faid maiftre en le repouifant,il répondit qu’on ne luy pouuoit railonnable-ment dénier cefte gloire & honneunveu que le combat a efté fi delàuanta-geux, que le plus gentil combatant du monde ne l’euft peu garder.Les autres dilènt outre ces choies que Sabin a dit touchant la corone citoyenne qu’ilfaut que le fauué le confefle, autrement lestemoings ny lèruentde rien ,& qu’il foit citoyen . Les alliez ne baillent point ceft honneur,combien que le Roy ait efté Iàuué : ny n’eft l’honneur fait plus grand pour auoir fauué le Chef, parce qu’en toutes choies les Legiflateurs ont préféré la bourgeoyfie. Depuis quelle a efté vne foisreccuëonla peuttou-iours porter:le Sénat aufsi a de coutume de toufioursfe leuer àlon arri-uéeaux ieuz,&adroid defalfoirau près d’eux.Il eft exempt de toutes charges, aulïî eft Ion pere, & Ion grand pere paternel. Les coronestrium-phales font celles lelquellesd’orlont portées deuantleChef vidorieux. Orne treuueiepointàqui on ait donné corone d’or : au regard du premier qui en a donne. L. Pifoenparle.A. Pofthume dictateur apres auoir forcé le camp des Latins au près du lac fiainde Seuere, donna àceluy par le moyen duquel il fut forcé, vne corone d’or du butin : tellement que celle qui anciennement eftoit de Laurier, a efté par apres faide d’or, lequel or on appelle communément or coronal.Pindare & Callimache font mémoire qu’ApolloIècoronna de laurier,les autres dientde l’Efcule apres la defaide du dragon. Ouide:
- Or à fin que le temps la famé n effaça fi
- Del'euure, Pytbïa ordonna les faïnél% ieu^
- D’vn renommé combat, diélz du nom dufirpent
- Veincu3la ouceluy qui d'entre la ïeuneffe
- Auoitveincu despfed%3des mains3ou de la roue, ;
- p.220V - vue 452/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. «
- „ S'acoujlroit de l'honneur d'vn rameau Efculée.
- ,, L’ors nefloitle laurier,Phehus de chacun arbre
- „ Les temples ceinéluroit belles d'vn longfueiüart.
- Lcpere Liber aulfi marchoit affeubléd:Vne corone de l’aurier apres auoir triumphé des Indes,auquel aulsi elloit lierre confacré, duquel,comme les autres dilènt,il a premièrement corone fa telle. Cefar Augufte auoit entriumphant le laurier en. telle, & en main, lequel combien qu’il lôit proprement dédié aux triumphes, e£l toutesfois portier trelàggreable aux Celars, pour beaucoup de railons & diuerlês. Ouide:
- Compagne aux Chefe ioyeux, lors feras que la voix Chantera les triumphes en ioyeufe lieffe:
- 3 » %^Aux venerables huysgardefure pofée
- 33 ^Auant l'entrée feras, & défendras le chefhe.
- Le melme en vn autre palfage:
- 33 Pourquoy donq du laurier ef couuerte la porte,
- 33 Et ceinél l'arbre feuilleux les venerables huys?
- 33 EJl ce que ce manoir a mérité triumphes
- 3> Perpétuel^ ? ou bien quelle ef tou fours aymée
- 33 E)u Dieu Leucadien ? ou quelle foit en ioje f
- 3> Ou tout réiouijjant ? ou bien que ce fie cy
- 33 Soit la note de paix quelle a liuré au monde:
- 33 Toutdinf que toufiours verdoye le laurier,
- 33 Ne flejlrijfantfafueille, ainjt a cefluy cy «
- 33 Son honneur eternelf Or de la ftfafifè
- 33 Corone,la raifon montre temoingl'efcrit
- j 3 Que par luy ont eflé'les citoyensfauue’Z.
- Le laurier finalement paroit les maifons, ôc telles des poëtes tout ainlî que celles des Cefars & Pôtifes: pour Iefquelz coroner nous auons leu auoir elléoblêrué d’ancienneté, que les Gréez auoient de coutume d’honorer trois combatz à chacun Quinquennal,de la mufique,de laluide,de nud à nud, & de courfe de cheuauxrielquelz Nero Claudius a premier introduit à Rome, les appellant de Ton nom Neronians. Al’imitation duquel Domitian les a fublèquemment honoré. Parce moyen les guerdôs &ho-neurs elloient ordonnez aux vidorieux d’entre tous les elcriueins & poëtes, comme d’entreles combatans a courlè, à pugnade, & a laluide. On choififioit de vray quelque nombre des plus làuans entre tous les lettrez,à fin qu’à leur iugement ceux qui entre les combatans de poëfies lèroient par lur tous autres plus louez,fulfent honorez ainfi que les gens de guerre combatans entre eux de corones, & gloire méritée. Nyn’elloit cela lâns raifon, car tant aux vns qu’aux autres elldeuë prefque vne melme gloire, ôcprefquemefme honneur tant à ceux qui ont fait les prouelfes, qu’à ceux qui par témoignage des choies faides, des lettres, &deleurelprit le lai£ fant à la pollerité ont acquis vne immortalité de nom-, La corone aufsi
- p.221R - vue 453/480
-
-
-
- ROBERT V ALTVRIN
- ouale fingere es affaires de la guerre,gratieufemét toutesfois 8c fans meurtre eftansfoudain les ennemis redui&z. A laquelle gratieufeté ilzont dit que le feuillard de la viôlorieulé Venus y eftoit bien leant,d’autant que c e-ftoit vn certain triumphe quafi Venerien 8c non pas Marcial.Chacun por-toit celle corofte non pas en car, ne attouré de Ton de trompettes, mais a pied auec fouliers Patriciens,8c yne harmonie de fluftes en menât la pompe à chant de Pean. La flufteauisi de vray eft pour la paix, & le myrte l’ar-briffeau de Venus, laquelle hait fur toutes choies la violence & la guerre. Pofthume l’Affranchy à marché en triumphant en Ion Conlûlatdes Sa-bins,eftant le premier qui ouant eft entré dedans Rome, & a rendu l’arbrif-léau defirable. Et depuis il fut la corone des ouans-.exceptéen M. Craffe,lequel apres auoirvuydé la guerre des fugitifz, fut porté corone de laurier +Ex 15.1. contemnant le myrte d vn decret du Sénat faid de grâce. Maffurius récité Sue ^es trlumphans en car, ont aulsi vfé de la corone de myrte. L. Pifo dit rius pro que PapiriusMalfo lequel premier triumpha des Corlès au mont Alban, Maximus, auoit de coutume de regarderies ieuz Circenlés eftant corone de myrte, Il fut grand pere maternel de l’Affricain qui fut depuis. M. Valere portoit. deux corones de laurier 8c de myrte,aulsi 1 auoit il de veu. La corone murale eft celle que le Chef donne à celuy qui premier a monté la muraille, & eft entré par force dedans la ville des ennemyz. Et pourtant dit Tite Liue: » La propre gloire de la corone murale,eftoit à celuy qui premier auoit môté 3> lamuraille.Orditon quele cheualier T. Romuliusaefté Iepremierqui a receu celle corone. Q^Trebellius,8c Sextus Digitus montans enfemblela muraille ont a caulè de leur vertu receu de Scipion celle corone en don.
- La corone Caftrenle eftoit celle qu’on donnoit au premiçr qui en com-batantforçoitle camp des ennemys, auquel on bailloitjDOür marque vn pallilfement d’or. La corone hauale eft celle qu’on a de coutume de donner en vne guerre marine à celuy qui premier fuft entré en armes dans le nauire ennemy.Orléroitil trop long, 6c laborieux de comprendre en vn récit tant des eftrangiers,que des noftres,quand a efté la coutume de donner enor la corone nauale,murale, 6c vallare, 6c qui outre plus les ainuen-té, 6c quelles premièrement,ou qui premierlesareceu, car elles font pref-ques innumerables 6c infinies, 6c vn grand nombre de liures d’elles eferitz par diuers autheurs. Somme qu’entre les Gréez Mneftée 6c Callimache medecinSjôcTheophrafteontelcritâpart de ces corones. Au regard des noftres quelques vns ont intitulé des liures ^Anthologiron : pas vn toutes-fois(pasqueietreuue)n’aparlé desflœurs. Il eft vray que Claudius Satur-nius commentateur a comprins en vn Iiure les corones des Dieux des Gen-tilz:auquelila fi bien épluché lescaufes 8clourfés, elpeces 8c folennitez, qu il n eft point de grâce de flccur,ne beau feuillard, pied d’herbe ne rameau qui n’ait elle trouuéeftre dédié à la telle de quelqu’vn.Cecy luffira touchant les corones. ’ ’’
- . LES
- p.221V - vue 454/480
-
-
-
- zzz
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII.
- LES HONNEURS ES PERSONNES prîmes. Cbap. NUI-
- L yad’autres honneurs delà vertu qui pour le prefent foffrenc que les Chefz nevfurpoient pas,mais en faifoientpart à ceux qui eftoient participai des trauaux de leurs combatz. Et pourtant non fans caufê dit Dauid â fon couftellier: Il a mis le fâng du combatenfaceindure ceinte fur les reins,&furlachauflurede fes piedz: finon d’autant qu’il y auoit quelques marques de vertu à l’accouftrement des perfônnes priuées .Le Balthée n eft pas feulement la ceindure d’ont nous nous ceignons, mais aufsi celle â laquelle pendent les armes. Les en-feignes de la légion fe peuuent difeerner par le nombre, Il eft certain aufli que les Romains ont donné aux alliez & aux étrangers des chaines d’or, 6c à leurs citoyens tant feulement d’argent: auxquelz aufli ilz ont baillé lecuflonque leseftrangiersn’auoientpoint. Ondonnoitaufsiaux anciés des bardes 6c pointonspour leur vertu. L.SiciniusDentatus de vray qui fut tribun des gens de guerre receut en don vingt 6c cinq bardes & dixhuid pointons, 6c d’auantage. Le pointon eftoit le fupreme des armes, 6c de l’Empire: 6c pourtant on en fàifoit prefent aux vaillans hommes, 6c foubz lequel aufsi les prifonniers eftoient venduz : les Roys des Romains le por-toient au lieu du Diademe,lequel les Gréez appellent o’XHTrrç* feeptres. A la vérité aufsi les anciens au commencementdu monde adoroient les pointons pour Dieux immortelz:pour la mémoire de laquelle religion on a depuis aioufté des pointons aux images. Il eft certain aufsi qu’on n’a pas feulement donné aux anciens des bardes, & pointons, mais aufsi des cceufs d’or. Nous lifons que Ancus Tarquinius Prifcus a cftéle premier qui donna vn cœur d'or à fon fils, ayant en bas âge tué l’vn des ennemys : d’ont depuis en vint la coutume que les enfans des cheualiers porteroiet cefte marque, à celle fin que les enfans des nobles fuflent difeernez de ceux de la cô-mune. Le parement aufsi de l’anneau d’or eftoit en grande authorité 6c dignité aux autres nations 6c aux noftres. Auquel les fables ont donné commencement du rocdeCaucafus par vne interprétation fatale des liens de Promethée plus toft que pour parement. Au regard de ce que l’antiquité luy donne le premier anneau, 6c de fer, ie le tien pour fable.Et quant â ce-luy de Midas,autour duquel perfonne ne voyoit celuy qui le portoit:qui ne dira cela eftre trop effrange delà vérité, combien que félon l’auis de Cicéron il foit pofsible? On dit aufsi que le Roy Pyrrhus, qui eut la guerre aux Romains auoit vne agathe fans feinte, 6c de grand pris, en laquelle on voyoit des images naturelles,& fans artifice d’homme de diuerfès cho-fès,commeiumens,riuieres,forcftz,oyfèaux, 6c beftes fàuuages,de figures naïues 6c non grauées auec lignes fi bien couchées 6c conioindcs en-fêmble,que chacune d’vn fi grand nombre d’images fe choififloiten vnfi petit efpace fuflifant âfon pourtraid. Le bruyt de l’anneau de Pylocrates
- FVerti eî 7. li.c.1?^ Plinii,
- {•Legc.A.
- Tarqui,
- Ex .xxxvii Plinii .c.i, adde iilii, poft, me* ruiHênt.
- Hæc emo-dauiexpro hem 37. Plinii,
- p.222R - vue 455/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- efl de plus grande ancienneté: duquel celle Sardonice qu’il auoit en recô-mendation e liant iettée en la mer/ut rapportée auec la prinlê dvn poilfon tué deux centz& trente ans apres l’édification de Rome. Et combien que nous ne liions en Homerequedu temps des Troyens il ne fut aucun an-legô mif- neau, & qu’il n y ait point de doubte que les paquetz de lettres qu’on en-fitatos pro uoyoitelloientclozd’vnneud, & non pas d’vn cachet: on dit toutesfois mufitatos que entre les Carthaginois le parement des anneaux elloit receu félon le 33 pUnii.1* nombre des voyages qu’ilz auoient fait a la guerre. On dit que les Lacede-tnoniens les auoient de fer. L’anneau aulsi a iadis ellé le parement des cheualiers Romains,les feparant delà commune, ny n’a commencé en mefme temps à l’ordre des cheualiers & du Sénat: &ell certain que long temps apres ils prindrent les anneaux d’or. On les bailloit de vray publiquement aux ambalfadeurs allans en ellrange contrée pour les porter publiquemét, vfans en priué de ceux de fer. le croy que c’elloit d’autat que par ce moyen les ellragiers les cognoilfoient les plus honorables, ny n elloit la coutume aux autres d’en porter, & non qu’a ceux qui les prenoient pour celle caufê publique.Ilz triumphoient aulsi communément delorte,que quand l’He-llrulque couronne d’or elloit foullenuë par derrière, ils auoient toutesfois Tanneau de fer au doigt. Ainli triumpha C.Marius de Iugurtha, lequel on dit auoir chargé l’anneau d’or àlon troifielme Confulat.Par ce moyen lot n’elloitpasgrandàRomeparvnlongtemps:caràlaverité quandla ville fut prinlê par les Gaulois,ilz ne fceurent payer pour achetter la paix plus de lix mille elcuzd’vfage aufsi des anneaux elloit bien rare à la fécondé guerre Punique: car comme pour la pompe de la grande defaide aux Cannes il loit certain que parle commandement de Hannibal,Jes anneaux d’or fufi lêntepanduz a l’entrée de la court, l’amas en fut fi grand, qu’on afferme qu’en les melùrant il l’y en trouuatrois boilfeaux & demy,les aucuns difent trois, les autres deux entiers enuoyez à Carthage, combien que le bruye commun a elle comme il lêmble à Tite Liue, & qui approche plus la vérité, qu’il n’y en auoit point plus d’vn boilfeau,dilànt d’auatagepour montrer la defaide plus grande, que nul hors les Cheualiers, ou leurs Chefz portoient ce lignai. Plufieurs aulsi des Cheualiers,& qui ont ellé du nombre des Prêteurs,ont porté iufques à la mort l’anneau de fer dedaignans celle maniéré d’anneaux d’oncomme ManiliusjL.Sulfidius & Calphurnius, & alfez d’autres vaillans hommes Romains, l’ellimans choiereprochable, effeminée,& digne de blâme.-d’ont encores on fait memoyre de ce did de si Gracchus contre Neuius : Conliderez, dit il, Mefsieurs les Romains là fè-a nellre: Voyla celuy foubz l’authorité duquel vous viuiez,& qui pour le de-fir des dames,ellparé en femme.Celuy qui premier ordonna les anneaux, nen a pas làns propos accoullré la main gauche & lêcrette, comme quafi n’ellan s pas leurs pour la gloire de la dextre. Cralfus grand Capitaine general eut deux anneaux en là viellelfe, mettant en auant pour exculè que lès richelfes elloient creuës. Or tout ainfi qu’aucuns de celle ancienne lèuerifé
- n’auoieac
- p.222V - vue 456/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII. 22 n’auoient aucuns anneaux, autres aufsi hommes notables les ont eu, lors auec pierreries, & graueures par vn defordre d’âges.Donc Sylla a efté fi friand qu’il portoit faiétz grauez en vne pierre dans vn anneau dont la graueure eftoit de ce Bocchus Roy delà haute Mauritanie, qui liuroitfon gendre IugurthaâSylIa,le prenant entre les mains,qui fut la caille de ce di~ Icord irréparable d’entre luy & Marius, qui ruina prefquela République Romaine: veu queplulieurs qui brulloientd’enuie contre Marius femoiéc par tout que ç auoit efté l’ouurage de Sylla. Nous Iifons aufsi que l’anneau de Pompée auoit vne pierre precieulê ayant en graueure vnlion portant efpée.Il eft vray aufsi que la coutume eftoit de porter anneau nonleule-ment pour diapreure, mais aulsi pour cacheter. Et pourtant il n’eftoit loy-fibled’enauoirplusd’vn,ny àautresqu’aux hommes libres :lefquelzlèulz la foy dilcernoit gardée en la graueure.Parquoy il n’eftoit pas licite aux fer-uiteurs d’en porter. Les aucuns aulsi ont fait prouifion d’anneaux pour la mort, enfermans despoilonsfoubz des Ceraunies, Iacinthes, Emeraudes, & autre pierrerie.Ainli a fait Demofthenes Chef de guerre & fupreme des orateurs de Grece: aulsi a fait Hannibal Chef des Carthaginois, & Helio-gabalerà celle fin qu’en aualant la poylbnqu’ilz portoient loubz la pierre precieufe fil en eftoit befoin,c’eft à dire que quelque violence les preflaft, ilz mouruflent loudain: L’vlànce donques des anneaux d’or diftinguoit les Cheualiers de la commune,comme nous auons dit:veu que ceux qui ne I’e-ftoient,auoient de coutume de le porter de fer, & rien autre choie durant la paix.Car es batailles on auoit de coutume d’enrichir les armes d’or, mef-mes les Gaulois,defquelz non fans caulê eft ce dnft de Virgile : jj D’or eft leur cbeueleure,aufsi eft leur vefture
- >j 11% fe montrent fort brunes en nerueurcs de fttye,
- jj Et font d’or leurs blanc% col%,tout autour enlajfe%.
- Nouslilons aulsiparmelmemoyen qu’aucuns del’armée d’Alexandre ont efté appeliez Argyralpides,à caulè de leurs armes argentées, tout ainfi que les Capitaines & Cheualiers de noftre temps ont leur crefte, armée, ôc làyes enrichiz d’or, ôc d’argent.
- LES SEVICES D’AVCVNS XICTOKIEXX ET
- triumpbans renomme%par furnoms. Cha. IX.
- Aïs outre toutes les chofesfufdides, on donnoità ceux qui par leurs proueftes I’auoient mérité pour perpétuer leur renom, des furnoms, corne à Romulediéb de lignifiât force, lequel les anciés furnômoiétQuirinus,côme fi ce lurnom euft en foy quelque chofe de Martial & belliqueux. Nous Iifons de vrayqueles anciens a-uoient de coutume de dôner la lance â ceux qui côbatans vaillamét auoiét mérité louenge par leur prouelferd’ont il eft auenu que Romule, côme vn
- PP-Ê
- p.223R - vue 457/480
-
-
-
- Marci,
- ROBERT VALTVRIN
- certain Dieu Martial a efté appelle Qmrinus: combien qu’il n’a pas faute
- d’autheurs notables qui afferment, que ce furnom a efté deduid, d’autan t
- quefes citoyens eftoient appeliez Quintes :lefquelz ont baillé ce nom à
- -hLegô vi- leur Roy : ou bien d’autant que le Roy des Romains a vaincu les Cures.
- cent pro £e £)^atcar Camille apres auoir recouuré le pais des ennemys,& eftant visent. . , % r v r c v t r i ,
- ^ porté en tnumphe a Rome a Ion retour, rut aplailans motz de gens de
- guerre ( que comme de coutume ilz degoufilloient lourdement) appellé d’vnelouenge véritable Romulepere du pais, & le fécond édificateur de Rome. On ditaufsique M. Claudius cinq fois Conful ne fut point au-Lego Mar trement furnommé & did fils de Mars : car comme il fuft homme d’ex-tis pro perience à la guerre, fort de tous fes membres, &: de fa nature ardant au combat, il eut le premier de la race des Marcels le furnom de Marcial,ain-fi que dit Pofsidœne, félon l’auis duquel ileft certain qu’il a efté appellé par les Romains efpée, tout ainfi que Fabius, bouclier. Aufsi de mefmea efté le furnom de Capitolin à M. Manlius, d’autant qu’il repouffale premier les Gaulois du Capitole, qui le furprenoient la nuid. le ne fuis pas bien affiné fi le furnom de l’Aphricama point prinsfon renom d?vne fa-ueur des gens de guerre, ou bien d’vn bruyt de commun peuple, ou bien fil a prinsfon commancementd’vneflaterie de fes amis, comme celuy de Syllale heureux, & du grand Pompée parla mémoire desanceftres.De vrayceftle premier Chef, comme dit Tite Liue, qui a efté renommé du nom de la nation qu’il a vaincu. Ce que confefte n’auoir pas en petitte admiration d’eftre did d’vn fi grand autheur.-veu qu’au parauat Cneius Mar-tius apres auoir prins Coriole ville des Volfques a efté did Coriolan pour fês excellentes proueffes de guerre. Que dirons nous de ce premier Caton? N’a-il pas efté did Cenforin pour fa feuerité Cenfbrine? veu qu’au para-uantileftoit did Prifcus, & depuis il fut did Cato,quafi comme d’vn furnom de vertu & fapience : ou bien comme did le Cefarienfe de catus, qui nefonnepas comme aucuns difent,faige, mais fubtil, ainfi que le di-fènt Helius & Varro:ou bien en fuyuantTauthorité dePlutarche, d’autant que les Romains appellent Cato celuy qui auoitl’vfàge & expérience de plufieurs chofes.Fabius aufsi Rutilianuspour faire vn cômun accord,&quc les eledios ne fè fiflét par la force du menu peuple mit a part toute la tourbe des pradiciés,les affemblât tant feulemét en quatre bédes, &: les appella Vrbeines:qui fut vne chofè,comme l’on dit,receue d’vn fi grand contentement, qu’il facquit de cefte modération d’ordre le nom de trefgrand, qu’il n’auoitpeu acquérir d’vn grâdnôbre de vidoires. Q^ Fabius apareillemét acquis le furnom de Temporifêur,fbit que de fà nature il fuft pofé ( veu que pour fà clemence aux armes on le iugeoit brebiette)ou bien qu’en tempo-rifànt tout degré vnenouuellevidoire &fàlutairc, & fànscombatreauec I’ennemy,il a remis foubz la Republique Romaine. Quelque autre aufsi fut appellé Celer, pour l’admirable diligence & prôptitude de fon apprefh
- d’au-
- p.223V - vue 458/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII. zij
- d’autan: que quelque peu de iours apres le trefpas de jfbn pere ,il fit les ieuz funèbres des gladiateurs, tout ainfi que'Claudius fut furnommé har-dy pour auoir veincu les Volfiniens.Ie treuue aufsi es Annales, que L. Siccius Tribun de la commune a efté plus qu’il n’eft croyable,vaillant combatant, & que pour la grande hardieflè il a efté appelle le R^omain Achilles: ny n’a point efté autrement que luy Q^Cottius furnommé pour faproueiTe. LefurnorndeTorquatusaeftébaillé à T. Manlius venu de bien grande race, & auons entendu lacaufè du furnom auoir efté d’autant qu’il fc para du butin d’vne chaine qu’il ofta à l’ennemy,l’ayant tué: pour lequel faidlluy &les fiens ont efté furnommezTorquatz.
- Il n’eft Hiftoriographe notable qui ne die que Valere le trefgrand eftantieune & Tribun des gens de guerre, ne fc toit gaignéle furnom de Coruin en tuant le Chef des Gaulois : tant pour fa proueftè que par l’ayde d’vn corbeau arriuant foudain parvne vertu Diuine.,enempefchant les yeux & laveuë de l’ennemydefès ailes & ferres. Lequel aufti pour auoir prins Meftinaville de Sicile de grand renom, fut premièrement appellé Meflana,puispeuàpeu parvn commun changement de lettre, Mefîala.
- Comme Cornélius Rufïus eftant du nombre des dix députez per-fuadaft que les Jiures Appollinaires fuflent dreftez félon les Sybillins,il en fut par apres appellé Sibille, & depuis par vne corruptelle de vocable, comme nous auons dit, il commença eftre appellé SilIa,d’ont par apres Sylla le Dictateur prend fiiyte : qui tout ainfi qu’entre les Latins il a eu le furnom de heureux, eft intitulé enuers les Gréez L. Cornélius Sylla Venerien, comme il eft notoyre en la Cheronie de Plutarche qui en a elcrit en Grec, ôc comme aulsi on a trouué les trophées de la guerre Mithridati-que ainfi intitulez,& non fans grâce: car, comme dit Menander,la fortune donne beaucoup de bône grâce,& non nous,a laquelle il feft voué auec toutes les proueftes tat renômées, f écriât auprès de l’Oedipode Sophoclée: le me reclame eftre fils de fortune.
- IuilleCefar aufsi voulut qu’on luy décrétait le nom d’Empereur pour auantnom, &celuy de pere du pais pour furnom, entre autres plufieurs chofès donnans gloire à fon nom. Le fucceffeur duquel Oétauian Cefàr a efté diét Augufte,d’vn furnom beaucoup plus riche,d’autant qu’on appelle Auguftes les homes grads,fainctz,& heureux: ou-bien d’autâc que les lieux fàin£tz,& efquelz on fâcrifioit quelque chofè par augures font diétzAugu-ftesde auStusou de au'utm geftusouguftusc^ii fignifietdemefmes. QTabius Maximus facquit & aux fiens le fîirnom d’Allobrox, pour vne victoire fur les GauIois:de mefme aufsi les Germaniques fè font acquis ce furnom,pour auoir veincu en guerre lesGermains ennemys.Les noftres de vray pren nent ces furnoms ou auantnoms tout ainfi que les Gréez les foloiét bailler: dont plufieurs noms ont efté baillez à Dionyfius par les homes à caufê des chofes qu’il afaict.Les vus de vray i’ont die Baçchus à caufe des Femmes,lefquelles
- PP 4
- p.224R - vue 459/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- lefuyuoient(.B<*fd^«rtt)tranfportéesde furie : les autres l’ont dit Lenée, à caufe du prelïouer qui prelfe l£vin:les aucuns Bromie, a caulè du tonnerre qui auint le iour de (à nailfance, pour laquelle caulè il eft aufsi appelle Pin-genius. Il eft auisi dit triumpheur, d'autant que premier il a triumphé des Indes, eftant de retour au pais auec vn grand butin.On Peftime auisi auoir efté diét Libre,non pas pourvne licence de parolîes,mais pour autant qu’il deliure l’efprit de la lèruitude de foucy, & qu’il le rend plus vif,& plus hardy à toutes entreprinlès: au lurplus on l’appelle Pere,d’autant qu’ayant veincu les Indiens, les Thebains feftimoient libres & conlèruez luy viuant, quafi comme foubz la garde d’vn bon pere. Il en eft auisi d’autres deriuez de lès euures, comme Sauueur,& Victorieux,&: a caulè delà vertu Bienfa&eur, & Fraternel. On dit qu’Anftides a efté fi excellent en la vertu d’abftinen-ce, qu’on l’a furnommé iufte, & Phocion, bon,pour fa bonne vie. On a auisi dit ceu x enfans de Iuppiter, qui ont efté excellens en vertu, pruden-ce,& force, comme Eacus, Minos, & Sarpedon, & ceux, enfans de Neptune , qui on t efté trop outrageux,crueIz, & inhumains, comme engendrez de la mer,ainlî qu’ont efté Cyclops, Gerion, &, les Leftrigones:les autres a caufe de la bonne fortune,comme Eudemon. Nous liions de vray que Baftiisaeftéainlï appelle. Le furnom aufsi de rafeuille fut donné àDe-metrie fils d’Antigone, Chefpourlors de renom, à caulè du râlement des villesjoubienpourl’art&difciphne d’alsieger vne ville, & pour fa inge* nieulè in uention d’engins pour batre&forcer les villes. Nous en nommons aulfi aucuns félon la fortune de leur nailfance, comme les Procules, à caulè d’eftre naiz en païs eftrange loin g de leurs parens:& celuy Pofthu-me qui eft nay depuis le trefpas de Ion pere : & vopifque,celuy qui des deux iumeauxfuruit l’autre. Celuy aufsi, Celâr, qui eft nay par l’ouuerture du ventre de là mere ia trelpalfée. Voyla comment eft nay le premier Scipion l’Afîricain, & qui premier entre les Romains a efté appelle Celâr,pour l’in-cifion du ventre de lâ mere: on appelle celuy Seruius, qui apres la mort de là mere eft conferué en Ion ventre. Nous liions auisi aucuns auoir prins furnom de leur corps. De vray Horace print le nom de Codes, ayant au parauant perdu vn œil à la bataille, quafi comme Borgne, & voyant tant feulement d’vn œil. Les anciens de vray appelioient vn borgne, Codes, tellement que nous liions les Cyclopes auoir efté diétz Coclites: d’autant qu’on les recite n’auoireu qu’vn œil. Quelques vns toutesfois penlènt cela eftre dit, pour autant qu’ilz eftoient camuz, comme defquelz le nez cftoit fi écaché & plat foubz le front, qu’il n’y auoit prefque nul elpace entre deux yeux: & eftoient leurs fourcilz continuez & confuz enlèmble. Et pourtant ainli que le vouloir de plufieurs eftoit d’appeller ce nez Cyclops, la coutume de parler a gaigné de lorte que la plus grande partie l’ont appd-le codes. M. T. Cicéron a auisi eu au bout du nez vne carnofité en forme
- le temporilèur a
- auisi
- de chiche, d’on t il a eu le furnom de Cicéron. QTabius
- p.224V - vue 460/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. uS
- aulsieftédit Verruqueuxà caulè dvne verrue auxleures : 8c Cneus a elle diét à caulè d’vne Lentille.M.Curtius,8c Cn.Papyrius Carboont efté lùrnommezDentez,pour eftre naizauecdens .Ncoptolemus a efté dict Pyrrhus, à caulè delà qualité de fa perru que : lequel on dit auoir premièrement drelfé l’art des courlàires: 8c Alcanius,Iulius,pourlabarbe qui Iuy poignoit au temps delà vidoire. Artaxerxes,Longimanusà caufe de la main dextre qu’il auoit plus longue que la lèneftre. Varro penlè que le nomde Ancuseft venu des Sabins. Valere Antias elcrit, qu’il a eu le coude ofFenle, que les Gréez appellent «>jta^Papyriusa efté appelle Curlbr a caulè de là viftefie. Au regard de ceux qui naiflbient les piedz premiers & non pas la telle, qui eft vn enfantement qu’on eftime fort périlleux 8c maladif,ilz ont efté appeliez Agrippes,par vn vocable compolè d’egri-tttdo & pes. Les autres ontprins le nom par parentage comme les Man-lies, Cornelins, 8c Pompées, Ielquelz autres dilènt auoir efté ainlî fur-nommez d’autant que Pompée leur autheur amena de l’Elpaigne vne pope debœufz. Ainlî eftilauenuen Grece auxHeraclydes, 8c Pelopides, 8c plulîeursfurnomsàautres par vne imitation de vie, 8c qualî par vne certaine fimilitude prolongeans la gloire des viuans : veu que les aucuns ont prins merueilleux plaifir d’eftre appeliez foudres, comme les Iumeaux, Scipiades,eftans deux foudres de guerre,& ruine de la Lybie : lès autres aigles vidorieulês, & oileaux de proyeinuincibles : les autres Dieux, & engendrez de Dieu,comme ceft Alexandre de Macedoyne, & outre luyplti-lïeurs autres prenans grand plaifir d’eftre ainfi lürnommez.
- - LES RECOMPENSES DES ANCIENS les brouejjes. Cbap. X.
- Ais pour autant qu’on a de coutume d’employer le trauail 8c prendre le péril là ou il y a elperance de gain 8c d’honneur, 8c que les hommes ne fauantureront point àvn danger,fi on ne propolè grandesrecompenfesaux grandzelFors,ona concédé outre les choies que nous auons maintenant recité d’autres aux Chefz,aux Auxiliaires, 8c légions, tant par le decret du Sénat, que par la libéralité des anceftres lefquelles on dit eftre en grand nombre 8c diuerfes. Ilz ordo-nerentdevray pourlarecôpenlêdu plus ancien des Aphricains des ftatuës i d’vn mefme enrichilfement pour eftre veuës auec vn accouftrement trium-' phal,lefquelles lêroiët pofées en plufieurs quartiers de la ville, 8c es plus fre-quens: côme à la place des eleétions,a celle des proues,à la court, 8c au Ca-pitolle, 8c de luy bailler tous les ans de fa vie vn Confulat continuel,8c vne perpétuelle Diélature. Ilz ordonnèrent aufsi que Ion image Ibrtiroit en parementtriumphaldutcmpledutre(grand8ctresbon Iupiter.Nyn’a là grâdeur de cœur, 8c là notable modeftie peu refulèr apres fa mort, ce qu’on
- PP- «j-
- p.225R - vue 461/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- iie iuy a peu donner par l’ordonnance du peuple, ne parle decret du Sénat* Le peuple Romain a efté fort liberal en grandeur de prefens, comme qui a donné l’Afie au Roy Attale, mais aufsi Actalen’apas mis en oubîy le prc-fentqui par vne équité de teftament,a fait a fa mort vnlais delAfie au peuple Romain. Eumenes frere du Roy Attalle, & qui vint au fècours contre Antiochus Roy des Macédoniens eut pardon du Sénat toutes les citez d’Afie,qu’Antiochus auoit perdu par guerre.Pompée donna a Deio-taireRoydes Galates la petite Arménie pour auoirmené la guerre auec luy contre. Mithridates. Comme aufsi MafsinifTa Roy des Numides ,re-ceu en amitié pat P. Scipion l’Aphricain, eut faiéfc plufîeurs grandz faidz d armes, par lefquelz il a acquis vne grande gloire auxnoftres,eftansles Carthaginois veincuz & Syphax prins, duquel l’Empire eftoit grand & ample en l’Aphrique , le peuple Romain luy donna toutes les villes & pais qu’il auoit fubiugué. Comme M. Curius eut chaffé de l’Italie le Roy Pyrrhus, & que le Sénat eut ordonné fèpt arpens Romains au peuple, & à luy cinquante, il n’a point paffé la raifon de l’aflignation populaire, efti-mant le bourgeois peu duifânt à la republique quinefè contentoitde la portion qu’on faifoitaux autres. Le Conful aufsi P. Corneille Scipion ordonna a les foldas touchant les terres que chacun d’eux prendroit deux arpens pour chacun an‘qu’il auoit hanté la guerre en Efpagne, & Aphrique. Comme le dernier Scipion departoit les dons militaires à ceux qui auoiét bien fait leur deuoir, T. Labienus luy remontra de bailler à vn preux Che-ualier des blazons d’or, & comme il ne le voulut faire, à fin que l’honneur del’ordre nefuftviolé en ceftuylaqui de nagueresfèruoit,Labienus luy donna de l’or du butin des Gaulois: ny ne fêteut Scipion difantau Che-ualier tu receuras vn don d’vn homme riche, ce qu’oyant l’homme de chc-ualil baiffala tefteiettantl’or auxpiedz de Labienus, & comme apres il ouift Scipion luy difànt. Le C hef de l’armée te fait prêtent d’armes d argentai fen alla allaigre & ioyeux. L’affe&ion de C. Marius en recongnoite fànces n’a pas feulement efté fînguliere,mais aufsi bien grande. De vray il a donné a la bataille mefmes le droiéfcde bourgeoifie Romaine contre la condition de la c5federation,& cotre toutes les loix à deux bandes de Ca-mertins fouftenas d’vne merueilleufè vertu la furië des Dannemarchois.Et côme.quelques vnsblâmafTentcela,ilrepondoit qu’iln’auoit peu ouir les loix à caufè du vacarme des armes. Comme d’auantage C. Lucius fils delà fbeur,& Marefchal en fon fècôd Côfulat,fift effort à Trebonius d’vne grade beauté & fbldatfoubzfà charge pour le violer, & que le ieune homme l’eut tué,ilneniapointd’auoirmisàmortceluy qui eftoit conftitué au Magi-ftrat,corne il fuft accufé de plufîeurs,& de nul fouftenu:mais il mit vne eau fè en auât & Iaprouua:Côme, qu’il auoit refîfté aux importunitez de Lu-cius,& côbien qu’il prefèntaft beaucoup de chofês, qu’il ne voulut toutes-fois iamais abandoner fâ chafteté:parquoy Marius fe fit apporter la corone qu’on a de coutume de donner aux grandes proueffes deguerre,&en c o-
- rona
- p.225V - vue 462/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. 225 ronnaTrebonius.Comme quelque fois Bandais fàluaft Marcelfus,Mar-cellus luy demande qui il eftoit,combien qu’il le cogneuft tresbien, & com me il répondit :qu’il eftoit Bandius,Marcel comme Ce reiouiflant&émer-ueillant: Es tu (ditil) ce Bandius duquel la renommée eft fi grande entre les combatans aux Cannes,comme que tu es le lèu 1 qui n’as point abandô-néle ConfulP.Emilius,& qui comme on luy dardaift innumerables dards les as receu le couurant de ton corps?Ce que confeflant Bandius, & montrant quelques cicatrices:pourquoy(ditiI)portanttelles marques d’amitié entiers nous,n’y venois tu a hafte?Nous as tu eftimez homes iniuftes, pour rétribuer les recompenlês de la vertu des amys.*aux quelz les ennemys mef-mes portent fi grand honneur. Apres lès parolles gratieufès,il prend ce ieu-ne homme par la main, & luy donne vn bien excellent cheual defêruice auec quinze cents dragmes d’argent. Hannibal aufîi aflembla lès gens de guerrcpour les harenguer au pais Millannois,& leur promet de fort riches & certaines recompilés,comme qu’il donneroit terres en Italie, Aphrique, &Elpagne, la ou chacun d’eux les voudroit prendre franches àluy& a là pofterité,&qu’il fàtisferoit au defir de celuy qui aymeroit mieux argent que terres,& qu’il donneroit pouuoir d’eftre bourgeois de Carthage à qui le voudroit eftre, &; qu a ceux qui voudroient retourner en leurs mailons, il donneroitordre telqu’ilz ne délireront leur fortune eftre changée a pas vndeleurscitoyens.AulîirpIusil propolè auxferfzlùyuans leurs maiftres la liberté, & d’en bailler deux aux maiftres pour vn. Et a En qu’ilz tinfent ces chofes véritables,il prend vn agneau a la fèneftre tenant vn caillou à la dextre, & prie Iupiter,& les autres Dieux qu’ilz fiflent tel làcrifice de luy (fil trompoitjqu’il feroit de lagneau.* luyuant laquelle priere il a rompu la tefteàlagneau.Celâraufli ordonnoit des Quefteurs à chacune légion es preléntes,& grolfes batailles pour cognoiftre les gens debicn,& les recom-penlèr:à celle finquelesrécompenlêsnedefailliflent point à la renommée des prouefles.Or na-il pas alTemblé les richefles ny opulences par la guerre pour lônplaifir,ne pour lès delices,plustoft les a-il voulu conlèruer en les mains pour les départir comme recompenlès cômunes aux gens de cœur, feftimant eftre de tant enrichy toutes les fois qu’il les départoitaux foldas & à ceux qui l’auoient mérité. Aufli de vray enuoyoit il à Rome tout l’or & l’argent & toutes autres richefles conquiles furies ennemys les élargiflant aux Ediles pour les ieuz,& en donnant aux Prêteurs, Confulz, & à leurs femmes il f en eft beaucoup gaigné,&a renuoyé les autres auec grande ef perance& dons.Mais entre autres choies il ne faut pas taire qu’à l’entrée de la guerre ciuile,il alèul vuydéen vniour le trelbrdu peuple Romain, que tant de Roys veincuz,tant dépeuples d’Allé,tant de nations, tant de guerresauoientaflemblé,& qui eftoitdcmouréft long temps entier:du quel entre autres cholès(comme il eft eferit) il a tiré trente fix mille tuyles d’or, & innumerables marez comme de lîx mille, & ( comme autres elcri-uent) dehuiét mille deux centz loixante dix, & près d’vn million huiâ;
- p p.iiij.
- p.226R - vue 463/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- centz mille marcz d’argent. Ce qu’il n’a fait, comme nous avions dit, que d’vn defir de faire largeftes-.car,comme dit vn autre, il n’en eft point qui ait vfé de plus grande libéralité en vne vidoire, comme qui ne feft rien retenu finon Ta liberté de la départir. Et pourtant eft bien magnifique; 8c entre tous louable cefte parolle 8c exhortation de Tite au fîege de Hierufalem: le puifte mourir(dit il)fiie ne faypar mes rémunérations, porter à tous cnuie à celuy qui premier montera la muraille de forte que fil furuit il fera Chef de fes compagnons. Ny ne feft trouué defaillant a fes promeffes, lequel en vne harengue apres la prinfe de Hierufalem leur dit qu’il recompenfèroit 8c honnoreroit ceux qui auroient combatu de plus grande prouefte , 8c qui auroient rendu leurmeftier de la guerre plus noble par leurs fai&z magnanimes 8c manifefte renom de leurs prouefles: 8c que celuy qui auroit mieux trauaillé que les autres ne lèroit point priué d’vne raifonnable recompenfê. Et pourtant foudain il commande à ceux qui auoient la charge de déclarer tous ceux qui feftoient porté en gens de bien, lelquelz appellant par leurs noms, il loue en leur prelènce, comme qui fe reiouiftoit beaucoup de les affai-. res domeftiques bien conduidz, 8c leur mettoit a la tefte des corones d’or,leur donnant chaines 8cpiques, 8c enfèignes d’argent,changeant d’vn chacun fa condition en meilleur,8c outre plus leur diftribuant or,argent, 8c autre butin du pillage d’vne grande libéralité.
- LES TILT B^ES RENOMMEZ NON feulement pour la memoyre des Cbef^yiuans , mais du fi des trejpajfe%, & Jubfequemment des columnes, obeli/ques, pyramides, arcs, boucliers ^tableaux, & vajes pour cela édifiéChapitre. XL
- Ecitons maintenant les tiltres renommez de la memoyre continuée des Chefz non feulement viuans, mais aulsi des mors: 8c premièrement de Iupiter lequel a l’auis de plufieurs a fur-pafle les autres tant en Deité, qu’en faiétz . Car comme Eue-merus témoigné r’amaflant fes geftes,8c des autres qui font tenuz pour Dieux , 8c dreffant fou hyftoire par les tiltres 8c infcriptionsfacréesqui eftoient es temples fort anciens, il eft certain qu’au temple de Iupiter le Trifile fut poleepar Iupitermefme vnecolumne d’or.,en laquelle comme le montroit letiltre il a deferit les faiétz, à celle fin quelle feruitdete-moignagea fâ pofterité.Selofis mettant fin àfôn voyage de guerre en la Turchie a en plufieurs lieux par luy lubiuguez drefl'écolumnes>efquellesil eft certain eftre eferit en lettres Egiptiennes, qu’ils diient (âcrées: S E S O-SIS ROY DES ROYS, ET PRINCE DES PRINCES A PAR ARMES CONQVIS CESTE PRO VI N CE. Quedi rons nous de ceft Alexadre de MacedoineïNa-il pas édifié Alexâdrie es co-
- p.226V - vue 464/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. zis
- fins des Sogdias pour le témoignage des limites de fon voyage ? au quel lieu aufsi les autelz ont efté dreliez premieremét par Hercules,& depuis par le pe re Liber,& fubfèquëmét par Cyrus, & Semiramis,& finalement par le mef-me Alexadre,d’autat qu’ilz ont eftimé vn fupreme moyen de gloire d’auoir étendu les limites de leurs voyages iulques la en la côtrée des terres que la ri-uiere diuifè appellée par les lêulz Ba&rians Iaxarte, & par les Scytes Silis.
- L armée d’Alexâdre le grad l’a penleeftre la Tane.Mais apres que Demoda-mas guy de de Seleuque, & d’Antiochus eut pafle celle riuiere,&les limites il le trouua ellre autre que IaTane,pour la marque de laquelle gloire, &: pour là renommée il a drefte des autelz à Apollo Didime,c’eft a dire Colliminin, d’autant que les confins de la Perle le ioingnoient aux Scythes.Le mefmea aulfi fuyuant le bon heur de Tes triumphes édifié vne autre ville de ion nom fur le bord de lamerd’Egipte,que Dinocratesl’architecte a epacé,& comprinsde pourpris de quinze miles par vn elprit digne de mémoire àla Dinocra-femblance d’vn manteau Macedonic[ue,c’eft adiré d’vn circuit tournoyât tcsPr0 aupaisdVne traicle à angles autant à dextrequ’àIèneftre,eftanttoutesfois ”°cDe^o.! ialors la cinquieftne partie dediée au Roy.On trouue aulli qu’il a édifié dou crate*. zs citez en diuerfes régions del’Afie , mettant pour marque en leurs murailles certains chara&eres Grez,efquelz on lilbit: LE ROY A-LEXANDRE FILS DE IVPITER L’A FAIT. Lemefme encores apres auoir pafie les voyages de Hercules , & du pere Liber* commanda à celluy qu’il auoit commis au gouuernement de la Perfide., de drefler des columnes d’or de vingt & cinq piedz de hault, efi quelles il efctiuilHès faiélz, & qu’il les aftift au bout de l’Indie outre les trophées du pere Liber, & d’Hercules.Et pourtant il efcrit à Ion précepteur Ariftote.Tay d’auantagealfismescinqtrophéesd’orplus hault quêles autres de dix piedz,& les ay commandé pour eftre à l’auenir à miracle (Mon trefcher précepteur} à là pofterité,comme vnnouueau& perpétuel témoignage des vertus non làns grande admiration, & auquel les hommes n’auront à porter enuie pour la perpétuelle opinion de nous, ôc del’induftrie de noftre efprit-Les Romains ont enfuyuy la gloire de ce Roy,mais ilz n’ont iamaisefté firichesûlzont drefte des columnes r’apportansla mémoire de leurs faiciz,mais elles eftoient de cuyure ou de marbre. Augufte devray ayant fubiugué toute l’Egipte que Ceiàr auoit en partie conquis,print de la guerre nauale plufieurs eperons,apres lefquelz fonduz, il fit quatre columnes, lefquelles par apres ont eftê aftifes au Capitole par Domitian.il eft vray que Iuille en fit des éperons apres auoir veincu fur merles Aphricains, défi-quelles il eft certain que I’vne fut pofée à la place aux proues, & l’autre de-uant Iacourt.Ilaaufti efté des columnes de marbre, foubz lefquelles anciennement les nobles hommes eftoient enterrez au defliis des montai-gnesjou bien au dedans. D’onteft auenu que fur les corps mortz on faifoit des pyramides qui font maftes larges parle pied, famortiftans en pointe: ainfidi&es d’autant que’llesfaminuifoient comme le feu en pommes de
- p.227R - vue 465/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- pin,oubienqu’onyaflitdes columnes fort grandes. Et combien que Hérodote, Homere,Durifian,Ariftagoras,Dyonifius,Artemidore, Alexandre, Polyhiftor,Buthoriades, Antifthenes,Demetrie,ayent eferit de la pyramide,de fa mafle, & forme, pas vnd’eux toutesfois ne certifie qui premier lésa commencé. Au regard de la caulè de les drefter& dedier en Egipce, plufieurs dilènt que ceaefté vne oifiue & folle oftentation des Roys en leurs finances, afin de ne les laifler à leurs fuccefteurs, ou à leurs enuieux les guettans,ou bien que le menu peuple ne languift d’oifiueté.Quant a l’v-fage descolünes Cornélius Meuiu s l’a cômencé entre les Romains, ayant veincu les Prifques, l’an de l’édification de Rome, quatre centz Icize. Il y auoitaulfienlaplace la columne de Traian,loubz laquelle lès oflemens eftoient enterrez,encores en y a~ il deux à Rome renôrrrées des noms d’Ha-drian,&deM.Antonius.Oreftil quelles feruentà ce que ceux à qui elles font dediées,font glorifiez par lus tous autres hommes, comme nous vo-yonsàRome entre diuerfèsmafles plufieurs obelifques,les vns-couchez, les autres dreftez,que les bons Empereurs glorieux de conqueftes de peuples par guerre, & d’vn bô heur de grade proueflès ont dédié aux dieuxpar deuotion.Sefofis Roy d’Egipteadevray parce moyen drefledeux'obelifques de pierre,chacun d’vnepiece ,& de trente toyfes de haut, efquelles il a deferit la grandeur de Ion Empire,& les nations qu’il a conquis. Les Elpagnolz aufti qui eftoient vne nation belliqueufè auoientde coutume de drefler des obelifques autour d’vn chacun fepulchre félon le nombre des ennemys que le trefpafteauoittué.On dreftoit aufti desarez trium-phans,d’ont il eneft encores à Rome furpiedz, & melmemét de l’Empereur Cefar,L. Septimius, & de l’Empereur C. M. Aurehus, Antonius Pius d’vn marbre excellent,& artifice noble, comme le montre lagraueure du tiltre. Aufti fait l’arc triumphant de Conftantin, lequel les lettres grauées ledifent làuueur & fondateur du repos delà ville de Rome. Il eneft vne autre noble & triumphal en Hierufâlem ayant ce tiltre: DI VO VE-SPASIANO, ET DIVO TITO FILIO S.P.QJl:AuDiuin Vefpafian,& à Ion Diuinfils Tire,le Sénat,& peuple Romain. Au demou rantil n’yaplus gueres de reliques des triumphes,combien que depuys l’édification de Romeiufquesàcestempsque nousauons'recitéoncompte trois cents vingt triumphes. Aufti n’y a-il point de doute que pour le miracle de la vertu nozanceftresn’ayent commencé àglorifier en fupre-mesloûengesj&ennouueaux & finguliers hôneurs les Roys decedez/oit que ce fut par flaterie,ou bien parles biensfai&zqui les auoient ainfiré-duz gratieux. Outreplus les Roys finalement decedez, n’eftoient pas peu regrete?, comme ilz euftent efté merueilleulêment aymez de ceuxqu’ilz auoient nourriz & remplyde plufieurs honneurs.Par ce moyen les hommes de ce remps la, comme Samiens,Corinthiens, Aftiriens, Egiptiens, ou d’autre nation ont fait des fimulachres & ftatuës pour en contemplant les images tirer quelque volupté.Et pourfuyuans plus outre,ilz ont
- p.227V - vue 466/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. zz8 par amour porté reuerence à la mémoire des trefpaflez, à fin qu’ilz fêm-blaflent recognoiftre ceux qui le meritoient,& d’atrraire leurs luccefleurs a vndefirdebien régner: ce quel excellent orateur amonnefte en la nature » des Dieux dilânt:Lesviuans & la commune façon de viure a receu d’ele-” uer iufques au ciel par vn renom & de leur vouloir les hommes excel-« lens en biensfaiétz. Voylâ comme l’ont elle Hercules, Caftor,& Pol-Iux,Efculapius, & Liber. Puys enplufieurs autres paflages: On peut auffi entendre qu’en plufieurs citez la memoyre des hommes preux a eftécon-fâcréeauec l’honneur des Dieuximmortelz,àcellefin qu’vn homme de bien print plus voluntiersle péril pour le bien de la Republique. Voyla lemoyen parlequelles Maures ont confàcré leurs Roys&les Romains leursCefàrs,& les hommes renommez de grandprouefie.Delà auient que la religion des Dieux Ce change diuerfèment par les nations & pro-uinces,veuqu’vn Dieufêuln'eft pashonnoré de tous, gardant chacun la propre religion de fès anceftres. Ce qu eftre ainfi Alexandre a efcrità fà mereparvn notable volume,que les Dieux luy auoientreuelé lefêcret: ce qu’auffiauoit fait le Pontife aux hommes,quepourlacraintedeleurpui£-fâneela mémoire des anceftres &: Roys auoit efté gardée. Et depuys la reucréce eftant tournée en crainte, la mortifère fùperftition a gaigné peu à peu,& eft ce diét poétique véritable.
- 3} La crainte a fait les premiers Dieux en terre.
- Au regard du temps,auquel ont commencé eftre fai&zaux hommes ces Diuins honneurs , iln’eftpas incogneu: attendu mefmcment que nulz Roys ont efté auant Saturne ou Vrane, & qu’au temps de Iupiter les temples eftoient premièrement édifiez,& les Dieux nouuellement adorez. Par ce moyen les effigies des hommes ont commencé à cftre figurées:ce qu’on ne fôloit pas faire,& non lâns quelque caufè notable de ceux qui auoienc mérité vne perpétuité de nom . D’ont le commencement fut pour la vi&oire des facrés combatz, & mefmement de l’Olympie:la/ou la coutume eftoit défaire lesimages de tous ceux qui vcincroient pourlatroi-fiefme fois,en pourtrayant Tes lineamens de tout le corps lèlon fà relTem-blance. Mais ainfi qu’il me femble ceft honneur des ftatuës eft deu aux Gréez, ny ne penfè pas qu’a aucuns d’eux en ait efté plus dédié, qu’à Demetrius Phalereus filz de Phanoftrate : lequel faifânt harengues aux Athéniens, eut le gouuernement de leur ville l’efpace de dix ans , & luy a Ton fait l’honneur de trois cents foixante ftatuës decuyuredefquellesla plus part eftoient à cheual,affiles en cars 8cchariotz:& furent paracheuées d’vne grande diligence de quatre centziours prefquc. Or comme lesA-theniensl’euftent en grand honneur, il fut aufti aflaillÿft’enuie qui con-fume toutes chofês, comme qui abfênt fut par la menée de quelques vns condamné à mort: combien qu’il ne tombait pas entre leurs mains:mais portans par terre toutes les ftatuës ia d’in duftrie enrouillées,ilz en ont vendu quelques vnes,fubmergeans les aucunes,8c mis en pièces les autres, ex-
- p.228R - vue 467/480
-
-
-
- Lego Clo-elia, pro Claudia. Ex Pli li 34, cap, 6,
- ROBERT VALTVRIN
- cepté vne qui fut fauuéeàla bataille. Le bruit a efté que cela fut fait par les Athéniens àDemetrie fuyuant le commandement duRoy.Ileft certain aufli que les Romains ont eu quelque temps en grande reuerence les ftatuës tant à pied qu’a cheual: celles toutesfoisde cheual ont leur cômen-cement plus ancien: de l’honneur defquelles les femmes ont participé à l’exemple de Cloelie : la ftatuë de laquelle eftoit à cheual, comme fife-ftoitpeu de choie quellefuft enuelopée d’vn manteau long, veu quelle , ne fut point ordonnée a LucrelTe,neàBrutusayant chalfé les Roys,pour . la caufe defquelz Cloelie fut entre les oftages.Et combien qu’il y eut grâdz cris en la cenfure de Cato,que les ftatuës des femmes Romaines fuflent po-fées es prouinces, il ne peut toutesfois garder quelles nefulfent aufti af-fifes à Rome, comme à Cornelia mere des Gracches,fille du premier A-phricain.On dedioit anciennement les ftatuës mantelées,& depuysnuës tenans vnpointon en main.Car c’eftoit la façon des Gréez de dedier des ftatuës fans rien couurir d’elles. Les Romainsau contraire leurbailloient des mateaux longs & cuyraftês. Cefarle Dictateur a fouftert qu’on Iuyde-diaft en la place vneftatuëauec corps de cuyrafte.Celle de M.Trebellius qui par deux fois vainquit les Samnites,& auoit deliuré le peuple du payement de foudé pour la prinfe d’Anagne fut à cheual,& auec manteau long.Celleaufti de Scipion qui menala guerre en Afie, ôcaveincu Antio-chus, eft aftife au Capitole non feulement auec vne cotte d’armes,mais aufti auec pattins. Elles eftoient dediées à aucuns d’argent,aux autres d’or. Pompée de vray en tranfporta vne d’argent autriumphe de Pharnax qui fut le premier régnant au Ponthe:aufli fit il les cars d’or & d’argent de Mi-tridates,combien qu’aucuns eftiment faulfement que l’vfâge de l’argent a efté premièrement dédié en ftatuës au Diuin Augufte. Vne ftatuë d’or maf-fifa efté aftifê au temple d’Anaitis pour vn Dieu treffacré à celle nation la, laquelle depuis fut depecée durant la guerre Partiqued’Antoine.La ftatuë aufti du Roy Aftarius qu ilfalloit adorer fur peine de mort,fut d’or, & a-uoit fbixante & trois coudées de haut. Mais entre les noftres Domitian fut de fi grand orgueil,& outrecuydance,que commeil euft triumphédesDa-ces,& Germains,il ordonna de mettre les ftatuës d’or & d’argent dedans le Capitole . le treuue aufti que la première ftatuë de bronze faiéle à Rome,fut aufti premièrement dediéeà Ceres du propre bien deSpurius Caf-fius que fon pere tua tendant à la coronne.Celle aufti de Horace qui futfur-nommé Codes fut de bronze, & aftife au temple de Vulcan, laquelle r’ap-portoit le dommage receuenfon corps (car comme dit Plutarche) que fautant armé dedans le Tibre il fôuftrit blefle d’vn dard Tyrrein : combien que Tire Liue die autrement, témoignant qu’liait nagéiufques aux liens fain & fàuue,non obftant qu’il fuft chargé de multitude de dardz. Cefarle Dictateur n’a pas feulement fouffert qu’on luyait dédié des ftatuës en la place,mais a d’auatage remis celles de Pôpée qu’on auoit abbatu.Et pourtant me fémble.la façon d’Augufte Cefàr louable d’auoir fait finguliere diligence
- p.228V - vue 468/480
-
-
-
- DH L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. n9
- gence de glorifier les anciens Chefz qui auoient augmenté l’Empire Romain,remettant fusàchacunfêsfaiclz&:tiltres,en dédiant de tous les fia-tues enhabittriumphantaux porches de leurplace.Le faiétefl aggreable, aufii nel’efl pas moins la raiibn:car j1 fie au parauant entendre par vn ediél qu’il le failoit à celle fin qu’il y en eut,à l’exemple defquelz tant des homes excelles de Ton téps que du pafle les façons de vie Ce formaffent:& félon lesquels quafi corne à vne reigle prefènte le peuple Romain recerchafl les prin ces drefTez.De vray c’eflait fàgemét faiét: car corne les flatuës fufTent quelque fois enféignement de vertu,& qu’on les pofâfl à ceux qui efloient d’vn entendemét & doctrine exceliéte,& qui auoient fait de grandes proueffes, ou auoient fouffert la mort pour le bien public,côme nous les liions auoir eflé décrétées aux ambaffadeurs tuez par le Roy des Vegetes, on ne fauroit félon l’auis de Cicéron faire recompenfêà vn mort plus chere,ne déplus longue durée ne grâce plus grande que les flatuës ou fèpulchres.Oront la plus grade part de ces chefz de guerre,que nous auons dit,déliré afFeélueu-fêmécceflememoyre desfaidz&delagloyre, l’eflimâspouuoireflreéternelle,comme fil auoient à acquérir plus de recopenfê de celle façon de cer-cueilz & images fans aucun fens,que par vne côfcience de leurs faiétz hon-nefles & iufles.Càto le Cenforin toutesfois a montré corne il effc bien fèanc à celuy qui tend à la vraye gloyre,de contener ces chofès,comme petites 8c nulles, quand eflant incerrogué pourquoy il n’auoitvneflatuë entre tant d’hommes de renom.Tayme mieux ( dit il ) Iaiffer douter les gens de bien, pourquoy ie ne l’ay mérité,que gronder(quiefl pire)pourquoy ie l’ay impe tré.Les boucliers aufîi viënent en rac pour la gîoyre de la guerre,lefqueîz ie treuue par inflitution anciens eflre dediez au téple,ou bien publiquement aux: perforines pnuées. Onditqu’ApiusClaudius a elle le premier qui l’a fait: i’entëds celuy qui fut Côfulauec Seruilius l’an de l’édification de Rome deux cëtz foixâte dix-ll a de vray affis les anceflres au teplc de Bellona, Sc les a voulu eflre veuz haukz,Ôc que les tiltres de leurs faiétz renommes fufTent clairement leuz.Depuis lequel M.Emilie collegal au Cofulat de Q^, Luétacius non feulement en la grade file Emilie, mais aufîi en fa maifon a voulu que l’image de la vertu fufl amplement deferite au bouclier de chacun qui fen eftoit aydé.Les Aphricains les faifoiéc d’or,& les ont porté teîz au câpauec’les images. Onaaufïi cobatudecefte maniéréd’efeuzàTroye auec les images, & en futvnafîis fur la porte du Capitole iüfques au premier feu:& tat grandea efté notée i’authorité de noz enceflres en cela, que M.Aufidiusredépteurdela defence du Capitole durant le Confulatde L. Manilius Fuluius Tan de Tedifica.de Rome cinq céts foixante quinze, a fait entendre que les boucliers d’argent efloient les peres,lefquels par quelque teps ont efté ordônez pour ceux de cuyure. Il en efl qui ont aufîi honore la memoyre de leurs gefles par des tableaux,côme L.Emilie Paul,& Luce Sci-pion,&le prince Meffala. Defquelz le premier triumphat des Geneuoyz a laiflé en public tout Tordre de la guerre peinften vn tableau : lefècôd a mis au Capitole vn tableau defavidoire Afiatique, &le tiers a planté au coflé
- Q^q. j.
- p.229R - vue 469/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- de la court hoftilic l’an de Rome neuf céts quarate, le tableau auquel eftoit peinât la bataille en laquelle il défit en la Sicile les Carthaginoy s & Gerion. Au regard de ce laboureur C.Marius Arpinas,& Chef tire des bandes il n’a point deferit fes fai&z en eleuz pédas, ne en tableaux peinélz, ne graueure, ne enlèigne, ftatuë,ne marbre,ne en bronze,ou obelilque, ne en arc trium-phal,ne pyramide,ne en columne,ne tat lèuleméc en columnc d’or,ou edi-fice,mais les a fort glorieufement fait cognoiftre en vne nalfelle. Car on dit qu’apres lctriumpheIugurthin,Dannemarchois, &Theutonique,il beu-uoitalamodedupereLiberànaflelle par laquelle indice delà vidoyreti-rée de l’Afie,il faquift,& rendit là vidoyre femblable.
- LES SOLENN1TEZ DES IEVZ. Chap. XII.
- Près ces choies fenfûyuent les folënitez des icuz,lelquelles cftoiët ordonnées aux dedications des nouueaux temples,ou bien à lac-complifiement des veuz des princes auec vn abord d’vue grande tourbe de peuple, entre lelquelz ceuz de la chalïè, qu’ilz appel-loient dons,eftoient attribuez à Saturne:foit que ce fut d’autant que quand ilz ont à faire vn voyage de guerre, ilz doiuent regarder les combatz, & les deux armées le ioignans pour la bataille, afin qu’ilz ne fepouantent en la guerre des armes des ennemys,ne des plaies,ne dufàng,oubien (corne aucuns dilèntjque celle deuotion a elle faiéteancienemët,à fin que contre les en nemys on fill premièrement làcrifice a ce Dieu du làng des cytoiês. Car Pifcenius Fellus récité es liurcs des hiltoyres,quc les Carthaginoiz auoient de coutume d’immoler à Saturne des homes,& que lors qu’ilz furent vein-cuz par Agatocles Roy des Siciliës,ilz penferët que Dieu eftoit courroucé conrrceuxr&pourtât pour faire vne purgation plus foudainc,ilz làcrifie-rent deux céts cnfans:tant a peu perlûader de maux la religion, que de tuer vne û grande part de leur cité,& telle parauanturc qu’Agatocles veinqueur n’auoit pas tué fi grande. Ce melme Saturne a efté honoré en l’Italie de la melme maniere;nonpas qu’vn homme fuft immolé a l’autel,mais en forte qu’il eftoit ietté du pont Miluin dedans le Tibre: celle façon toutesfois de facrifice,fut abolie par Hercules retournant de l’Elpagne par Italie auec les aumailles de Gerion:& perlûada a leurs peuples qu’ilz châgeaflent les malheureux làcrifices à des heureux,demourant toutesfois la fiiçon de faire en Ion entierrde forte que pour les vrays hommes on îetta leurs images fai&es de ionc,comme l’enlêigne Ouide en lès Faites: cAu Dieu Leucadien trijles on preparoit Chacun en facrifices, auant qu'en ces contrées Hercules arriua Mettant Quirins de paille Dans les eauxiiette donq a l'exemple de luy Corpsfeinth?.
- Lequel poëte fait auftïmemoyre par ces paroIles que les vierges Veltales ont fait celle maniéré de facrifices:
- *Aufi a de coutume vne Vierge ietter.
- p.229V - vue 470/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XII. 230
- „ D u haut du pont en bas les anciens feinSh^ de ionc
- par ccs caulês recitées delalburlè de celle folenité,il appert que les Saturna--îeslontplus anciénesquela ville de Romeitellemétqu’Accius recite en les annales par ces vers que celte folennitéacomencéen Grece auantRome. » La plus grandpart de Grece,& mefmes les ^Athènes,
- »•> Au Dteu Saturne font Saturnins fterifces:
- » Par eux réitéré^, gj celebrans le tour
- » Par tous Village & Ville, il^font ioieufe chere
- 3 j Et traitent leur famille.
- De la auffi eft venue la coutume entre les noltres que les lèruiteurs repaif fent auec leurs maiftres.On dit auffi que corne au mefme téps ilz’penfàflent ia de longue main appailèr Pluton, auec telles d’hommes,que Hercules retournât par l’Italie auoitperfuadé aux nations défaire autres làcrifices,portas à Pluton des petittes images pourtraiétes au vif,& non pas telles d’hom mes.le treuue que depuis quad on failoic les ieuz à Rome par les carrefours que les facrifices furent remys lus par Tarquinius Superbus au« bonsôc mauuaiz efpritz, & à la Manie fuyuant l’oracle d’Apollo: par lequel il elloit cômandé que pour telles on làcrifialltelles,ce que futoblerué par quelque tépSjtellemét que pour la côlêruation d’vfte famille on làcrifioit des enfans à la Déelfe Manie mere des elpritz bôs,&mauuaiz,c’ell à dire aux Dieux in-fernauxdaquelle maniéré de facrifice Iunius Brutus apres auoir chalféTar-quin ordonna ellreautrement celebrée, comme qui cômanda de làcrifier à telles d’ail, & de pauot,pour fatisfaire à la reponce d’Apollo touchât le nô-bre des telles en ollant la melchaceté du malheureux facrifice.Et eft auenu qu’on pendoit par les carrefours des boules & effigies d’hommes & femmes fàiétes de laynes, & qu’on pédoit autât de boules, qu’il y auoit de chefz de ferfz,&autat d’effigies que d’homes libres:lefquelles£inalemét pendues à la Manie aux portes d’vn chacun ilz detournoiét par celle purgation le péril, li vne famille elloit en dâgier,& que la Déelfe pardônoit aux viuans côtéte de celle maniéré déboulés, & fimulachres. Au regard des ieuz ilz les ont appelle compitales à cauledes ruës des carrefours auxquelles on les iouoir. Mais pourtant qu’il eft certain qu’on a fait célébration Diuine à Pan Licée, & qued’auatage on a fait anciënemét des felles Lupercales,lelon les eferi-uains de Î’antiquîté,il lêmble que nous en deuons parlerpour vn troilielme article.Ces efpeces donques de làcnfices,cômeil lemble au plus elegas eferi nains des hilloirés, ont premièrement elle transferez aux nollres par ceux qui partâs de l’Arcbadie auec Euandre font allez au lieu,ou maintenant eft Rome,& ont elle celebrez à leur mode. Ouide aux Falles:
- 33 Les Arckades iadis comme on dit honorèrent a Pan le Dieu du beflail, efant bien abondant
- 33 En iowz Archadiensda Pan ejloit le Dieu 33 D’dumaiües & des eaux,receuant des prefens *3 F ourles ouaillesftines.Qr auecfoy les-Dieux
- Q^q-îj.
- p.230R - vue 471/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- ,, Sylueflres Euander tranfporta: & dors „ Le heu ouefkla ville efioit d'elle la place.
- En laquelle ville il eft certain qu’Euandre ordonna qu’eftant la tourbe des pafteurs éparlè,Ies ieunesgarçons nudz & enueloppez dedans les peaux des belles lâcrifiées coururent à l’honneur dePan Licée déguizéz,& tranf portez d’vne reliouilfance de trop boyre & manger par vne fuperfluité & debauchement, & queportans en main vn fouet ilzbatteroient tous ceulx qu’ilzr’encontreroient, & mefmementles femmes de bon âge , leurs of-frans leurs mains de leur bon gré, pour l’eftime qu elles auoient que ce leur pourroit eftre vn heureux moyen d’enfanter, comme le dit le melïnc Poëte lublêquemment:
- 33 Quattenstu manchotes neferas mere
- 33 Parla pâleur des herbes ,ou par tes oraifons,
- 93 Me par magiques vers, reçoy patiemment
- 33 En la dextre fecunde vn coup'.car le voué 33 Defm ayeul le nom defiré portera.
- Or ya-il plulieurs caulès qui par le cours de l’antiquité font venues iufquesâ nous,lelquelles nous en feignent pourquoy ilzont nudz adoré ce Dieu:fbit qu’eftant nud il aittrou'ué bon que pour lâviftelTe les miniftres nudz luy eftoient plus conuenans:oubien que les Archades qui font les plus anciens de tous les peuples qui ont habité la Grece, menans encores vne vie lêmblable aux belles lauuages dedans les foreftz & montaignes fans cognoilfance d’art, ne deloix,ont premièrement cômencédc reuerer ceDieufelon leur façon d’acouftremens. Le mefmeOuide aux Falles:
- 33 Situquïerslaraifon de leurcourfè>& pourquoy
- 3 3 S’il fault courir,leurs corps portent nud% delaijfans
- 33 Robbes:celeger Dieufefîouytde la courfe 33 Par les hautes montaignes, &prend les hefles vijles.
- 33 Ce Dieu nud donques veult tous fes minières nud%
- 33 Ny nefloitpour courir la robhe bien commode.
- Au lùrplus Aélacilius elcrit,comme temoignePlutarchc, que comme auat l’édification de Rome,le beftaildeRomuleeuftefté robbé par les larrons, il fit lorspremieremét lèsprieresaueclafolénitédesLupercales,â l’hôneur de Faune tournoyat de courfe par apres nud pour n’eftre empelché de lueur toutes les môtaignes & foreftz,& qu a celle caulè les Lupercales ont célébré ces ieuz. Les autres dilènt que les Luperques eftoient fai&z nudz,d’autant que Faune ayant efté moqué des liens pour vne robbe, l’a défendu en fes fa-crifices. Ouide es Falles.
- 33 Le Dieu moqué des rohhes ehloijfans lesyeux
- 33 N’ayme poin^appellant à fes fefies les nud^.
- Iuftin dit que la cauledela nudité eftplus venue â railon de la façon du E>ieu,au quel on failôit telz facrifices que d’autre part: veu qu’on dit que Faune fut le tiers qui régna apres luy,foubz lequel Euander eft venu en
- Italie
- p.230V - vue 472/480
-
-
-
- DE L’ART MILITAIRE. LIVRE XXL z3i Italie de Palantée ville d’Archadie, auec vne moyenne compagnie de menu peuple. Auquel Faune afhgnagratieutement terres,& le mont que de-puys il appelîa Patentée,au pied du quel il édifia vn temple a Lycée,que les Gréez appellét Pan:& les Romains Lupercal, Au regard de l’image du Dieu elleednuë, & attourée d’vnepeau de chieure, au quel habit on a depuys couru a Rome aux ieuxLupercales.Corne quecefbiton trouue que celle obteruation a dure iufquesau temps de Ceter:car comme elLant afïis il regardait ces fâcrifices, & qu’entre ceuz qui celebroient la fblennité Marc Antoine fuit prêtent pour lors Conful,&depuis Triumuir. On dit qu’il fedorçad’afTeoirlediademefurtetede de Cefar. Ce que comme Cefar re-poulte des mains en retirant fa tede,il ordonna foudain quon le milîà la datuë delupiterle Capitolin.Au regard du nom des Lupercaîes, onn’en baille pas vne raifbnteule,maisplufieurs, ditens les aucuns qu’vn lieu fut confacré enArchadieau DieuPamauquelauffi aedécontecré le mont Ly cée,diét en Grec Lucos,c’ed a dire loup, comme qui ne fouffrepas les loups rauirles brebis.Et pourtant Euander dédia vn lieu au Dieu detenation, & l’apella Lupercal, d’autant que parte preterue les loups edoient chaflez d’autour de tes ouailles. Les autres côme le recite Plutarche pententquele nôedplustod venu de Lupa quia nourry RomuIe:veu que côme il dit, les Lupercaîes commencent leieu,Iâoucomme Ion dit, Romulefut mis àl’a-uanture-.combien que les chotes qui concernent les tecrifices ne conuien-nentpointàce qu’on dit de Lupa nourrice de Romule. Aquoy témoigné le poëte par ces parolles:
- • Elle a le nom donné au lieu de Lupercal,
- » Grandloyerla nourrice a de fonlaiél tiré.
- ” Qjfe Refend les Luperques efere nomme% du mont
- » Arcbadienfes temples ala faune Licée
- En Archadie.
- Il fen treuue audi, comme dit Quintilian,quiditent que les Lupercaîes font trois parties de l’oraifon, quafî comme iouerparle bouc.Finalement on pente,comme dit Plutarche,que çe ieuaedé ordonné d’ancienne ob-lèruance pour appaifer les Dieux infernaux. Auffi te faifoientilz (comme ___ ildit)aux iours malheureux de Feurier, lequel il interprètent mal encon- p^ospro treux,comme dit Ouideaux fades: cxpedicn-
- }y Le tiers matin apres les Ides les Luperques <ïos*
- „ Vbitmd^y & fait on fefee au faune le bicorne.
- Les Côfuales edoiet ieux qu’ilz faifoient en l’honneur de Confus,qu dz edi moient Dieu de confeil. Au regard des Circenfès que Romule célébra premièrement au nom des Côfuales apres le rapt des Sabines ilzedoient dediez à Neptunedefquelz iadis edoiét faiétz au riuage d’vne riuiere, met-tans de l’autre codéefpées,&glaiues,à fin qued’vn codé & d’autre la be-difèfud en peril.Ilzont edéditlz Circentes d’autant qu’on les dreffoit a-uec efpées mites tout autour,côbien qu’aucuns ditent qu ilz font ainfi diétz
- Qa-iij.
- p.231R - vue 473/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- des Aftcrcienfèsàcaulede tournoyer.Mais iene voy point que la raifon de ces ieuzait autre chofe linon qu’vne folie,vanité, & furie : caries cœurs eftoient émeuz d’aulsi grande fureur que de grande impetuofité,on y cou-roit de forte que ceux qui feftoient la aflèmblé pour voir,lèruoient de plus grand fpe&acle, lors qu’ilz auoient commencé a fécrier, braire, ôc trelTaiilir.LesEcuries,fontieuzque RomuleinftituaàMars parla courlè des che'üaux,qui le faifoient à la campagne de Mars. Le(muntts ) don des Gladiateurs, eft ainfi di<ft pou r autant qu’on les donnoit côme vn (munus) prelènt:celuy aulsi qui les donne eft appellé ( Mmeranus) donneur :ccluy aulsi eft appellé Lanifte qui a vne famille de gladiateurs, les dreflant & apprenant en fa maifon pour puis apres les vendre. Et a efté ainfi di<ft le nom des Gladiateurs,d’autant qu’on auoit de coutume de tuer des prifonniers auxfèpulchres des vaillans hommes. Mais comme depuis cela femblaft cruel, le combat des gladiateurs deuant les fopulchres futreceu : laquelle façon de faire noftre Homere Mantuan a déclaré par ces parolles:
- )i Sacrifices vïuanspour immoler aux mort^ a 11 prend, & pour fur flambe epandrefangcaptif.
- Et comme dit Florus,leSpartaque ne refula point les accouftrcmcns Prétoriens,lequel faid loldac,deThrace tributaire,& delbldat,haban-donneur d’enlèigne,puis brigant,& foblèquemment gladiateur à caulê de lès forces a folennile la mort des Capitaines tuez à la bataille des funérailles des Empereurs, ôeaordonné que les captifz combattroient à oultran-ce dedans vn parc Royal, comme quafi purgeant par la la honte du temps palfé, fi de gladiateur il eftoit faicf drefteur du ieu gladiatoire. Tite Liue „ au vingtneufiefme: Scipion eft retourné à Carthage pour accomplir les „ veuzaux Dieux, & pour faire le ieu gladiatoire qu’il auoit préparé àcaulè y> de la mort de fon pere&defon oncle. Le fpe&acle des gladiateurs ne fut de cefte maniéré d’hommes, que les Laniftesont de coutume d’achetter comme d’vneleuée de lèrfz & libertins, qui vendent leur chair: car le ieu fut d’hommes combattans voluntairement, & fans foude. D’autant que les vns furent enuoyez par les Roys pour montrer la vertu naiue de Iana-tion: les autres foffroient decombatrepour l’amour du Chef:L’enuie au/fi de combatre a attrait les vns de prelènter, ou bien de ne refufer le combat. Mais dequoy fodeuralon plus émcrueiller encecy,de l’inuenteur ou de rinuention,dePouurierou de rautheur,quia oie le penfer, regarder, ou commander,ou bien fur toutes choies delà fureur du peuple? Qui eft celuy qui ne voit quan t vile eft cefte exécration de vies,quantes querelles de la méchanceté en fortent.Les ieuz des Neuueines font ceux quon folennile à 1 honneur des mortz . Au lurplus quand anciennement quelqu’vn eftoit trelpafie on ler’apportoit a la maifon .D’ontondit,r’apporteauantceftuy aux liens : & la il eftoit lèpt iours : au huiétielme on le brulloit, puis au neufielme on le mettoit en terre a là maifon : d’ont eft venue la coutume que les Dieux domeftiques font honorez aux maifons .le treuue finalement
- p.231V - vue 474/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII. i$z
- met que les ieuz funèbres,Plebeiens, Megalélès, & AppolIinaires,d’ont les Ediles curules auoient la charge publique,eftoient folennifezàgrande ioye.Les funèbres eftoient inftituez pour amufer le peuple, pédant que la pompe ordonnée à l’honneur d’vn homme Patrick fuit dreffée . Les plebeiens font faiélz pour Iefàlut du peuple apres auoir chafle les Roys, & pour la liberté, ou pour la réconciliation du peuple apres leur retraicle au mont Auentin. Les grands ieuz eftoient appeliez Romains quMz fai-foient a l'honneur de Iupiter,ou bien au témoignage d’Alconius,les ieuz Romains Royaux ont efté inftituez foubz leurs Roys ,& ontefté appeliez grandz, d’autant qu’lz ontefté donnez à grandz fraizrveu qu’au commencement la depence des ieux montoit cinq mille efcuz ,tant on e*-ftime les ieux auoir efté faiélz grandz , d’autant qu’ilz ont efté baillez au Dieux des Côièilz & fecretz,c’eft à dire à Neptune,au Lare, & aux grâdz Dieux,c’eft à dire aux Lares de la ville de Rome,par le moyen delquelzon ditquelesSabinesont efté rauies: Ce que Virgile fêmble auoir noté:
- « Et magnis Circenfibus aélis.
- » dp res les grande ieu% Çircenfes perfaiéhç.
- Au regard des Megalenfês c’eftoiét les ieux des nobles,& confierez aux grandz Dieux;ainfi appeliez du lieu de I’inuention. Aux quelz le deuoir des r. Prêteurs eftoit de fy trouuer,& de louer les ioueurs .IuuenalauxSatyres:
- »> Les fpeélacles tandis des nappes Megalenfês » La fefle Jdéefiontjà ou comme on triumphe
- >» Efl a fis le Prêteur rauiffeur de cbeuaux
- ’> Etfl licite m'efl de dire fauf la grâce
- >> Du grandpeuple a merueilles au tourd’huy le parc rond
- » Toute Rome comprend, & le bruyteflourd'tt » Voreille : d'ontiatten le malheur du drap verd:
- a De vrayfildefailîoity tu vernis cefle ville
- » Fâchée3&eflonnéeainfi qua ladefaiéle
- » De no% Confu 1% aux Cannes.Qrdonq que la ’teuncfjc » Mfi fie aufquels le enfiet bien, la promejjè
- » Eîardie, Çyfafleoirprès la fille parée.
- Valere Ancie dit que les Megalenfes ont efté appeliez ieuz de théâtres, & qui fi nouscroyonsa Firmian ont efté attribuez à Liber, auquel reuenant desIndesàThebes,les Grecz(commelon dit)ontinftitué lesTrieterides, pourl’elpace triennal employé en ce voyage.On dit que l’origine des ieuz Appollinaires a efté à eau le de lavi£toire,& non pas pour la fanté, comme aucüsonte(crit,fuyuans deux vers du prophète de Mars, du quel onauoit apporté deux volumes au Sénat, d’ont au premier vers la prophétie de la defaiéle des Cannes fonnoit prelquesainfi:Fuy la riuiere de Cannes ôP>.o main defeendu des Troyens,a fin que les eftrangiers ne te forcent de com-batre à la campagne deDiomedes. Si nemecroyras tu pas pourtant, iufi ques à ce que tu ayes réplyla place de fang,& que la riuiere porte beaucoup
- Q^.iiij,
- Emendau* ex Tit.LÛ li. 5.3,Décadré.
- p.232R - vue 475/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- de milliers de tes corps dedans la grande mer de la terre fru ctueufè en poi£l fons,oyfeaux,&belles fauuages qui habitent la terre, & auxquelz ta chair fera en proye: Iupiter le m’a de vray ainfi dit. Au regard de la Campagne de Diomedesle Grec,& de la riuiere des Cannes, ceux quiyauoientellé à la guerre, & aulli à la defaicte les cognoilToient bien. Et alors anlîi fut trouué vn autre verlêt parlant ainli: Si entre vous Romains vous voulez chafler de voftre pais bennemy & l’apollume des nations qui viennent de loing, ie fuis d’auis qu’on voue des ieuz à Appollo, lefquelz on luy fera tous les ans gratieufement.Et apres que le peuple aura baillé vne portion fur les finances publiques,les perfonnes priuées bailleront pour eux,& pour les leurs. Defquelz ieuz le Prêteur aura la luperintendence, qui aura toutdroicl de iullice fur 1e peuple. Les dix députez feront la folennitéauec lacrifices a la façon des Gréez, lefquelz fi vous faites bien,vous ferez toufiours en ioye: vollre bien auiendra toufiours : car ce Dieu qui gratieufement nourrit voz terres éteindra voz ennem y s.Et comme on eut employé vn iour pour l'interprétation de ce verlèt, on fit finalement vn decret du Sénat que les dix députez pour ellre mieux inflruiétz en l’execution des ieuz Appollinai-res,& pour bien faire le lâcrifice Diuin iroiet aux liures Sybillins,aux quelz comme le r’apport fut d’auoir trouué demefmes,Les Sénateurs ordonnent de vouer, & faire des ieuz à Appollo,& apres les ieuz fai&z on liureroit au Prêteur fix vingt elcuz,& deux des plus grandes hollies. Il fut aufsi ordonné par vn autre decret que les dix députez feroient la lolénité à la mode des Gréez,& auec celle façon d’hollies:d ont vn bœuf auec deux chieures bla-ches dorez lêroiét pour Appollo, & vne vache dorée pourLatona.il elloit aulli ordonné au peuple de regarder ces ieuz ellant coroné. Au regard des matrones,elleselloienten priere,tout le monde mangeoit enveuë,&~à portes ouuertes:fbmmequece iour la elloit folennifé de toutes façons de cerimonies. Par ce moyen (comme dit Sifinius Capitojon a commécé peu à peu de faire aux autres dieux l’honneur de celle maniéré deieuz:&aellé chacun ieu,comm.e Sifinius Capito ledeferit es liures des lpeâ:acles,con-facréenleursnoms.
- LES OBLATIONS DES PRINCES FAICTES aux Dieux du butin des guerres. Ch dp. NIII.
- •
- Vr la derniere donques partie de noltre labeur nous coucherons lafupreme des princes, en recitant leurs oblations de la guerre. Qui ellceluy qui fortant victorieux des tourbillons des guerres oublie à honorer le lêigneur des armées ?veu que ceux qui mef-mesn’auoient pas la cognoilfance du vray Dieu , ne mettoient point en oubly celuy quiconque en auoitlapuilTance^efortequ’ilzne l’eulfenten bien grande reuerence. Mais à fin que quelqu’vnn’en foitparauanture en doute,vous auez de trelèxcellés Capitaines pour temoingz, & entre autres
- p.232V - vue 476/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XIÏ. 233 principalement Dionyfius,qui fut aufsi di<ft Libéré Alexandre de Mace-doyne. Car ceft autre eftant entré aux Indes,offrit premier au Dieulupiter en orient lesprimices quil eut desprifonniers ^Et fi cela n’eftoit alfez ma-nifefte Ouide le témoigné richement es Faftes difant :
- 9> Or (tuant ta naijfance,ô Liber les autelz
- » Nefurent honore^, l'herbe aufsifut trouuée
- » Es atres froidz, on dit qu apres auoirfub^mis
- ,3 G anges, & ÏQrient as au grand Iupiter
- » Mis a part les primices,gp que premier donnas
- 33 Le cinname & l'encens captif?, & les entrailles 33 Ropiës de cebeuf d'ont tuas triumphé.
- 33 De celuy de l'autheur, leur nom les Ltbamines
- 33 Tirent}aifsi font Libes aux feuz facrez liurez•
- Au regard d’Alexandre, comme en fon enfance il iettaft â la façon des Gréez de l'encens aux autelz fans mefure, Leonidefon pédagogue eftant marrvde cefteprodigalité luy dit: Mon fils tu*ofFriras ainfi àlargeffe les lenteurs,lors que tu iouyras du pais qui porte l’encens. Lequel finalement fouillant de l’Àrabie,enuoyaâLeonidevnnauire chargé d’encens, & vne lettre de cefte teneur prefque? :Iet’ay enuoyé force encens & cafte, â fin qu’es choies Diuines tune tiennes les choies cheres qui ne les font pas, comme qui nés pas ignorant quenousfommes iouiflans delaterrc fru-éfcueulè en lenteurs. Le melme Alexandre aulsi depuis eftant en fleur d’âge auoiten recommendation les lampes ardentes es chapelles de bois mort, comme iadis au temple d’ApolIo le Palatin : lequel prins â la prinlè de Thebesle mefme Alexandre auoit dédié âLucinie. Hannibal aulsi pafi-font l’Efté près le téple de Iuno Lucinie au pais de la Brulfe drefla la vu autel, & le dédia auec vng grand tiltre de lès faidtz en lettres Grecques & Puniques. Lequel aulsi apres tant de bonnes fortunes de guerre en l’Italie, & melmement apres auoir abaifle &prelquc du tout ruiné lapuiflance Romaine par la defaiéte des Cannes ordonna de folennifer vn focrifice aux Dieux immortelz. Au demourant Romule fut le premier qui porta les dépouillés d’Acron Roy des Cenienlès tué de là main au temple de Iupiter, qui premier fut confocré â Rome. Depuis luy Corneille Colfe ayant tué Columnie l’Hetrufque Chef des Fidenates confiera là dépouille au mefme dieu. Il ne fault pas aulsi oublier M.Marcel, qui au près du Pau défit & tua, & déforma Briomale Roy des Gaulois, & de la il monta au temple de Iupiter le Feretrie pendant les armes par vne dedication folennelle. Ny ne fut en cela Marcel fotisfait,car apres auoir prins Sarragoulè, il tranlporta à Rome les paremens,enlèignes & tableaux dont pour lors la ville florifîoit, & les dédia aux Dieux du pais.On les voit â la porte Capene au temple par luy dédié. Nous liions aulsi que le temple de vertu, & d’honneur a efté par luy rebafty: lequel long temps au parauant auoit efté dédié â ÇLMaxi-fnus durât la guerre de Genes.Ie treuue aufsi que comme Tullus Hoftilius
- p.233R - vue 477/480
-
-
-
- ROBERT VALT.VRIN
- eut deux fois tritimphé des Albains, & des Sabins pour la tierce fois, il confiera de veuvn temple à Saturne, &: que lors premièrement furent ordonnez les Saturnales à Rome .‘combien queVarroau fixiefme liure des maifons làcrées écriue que le Roy L. Tarquin bailla à faire le temple dedas la place: & T. Laertius le Di&ateur le dédia aux Saturnales, Ny ne fuis ignorant que Gellius a elcrit,que le Sénat ordonna que le temple de Saturne fuftfaidtjd’ontL. Furius Tribun de la commune euft la charge. Tarquin auquellafaçon de vie donnale lûrnom de Superbe, baftitvn temple des dépouilles des ennemys: lequel comme on confierait a lupiter, & que les autres Dieux luycedaflént la place, ce fut vn cas merueilleux que le char-roy & les Dieux des bornes farrefterent comme Dieux opiniaftres promet-tanstoutes ces chofes ftables & éternelles. Scipion le Numantin édifia le temple de Vertu,& depuis C.Marius fit vn temple à l’Honneur & à la Vertu, du pillage des Dannemarchois,&Theutoniques.ScaurusEmilius en a par apres fait vn à l’Entendement,d’autant que nay enuiron le temps de la guerre deDannemarc,lek>quence& érudition fontentrées àRome,8c l’ont commencé à enrichir amplertient .Comme leConful Emilius euft veincu en bataille les Gaulois, il drefia à lupiter vn trophée d’or de leurs chainnes, d’autant qu’dz auoientfaitveu que filz vaincoient,ilz conlà-creroienta Mars de Gaule vnechaine d’or des dépouilles des Romains. Mais comme Furius Camillus euft efteinél la fureur des Gaulois, & euft deliuré Rome qu’on r’achetoit au pois de l’or,il édifia vn temple auprès de la rue neuue,non pas de conlèil,ne de force,mais de renom & diuination. On treuue es anciennes elcritures qu’Agrippa en a fait vn merueilleulè-ment beau de tous les Dieux a Iuppiter le vengeur. La Minerue iadis fituée à Rome au près du Capitole qui eftoit a Euphranore fut depuis diéfce Ca-tulhenne pour auoireftédediée de Q^Luclatius Catullus.Emilius Paulus en a dédié vn autre a Rome dedans le temple de Fortune. Spurius Claui-hus aulfi apres auoir défait les Samnites combatans ioubz condition de veincre ou mourir fit vn lupiter au Capitole de leurs corfelletz, fallades, & greues. Le Diuin Iulle Cefar voulut qu’on entendift que l’accouftreméc de corps, qu’il dédiaàlamere Venus dedans Ion temple eftoit fait de perles d’Anglererre. Pompée le grand & Chef confiera au temple de lupiter le Capitolin vn fep de vigne d’or auec le raifin : Au demourant elle eftoit de trois centz mille efcuz ayant le tikred’Ariftobole fils du Roy Alexandre. On treuue parefcrit que le Diuin Augufte a édifié ou bien réparé tous les temples. Le Diuin Velpafian a édifié &perfait le temple de Concorde & de Paix. Or à celle fin que ie nepourfuyue celle matière vniuerfellement, d’autant que ce feroit choie trop longue & trop laborieulè,& que mon propos à bon droiétfinilTeen toy ( Sigilmond) auquel il a commencé,tu as n’eftant moindre de ces excellens Capitaines, & deleurfublêquens en baftimens,en excellence de religion,& imitation de gloire, bafty outre les temples alfiz hors la ville a trois milles à la montaigne, &: vis à vis de la'
- mer,
- p.233V - vue 478/480
-
-
-
- DE L'ART MILITAIRE. LIVRE XII i34
- mer,ce temple tant renommé ôc digne de grande admiration:&: finalemét fingulier témoignage de ton nom Royal, que tuas laide baflyde fond en côble,& dédié a Dieu au milieu de la ville auprès de la place,de la dépouille des villes que tu asafliege & prins,confortéd’vnefupreme religion d’vn prince trefTaincfc&Diuin,apresauoir mis fin a la guerre de l’Italie, eflan s tous les ennemis défaiétz ôc ruinez par la vertu inuincible de ton cœur. Tu as finalement tourné ta fantafie des armes aux affaires ciuilz,&asfilarge-mécenrichy ce temple paré de tant merueilleufos pein&ures ôc graueures, que combien que celle ville ait beaucoup de choies mémorables,& dignes d’eftre cogneues,ellen’atoutesfois rien fi noble, ny rien qu’on penfo plus digne d’eftre veu,mefmemenc en l’exaucement des murailles, & nombre d’arez merueilleufoment hautz,faiétz de marbre de pais ellrange, defquelz les tables de pierre font couuertes, &parlefquelz on les voit de bien belle graueure,& quand ôc quad celles des iainélz peres,& des quatre vertuz, ôc des lignes du celefte Zodiac,& des planettesraufli font la les images des Sy-billes,des Mules,& de beaucoup d’autres nobles chofos,lefquelles ont bien le pouuoir d’attraire les fâuas hommes,& autres que le menu peuple les re-gardans,non feulement pourl’artificenotable de la taille &graueure,mais auffi pour la cognoiffance des formes,eftas les lineamés pris du profond de philofophie,par toy leplus fùbtil,& fans douteplus renômé detous les prin ces de ce lîecle.Tu as outre plus paré ces lieux tant fâinélz de trefoxcellés pri uileges du Pape,& d’innumerables dons,& reliques des fâindfczrveu qu’outre le merueilleux reuenu ordinaire d’or ôc d’argent dédié à Dieu,tu as d’vn mefme don élargy pierres precieufos,perles,taffos,calices,nauetes,encéfiers, croix,chadeliers,tableaux,orgues,tuniques de pourpre, chappes d’or frile: ôc finalement plufieurs liures de lafainéte efcriture,& des Ethniques, & de toutes foiences &ars.Ceft fans point de doute vne nouuelle,noble, ôc grade inuention pour l’immortalité:veu que tu as voulu non feulement ellre dédié par l’or,argent,cuyure,ou marbre,ou par chaux, ou pierres, mais aulfi csbiblioteques,parceux defquelz les âmes immortelles parlent es mefmes lieux.Quant au comble de tes autres faiélz, ie ne l’eftime aile a dire, veu qu’outre ces autres ton nom eft par tout tant cogne u par tant de témoignages manifeftes de tes euures,qu’il ne fora iamais pofterité fi fourde,ne reno-mée fi ingrate,qui ne loue iufques au ciel,ôc ne luy donne la gloire deuë,& exquifo.il me fomble,Sigifmond Pandulphe Maîtefte, qui es le trefoertain falut,la lumière, l’honneur du pais,& lepere, quei’ay accomply la charge de ton commandement, & de mon euure touchant le mellier de la guerre, fâchant tresbien que les chofos commandées eftoient de plus grand pois, que n’eftoient les forces d’vn moyen entendement pourles porter,& qu’au demouranti’ay teu plufieurs chofos cogneuës, lefquelles euffentpeu eftrc cômodement inférées en ce liure. Au furplus comme ce foit ( par maniéré de dire) vne commune maladie aux hommes,quechacun ignore plus qu’il ne fcet:& comme dit Horace.
- p.234R - vue 479/480
-
-
-
- ROBERT VALTVRIN
- Chacun ne decrijlpas armées herijjees
- De dards ne des Gaulois renuerfe^ la defaïtle:
- Me du Parthe tumhant de cheualles hlejjeures.
- S’il y a rien en ces iiures peu ou tropri’ily a rien aulfi qui lèmble départir de celle ancienne,ôcelegante façon de parler, & tumber en arriéré, ie te prie qu’à moy fcul en Jfôit le blalme:fi aulïi il y a choie qui lèmble digne de-lire gardée,& mile en lèurté,qualî comme celle Minerue de Phidie,ou bien qui lemble ellre partie de la boutique de la mefme Minerue,que non lèule-menton en rende grâces à dieu auec moy, & ata Diuinité,mais aulfi qu’on le recognoilTe grandement defFeét par euuresdetoy, ôc non pas de moy, comme qui fauorilânt noz eftudes par ta condui&e & bonne fortune les rendans plus renom' mez&allaigres,lésas toulïours eguillonné,
- &c as( comme }’on dit)incefïimment halle ma courlè :<quoy que pour mettre fin à ton labeur entreprins tu fulTes au grand feu
- rl#» la oïicrre.
- Fin.
- A VN SEVL DIEV HONNEVR ET GLOIRE.
- p.234V - vue 480/480
-
-